Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Lanaudière

JOLIETTE, 9 avril 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIERS CLP :

132610-63-0002

133562-63-0003

135640-63-0003

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Jean-Marc Charette

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIERS CSST :

063253900-1

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Lorraine Patenaude

 

063253900-2

 

Associations d’employeurs

 

063253900-3

 

 

 

063253900-4

 

Gérald Dion

 

063253900-5

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DE L'ASSESSEUR :

Dr Louis Montambault

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDIENCE TENUE LE :

17 novembre 2000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

JOLIETTE

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JEAN-LUC RONDEAU

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

INDUSTRIES ABEX LIMITÉE (FERMÉE)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA

SÉCURITÉ DU TRAVAIL - LANAUDIÈRE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

DOSSIER 132610-63-0002 

 

[1]               Le 28 février 2000, monsieur Jean-Luc Rondeau (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue 2 février 2000 à la suite d’une révision administrative (R-063253900-4).

[2]               Par cette décision, la CSST modifie la décision rendue le 7 mai 1999 suite à l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale du 28 avril 1999 portant sur l’atteinte permanente et établit, qu’en relation avec la rechute, récidive ou aggravation du 21 novembre 1996, le pourcentage d’atteinte permanente est établi à 3,3 %, ce qui donne droit à une indemnité pour dommages corporels évaluée à 1 630,17 $.

DOSSIER 133562-63-0003

[3]               Le 13 mars 2000, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 1er mars 2000 à la suite d’une révision administrative (R-063253900-1).

[4]               Par cette décision, la CSST confirme la décision rendue le 29 mars 1999 et déclare que le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable déjà déterminé de commis de bureau à compter du 26 mars 1999.

DOSSIER 135640-63-0003

[5]               Le 13 mars 2000, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 1er mars 2000 à la suite d’une révision administrative.

[6]               Par cette décision, la CSST confirme les décisions rendues le 6 mai 1999, le 9 juin 1999 ainsi que le 26 octobre 1999 et refuse de rembourser les frais engagés pour le débroussaillage des fossés (R-063253900-2), le déneigement du domicile (R-063253900-5) ainsi que la peinture du domicile (R-063253900-3).

[7]               Une audience est tenue à Joliette le 17 novembre 2000, en présence de monsieur Jean-Luc Rondeau, de son procureur ainsi que du procureur de la CSST.

 

L'OBJET DE LA CONTESTATION

[8]               Le travailleur demande de reconnaître que le pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique en relation avec l’aggravation survenue le 21 novembre 1996 doit être établi en tenant compte d’un déficit anatomo-physiologique de 5 % auquel s’ajoute un pourcentage pour douleurs et perte de jouissance de la vie (DPJV).

[9]               Le travailleur demande également de reconnaître qu’il n’est pas en mesure d’occuper l’emploi convenable de commis de bureau.

[10]           Le travailleur demande finalement de reconnaître qu’il a droit au remboursement des frais encourus pour les travaux d’entretien en cause.

 

LES FAITS

[11]           Au moment de la lésion d’origine, monsieur Jean-Luc Rondeau occupe l’emploi de conducteur de chariots-élévateurs au service de « Industries Abex ltée ».

[12]           Le 21 mai 1977 (CSST 063253900), le travailleur subit une hyper-extension du poignet gauche en raison d’un mouvement brusque du volant, le chariot-élévateur ayant heurté un obstacle.

[13]           A l’origine, monsieur Rondeau est traité pour une ténosynovite au poignet, au pouce et au majeur de la main gauche.

[14]           Le 14 mars 1978, le docteur G. Thiffault procède à une décompression chirurgicale du nerf médian au niveau du tunnel carpien gauche.

[15]           Le 22 novembre 1978, le docteur Desjardins procède à une neurolyse du nerf médian gauche avec nouvelle décompression au niveau du ligament annulaire.

 

[16]           Monsieur Rondeau reprend le travail chez son employeur à compter du 25 février 1980.

[17]           Dans un rapport d’expertise effectué par le docteur Robert St-Hilaire à la suite d’un examen fait le 10 avril 1981, le déficit anatomo-physiologique (DAP) est évalué à 5 % en relation avec les séquelles de la lésion à la main gauche.  Le pourcentage d’incapacité partielle permanente (IPP) est établi par la CSST à 5 %, celle-ci ne reconnaissant aucun pourcentage d’inaptitude à reprendre le travail (IRT), considérant que monsieur Rondeau aurait repris le même travail, chez le même employeur.

[18]           Le 2 juillet 1993, monsieur Rondeau subit une nouvelle lésion professionnelle, soit une fracture de l’index droit (CSST 105650493).

[19]           La lésion nécessite une réduction ouverte avec immobilisation.  Le travailleur présente cependant par la suite une ankylose de son index ainsi qu’une ténosynovite sténosante secondaire à la fracture ouverte, de sorte que le docteur Sylvie Cangé procède, en date du 16 novembre 1993, à une ténolyse de l’extenseur, à une arthrolyse de l’interphalangienne proximale et à une ténosynovotomie des fléchisseurs de l’index droit

[20]           Le docteur S. Cangé consolide la lésion en date du 3 juin 1995 et procède à l’évaluation des séquelles dans son rapport daté du 27 octobre 1995 ainsi que dans un rapport corrigé en date du 16 février 1996.

[21]           Relativement aux séquelles gênant le travailleur à son travail, le docteur S. Cangé note que les séquelles douloureuses que garde monsieur Rondeau au niveau de la paume du deuxième rayon de sa main droite et l’état inflammatoire de sa main opérée à plusieurs reprises lui laisse une perte de force, un manque de tolérance à l’effort ainsi que des douleurs l’empêchant d’occuper un travail manuel avec efforts.  Elle ajoute que des activités de précision nécessitant une bonne stabilité pourront également poser un problème étant donné la perte de la pince tridigitale.  Une réorientation professionnelle déjà amorcée et un transfert de dominance sont jugés nécessaires.

[22]           En ce qui concerne le déficit anatomo-physiologique (DAP) à retenir en relation avec la lésion professionnelle subie le 2 juillet 1993, le docteur Cangé l’établit ainsi, en tenant compte des séquelles d’une lésion antérieure subie à l’index droit en 1973 ainsi que les séquelles de la lésion professionnelle survenue le 21 mai 1977 au niveau du poignet gauche.

 

 

Séquelles antérieures :

 

Ténosynovite sténosante index droit selon l’expertise du docteur Léveillé (nov. 74), actualisé selon le barême actuel                                      102383                       2 %

 

Bilatéralité (Tunnel carpien gauche selon l’expertise du docteur Duchesne (mars 80), cicatrice douloureuse et Tinel positif (déjà indemnisé)    1005261                     1 %

 

 

Séquelles actuelles :

 

Amputation P3 D2                                                                  100633                       2 %

Amputation P2 D2                                                                  100642                       2 %

Ténosynovite sténosante index droit                                        102383                       2 %

Tunnel carpien droit                                                                100526                       1 %

Neurolyse du cubital                                                               100401                       0 %

Bilatéralité                                                                              100526                       1 %

 

DAP actuel 8 % - DAP antérieur 2 %   =   6 %

Aggravation due au dernier événement

 

 

Ajout à l’évaluation de monsieur Jean-Luc Rondeau

 

Préjudice esthétique d’amputation :

 

-- de P3                                                                                 224466                       0,5 %

-- de P2                                                                                 224466                       0,5 %

-- de P1 partielle                                                                    224466                       0,5 %

 

TOTAL :                                                                                                                   1,5 %

 

 

 

[23]           À partir de ce rapport d’évaluation des séquelles produit par le docteur S. Cangé, la CSST établit, dans une décision rendue le 15 mars 1996, à 7,5 % le pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique en relation avec la lésion professionnelle survenue le 2 juillet 1993, soit 6,5 % de déficit anatomo-physiologique (DAP) auquel s’ajoute un pourcentage de 1 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie (DPJV).

[24]           À compter de la date de consolidation de la lésion, soit à compter du mois de juin 1995, la CSST entreprend, en collaboration avec le travailleur, une démarche de réorientation professionnelle.  Suite à une démarche d’orientation auprès de madame Pierrette Laporte-Lafortune, conseillère en orientation, les emplois de commis de bureau et de téléphoniste-réceptionniste sont identifiés comme étant des emplois qui rencontrent les intérêts généraux du travailleur, ses aptitudes, ses traits de personnalité et respectent ses limitations physiques.

 

[25]           Un plan de formation de commis de bureau est mis sur pied en collaboration avec un service de formation spécialisé, Service d’Adaptation de Main-d’œuvre (SAMO).  Le plan de formation prévoit différents cours dans le domaine de l’informatique, de la tenue de livres et de la comptabilité en plus de stages de formation.  Le déroulement de la formation est prévu du 18 septembre 1995 au 19 janvier 1996.

[26]           Le 22 novembre 1995, monsieur Rondeau subit cependant une rechute, une récidive ou une aggravation de la lésion professionnelle reconnue à l’origine en date du 21 mai 1977, soit un canal carpien gauche récidivant pour lequel il subit une nouvelle décompression le 29 novembre 1995, ainsi qu’une neurolyse du nerf médian le 31 janvier 1996.

[27]           Le docteur S. Cangé consolide la lésion en date du 20 avril 1996.  Dans son rapport d’évaluation médicale produit le 23 mai 1996, le docteur S. Cangé note, en ce qui a trait aux séquelles gênant le travailleur à son travail, que celui-ci est apte à reprendre ses cours de formation tout en constatant que sa tolérance à l’effort est diminuée par rapport à son état antérieur.  Il ajoute que, comme le travailleur doit utiliser un clavier d’ordinateur, ses avants-bras devront être supportés lors de l’utilisation du clavier et il devra faire des pauses fréquentes puisque les mouvements de flexion-extension des doigts causent encore une douleur à l’avant-bras qui limite sa tolérance à la répétition et à l’effort.  Elle rappelle que le travail manuel forçant ou répétitif est contre-indiqué chez ce patient.

[28]           Le docteur S. Cangé établit ainsi les séquelles de l’aggravation reconnue en date du 22 novembre 1995 :

Séquelles actuelles :

 

Syndrome du canal carpien gauche opéré avec

EMG positif                                                                            100526                       1 %

 

Névrome du nerf médian au tiers distal de l’avant-bras gauche status post-neurolyse avec les hypoesthésies digitales de classe 2                             113059                       5 %

 

 

Séquelles antérieures :

 

Tunnel carpien gauche                                                 100526                       1 %

 

Pour fin de bilatéralité seulement (droite) :

 

Amputation P3 D2                                                                  100633                       2 %

Amputation P2 D2                                                                  100462                       2 %

Ténosynovite index droit                                                         102383                       2 %

Tunnel carpien droit                                                                100526                       1 %

 

 

Bilatéralité :

                                                                                              100526                       1 %

                                                                                              113059                       5 %

moins (déjà compensé)                                                           100526                       (1 %)

À compenser                                                                                                             5 %

Aggravation à compenser                                                                                           5 %

D.A.P. Total à compenser                   10 % plus le DPJV

 

[29]           Suite à cet examen, la CSST reconnaît, dans une décision rendue le 8 juillet 1996, un pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité et psychique (APIPP) établi à 12,20 % en raison d’un déficit anatomo-physiologique (DAP) évalué à 10 % et à un pourcentage de 2,20 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie (DPJV).

[30]           Le 30 avril 1996, la CSST informe le travailleur que la formation professionnelle entreprise à l’automne 1995 dans le but de le rendre apte à occuper l’emploi convenable de commis de bureau reprend et se poursuit jusque vers le mois de juin 1996.  Cette orientation tient compte des séquelles des lésions professionnelles reconnues dans les deux dossiers.

[31]           Dans une décision rendue le 23 septembre 1996, la CSST détermine que, suite aux mesures de réadaptation prises, le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable de commis de bureau à compter du 23 septembre 1996, que le revenu estimé de cet emploi est établi à 20 000 $ et que le travailleur a droit à une indemnité de remplacement du revenu pendant une période d’un an.  Cette décision n’est pas contestée.

[32]           Monsieur Rondeau soumet une réclamation pour rechute, récidive ou aggravation en date du 21 novembre 1996, en relation avec la lésion professionnelle survenue le 21 mai 1977.  Le diagnostic est alors celui de névropathie cubitale au coude gauche.

[33]           Le 12 mars 1997, le docteur S. Cangé procède à une neurolyse et épitrochléectomie au niveau du nerf cubital gauche.

[34]           Le 14 mai 1997, la CSST refuse de reconnaître une aggravation survenue le 21 novembre 1996 en relation avec la lésion professionnelle reconnue le 21 mai 1977.

 

 

[35]           Dans une décision rendue le 12 février 1998, le Bureau de révision[1] infirme cependant la décision rendue par la CSST et reconnaît que le travailleur a subi une rechute, une récidive ou une aggravation le 21 novembre 1996 en relation avec la lésion professionnelle d’origine reconnue en date du 21 mai 1977.

[36]           Le docteur S. Cangé consolide la lésion en date du 24 novembre 1998 et prévoit une atteinte permanente ainsi que des limitations fonctionnelles en relation avec la rechute, la récidive ou l’aggravation reconnue en date du 21 novembre 1996.

[37]           Dans son rapport du 2 septembre 1998, madame Martine Laborde, ergothérapeute, produit une évaluation des capacités de travail de monsieur Rondeau.  Madame Laborde conclut que le travailleur n’est pas en mesure d’effectuer un travail sous cadence imposée, un travail bi-manuel au-dessus du niveau des épaules et un travail nécessitant la manutention de poids de plus de 14 livres des deux mains.  Elle note de plus que le travailleur a peu de tolérance lors des activités répétitives et de précision.  Elle ajoute cependant que le travailleur est en mesure d’occuper un emploi à temps complet qui respecte les limitations, à titre d’exemple, un travail de type sédentaire, tel que commis de bureau (sans entrée de données), opérateur de centrale de système d’alarme, de préposé à la billetterie ou au stationnement.

[38]           Dans le cadre de la démarche de réadaptation, monsieur Rondeau est dirigé au Centre d’Évaluation et d’Entraînement au Travail Rive-Nord. 

[39]           À la demande de la CSST, le docteur Claude Proulx produit un rapport d’évaluation médicale en date du 1er décembre 1998.  En relation avec la récidive du 21 novembre 1996, le docteur Proulx émet l’avis que le travailleur ne présente pas d’augmentation du pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique selon le barème des dommages corporels, ni de limitations fonctionnelles autres que celles formulées auparavant.  Conformément à l’évaluation des capacités de travail établies par l’ergothérapeute, madame Martine Laborde, le docteur Proulx convient que le travailleur n’est pas capable d’effectuer un travail manuel soutenu et physiquement forçant mais qu’il peut occuper un travail à temps complet qui ne nécessite pas d’efforts soutenus.  Il note par ailleurs que le travailleur ne présente aucune motivation pour un retour au travail.

 

 

[40]           Dans son rapport d’évaluation médicale daté du 1er mars 1999, en relation avec l’aggravation du 21 novembre 1996, le docteur S. Cangé note, en ce qui a trait aux séquelles gênant le travailleur à son travail, qu’en plus des séquelles antérieures qui sont inchangées, monsieur Rondeau devrait éviter de rester appuyé sur la face interne de ses coudes et il devrait aussi éviter les mouvements de flexion-extension répétés de ses coudes.  Elle précise que l’ajout de la névropathie cubitale gauche opérée et des séquelles fonctionnelles qui en découlent ne changent pas significativement sa capacité de travail, tel qu’en témoigne l’évaluation en ergothérapie.  Elle ajoute que, malgré ses douleurs, le travailleur est fonctionnel dans plusieurs activités et que les perceptions qu’a monsieur Rondeau de ses douleurs l’empêche de voir une situation professionnelle intéressante, ajoutant que la longue invalidité centrée autour du problème de douleurs limite davantage la réinsertion professionnelle que les limitations objectives.

[41]           En ce qui a trait à l’évaluation de l’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique (APIPP), le docteur S. Cangé produit le bilan suivant :

BILAN DES SÉQUELLES 

 

Séquelles actuelles :

 

Atteinte motrice du nerf cubital gauche                         113282                       6 %

 

Atteinte sensitive du nerf cubital gauche                                   113718                       1 %

 

Neurolyse du nerf cubital avec épitrochléectomie atteinte permanente des tissus mous avec séquelles fonctionnelles                                                  102383                       2 %

 

D.P.J.V.                                                                                 225090                       1,35 %

 

TOTAL :                                                                                                                   10,35 %

 

 

[42]           Dans un avis rendu le 28 avril 1999, le docteur David Wiltshire, orthopédiste et membre du Bureau d'évaluation médicale, établit ainsi les séquelles reliées à la rechute du 21 novembre 1996, :

Séquelles actuelles :

 

Code                           Description                                                                 DAP %

 

113718                       Atteinte sensitive nerf cubital                            1 %

gauche classe 2

 

102383                       Atteinte tissus mous avec séquelles                              2 %

fonctionnelles (neurolyse nerf cubital avec

épitrochléectomie coude gauche)

 

Le docteur Wiltshire précise qu’il ne retrouve aucune atteinte motrice du nerf cubital gauche pouvant justifier un pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique.

[43]           Dans une décision rendue le 7 mai 1999, suite à l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale, le pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique (APIPP) est établi à 4,40 % en relation avec la récidive du 21 novembre 1996.  Pour en arriver à un tel pourcentage, la CSST tient compte d’un pourcentage supplémentaire de 1 % en raison de la bilatéralité.

[44]           Dans une décision rendue le 2 février 2000 à la suite d’une révision administrative, la CSST modifie cependant la décision initiale de la CSST et établit à 3,30 % le pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique en relation avec la rechute, la récidive ou aggravation survenue le 21 novembre 1996.  Le travailleur conteste cette décision (CLP 132610-63-0002).

[45]           Dans une décision rendue le 29 mars 1999, la CSST détermine, qu’en regard des séquelles de la rechute, récidive ou aggravation du 21 novembre 1996, le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable qui avait déjà été retenu, soit celui de commis de bureau, et ce, à compter du 26 mars 1999.  Cette décision est confirmée à la suite d’une décision rendue en révision administrative le 1er mars 2000, ce que conteste le travailleur (CLP 133562-63-0003).

[46]           À la demande du procureur du travailleur, le docteur Normand Moussette produit un rapport d’expertise en date du 23 juillet 2000.  En relation avec la rechute du 21 novembre 1996, le docteur Moussette retient les diagnostics d’entorse cervicale, d’épicondylite et d’épitrochléite au coude gauche ainsi que le diagnostic de syndrome du tunnel cubital et du tunnel carpien gauche avec atteinte sensitive, sans atteinte motrice.  Concernant les limitations fonctionnelles, il recommande d’ajouter les limitations à l’effet qu’il est impossible pour le patient de faire des mouvements de préhension, d’extension du poignet autant avec sa main gauche qu’avec sa main droite, ce qui l’oblige à ne pas effectuer de travaux de préhension.  Il ajoute par ailleurs que, pour ce qui est de la capacité de monsieur Rondeau à reprendre un emploi de commis de bureau, il n’y voit aucun inconvénient à condition qu’il n’ait pas à soulever des objets dépassant 14 livres ou pouvant exiger des mouvements répétitifs au niveau des mains, des avant-bras et de l’épaule gauche.  Le docteur Moussette complète son expertise en indiquant qu’il considère non souhaitable que le travailleur effectue les travaux de débroussaillage, les travaux de peinture et de déneigement, étant donné l’incapacité d’effectuer des mouvements répétitifs de préhension et de flexion-extension au niveau du membre supérieur gauche ainsi que du membre supérieur droit.

[47]           Suite à la réception d’une description des principales tâches reliées au travail de commis de bureau selon la Classification nationale des professions (CNP), document qui est acheminé par le procureur du travailleur, le docteur Moussette précise, qu’étant donné qu’il a ajouté des limitations sur l’impossibilité du patient à faire des mouvements de préhension et d’extension du poignet, il révise son opinion à savoir que le patient est incapable de réaliser la tâche de commis de bureau, principalement en ce qui a trait à la dactylographie, l’ouverture, le tri et l’acheminement du courrier et tout ce qui exige une manipulation.  Cependant, il considère que certaines activités ne sont pas incompatibles avec les capacités du travailleur, soit l’utilisation du télécopieur, l’acheminement des demandes de renseignements par téléphone, le classement et la photocopie de documents.

[48]           Dans une décision rendue le 1er mars 2000 à la suite d’une révision administrative, la CSST confirme les décisions rendues précédemment et refuse de rembourser, à titre de travaux d’entretien courants du domicile, le débroussaillage des fossés, le déneigement de l’entrée du domicile ainsi que la peinture intérieure du domicile.  Le travail de débroussaillage du terrain n’est pas considéré comme un travail d’entretien courant du domicile.  Pour ce qui est du déneigement du domicile, la CSST souligne que le travailleur a fait un choix personnel de faire souffler la neige plutôt que d’effectuer lui-même le déneigement à l’aide d’un « 4 X 4 » comme il le faisait auparavant.  Pour ce qui est des travaux de peinture du domicile, la CSST mentionne que le travailleur n’effectuait pas lui-même ces travaux auparavant.  Monsieur Rondeau conteste cette décision (CLP 135640-63-0003).

[49]           Monsieur Rondeau témoigne lors de l’audience.  Il mentionne n’avoir jamais occupé l’emploi de commis de bureau.  Il considère qu’il n’est pas en mesure d’occuper un tel emploi en raison du manque de force, de la douleur et des engourdissements qu’il ressent lors de ces activités.  Il se dit incapable d’effectuer un travail de dactylo et d’effectuer des tâches telles l’ouverture du courrier et les autres tâches généralement rattachées au travail de commis de bureau.

[50]           En ce qui concerne les travaux d’entretien courants du domicile, monsieur Rondeau mentionne qu’il est propriétaire de cette maison depuis 1995.  Il était propriétaire d’une autre maison auparavant et était en mesure d’effectuer le travail de débroussaillage.  En ce qui a trait au déneigement, depuis qu’il est propriétaire de la résidence actuelle, il n’est pas en mesure d’effectuer le déneigement de sa cour et utilise les services d’un entrepreneur. 

Auparavant, durant une certaine période, il utilisait à l’occasion, un véhicule « tout-terrain » muni d’une pelle à neige.  Concernant les travaux de peinture intérieure, il effectuait lui-même ces travaux avant l’accident survenu en 1993.

[51]           Le docteur Normand Moussette, neurologue, témoigne à la demande du travailleur.  Pour ce qui de l’évaluation de l’atteinte permanente, il se dit en accord avec l’évaluation produite par le docteur Cangé, à l’exception du pourcentage attribué pour l’atteinte motrice qu’il ne peut confirmer.  Il précise qu’il n’ajoute pas de nouvelles limitations à celles établies par le docteur Cangé mais qu’il s’agit plutôt d’une précision de ces limitations.  Le principal problème relatif à un retour au travail est la douleur que le travailleur ressent à la mobilisation.  Considérant les limitations établies par le docteur Cangé, le docteur Moussette émet l’avis que monsieur Rondeau n’est pas en mesure d’effectuer les principales tâches reliées au travail de commis de bureau.

 

L'AVIS DES MEMBRES

[52]           Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable qui avait été déterminé avant la rechute, la récidive ou l’aggravation du 21 novembre 1996 et que les limitations qui découlent de cette lésion professionnelle n’empêchent pas le travailleur d’occuper l’emploi convenable déjà déterminé.

[53]           Le membre issu des associations syndicales est d’avis que le travailleur n’est pas en mesure d’occuper l’emploi convenable de commis de bureau en raison de la symptomatologie douloureuse et des tremblements qu’il présente, tel qu’en témoigne le docteur Monfette.  De plus, le travailleur aurait besoin d’une formation complémentaire.

[54]           Le membre issu des associations d’employeurs ainsi que le membre issu des associations syndicales sont d’avis que le travailleur a droit au remboursement des frais de peinture du domicile à titre de travail d’entretien courant du domicile.  Les travaux de débrousaillage et de déneigement de la cour ne sont cependant pas des travaux d’entretien courants que le travailleur effectuait lui-même.

[55]           Le membre issu des associations d’employeur ainsi que le membre issu des associations syndicales sont d’avis que le pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique en relation avec l’aggravation survenue le 21 novembre 1996  doit être établi à 4.8 %.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

DOSSIER 133562-63-0003 :

[56]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si, suite à la rechute, récidive ou aggravation reconnue en date du 21 novembre 1996, le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable de commis de bureau, lequel avait été déterminé dans une décision précédente rendue le 23 septembre 1996, suite à la rechute, récidive ou aggravation reconnue en date du 22 novembre 1995.

[57]           En relation avec les lésions professionnelles reconnues au niveau des deux membres supérieurs, particulièrement suite à la rechute, récidive ou aggravation reconnue au niveau du membre supérieur gauche en date du 22 novembre 1995, le travailleur a conservé une atteinte permanente ainsi que des limitations fonctionnelles lui donnant droit à la réadaptation.

[58]           Sur le plan de la réadaptation professionnelle, différentes mesures ont été entreprises dans le but de rendre le travailleur apte à occuper un emploi convenable, dont une démarche d’orientation auprès d’une conseillère en orientation et la mise sur pied d’un programme de formation individualisé.  Suite à ces démarches, la CSST a rendu une décision, laquelle ne fut pas contestée, à l’effet que le travailleur était capable d’exercer l’emploi convenable de commis de bureau.

[59]           Une nouvelle rechute, récidive ou aggravation est cependant reconnue à la date du 21 novembre 1996, soit ultérieurement à la date de décision relative à la détermination de l’emploi convenable.  De plus, cette nouvelle lésion professionnelle entraîne une atteinte permanente ainsi que des limitations fonctionnelles supplémentaires donnant à priori droit au travailleur à la réadaptation.

 

 

[60]           La question principale, telle que soulevée lors de l’audience, consiste à déterminer si, considérant le droit renouvelé du travailleur à la réadaptation suite à l’aggravation du 21 novembre 1996, l’emploi convenable doit être réévalué à nouveau et selon tous les critères de la définition d’emploi convenable ou déterminer si les séquelles propres à l’aggravation du 21 novembre 1996 rendent le travailleur incapable d’exercer l’emploi convenable déjà déterminé. 

[61]           À diverses occasions, la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles ainsi que la Commission des lésions professionnelles se sont prononcées sur la question.  Dans l’affaire Goyette Funkel et Défense Nationale et CSST[2], le commissaire Alain Archambault, dans une cause similaire dans laquelle la travailleuse s’était vue reconnaître des limitations fonctionnelles supplémentaires en raison d’une aggravation et qui contestait la décision à l’effet qu’elle était redevenue capable d’exercer l’emploi convenable déjà déterminé suite à la lésion d’origine, considère que le tribunal ne peut remettre en question les critères prévus à la définition d’emploi convenable, sauf celui ayant trait à la capacité résiduelle de la travailleuse, eu égard aux nouvelles limitations fonctionnelles reconnues à la suite de l’aggravation.  La décision du commissaire Archambault s’appuie sur diverses décisions adoptant la même interprétation.

[62]           La commissaire Louise Thibault émet également un avis similaire dans l’affaire Fex et Cartonniers Vallée & Fils limitée[3].  Dans cette affaire, le tribunal devait se demander si le travailleur était redevenu capable d’exercer l’emploi convenable d’agent de sécurité, compte tenu du fait que la rechute entraînait une limitation supplémentaire.  La commissaire constate que le travailleur voudrait remettre en question la détermination de l’emploi comme étant un emploi convenable, non seulement en fonction de cette limitation additionnelle mais par rapport à l’ensemble des critères devant servir à l’évaluation de l’emploi convenable.  Rappelant que l’article 145 accorde au travailleur un droit à la réadaptation que requiert son état en raison de la lésion professionnelle, la commissaire précise que ce droit existe donc en fonction de la rechute et que la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles doit se limiter à se demander si la limitation fonctionnelle supplémentaire établie en raison de la rechute empêche le travailleur d’exercer l’emploi convenable déterminé antérieurement.

 

 

 

[63]           Dans l’affaire Pelletier et Industrie Metcoat inc. et CSST[4], le commissaire Pierre Brazeau en arrive à des conclusions similaires.  Tout en reconnaissant qu’un travailleur qui présente une atteinte permanente consécutive à une lésion professionnelle est « à priori » admissible au programme de réadaptation de la CSST, ses besoins réels aux fins de sa réinsertion sociale et professionnelle demeurent le seul critère permettant d’identifier les mesures de réadaptation dont il pourrait bénéficier.  Constatant que les limitations fonctionnelles établies suite à l’aggravation n’empêchent pas le travailleur d’exercer l’emploi convenable déterminé, le commissaire conclut qu’aucune nouvelle mesure de réadaptation n’est nécessaire.

[64]           Dans l’affaire Lupien et C.L.S.C. Val St-François et CSST[5], le commissaire Bernard Lemay écrit également que la travailleuse ne peut utiliser une décision rendue à la suite d’une aggravation pour rouvrir le débat sur la détermination de son emploi convenable puisque la décision rendue suite à l’aggravation ne statut que sur la capacité de la travailleuse à exercer l’emploi convenable déjà déterminé.

[65]           Dans l’affaire Leblond et CSST et Manugypse inc.[6], le commissaire Bertrand Roy révoque la décision initiale rendue par la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles.  Il considère que le premier commissaire a commis une erreur qui se rapporte à la compétence du tribunal, dans la mesure où la Commission d’appel avait tranché une question dont elle n’était pas saisie, soit la détermination de l’emploi convenable.  Il note que cet emploi convenable avait déjà été déterminé et que la Commission d’appel devait examiner la capacité du travailleur à exercer cet emploi convenable en fonction des nouvelles capacités résiduelles du travailleur.

[66]           Dans l’affaire Normand Marroni et TMT Canada inc. et CSST[7], le commissaire Camille Demers révise également la décision rendue par le premier commissaire au motif que ce dernier devait décider si le travailleur, compte tenu des nouvelles limitations fonctionnelles lui ayant été reconnues à la suite de la récidive, était capable d’exercer l’emploi convenable déterminé auparavant dans une décision non contestée.  Le commissaire Demers considère que le premier commissaire a rendu une décision ayant pour effet d’annuler la décision de la CSST concernant la détermination de l’emploi convenable et que, ce faisant, il a excédé sa compétence puisqu’il n’était pas saisi d’une contestation à l’égard de cette décision.

[67]           Finalement, la Cour supérieure, dans l’affaire Côté et International Harvester du Canada ltée[8] a rejeté une requête en évocation d’une décision de la CALP[9] qui s’en tient à l’évaluation de la capacité du travailleur à exercer un emploi convenable déterminé antérieurement, en fonction uniquement des séquelles permanentes supplémentaires reliées à la récidive.

[68]           En accord avec la jurisprudence citée précédemment, le présent tribunal est d’avis que le litige consiste à déterminer si, eu égard aux conséquences de la lésion professionnelle subie le 21 novembre 1996, le travailleur est en mesure d’exercer l’emploi convenable déjà déterminé d’agent de bureau.  Le travailleur ayant déjà été reconnu comme étant incapable de reprendre son emploi, c’est en regard de l’emploi convenable déjà établi que l’évaluation de la capacité du travailleur à exercer cet emploi doit être faite, en tenant compte des seules séquelles de la lésion professionnelle concernée.

[69]           En relation avec la rechute, récidive ou aggravation reconnue en date du 21 novembre 1996, touchant le membre supérieur gauche, les seules limitations fonctionnelles établies par le médecin qui a charge du travailleur, le docteur S. Cangé, sont à l’effet que le travailleur doit éviter de rester appuyé sur la face interne de ses coudes et doit éviter les mouvements de flexion-extension de ses coudes.

[70]           En regard de ces limitations fonctionnelles, madame Martine Laborde, ergothérapeute, émet l’avis que le travailleur est en mesure d’occuper à temps complet un travail de type sédentaire, tel que celui de commis de bureau.

[71]           Le docteur S. Cangé, médecin qui a charge du travailleur, émet l’avis que les séquelles reliées à l’aggravation du 21 novembre 1996 ne changent pas significativement la capacité de travail de monsieur Rondeau, notant que malgré ses douleurs, le travailleur est fonctionnel dans plusieurs activités et recommande un travail sédentaire avec activités physiques légères.

[72]           Même le docteur N. Moussette, dans son rapport d’expertise du 23 juillet 2000, mentionne qu’il ne voit aucun inconvénient à ce que le travailleur reprenne un emploi comme commis de bureau à condition qu’il n’ait pas à soulever des objets dépassant 14 livres ou pouvant exiger des mouvements répétitifs au niveau des membres supérieurs et ce, tout en ajoutant des limitations fonctionnelles.  Ce n’est que suite à la réception d’une description des tâches transmise par le procureur du travailleur que le docteur Moussette amende son avis pour préciser que le travailleur serait incapable de réaliser la tâche de commis de bureau, le travailleur étant incapable d’effectuer tout ce qui exige de la manipulation.

[73]           L’ergothérapeute, madame Laborde, le docteur Claude Proulx, médecin désigné de la CSST, ainsi que le docteur S. Cangé, médecin traitant du travailleur, émettent l’avis que l’aggravation survenue le 21 novembre 1996 n’a pas entraîné de modifications significatives des capacités de travail de monsieur Rondeau et qu’il est en mesure d’effectuer un travail de type sédentaire tel que le travail de commis de bureau.  Seul le docteur Moussette, qui après avoir émis un avis similaire dans un premier temps, précise par la suite que le travailleur n’est pas en mesure d’effectuer toutes les tâches reliées à l’emploi de commis de bureau.  Cependant, les principaux obstacles et limitations identifiés par le docteur Moussette à la capacité à exercer l’emploi convenable, consistent en des limitations fonctionnelles qui n’avaient pas été établies par le médecin qui a charge ou qui avaient déjà été établies avant la lésion professionnelle en cause, soit l’aggravation du 21 novembre 1996.

[74]           En conséquence, eu égard aux séquelles reliées à la lésion professionnelle subie le 21 novembre 1996, le présent tribunal est d’avis que le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable de commis de bureau qui avait été déterminé dans une décision finale rendue le 23 septembre 1996.

DOSSIER 132610-63-0002 :

[75]           La Commission des lésions professionnelles doit décider du pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique (APIPP) à reconnaître en relation avec la rechute, récidive ou aggravation survenue le 21 novembre 1996 et décider du montant d’indemnité pour dommages corporels à laquelle le travailleur a droit en regard de cette atteinte permanente.

[76]           Le principal point en litige concerne le fait que le docteur D. Wiltshire, membre du Bureau d’évaluation médicale, n’a pas tenu compte dans son évaluation du pourcentage additionnel de déficit anatomo-physiologique qui doit être reconnu en raison de la bilatéralité.

[77]           En ce qui concerne le déficit anatomo-physiologique (DAP) en relation avec la rechute, récidive ou aggravation du 21 novembre 1996, le docteur D. Whiltshire, membre du Bureau d'évaluation médicale, évalue le déficit anatomo-physiologique à 3 % en raison d’une atteinte sensitive du nerf cubital gauche ainsi que d’une atteinte des tissus mous avec séquelles fonctionnelles.

[78]           À la fois, le docteur S. Cangé, médecin traitant de monsieur Rondeau, ainsi que le docteur N. Moussette, qui produit une expertise à la demande du travailleur, retiennent les mêmes séquelles.  Seul le docteur S. Cangé ajoute un déficit anatomo-physiologique (DAP) supplémentaire pour une atteinte motrice du nerf cubital gauche. 

Cependant, cette évaluation n’est pas retenue par le docteur Whiltshire qui précise ne retrouver aucune atteinte motrice du nerf cubital gauche pouvant justifier un pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique.  De même, le docteur N. Moussette mentionne ne pouvoir identifier d’atteinte motrice du nerf cubital gauche.  En conséquence, pour ce qui est de l’évaluation du déficit anatomo-physiologique (DAP) propre à l’aggravation du 21 novembre 1996, les séquelles, telles qu’évaluées par le docteur Whiltshire, doivent être confirmées :

Code                           Description                                                                 DAP %

 

113718                       Atteinte sensitive nerf cubital                            1 %

gauche classe 2

 

102383                       Atteinte tissus mous avec séquelles                              2 %

fonctionnelles (neurolyse nerf cubital avec

épitrochléectomie coude gauche)

 

[79]           Cependant, cette évaluation des séquelles n’est pas complète et, comme le prévoit le paragraphe 5 du Règlement sur le barème des dommages corporels, l’évaluation des séquelles doit tenir compte des séquelles de la lésion préexistante :

Dans le cas d’une lésion préexistante à la lésion évaluée, les séquelles de la lésion préexistante sont évaluées suivant le barème, mais uniquement aux fins du calcul des dommages corporels résultant de la lésion évaluée.

 

Le pourcentage résultant des séquelles de la lésion préexistante sont ensuite déduits des pourcentages totaux de dommages corporels.

 

 

 

[80]           Aux séquelles retenues par le docteur Whiltshire, il faut donc tenir compte des séquelles évaluées par le docteur S. Cangé dans son évaluation du 27 juin 1996 en relation avec la récidive du 22 novembre 1995, concernant le membre supérieur gauche :

Syndrome du canal carpien gauche opéré avec EMG positif   

100526                       1 %

 

Névrome du nerf médian au tiers distal de l’avant-bras gauche status post-neurolyse avec les hypoesthésies digitales de classe 2                             113059                       5 %

 

 

 

[81]           Le paragraphe 7 du Règlement sur le barème des dommages corporels prévoit également un pourcentage additionnel de déficit anatomo-physiologique (DAP) lorsqu’un travailleur subit des dommages à un organe symétrique à celui qui est déjà atteint :

 

Lorsqu’un travailleur subit, en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, des dommages bilatéraux résultant de déficits anatomo-physiologiques à des organes symétriques ou d’un déficit anatomo-physiologique à un organe symétrique à celui qui est déjà atteint, le barème détermine un pourcentage additionnel qui correspond à la somme des pourcentages de déficits anatomo-physiologiques fixés pour l’organe le moins atteint.

 

Ce principe ne s’applique pas aux pourcentages prévus pour le préjudice esthétique ou les douleurs et la perte de jouissance de la vie.

 

Dans le cas de lésion préexistante à celle évaluée, les séquelles de la lésion préexistante sont évaluées suivant le barème, mais seulement aux fins du calcul des dommages bilatéraux.

 

 

[82]           Pour fins de bilatéralité, il faut donc tenir compte de l’évaluation du déficit anatomo-physiologique reconnue en relation avec le membre supérieur droit.  L’évaluation du déficit anatomo-physiologique pour le membre supérieur droit est celle qui fut effectuée suite à la lésion professionnelle subie le 2 juillet 1993 et reprise par le docteur Cangé dans son évaluation du 27 juin 1996, dans le but d’évaluer le déficit anatomo-physiologique (DAP) pour fins de bilatéralité :

Amputation P3 D2                                                                  100633                       2 %

Amputation P2 D2                                                                  100462                       2 %

Ténosynovite index droit                                                         102383                       2 %

Tunnel carpien droit                                                                100526                       1 %

 

 

[83]           L’atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique en relation avec la rechute, récidive ou aggravation survenue le 21 novembre 1996 correspond à la différence entre l’atteinte permanente actuelle et l’atteinte permanente antérieure.  L’atteinte permanente (APIPP) est constituée de la somme des déficits anatomo-physiologiques à laquelle s’ajoute le pourcentage supplémentaire reconnu pour bilatéralité ainsi que le pourcentage pour douleurs et perte de jouissance de la vie (DPJV) correspondants.

[84]           En tenant compte du Règlement sur le barème des dommages corporels, le bilan des séquelles est ainsi établi :

Séquelles actuelles :

 

Code               Description                                                                                         DAP %

 

113718            Atteinte sensitive du nerf cubital gauche                                               1 %

 

102383            Atteinte tissus mous avec séquelles fonctionnelles (neurolyse

                        nerf cubital gauche)                                                                             2 %

 

100526            Canal carpien gauche opéré avec EMG positif                         1 %

113059            Névrome du nerf médian au tiers distal de l’avant-bras gauche

                        status post-neurolyse avec hypoesthésies digitales de classe 2  5 %

                                                                                                                                 ____

 

                                                                                                                                 9 %

 

 

Séquelles antérieures :

 

100526            Canal carpien gauche opéré avec EMG positif                         1 %

 

113059            Névrome du nerf médian au tiers distal de l’avant-bras gauche

                        status post-neurolyse avec hypoesthésies digitales de classe 2  5 %

                                                                                                                                 ____

                                                                                                                                                                                                                                                                               6 %

 

 

Pour fins de bilatéralité seulement (droite) :

 

100633            Amputation P3-D2                                                                             2 %

100462            Amputation P2-D2                                                                             2 %

102383            Ténosynovite index droit                                                                     2 %

100526            Tunnel carpien droit                                                                            1 %

                                                                                                                                 ____

 

                                                                                                                                 7 %

 

 

Déjà compensé (bilatéralité) :

 

113059            Névrome du nerf médian au tiers distal                                    5 %

 

100526            Syndrome du canal carpien gauche opéré                                            1 %

                                                                                                                                 ____

 

                                                                                                                                 6 %

 

 

Aggravation à compenser :

 

APIPP actuelle :           9 % (DAP) + 7 % (bilatéralité) + 3,2 %

(DPJV code 225161)                                                                                    =          19,2 %

 

APIPP antérieure :       6 % (DAP) + 6 % (bilatéralité) + 2,4 %

(DPJV code 225125)                                                                                    =          14,4 %

 

APIPP à compenser :                                                                                               4,8 %

 

 

[85]         En relation avec la rechute, récidive ou aggravation survenue le 21 novembre 1996, le pourcentage  d’atteinte permanente  à l’intégrité physique et  psychique  (APIPP) est établi à 4,80 %, ce qui donne droit à une indemnité pour dommages corporels évaluée à 2 371,16 $.

DOSSIER 135640-63-0003 :

[86]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur a droit au remboursement des frais de déneigement, de débroussaillage ainsi que de peinture du domicile à titre de frais reliés à des travaux d’entretien courant du domicile.

[87]           L’article 165 de la loi édicte les conditions d’ouverture au programme de remboursement du coût des travaux d’entretien courant du domicile :

165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui - même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[88]           Le travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison des lésions professionnelles qu’il a subi au niveau des deux membres supérieurs.  Le caractère grave de l’atteinte permanente à l’intégrité physique s’analyse en tenant compte de la capacité résiduelle du travailleur à exercer les travaux d’entretien courant du domicile.

[89]           L’expression « entretien courant » n’est pas précisé à la loi et la jurisprudence nous enseigne qu’il faut s’en remettre au sens usuel du terme, soit des travaux d’entretien habituel, ordinaire, par opposition à des travaux d’entretien inhabituel ou extraordinaire.  Il faut de plus qu’il s’agisse de travaux d’entretien courant que le travailleur aurait lui-même exécutés, n’eut été de l’atteinte permanente grave.

[90]           Relativement aux travaux de déneigement de l’entrée du domicile, le tribunal est d’avis que le déneigement d’une entrée de cour d’une dimension de plus de 5 000 pieds carrés ne peut être considéré comme un travail d’entretien courant que le travailleur effectuerait lui-même.  Le déblaiement d’une telle surface nécessite des équipements mécaniques particuliers.  De plus, le travailleur n’est propriétaire de cette résidence que depuis 1995 et il n’a jamais effectué lui-même le déneigement de voies d’accès à la résidence.

[91]           De même, le débroussaillage de fossés qui séparent le terrain de la voie publique ne peut être considéré comme un travail d’entretien courant du domicile.  Malgré les limitations fonctionnelles, le tribunal est d’avis que le travailleur est en mesure d’effectuer, à son rythme, le débroussaillage occasionnel autour des aménagements de fleurs et des arbres. 

Cependant, le débroussaillage des fossés ne peut être considéré comme étant un travail d’entretien courant et ordinaire.

[92]           Par ailleurs, les travaux de peinture du domicile sont considérés comme des travaux d’entretien courant, c’est-à-dire des travaux habituels et ordinaires.  Les limitations fonctionnelles reconnues au niveau des deux membres supérieurs rendent le travailleur inapte à effectuer les travaux de peinture du domicile.  De plus, selon son témoignage, il effectuait lui-même les travaux de peinture à son domicile antérieur, avant que ne survienne la lésion professionnelle initiale.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

 

DOSSIER 132610-63-0002 :

ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Jean-Luc Rondeau, le travailleur ;

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 2 février 2000 à la suite d’une révision administrative ;

DÉCLARE qu’en relation avec la rechute, récidive ou aggravation survenue le 21 novembre 1996, le pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique (APIPP) est établi à 4.8 %, ce qui donne droit à une indemnité pour dommages corporels évaluée à 2 371,16 $.

 

DOSSIER 133562-63-0003 :

REJETTE la requête de monsieur Jean-Luc Rondeau, le travailleur ;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 1er mars 2000 à la suite d’une révision administrative ;

DÉCLARE que suite à la rechute, récidive ou aggravation survenue le 21 novembre 1996, le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable déjà déterminé de commis de bureau à compter du 26 mars 1999.

DOSSIER 135640-63-0003 :

ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Jean-Luc Rondeau, le travailleur ;

MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 1er mars 2000 à la suite d’une révision administrative ;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais pour le débroussaillage du terrain et le déneigement de l’entrée du domicile ;

DÉCLARE que le travailleur a droit, sur présentation de pièces justificatives, au remboursement des frais engagés pour la peinture du domicile.

 

 

 

 

 

Jean-Marc Charette

 

Commissaire

 

 

 

 

 

Me André Laporte

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 

Me Benoit Boucher

 

Représentant de la partie intervenante

 

 

 



[1]           BR 62578192, le 12 février 1998, Jean-Marc Charette, président

                Jean-Benoit Marcotte, membre représentant les employeurs

                Jean-Guy Lévesque, membre représentant les travailleurs

[2]           CALP 82304-62-9608, le 19 septembre 1997, Commissaire Alain Archambault

[3]           CALP 53541-64-9306, le 22 août 1995, Commissaire Louise Thibault

[4]           CALP 28088-04-9104, le 13 mars 1992, Commissaire Pierre Brazeau

[5]           CALP 43683-05-9208, le 30 juin 1994, Commissaire Bernard Lemay

[6]           CALP 70079-03-9505. le 8 janvier 1998, Commissaire Bertrand Roy

[7]           CALP 65127-62-9412, le 11 février 1997, Commissaire Camille Demers

[8]           C.S. M. le Juge Armarnd Carrier, le 7 mars 1994

[9]           CALP 25016-02-9001, le 6 mai 1993, Commissaire Denys Beaulieu

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