Rivest et Québec (Ministère des Transports) |
2008 QCCLP 917 |
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311816
[1] Le 9 mars 2007, monsieur Marcel Rivest (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 9 février 2007 suite à une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme une décision initialement rendue le 2 novembre 2006. Elle déclare que le travailleur n’a pas subi de récidive, rechute ou aggravation, le 14 juillet 2006, de sa lésion professionnelle. Elle déclare qu’il n’a pas droit aux prestations prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) et qu’elle est bien fondée de lui réclamer la somme de 1 129,60 $ versée du 15 au 28 juillet 2006.
324708
[3] Le 17 juillet 2007, le travailleur dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 11 juillet 2007 suite à une révision administrative.
[4]
Par cette décision, la CSST confirme une décision initialement rendue le
29 mai 2007. Elle déclare qu’elle est justifiée de refuser de réactiver le
versement de l’indemnité de remplacement du revenu selon les dispositions de
l’article
[5] À l’audience tenue le 5 décembre 2007, le travailleur est présent et il est représenté. Le Ministère des Transports du Québec est également représenté. Le dossier est pris en délibéré au jour de l’audience.
L’OBJET DES CONTESTATIONS
[6] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a subi une récidive, rechute ou aggravation, le 14 juillet 2006, de sa lésion professionnelle (dossier 311816-08-0703).
[7]
Il lui demande également de déclarer qu’il ne peut occuper l’emploi
convenable déterminé à compter du 14 juillet 2006 et qu’il a droit au versement
de l’indemnité de remplacement du revenu en vertu des dispositions de l’article
LES FAITS
[8] Le 3 décembre 2004, le travailleur subi un accident du travail au volant d’une camionnette de l’employeur pour qui il agit à titre de chef d’équipe en routes et structures. Arrêté afin d’amorcer un virage à gauche, sa camionnette est heurtée par l’arrière par une autre camionnette.
[9] Le travailleur subit une fracture du corps vertébral de L1 avec antéropulsion de la moitié antérieure de la vertèbre. Le travailleur est hospitalisé du 10 au 24 décembre 2004. Un corset rigide est porté jusqu’en avril 2005 puis changé pour un corset mou. Des traitements d’acupuncture et de physiothérapie sont prescrits par la suite.
[10] Le 2 septembre 2005, le docteur Desnoyers, chirurgien-orthopédiste, examine le travailleur. Il conclut que la lésion professionnelle n’est pas consolidée.
[11] Le docteur Ferland, orthopédiste, examine le travailleur le 16 janvier 2006. Il pose le diagnostic de séquelles douloureuses chroniques post-fracture L1 sans atteinte neurologique. Il consolide la lésion professionnelle au jour de son examen sans autres soins requis sauf un programme d’entraînement pour diminuer son poids.
[12] Il est d’avis qu’un examen radiologique est requis pour évaluer si l’écrasement de la vertèbre est équivalent à plus ou moins 25 %. Le docteur Ferland précise les limitations fonctionnelles suivantes :
- éviter de porter, pousser, soulever des charges de plus de 15 kilos;
- éviter de travailler en position accroupie;
- éviter de ramper ou de grimper;
- éviter d’effectuer des mouvements avec amplitude extrême de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire;
- éviter de subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale.
[13] Le 8 mars 2006, le docteur Dugas, chirurgien-orthopédiste et médecin qui a charge du travailleur, se déclare en accord avec les conclusions du docteur Ferland. Il précise que la perte de hauteur de la vertèbre L1 est équivalente à 31,34 % ce qui génère un déficit anatomo-physiologique de 4 % (code 204031).
[14] Le docteur Barbeau pose le diagnostic de douleur lombaire post-traumatique le 30 mars 2006. Il mentionne que la douleur lombaire persistante est devenue incapacitante. Elle irradie aux membres inférieurs.
[15] Le 4 mai 2006, le docteur Lacoursière, orthopédiste et membre du Bureau d'évaluation médicale, examine le travailleur. Celui-ci se plaint d’une douleur lombaire qui irradie aux deux membres inférieurs. Elle le réveille la nuit. Elle est augmentée par la position assise ou debout prolongée, par la marche de plus de 15 minutes et par les mouvements de flexion, d’extension et de rotation du tronc. Ses activités de la vie quotidienne et domestique sont réduites.
[16] Le docteur Lacoursière rapporte que les réflexes achilléens sont absents. La flexion antérieure est limitée à 800 et elle est douloureuse. L’extension est complète mais douloureuse. Les réflexes rotuliens sont absents en position assise sur le bord de la table. Il existe un œdème à godet important aux membres inférieurs. Le « Straigt leg raising »provoque des douleurs lombaires à partir de 500. Des douleurs sont alléguées à la palpation et à la percussion des apophyses épineuses de D12 à L1.
[17] Le docteur Lacoursière est d’avis que le travailleur demeure avec des douleurs lancinantes chroniques et des signes d’instabilité lombaire clinique importante.
[18] Il pose le diagnostic de fracture de L1. Il consolide la lésion professionnelle au 4 mai 2006 sans autres soins requis. Il confirme le déficit anatomo-physiologique déjà précisé par le docteur Dugas (4 % - code 204031). Il détermine les limitations fonctionnelles suivantes :
- éviter de porter, pousser, tirer ou soulever des charges de plus de 15 kilos;
- éviter de travailler en position accroupie;
- éviter de ramper ou de grimper;
- éviter d’effectuer des mouvements avec amplitudes extrêmes de flexion, d’extension, de torsion de la colonne lombaire;
- éviter de subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale.
- éviter de maintenir des positions statiques debout ou assis pour des périodes dépassant 30 minutes sans devoir changer de position.
[19] Le 26 mai 2006, le docteur Barbeau recommande un retour progressif au travail.
[20] La CSST, le 20 juin 2006, détermine l’emploi convenable de monitoring et chef d’équipe avec un revenu annuel de 41 560 $. Elle considère que le travailleur peut l’occuper à compter du 26 juin 2006.
[21] Ce travail consiste à circuler en camionnette sur les routes du Témiscamingue pour en signaler leur état et les défectuosités à réparer. Ainsi, le travailleur circule sur des routes principales et secondaires avec revêtement de pavé, de pavé économique ou de gravier.
[22] Le travailleur y circule en camionnette F-150 de marque Ford. Celle-ci est munie d’une suspension ordinaire et rigide. Dépendamment de l’état de la chaussée, le travailleur déclare qu’il perçoit souvent des contrecoups.
[23] Il n’a pas contesté la décision relative à l’emploi convenable car un siège ergonomique était fourni. Toutefois, le siège est mal ajusté et le travailleur n’est pas satisfait. Malgré un premier ajustement, le siège est encore trop élevé. Il est également trop étroit compte tenu du gabarit du travailleur. Il sera éventuellement remplacé par le siège original de la camionnette selon le travailleur.
[24] Le travailleur occupe l’emploi convenable du 4 au 17 juillet 2006 à temps plein. S’il est debout, la douleur lombaire augmente mais elle s’endure. Il parcourt environ 150 kilomètres par jour. Il est particulièrement sensible aux contrecoups générés par les roues qui circulent dans des nids de poule d’un seul côté de la camionnette ou dans les longues fissures dans la chaussée.
[25] À la fin de la première semaine de travail, une urgence survient et le travailleur doit effectuer de la signalisation routière debout sur un accotement en pente pendant 2.5 heures alors que le trafic routier est important sur un tronçon de route en réparation.
[26] La condition du travailleur se détériore par la suite. La douleur lombaire s’intensifie et il se sent de plus en plus enraidi. Ses activités de la vie quotidienne sont réduites.
[27] Le 14 juillet 2006, le travailleur est incapable d’accomplir les tâches reliées à l’emploi convenable. Il a peine à se tenir debout et à endurer les vibrations et les contrecoups dans la camionnette.
[28] Le même jour, il consulte le docteur Barbeau. Celui-ci pose le diagnostic d’aggravation de la douleur, séquelle de la fracture L1. Une consultation à la Clinique de la douleur est recommandée. L’arrêt de travail est requis. Le 26 juillet 2006, il ajuste la médication du travailleur pour soulager la douleur exacerbée.
[29] Selon le docteur Nguyen, qui interprète les résultats d’une radiographie lombaire le 30 juillet 2006, il n’y a pas de changement significatif en regard du tassement du corps vertébral de L1.
[30] Des changements dégénératifs discaux sont observés de L1 à S1 par le docteur Sagredo, qui interprète les résultats d’une tomodensitométrie lombaire le 24 août 2006.
[31] Le docteur Barbeau autorise un retour progressif au travail le 26 octobre 2006. Après 11 jours de travail à se promener dans la camionnette, l’état de santé du travailleur se dégrade à nouveau.
[32] Le 30 novembre 2006, le docteur Barbeau prescrit l’arrêt de travail. Il doute de la capacité du travailleur à retourner au travail.
[33] Selon le docteur Blainey, de la Clinique de la douleur, le travailleur présente une douleur lombaire avec irradiation à la jambe gauche le 25 janvier 2007. Il pose également le diagnostic de hernie discale L3-L4 parfois symptomatique.
[34] Le 3 juillet 2007, le docteur Bellemare, chirurgien-orthopédiste, examine le travailleur. Celui-ci se plaint d’une douleur lombaire importante qui irradie aux membres inférieurs.
[35] Le docteur Bellemare, après examen, rapporte que, en station debout, le travailleur doit adopter une certaine position en hyperextension du rachis afin de balancer son poids. Le fait d’avoir une fracture avec une cyphose au niveau de L1 fait augmenter la position de déséquilibre ce qu’il remarque à son examen.
[36] Il considère que le travailleur présente des mouvements relativement normaux au niveau du rachis lombaire. Toutefois, les indices de Schoëber montrent une rigidité du rachis lombaire à la région inférieure. Il existe également une certaine cyphose angulaire lombaire secondaire à la fracture de L1. Quant à l’examen neurologique, il le considère dans les limites de la normale.
[37] Il conclut à une fracture de L1 par écrasement avec comme conditions associées une discopathie dégénérative lombaire et une obésité morbide.
[38] Le docteur Bellemare est d’avis que les traitements de physiothérapie apportent un bénéfice évident. Il considère que la lésion n’est pas consolidée.
[39] Révisant les critères habituellement utilisés pour déterminer de la survenance d’une récidive, rechute ou aggravation d’une lésion professionnelle, le docteur Bellemare conclut que le travailleur présente, le 14 juillet 2006, une lombalgie chronique de type mécanique secondaire à la fracture de L1 subie le 3 décembre 2004.
[40] Cette lombalgie chronique est exacerbée par l’exposition à du millage excessif dans une camionnette avec reprise de la médication, des traitements de physiothérapie et du repos complet.
[41] À l’audience, le docteur Bellemare reprend essentiellement les éléments médicaux au dossier du travailleur. Il conclut que le travailleur a présenté une dégradation rapide de son état de santé avec la reprise du travail à temps plein à compter du 4 juillet 2007.
[42] Les principaux stresseurs ont été le kilométrage journalier important sur des routes plus ou moins entretenues dans une camionnette, l’exposition à des contrecoups malgré un siège ergonomique et le fait de rester debout de façon statique au-delà des limitations fonctionnelles précisées pour effectuer de la signalisation routière lors d’une urgence lors du retour au travail à temps plein.
[43] À son avis, l’emploi convenable dépasse les limitations fonctionnelles compte tenu que le travailleur est exposé à de longs trajets en camionnette quotidiennement et qu’il est faux de prétendre qu’un siège ergonomique élimine l’ensemble des vibrations et des contrecoups dans un véhicule routier.
[44] Le 29 novembre 2007, le docteur Barbeau achemine à la représentante du travailleur un avis motivé. Il explique les motifs de l’incapacité du travailleur à exercer son emploi convenable.
[45] Notamment, il précise que les limitations fonctionnelles retenues pour le travailleur sont incompatibles avec le travail exécuté à temps complet. Il indique que ce travail ne respecte pas le fait d’éviter de subir des vibrations de basse fréquence et des contrecoups à la colonne vertébrale.
[46] Il ajoute de plus que le siège ergonomique n’est pas convenable et que le véhicule n’est équipé que d’une suspension rigide. Or, les routes sur lesquelles doit circuler le travailleur sont cahoteuses, souvent non asphaltées ou gravelées avec de nombreux nids de poule. Il devient évident que l’emploi convenable ne respecte pas les limitations fonctionnelles établies et constitue un danger pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique du travailleur.
[47] Après deux vaines tentatives de retour au travail, il est évident que le travailleur ne peut être exposé aux vibrations et aux contrecoups.
L’AVIS DES MEMBRES
[48] Le membre issu des associations syndicales et le membre issu des associations d'employeurs partagent le même avis. Ils considèrent que le travailleur a été exposé à des stresseurs significatifs lors d’un retour au travail à temps plein du 4 au 17 juillet 2006.
[49] Ainsi, l’exposition à des trajets importants quotidiens, l’état de la chaussée des différentes routes empruntées, les vibrations et les contrecoups dont les effets sont mal compensés par un siège ergonomique mal ajusté et l’obligation de demeurer debout pendant 2.5 heures durant une situation d’urgence, sont des facteurs qui ont contribué à détériorer l’état de santé du travailleur.
[50] La Commission des lésions professionnelles doit déclarer que le travailleur a subi une récidive, rechute ou aggravation, telle que diagnostiquée le 14 juillet 2006, de sa lésion professionnelle.
[51] Les membres sont d’avis également que la preuve factuelle et médicale prépondérante démontre que les exigences de l’emploi convenable dépassent les limitations fonctionnelles précisées pour le travailleur.
[52]
En conséquence, le travailleur ne peut occuper un tel emploi convenable.
Son abandon est justifié. Les dispositions de l’article
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[53]
La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le
travailleur a subi une lésion professionnelle le 14 juillet 2006. Elle doit
aussi déterminer s’il doit bénéficier des dispositions de l’article
[54]
La lésion professionnelle est définie comme suit à l’article
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;
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1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1.
[55] Les notions de récidive, rechute ou aggravation ne sont pas définies à la loi. Suivant les définitions courantes, il peut s’agir d’une réapparition, d’une recrudescence ou d’une aggravation de la lésion survenue lors de l’événement initial.
[56] Il appartient au travailleur de démontrer, par une preuve médicale prépondérante, la relation qui existe entre la récidive, rechute ou aggravation alléguée et la lésion professionnelle diagnostiquée suite à l’événement initial.
[57] Dans l’affaire Boisvert et Halco[2], plusieurs paramètres sont utilisés pour déterminer l’existence d’une relation entre la récidive, rechute ou aggravation et la lésion professionnelle diagnostiquée suite à la survenance de l’événement d’origine. On retient ainsi la gravité de la lésion initiale, la continuité de la symptomatologie, l’existence ou non d’un suivi médical, le retour au travail avec ou sans limitations fonctionnelles, la présence ou l’absence d’une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique, la présence ou l’absence d’une condition personnelle, la concordance de la symptomatologie alléguée au moment de la récidive, rechute ou aggravation et la lésion initiale.
[58] Il est important de retenir qu’aucun des paramètres n’est décisif par lui-même. Toutefois, pris ensemble, ces paramètres permettent de déterminer le bien-fondé d’une réclamation.
[59] La Commission des lésions professionnelles considère que l’événement survenu le 3 décembre 2004 n’est pas bénin. Le travailleur subit une fracture de la vertèbre L1. Il en conserve des séquelles douloureuses lancinantes chroniques et une instabilité lombaire. Un déficit anatomo-physiologique équivalent à 4 % et des limitations fonctionnelles importantes sont déterminées par le membre du Bureau d'évaluation médicale.
[60] D’ailleurs, ce dernier consolide la lésion professionnelle au 4 mai 2006. Un plan individualisé de réadaptation, mis en œuvre rapidement, conduit à la détermination d’un emploi convenable dès le 20 juin 2006.
[61] Entretemps, le travailleur est suivi médicalement pour une douleur lombaire persistante qui irradie aux membres inférieurs. Malgré que le médecin qui a charge recommande un retour progressif au travail, le travailleur doit reprendre un travail à temps plein du 4 au 17 juillet 2006.
[62] Le travailleur, dans le cadre des activités de son emploi convenable, doit circuler en camionnette sur différentes routes du Témiscamingue dont la chaussée est en pavé ordinaire, en pavé économique ou en gravier.
[63] Malgré l’installation d’un siège ergonomique, qui est mal ajusté compte tenu du gabarit du travailleur, celui-ci est exposé à des vibrations et à des contrecoups. Selon le docteur Bellemare, un tel siège n’élimine pas complètement les vibrations qui émanent de la camionnette. D’après le témoignage non contredit du travailleur, il est exposé à des contrecoups particulièrement lorsque les roues viennent en contact avec des nids de poule ou des fissures dans le pavé. Les contrecoups générés par le passage, d’un seul côté, des roues dans ces anomalies de la chassée sont les plus sévères et dommageables pour l’état de santé du travailleur.
[64] De plus, vers la fin de la première semaine, le travailleur doit assurer la signalisation routière sur un tronçon de route en réparation. Il demeure debout pendant 2.5 heures sur un accotement en pente pour diriger le trafic important.
[65] Le docteur Barbeau pose le diagnostic d’aggravation de la douleur persistante lombaire qui résulte de l’accident du travail survenu le 3 décembre 2004. Il réfère le travailleur à la Clinique de la douleur, prescrit un arrêt du travail et ajuste la médication pour soulager la douleur.
[66] Même si les examens paracliniques, dont les résultats sont interprétés par des spécialistes, ne montrent pas de détérioration de la fracture à la vertèbre L1, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’état de santé du travailleur est aggravé.
[67] En effet, le travailleur est exposé, sur une courte période, à des agents stresseurs, dont certains dépassent les limitations fonctionnelles précisées pour lui, qui exacerbent sa douleur lombaire chronique. Or, selon son médecin qui a charge, l’état de santé du travailleur requiert le repos complet, un suivi spécifique à la Clinique de la douleur et un ajustement de sa médication.
[68] L’ensemble de ces éléments milite en faveur de la reconnaissance d’une détérioration de l’état de santé du travailleur, celle d’une douleur lombaire persistante post-traumatique reliée à la fracture de la vertèbre L1.
[69] Le tribunal conclut donc que le travailleur a démontré par une preuve médicale et factuelle prépondérante que les éléments habituellement retenus pour déterminer de la survenance d’une récidive, rechute ou aggravation d’une lésion professionnelle sont présents en nombre suffisant.
[70] La Commission des lésions professionnelles conclut donc que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 14 juillet 2006 et qu’il a droit aux prestations prévues à la loi.
[71]
L’article
51. Le travailleur qui occupe à plein temps un emploi convenable et qui, dans les deux ans suivant la date où il a commencé à l'exercer, doit abandonner cet emploi selon l'avis du médecin qui en a charge récupère son droit à l'indemnité de remplacement du revenu prévue par l'article 45 et aux autres prestations prévues par la présente loi.
Le premier alinéa ne s'applique que si le médecin qui a charge du travailleur est d'avis que celui-ci n'est pas raisonnablement en mesure d'occuper cet emploi convenable ou que cet emploi convenable comporte un danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur.
__________
1985, c. 6, a. 51.
[72] Pour bénéficier des dispositions de cet article, la Commission des lésions professionnelles considère que le travailleur doit produire un avis du médecin qui permet d’apprécier raisonnablement le respect des critères établis à cet article. Il doit donc s’agir d’un véritable avis médical motivé sur la base notamment des antécédents médicaux, des limitations fonctionnelles précisées pour le travailleur, des tâches et exigences physiques de l’emploi en cause.[3]
[73] Dans un avis acheminé à la représentante du travailleur le 29 novembre 2007, le médecin qui a charge du travailleur explique notamment que les exigences de l’emploi convenable sont incompatibles avec les limitations fonctionnelles précisées pour le travailleur.
[74] Il apparaît que cet avis respecte les critères retenus dans la décision citée dans les paragraphes précédents. En effet, le docteur Barbeau, médecin qui a charge du travailleur, motive son opinion en référant aux antécédents médicaux, en comparant les limitations fonctionnelles précisées pour le travailleur aux tâches à effectuer dans le cadre de l’emploi convenable et aux conditions dans lesquelles ces tâches sont exercées. C’est ainsi qu’il en arrive à la conclusion que les limitations fonctionnelles retenues pour le travailleur sont incompatibles avec l’emploi convenable déterminé par la CSST.
[75] Après deux vaines tentatives de retour au travail, le docteur Barbeau en vient à l’évidence que la moindre exposition aux vibrations et aux contrecoups est non envisageable et doit être évitée.
[76] Le tribunal considère que l’avis du docteur Barbeau est suffisamment clair et permet de conclure que le travailleur n’est pas en mesure d’occuper l’emploi convenable car cet emploi comporte un danger pour sa santé.
[77] La Commission des lésions professionnelles est d’avis que le travailleur a démontré que les critères énoncés à l’article 51 sont présents. Il doit donc récupérer son droit à l’indemnité de remplacement du revenu.
[78]
Cependant, puisque le rapport du docteur Barbeau est daté du 29 novembre
2007, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur ne
peut bénéficier des dispositions de l’article
[79] La Commission des lésions professionnelles tient à souligner qu’il est dans l’intérêt du travailleur de collaborer avec la CSST dans l’élaboration d’un nouveau plan de réadaptation.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
311816
ACCUEILLE la requête de monsieur Marcel Rivest déposée le 9 mars 2007;
INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 9 février 2007 suite à une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 14 juillet 2006;
DÉCLARE qu’il a droit aux bénéfices de la loi.
324078
ACCUEILLE la requête du travailleur déposée le 17 juillet 2007;
INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 11 juillet 2007 suite à une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur récupère son droit à
l’indemnité de remplacement du revenu, en vertu des dispositions de l’article
RETOURNE le dossier à la CSST pour l’élaboration d’un nouveau plan de réadaptation qui tient compte des limitations fonctionnelles précisées pour le travailleur.
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Me Pierre Prégent |
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Commissaire |
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Me Stéphanie Gagné |
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GRONDIN, POUDRIER, BERNIER |
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Représentante de la partie requérante |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.