Décision

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Gabarit EDJ

Champagne c. Groupe Dagenais MDC inc.

2014 QCCQ 3450

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

LAVAL

LOCALITÉ DE

LAVAL

« Chambre civile »

N° :

540-32-025720-135

 

 

 

DATE :

Le 24 avril 2014

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

BENOIT SABOURIN, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

Louise-Marie CHAMPAGNE

Demanderesse

c.

GROUPE DAGENAIS M.D.C. INC.

Défenderesse

 

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

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[1]           Louise-Marie Champagne réclame 4 972,82$ à Groupe Dagenais M.D.C. inc. (ci-après nommée « Dagenais »). Elle prétend que l'une des dix chaises achetées de Dagenais et le pouf ottoman acquis quelques mois plus tard se sont usés prématurément. Elle ajoute que contrairement aux représentations faites par Dagenais, les meubles vendus par Dagenais ne sont pas en cuir véritable. La somme réclamée équivaut au remboursement intégral du prix payé pour ces meubles.

[2]           Dagenais conteste la demande. Elle prétend que la garantie conventionnelle est expirée depuis plus de sept ans. Elle ajoute que les représentations faites lors de la vente à l'effet que les meubles étaient en cuir étaient conformes aux normes de l'époque.

QUESTION EN LITIGE

Louise-Marie Champagne a-t-elle droit au remboursement intégral du prix payé pour les dix chaises en cuir et le pouf ottoman en 2004 et 2005 ?

CONTEXTE

[3]           Le 24 octobre 2004, Louise-Marie Champagne achète huit chaises en cuir sans bras chez Dagenais au prix de 359 $ chacune avant taxes et deux chaises en cuir avec bras au prix de 439 $ chacune avant taxes. Ces meubles sont destinés à être placés dans la salle à manger de sa résidence. Le 18 mars 2005, elle achète au même endroit un pouf ottoman en cuir qu'elle paie 535 $ avant taxes.

[4]           Au cours du printemps 2012, Louise-Marie Champagne constate que le revêtement de cuir de l'une des chaises est fendillé. Quelques semaines plus tard, elle constate que le revêtement de cuir du pouf ottoman présente les mêmes symptômes.

[5]           Elle précise que ces chaises ont été peu utilisées depuis leur acquisition. En effet, elles sont situées dans la salle à manger qui est rarement occupée.

[6]           Le 14 mai 2012, soit quelques jours après la découverte du fendillement du revêtement de cuir des meubles, Louise-Marie Champagne communique avec Dagenais. Elle discute brièvement avec Domenica Gioia. Cette dernière demande à Louise-Marie Champagne de lui transmettre des photographies montrant le fendillement du revêtement de cuir. Les photographies sont transmises à Mme Gioia par courriel.

[7]           Comme elle est sans nouvelle de Mme Gioia, Louise-Marie Champagne prend rendez-vous avec cette dernière en lui confirmant qu'elle apportera la chaise dont le revêtement est fendillé.

[8]           La rencontre a lieu à la succursale de Dagenais située à Laval. Mme Gioia prend elle-même des photographies du revêtement de cuir fendillé en précisant que Dagenais prendra position au cours des prochains jours.

[9]           Louise-Marie Champagne ne reçoit aucune nouvelle de Dagenais par la suite. Elle communique avec Dagenais le 24 août 2012 et discute avec Christian Paquette qui est en charge des réclamations. Ce dernier réitère que Dagenais prendra position prochainement. Dagenais ne fait aucun suivi par la suite.

[10]        Le 8 octobre 2012, Louise-Marie Champagne transmet une mise en demeure à Dagenais dans laquelle elle lui réclame la somme de 4 972,82$, soit le remboursement intégral des dix chaises et du pouf ottoman.

[11]        À l'audience, elle explique qu'elle a obtenu l'opinion d'un couvreur, M. Désormeaux qui travaille chez Bélair Décoration à Ste-Adèle. Ce dernier a rédigé une lettre datée du 20 novembre 2012, dans laquelle il confirme que les meubles ne sont pas recouverts de cuir véritable. Il estime que la composition du revêtement de ces meubles est composée de 37% de polyuréthane, de 25% de polyester, de 24% de cuir et de 14% de coton.

[12]        À l'audience, le représentant de Dagenais admet que les meubles vendus ne sont pas recouverts de cuir véritable. À l'époque où les meubles ont été vendus, il était généralement reconnu que les meubles recouverts d'un cuir recyclé, fabriqués pour la plupart en Chine, pouvaient être vendus comme étant recouverts de cuir. Les commerçants de meubles, incluant Dagenais, vendent maintenant ces meubles en identifiant qu'il s'agit de cuir recyclé ou bycast.

[13]        Selon lui, la vente a été faite en respectant les normes de l'époque. De plus, les biens sont utilisés par Louise-Marie Champagne depuis plus de neuf ans. Le fendillement est lié à de l'usure normale ou encore à un manque d'entretien.

[14]        Louise-Marie Champagne estime être victime de fausses représentations par Dagenais. Elle demande le remboursement intégral des meubles qu'elle a achetés en 2004 et 2005. Elle offre de remettre tous les meubles qu'elle a achetés à Dagenais en échange du remboursement.

ANALYSE ET DÉCISION

Louise-Marie Champagne a-t-elle droit au remboursement intégral du prix payé pour les dix chaises en cuir et le pouf ottoman en 2004 et 2005 ?

[15]        Le contrat conclu entre les parties est régi par la Loi sur la protection du consommateur.

[16]        Les articles 38, 40 et 272 de la Loi sur la protection du consommateur s'appliquent au présent litige. Il convient de citer ces dispositions :

« 38. Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation du bien.

40. Un bien ou un service fourni doit être conforme à la description qui en est faite dans le contrat.

272. Si le commerçant ou le fabricant manque à une obligation que lui impose la présente loi, un règlement ou un engagement volontaire souscrit en vertu de l'article 314 ou dont l'application a été étendue par un décret pris en vertu de l'article 315.1, le consommateur, sous réserve des autres recours prévus par la présente loi, peut demander, selon le cas:

a) l'exécution de l'obligation;

b) l'autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;

c) la réduction de son obligation;

d) la résiliation du contrat;

e) la résolution du contrat; ou

f) la nullité du contrat,

sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs. »

[17]        En vertu des articles ci-avant cités, les biens vendus par un commerçant doivent être conformes à la description qui en est faite dans le contrat. De plus, le bien doit pouvoir servir à un usage normal durant une durée raisonnable, et ce, eu égard au prix et aux conditions d'utilisation du bien.

[18]        Le Tribunal retient de la preuve entendue que les meubles acquis par Louise-Marie Champagne ont été peu utilisés depuis leur achat en 2004 et 2005. Le Tribunal retient aussi que les meubles vendus ne sont pas en cuir véritable, et ce, contrairement aux indications retrouvées sur la facture d'achat de ces biens. Le fendillement est une conséquence directe du fait que le revêtement des meubles n'est pas en cuir véritable, mais bien en cuir recyclé.

[19]        Le Tribunal conclut que le contrat de vente conclu entre les parties ne respecte pas l'article 40 de la Loi sur la protection du consommateur en ce que les meubles ne sont pas recouverts de cuir, tel qu'indiqué sur la facture. De plus, le Tribunal estime que le fendillement est prématuré, et ce, dans le contexte où Louise-Marie Champagne croyait avoir acquis des meubles recouverts de cuir véritable qui est plus durable et ne fendille pas.

[20]        En conséquence, Louise-Marie Champagne a droit à l'un des remèdes prévus à l'article 272 de la Loi sur la protection du consommateur.

[21]        Dans sa décision, le Tribunal doit tenir compte du fait que les biens ont été utilisés sans que ne se manifeste le fendillement du revêtement de cuir entre 2004 et 2012.

[22]        En conséquence, la résolution de la vente et le remboursement intégral ne peuvent être accordés, car cela ne tiendrait pas compte du fait que Louise-Marie Champagne a utilisé ces biens pendant plus de neuf ans en date de l'audience.

[23]        D'autre part, le Tribunal considère que les représentations inexactes faites par Dagenais justifient une réduction de l'obligation de Louise-Marie Champagne à son égard, et ce, conformément à l'article 272 c) de la Loi sur la protection du consommateur.

[24]        Usant de la discrétion judiciaire dont il dispose, le Tribunal estime que l'obligation de Louise-Marie Champagne envers Dagenais doit être réduite d'un montant équivalant à 30% du prix total des biens vendus, soit 1 491,85$, montant que le Tribunal arrondit à 1 500 $.

[25]        Cette réduction vise à fixer le prix de vente des biens vendus de façon à tenir compte du fait qu'ils ne sont pas recouverts de cuir véritable.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE la demande en partie.

CONDAMNE la défenderesse, Groupe Dagenais M.D.C. inc., à payer à la demanderesse la somme de 1 500 $ avec les intérêts au taux de 5% l'an ainsi que l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec à compter du 10 octobre 2012, date de réception de la mise en demeure P-4, plus les frais de la demande au montant de 136 $.

 

 

__________________________________

BENOIT SABOURIN, j.c.q.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Date d’audience :

Le 14 avril 2014

 

AVIS :
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