Décision

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Rossdeutscher (Succession de) c. Organisation d'éducation et d'information logement de Côte-des-Neiges (OEIL)

2014 QCCS 1515

JM 2141

 
 COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

 

N° :

500-17-074630-123

 

 

 

DATE :

Le 9 avril 2014

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

JOHANNE MAINVILLE, j.c.s.

______________________________________________________________________

 

 

SUCCESSION D’EISIG ROSSDEUTSCHER,

HEDY BLANK,

RAPHAEL ROSSDEUTSCHER,

demandeurs INTIMÉS

 

c.

 

ORGANISATION D’ÉDUCATION ET D’INFORMATION LOGEMENT

DE CÔTE-DES-NEIGES (ŒIL),

CLAUDE DAGNEAU,

défendeurs REQUÉRANTS

et

Me JESSICA ANN LIPES,

défenderesse

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

(Requête de l’ŒIL et de Claude Dagneau en rejet d’une requête

introductive d’instance pour abus de procédure,

article 54.1 C.p.c.)

______________________________________________________________________

 

 

1.         INTRODUCTION

[1]           Le Tribunal doit disposer d'une requête des défendeurs-requérants, l'Organisation d'éducation et d'information logement de Côte-des-Neiges (« ŒIL ») et Claude Dagneau (« Dagneau ») ou (« les requérants ») en rejet de la requête introductive d'instance ré-ré-amendée des demandeurs-intimés (« intimés »).

[2]           Les requérants plaident que l'action des intimés est manifestement non fondée, déraisonnable et abusive et en demande le rejet. Ils recherchent également des dommages et intérêts, dommages moraux et dommages punitifs. Subsidiairement, ils demandent au Tribunal l'attribution d'une provision pour frais.

[3]           La codéfenderesse Me Jessica Lipes n'est pas partie à la requête en rejet.

2.         LES PARTIES

[4]           L'OEIL est un organisme à but non lucratif existant depuis 1971 et incorporé en 1983 sous la partie III de la Loi sur les compagnies[1]. Il est financé par Centraide et le Secrétariat à l'action communautaire autonome[2].

[5]           La mission principale de l'OEIL est de promouvoir l'amélioration des conditions de logement des personnes défavorisées du quartier Côte-des-Neiges, un quartier fortement multiethnique, par le biais de programmes d'information et d'éducation, la distribution de publication et l'organisation d'activités permettant de mettre en œuvre cette mission[3]. L’organisme veille à lutter contre la détérioration des logements et de la pauvreté[4].

[6]           L'OEIL a quatre employés et des bénévoles.

[7]           Dagneau, âgé de 70 ans, œuvre depuis 30 ans dans le milieu communautaire notamment à la défense des droits des locataires. Il est le coordonnateur de l'OEIL depuis 1978 et participe activement aux activités de l'organisme. Notamment, il fait du porte-à-porte dans les immeubles à logements de Côte-des-Neiges, dont ceux des intimés, afin d'informer les locataires de leurs droits en matière de logement et distribue des feuillets d'information. Il assiste également ceux-ci dans leur demande auprès de la Régie du logement et agit comme témoin lorsque nécessaire.

 

[8]           La codéfenderesse, Me Lipes, est avocate et représente régulièrement les locataires du quartier Côte-des-Neiges.

[9]           Les intimés sont propriétaires d'immeubles à logement situés à Côte-des-Neiges. Plus spécifiquement, la Succession d'Eisig Rossdeutscher est propriétaire d'immeubles situés aux 3275[5] et 3380[6] avenue Barclay et 5575 avenue Victoria[7]. Elle est aussi copropriétaire avec Hedy Blank du 3265 avenue Barclay[8].

[10]        Eisig Rossdeutscher est décédé le 11 juillet 2010[9]. Hedy Blank est la seule légataire universelle et liquidatrice de la Succession d'Eisig Rossdeutscher[10].

[11]        Raphael Rossdeutscher est propriétaire des immeubles à logement situés aux 3240 et 3250 avenue Barclay[11].

3.         LE CONTEXTE

[12]        Considérant faire l'objet de propos diffamatoires, d'insinuations, d'accusations ainsi que d'actes malveillants et illégaux de la part des défendeurs portant atteinte à leur réputation, leur dignité et leurs droits fondamentaux, le 9 novembre 2012, les intimés déposent au greffe de la cour une requête introductive d'instance en dommages contre les défendeurs de huit paragraphes, par laquelle ils recherchent leur condamnation conjointe et solidaire à leur payer une somme de plus de 11 M$.

[13]        Vers le 17 décembre 2012, les intimés amendent une première fois leur requête portant celle-ci à 223 paragraphes. Le montant en dommages est réduit à 5 650,400 $, à savoir :

·        2 850,000 $ réclamés par la succession d'Eisig Rossdeutscher;

·        2 350,000 $ réclamés par Hedy Blank;

·           450 400 $ réclamés par Raphael Rossdeutscher

[14]        Plus spécifiquement, ces montants, dont certains sont à parfaire, se détaillent comme suit :

 

Pour la succession d'Eisig Rossdeutscher:

·         1 000,000 $ pour perte de revenus sur ses immeubles due à la conduite malicieuse des défendeurs durant la période de mai 1999 à ce jour;

·         500 000 $ à titre de dommages pour atteinte à la réputation de feu Eisig Rossdeutscher à titre de locateur et pour diffamation incluant atteinte à sa dignité, son honneur et sa réputation;

·         500 000 $ à titre de dommages pour harcèlement et abus de droit;

·         250 000 $ à titre de troubles et inconvénients;

·         300 000 $ en dommages moraux vu la violation intentionnelle et illégale des défendeurs des droits et libertés protégés et garantis par la Charte des droits et libertés du Québec de la Succession;

·         300 000 $ en dommages punitifs vu la violation intentionnelle et illégale des défendeurs des droits et libertés protégés et garantis par la Charte des droits et libertés du Québec de la Succession.

Pour Hedy Blank

·         500 000 $ pour perte de revenus sur ses immeubles due à la conduite malicieuse des défendeurs durant la période de mai 1999 à ce jour;

·         500 000 $ à titre de dommages pour atteinte à sa réputation à titre de locateur et pour diffamation incluant atteinte à sa dignité, son honneur et sa réputation;

·         500 000 $ pour harcèlement et abus de droit;

·         250 000 $ à titre de troubles et inconvénients;

·         300 000 $ en dommages moraux vu la violation intentionnelle et illégale des défendeurs de ses droits et libertés protégés et garantis par la Charte des droits et libertés du Québec;

·         300 000 $ en dommages punitifs vu la violation intentionnelle et illégale des défendeurs de ses droits et libertés protégés et garantis par la Charte des droits et libertés du Québec.

Pour Raphael Rossdeutscher

·         50 400 $ pour perte de revenus sur ses immeubles due à la conduite malicieuse des défendeurs durant la période d'octobre 2011 à ce jour;

·         100 000 $ à titre de dommages pour atteinte à sa réputation à titre de locateur et pour diffamation incluant atteinte à sa dignité, son honneur et sa réputation;

·         100 000 $ pour harcèlement et abus de droit;

·         100 000 $ à titre de troubles et inconvénients;

·         50 000 $ en dommages moraux vu la violation intentionnelle et illégale des défendeurs de ses droits et libertés protégés et garantis par la Charte des droits et libertés du Québec;

·         50 000 $ en dommages punitifs vu la violation intentionnelle et illégale des défendeurs de ses droits et libertés protégés et garantis par la Charte des droits et libertés du Québec;

[15]        La requête introductive d'instance est ré-amendée le 13 février 2013 et ré-ré amendée le 3 février 2014.

[16]        Selon les intimés, les défendeurs ont agi et continuent d’agir avec témérité, imprudence et dans l'intention de leur nuire, et ce, malgré l'institution de l'action.

[17]        Dans leur requête introductive d'instance, les intimés allèguent que vers le mois de mai 1999, ils ont noté la présence d'un homme suspicieux à l'intérieur des immeubles situés aux 3265 et 3275 avenue Barclay, lequel a refusé de s'identifier et d’expliquer les raisons de sa présence répétée dans ces immeubles. Ils ont par la suite découvert que cet homme était Dagneau. [12]

[18]        Les reproches qualifiés de fautes et d'actes illégaux allégués contre les défendeurs sont nombreux. Notamment, on lit ce qui suit :

22. THAT since that day [May 1999] Co-defendant, Claude Dagneau embarked on a deliberate, intentional and calculated campaign to disturb, upset, discredit and frustrate the late Eisig Rossdeutscher and his sons and to further damage the late Eisig Rossdeutscher’s reputation and to further sever and irreversibly damage the Landlord-Tenant Relationship which the late Eisig Rossdeutscher has worked so hard to cultivate over the years;

23. THAT Co-defendant, Claude Dagneau began an intentional and calculated campaign of harassement and defamation on the late Eisig Rossdeutscher and his sons, by intentionally and maliciously discrediting and sullying the late Eisig Rossdeutscher and his sons and by creating a hostile environment of mistrust and fear amongst tenants with whom the late Eisig Rossdeutscher and his sons previously had good relations;

24.  THAT Co-defendant, Claude Dagneau served himself of Co-Defendant, OEIL, to carry out his deliberate, malicious, intentional and calculated actions against the late Eisig Rossdeutscher and his sons;

(...)

26         THAT Co-defendant, Claude Dagneau embarked on an unlawful and abusive identification campaign of Plaintiffs’ tenants, by proceeding to regular and daily unlawful and abusive canvasses of Plaintiffs’ properties with the sole objective of unduly and without right identifying each and every tenant living in Plaintiff’s property, the whole for the sole purpose of soliciting clients for his organisation Co-Denfendant OEIL;

(...)

50.        THAT in fact, Co-Defendant, Me Jessica Lipes, negligently worked hand in hand with Co-Defendants, Claude Dagneau & OEIL and took instructions from Co-Defendants, Claude Dagneau & OEIL and negligently represented every tenant solicited and recruited by Co-Defendants, Claude Dagneau & OEIL before the Rental Board,without validating facts with tenants and by solely relying on facts advanced by Co-Defendant, Claude Dagneau;

51.        THAT Co-Defendants, Claude Dagneau & OEIL further worked hand in hand with Co-Defendant, Me Jessica Lipes and further prepared and transmitted applications, amendments and notices to the Rental Board on behalf of Co-Defendant, Me Jessica Lipes, the whole as more fully appears from copy of a fax transmission sheet emanating from Co-Defendant, OEIL and signed by Co-Defendant, Claude Dagneau, communicated and filed herewith as EXHIBIT P-15;

52.        THAT at all times relevant, Defendants, Claude Dagneau & OEIL intentionally and maliciously acted in bad faith and in an abusive, excessive and unreasonable manner against Plaintiffs and Co-Defendant, Me Jessica Lipes further turned a blind eye to Defendants". Claude Dagneau and OEIL's intentional and malicious stratagem, the whole contrary to the requirements of good faith and therefore unduly prejudicing Plaintiffs in a irremediable manner;

53.        THAT Defendants, Claude Dagneau & OEIL constantly sought out and continue until this day to intentionally and maliciously incite Plaintiffs' tenants to defy Plaintiffs by not paying their rent and to take action against Plaintiffs;

54.        THAT Defendants further continue to seize any opportunity to act as a          catalyst to continue their intentional and malicious campaign of harassment against Plaintiffs;

[19]        S'ensuit une longue description, souvent répétitive, des nombreux agissements intentionnels, malveillants, malicieux et dans le but de nuire qu'auraient commis et continueraient de commettre les défendeurs que l'on peut résumer comme suit :  

a)    La présence de Dagneau dans leurs immeubles locatifs sans que celui-ci s’identifie aux membres de la famille Rossdeutscher (par. 17 à 21), sa persistance à violer leurs propriétés («…on a daily basis…with no color of right illicitly trespassed onto Plaintiffs’ properties..»), et ce, sur une base continue (par. 27, 32, 33) et son refus de quitter les lieux malgré leurs demandes (par. 29 à 31);

b)    La sollicitation porte-à-porte aux locataires habitant leurs immeubles dans le but d’inciter ceux-ci à retenir leurs loyers et à en les encourager à prendre des actions frivoles et dilatoires devant la Régie du logement (par. 27 à 29, 31, 37, 38, 40, 42 et 45);

c)    La confection et la distribution de brochures dans leurs immeubles (par. 28, 166 à 194);

d)    Le harcèlement de Dagneau auprès des locataires (par. 34) et des défendeurs à l’encontre des intimés (par.54);

e)    Le dépôt par Dagneau de plaintes auprès de la division des inspections et permis de la Ville de Montréal obligeant ainsi les demandeurs à se plier aux nombreuses visites des inspecteurs (par. 38);

f)     Les manœuvres de Dagneau visant à encourager les locataires à se plaindre des conditions de leur logement et ses initiatives visant à les organiser entre eux contre les locateurs, à les discréditer auprès des locataires (par.34, 35, 39, 41, 43), à inciter ces derniers à ne pas payer leur loyer (par. 53);

g)    Les manœuvres et initiatives de Dagneau et l’ŒIL visant à décourager les locataires potentiels à louer un logement dans les immeubles des demandeurs. À cet égard, le paragraphe 44 se lit comme suit :

44. THAT Co-Defendant, Claude Dagneau and other associates of Co-Defendant, OEIL, intentionally, maliciously and methodically stood outside Plaintiffs' properties and discouraged potential tenants from noting posted rental information or from communicating with Plaintiffs for the rental of vacancies, the whole as to be more fully demonstrated as the trial herein.

h)    Les faux témoignages de Dagneau à la Régie (par. 45);

i)     L’embauche par Dagneau et l’ŒIL de Me Lipes, afin de les aider à atteindre leurs objectifs (par. 46 et 47,) laquelle a choisi de fermer les yeux devant les actions intentionnelles et malicieuses de ceux-ci (par. 48 à 52,), agi de façon négligente en représentant des locataires devant la Régie et contraire aux règles d’éthique et commis des actes illégaux et frauduleux (par. 49, 50, 119 à 130);

j)      Les manipulations des défendeurs et notamment de Dagneau quant aux locataires suivants :

·        Jeanne Mukarukundo, représentée par Me Lipes, encouragée par Dagneau à occuper les lieux loués malgré l’ordonnance d’éviction de la Régie pour non-paiement de loyers, à faire un faux témoignage devant la Régie et a réclamé des dommages, alors que le commissaire a jugé son témoignage invraisemblable (par. 56 à 78);

·        Nazrel Islam (par. 79 à 109 et 157.33) que Dagneau a encouragé à ne pas payer son loyer, alors qu’il était un bon locataire depuis 10 ans, ce qui a obligé Eisig Rossdeutscher a demandé la résiliation de son bail et une ordonnance d’expulsion. Dagneau et l’ŒIL ont alors intenté diverses procédures devant la Régie, accusé le locateur de forger la signature du locataire dans une entente, élaboré un stratagème avec Me Lipes pour gagner du temps empêchant la relocation du logement à un tiers faisant en sorte de maintenir le locataire cinq mois de plus dans son logement (…Defendants plotted, directed and modified said tenant’s false position and pretention before the Rental Board), alors que finalement le locataire a été jugé non crédible par la commissaire (par. 80 à 113);

·        Mirian Pinto, une nouvelle immigrante que les défendeurs auraient encouragé à résilier son bail signé avec Raphael Rossdeutscher, laquelle, allègue-t-on, a quitté les lieux loués au mois de mai 2012 sans payer le reste de son bail à la suite des conseils des défendeurs. (par. 131 à 143);

·        Emetheria Larosa laquelle, aussitôt après avoir signé son bail avec Raphael Rossdeutscher en juin 2012, a été encouragée par Dagneau et l’ŒIL a porté plainte au locateur contre les conditions de son logement, notamment la présence de vermine, et à ne pas payer son loyer. Le locateur a mandaté un exterminateur qui n’a pu pénétrer dans le logement, la locataire lui ayant refusé l’accès. Mme Pinto a par la suite refusé de renouveler son bail. (par. 145 à 152);

·        Giuseppe Gagliano qui, en novembre 2012, a transmis une mise en demeure à l’intimée Hedy Blank l’avisant de l’absence d’accessoires dans la salle de bain, de présence de moisissure et de souris dans son logement et lui demandant de rectifier la situation dans les 10 jours. Gagliano aurait par la suite avisé Mme Blank qu’il avait agi sous la pression de Dagneau et l’ŒIL qui lui ont fait miroiter une baisse de loyer. (par.153 à 155);

·        Également, aux paragraphes 39 à 41 qui référent aux pièces P-10 à P-12, il est fait état d'une dizaine de locataires qui ont déposé des plaintes au locateur ou à la Régie en 2002, 2005, 2006 et 2008 à propos de l'état de détérioration de leur logement, de la présence de moisissure et de vermine, et dont certains ne se sont pas présentés à la Régie lors de l'audience ou se sont désistés en cours de route de leur demande.

k)    La création par Dagneau et ŒIL d’un environnement de méfiance et de peur chez les locataires (par. 133).

l)      La poursuite des défendeurs de leurs actions et agissements malicieux et intentionnels malgré l’institution des procédures (par. 156. à 157.1) et notamment à l’égard des locataires suivants :

·        Mashud Rana, lequel a signé un bail avec Hedy Blank pour un an au mois de février 2013. Après avoir payé son loyer pendant trois mois sans se plaindre, il a demandé une diminution de loyer et refusé de payer son loyer après avoir été sollicité par Dagneau et l’ŒIL. Au lieu d’accepter la proposition à l’amiable offerte par le locateur de mettre fin au bail, le locataire, sous l’influence malveillante des défendeurs, a obligé le locateur a prendre des procédures en résiliation de bail et expulsion devant la Régie. Le locataire a continué à occuper les lieux loués sans payer. Devant la multiplication des procédures de l’ŒIL et Dagneau, Hedy Blank s’est désistée de sa demande originale et déposé une nouvelle demande d’expulsion à la Régie sur la base de six mois de loyers impayés (par. 157.4 à 157.34).

·         Marcella Madaire, qui a signé un bail d’un an en octobre 2013 avec Hedy Bank, a été immédiatement contactée par Dagneau et l’ŒIL, puis a avisé le locateur de tous les problèmes dans son logement aussi mineurs soient-ils. Après discussion avec le locateur, elle s’est désistée de sa demande et avisé celui-ci qu’elle avait agi sous l’influence de Dagneau et l'OEIL (par. 157.43 à 157.46.27).

[20]        Les intimés dénoncent également les avis laissés par Dagneau et ŒIL aux locataires, lesquels s'inscrivent dans la campagne d’intimidation et de diffamation menée par ceux-ci et n'auraient été découverts qu'au mois de mai 2012. Ces avis se lisent comme suit (par 159 à 196) :

7 décembre 2006

Au locataire de Eisik Isak Rossdeutscher,

Cet avis vous parvient de l’association des locataires de Côte-des-Neiges (ŒIL). Ce propriétaire est connu comme étant un propriétaire des taudis qui ne s’occupe pas de ses propriétés et qui ne respecte pas ses locataires. Nous aidons présentement des locataires qui ont des problèmes avec ce propriétaire, lorsqu’il refuse d’exécuter en nature ses obligations. Si vous avez des problèmes tels que l’insuffisance de chauffage, infiltration d’eau, moisissure, présence de vermine (souris, blattes…), s’il-vous-plaît, n’hésitez pas à nous contacter afin que nous puissions vous informer de vos droits et de vos recours contre Eisig Isak Rossdeutscher[13].

23 juin 2008

Au locataire de Eisig Isak Rossdeutscher,

Cet avis vous parvient de l’association des locataires de Côte-des-Neiges (ŒIL). Nous vous recommandons de ne jamais payer votre loyer sans demander un reçu en échange. Nous aidons présentement des locataires qui ont des problèmes avec ce propriétaire puisqu’ils n’ont pas de preuve de paiement. Soyez prudent et n’acceptez jamais de payer sans demander un reçu.

Si vous avez des questions, s’il-vous-plaît, n’hésitez pas à nous contacter au 514 738-0101.[14]

3 juillet 2008

Au locataire du 3380 Barclay, apt 2

Cette lettre vous parvient du Projet Nord-Est. En avril, nous avons fait du porte-à-porte dans votre immeuble et vous avez signé une lettre soulignant la présence de vermine dans votre logement (ci-joint). Malheureusement, nous avons eu beaucoup de difficulté à rejoindre tous les locataires de l’immeuble et jusqu’à présent, nous n’avons eu que trois signatures. Nous allons retourner dans l’immeuble une dernière fois afin de pouvoir en récolter d’autres et nous enverrons la lettre tout de suite après. La mise en demeure sera envoyée par huissier à votre propriétaire. Nous sommes désolés des inconvénients que cela a pu vous occasionner.

(..)[15]

15 juillet 2008

Nous vous invitons à une réunion d’information au sujet de l’inspection municipale qui aura lieu dans vos immeubles. Nous désirons, de plus, discuter de l’insalubrité dans les logements et des reçus de loyer (quand vous payez en argent comptant).

Nous pensons que cette rencontre est très importante pour vous. Nous pourrons alors vous communiquer de l’information que vous n’avez pas et vous pourrez ainsi décider de manière éclairée des moyens à prendre pour qu’on cesse de vous manipuler.

La réunion aura lieu dans notre local (..)[16].

29 janvier 2009

Au locataire de Eisig Isak Rossdeutscher,

Cet avis vous parvient de l’association des locataires de Côte-des-Neiges (ŒIL). Nous avons remarqué  que Mr. Eisig Isak Rossdeutscher ou ses représentants ont rempli des formulaires de désistement en imitant les signatures de ses locataires à la Régie du logement. Nous vous recommandons de faire le suivi de vos demandes contre ce propriétaire jusqu’à l’obtention de votre date d’audience. Nous aidons présentement les locataires qui étaient victimes de fraude de Mr. Eisig Isak Rossdeutscher ou ses représentants[17].

(..)

(Caractère gras dans les avis)

[21]        Selon les allégations de la requête des intimés, Eisig Rossdeutscher était connu comme a « landlord with a heart »[18], un locateur qui « often accepted late rental payments, gave second chances to defaulting tenants and provided shelter to individuals »[19], et qui « had on many occasion sheltered families or individuals for extended periods without collecting any rentals »[20].

[22]        Il est à noter que la requête introductive d’instance ré-ré amendée contient maintenant 296 paragraphes et 68 pièces[21]. Près de 170 paragraphes décrivent les problèmes vécus avec sept locataires. 

[23]        Par ailleurs, la défense n'a pas encore été produite.

[24]        Dagneau et un représentant de l'OEIL ont signé un affidavit au soutien de la requête en rejet et ont été interrogés par le procureur des intimés. Le 23 octobre 2013, le juge Michaud a accueilli les 87 objections soulevées par les requérants, le tout avec dépens.

[25]        Enfin, le 20 février 2014, au cours du délibéré, le procureur des intimés a transmis au Tribunal par courriel les documents suivants: Re-Re-Re-Amended Motion to institute proceedings, Re-Re-Re-amended list of exhibits et Exhibits P-45.10.1 à P-45.10.5.

[26]        Le 27 février 2014, le Tribunal a avisé celui-ci que comme la preuve est close et que la cause est en délibéré, si l'intention des intimés est d'introduire ces documents, ils doivent produire une requête en suspension du délibéré et en réouverture d'enquête.

[27]        Le 3 mars 2014, les intimés ont informé le Tribunal de leur intention de produire une telle requête, ce qu'ils ont fait le 11 mars 2014. Le 18 mars, le Tribunal a suspendu le délibéré jusqu'à la date de la présentation de la requête des intimés.

[28]        La requête des intimés a été entendue le 1er avril 2014. Le 3 avril, le Tribunal a rejeté celle-ci au motif que les nouveaux éléments de preuve que désiraient introduire les intimés n'auraient pas une influence déterminante sur le jugement à venir.

4.         LE DROIT APPLICABLE

[29]        Les requérants fondent leur requête sur les dispositions des articles 54.1 à 54.4 C.p.c. Dans l'affaire Thériault-Martel c. Savoie[22] notre collègue, le juge Gary D.D. Morrison, a eu l'occasion de résumer les principes applicables en matière de requête en rejet en vertu de l'article 54.1, notamment dans le cadre d'une poursuite-bâillon. Le Tribunal adopte mutadis mutantis ceux-ci aux fins de la présente analyse. Il écrit:

[18]       Lesdits articles sont entrés en vigueur en 2009[23]. Comme dit le nom de la loi, l’objectif du législateur québécois est de prévenir l’utilisation abusive des tribunaux et favoriser le respect de la liberté d’expression et la participation des citoyens aux débats publics. Le préambule de la loi se lit ainsi :

CONSIDÉRANT l’importance de favoriser le respect de la liberté d’expression consacrée dans la Charte des droits et libertés de la personne;

CONSIDÉRANT l’importance de prévenir l’utilisation abusive des tribunaux, notamment pour empêcher qu’ils ne soient utilisés pour limiter le droit des citoyens de participer à des débats publics;

CONSIDÉRANT l’importance de favoriser l’accès à la justice pour tous les citoyens et de veiller à favoriser un meilleur équilibre dans les forces économiques des parties à une action en justice.

[19] Cet objectif vise à répondre au phénomène des poursuites stratégiques contre la mobilisation publique, connues dans le monde de la common law comme des poursuites « slapp » et au Québec, les poursuites-bâillon.

[20]       Les poursuites-bâillon visent à restreindre, dans le contexte des débats publics, l’exercice des droits fondamentaux, notamment, la liberté d’expression et d’association.

[21]       Cela dit, pas toutes poursuites dans le contexte des débats publics ne devraient être considérées comme une poursuite-bâillon.

[22]       Le débat public, une pierre angulaire des sociétés démocratiques, met en confrontation des droits fondamentaux des intervenants. Au Canada et au Québec, ces droits sont protégés par la Charte fédérale et la Charte provinciale :

·         Charte canadienne des droits et libertés[24] :

L’article 2 : Chacun a les libertés fondamentales suivantes : b) liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication;

·         Charte des droits et libertés de la personne[25] :

L’article 3 : Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté d'expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d'association.

L’article 4 : Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.

[23]       Dans le présent cas, le débat juridique se traduit par l’analyse de la liberté d’expression et la liberté d’association de martel et le droit à la réputation de savoie. Les droits de l’un, méprisent-ils les droits de l’autre?

[24]       Cela dit, le Tribunal n’a pas au stade préliminaire à trancher le fond de litige, tel que nous l’enseigne la Cour d’appel[26].

[25]       De plus, étant donné les conséquences sérieuses constituant la sanction de rejet d’un recours juridique au stade préliminaire, le juge doit faire preuve d’une grande prudence avant de déclarer le rejet[27].

[26]       Une telle prudence ne veut pas dire, par contre, que le Tribunal devrait être privé du pouvoir octroyé par le législateur « lorsqu’il estime que les conditions d’un tel rejet sont remplies »[28]. Autrement dit, la prudence n’équivaut pas à l’impuissance. L’objectif établi par la législature québécoise doit être respecté, le tout selon les conditions énoncées par la loi.

[30]        Sur le fardeau de la preuve au stade préliminaire, le juge Morrison résume le droit applicable comme suit :

[27]       Sur qui repose le fardeau de la preuve pour établir qu’il s’agit d’une demande en justice abusive et, donc, qu’une des sanctions prévues aux articles 54.3 et 54.4 C.p.c. soit prononcée par le Tribunal?

[28]       Selon l’article 54.2 C.p.c., le requérant doit établir « sommairement » que la procédure en question « peut » constituer un abus.

[29]       Le mot « sommairement », selon l’enseigne de la Cour d’appel[29], veut dire, dans son sens usuel, « brièvement, promptement, sans les formalités de l’enquête et de l’instruction au fond ».

[30]       Si le requérant établit sommairement que le recours peut constituer un abus, et non pas qu’il est actuellement abusif, le fardeau de la preuve est renversé et le demandeur se voit obligé de démontrer que son recours n’est pas exercé d’une manière excessive ou déraisonnable et se justifie en droit.

[31]       Donc, le requérant n’est pas obligé de démontrer que le recours du demandeur est abusif pour permettre au Tribunal de conclure qu’il s’agit d’un cas d’abus qui justifie une sanction, notamment le rejet de la demande en justice.

[32]       Dans le cas où le Tribunal n’est pas en mesure de conclure que le recours est abusif, mais qu’il « paraît y avoir un abus », le Tribunal, selon le deuxième alinéa de l’article 54.3 C.p.c., peut imposer d’autres sanctions destinées au déroulement équitable de la demande.

[31]        Quant à l'action en diffamation, le juge Morrison écrit ce qui suit:

[33]       Le fondement du recours diffamatoire au Québec se trouve aux règles générales applicables en matière de responsabilité civile[30]. L’article 1457 C.c.Q. établit les trois éléments essentiels, soit l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité.

[34]       Donc, pour réussir, le demandeur doit établir non seulement qu’il existe des propos diffamatoires, mais il doit démontrer que l’auteur des propos a commis une faute[31]. Deux types de conduite fautive sont reconnus, l’un malveillant qui comporte l’intention de nuire, et l’autre simplement négligent qui ne comporte pas une telle intention[32]. Ce n’est pas nécessaire que les propos désagréables soient faux. Même les propos véridiques peuvent constituer une faute s’ils sont diffusés sans intérêt public ou pour des raisons injustifiées ou malicieuses[33].

[35]       De plus, même si une faute est établie, ce n’est pas suffisant pour permettre au Tribunal de présumer l’existence d’un préjudice susceptible de réparation[34]. Les dommages et le lien de causalité devront également être établis.

[36]       Cela dit, le Tribunal considère que ce n’est pas nécessaire au stade préliminaire d'analyser tous les éléments qui impliquent l'action en diffamation. Il suffit de reconnaître les principes élémentaires d’une telle action et, de plus, de savoir que l’évolution du domaine de diffamation est liée étroitement à l’analyse de la coexistence des droits fondamentaux des parties.

[32]        Quant au recours pour abus et harcèlement, il nécessite tout autant la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité.

[33]        Dans Dalla Riva[35], la Cour d’appel, sous la plume du juge Vézina, traite des articles 54.1 et ss. C.p.c. et fait la distinction entre l'action qui parait manifestement mal fondée et les poursuites-bâillons:

 [20]      Les nouvelles dispositions poursuivent deux objectifs qui n’y sont pas nettement scindés, soit de prévenir les poursuites-bâillons, d’une part, et de sanctionner les abus de procédure, d’autre part.

Les poursuites-bâillons

[21]       Qu’est-ce qu’une poursuite-bâillon? Désignée en anglais par l’acronyme SLAPP pour Strategic lawsuit against public participation[36] :

[…] la notion de poursuite stratégique, ou poursuite-bâillon, présente des caractéristiques plus générales. Il s’agit, pour l’essentiel, 1) de poursuites judiciaires 2) entreprises contre des organisations ou des individus 3) engagés dans l’espace public dans le cadre de débats mettant en cause des enjeux collectifs, 4) et visant à limiter l’étendue de la liberté d’expression de ces organisations ou individus et à neutraliser leur action 5) par le recours aux tribunaux pour les intimider, les appauvrir et les détourner de leur action.

(…)

 [23] Notons que la dernière partie de cette description [art. 54.1 C.p.c.] renvoie aux poursuites-bâillons qui, bien sûr, constituent elles-mêmes des abus de procédure.

[37] L'utilité et la nécessité des nouvelles dispositions se comprennent bien pour contrer efficacement les poursuites-bâillons. Elles sont un peu moins évidentes en rapport avec le second objectif de la nouvelle loi, celui de contrer de manière générale les abus de procédure de toutes autres sortes.

Les autres abus de procédure

[38] Si une intervention rapide du tribunal est essentielle dans un cas de poursuite-bâillon, elle n'est tout de même pas aussi nécessaire, bien qu'utile, dans les cas où une action parait «manifestement mal fondée» - une norme exigeante - frivole ou dilatoire.

[39] Ni la liberté d'expression ni le débat démocratique ne sont en jeu. Certes, il est toujours désagréable d'être poursuivi et d'avoir à se défendre, mais le poids de ces inconvénients n'est rien comparé à la chape de plomb résultant du bâillon.

(…)

[68]       Confrontés à une poursuite-bâillon, ils doivent intervenir sans délai, mais dans le cas d’actions traditionnelles où il n’y a pas d’urgence, ils doivent se hâter lentement.

5.         QUESTIONS EN LITIGE

[34]        Aux fins de la Requête en rejet, les questions en litige sont les suivantes :

1)    Les requérants ont-ils établi que la demande en justice des intimés est manifestement mal fondée?

2)    Les requérants ont-ils établi sommairement que ladite demande en justice peut constituer un abus?

3)    Dans l'affirmative, les intimés ont-ils démontré que leur recours n'est pas exercé de manière excessive ou déraisonnable ou qu'il ne constitue pas un détournement des fins de la justice selon l'article 54.1 C.p.c.?

4)    Dans la négative, s'agit-il d'un abus qui mérite une sanction et dans l'affirmative quelle est la sanction appropriée?

6.         ANALYSE

5.1.1     Les requérants ont-ils établi que la demande en justice des intimés est manifestement mal fondée?

[35]        Selon les requérants, l'action en dommages est manifestement mal fondée. Ils plaident qu'aucune faute n'a été commise par les défendeurs et, si faute il y a, elle est invraisemblable et farfelue, car les activités d'information, d'aide et de sollicitation de l'OEIL et de Dagneau sont tout à fait légitimes. Au surplus, il y a absence d'explication quant au quantum et absence de lien causal avec les prétendues fautes alléguées.

[36]        Les tribunaux ont reconnu la légalité des moyens d'expression tels l'affichage et la distribution de brochures, fussent-elles pamphlétaires[37]; que la liberté de s'exprimer sur des questions d'intérêt public ainsi que le droit de diffuser des nouvelles et des renseignements et d'exprimer des opinions sur des questions d'intérêt public sont considérés comme des droits fondamentaux[38]; et le principe voulant que l'occupant d'une maison soit réputé consentir l'autorisation à tout membre du public de s'approcher de sa porte et d'y frapper dans un but licite[39].

[37]        Au surplus, la Cour supérieure a déjà rendu une décision dans un litige intenté contre l'OEIL et Dagneau où un locateur cherchait notamment une ordonnance afin d'empêcher ce dernier de se présenter dans sa bâtisse. Le juge Gomery rejeta cette demande aux motifs suivants [40]:

Il n'y a absolument aucune raison pourquoi M. Dagneau serait empêché de faire quoi que ce soit. À ce niveau-là, M. Dagneau représente ou est l'employé d'une organisation des gens de la communauté autour de cette bâtisse, et je n'ai aucun indice qu'il ne fait pas son travail d'une façon légale et permissible.

Alors, il n'y a pas d'illégalité pratiquée. Au contraire, c'est M. Di Giambattista qui refuse de comprendre une obligation élémentaire dans notre société, l'obligation élémentaire d'un locateur de garder ses logements loués à ses locataires dans un état de réparations acceptables. (…).

[38]        En l'espèce, à ce stade des procédures, le Tribunal n'est pas en mesure de conclure qu'il y a absence de faute.

[39]        Les demandeurs allèguent que dans l'exercice de leurs activités les défendeurs agissent de mauvaise foi, manipulent les locataires, leur proposent des stratagèmes pour tromper et induire en erreur la Régie du logement et l'arrondissement municipal, etc.

[40]        De plus, dans la multitude de reproches faits aux défendeurs, se trouvent notamment deux avis dans lesquels l'OEIL qualifie Eisik Isak Rossdeutscher de personne « connu[e] comme propriétaire de taudis » et de « fraudeur ». Ces avis sont directement adressés aux locataires d'Eisik Rossdeutscher.

[41]        Par ailleurs, les paragraphes 9 à 16 de la requête introductive d’instance traitent du caractère et de la réputation d'Eisik Rossdeutscher. Il y est décrit comme un homme généreux, patient avec ses locataires, toujours prêt à aider ceux-ci et qui prenait grand soin de ses propriétés. Cela peut en quelque sorte servir à justifier les dommages moraux et punitifs recherchés. Encore là, la preuve devra en être faite.

[42]        Il faut toutefois noter que les pièces R-6 à R-9 produites au soutien de la requête en rejet tendent à prouver le contraire de ces allégations.

[43]        De plus, il n'y a aucun détail ou exemple de la façon dont la réputation et la crédibilité des deux autres intimés sont atteintes par les agissements des défendeurs.

[44]        Également, les intimés allèguent que les avis, lettres et documents distribués par les défendeurs :

« completely discredit Plaintiffs before the tenants, without regard of the detrimental effect of their actions on Plaintiffs' tenants and to further ensure that Plaintiffs completely lose esteem and consideration of all their tenants and to further falsely put all of Plaintiffs' tenants on guard against Plaintiffs, the whole to specifically and calculatively falsely manipulate the trust of tenants and to obtain said tenants as clients for Co-Defendant, OEIL. »

(Caractère gras ajouté par le Tribunal)

[45]        Toutefois, la pièce P-45.16 jointe à la requête introductive d'instance des intimés est un affidavit de la locataire Madaire affirmant avoir été manipulée par Dagneau et l'OEIL, mais « got in touch with the Ross Brothers and happily came to an agreement with them » et qu'elle est « grateful for their aid ». On peut voir là une contradiction quant aux prétendus dommages subis par les intimés.

[46]        Il est vrai que la requête introductive d’instance est davantage un long réquisitoire contre les défendeurs et que la prétendue illégalité des agissements de ceux-ci est loin d'être évidente.

[47]        À ce stade-ci, la façon dont les intimés établiront un lien causal entre les dommages et les fautes allégués est loin d'être claire. Malgré ses 296 paragraphes, la procédure est avare de précisions à cet égard. Il en est de même de la quantification des dommages.

[48]        Cela dit, on peut quand même déceler une apparence de droit. Il existe au dossier certains éléments contradictoires et il appartiendra aux intimés de faire la preuve de ce qu'ils allèguent. À ce stade-ci, alors que la défense n'est pas encore produite, il est de mise de faire preuve de prudence.

[49]        Tenant compte de l'ensemble des circonstances, le Tribunal estime que la procédure des intimés n'est pas manifestement non fondée.

5.1.2     Les requérants ont-ils établi sommairement que ladite demande en justice peut constituer un abus?

[50]        Les requérants soutiennent que la demande en justice constitue un détournement des fins de la justice. Selon eux, il s'agit d'une poursuite-bâillon visant spécifiquement à faire cesser ou restreindre leurs activités.

[51]        Dans Acadia Subaru[41], le juge Kasirer écrit ce qui suit :

[60] A finding that the principal action in defamation is not clearly unfounded in law does not preclude it from being declared improper on some other basis identified by the legislature». The authors of the report of the committee struck to advise the Minister of Justice on strategic lawsuits against public participation recommended that courts should be allowed to take remedial measures to combat abuse of process «même dans les cas où il y a apparence de droit». As noted above, this was carried forward with the enactment of distinct bases for impropriety in article 54.1, paragraphe 2 C.C.P., including «an attempt to defeat the ends of justice» (…). (références omises).

[52]        Le juge Kasirer réfère également au jugement de la Cour Suprême dans Grant c. Torstar notant que cette dernière a fourni une base assez large de la notion d’intérêt public[42]. Dans ce jugement de la Cour suprême, on lit ce qui suit[43] :

[104]      Dans London Artists, Ltd. c. Littler, [1969] 2 All E.R. 193 (C.A.), lord Denning, maître des rôles, qui traitait de la défense de commentaire loyal, a décrit l’intérêt public de façon large, en parlant de sujets qui peuvent légitimement intéresser ou préoccuper les gens :

[traduction]  Les ouvrages ne définissent pas ce qui est d’intérêt public.  On n’y trouve qu’une liste d’exemples, et la mention que la question relève du juge et non du jury.  Je pense, pour ma part, qu’il ne faut pas enfermer la notion dans des limites étroites.  Dès qu’une question touche les gens en général, à tel point qu’ils peuvent légitimement s’intéresser à ce qui se passe ou à ce qui peut leur arriver à eux ou à ce qui peut arriver à d’autres personnes, ou s’en préoccuper, cette question en est une d’intérêt public sur laquelle tout le monde a le droit de faire un commentaire loyal. [p. 198]

[53]        De plus, d’ajouter le juge Kasirer, « [t]he comments may or may not have been defamatory, but they can fairly be said to partake of a participation in «public debate » within the meaning of that term in article 54.1 C.p.c.[44] ».

[54]        Comme fardeau principal, les requérants doivent donc dans un premier temps démontrer que la restriction à leur liberté d'expression découlant de l'action des intimés a eu lieu en rapport avec un débat public.

[55]        En l’espèce, le dossier tel que constitué démontre que le recours intenté par les intimés porte sur les agissements, actions et points de vue exprimés et exercés par les défendeurs dans le cadre de leurs activités d'information et d'aide à des locataires défavorisés afin de faire valoir leurs droits en matière d'habitation. Le dossier démontre que les requérants sont engagés dans l'espace public dans le cadre de débats mettant en cause des enjeux collectifs.

[56]        De l'avis du Tribunal, les commentaires de l'OEIL dans les avis laissés aux locataires d'Eisik Isak Rossdeutscher, même à supposer qu'ils constituent une faute intentionnelle et peuvent être qualifiés de diffamatoires, se rapportent à une question d’intérêt public et s’inscrivent dans le cadre d’un débat public au sens de l'article 54.1 C.p.c..

[57]        De plus, le dossier tel qu'il apparait contient plusieurs éléments qui, lorsqu'examinés comme un tout, indiquent que la demande en justice peut être abusive.

[58]        Premièrement, bien que les intimés à ce stade-ci ne demandent pas de conclusions de nature injonctive, les paragraphes 205, 212 et 219 sont de cette nature et visent à empêcher ou restreindre les activités des défendeurs et faire taire ces derniers.

[59]        Deuxièmement, tous les actes, paroles, agissements reprochés à Dagneau et allégués dans l'action des intimés ont été commis dans le cadre de son travail au sein de l'OEIL.

[60]        Troisièmement, le montant des dommages recherché parait démesuré et arbitraire[45]. Nous y reviendrons.

[61]        Quatrièmement, il y a une inégalité de forces économiques entre les intimés et les requérants. L'OEIL est un organisme à but non lucratif disposant d'un budget annuel de 186 636 $ et les états financiers présentent un bilan déficitaire[46].

[62]        Le salaire annuel de Dagneau au sein de l’ŒIL est de 43 833 $, somme à laquelle s'ajoutent d'autres sources de revenus d'environ 6 800 $[47] en pension de retraite et revenus de placements. Il doit, à même cette somme se loger, se nourrir et se déplacer.

[63]        Les requérants ne sont pas admissibles à l'aide juridique[48] et font face à trois intimés qui ont des moyens plus assurés que les leurs, étant notamment propriétaires de plusieurs immeubles à revenus, d'une valeur en équité d'au moins 3.2 M$[49].

[64]        Bref, selon le Tribunal, il y a suffisamment de signes pour conclure que les motifs des intimés pourraient être abusifs. La combinaison de l'ensemble des facteurs mentionnés ci-dessus démontre que les requérants ont établi sommairement le caractère abusif de la demande en justice.

5.3       Dans l'affirmative, les intimés ont-ils démontré que leur recours n'est pas exercé de manière excessive ou déraisonnable ou qu'il ne constitue pas un détournement des fins de la justice selon l'article 54.1 C.p.c.?

[65]        À cette étape-ci, les intimés ont le fardeau de démontrer que leur demande en justice n'est pas excessive et déraisonnable et qu'elle se justifie en droit. Le Tribunal doit alors examiner quelles sont les véritables intentions des intimés.

[66]        Les intimés plaident que leur recours est justifié, car ils cherchent notamment à rétablir leur réputation et être indemnisés pour les dommages causés par les défendeurs.

[67]        Le Tribunal est plutôt d'avis que la véritable intention des intimés est de limiter l'exercice par les requérants de leurs droits fondamentaux à la liberté d'expression. À cet égard, Tribunal réfère aussi aux motifs exposés dans la section précédente en plus de ce qui suit.

[68]        Premièrement, le dépôt d'une poursuite de plus de 11 M$ en novembre 2012 a été la première démarche entreprise par les intimés pour rectifier les prétendues activités illégales des défendeurs ayant débuté, selon la requête introductive d'instance, en mai 2009. S'il est exact qu'en matière délictuelle la mise en demeure n'est pas requise, on s'étonne qu'on ait attendu si longtemps pour agir considérant l'ampleur des dommages qu'on allègue avoir subis.

[69]        On n'allègue pas avoir pris d'autres recours, telles des plaintes au criminel, alors que l'on accuse Dagneau d'intrusion à la propriété privée et de parjure devant la Régie; il n'est pas allégué non plus que des plaintes auraient été déposées à l'arrondissement vu les demandes non fondées de Dagneau; il n'y a pas d'allégations de plaintes au syndic du Barreau contre Me Lipes, alors que les fautes alléguées contre elle sont nombreuses et sérieuses, soit cacher de la preuve, participer à la confection de preuve, manipuler les demandes des locataires, assumer la défense de locataires alors qu'elle sait celle-ci non fondée en faits et en droit, etc..

[70]        Deuxièmement, outre que, comme mentionné dans la section précédente, le lien causal est très tenu entre les innombrables reproches allégués dans la poursuite et les dommages subis, il n'y a aucune quantification des dommages.

[71]        Ainsi, on ne donne aucun indice ou précision du préjudice subi alors que l'on réclame des dommages de plus de 3.5 M$, en dommages punitifs, moraux et troubles et inconvénients. On peut déduire quelques justifications quant aux dommages moraux ou punitifs à l'égard de l'intimé Eisik, mais la procédure est silencieuse en ce qui concerne les deux autres intimés. Également, aucun des intimés n'allègue avoir souffert d'anxiété ou de stress découlant des actions des requérants.

[72]        Les dommages punitifs, moraux et les troubles et inconvénients réclamés sont démesurés en regard des principes et précédents jurisprudentiels en pareille matière[50].

[73]        Il n'y a aucune précision quant au montant de 1 550,400 M$ recherché pour perte de revenus. C'est une somme énorme lorsque l'on sait qu'il s'agit de logements loués à des personnes démunies. Au surplus, au niveau des dommages, on parle ici de baux annuels d'environ un an, avec des loyers d'environ 450 - 550 $ par mois. Les pièces au dossier produites par les intimés font voir des ordonnances de paiement de loyer dans un cas de 1 515 $[51], dans un autre de 800 $ [52].

[74]        Les intimés plaident qu'ils peuvent amender leur requête introductive d'instance en tout temps avant jugement. Ils pourront alors ajouter des précisions ou réduire le montant des dommages, s'ils le jugent opportun.

[75]        Or, ceux-ci ont déposé leur action il y a plus d'un an. En novembre 2012, ils demandaient plus de 11 M$ sans justification. En décembre 2012, ils ont amendé leur procédure et réduit leur réclamation à 5 650,400 $. Ils ont par la suite amendé deux fois leur procédure, sans pour autant fournir de précisions. On s'en étonne, d'autant plus que la requête comporte maintenant près de 300 paragraphes.

[76]        Après trois amendements, l'absence d'explications raisonnables et plausibles quant aux dommages recherchés alors que la somme est aussi importante tend à démontrer le caractère arbitraire de ceux-ci et peut être perçue comme un geste d'intimidation à l'égard des deux défendeurs à l’action que les intimés considèrent être des activistes.

[77]        Les demandeurs plaident que les tribunaux ont établi que le montant des dommages ne peut entraîner le rejet de l'action[53]. Si le montant de la réclamation ne peut à lui seul établir le caractère abusif des procédures, en l'espèce, il est un facteur qui s'ajoute aux autres[54] et peut tendre à démontrer la nature réelle des procédures intentées.

[78]        On ne peut nier que réclamer plus de 5 M$ de dommages à un organisme à but non lucratif et à un individu qui dispose de revenus de moins de 50 000 $ par année est susceptible d'affecter les activités de l'organisme et de bâillonner ses membres. Ici, c'est l'artillerie lourde que les intimés ont décidé de sortir, alors qu'ils connaissent les activités de l'organisme au sein de leurs immeubles depuis mai 2009.

[79]        La réclamation solidaire donne aussi une indication du caractère abusif de la procédure entreprise.

[80]        Le fait de poursuivre l’avocate Lipes est aussi un signe qui peut-être considéré comme un geste d’intimidation.

[81]        Après analyse sommaire, mais attentive et complète du dossier, le Tribunal est d'avis que le recours institué par les intimés est une poursuite-bâillon visant à faire taire les requérants.

[82]        Les intimés n'ont pas démontré que leur action n'est pas exercée de manière excessive et déraisonnable et qui se justifie en droit. Il y a ici présence de plusieurs éléments permettant de conclure que la poursuite est motivée par la volonté d’intimider les défendeurs.

5.4       Quelle est la sanction appropriée?

[83]        L'article 54.3 C.p.c. prévoit que dans le cas d'une poursuite-bâillon, la demande en justice peut être rejetée, et ce, même si elle n'est pas manifestement fondée.

[84]        Les intimés plaident que la procédure entreprise n’a pas mis fin aux activités de l’ŒIL puisque Dagneau continue ses activités dans leurs immeubles.

[85]        Les procédures n'en sont qu'à leur début. À ce jour, excluant les frais résultant de la requête en réouverture d'enquête des intimés, les requérants ont encouru 14 380 $ d'honoraires d'avocats[55], argent devant servir à des fins d'aide et d'éducation en matière d'habitation aux personnes démunies. Dagneau et les représentants de l'OEIL ont de plus consacré de nombreuses heures à préparer la présente requête et la défense à venir[56].

[86]        Pour paraphraser la Cour d'appel, sous la plume de la juge St-Pierre, dans Cooperstock c. United Air Lines inc.[57], les frais de défense à encourir et la menace, même peu probable, d'une condamnation à une somme aussi élevée, a l'effet nocif de faire taire les défendeurs et d'empêcher ou de restreindre la poursuite d'activités visant la participation citoyenne au débat public.

[16] Le seul fait d'intenter une poursuite-bâillon atteint pleinement cet objectif nocif, peu importe le maintien ou le rejet de l'action à la fin du procès, alors que deux ou trois années se seront écoulées.

[17] En ce sens, le jugement final ne pourra remédier à l'effet bâillon créé au départ. D'où la nouvelle législation pour une intervention immédiate du tribunal.

[87]        Le Tribunal a conclu à une poursuite-bâillon. La liberté d'expression et le débat démocratique sont en jeu. Un jugement final ne pourra remédier à l'effet bâillon créé au départ. Dans les circonstances du présent dossier, le remède le plus approprié est de mettre fin au recours intenté par les intimés.

7.         LA DEMANDE EN DOMMAGES

[88]        Lors des plaidoiries, les requérants ont demandé au Tribunal de réserver leurs droits quant aux dommages réclamés.

[89]        Considérant le dossier tel que constitué, il est opportun de faire droit à cette demande en accordant aux requérants un délai de 60 jours pour le faire.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL 

[90]        ACCUEILLE la requête en rejet des défendeurs-requérants l'OEIL et Claude Dagneau;

[91]        DÉCLARE abusive la requête introductive d'instance ré-ré amendée des demandeurs-intimés;

[92]        RÉSERVE les droits des défendeurs-requérants l'OEIL et Claude Dagneau de s'adresser au Tribunal par requête, dans un délai de 60 jours, pour réclamer, le cas échéant des dommages-intérêts, punitifs et moraux suite au rejet de l'action instituée par les demandeurs-intimés.

LE TOUT, avec dépens.

 

 

__________________________________

JOHANNE MAINVILLE, j.c.s.

 

 

Me Maurice Oiknine

Procureur des demandeurs INTIMÉS

 

Narang & Associés

Me Geeta Narang

Procureurs des défendeurs REQUÉRANTS

 

Mme Jo-Annie Perron, stagiaire

Fonds d’assurance responsabilité professionnelle

Procureurs de la défenderesse Me Jessica Ann Lipes

 

 

Date d’audience sur la requête en rejet :10 février 2014

 

Requête en suspension du délibéré et ré-ouverture d'enquête : 11 mars 2014

Suspension du délibéré : 18 mars 2014

Audience sur la requête en ré-ouverture d'enquête : 1er avril 2014

Jugement rejetant la requête : 3 avril 2014

 

 



[1]     R-1 et RLRQ, a. 218.

[2]     P-14.

[3]     R-2.

[4]     P-8

[5]     P-1.

[6]     P-4.

[7]     P-3.

[8]     P-2.

[9]     P-6.

[10]    P-7.

[11]    P-5.

[12]    Par. 17, 18 et 19.

[13]    P-46, avis écrit en français et en anglais.

[14]    P-47, avis écrit en français, en anglais et en espagnol. Un avis identique est aussi daté du 26 juin 2008.

[15]    P-49.

[16]    P-50.

[17]    P-51.

[18]    Requête introductive d'instance ré-ré amendée, par. 12.

[19]    Id., par. 13.

[20]    Id., par. 14.

[21]    La requête a 223 paragraphes et réfère à 52 pièces. À ceux-ci s’ajoutent les sous-paragraphes de 157.1 à 157.46 et les sous-sous paragraphes de 157.46.1 à 157.46.27 ainsi que les 16 pièces additionnelles auxquelles ils réfèrent.

[22]    Thériault-Martel c. Savoie (C.S., 2013-09-10), 2013 QCCS 4280, Requête pour permission d'appeler rejetée (C.A. 213-10-25, 2013 QCCA 1856; requête pour permission d'appeler rejetée (2013 CQQA 1858 et (C.A. 2014-02-03, QCCA 208;

[23]    Loi modifiant le Code de procédure civile pour prévenir l’utilisation abusive des tribunaux et favoriser le respect de la liberté d’expression et la participation des citoyens aux débats publics, Projet de loi Nº 9, 2009, chapitre 12, sanctionné le 4 juin 2009.

[24]    Loi constitutionnelle de 1982, 1982, ch. 11 (R.-U.), Annexe B, Partie 1.

[25]    RLRQ, c. C-12.

[26]    Guimont c. RNC Média inc. (CHOI-FM), 2012 QCCA 563.

[27]    Cosoltec inc. c. Structure Laferté inc., 2010 QCCA 1600; Aliments Breton (Canada) inc. c. Bal Global Finance Canada Corporation, 2010 QCCA 1369; Guimont, supra, note 10.

[28]    F.L. c. Marquette, 2012 QCCA 631, par. 19.

[29]    Acadia Subaru c. Michaud, 2011 QCCA 1037, par. 67; Fortin c. Fortin, 2009 QCCS 5345.

[30]    Prud’Homme c. Prud’Homme, [2002] 4 R.C.S. 663, par. 32.

[31]    Idem, par. 35.

[32]    Idem, par. 36.

[33]    Idem; Voir aussi Société Radio-Canada c. Radio Sept-Iles inc., 1994 CanLII 5883 (QCCA).

[34]    Bou Malhob c. Diffusion Métromédia CMR Inc., 2011, 1 R.C.S. 214, par. 22.

[35]    Développements Cartier Avenue inc. c. Dalla Riva 2012 QCCA 431.

[36]    Roderick A. Macdonald, Pierre Noreau and Daniel Jutras, Rapport du comité au ministre de la Justice : Les poursuites stratégiques contre la mobilisation publique - les poursuites-bâillons (SLAPP) March 15, 2007, 7. Voir Acadia Subaru c. Michaud, 2011 QCCA 1037, J.E. 2011-1064, AZ-50759332, par. 60 et suiv..

 

[37]    R. Guignard [2002] 1 R.C.S. 472, par. 485.

[38]    T.U.A.C. c. Kmart Canada [1999] 2 R.C.S.1083, par. 1103.

[39]    Ville de Blainville et al. c. Gingras et al. 500-09-010960-011, par.13.

[40]    R-12, Claudio Di Giambatta c. Ville de Montréal et Organisation d'éducation et d'information logement, 500-05-062637-010, p. 2 et 3.

[41]    Acadia Subaru c. Michaud, 2011 QCCA 1037.

[42]    Id., par. 72.

[43]    Grant c. Torstar 2009 CSC 61, par. 104.

[44]    Id., par. 72.

[45]    Acadia Subaru c. Michaud, 2011 QCCA 1037, par. 89.

[46]    R-3.

[47]    R-13.

[48]    Affidavit de Marjolaine Olwell, par. 18.

[49]    R-5.

[50]    Savoie c. Thériault-Martel 2013 QCCA 1856, par. 35.

[51]    D-17.

[52]    P-28.

[53]    Voir notamment Guimont c. RNC Média inc. (CHOI-FM) 2012 QCCA 563.

[54]    3834310 Canada Inc. c. Petrolia Inc., 2011 QCCS 4014, par. 60 à 63; Barrick Gold Corporation c. Éditions Écosociété 2011 QCCS 4232, par. 25.

[55]    R-19.

[56]    Affidavits de Claude Dagneau et de Marjorlaine Olwell.

[57]    2013 QCCA 1670, par. 15 et 16.

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