[1] LA COUR; - Statuant sur le pourvoi de l'appelante contre un jugement de la Cour supérieure, (Montréal, 29 octobre 1996, le juge Roland Tremblay) qui a rejeté sa demande en dommages-intérêts pour diffamation;
[2] Après étude du dossier, audition et délibéré;
[3] Pour les motifs exprimés dans l'opinion ci-annexée du juge Robert, auxquels souscrivent les juges Dussault et Rochon,
[4] ACCUEILLE l'appel avec dépens;
[5] INFIRME le premier jugement avec dépens;
[6] CONDAMNE The Hindu Mission of Canada (Québec) à payer à l'appelante 10 000 $ pour le dommage moral résultant de la violation de son droit à la vie privée, avec intérêt et indemnité additionnelle depuis l'assignation et dépens;
[7] CONDAMNE solidairement Ram Swaroop Kaushal, Prekash Chadha, Ravi Sharma et Vijay Sharma à payer à l'appelante 5 000 $ pour dommage moral à sa réputation avec intérêt et indemnité additionnelle depuis l'assignation et dépens;
[8] CONDAMNE Ravi Sharma et Vijay Sharma solidairement à payer à l'appelante 5 000 $ à titre de dommages exemplaires, avec intérêt, indemnité additionnelle à compter du 29 octobre 1996 et les dépens.
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Opinion du juge ROBERT |
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[9] Les appelants, Shanta Srivastava et Sita Ram Sharma se pourvoient contre un jugement de la Cour supérieure du district de Montréal (l'honorable Roland Tremblay, le 29 octobre 1996) rejetant leur demande en dommages-intérêts pour diffamation. Ils prétendent que les intimés Hindu Mission of Canada (H.M.C.) ainsi que Awasthi, Dhand, Khaushal, Lal et les frères Ravi et Vijay Sharma, ont porté atteinte à leur vie privée. Les deux poursuites ont été réunies pour fins d'audition. Un seul jugement en a disposé. Deux appels furent logés. La présente opinion vaut pour les deux appels, celui-ci ainsi que l'appel de Sita Ram Sharma dans le dossier 500-09-003348-968.
[10] La Hindu Mission of Canada (Québec) Inc., regroupe environ 500 membres et administre un temple hindou situé à Montréal. C'est le lieu principal des événements contentieux.
[11] En 1985, Sita Ram Sharma (Sharma) arrive de l'Inde et est embauché par la Hindu Mission of Canada à titre de prêtre. Il est marié et père de cinq enfants mais, à ce moment-là, sa famille demeure en Inde.
[12] Durant les premières années Sharma est logé au temple, sa nourriture est fournie et on lui paie un modeste salaire. Il devait passer de nombreuses heures au temple. En 1989, avec l'aide de Shanta Srivastava, il se trouve un appartement ainsi que du mobilier pour recevoir sa famille.
[13] Madame Srivastava est mariée et mère de deux filles. Personne respectée au sein de la communauté Hindu, elle enseigne la biologie au collège Vanier; elle est bénévole et exerce plusieurs fonctions au temple. À certaines occasions elle conduit Sharma qui n'a pas de voiture.
[14] Pendant quelques années, Sharma accomplit son travail de manière satisfaisante. Cependant, en 1990, certains sages du temple commencent à montrer une certaine insatisfaction à l'égard de son travail.
[15] Certains membres du temple affirme que Sharma ne respecte pas toujours ses rendez-vous pour présider des cérémonies religieuses dans des maisons privées. D'autres membres se plaignent du fait que Sharma répondait lui-même au téléphone pour dire qu'il n'était pas présent, parfois en changeant sa voix, parfois sans se donner la peine d'utiliser ce stratagème.
[16] On se plaignait de la disparition de certaines sommes d'argent au temple et même du vol d'un système de son. Rien ne permet de relier le prêtre à ces disparitions mais les membres de la communauté le tenaient responsable de la sécurité du temple et des objets qui s'y trouvaient.
[17] On lui reprochait également ses longues conversations téléphoniques qui empêchaient les membres de communiquer avec lui et le fait que plusieurs appels interurbains étaient logés à partir du temple sans que l'on puisse contrôler ces appels.
[18] En raison de ces plaintes et de ces soupçons, les membres du comité exécutif décident de manière unanime, le 31 mars 1991, de placer le téléphone du temple sous écoute électronique. Il est important de noter que la résolution adoptée à cette date ne fait aucune mention des interurbains comme motif pour l'enregistrement électronique des conversations téléphoniques[1]. Le texte de la résolution se lit comme suit:
Executive Meeting held in Temple on March 31, 1991
In view of the problems (1) Priest services being provided to the public without the knowledge of the Committee and its representatives (11) recent thefts in the Temple, and (111) to avoid duplicate bookings of Programmes and Lungar, a meeting was called in to discuss any alternatives so that Temple Committee is properly informed of all the situation properly.
Pt Sita Ram Sharma and Pt Sita Ram Pathak both have provided services outside the Temple without the knowledge of the Executive, which not only represents a negative view of the poor management but also a loss of revenue for the Temple. After discussions and giving suggestions all present members decided to install a proper message (Incoming/outgoing) recording device which will help the Committee to monitor the activities of the Priests and also will help in finding out if any of the people living in the Temple Building have anything to do with the thefts in the Temple property.
A brief discussion on the upcoming General Body Meeting was also carried out to sort out any possible problems.
At this point Mr. Ramesh Dhand proposed to adjourn the meeting which was agreed by all present.
J.K. Awasti
Ramesh Dhand
Darbari Lal
Navin Sharma
Ritish Chakraborty
Durga Dass Sharma
Vijay Sharma
R.P. Chadha
Durga Dass Sharma.
[19] Les conversations en cause ont été enregistrées entre le 14 et le 18 avril 1991.
[20] Le 29 avril 1991, cinq membres du comité exécutif, Ramesh Dhand, Darbari Lal, Ritish Chakraborty, Vijay Sharma, Prekash Chadha ainsi que Hari Tuknat, ont écouté le contenu des cassettes; selon leur témoignage ils furent bouleversés d'apprendre que Sharma et Mme Srivastava avaient une relation amoureuse.
[21] Ils convoquent alors les sages du temple, c'est-à-dire les membres du conseil, les autres membres de l'exécutif et ceux qui dans le passé avaient siégé au conseil, afin de déterminer la conduite à suivre dans les circonstances. Entre 25 et 30 personnes sont convoquées à l'assemblée du 30 avril 1991.
[22] Au commencement de l'assemblée, Darbari Lal affirme que les conversations enregistrées entre Sharma et une femme étaient indignes et bouleversantes; selon lui, elles contenaient des propos «malpropres» qu'un homme ne tenait pas à une femme, encore moins un prêtre.
[23] À l'assemblée, Lal offre de faire écouter les cassettes à l'assistance, mais personne ne veut les entendre; les personnes présentes se fient à la parole des membres du comité exécutif. Un des sages, Rij Sehgal, refuse catégoriquement d'entendre les cassettes et met l'assemblée en garde contre les conséquences légales d'une telle audition publique.
[24] Selon Lal, les cassettes étaient gardées sous clé, mais elles étaient disponibles, si l'assemblée voulait les écouter.
[25] Par la suite, Amar Grover, secrétaire du conseil, inviteNaksami Dubé, Hari Tuknat et Gouptaà prendre une décision concernant le dossier dans le bureau privé du temple. Ils décident de ne pas écouter les cassettes contenant les conversations enregistrées, mais ils voulaient entendre ce que Sharma avait à dire concernant les allégations en cause.
[26] L'assemblée décide à l'unanimité que si Sharma avait eu une relation avec une femme autre que la sienne, il devait démissionner. Dubé et Grover furent mandatés par l'assemblée pour aller rencontrer Sharma et obtenir sa version des événements.
[27] Grover et Dubé donnent deux versions différentes de la rencontre avec Sharma. Selon Grover, le prêtre était bouleversé et aurait demandé conseil à ce dernier qui lui aurait alors dit «si ce n'est pas vrai, je vais te défendre de toutes mes forces, mais si c'est vrai, tu es mieux de démissionner». Toutefois, selon Dubé, Grover insistait pour avoir la démission de Sharma, mais lui-même a suggéré de laisser un peu de temps à Sharma pour réfléchir.
[28] Le 1er mai 1991, Sharma offre sa démission à Grover.
[29] Le 12 juin 1991, Sharma dépose une plainte à la Commission des normes de travail concernant son congédiement sans cause juste et suffisante. Le 10 août 1991, la plainte est rejetée pour le motif que la démission de Sharma prive l'arbitre de toute compétence.
[30] En juillet 1991, au cours d'un festival Hindou au New Jersey, Ram Swaroop Kaushal voit Sharma qui marche, main dans la main, avec Mme Srivastava.
[31] Après la démission de Sharma mais avant la décision arbitrale, des pourparlers ont eu lieu entre les parties pour tenter d'arriver à un règlement. Ces discussions n'ont pas porté fruit.
[32] Le juge de première instance conclut qu'il n'y a pas eu de violation de la vie privée des appelants et rejette les actions en diffamation.
[33] Les appelants portent cette décision en appel.
LE JUGEMENT DE PREMIÈRE INSTANCE
[34] En première instance, le juge décide qu'il n'y a pas eu de violation de la vie privée des appelants et que l'action en diffamation n'est pas fondée. L'analyse du juge porte sur six questions:
1. Est-ce que l'enregistrement des conversations viole la Charte des droits et libertés de la personne[2]? La preuve de ces enregistrements est-elle admissible?
2. Est-ce qu'il y a eu déclaration? Et dans l'affirmative par qui?
3. Est-ce que le contenu des conversations enregistrées fut diffusé ? Si oui, par qui ?
4. Est-ce que la déclaration concernant les conversations enregistrées est vraie ou fausse?
5. Quant à la faute : si la déclaration est vraie, est-ce que les intimés ont agi avec l'intention de nuire à la réputation des appelants et de les exposer à la haine, au mépris ou au ridicule?
· Si cette déclaration est fausse, quels sont les dommages généraux majorés ou punitifs?
[35] Le premier juge répond à ces questions de la façon suivante:
Question no 1: Est-ce que la preuve des conversations enregistrées viole la Charte québécoise? Est-elle admissible?
a) L'enregistrement des conversations ne constitue pas une violation de l'article 5 de la Charte québécoise
[36] Le juge affirme que l'enregistrement des conversations téléphoniques ne constitue pas une violation du droit à la vie privée, tel que prévu à l'article 5 de la Charte québécoise. D'emblée, le juge affirme, que compte tenu de la nature des nombreuses plaintes, les défendeurs avaient l'obligation de vérifier la validité des allégations portées contre Sharma. Donc, la décision d'enregistrer les conversations en cause était justifiée. De plus, le juge soutient que la preuve recueillie de cette manière est légale en matière civile et le tribunal doit en tenir compte, nonobstant le fait qu'elle pourrait être illégale en droit pénal. En effet, en invoquant les principes de l'arrêt Roy c. Saulnier [3] (ci-après Saulnier), le juge conclut que les conversations interceptées n'étaient pas purement privées car elles avaient été tenues avec l'appareil téléphonique du temple.
b) L'article 2858 C.c.q. ne peut être utilisé afin d'exclure la preuve recueillie par l'intimé
[37] Le juge affirme également que la preuve recueillie ne déconsidère pas l'administration de la justice et ne peut donc être exclue en vertu de l'article 2858 du C.c.q.
Question no 2: Est-ce qu'il y a eu déclaration? Et dans l'affirmative par qui?
Question no 3: Cette déclaration fut-elle diffusée? Et dans l'affirmative par qui?
a) Certains intimés sont exonérés
[38] Selon le juge, les intimés Darbari Lal, Hari Tuknat, Ramesh Dhand, Joginder Awasthi, Ritish Chakraborty, Ram Swaroop Kaushal et la H.M.C. n'ont pas diffusé de rumeur et n'ont parlé à personne du contenu des cassettes ou fait des commentaires concernant les appelants. Il est important de reproduire ci-dessous les commentaires du juge concernant chacun des défendeurs mis hors de cause.
[39] Darbari Lal, secrétaire de l'exécutif à l'époque: tous disent du bien de lui et il déclare n'avoir jamais rien dit au sujet des cassettes.
[40] Hari Tuknat,président du conseil de 1988 à 1990 et de 1993 à 1995: tous disent du bien de lui et il déclare n'en avoir jamais parlé.
[41] Ramesh Dhand, vice-président de l'exécutif à l'époque et président par intérim du 7 avril au 7 mai 1991: aucun témoin de la demande ne le relie à une déclaration après le 30 avril 1991 et il déclare n'en avoir jamais parlé à personne.
[42] Joginder Awasthi, président de l'exécutif à l'époque: il était absent du pays du 7 avril au 7 mai 1991 et ce n'est qu'à son retour qu'il apprit la démission de Sharma. Personne ne le relie à une déclaration après le 7 mai 1991, sauf le témoin Rashter Sharma. Awasthi lui-même déclare n'en avoir parlé à personne. Dans ce cas, le tribunal préfère le témoignage d'Awasthi à celui de Rashter Sharma.
[43] Ritish Chakraborty, membre de l'exécutif de 1986 à 1988 et de 1990 à 1992 ; il n'a pas assisté à la rencontre du 30 avril 1991 mais avait écouté les cassettes la veille durant 20 minutes : personne ne le relie à une quelconque déclaration et lui-même déclare n'en avoir parlé à personne.
[44] Ram Swaroop Kaushal a été président du conseil de 1986 à 1988 et de 1990 à 1992 : il était absent jusqu'en juillet 1991. Il n'a appris la démission de Sharma que lors de la réception de la plainte de ce dernier à l'encontre de son congédiement. Malgré que certains témoins aient déclaré que Kaushal disait à tout le monde dans le temple des mots irrévérencieux à l'égard des appelants, il déclare n'avoir parlé à personne du contenu des cassettes ni d'avoir exprimé son opinion.
[45] La H.M.C. agit par son conseil et son exécutif et le seul reproche qui puisse lui être fait est celui d'avoir laissé enregistrer les conversations, mais les autorités du temple n'ont jamais permis la diffusion du contenu des cassettes.
[46] Il faut préciser que le juge rejette l'action en diffamation contre les intimés énumérés ci-dessus sur la base de son appréciation des divers témoignages.
b) Le cas des trois intimés, Ravi Sharma, Vijay Sharma et Prekash Chadha
[47] Le juge examine ensuite la conduite des trois défendeurs, Ravi Sharma, Vijay Sharma et Prekash Chadha, séparément des autres défendeurs, compte tenu des allégations importantes faites par les appelants à leur égard. En somme, le juge décide que les appelants n'ont pas réussi à le convaincre selon la prépondérance de probabilités que les trois défendeurs ont commis des gestes diffamatoires à leur égard. En effet, le juge soutient qu'il est possible que les trois intimés, emportés par leur dégoût et la gravité de ce qui avait été exposé par les enregistrements, auraient pu diffamer les appelants après le 31 avril 1991- mais ce n'est qu'une possibilité et non une probabilité. Encore une fois, afin de faciliter la compréhension de ce dossier, il est utile de résumer les commentaires du juge concernant les faits pertinents qui ressortent du témoignage des trois défendeurs: en premier lieu, le juge souligne, qu'avant l'enregistrement des conversations, il existait déjà un conflit entre les frères Sharma et Mme Srivastava concernant un contrat d'imprimerie.
[48] Vijay Sharma : appelé comme témoin par la demande, il déclare avoir écouté les cassettes le 29 avril 1991, avec cinq autres personnes; il considère que les conversations étaient indignes et démontraient que leur prêtre était «mauvais» . Selon Vijay Sharma, à la rencontre du 30 avril 1991, il n'a pas été dit que les appelants avaient une relation amoureuse et le nom de Mme Srivastava n'a pas été mentionné, bien qu'il en fut question au comité. Il déclare n'avoir jamais discuté de ce cas avec les membres du temple ou avec personne d'autre et n'avoir jamais entendu une discussion publique de cette situation.
[49] Prekash Chadha: appelé comme témoin pour la demande, il explique qu'il existait beaucoup de problèmes au temple, notamment des appels interurbains et le vol d'argent; donc le 31 mars une résolution fut adoptée pour élucider les soupçons. Il déclare avoir écouté les cassettes après l'assemblée générale du 29 avril 1991, de !7 à 22 heures ; selon lui, c'était Lal qui avait sorti les cassettes. Les six personnes présentes étaient bouleversées par ce qu'elles avaient entendu. Il affirme qu'à l'assemblée du 30 avril 1991, les cassettes n'ont pas été écoutées. Il ajoute qu'après le 30 avril 1991, il n'a jamais parlé du cas à quiconque et jusqu'à maintenant il déclare qu'il ne savait pas le nom de la femme dont la voix était enregistrée, car la cassette n'était pas claire. En contre-interrogatoire, il déclare avoir rendu visite à Dubé en compagnie de Vijay Sharma à l’été 1991, dans le but d’empêcher un conflit. Il affirme également avoir tenté de convaincre le père de Rashter Sharma de l'existence des faits, car celui-ci entretenait encore des doutes; mais ce dernier n’a pas voulu écouter les cassettes. Il explique qu’il ne connaissait pas le nom de Mme Srivastava et qu’il l’a vue pour la première fois à la séance d’arbitrage[4]. Il explique que les mots «avoir une affaire» étaient en anglais dans la conversation enregistrée, et qu’il n’a rien entendu en Indi qui traitait de relations sexuelles.
[50] Le juge de première instance résume ces témoignages en affirmant qu’il n’y avait pas de malice dans les gestes de Sharma et Chadha, seulement un mouvement intempestif justifié par leur devoir de savoir ce qui se passait. En somme, le juge conclut que même s’il y a eu diffusion de l’information contenue dans les cassettes, celle-ci n’a pas été faite dans l’intention de causer du tort aux appelants. Conséquemment, ces dernières personnes n'ont pas commis de faute qui devrait être sanctionnée par le tribunal.
Question no 4: Est-ce que la déclaration concernant les conversations enregistrées est vraie ou fausse?
Le juge conclut que la preuve ne démontre pas qu'il existait une relation amoureuse entre les appelants ou qu'une telle relation n'existait pas. La question demeure sans réponse.
[51] De fait, le juge affirme que les appelants n'ont pas réussi à convaincre le tribunal de l'inexistence d'une relation amoureuse entre eux; mais, selon lui, ceci ne veut pas dire qu'ils en ont eu une. Dans la pire des hypothèses, le juge conclut que la version des appelants n’est pas plausible et que la défense a démontré l’existence d’une relation amoureuse. À l’appui de cette dernière thèse, le juge invoque certaines présomptions de fait:
En ce qui a trait à la démission de 1991 : Sharma l’a remise après qu’on lui eut dit que, s’il y avait relation amoureuse, il devait démissionner.
Le langage utilisé lors des conversations téléphoniques démontre une relation amoureuse.
Le manquement au devoir de la charge : téléphone sans réponse ou occupé, absence du temple aux heures prévues, temple non verrouillé en-dehors des heures d'ouverture, oubli de rendez-vous pour cérémonie chez les particuliers, manque de communication avec l'exécutif.
Après la démission, la visite au New Jersey.
Question no 5: Est-ce qu'il y a faute de la part des intimés qui peut être sanctionnée par l'attribution de dommages-intérêts?
[52] Étant donné que le juge ne donne pas de réponse à la question précédente il se retrouve face à deux scénarios possibles. Dans l'hypothèse où la déclaration est vraie, le juge conclut que les défendeurs n'ont pas commis de faute, donc leur conduite ne peut être sanctionnée par le tribunal. D'autre part, si la déclaration est fausse, le juge conclut que les dommages subis par les appelants découlent d'autres sources, telle la diffusion faite par la séance d'arbitrage et la sentence rendue. En conséquence, le juge décide de rejeter l'action des appelants.
[53] En bref, les appelants plaident qu'ils n'ont jamais eu une relation amoureuse. De plus, ils affirment que l'enregistrement de leurs conversations téléphoniques constitue une violation de l'article 5 ainsi que de l'article 46 de la Charte québécoise. Ils plaident que les intimés ont posé des gestes diffamatoires à leur égard.
a) Les appelants nient avoir eu une relation amoureuse
[54] Les appelants affirment dans leur témoignage que leur relation était de nature amicale ; ils nient catégoriquement toute allusion à une relation amoureuse. D'une part, Mme Srivastava soutient qu'elle n'a jamais eu de relation amoureuse avec Sharma. Dans son témoignage elle explique que cette grande amitié découlait du fait qu'ils travaillaient ensemble et qu'elle appréciait les qualités de Sharma; selon elle, il était savant, plaisant, avait un bon rapport avec les enfants et un sens de l'humour Mme Srivastava affirme que parfois le prêtre venait chez elle, et d'autres fois elle le voyait au temple ou avec des amis. Toutefois, elle déclare n'avoir jamais été dans la chambre du prêtre, sauf pour les besoins du temple. En ce qui a trait aux conversations enregistrées, Mme Srivastava admet que c'est bien sa voix, mais elle soutient que la nature des conversations n'a rien d'exceptionnelle ; les appelants ne faisaient que parler des petits détails de la vie quotidienne.
[55] D'autre part, Sharma nie lui aussi catégoriquement toute allégation concernant une relation amoureuse avec Mme Srivastava. Il affirme s'être lié d'amitié avec Mme Srivastava dès le commencement, car il la trouvait très intelligente, bien éduquée, organisatrice et impliquée dans les activités du temple. Il explique que les querelles avec Mme Srivastava découlaient du fait qu'il était sous pression et près de la dépression devant les soupçons formulés contre lui. On le soupçonnait de vol d'argent, de chaises, de système de son et de bris de boîtes. De ce fait, les conversations se terminaient souvent en dispute. De plus, il affirme que les deux frères Sharma étaient très agressifs à son égard, l'empêchant même de parler à Mme Srivastava. Il admet qu'il a rencontré Mme Srivastava à la station de métro Sauvé, mais il explique que c'était seulement parce qu'il avait besoin d'aide pour faire ses emplettes. Selon lui, les conversations enregistrées entre lui et Mme Srivastava, étaient des conversations normales entre deux amis.
b) Les appelants affirment que l'enregistrement des conversations viole leurs droits garantis aux articles 4 et 5 de la Charte québécoise ainsi que celui garanti par l'article 8 de la Charte canadienne
[56] Les appelants plaident que l'interception des conversations téléphoniques constitue non seulement un acte criminel, mais aussi une violation du droit à la dignité et à la vie privée des appelants, tel que prévu par les articles 4 et 5 de la Charte québécoise respectivement. Au surplus, les appelants affirment que l'interception constitue une violation de l'expectative raisonnable de vie privée, protégée par l'article 8 de la Charte canadienne des droits et libertés [5] (Charte canadienne). En ce qui a trait à la question du droit à la vie privée, les appelants s'appuient sur les critères élaborés par la jurisprudence concernant l'article 8 de la Charte canadienne, pour affirmer que les appelants avaient une expectative raisonnable de vie privée à l'égard des conversations téléphoniques enregistrées[6]. En effet, les appelants affirment que Sharma passait beaucoup de temps au temple; parfois il restait toute la nuit. De plus, le téléphone était mis à la disposition de Sharma, et celui-ci l'utilisait afin de parler avec les membres de la communauté qui lui révélaient fréquemment leurs confidences. Selon les appelants, Mme Srivastava était une membre de la communauté qui appelait son ami afin de parler d'affaires privées; donc, cette situation est différente de celle où un téléphone est mis à la disposition d'un employé pour des fins commerciales exclusivement. Conséquemment, en tenant compte de l'ensemble des circonstances, les appelants affirment que l'interception des conversations téléphoniques viole leur droit à la vie privée.
c) Sharma plaide que l'enregistrement des conversations constitue une violation de l'article 46 de la Charte québécoise
[57] Sharma plaide que l'enregistrement de ses conversations porte atteinte à son droit à des conditions de travail justes et raisonnables, protégé par l'article 46 de la Charte québécoise. Il affirme que, dans certains cas, l'employeur peut avoir recours à la surveillance électronique des employés, toutefois cette surveillance doit être nécessaire et être utilisée d'une manière qui minimise l'atteinte aux droits des salariés.[7] Selon l'appelant, en l'espèce, l'employeur ne peut justifier l'écoute électronique. En effet, il plaide que la résolution autorisant l'interception des communications fait mention de vols et de la nécessité de surveiller les activités de Sharma. Or, il n'existe aucun lien logique entre le mode de surveillance utilisé et l'activité qu'on voulait surveiller; comment l'écoute électronique aurait-elle pu servir à découvrir le voleur. Il plaide que l'écoute électronique ne constituait qu'une expédition de pêche pour trouver des choses qu'on pourrait retenir contre Sharma qui n'était plus dans les bonnes grâces de certains membres du comité. L'appelant plaide que l'absence de justification valide rend la résolution illégale et l'interception des conversations, abusive. Conséquemment, les appelants réclament des dommages pour ces atteintes à leurs droits fondamentaux, ainsi que des dommages additionnels pour l'utilisation abusive de l'information enregistrée.
d) Les appelants soutiennent qu'ils ont été injustement diffamés par l'intimé
[58] Les appelants affirment que le juge de première instance a commis une grave erreur en décidant que les trois intimés, Vijay Sharma, Ravi Sharma et Prekash Chadha n'ont pas commis d'actes de diffamation à leur égard. Les appelants soulignent que les conclusions du juge sont inconciliables avec la preuve présentée à l'audience. En effet, les appelants plaident qu'il y avait abondance de preuve démontrant la diffamation; selon eux cette preuve est corroborée par l'invraisemblance du témoignage des intimés. Afin de faciliter la compréhension de la position des appelants, il est important de résumer ci-dessous certains témoignages pertinents cités par ces derniers à l'appui de leur action :
Amir Shandal, Brij Sehgal, Laksmi Dube, et Vikram Bhatti, affirment tous avoir appris l'identité de Mme Srivastava à l'assemblée du 30 avril 1991.
Satish Chopra : affirme qu'elle fut approchée par M Chadha durant l'été 1991 et Chadha et Dhand en présence des Vijay Sharma et Lal lui ont fait entendre les cassettes.
Rashter Sharma: déclare qu'en juillet 1991, certains membres de l'exécutif, notamment Awasthi, Chakraborti, Chadhaet Dhand, l'ont approché pour lui faire entendre les cassettes. Selon lui, les frères Sharma étaient les plus insistants.
Selon Rashter Sharma, Vijay Sharma réitérait souvent son offre de faire jouer les cassettes et les défendeurs parlaient souvent du sujet au temple.
Vikram Bhatti: déclare qu'après le 30 avril 1991, Chadha, Tuknat, Kaushal, Ravi et Vijay Sharma, parlaient de cette question lors des rencontres du dimanche au temple.
M. Lakshmi Dube: déclare qu'il existait des rumeurs dans la ville concernant la relation amoureuse en cause et que M Sharma et M Chadha lui ont offert d'écouter les cassettes; toutefois il a refusé cette offre. Il prétend que M. Kaushal lui a dit que le temple était une maison de prostitution et que Mme Srivastava était la pire de tous.
M. Chitranjan Misra : affirme que Messrs Kaushal, Chadha, Vijay Sharma et Chakraborty discutaient ouvertement de la relation au temple, lors des assemblées du dimanche.
Mme Mercédès Beaulieu : épouse de M. Rashter Sharma, affirme que les frères Vijay et Ravi Sharma voulaient écouter les cassettes lors d'un dîner de famille à sa résidence.
M. Amir Handal : déclare qu'après le 30 avril 1991, Messrs Lal, Awasthi, Tuknat, Chadha, Dhand, Ravi et Vijay Sharma, essayaient fréquemment de le convaincre de leur point de vue. Il ajoute que lors de la rencontre du 30 avril 1991, Sharma fut décrit comme un criminel et un coureur de jupons.
M Mohinder Gulati : affirme que Chadha et Vijay Sharma lui ont dit que Sharma côtoyait[8] beaucoup de femmes. De plus Vijay Sharma lui a offert d'écouter les cassettes, mais ce dernier a refusé l'offre.
[59] Selon les appelants ces témoignages contredisent les affirmations des défendeurs, Dhand, Vijay Sharma, Ritish Chakraborty et Prekash Chadha, qui nient avoir discuté de l'affaire ou avoir répandu des rumeurs au sujet des appelants. Les appelants affirment que le juge accorde une importance indue à l'allégation concernant la relation amoureuse entre les appelants. D'après eux, la décision du juge démontre qu'il était convaincu de la véracité de cette allégation. À l'appui de cette dernière thèse, les appelants affirment que le langage employé par le juge dans la décision en cause est un indice révélateur de ses sentiments personnels sur le sujet. En effet, le juge parle des intimés comme étant emportés par le dégoût et la gravité de ce qui se passait au temple et incrédules face au scandale. Donc, les appelants soutiennent implicitement que la décision du juge ne s'appuie pas sur la preuve, mais sur ses convictions personnelles.
[60] Les appelants affirment que leur crédibilité n'a pas été mise en doute par une preuve objective, et qu'en conséquence leur négation de la relation amoureuse doit être acceptée comme constituant la vérité. De manière subsidiaire, les appelants soutiennent que même dans le cas hypothétique où une relation amoureuse aurait existé entre eux, ceci n'empêche pas une poursuite en diffamation- car au Québec, la fausseté de l'information n'est pas un élément essentiel à une telle poursuite[9]. En somme, les appelants soulignent que même si la déclaration concernant la relation amoureuse est vraie, elle fut faite dans le but de nuire à la réputation et à la considération dont jouissaient les appelants ; il s'agissait d'une faute délictuelle au sens de l'article 1457 du C.c.Q.
e) Le quantum des dommages réclamés par les appelants
[61] Les appelants affirment que la violation de leurs droits fondamentaux doit être sanctionnée par le tribunal. Ils soutiennent que Sharma a subi des dommages matériels ainsi que des dommages non pécuniaires, découlant de l'interception et de la propagation de l'information se trouvant sur les cassettes en cause. Selon les appelants, Sharma a subi beaucoup d'humiliation, d'anxiété et a du réorienter sa carrière. Dans le cas de Mme Srivastava, les appelants soulignent qu'elle aussi a été humiliée et a souffert d'anxiété; sa vie privée a été lourdement affectée, notamment en ce qui concerne sa relation avec son époux et avec la communauté indienne. En bref, les appelants réclament, individuellement, 145 000 $ ventilés de la façon qui suit :
125 000 $ pour compenser les dommages pécuniaires et non pécuniaires subis par les appelants.
20 000 $ à titre de dommages exemplaires.
LES PRÉTENTIONS DES INTIMÉS
a) Les intimés soutiennent que l'enregistrement des conversations téléphoniques des appelants était légal
[62] En s'appuyant sur la décision de l'arbitre Me Pierre Laporte, ainsi que sur l'arrêt Saulnier[10], les intimés plaident, que compte tenu des circonstances, l'enregistrement des conversations ne constitue pas une atteinte à la vie privée des appelants. En effet, les intimés soutiennent que les nombreux problèmes du temple justifiaient l'interception des conversations téléphoniques. De plus, les intimés ajoutent que l'appareil téléphonique était placé dans le temple car il servait normalement aux affaires du temple. Ils soutiennent que Sharma n'était que leur agent ou porte-parole. En conséquence, les intimés concluent que dans le cadre de son travail, la vie privée de Sharma ne peut être alléguée[11].
[63] Les intimés soutiennent qu'ils n'ont pas posé de gestes diffamatoires à l'égard des appelants
[64] Les intimés plaident que les conversations enregistrées démontrent qu'il existait une relation amoureuse entre les appelants. Sharma a démissionné de son poste parce qu'il reconnaissait avoir commis une faute. Le nom de Mme Srivastava ne fut jamais révélé lors de la rencontre de l'assemblée le 30 avril 1991. Tous les membres du temple ont agi de bonne foi et sans intention malicieuse. La diffamation aurait eu lieu après le 30 avril 1991, toutefois les appelants ont pris plus d'un an pour instituer leurs actions en Cour supérieure. Ceci démontre que les appelants n'ont pas subi de dommages, car dans un tel cas ils auraient agi plus vite. En somme il n'y aurait pas eu de diffamation à l'égard des appelants; ces derniers sont les artisans de leur propre malheur.
b) Les intimés soutiennent que les appelants ne peuvent demander des dommages-intérêts.
[65] Les appelants travaillent dans leurs professions respectives, ils n'ont pas subi de pertes pécuniaires. Les procédures sont abusives et aucune somme d'argent ne devrait être accordée aux appelants.
a) La responsabilité
[66] En première instance, le juge affirme qu'en tenant compte de l'ensemble des circonstances ainsi que des principes dégagés par l'arrêt Saulnier, l'enregistrement des conversations ne viole pas l'article 5 de la Charte québécoise. Avec égards, je crois que cette conclusion est erronée. En premier lieu, il est important de noter que les faits de l'arrêt Saulnier sont différents des faits en l'espèce. En effet, dans l'arrêt Saulnier, l'employeur d'un commerce avait mis ses téléphones sous écoute électronique pour obtenir des preuves contre son employé, qu'il soupçonnait de vouloir lui soutirer ses clients en faveur d'une tierce partie. En Cour d'appel, le juge Moisan affirme que les conversations enregistrées ne sont pas protégées par l'article 5 de la Charte québécoise. Il souligne que l'appareil téléphonique appartient à l'employeur et que celui-ci était utilisé pour les affaires du commerce. De plus, le juge Moisan met l'emphase sur le fait que le contenu des conversations interceptées, qu'on voulait mettre en preuve, ne portait pas sur des matières relevant de la vie privée de l'employé, de ses relations familiales ou sociales, mais uniquement d'affaires commerciales[12]. Donc la vie privée des interlocuteurs n'était pas en cause. Toutefois, en l'espèce les conversations interceptées portent sur des matières privées.
[67] Cet argument a été repris à quelques reprises par la jurisprudence, notamment dans la décision Thibodeau c. Commission Municipale du Québec[13] . Dans ce dernier cas, il fut décidé que l'enregistrement par une salariée des discussions qu'elle avait eues avec ses supérieures hiérarchiques à l'occasion du travail, ne portait pas atteinte à l'article 5 de la Charte québécoise.
[68] Dans son dispositif le juge affirme que les appelants ne citent que des causes criminelles, sauf une en matière civile. Avec égards, je crois que ceci ne constitue pas une faiblesse dans l'argumentation des appelants. En effet, la jurisprudence concernant l'article 8 de la Charte canadienne est pertinente. Comme l'article 5 de la Charte québécoise, l'article 8 de la Charte canadienne protège la vie privée des citoyens contre l'ingérence d'autrui, la seule différence étant que la Charte canadienne ne s'applique qu'aux actions gouvernementales[14]. Étant donné que les deux Chartes protègent essentiellement le même droit à la vie privée, il n'est pas surprenant de constater que les décisions concernant l'article 5 de la Charte québécoise font souvent appel aux principes énoncés en vertu de l'article 8 de la Charte canadienne. En effet, dans les causes civiles impliquant le droit à la vie privée, les juges commencent souvent leur analyse en se demandant si la personne visée possède une expectative raisonnable de vie privée[15]. L'utilisation de cette notion empruntée du droit pénal restreint l'application de l'article 5 de la Charte québécoise, et amène avec elle le critère de l'ensemble des circonstances- qui détermine si une personne a une expectative raisonnable de vie privée quant à un lieu, objet ou information[16]. Le critère de l'ensemble des circonstances est composé des facteurs qui suivent :
La présence au moment de la perquisition ;
La possession ou contrôle du bien ou lieu faisant l'objet de la fouille ou perquisition ;
La propriété du bien ou du lieu ;
L'usage historique du bien ou de l'article ;
L'habilité à régir l'accès au lieu, y compris le droit d'en exclure autrui ;
L'existence d'une attente subjective en matière de vie privée ;
Le caractère raisonnable de l'attente ;
[69] Il faut souligner que la Charte canadienne ne s'applique pas en l'espèce (la requête ne vise pas une action gouvernementale) mais qu'on peut s'en inspirer pour interpréter la Charte québécoise.
[70] L'analyse du juge adopte implicitement le critère de l'ensemble des circonstances afin de déterminer si les appelants ont une expectative raisonnable de vie privée quant aux conversations téléphoniques. Le juge affirme que les appelants n'ont pas d'attente en matière de vie privée concernant leurs propres conversations, puisque le téléphone appartenait au temple et que celui-ci était utilisé pour des matières professionnelles. Je crois, avec égards, que l'analyse de l'ensemble des circonstances faite par le juge de première instance est erronée.
[71] La décision du juge s'appuie sur le droit de propriété du téléphone ainsi que sur l'utilisation historique de celui-ci, toutefois elle ne traite pas de la conversation elle-même. Or, la question fondamentale en l'espèce est celle de savoir si la conversation est protégée et non le téléphone. En effet, je crois que l'emphase doit être mise sur l'attente subjective de la personne face à la conversation, son caractère raisonnable, ainsi que sur la nature de celle-ci. À défaut de quoi, il serait très difficile pour quelqu'un de prouver une expectative raisonnable de vie privée quant à tout élément intangible- ne pouvant être grevé d'un droit de propriété.
[72] Il est possible dans ce cas d'assimiler la conversation téléphonique en cause à un échange d'information entre deux personnes. Dans un tel cas, la nature de l'information ainsi que celle des interlocuteurs deviennent des facteurs importants afin de déterminer si la conversation est protégée par l'article 5 de la Charte québécoise.[17] En l'espèce, il est évident que subjectivement, dans le temple, Sharma s'attendait à pouvoir communiquer de manière privée avec Mme Srivastava au téléphone. De plus, les conversations enregistrées étaient de nature privée. Les appelants étaient des bons amis qui partageaient leurs peines et succès par le biais du téléphone. En conséquence, il serait illogique d'affirmer que les appelants n'avaient pas une expectative raisonnable de vie privée quant aux conversations. La nature et le ton des conversations démontrent clairement le contraire. Il est aussi intéressant de souligner que le juge restreint son analyse à Sharma, toutefois il ne faut pas oublier que le droit à la vie privée de Mme Srivastava fut aussi violé par l'interception illégale de sa conversation. En effet, en mettant l'appareil téléphonique du temple sous écoute, l'intimé s'est donné le pouvoir de s'ingérer dans la vie privée de toutes les personnes qui appelaient au temple durant la période en cause. Selon Sharma, beaucoup de personnes l’appelaient pour lui confier leurs problèmes personnels.
[73] Les conversations téléphoniques interceptées par l'intimée étaient nécessairement privées et privilégiées. Les conversations entre un prêtre et ses fidèles sont protégées par l'article 9 de la Charte québécoise. Ainsi, le fidèle qui recherche conseil et directive spirituels auprès d'un prêtre jouit d'une assurance quasi constitutionnelle de non-divulgation.
[74] De même, l'assignation du prêtre au temple pendant des journées entières, impliquait l'utilisation par ce dernier de l'appareil téléphonique pour des besoins exclusivement privés. Bref, il existait peu ou pas de relation logique entre les écoutes téléphoniques et les motifs inscrits à la résolution pour les effectuer.
b) Évaluation des dommages non pécuniaires et pécuniaires découlant de l'atteinte à la vie privée des appelants
[75] Les appelants prétendent qu’ils ont subi des dommages moraux par suite de l’atteinte à leur vie privée et la diffusion de cette information. Dans son témoignage Sharma affirme avoir été humilié et choqué d’apprendre que ses conversations avaient été enregistrées. Ce dernier réclame également des dommages pécuniaires à cause du fait qu’il a du réorienter sa carrière. De son coté, Mme Srivastava soutient qu’elle a beaucoup souffert d’humiliation et d’anxiété à cause de l’interception des conversations. Elle affirme que sa vie privée familiale a été ébranlée par les événements et que sa réputation au sein de la communauté Hindou n’est plus la même.
[76] Dans l'appréciation des dommages attribuables aux appelants, il est important de distinguer les dommages qui découlent de la diffamation de ceux qui sont une suite directe de l'interception des conversations. En ce qui concerne Sharma, je crois que l'enregistrement de ses conversations privées lui a causé beaucoup d'anxiété et un certain degré d'humiliation. Selon le témoignage de Sharma, un grand nombre de personnes l'appelaient au temple pour lui raconter leurs problèmes personnels ; il avait également utilisé le téléphone pour parler avec Mme Srivastava de sa vie privée, et celle-ci avait fait de même. Donc, compte tenu de la nature des conversations enregistrées, et de la confiance avec laquelle les membres de la communauté se confiaient à Sharma, il est raisonnable de croire que ce dernier aurait éprouvé une certaine anxiété concernant le fait que des tierces personnes avaient accès à toute cette information privée. Il se sentait impuissant face aux événements. De surcroît, sa propre vie privée ainsi que celle de Mme Srivastava avaient été dévoilées et pouvaient être exposées à la communauté Hindu. Il est évident que Mme Srivastava a également beaucoup souffert d'anxiété et d'humiliation du fait que ses conversations privées avaient été interceptées et que leur contenu pouvait devenir public. En conséquence, je crois qu'il y a lieu d'accorder 10 000 $ à chacun des appelants pour compenser le dommage moral qui est une conséquence directe de la violation de leur droit à la vie privée. Toutefois il n'y a pas de lien direct entre cette violation et le fait que Sharma ait du réorienter sa carrière. Cette décision fut prise pour d'autres motifs, qui sont reliés de manière indirecte à cette première violation. Donc, il n y pas lieu d'accorder des dommages pécuniaires pour compenser la violation de son droit à la vie privée. Étant donné que la décision d'enregistrer les conversations provient du comité exécutif du temple, je crois que toute condamnation à des dommages-intérêts ou dommages exemplaires doit nécessairement viser la Hindu Mission of Canada (art. 309 du C.c.q.).
c) Les dommages exemplaires liés à la violation du droit à la vie privée des appelants
[77] En ce qui a trait aux dommages exemplaires, il faut se demander si les membres du comité exécutif du temple Hindu, en autorisant l'enregistrement clandestin des conversations, avaient l'intention de causer les conséquences de leur conduite fautive ou encore s'ils ont agi en toute connaissance des conséquences négatives, immédiates et naturelles de leur acte.[18] En réponse à cette question, je crois que le comité exécutif savait que le téléphone du temple était utilisé par le prêtre pour les affaires professionnelles de celui-ci, ainsi que pour ses fins personnelles. En effet, selon son contrat de travail, Sharma devait ouvrir le temple à sept heures le matin et le garder ouvert jusqu'à 19 h 30 le soir, sauf les vendredis.[19] Donc, on peut affirmer que le comité exécutif savait qu'il était extrêmement probable que les conversations personnelles de Sharma allaient être enregistrées. Cependant, la preuve ne nous permet pas d'affirmer, selon la prépondérance des probabilités, que le comité exécutif voulait causer des dommages moraux à Sharma et Mme Srivastava ou qu'il ait agi en toute connaissance de cause, sachant que leur faute causerait ce genre de dommage. Selon nous, la preuve nous démontre que la décision d'enregistrer les conversations était motivée par le désir de trouver quelque chose d'incriminant dans les enregistrements. C'était une expédition de pêche sans but précis. Donc, je crois qu'il n'y a pas lieu de condamner l'intimé à des dommages exemplaires pour l'atteinte à la vie privée des appelants.
[78] Dans leur mémoire, les appelants affirment que l'enregistrement clandestin des conversations téléphoniques de Sharna constituait une violation du droit à des conditions de travail justes et raisonnables, protégées par l'article 46 de la Charte québécoise.[20] D'après la jurisprudence sur le sujet[21], la H.M.C. pouvait avoir recours à un mode de surveillance électronique de Sharma si le critère de la nécessité était satisfait et si cette surveillance était utilisée de manière à limiter la violation des droits de ce dernier. Or, en l'espèce, je crois que les motifs mentionnés dans la résolution du 31 mars 1991 ne justifiaient pas l'enregistrement clandestin des conversations de Sharma. En effet, il est peu probable que l'écoute électronique du téléphone aurait pu fournir des preuves quant à l'identité du voleur recherché. De plus, l'enregistrement des conversations téléphoniques d'un prêtre, qui entend souvent des confidences, constitue une grave violation qui ne peut être justifiée que par des motifs importants ayant un lien logique avec les conversations enregistrées. Donc, je crois que la Hindu Mission of Canada a commis une violation de l'article 46 de la Charte québécoise, en enregistrant les conversations téléphoniques de Sharma. Je crois que H.M.C. doit être condamnée à payer 5 000 $ à Sharma pour avoir violé l'article 46 de la Charte québécoise.
d) La question concernant la diffamation des appelants
[79] Les appelants affirment que le juge de première instance a commis une grave erreur en affirmant qu'ils n'avaient pas fait l'objet de diffamation de la part des intimés. Selon eux, la conclusion du juge est déraisonnable compte tenu de l'abondance de preuves démontrant les actes de diffamation des intimés. Afin de vérifier la validité des prétentions des appelants, il est nécessaire d'analyser la conduite de l'intimée, la Hindu Mission of Canada, ainsi que les intimés, Awasthi, Chadha, Chakraborty, Dhand, Kaushal, Lal, Ravi Sharma et Vijay Sharma.
[80] Le droit à la libre expression ne peut être utilisé de manière à porter préjudice à autrui[22]. Au Québec, c'est la notion de faute qui est le fondement du régime de responsabilité pour diffamation. En d'autres mots il est nécessaire de se référer aux règles ordinaires de la responsabilité civile pour déterminer s'il y a diffamation[23]. Pour que la diffamation donne lieu à une action en dommages-intérêts, son auteur doit avoir commis une faute en exprimant des propos diffamatoires[24]. Cette faute peut résulter de deux types de conduite. La première est celle où le défendeur sciemment, avec l'intention de nuire, s'attaque à la réputation de la victime. La seconde résulte d'un comportement où le défendeur porte atteinte à la réputation de la victime par sa négligence, incurie, ou impertinence[25]. Il est important de noter qu'en droit civil, la diffamation peut découler de la transmission d'information fausse, ainsi que de la divulgation d'information vraie mais qui est faite dans le but de nuire à la réputation d'autrui[26].
[81] La première question à laquelle il faut répondre est celle de savoir si l'information que les appelants allèguent avoir été propagée par les intimés est vraie ou fausse. Je crois que les conversations enregistrées et la conduite de Sharma démontrent, selon la prépondérance des probabilités, qu'il existait une relation d'affection et d'amitié entre les appelants, mais pas nécessairement une relation intime de nature physique.
[82] D'un autre côté, certains gestes de la part de Sharma militent également en faveur de l'existence d'une relation d'affection entre les appelants. En effet, quand Grover et Dubé sont venus l'interroger concernant les conversations enregistrées, ils lui ont dit que si les rumeurs étaient vraies, il devait démissionner ; toutefois, s'il affirmait qu'elles étaient fausses, on allait défendre son nom devant le comité exécutif ainsi que la communauté Hindu. Sharma a commencé à pleurer et il a mis sa tête sur l'épaule de Grover, en lui demandant ce qu'il devait faire. Le lendemain, Sharma a démissionné de son poste. Il n'a pas nié l'existence d'une relation d'affection ce qu'il aurait sûrement fait si les allégations étaient fausses.
[83] La deuxième étape consiste à vérifier si les intimés ou les défendeurs ont diffusé cette information avec l'intention de nuire à la réputation de Sharma. D'emblée, je crois comme le premier juge que la H.M.C. n'a pas, en tant que personne morale, diffusé de rumeur ou parlé à qui que ce soit du contenu des cassettes. Toutefois, je crois que tel n'est pas le cas pour certains des autres intimés.
[84] En effet, selon certains témoins, qui n'avaient aucun intérêt à mentir, certains intimés auraient porté atteinte à la réputation des appelants en propageant des propos scandaleux à leur égard. Il convient ici de reproduire, de façon sommaire, certains de ces témoignages pertinents :
Rashter Sharma: déclare qu'en juillet 1991, certains membres de l'exécutif, notamment Awasthi, Chakraborti, Chadhaet Dhand, l'ont approché pour lui faire entendre les cassettes. Selon lui, les frères Sharma étaient les plus insistants;
Au téléphone Vijay Sharma lui aurait dit que Sharma était sale (filthy). À la maison de Vijay Sharma, Kaushal lui aurait également dit que le prêtre était de la saleté, et qu'il avait des relations avec beaucoup de femmes. Il souligne qu'a chaque fois qu'il allait au temple tous les membres de l'exécutif essayaient de le convaincre que Sharma était un mauvais homme, qui avait des relations sexuelles avec plusieurs femmes;
Vikram Bhatti, témoigne qu'après le 30 avril 1991, Chadha, Tuknat, Kaushal, Raviet Vijay Sharma, parlaient du sujet, lors des rencontres du dimanche au temple; ils affirmaient que Sharma avait eu une relation sexuelle avec Mme Srivastava. De plus, M Tuknat, lui aurait affirmé lors d'une conversation téléphonique le 30 avril 1991, que Sharma avait eu des relations sexuelles avec Mme Srivastava dans le temple;
M. Chitranjan Misra : affirme que Kaushal, Chadha, Vijay Sharma et Chakraborty discutaient ouvertement de la relation au temple lors des assemblées du dimanche et informaient tout le monde qui venait de la véracité des allégations concernant les appelants;
Mme Mercédès Beaulieu : épouse de M. Rashter Sharma, affirme que les frères Vijay et Ravi Sharma l'ont inviter à écouter les cassettes lors d'un dîner de famille à sa résidence, en affirmant que ca allait changer sa perception de Sharma;
Mohinder Gulati : soutient que Chadha et Vijay Sharma lui ont dit que Sharma côtoyait beaucoup de femmes. De plus Vijay Sharma lui a offert d'écouter les cassettes, mais il a refusé l'offre ;
Brij Sehgal : affirme que Vijay Sharma a offert de lui faire jouer les cassettes quelques mois après la rencontre du 30 avril 1991;
[85] En somme, il faut admettre que ces nombreux témoignages nous démontrent que certains intimés, notamment Kaushal, Chadha ainsi que les frères Sharma, ont participé dans une certaine mesure à diffuser certaines allégations concernant Sharma ainsi que Mme Srivastava . Malgré que ces derniers nient avoir diffusé des rumeurs, les témoignages cités ci-dessus me démontrent le contraire. Je crois que la similarité des allégations relatées dans ces témoignages confirme leur authenticité. Il est improbable que ces témoins aient conspiré ensemble pour témoigner contre certains membres du comité exécutif du H.M.C.
[86] Il y a eu deux sortes d'allégations diffusées à propos de Sharma: la première est que Sharma côtoyait beaucoup de femmes ; la deuxième était qu'il entretenait une relation sexuelle avec Mme Srivastava. En ce qui a trait à Mme Srivastava, elle est également visée par la deuxième allégation. Seule la diffusion concernant cette deuxième allégation est soulevée par les appelants en appel, donc je limiterai mes conclusions à celle-ci. Afin de vérifier s'il y a eu diffamation concernant cette allégation, il faut se demander si les intimés en cause ont agi de manière malicieuse, dans le but de nuire à la réputation des appelants[27]. En l'espèce, je crois que la conduite de Vijay et Ravi Sharma démontre une intention de nuire à la réputation des appelants. Leur insistance auprès des membres à faire jouer les cassettes pour démontrer la prétendue relation sexuelle des appelants, ainsi que la preuve de leurs propos malveillants sont indicatives d'une intention malicieuse de nuire à la réputation des appelants. En ce qui a trait aux autres intimés il n'y a pas de preuve précise qui puisse nous démontrer une intention malicieuse de nuire à la réputation des appelants.
[87] En somme, je crois que la décision du juge de première instance concernant la diffamation doit être renversée. En effet, celle-ci ne peut s'appuyer sur la preuve versée au dossier. Conséquemment, cette décision constitue une erreur manifeste qui justifie l'intervention de cette Cour.[28]
e) Le quantum des dommages moraux
[88] En évaluant les dommages moraux subis par les appelants, il est important de noter que plusieurs intimés ont diffusé des allégations concernant les appelants ; il est difficile alors de déterminer quelle portion du dommage moral causé aux appelants doit être attribuée aux frères Sharma. Il faut également tenir compte du fait que la séance d'arbitrage et la sentence rendue, à la demande de Sharma, a pu causer une certaine partie des dommages. En conséquence, je crois que Kaushal, Tuknat, Chadha ainsi que Vijay et Ravi Sharma, doivent être condamnés à payer, solidairement, 5 000 $ à chacun des appelants, représentant les dommages moraux causés par leurs fautes.
f) Les dommages exemplaires
[89] Je crois que les frères Sharma avaient l'intention de causer le dommage moral que les appelants ont subi ou du moins, qu'ils ont agi en sachant qu'un tel dommage était extrêmement probable.[29] Ils savaient pertinemment que les appelants étaient mariés, et que leur réputation au sein de la communauté Hindu serait détruite par l'allégation concernant une relation amoureuse. De plus, en insistant auprès des membres pour faire jouer les cassettes, ils ont démontré leur intention de causer le plus de préjudices possibles aux appelants. Pour ces raisons, je crois, qu'il y a lieu de condamner les frères Sharma à payer, solidairement, 5 000 $ à chacun des appelants, à titre de dommages exemplaires avec intérêt et indemnité additionnelle à compter du 29 octobre 1996, date du jugement de première instance[30].
[90] Pour ces motifs, je propose d'accueillir l'appel avec dépens et d'infirmer le premier jugement avec dépens, de condamner The Hindu Mission of Canada (Québec) Inc. à payer à chacun des appelants 10 000 $ pour le dommage moral résultant de la violation de leur droit à la vie privée, avec intérêt et indemnité additionnelle depuis l'assignation et dépens, de condamner The Hindu Mission of Canada (Québec) à payer à Sita Ram Sharma 5 000 $ à titre de dommage moral pour violation de son droit à des conditions de travail justes et raisonnables, avec intérêt et indemnité additionnelle depuis l'assignation et dépens, de condamner solidairement Ram Swaroop Kaushal, Prekash Chadha, Ravi Sharma et Vijay Sharma à payer à chacun des appelants 5 000 $ pour dommage moral à leur réputation avec intérêt et indemnité additionnelle depuis l'assignation et dépens, de condamner Ravi Sharma et Vijay Sharma solidairement à payer à chacun des appelants 5 000 $ à titre de dommages exemplaires, avec intérêt, indemnité additionnelle à compter du 29 octobre 1996 et dépens.
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________________________________ MICHEL ROBERT J.C.A.
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[1] Ibid. ;En effet, la résolution met l'emphase sur le vol, sur des services offerts par le prêtre sans la connaissance de l'exécutif ainsi que sur les problèmes liés au chevauchement des rendez-vous.
[2] Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q., c. C-12 (ci-après Charte québécoise)
[3] Roy c. Saulnier (1992) R.J.Q. 249 C.A. (ci-après Saulnier)
[4] Ibid.
[5] Charte canadienne des droits et libertés, Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.U.), 1982, c. 11.
[6] R. v. Wong, [1987] 34 C.C.C. 3d 51 ; voir aussi R. v. Duarte [1990] S.C.R. 30, à la p. 47.
[7] M.A., vol 1, 16 ; voir: L'association des Techniciennes et Techniciens en diététique du Québec c. Centre Hospitalier Côte-des-Neiges, [1993] T.A. 1021 , à la p. 1027-1029
[8] M.A., vol 1, à la p. 27 ; N.B. que le mot utilisé en anglais se traduit par des relations sexuelles.
[9] Voir : Société Radio-Canada c. Radio Sept-Iles Inc. [1994] R.J.Q. 1811 , à la p. 1818.
[10] Saulnier, Supra note 8.
[11] Ibid., à la p.9 ; N.B. ici, l'intimé reproduit les pages 2424 et 2425 de l'arrêt Saulnier.
[12] Saulnier, Supra note 8, à la p. 2424.
[13] (1996) R.J.Q. 1217 (C.S.) (ci-après Thibodeau)
[14] S.D.G.M.R. c. Dolphin Delivery ltd., (1986) 2 R.C.S. 573 .
[15] Voir Mascouche (Ville de) c. Houle, [1999] R.J.Q. 1894 , à la P. 1919 ; Saulnier, Supra note 8, à la p. 2425
[16] Voir Edwards, Supra note 24.
[17] R. c. Plant, [1993] 84 C.C.C. 3d 203
[18] Curateur Public c. Syndicat national des employés de l'hôpital St. Ferdinand [1996] 3 R.C.S. 211 à la p. 262. (ci-après St Ferdinand)
[19] M.A., vol 1, à la p. 158.
[20] Ibid., à la p. 20.
[21] Voir : L'association des Techniciennes et Techniciens en Diététique du Québec c. Centre Hospitalier Côte-des-Neiges, [1993] T.A., 1021, à la p. 1027-1029
[22] J.-L. BAUDOIN et Patrice DESLAURIERS, la Responsabilité Civile 5 ed, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 1998, à la p. 302.
[23] Ibid.
[24] Barrou c. Micro-boutique éducative inc. [1999] R.J.Q. 2659 (ci-après Barrou)
[25] J.-L. BAUDOIN et P. DESLAURIERS, op. cit., note 79, à la p. 302.
[26] Ibid., à la p. 302.
[27] J.-L. BAUDOIN et P. DESLAURIERS, op. cit., note 79, à la p. 302.
[28] Bourassa c. Forum de Montréal, [1989] R.R.A. 137 , à la p. 138.
[29] St Ferdinad, Supra note 75, à la p. 262.
[30] Association des professeurs de Liguery (A.P.L.) c. Anetta Comeau [1990] R.J.Q. 130
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