Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Richelieu-Salaberry

SAINT-JEAN-SUR-RICHELIEU

 

Le

5 août 2003

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

190081-62A-0209

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Me Norman Tremblay

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Claude Jutras

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Rita Latour

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DE L'ASSESSEUR :

Christian Hemmings, médecin

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

076021518

AUDIENCE TENUE LE :

26 mai 2003

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

Montréal

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

FRANCIS LAVERS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TEXTILES FDL INC. (FAILLITE)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

C.S.S.T. - RICHELIEU

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 9 septembre 2002, monsieur Francis Lavers (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 29 août 2002, à la suite d’une révision administrative.

[2]               Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 10 mai 2002 et déclare que le travailleur n’a pas subi une lésion professionnelle le 4 juillet 2001.

[3]               Le travailleur est présent à l’audience. La CSST est représentée, alors que la compagnie Textile FDL inc. (l’employeur) est fermée suite à une faillite.

L'OBJET DE LA CONTESTATION

[4]               Le travailleur demande de reconnaître qu’il a subi une lésion professionnelle le ou vers le 4 juillet 2001.

LES FAITS

[5]               Les faits pertinents à la réclamation du travailleur débute le 30 août 1981. À cette époque, le travailleur est à l’emploi de l’employeur où il travaille dans le département de la coloration et la finition. Pendant une période d’environ 200 jours, il est affecté à la décoloration du textile.

[6]               Le travailleur explique que la décoloration du textile est faite à l’aide de produits chimiques tels que la cyanamide, cyanure, acide hydro-chlorique, acide sulfurique, caustique, peroxyde, acide acétique et acide nitrique. Ces produits chimiques produisent une fumée qui lorsque respirée est très irritante. Le 30 août 1981, le travailleur consulte à l’urgence suite à une intoxication aux produits ci-haut mentionnés. La fiche de consultation démontre que le travailleur s’est présenté à l’urgence avec des nausées, une gorge irritée ainsi qu’une toux. L’auscultation pulmonaire est par contre normale. Le médecin consulté, le docteur Dankoff, pose un diagnostic de « gaz intoxication ». Le seul traitement qu’il prescrit est de ne plus être exposé à des produits chimiques.

[7]               Une réclamation est produite à la Commission des accidents du travail du Québec (l’ancêtre de la CSST) laquelle est acceptée. Par contre, la CSST, compte tenu qu’aucun traitement n’est prescrit, considère que le travailleur est apte à reprendre son travail dès le 31 août 1981. Aucune atteinte permanente ni limitations fonctionnelles ne sont déterminées en rapport avec cette réclamation.

[8]               Le travailleur quant à lui décide de son propre chef de ne plus retourner travailler chez l’employeur et se recycle dans le domaine de la construction où il a travaillé comme ouvrier.

[9]               Les prétentions du travailleur sont à l’effet que tous les problèmes de santé qu’il a eus entre 1981 et 2001 sont reliés aux 200 jours qu’il a travaillé dans le département de la décoloration chez l’employeur. L’étude du dossier démontre que le travailleur, à travers les années, a été traité entre autres pour des problèmes respiratoires, de hernie discale lombaire, diabète, cholestérol ainsi qu’une pancréatite.

[10]           Le problème de hernie discale lombaire a fait l’objet d’une réclamation séparée, laquelle a été refusée par la CSST dans une décision datée du 26 mai 1998, à la suite d’une révision administrative. Cette décision a été maintenue par une décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 6 décembre 2000[1].

[11]           Quant aux diagnostics de diabète, de cholestérol et de pancréatite récidivante, ils n’ont pas fait l’objet d’une décision de la CSST et ne sont pas non plus visés par la décision contestée en l’espèce. D’autre part, le tribunal constate que tous les médecins, incluant ceux du travailleur, considèrent que ces pathologies sont toutes d’ordre personnel.

[12]           Le tribunal doit disposer de la seule question de savoir si le travailleur est aux prises avec une maladie professionnelle pulmonaire suite à l’exposition aux gaz toxiques subie au mois d’août 1981.

[13]           Au niveau pulmonaire, la première consultation médicale qui suit l’événement du mois d’août 1981 date du 16 juillet 1982 alors que le travailleur est traité par le docteur Rochon. Les notes de consultation démontrent que le travailleur consulte en rapport avec un rhume qu’il traînait depuis environ une semaine et demie. Le diagnostic posé est celui de bronchite aiguë. Le 2 août 1982, le travailleur est vu par le même médecin qui note que le travailleur va beaucoup mieux. Il continue le traitement prescrit pour une autre semaine.

[14]           Le 7 juillet 1983, le travailleur consulte un médecin en rapport avec de la constriction thoracique ainsi qu’une toux. Le médecin note qu’il fume un paquet de cigarette par jour. Le diagnostic posé est celui de bronchospasme.

[15]           Au sujet des habitudes tabagiques du travailleur, il ne nie pas qu’il fume la cigarette depuis environ l’âge de 13 ans. Il prétend par contre que ses habitudes tabagiques variaient surtout lorsque qu’il était aux prises avec des crises bronchiques. Actuellement, il dit fumer entre 15 et 20 cigarettes par jours.

[16]           Le 8 mai 1986, on retrouve une autre consultation où le diagnostic de bronchite est posé.

[17]           Le 26 août 1987, le travailleur consulte en rapport avec une dyspnée ainsi qu’une toux. Le diagnostic posé est celui de maladie pulmonaire obstructive chronique surinfectée ainsi que de bronchite asthmatiforme.

[18]           Le 4 février 1988, il consulte au Centre hospitalier de St-Mary où il est vu par le docteur Rohan. Les notes de consultation du docteur Rohan indiquent que le travailleur fume entre 25 et 30 cigarettes par jour et ceci depuis 27 ans. Le médecin indique également qu’il est aux prises avec des problèmes pulmonaires de nature obstructive depuis environ 10 ans. Il pose des diagnostics de bronchite chronique, de bronchite asthmatiforme ainsi que rénite allergique. Le docteur Rohan revoit le travailleur pour une visite de suivi le 18 février 1988.

[19]           Le dossier n’indique aucune autre consultation médicale spécifiquement en rapport avec les problèmes d’ordre pulmonaire avant la réclamation du 4 juillet 2001. Questionné à ce sujet, le travailleur mentionne qu’il a été traité pendant une période d’environ deux ans dans une clinique à Notre-Dame-de-Grâce, à Montréal. Par contre, il est incapable de produire des documents en rapport avec ces traitements et le dossier n’en contient aucun. Le travailleur aurait été suivi par le docteur Khadilkar environ six mois après l’événement de 1981, mais aucun document n’est produit au soutient de cette prétention alors que le docteur Khadilkar, lorsque approché par la CSST de produire ses notes de consultation, ne produit qu’une note qui comprend la première consultation médicale faite auprès du docteur Dankoff le 30 août 1981.

[20]           La présente réclamation débute avec une hospitalisation qui a eu lieu du 8 au 18 janvier 2001 où le travailleur est traité par le docteur Michel Bertrand. Il est suivi pour le diabète, le cholestérol élevé, des douleurs abdominales ainsi que pour des problèmes pulmonaires. Suite à cette hospitalisation, il est suivi par le docteur Boisvert.

[21]           Le docteur Boisvert produit un premier rapport médical sur les formulaires de la CSST où il indique que le rapport est produit à la demande du travailleur et qu’il est suivi pour une bronchite chronique qui serait reliée à l’accident de 1981.

[22]           Le travailleur décide alors de consulter un procureur en la personne de maître Sophie Mongeon. Cette dernière demande une expertise auprès du docteur Gildo Renzi qui produit un premier rapport d’expertise en date du 14 mai 2001. Après avoir fait un relevé détaillé du dossier, ce dernier pose le problème comme suit :

« Le problème de base est de déterminer si l’événement qu’a subi monsieur Lavers au mois d’août 1981 est un accident ou une maladie professionnelle pulmonaire de type RADS (reactive airway dysfonction syndrome). »

 

 

 

[23]           Le docteur Renzi poursuit en mentionnant ce qui suit :

« [...]

 

Le tableau clinique récent est plutôt en faveur d’une maladie pulmonaire obstructive chronique que de l’asthme bronchique mais, il n’y a pas eu d’évaluation précise à ce propos.

 

[...] Le RADS a été décrit en 1985 et, je ne suis pas certain qu’on puisse l’appliquer à l’événement que monsieur Lavers a subi en août 1981.

 

Les critères cliniques nécessaires pour le diagnostic de RADS sont les suivants :

 

1. L’absence documentée de maladie respiratoire antérieure. Monsieur Lavers n’a pas d’antécédent respiratoire avant 1981.

 

2. Le début des symptômes est arrivé après une simple et singulière exposition. Le dossier de monsieur Lavers n’est pas clair à ce propos car, il semble qu’il y a eu plusieurs exposition sur une série de quelques jours.

 

3. L’exposition est un gaz fumé qui s’évapore d’une substance chimique qui est en haute concentration et avec des conséquences irritatives. Le dossier de monsieur Lavers correspond à une exposition à des gaz toxiques.

 

4. Le début des symptômes est arrivé en dedans de 24 heures après l’exposition et a persisté pour au moins trois mois. Le dossier de monsieur Lavers n’est pas clair à ce propos. Il semble que les symptômes ont été graduels et le dossier ne supporte pas la notion que les symptômes ont duré au moins trois mois.

 

Dans votre lettre, vous mentionnez que monsieur Lavers a toussé durant environ 3 semaines mais aucun document médical ne supporte l’important fait que les symptômes doivent persister au moins trois mois.

 

5. Les symptômes étaient similaires aux symptômes d’asthme tel que toux, sillement et dyspnée. Le dossier de monsieur Lavers peut supporter les symptômes compatibles avec l’asthme.

 

6. Les épreuves fonctionnelles respiratoires ont démontré de l’obstruction bronchique et la spirométrie du monsieur Lavers démontre une obstruction bronchique d’intensité modérée à légère.

 

7. Le test de métacholine a été positif. Ce test n’a pas été fait chez monsieur Lavers.

 

8. Les autres causes de maladie respiratoire ont été éliminées. Ici, il est important de souligner, qu’à mon avis les symptômes respiratoires de monsieur Lavers sont plutôt en rapport avec sa maladie obstructive pulmonaire d’origine tabagique.

 

Il faut maintenant souligner, d’après les articles que tous les critères doivent être présent autrement on ne peut pas porter le diagnostic de RADS. Tel que mentionné antérieurement, il y a quelques critères qu’on ne retrouve pas dans le dossier de monsieur Lavers.

 

Je ne crois pas que je puisse porter un diagnostic de maladie professionnelle pulmonaire avec l’information présente au dossier actuellement. Par contre, je crois qu’il serait important que monsieur Lavers subisse des tests de fonction respiratoire additionnels dont surtout une provocation bronchique non spécifique. Je porterai aussi attention aux derniers tests que monsieur Lavers a subis au laboratoire de fonction respiratoire de l’Hôpital Notre-Dame au mois de janvier 2001 et je vous ferai parvenir un rapport complémentaire avec ma conclusion finale dans le dossier de monsieur Lavers. » [sic]

 

[24]           Suite à cette opinion, le travailleur poursuit son investigation notamment en faisant le test de métacholine lequel s’avère positif. Le 21 juin 2001, le docteur Renzi émet un complément d’expertise afin de tenir compte de ce nouvel examen. Il mentionne ce qui suit :

« Monsieur Francis Lavers a subi une provocation bronchique non spécifique à l’Hôpital Notre-Dame le 5 juin 2001. Ce test est revenu positif avec un CP20 à 4.96 mm/ml de métacholine. Monsieur Francis Lavers souffre encore d’une hyperréactivité bronchique légère.

 

Malgré le fait que tous les critères de RADS ne sont pas respectés de façon minutieuse dans le dossier de Monsieur Lavers, il faut conclure que monsieur Lavers a subi un accident de travail le 31 août 1981. Cette réclamation a été acceptée par la CSST. Il persiste, chez monsieur Lavers une hyperréactivité bronchique légère qui pourrait être en rapport avec son accident ainsi que le développement d’un RADS.

 

Je crois que monsieur Francis Lavers souffre d’une maladie professionnelle pulmonaire et j’établis le déficit anatomo-physiologique comme suit :

 

Code 223500              Sensibilisation                DAP : 3 %

Code 223626              Classe 3                      DAP : 18 %

                                                            DAP total : 21 %

 

Monsieur Lavers souffre d’une maladie pulmonaire obstructive chronique légère et il doit éviter les expositions aux irritants respiratoires qui dépassent les normes. Vu la réserve pulmonaire, il pourra faire un travail d’intensité modérée. »

 

 

[25]           Le 4 juillet 2001, le travailleur produit une réclamation à la CSST. La CSST, comme le prescrit la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[2] (la loi), transmet le dossier au Comité des maladies pulmonaires professionnelles dont son avis est entériné par le Comité spécial des présidents.

[26]           Les médecins pneumologues Gaston Ostiguy, André Cartier et Neil Colman, qui composent le Comité des maladies pulmonaires professionnelles, examinent le travailleur le 8 novembre 2001. Leurs conclusions sont les suivantes :

« CONCLUSIONS

 

Diagnostic :

 

Les membres du Comité ne peuvent finaliser le dossier de ce réclamant aujourd’hui. En effet, plusieurs éléments vont à l’encontre du diagnostic de RADS. Lorsqu’il s’est présenté à la salle d’urgence de l’Hôpital Général Juif de Montréal, en date du 30 août 1981, les plaintes à l’infirmière furent ceux de gaz dans l’estomac et de vomissements. Le Dr Dankoff qui voit le réclamant parle surtout de symptômes affectant les voies respiratoires supérieures et les yeux. Il le décrit comme un individu qui a une bonne apparence et qui n’est dans aucune détresse respiratoire. L’auscultation pulmonaire est claire.

 

Par la suite, le réclamant n’est pas revu avant l’année suivante soit en juillet 1982 alors qu’il présente des ronchi à l’auscultation, mais qu’il souffre d’une infection respiratoire depuis environ une dizaine de jours.

 

Le réclamant nous dit que dans les 6 mois qui ont suivi l’accident ou l’exposition aux acides et aux cyanures à la compagnie des Textiles FDL, il a été suivi par le Dr Madhusudan Khadilkar.

 

Donc, les membres du Comité demanderaient à la CSST de contacter le Dr Khadilkar pour savoir si ce dernier a gardé des notes de ses consultations lorsqu’il aurait vu le réclamant à la clinique du boulevard Cavendish.

 

De plus, les membres sont frappés par le degré modéré d’obstruction des voies aériennes et la discordance qui existe entre cette obstruction modérée et la symptomatologie actuelle du réclamant.

 

Mentionnons quand même la présence de plusieurs conditions médicales associées à savoir, des hernies discales, un diabète insulino-dépendant, de l’obésité, des lombalgies chroniques probablement en relation avec des hernies discales, Maladie cardiaque artériosclérotique et une hypertriglycéridémie.

 

Suite à l’obtention des notes du Dr Khadilkar qui ont été demandées, les membres du Comité fourniront un rapport complémentaire. »

 

 

[27]           Le Comité demande donc à la CSST d’obtenir les notes du docteur Khadilkar. La CSST produit au comité une télécopie qui provient du docteur Khadilkar où il ne fait que décrire la note de consultation du docteur Dankoff, suite à l’événement du 30 août 1981. Aucune autre information n’est fournie par le docteur Khadilkar. Le comité émet ensuite les conclusions suivantes dans un avis complémentaire du 14 mars 2002 :

« En conclusion, les membres du comité n’ont pas d’élément nouveau et différent de ceux dont ils disposaient lors de l’expertise de 8 novembre 2001. Ces éléments ne permettent pas de poser un diagnostic de bronchite chimique hyperactive (RADS) et compte tenu du tabagisme du réclamant, ce tabagisme est amplement suffisant pour expliquer les anomalies fonctionnelles respiratoires retrouvées.

 

Dans ce contexte, aucun DAP n’est accordé et le diagnostic de maladie pulmonaire professionnelle n’est pas posé. »

 

 

[28]           Cet avis du Comité des maladies pulmonaires professionnelles est entériné par le Comité spécial des présidents le 25 avril 2002, par les pneumologues Raymond Bégin, Jean - Jacques Gauthier et Marc Desmeules.

[29]           La CSST rend ensuite les décisions qui font l’objet de la présente contestation.

[30]           Finalement, la CSST produit une expertise du docteur Rita Jean-François, pneumologue, qui, après avoir revu le dossier et suite aux différentes constatations médicales y consignées, émet l’opinion suivante :

« En conclusion, après avoir revu extensivement le dossier de ce travailleur, je pense sincèrement qu’il n’y a pas lieu de reconnaître la bronchite chronique comme étant une maladie pulmonaire professionnelle à titre de rechute, récidive ou aggravation de l’accident d’origine du 31 août 1981 parce que :

 

·         Il existe dans ce dossier une note qui fait état de symptômes de bronchite chronique antérieurs à l’accident du 31 août 81.

·         Il est extrêmement peu probable qu’il y ait eu des symptômes persistants à la suite de l’accident du 31 août 81 puisque l’auscultation a été claire le 31 août 81, le travailleur n’a pas eu besoin d’autres visites médicales pendant les dix mois suivants. et que lors de la visite subséquente en juin 82, il n’était fait mention que de symptômes de bronchite aiguë.

·         Le travailleur présente actuellement une bronchite chronique avec une légère hyperréactivité bronchique dont le tabagisme peut assurément être la seule cause. »

 

 

L'AVIS DES MEMBRES

[31]           Tant la membre issue des associations syndicales que celui issu des associations d’employeurs sont d’avis que le travailleur n’a pas démontré qu’il a contracté une maladie professionnelle. Ils considèrent que la preuve démontre que les problèmes pulmonaires qui affligent le travailleur sont dus à son tabagisme.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[32]           Le tribunal doit décider si le travailleur est aux prises avec une maladie professionnelle pulmonaire. La maladie professionnelle prévue aux articles 29 et 30 de la loi prévoit ce qui suit :

29. Les maladies énumérées dans l'annexe I sont caractéristiques du travail correspondant à chacune de ces maladies d'après cette annexe et sont reliées directement aux risques particuliers de ce travail.

 

Le travailleur atteint d'une maladie visée dans cette annexe est présumé atteint d'une maladie professionnelle s'il a exercé un travail correspondant à cette maladie d'après l'annexe.

________

1985, c. 6, a. 29.

 

 

30. Le travailleur atteint d'une maladie non prévue par l'annexe I, contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui ne résulte pas d'un accident du travail ni d'une blessure ou d'une maladie causée par un tel accident est considéré atteint d'une maladie professionnelle s'il démontre à la Commission que sa maladie est caractéristique d'un travail qu'il a exercé ou qu'elle est reliée directement aux risques particuliers de ce travail.

________

1985, c. 6, a. 30.

 

 

[33]           Afin de déterminer si le travailleur peut bénéficier de la présomption indiquée à l’article 29 de la loi il y a lieu de préciser le diagnostic à retenir.

[34]           La prépondérance de la preuve est à l’effet que le travailleur souffre d’une maladie pulmonaire obstructive chronique. Il s’agit là de l’opinion du docteur Guildo Renzi, ainsi que du docteur Boisvert et du docteur Rita Jean-François. Quant au Comité des maladies pulmonaires professionnelles, bien qu’il ne se penche pas spécifiquement sur le diagnostic, il note également un degré modéré d’obstruction des voies aériennes tout en éliminant qu’il s’agisse d’une maladie pulmonaire professionnelle. Le Comité des maladies pulmonaires professionnelles élimine également la possibilité que le travailleur soit aux prises avec le RADS. Or, la maladie pulmonaire obstructive chronique ne se retrouve pas à l’annexe I dont il et question à l’article 29 précité. le travailleur ne peut donc bénéficier de la présomption indiquée à cet article.

[35]           Le travailleur, afin de réussir dans sa demande, doit donc démontrer par une prépondérance de preuve qui rencontre les critères indiqués à l’article 30 de la loi précitée.

[36]           Le tribunal est d’avis que la prépondérance de preuve est à l’effet que les problèmes du travailleur découlent de son habitude tabagique et non pas de l’exposition aux produits chimiques subie par le travailleur en 1981, pour les motifs suivants.

[37]           L’événement du mois d’août 1981 n’a nécessité qu’une seule consultation médicale au cours de laquelle aucun traitement n’est prodigué au travailleur. Le docteur Dankoff n’a fait qu’indiquer que le travailleur ne devrait plus être exposé aux gaz toxiques. De plus, au niveau pulmonaire, l’auscultation du docteur Dankoff était négative. Les consultations médicales que l’on retrouve au dossier entre 1982 et 1988 ne sont pas reliées à cet événement tel qu’expliqué par l’expert du travailleur, le docteur Renzi, qui mentionne ce qui suit :

« Tel que vous mentionnez dans votre lettre, monsieur Lavers a été vu pour des problèmes respiratoires à quelques reprises dont en 1982, 1986, 1987 et 1988. L’examen des notes du médecin, pendant ses entrevues, démontre que les visites sont surtout dues à des bronchites infectées et le traitement a été des antibiotiques. »

 

 

[38]           Le docteur Renzi a examiné la possibilité que le travailleur soit aux prises avec une maladie professionnelle pulmonaire de type RADS et énonce les critères que le travailleur doit rencontrer pour qu’on puisse poser ce diagnostic. Il constate dans son premier rapport du 14 mai 2001 que le travailleur ne rencontre pas tous les critères nécessaires afin de reconnaître le diagnostic de RADS et notamment les critères numéros 4 et 8 à l’effet que les symptômes devaient débuter dans une période de 24 heures et persister pendant au moins trois mois suivant l’exposition et que les autres causes de maladies respiratoires ont été éliminées. Le docteur Renzi va plus loin en mentionnant, qu’à son avis, les problèmes respiratoires du travailleur sont en rapport avec une maladie obstructive pulmonaire d’origine tabagique.

[39]           Le docteur Renzi précise que « d’après les articles tous les critères doivent être présents autrement on ne peut porter de diagnostic de RADS ».

[40]           Par la suite, le docteur Renzi émet une opinion complémentaire du 21 juin 2001 où il porte un bémol à son premier avis compte tenu du résultat positif à l’épreuve métacholine. Le docteur Renzi modifie donc son opinion pour dire que l’hyperréactivité bronchique légère dont le travailleur est porteur pourrait être en rapport avec son accident ainsi que le développement de RADS malgré le fait que tous les critères de RADS ne sont pas respectés. Cette dernière énoncée du docteur Renzi semble être en contradiction avec son opinion antérieure à l’effet que tous les critères doivent être présents afin de poser le diagnostic de RADS. Le tribunal a beaucoup de réticences à suivre cet opinion complémentaire du docteur Renzi surtout qu’il n’explique pas en quoi ce dernier examen vient changer le fait que les critères 4 et 8 ne sont pas rencontrés, surtout le critère no 8 à l’effet que les autres causes de maladies pulmonaires doivent être éliminées. Rappelons que le docteur Renzi s’est déjà prononcé à l’effet qu’à son avis, les problèmes pulmonaires du travailleur découlent de son habitude tabagique. Il s’agit également de l’opinion de tous les autres pneumologues qui ont eu à se prononcer.

[41]           En effet, le Comité des maladies pulmonaires professionnelles arrive à la conclusion que compte tenu du tabagisme du travailleur, « ce tabagisme est amplement suffisant pour expliquer les anomalies fonctionnelles respiratoires retrouvées ». Cette opinion est également partagée par l’expert de la CSST, le docteur Rita Jean-François.

[42]           Il y a donc très peu d’éléments qui supportent la thèse du travailleur à l’effet que ses problèmes pulmonaires sont reliés à l’exposition aux produits chimiques au cours du mois d’août 1981. La prépondérance de la preuve est plutôt à l’effet que ses problèmes découlent de son habitude tabagique laquelle a été décrite par les différents médecins au dossier comme étant d’environ un paquet par jour depuis l’âge de 13 ans.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête de monsieur Francis Lavers, le travailleur;

CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 29 août 2002 à la suite de sa révision administrative.

 

 

 

 

Me Norman Tremblay

 

Commissaire

 

 

 

 

 

 

PANNETON LESSARD

(Me Claude Lanctot)

 

Représentant de la partie intervenante

 



[1]  101929-62A-9806, Y. Lemire

[2]           L.R.Q., c. A-3.001

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