Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier

Lampron c. 9136-9074 Québec inc. (Corbeil Électroménagers)

2013 QCCQ 13566

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

DRUMMOND

LOCALITÉ DE

Drummondville

« Chambre civile »

N° :

405-32-006536-126

 

 

DATE :

7 novembre 2013

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

GILLES LAFRENIÈRE J.C.Q.

 

 

______________________________________________________________________

 

JOSETTE LAMPRON

Demanderesse

c.

9136-9074 QUÉBEC INC. (Corbeil Électroménagers)

Défenderesse

-et-

COMÉRO SERVICES INC.

           Appelée

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

 

CONTEXTE

[1]           La demanderesse requiert l'annulation de la vente d'une cuisinière de marque Kitchen Aid qu'elle a achetée de la défenderesse, au motif qu'elle présente un vice de fabrication important.

[2]           La défenderesse 9136-9074 Québec inc., faisant affaires sous la raison sociale de Corbeil Électroménagers (ci-après appelée Corbeil) nie tout défaut de fabrication et reporte la faute sur la demanderesse qui a négligé de l'entretenir correctement.

[3]           L'appelée Comerco Services inc. (ci-après appelée Comerco) fait valoir que le défaut observé à la cuisinière est exclu du plan de protection auquel a adhéré la demanderesse.

LES FAITS PERTINENTS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

[4]           Le 11 juillet 2009, la demanderesse achète de la défenderesse Corbeil, une cuisinière de marque Kitchen Aid avec autonettoyant au prix de 2 528,35 $.  Au même moment, elle adhère à un plan de protection supplémentaire de 50 mois, sous la responsabilité de l'appelée Comerco.

[5]           Au cours de la première année d'utilisation, la demanderesse remarque que le système autonettoyant de la cuisinière ne donne pas les résultats souhaités, mais ne s'en plaint pas.

[6]           En janvier 2012, la demanderesse tente de faire partir une tache à l'aide du système autonettoyant, mais n'y parvient pas.  Elle appelle donc chez Corbeil pour s'enquérir du bon fonctionnement de ce système.

[7]           En juillet 2012, la demanderesse n'arrive toujours pas à nettoyer adéquatement son four et constate que l'émail de celui-ci est endommagé.

[8]           Robert Quessy est directeur pour la défenderesse Corbeil.  Selon les registres de l'entreprise, la demanderesse ne place que deux appels auprès d'elle.  Lors du premier, en date du 27 janvier 2012, elle demande des instructions pour faire fonctionner le système autonettoyant alors qu'au second, en date du 20 juillet 2012, elle se plaint d'une tache qu'elle n'arrive pas à faire disparaître.

[9]           Un technicien mandaté par l'appelée Comerco se rend chez elle et constate que l'émail est sévèrement endommagé.  Toutefois, il refuse d'effectuer quelque réparation que ce soit, puisqu'il conclut à un problème d'esthétisme qui est exclu de la garantie.  À cet égard, le représentant de l'appelée dépose en preuve les conditions d'application du programme de protection qui énonce que:

«Les dommages suivants sont exclus de la couverture du présent contrat de service:

L'esthétique, les garnitures, la rouille, le bruit ou la performance du produit qui n'est pas causé par un bris [….].»

[10]        Mario Gagnon est propriétaire de l'entreprise L.M. Services, une entreprise spécialisée dans la réparation d'appareils domestiques depuis 1976.  À ce titre, il est responsable de tous les appels de service pour la compagnie Kitchen Aid et travaille régulièrement pour le bénéfice de Corbeil.

[11]        D'emblée, il reconnaît que l'émail du four est endommagé et que cette situation ne peut être corrigée.  Toutefois, il affirme qu'il s'agit d'un problème esthétique qui ne nuit pas au bon fonctionnement du four.

[12]        Selon son témoignage, la détérioration de l'émail résulte de la négligence de la demanderesse de nettoyer régulièrement son four et de laisser au fond de celui-ci des taches importantes.

[13]        La demanderesse n'est pas d'accord. Ce n'est pas la première cuisinière qu'elle achète et jamais auparavant elle n'a éprouvé un tel problème.  Aussi, elle affirme qu'elle a toujours pris soin de celui-ci en le nettoyant régulièrement.

ANALYSE

[14]        Les photos produites à l'audience sont éloquentes quant à la détérioration de l'émail du four de la cuisinière.  En moins de trois ans, le fond de la cuisinière est complètement dégradé.

[15]        Le Tribunal ne retient pas le témoignage de l'expert Gagnon, voulant que la détérioration de l'émail résulte de la négligence de la demanderesse de nettoyer son four régulièrement.  Le Tribunal ne retient également pas son témoignage voulant que la détérioration de l'émail ne porte pas atteinte à la durée de vie utile du four.  Son témoignage ne repose sur aucune assise technique solide.

[16]        S'il est vrai que le guide d'entretien de la cuisinière mentionne qu'à des températures élevées, les aliments réagissent avec l'émail du four pour provoquer des piqûres ou de légères taches blanches, ce n'est pas ce qui est observé au four de la demanderesse.  Les photos démontrent qu'en moins de trois ans, l'émail du four est complètement dégradé.

[17]        Il est inconcevable que cette détérioration soit le résultat de résidus de nourriture laissés au fond du four. Un four doit être conçu et construit de manière à pouvoir recevoir et résister aux résidus de nourriture. D'ailleurs, l'article 37 de la Loi sur la protection du consommateur énonce que:

«Art. 37:   Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à l'usage auquel il est normalement destiné.»

[18]        Qui n'a pas déjà laissé au fond du four quelques petites éclaboussures de nourriture, le temps qu'elles soient en nombre suffisant pour faire fonctionner le système autonettoyant?  D'ailleurs, les photos produites à l'audience ne montrent pas un four sale et mal entretenu.  Bien au contraire, le four est propre à l'exception de quelques petites taches.

[19]        De même, il est inconcevable que la dégradation de l'émail observé à la cuisinière de la demanderesse ne porte pas atteinte à sa durée de vie utile. Il est d'ailleurs surprenant que le témoin Gagnon, après avoir affirmé que sa dégradation ne porte pas atteinte à la durée de vie utile du four, ne puisse indiquer au Tribunal le rôle que joue l'émail dans la conception du four.

[20]        À l'évidence, cette cuisinière ne satisfait pas l'exigence de la durée raisonnable prévue à la Loi sur la protection du consommateur:

«Art. 38:  Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation du bien.»

[21]        Puisque la détérioration à l'émail ne peut être corrigée par une réparation quelconque, le Tribunal doit annuler la vente.

[22]        POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[23]        ANNULE  la vente intervenue le 11 juillet 2009;

[24]        CONDAMNE conjointement et solidairement la défenderesse et l'appelée à payer à la demanderesse la somme de 2 528,38 $ avec intérêts au taux légal de 5 % l'an et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, et ce, à compter du 14 décembre 2012;

[25]        CONDAMNE conjointement et solidairement la défenderesse et l'appelée à payer à la demanderesse les frais judiciaires de la présente demande au montant de 103 $;

ET POUR VALOIR ENTRE ELLES SEULEMENT:

[26]        DÉPARTAGE la responsabilité de la défenderesse et de l'appelée de la façon ci-après:

Ø  Défenderesse:  50 %

Ø  Appelée:  50 %

 

__________________________________

GILLES LAFRENIÈRE, J.C.Q.

Date d'audience:

23 septembre 2013

 

Retrait et destruction des pièces

 

Les parties doivent reprendre possession des pièces qu’elles ont produites, une fois l’instance terminée. À défaut, le greffier les détruit un an après la date du jugement ou de l’acte mettant fin à l’instance, à moins que le juge en chef n’en décide autrement.

 

 

 

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.