Décision

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Décision

Morneau c. Labonté

2016 QCRDL 26931

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Laval

 

No dossier :

28-130708-003 36 20130708 T

No demande :

1988695

 

 

Date :

02 août 2016

Régisseur :

Daniel Gilbert, juge administratif

 

Maryse Morneau

 

Sandrine Morneau

 

Locataires - Partie demanderesse

c.

Danny Labonté

 

Genevieve Methot

 

Locateurs - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

Demande de rétractation

[1]      Le 28 avril 2016, les locataires demandent la rétractation de la décision rendue le 18 avril 2016 par le soussigné à la suite d’une audition tenue le 11 mars 2016 (la « Décision »). Cette audition faisait suite à une réclamation des locateurs en dommages-intérêts (645,70 $).

[2]      Les conclusions de la Décision sont :

« [ 6 ] CONDAMNE les locataires à payer aux locateurs la somme de 645,70 $, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 8 juillet 2013, plus les frais judiciaires de 87 $. »

[3]      Les locataires demandent la rétractation de la Décision au motif qu’ils ne se sont pas présentés à l’audition, n’ayant jamais reçu l’avis de convocation avant la tenue de l’audition.

[4]      Ils indiquent de plus avoir pris connaissance de la Décision le 25 avril 2016, alors que la demande de rétractation est déposée le 28 avril 2016.

[5]      Enfin, quant aux moyens de défense que les locataires entendent faire valoir à l’égard de la demande originaire des locateurs, les locataires les ont énoncés à l’audition.


Droit applicable et analyse

[6]      La demande de rétractation est prévue à l’article 89 de la Loi sur la Régie du logement qui édicte :

« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.

Une partie peut également demander la rétractation d'une décision lorsque la Régie a omis de statuer sur une partie de la demande ou s'est prononcée au-delà de la demande.

La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l'empêchement.

La demande de rétractation suspend l'exécution de la décision et interrompt le délai d'appel ou de révision jusqu'à ce que les parties aient été avisées de la décision. »

[7]      Le Tribunal doit d’abord déterminer si la demande de rétractation des locataires est produite dans le délai imparti de la connaissance de la Décision. Ensuite, ils doivent démontrer des motifs de rétractation. Enfin, le Tribunal doit aussi évaluer si les moyens de défense soulevés afin de contester la demande originaire des locateurs apparaissent sérieux à première vue.[1]

[8]      Ces trois conditions sont cumulatives, en ce sens que les locataires doivent établir qu’ils rencontrent chacune d’elles.

Délai

[9]      Les locataires déclarent avoir pris connaissance de la Décision le 25 avril 2016, alors qu’ils déposent leur demande de rétractation à la Régie du logement le 28 avril 2016. Le délai de 10 jours prévu à l’alinéa 3 de l’article 89 de la Loi sur la Régie du logement est respecté. Faute d’une preuve prépondérante au contraire, les locateurs n’ont pu établir que les locataires ont déposé leur demande de rétractation plus de 10 jours après avoir pris connaissance de la Décision.

Motifs de rétractation

[10]   Les locataires affirment qu’ils ont reçu les avis de convocation relatifs à l’audition tenue le 11 mars 2016, le lendemain ou surlendemain de cette dernière date. Questionnées par le Tribunal, les locataires répondent que leur courrier est livré à une boîte communautaire, mais qu’elles s’y rendent chaque jour pour cueillir leur courrier.

Moyens de défense

[11]   En ce qui concerne les moyens de défense qu’elles entendent soumettre à l’égard de la demande originaire des locateurs, les locataires démontrent qu’elles ont une défense sérieuse à faire valoir à première vue.

[12]   En effet, les locataires produisent un reçu démontrant qu’un dépôt au montant de 450 $ a été perçu par les locateurs à la signature du bail, soit avant même que le bail ne débute. La locatrice, seule présente à l’audition, admet la véracité du reçu produit. Questionnée par le tribunal afin de savoir si le dépôt avait été pris en compte dans le montant de la réclamation pour dommages des locateurs, la locatrice affirme que c’est bien le cas sauf, qu’elle ne peut produire les pièces justificatives qui ne sont pas en sa possession.

[13]   De leur côté, les locataires soutiennent qu’on ne leur a jamais soumis une reddition de compte quant à l’usage fait par les locateurs de ce dépôt.

[14]   Les locataires ont convaincu le Tribunal qu'elles rencontrent les critères mentionnés à l'article 89 de la Loi sur la Régie du logement pour accorder la rétractation de la Décision. En effet, dans le présent cas, le principe de la stabilité des décisions doit céder le pas au droit des locataires d’être entendues.


[15]   La Cour d’appel du Québec, traitant de la rétractation, a déjà indiqué :

«En matière de rétractation de jugement pour cause de « surprise ou autre cause jugée suffisante » (C.p.c., art. 482), le rescindant (les « motifs qui justifient la rétractation ») et le rescisoire (« les moyens de défense à l’action ») sont des vases communicants. Plus les moyens de défense sont sérieux, plus sont vraisemblables et recevables les motifs du défendeur pour expliquer que son défaut est dû à la surprise, à l’oubli, à l’inadvertance, à la méprise, à une erreur, peut-être même stupide, mais sincère.»[2]

(références omises)

[16]   Les motifs invoqués par les locataires sont donc suffisants pour donner ouverture à la rétractation demandée.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[17]   ACCUEILLE la demande de rétractation des locataires qui en assument les frais;

[18]   RÉTRACTE la décision rendue le 18 avril 2016;

[19]   DEMANDE au maître des rôles de convoquer à nouveau les parties pour procéder à l'audition de la demande originaire des locateurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

Daniel Gilbert

 

Présence(s) :

les locataires

la locatrice

Date de l’audience :  

6 juillet 2016

 

 

 


 



[1] La Capitale des Cantons de l'Est Inc. c. Super Plus Inc.et al., 2005 CanLII 27296 (QC CS), j. Fréchette (par. 134).

[2] Le Groupe J.S.V. inc. c. Goal Capital inc.,  2014 QCCA 398.

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