Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Lanaudière

JOLIETTE, le 30 janvier 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

132501-63-0002

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Manon Gauthier

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Madame Francine Melanson,

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Monsieur Richard Tremblay,

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

115717159

AUDIENCE TENUE LE :

23 novembre 2000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

Joliette

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

henry preston

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

malo transport (1971) inc.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 24 février 2000, monsieur Henry Preston (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue 19 janvier 2000, à la suite d’une révision administrative.

[2]               Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 3 mars 1999 et déclare que le travailleur n’a pas subi de lésion professionnelle le 22 octobre 1998 et qu’ainsi, il doit rembourser une somme de 515,76 $, représentant les indemnités de remplacement du revenu versées pour la période du 24 octobre 1998 au 1er novembre 1998.

[3]               Lors de l’audience du 23 novembre 2000, le travailleur était présent et représenté.  L’employeur, Malo Transport (1971) inc. était également présent et représenté.

 

L'OBJET DE LA CONTESTATION

[4]               Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître qu’il a subi une lésion professionnelle le 22 octobre 1998.

 

QUESTION PRÉLIMINAIRE

[5]               Au début de l’audience, le représentant de l’employeur, Monsieur Gérald Corneau, présente une demande de récusation de la commissaire saisie du dossier en titre en vertu de l’article 429.43 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., chapitre A-3.001) (la loi).

[6]               En effet, le représentant de l’employeur soumet que la commissaire n’a pas l’indépendance et l’impartialité nécessaires afin de statuer dans la présente affaire.  Il indique que lors de ses activités professionnelles antérieures, la commissaire a représenté pendant plusieurs années des travailleurs de l’industrie du camionnage et elle a également plaidé à plusieurs reprises des dossiers où lui-même fut impliqué comme représentant d’employeur.

[7]               Le représentant du travailleur soumet quant à lui que la requête formulée par le représentant de l’employeur concernant la demande de récusation doit être rejetée.

[8]               En effet, il soumet qu’il y a absence de démonstration de motifs sérieux justifiant cette récusation.

[9]               Aucune preuve ne fut soumise à l’effet que la commissaire désignée au dossier ait eu une connaissance préalable du dossier ou un préjugé favorable envers la décision contestée.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LA QUESTION PRÉLIMINAIRE

[10]           La commissaire soussignée a rendu séance tenante sa décision quant au bien-fondé de la requête en récusation formulée par le représentant de l’employeur à l’égard de sa désignation comme commissaire au présent dossier.

[11]           La demande de récusation s’appuie sur l’article 429.43 de la loi :

429.43. Toute partie peut, à tout moment avant la décision et à la condition d'agir avec diligence, demander la récusation d'un membre saisi de l'affaire si elle a des motifs sérieux de croire qu'il existe une cause de récusation.

 

La demande de récusation est adressée au président.  Sauf si le membre se récuse, la demande est décidée par le président, ou par un membre désigné par celui - ci.

________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[12]           On constate d’abord que l’implication de l’article 429.43 de la loi requiert des motifs sérieux de croire qu’il existe une cause de récusation.

[13]           La commissaire a examiné si la situation alléguée par le représentant de l’employeur est susceptible de soulever une crainte raisonnable d’impartialité aux yeux d’une personne raisonnable et bien renseignée, mais non tatillonne[1].  Or, aucun motif précis n’est allégué à l’appui de la demande de récusation de la commissaire soussignée.

[14]           Bien qu’elle ait eu des activités professionnelles antérieures où elle a effectivement représenté des travailleurs oeuvrant dans l’industrie du transport et qu’elle ait plaidé à plusieurs reprises contre monsieur Corneau, la commissaire ne reconnaît aucun lien autre que professionnel avec ce dernier; elle n’a jamais défendu de dossiers concernant des travailleurs œuvrant chez Malo Transport (1971) inc.  Elle n’a jamais pris connaissance de quelque façon que ce soit du dossier de monsieur Preston ni ne le connaît personnellement. 

[15]           La commissaire a donc rejeté séance tenante la requête formulée par le représentant de l’employeur.  Elle a indiqué qu’elle n’entendait pas se récuser et a écrit une décision manuscrite qui fut d’ailleurs consignée au procès-verbal lors de l’audience qui s’est tenue le 23 novembre 2000.

[16]           Avant de procéder sur le fond du litige, les parties furent informées de la possibilité d’en appeler de cette décision conformément aux Règles de preuve, de procédure et de pratique de la Commission des lésions professionnelles (L.R.Q., chapitre A-3.001, a.429.21); les parties se sont déclarées satisfaites de la décision.

 

LES FAITS

[17]           Monsieur Henry Preston est au service de l’employeur depuis 1988 comme chauffeur de camion-citerne lorsque le 22 octobre 1998, il allègue avoir subi une lésion professionnelle.

[18]           Au formulaire « Avis de l’employeur et demande de remboursement » le travailleur rapporte en ces termes l’événement dont il fut victime le 22 octobre 1998 :

« En manipulant des blocs de bois chez un client j’ai senti une douleur au bras droit résultant tentinite. » (sic)

 

 

[19]           Lors de son témoignage, monsieur Preston indique que le 22 octobre 1998, il a débuté son quart de travail à 4 h du matin.  Il s’est alors rendu chez Betcon afin d’aller chercher un chargement de dalles de béton qui étaient destinées au CEGEP André-Laurendeau.  Le fait de conduire une remorque plate, communément appelée « flat bed », n’était pas habituel pour le travailleur; en effet, il indique que, depuis son embauche chez Transport Malo (1971) inc. en 1988, il n’en a conduit qu’à quelques reprises.

[20]           Après avoir effectué deux voyages de livraison de dalles au CEGEP André-Laurendeau, monsieur Preston est retourné chez Betcon vers 14 h afin d’y reconduire la remorque qu’il avait préalablement cueillie le matin.

[21]           A son arrivée chez Betcon, on lui a signifié qu’il devait aller décharger les blocs de bois appelés « spacers » servant de pièces d’espacement entre les dalles de béton qui demeuraient sur la remorque.  Ces blocs de bois sont faits de bois franc, d’une dimension de 4 pouces x 4 pouces x 4 pieds.  Il y en avait environ une douzaine, et chaque pièce pesait approximativement 25 livres.

[22]           Monsieur Preston a donc conduit la remorque à l’endroit où il devait les décharger.  Il devait prendre un bloc à la fois et les lancer sur une pile où d’autres blocs du même type étaient situés.  Ce faisant, trois blocs de bois ont roulé au sol.  Monsieur Preston est donc descendu de la remorque afin de les prendre et de les lancer à nouveau sur la pile située à côté de lui.  En lançant un bloc de bois avec force, il a ressenti une douleur au bras droit.  Comme le bloc en a heurté un autre, il est revenu vers lui et l’a heurté au niveau de l’épaule droite.  Il a alors ressenti une brûlure et une sensation de perte de force.  Renonçant à lancer les deux autres morceaux de bois qui avaient roulé au sol, il les a seulement déplacés.

[23]           Il a alors reconduit la remorque à l’endroit qui lui était assigné et il est retourné par la suite chez son employeur sans chargement.

[24]           Monsieur Preston indique être arrivé chez l’employeur vers 15 h 30.  Après avoir complété ses rapports journaliers, il a terminé son quart de travail à 16 h.  Cependant, à cette heure-là, l’horaire de travail pour le lendemain n’est pas encore disponible.  Son assignation de travail lui fut donc communiquée plus tard au cours de la soirée.

[25]           Monsieur Preston indique n’avoir parlé à aucun autre travailleur lorsqu’il s’est présenté chez l’employeur.

[26]           Lorsqu’il est retourné chez lui, la douleur à l’épaule droite était toujours présente.

[27]           Vers 18 h, le répartiteur Claude Bonin l’a appelé à son domicile et il lui a simplement mentionné « Quévillon » auquel le travailleur a répondu « O.K ».  Il devait alors partir à minuit afin de faire le trajet qui lui avait été assigné.  Après avoir reçu l’appel, il a pris de la médication et s’est couché afin de prendre un peu de repos.  Il s’est alors réveillé vers 21 h 30 mais qu’à son réveil, il ne se sentait pas bien et qu’il ressentait une forme de « paralysie » au niveau du bras droit.  Son épouse lui a alors appliqué de la glace ainsi qu’une pommade analgésique.

[28]           Vers 22 h 30, compte tenu de son état, son épouse a téléphoné chez l’employeur afin d’aviser que son époux ne pourrait effectuer le trajet qui lui avait été assigné en raison des douleurs qu’il éprouvait.  Le même soir, vers 23 h, monsieur Preston indique avoir bénéficié d’un traitement de massothérapie de la part d’un voisin à qui il s’était adressé préalablement en début de soirée, ce qui malheureusement n’a pas apporté l’amélioration souhaitée. 

[29]           Il est donc allé le lendemain, le 23 octobre 1998, rencontrer son médecin de famille, le docteur Turenne, qui indique le diagnostic de tendinite de la longue portion du biceps.  Il prescrit du repos, la prise d’anti-inflammatoire non stéroïdiens et une possibilité de retour au travail le 29 octobre 1998.

[30]           Aux notes de consultation complétées par le docteur Turenne le 23 octobre 1998, celui-ci note : « Trauma en déplaçant morceaux de bois »(sic).

[31]           Le samedi 24 octobre 1998, monsieur Preston indique s’être présenté à l’établissement de l’employeur afin de remettre son rapport médical.  Monsieur Daniel Garceau, répartiteur, était alors présent sur les lieux. 

[32]           Quant au formulaire « Avis de l’employeur et demande de remboursement » précité, ce document fut rempli quelques jours plus tard.

[33]           Monsieur Preston a rencontré une nouvelle fois le docteur Turenne le 28 octobre 1998 qui maintient l’arrêt de travail.  Au rapport médical, le docteur Turenne indique que le travailleur pourra reprendre ses fonctions à compter du 2 novembre 1998.

[34]           Lors de son témoignage, monsieur Preston confirme être effectivement retourné au travail le 2 novembre 1998 et qu’il ne ressentait plus aucun malaise au membre supérieur droit.  Il a par la suite occupé son travail de façon régulière jusqu’à ce que survienne un autre événement au travail en date du 13 janvier 1999 et faisant l’objet d’une autre cause pendante devant la Commission des lésions professionnelles (dossier 131732-63-0002).

[35]           Interrogé sur le fait que le docteur Turenne ait mentionné au rapport médical que la date de l’événement initial était le 15 novembre 1996, monsieur Preston indique avoir effectivement subi une lésion professionnelle à cette date mais qu’il s’agissait d’une erreur de la part de son médecin traitant.  En effet, la lésion survenue le 15 novembre 1996 concernait une blessure survenue à l’épaule gauche et non à droite, et suite à laquelle il n’avait connu qu’une courte période d’arrêt de travail.

[36]           Au formulaire « Avis de l’employeur et demande de remboursement », l’employeur a joint deux déclarations rédigées contemporainement par messieurs Claude Bonin et Daniel Garceau et qui sont présentes au dossier.  La déclaration rédigée par monsieur Bonin se lit comme suit :

«23 Octobre 1998 

Quand Henry à fini jeudi soir à 16 :00 heures, il m’a dit que demain il ne voulait pas aller loin, parce que vendredi soir c’était la chasse.  Je l’ai booké à Quevillon à minuit pour respecter les heures de logbook, je n’avais pas le choix, tous les chauffeurs ont fini tard jeudi et il y avait beaucoup de voyages au loin vendredi.  Il m’a appelé vers 18 :00 heures pour savoir où il allait, je lui ai dit et il m’a répond O.K.  Sa femme à appelé Daniel à 22 :30 heures pour lui dire que Henry ne rentrerait pas travailler car il avait mal au dos. »  (sic)

 

 

[37]           Quant à celle rédigée par monsieur Garceau, elle se lit de la façon suivante :

« 24 Octobre 1998

Henry Preston est arrivé au bureau samedi matin, le 24 octobre 1998, avec un papier de C.S.S.T.  Il ma expliqué qu’il s’est levé le soir du 22 octobre 1998 avec un mal de dos et de bras, coté droit, et il pensait être paralizé.

Il m’a dit qu’il avait expliqué au docteur que ce n’était pas un accident de travail, et le docteur lui aurait répondu qu’il savait ce qu’il faisait et que cétait des mouvements répétitifs qui causaient ses malaises. » (sic)

 

 

[38]           Interrogé à cet effet, monsieur Preston indique qu’après avoir pris connaissance des deux déclarations complétées par messieurs Bonin et Garceau, ne pas comprendre pourquoi monsieur Bonin mentionne qu’il ne pouvait travailler le vendredi 23 octobre parce qu’il allait à la chasse.  En effet, monsieur Preston indique ne jamais avoir pratiqué ce sport de toute sa vie et il ne possède aucune arme à feu.  Il indique au surplus qu’il est impossible qu’il ait mentionné une telle information à monsieur Bonin puisqu’en raison d’un conflit subsistant entre eux depuis plusieurs années, il n’adresse jamais la parole à monsieur Bonin sauf quelques mots à l’occasion en ce qui concerne le travail.  L’employeur est d’ailleurs au courant de cette tension qui existe entre eux.

[39]           Quant à la déclaration écrite par monsieur Garceau, il indique avoir blagué avec ce dernier lorsqu’il lui a apporté son billet médical car monsieur Garceau l’aurait interpellé quant à l’origine professionnelle de sa lésion.

[40]           La Commission des lésions professionnelles a par la suite entendu le témoignage de madame Pierrette Giroux-Preston, conjointe du travailleur.  Celle-ci confirme que le 22 octobre 1998, monsieur Preston a quitté le domicile pour aller travailler sans éprouver aucun malaise particulier.  Lorsqu’il est revenu vers 16 h 30, celui-ci lui a alors mentionné avoir mal à l’épaule droite.  C’est après qu’il se soit douché que cette dernière l’a frictionné avec une pommade analgésique avant qu’il aille se coucher.  Il a également pris de la médication.

[41]           Elle confirme que vers 18 h 30, un représentant de l’employeur a téléphoné à la maison afin de parler à monsieur Preston concernant le voyage qu’il devait effectuer le soir même.  Il a pris la communication et s’est recouché par la suite pour se réveiller vers 21 h 45.

[42]           A son réveil, comme il se plaignait toujours de malaises à l’épaule droite, celle-ci lui a alors signifié qu’il n’était pas raisonnable d’aller travailler dans ces conditions et qu’il était susceptible de provoquer un accident de la route.  C’est alors elle qui a pris l’initiative de téléphoner chez l’employeur; elle ne peut cependant affirmer à qui elle a parlé ce soir-là.  Elle indique avoir mentionné que son mari ne pouvait entrer au travail parce qu’il avait mal à l’épaule mais elle indique également qu’elle a pu mentionner qu’il avait mal au dos à ce moment.  En effet, elle démontre, geste à l’appui, que monsieur Preston avait mal de l’avant à l’arrière de l’épaule jusqu’à l’omoplate, ce qui a pu causer la confusion.

[43]           Le troisième témoin à avoir été entendu fut monsieur Claude Bonin, superviseur chez Malo Transport (1971) inc. depuis octobre 1998.  Monsieur Bonin indique que ses fonctions l’amènent à s’occuper des heures de conduite des chauffeurs de camions, de la répartition du travail, de veiller à ce que les véhicules soient en bon état de marche, de la validité des permis de transport ainsi que de la paie.  Il indique avoir effectivement complété la déclaration apparaissant au dossier, datée du 23 octobre 1998.

[44]           Monsieur Bonin indique avoir tout d’abord complété un rapport manuscrit qui devait être consigné au dossier du chauffeur, document qu’il a d’ailleurs rédigé le 24 octobre 1998 suite à une note laissée initialement par monsieur Garceau qui était le répartiteur de soir lorsque madame Preston a communiqué avec l’employeur.  En effet, le répartiteur de soir avait dû trouver un remplaçant pour effectuer l’assignation de travail vers Quévillon parce que monsieur Preston ne pouvait entrer au travail.  Il devait donc écrire une note en raison d’un retard du voyage qui ne pourrait être livré à temps au fournisseur d’ouvrage.

[45]           Lors de son témoignage, monsieur Bonin indique avoir effectivement dactylographié lui-même sa déclaration, ce qu’il ne fait cependant pas de façon systématique.  En effet, il indique que lorsqu’il survient des événements qui peuvent nuire au bon déroulement des opérations de l’entreprise, il peut alors dactylographier les informations.  Ce document fut préparé à la demande de son employeur, monsieur Robert Bunclark, parce que celui-ci désirait joindre cette déclaration au formulaire « Avis d’employeur et demande de remboursement ».

[46]           Monsieur Bonin indique quant à lui avoir de bonnes relations avec monsieur Preston sans qu’il soit survenu d’incident particulier pouvant nuire à leur bonne entente.  Il indique pouvoir s’entretenir avec lui à l’occasion sans discuter de situations particulières.

[47]           Concernant la mention retrouvée au rapport à l’effet que monsieur Preston allait à la chasse, il indique que lorsqu’il lui a parlé le jeudi 22 octobre c’est monsieur Preston lui-même qui lui a indiqué ne pouvoir aller très loin parce qu’il devait aller à la chasse.  Celui-ci indique ne pas savoir si effectivement monsieur Preston pratique cette activité sportive; il ne lui a pas posé de question à cet effet.

[48]           Monsieur Bonin confirme que le travailleur est une personne assidue, qui s’absente peu du travail et qui effectue les tâches qu’on lui demande d’accomplir.

[49]           Concernant le poids des blocs de bois que monsieur Preston a eu à manipuler, il indique que selon son estimation, ces blocs de bois pèsent environ 15 livres; comme ce dernier a déjà été lui-même chauffeur de camion, il estime être en mesure de pouvoir donner ce poids.

[50]           Le dernier témoin à avoir été entendu est monsieur Daniel Garceau.  Monsieur Garceau confirme qu’en octobre 1998, il était répartiteur de soir chez l’employeur.  Il confirme avoir écrit la déclaration précitée.

[51]           Il indique que cette déclaration fut dactylographiée par la secrétaire de l’employeur et que ce fut fait à la demande de monsieur François Forest, représentant de l’employeur.  Monsieur Garceau indique qu’il n’est pas habituel que ce genre de déclaration soit dactylographiée.  Il indique c’est suite à une directive formulée par l’employeur qu’un rapport manuscrit doit être complété lorsqu’un incident survient lors du déroulement des opérations de l’entreprise. Bien qu’il indique ne pas se rappeler des dates, il croit avoir complété cette déclaration le soir même qu’il a reçu l’appel de madame Preston.  Il ne peut cependant le confirmer puisqu’il n’a pas en sa possession le document manuscrit qu’il a pu rédiger le soir du le 22 octobre 1998 ou plutôt le 24 octobre tel que mentionné à sa déclaration.  Il confirme que c’est bel et bien madame Preston qui a communiqué avec lui afin de lui indiquer que monsieur Preston ne pouvait effectuer son assignation de travail puisqu’il avait mal au bras et au dos.  Il mentionne que bien qu’il soit indiqué au rapport qu’il s’agissait du membre supérieur droit, il ne se souvient pas si madame Preston le lui a effectivement mentionné ou non.  Il ne lui a d’ailleurs posé aucune question.  Il indique avoir laissé la note manuscrite à l’autre répartiteur, monsieur Claude Bonin.

[52]           Par la suite, il confirme avoir effectivement vu monsieur Preston le samedi matin qui est venu lui remettre un billet médical concernant un événement survenu au travail et que monsieur Preston lui a alors mentionné qu’il avait consulté un médecin; il indique alors avoir pris possession du papier sans avoir formulé aucun commentaire.  Monsieur Preston a par la suite quitté, sans plus.

[53]           Concernant le poids des blocs de bois, monsieur Garceau confirme avoir été lui-même chauffeur de camion et avoir pesé quelques jours avant l’audience un de ces blocs; il indique que ceux-ci sont fait de bois franc et pèsent environ une quinzaine de livres chacun.

[54]           La Commission des lésions professionnelles a également pris connaissance d’une expertise médicale rédigée le 12 août 1999 par le docteur Gilles-Roger Tremblay, chirurgien-orthopédiste.  Dans cette expertise médicale, le docteur Tremblay indique que, selon la description de l’événement du 22 octobre 1998 qui lui fut rapportée, il s’agissait d’un mécanisme  susceptible de provoquer la tendinite de l’épaule droite qui fut diagnostiquée par le docteur Turenne le 23 octobre 1998.

 

 

L'AVIS DES MEMBRES

[55]           Conformément à la loi, la commissaire soussignée a recueilli l’avis des membres issus des associations syndicales et d’employeurs sur l’objet du litige.

[56]           Le membre issu des associations d’employeurs et celui issu des associations syndicales sont d’avis qu’il y a lieu d’accueillir la requête.  En effet, ils croient que monsieur Preston a effectivement été victime d’un accident de travail et que son témoignage fut rendu de façon très crédible.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[57]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si monsieur Henry Preston a subi une lésion professionnelle le 22 octobre 1998.

[58]           La Commission des lésions professionnelles a étudié avec intérêt l’ensemble du dossier et soupesé les divers témoignages qui furent rendus devant elle.  Elle rend en conséquence la décision suivante.

[59]           À l’article 28 de la loi, le législateur énonce une présomption en faveur de la reconnaissance d’une lésion professionnelle.  L’article 28 se lit comme suit :

28. Une blessure qui arrive sur les lieux du travail alors que le travailleur est à son travail est présumée une lésion professionnelle.

________

1985, c. 6, a. 28.

 

 

[60]           Et l’article 2 de  la loi donne la définition suivante d’un accident du travail :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:

 

«accident du travail» : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle;

________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1.

 

 

[61]           Il ressort du libellé de l’article 28 que trois éléments doivent se retrouver pour que la présomption de lésion professionnelle puisse trouver application, soit :

-         le travailleur doit avoir subi une blessure;

-         la blessure doit survenir sur les lieux du travail;

-         le travailleur doit être à son travail.

[62]           Ces trois éléments doivent être établis par une preuve prépondérante.

[63]           La Commission des lésions professionnelles croit tout d’abord que le travailleur peut bénéficier de la présomption de lésion professionnelle énoncée à l’article 28 de la loi.  En effet, selon la preuve médicale non contredite, la tendinite diagnostiquée par le docteur Turenne étant d’origine traumatique, comme le confirme d’ailleurs la lecture des notes de consultation du médecin datées du 23 octobre 1998, constitue une blessure. La Commission d’appel en matière de lésions professionnelles et la Commission des lésions professionnelles ont d’ailleurs rendu plusieurs décisions en ce sens.

[64]           La blessure est-elle arrivée sur les lieux du travail alors que le travailleur était à son travail?

[65]           La Commission des lésions professionnelles conclut qu’il y a eu démonstration par le travailleur d’une preuve prépondérante à cet effet.  En effet, le témoignage du travailleur était crédible et non contredit sur ces aspects.  Ce dernier a toujours soutenu, de ce qui apparaît tant du dossier que de son témoignage, que les douleurs à l’épaule droite sont apparues immédiatement après avoir lancé un bloc de bois qui était retombé au sol et que suite à un rebond, celui-ci est venu le heurter à la face antérieure de l’épaule droite.

[66]           Quant aux témoignages de messieurs Bonin et Garceau, ceux-ci ne sont pas de nature à contredire la version de monsieur Preston pour les raisons suivantes.

[67]           Lors de la survenance de l’événement, aucune de ces deux personnes n’étaient présentes sur les lieux lorsque monsieur Preston a subi sa blessure au travail.  Et les informations qu’ils ont par ailleurs consignées par écrit concernent des faits postérieurs à la survenance de la lésion.

[68]           Lorsque monsieur Bonin rédige son rapport, il le fait à partir des notes manuscrites laissées par son confrère de travail.

[69]           Quant à monsieur Garceau, il est des plus imprécis quant à la survenance des événements et ce qu’il relate d’ailleurs n’est pas de nature à déconsidérer la version des faits rendue par monsieur Preston.

 

[70]           La Commission des lésions professionnelles considère également comme curieux le fait que monsieur Bonin rapporte que monsieur Preston lui ait indiqué ne pas vouloir s’éloigner en raison du fait qu’il voulait aller à la chasse et qu’il témoigne par la suite que le travailleur était une personne assidue au travail et s’absentait peu.  Aucune preuve ne fut d’ailleurs apportée à l’effet que monsieur Preston ait pu effectivement aller à la chasse ou qu’il pratiquait ce sport depuis des années; en effet, il est allé consulter le lendemain de la survenance de sa lésion et le samedi, il apportait une attestation médicale à son employeur.  Il a également revu son médecin quelques jours plus tard et repris le travail normal par la suite.

[71]           Comme le tribunal constate que la présomption de lésion professionnelle énoncée à l’article 28 trouve application, elle doit donc recevoir son plein effet.  La requête du travailleur est donc accueillie.

[72]           Cependant, nonobstant l’application de la présomption énoncée à l’article 28 de la loi, la Commission des lésions professionnelles considère également que le travailleur a été victime d’un accident du travail au sens de l’article 2 de la loi.  En effet, le tribunal considère que la description des faits démontrait la présence d’un événement imprévu et soudain alors que monsieur Preston a lancé une pièce de bois qui était retombée au sol et que c’est à ce moment qu’il a ressenti une douleur à l’épaule droite, et qu’au surplus, suite au rebond de la pièce lancée, celle-ci est venue le heurter à la face antérieure de l’épaule droite.  Il y a clairement un fait accidentel de décrit; de plus, le travailleur n’avait jamais exécuté cette tâche auparavant depuis qu’il est au service de l’employeur, soit depuis 1988 et il conduisait essentiellement des camions-citernes.

[73]           Pour tous ces motifs, la requête est accueillie.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de monsieur Henry Preston, le travailleur;

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 19 janvier 2000, à la suite d’une révision administrative;

 

 

 

DÉCLARE que monsieur Henry Preston a subi une lésion professionnelle le 22 octobre 1998.

 

 

 

 

 

Manon Gauthier

 

Commissaire

 

 

Laporte et Lavallée

(Me André Laporte)

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 

GCO Santé et sécurité inc.

(M. Gérald Corneau)

 

Représentant de la partie intéressée

 

 

 



[1]           Latreille et 90141672 Québec inc. failli, 31 août 1999 par Me Jean-Pierre Arseneault, président, dossier 90863-62-9708

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