Décision

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Caron-Cantin c. Nadeau

2022 QCCS 2712

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

 

 

 

 :

200-17-033131-228

 

 

 

DATE :

 2 mars 2022

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

ALAIN MICHAUD, j.c.s.

______________________________________________________________________

 

 

PASCAL-HUGO CARON-CANTIN

et

9400-3415 QUÉBEC INC.

Demandeurs

c.

JESSIE NADEAU

Défenderesse

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

sur demande en moyen déclinatoire

(art. 167 et 42 (2) C.p.c.)

______________________________________________________________________

 

[1]                VU la demande introductive signifiée par les demandeurs le 11 janvier 2022, soutenant que la défenderesse ait tenu des propos diffamatoires visant le demandeur Pascal-Hugo Caron-Cantin [PH], en affirmant que celui-ci se serait rendu coupable de violence conjugale à l’époque où ils formaient un couple[1];

[2]                ATTENDU que la défenderesse requiert que ce litige soit renvoyé dans le district judiciaire de Montréal, lieu de son domicile[2], et lieu où seraient survenus – selon elle – le fait générateur du préjudice et le préjudice subi par les demandeurs (selon 42 (2) C.p.c.)[3];

[3]                ATTENDU que le Tribunal doit ici, selon les enseignements de la jurisprudence, tenir pour avérés les faits pertinents de la demande et la preuve qui lui est soumise par déclaration sous serment, aux fins du traitement du moyen déclinatoire[4];

[4]                CONSIDÉRANT que les allégations du paragraphe 87 de la demande soutiennent que « les propos véhiculés par la Défenderesse ont dans leur ensemble déconsidéré la réputation que les Demandeurs s’étaient taillée, et ce, particulièrement dans le district judiciaire de Québec où résident de nombreux membres de la famille, amis, commanditaires et collaborateurs du Demandeur PH »;

[5]                CONSIDÉRANT que ces allégations, à tenir pour avérées, sont au surplus détaillées aux paragraphes 13 à 23 de la déclaration sous serment du 9 février 2022 du demandeur PH, qui fait entre autres état des explications qu’il a dû donner et des problèmes qu’il a subis, à Québec, à la suite et en raison des propos de la défenderesse;

[6]                CONSIDÉRANT que ces allégations de la demande et de la déclaration sous serment consacrent à l’évidence le droit du demandeur PH d’introduire sa demande dans le district judiciaire de Québec, puisqu’il s’agit de la juridiction « de l’un des lieux où le préjudice a été subi »[5];

[7]                CONSIDÉRANT que cette règle, introduite au nouveau Code de procédure civile, marque une rupture avec les dispositions du code antérieur et s’inspire entre autres « de la faveur donnée à la victime lorsque le préjudice se manifeste à plusieurs endroits, ce qui sera souvent le cas en matière de diffamation »[6];

[8]                CONSIDÉRANT que le test en deux étapes proposé par l’avocate de la défenderesse, à l’égard de ce questionnement, n’existe dans aucune décision récente de nos tribunaux[7], le demandeur ayant le choix d’entreprendre son recours dans l’un des lieux prévus au paragraphe 42 (2) C.p.c., entre autres possibilités;

[9]                CONSIDÉRANT que le juge Louis Rochette, examinant les deux options du paragraphe 42 (2) C.p.c. dans l’arrêt Boulanger, a déterminé en cette instance qu’il n’a pas été établi que le fait générateur du préjudice (la faute) soit survenu dans le district judiciaire de Québec, en même temps qu’il reconnaissait que le préjudice avait été subi dans cette juridiction[8];

[10]           CONSIDÉRANT que, de l’avis du Tribunal, ce moyen préliminaire n’aurait pas dû être soumis à la Cour supérieure – surtout pas après la communication de la déclaration sous serment du demandeur – et que la défenderesse serait mieux inspirée pour l’avenir d’être davantage sélective dans le choix de ses combats, pour ne pas s’exposer au paiement éventuel de compensations en vertu de l’article 342 C.p.c.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[11]           REJETTE la demande de moyen déclinatoire présentée par la défenderesse;

[12]           AVEC FRAIS de justice contre la défenderesse.

 

 

 

 

 

__________________________________

ALAIN MICHAUD, j.c.s.

 

 

Me Élodie Drolet-French

Jean-François Bertrand Avocats inc.

1394, avenue Maguire, bureau 200

Québec (Québec) G1T 1Z3

Pour les demandeurs

 

Me Imane Melab

Arsenault Dufresne Wee Avocats

3565, rue Berri, bureau 240

Montréal (Québec) H2L 4G3

Pour la défenderesse

 

 

Date d’audience :

 17 février 2022

 


[1]  Selon la publication Instagram P-11.

[2]  Dénonciation du moyen déclinatoire, paragr. 2.

[3]  Id., paragr. 3.

[4]  Corporation Capital Kilkenny c. IOS Services géoscientifiques inc., 2013 QCCA 1354, paragr. 8.

[5]  Tel qu’il appert de la simple lecture du paragraphe 42 (2) C.p.c., et sans nul besoin de référer à la jurisprudence rendue sur le sujet.

[6]  Selon les Commentaires de la ministre de la Justice, repris par le juge Jocelyn-F. Rancourt dans Bergeron c. Écomaris, 2016 QCCS 546, paragr. 29.

[7] S’agissant simplement, pour le Tribunal, de vérifier si la juridiction choisie constitue l’un des lieux où le préjudice s’est manifesté.

[8]  Groupe TVA inc. c. Boulanger, 2020 QCCA 1575, paragr. 50 et 51.

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