Décision

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Entreprises Nowlan inc. c. Peyrow

2020 QCCS 3171

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

 

 

 

N° :

500-17-113140-209

 

 

 

DATE :

28 SEPTEMBRE 2020

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

MICHEL A. PINSONNAULT, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

entreprises nowlan inc.

Demanderesse

c.

mehrzad peyrow

et

sepideh latifkar

Défendeurs

et

 

L’OFFICIER DE LA PUBLICITÉ DES DROITS DE LA CIRCONSCRIPTION FONCIÈRE DE MONTRÉAL

et

ROYAL BANK OF CANADA

             Mis en cause

et

FIDUCIE DE CRÉDIT MELLON TRUST

             Intervenante

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT SUR DEMANDE EN REJET ET EN RADIATION D’UNE INSCRIPTION AU REGISTRE FONCIER

(Articles 51 et suivants, 168 (2) C.p.c. et article 3057 et suivants C. c. q.)

______________________________________________________________________

 

L’APERÇU

[1]           Le défendeur Monsieur Mehrzad Peyrow (« Peyrow » ou « Monsieur ») est en instance de divorce avec son épouse la défenderesse Madame Sepideh Latifkar (« Latifkar » ou « Madame »). Madame et Monsieur sont copropriétaires indivis de la résidence familiale située au [...] à Montréal (l’« Immeuble ») laquelle fait partie du patrimoine familial qui doit être partagé.

[2]           Dans un premier temps, Peyrow demande le rejet de la Demande en passation de titre instituée par la demanderesse Entreprises Nowlan inc. (« Nowlan ») relativement à l’Immeuble au motif que cette dernière ne respecte pas les critères d’ouverture énoncés par la jurisprudence pour un tel recours à savoir l’envoi d’une mise en demeure aux vendeurs, la présentation d’un acte de vente conforme à la promesse d’achat, l’offre et la consignation du prix de vente et le dépôt de la demande en passation de titre dans un délai raisonnable.

[3]           Nowlan prétend être le bénéficiaire d’une offre d’achat ferme qui lie les défendeurs et qui les oblige à lui vendre l’Immeuble au prix de 18 000 000 $ au plus tard le 30 octobre 2020.

[4]           Subsidiairement, si le Tribunal ne rejette pas la Demande en passation de titre, Peyrow demande de déclarer que Nowlan ne détient aucun droit réel à l’égard de l’Immeuble et par conséquent, d’ordonner la radiation d’un avis de préinscription daté du 6 août 2020 et publié par Nowlan contre l’Immeuble le 7 août 2020 sous le numéro 25 593 535 (l’« Avis de préinscription ») lequel a essentiellement pour effet de bloquer toute transaction.    

[5]           La Fiducie de crédit Mellon Trust (« Mellon Trust ») est intervenue agressivement afin d’appuyer les défendeurs au niveau du rejet de la Demande en passation de titre et de la radiation de l’Avis de préinscription de Nowlan au motif qu’elle détient une offre d’achat ferme dûment acceptée par les défendeurs aux mêmes conditions que l’offre d’achat invoquée par Nowlan à la différence essentielle que contrairement à Nowlan, Mellon Trust a déjà respecté toutes les conditions préalables exigées par les vendeurs.

[6]           Le Tribunal comprend que les défendeurs veulent compléter le plus rapidement possible la transaction avec le Mellon Trust, mais la Demande en passation de titre qu’ils contestent et l’Avis de préinscription bloquent leurs démarches en vue de disposer de la résidence familiale présentement occupée par Madame et leurs enfants qui doivent se relocaliser ailleurs.     

1.            LE CONTEXTE

[7]           Pour l’essentiel, Madame et Monsieur désirent disposer de l’Immeuble en raison de leur divorce ce qui implique que Madame et leurs enfants devront être relocalisés à courte échéance.

[8]           Le 28 août 2018, ils confient à l’agence immobilière Sotheby’s International Realty Quebec LK (« Sotheby’s ») le mandat d’offrir l’Immeuble en vente au prix de 22 500 000 $[1].

[9]           Peu d’acheteurs intéressés se sont manifestés vu le prix demandé.

[10]        Le 25 juillet 2020, Nowlan présente une offre d’achat au prix de 18 000 000 $[2] (l’« Offre Nowlan ») par l’intermédiaire de son propre courtier, Monsieur Samuel Larocque (« Larocque ») de l’agence Engel & Völkers Montreal (« Engel »). L’Offre Nowlan prévoit que la séance de signature de l’acte de vente doit avoir lieu au plus tard le 30 octobre 2020.

[11]        Bien que d’autres acheteurs potentiels s’annonçaient, il s’agissait alors du prix le plus élevé offert aux défendeurs de la part d’acheteurs éventuels.

[12]        L’Offre Nowlan prévoit, entre autres, un dépôt de 500 000 $ devant être versé ainsi :

(Deposit): The deposit of 500,000$ shall be remitted to the notary Anna Komateros […] and/or Jean-Francois Pelland lawyer within 7 business days after an accepted promise to purchase.

[13]        À la clause F2.1 intitulée Proof of availability of funds in case of cash purchase, Nowlan s’engage à fournir aux défendeurs une preuve que l’acheteur détient les fonds requis pour conclure la transaction de 18 000 000 $ en argent, car l’Offre Nowlan ne comporte aucune condition de financement :

The BUYER undertakes to provide to the SELLER within 7 [business] days following acceptance of the promise to purchase:

- any document demonstrating that he has the necessary funds to cover the purchase price;

[…]

Should the BUYER fail to provide these documents within the time period specified above, the SELLER shall have the right to render the promise to purchase null and void by sending written notification to the BUYER to this effect within four (4) days following the expiry of this time period. The promise to purchase shall become null and void from the time of receipt of such notification by the BUYER. Should the SELLER fail to notify the BUYER within the time period and in the manner specified above, he shall be deemed to have waived the benefit of this condition.[3]

[la “Preuve de disponibilité des fonds”]

[14]        Le 26 juillet 2020, les défendeurs soumettent une contre-proposition à Nowlan ajoutant un délai précis pour la fourniture de la Preuve de disponibilité des fonds qui vient alors à échéance le 3 août 2020[4].

[15]        La contre-proposition des défendeurs datée du 26 juillet 2020 est aussitôt acceptée par Nowlan le même jour[5].

[16]        Par ailleurs, le délai pour le dépôt de 500 000 $ vient à échéance le 4 août 2020.

[17]        Entretemps, le 2 août 2020, les défendeurs reçoivent de Mellon Trust une offre essentiellement identique[6] laquelle doit être acceptée au plus tard le 3 août 2020 à 23 h[7] sujet à ce que l’Offre Nowlan soit nulle et de nul effet (l’« Offre Mellon Trust »).

[18]        Larocque et sa cliente étaient au fait que les défendeurs considéraient alors d’autres offres sans pour autant connaitre l’identité des acheteurs potentiels concurrents.

[19]        Dès le 3 août 2020 en après-midi, Mellon Trust communique à Madame Liza Kaufman (« Kaufman ») de Sotheby’s, la représentante du courtier des vendeurs, une preuve émanant de TD Wealth Private Investment Advice, une division de TD Waterhouse Canada confirmant que Mellon Trust dispose de liquidités de quelque 25 000 000 $ pour pouvoir compléter sans aucun délai la transaction envisagée[8].  

[20]        Le jour même, les défendeurs acceptent l’Offre Mellon Trust[9] dans les circonstances ci-après décrites.

[21]        À ce moment, les défendeurs n’ont toujours pas reçu la Preuve de disponibilité des fonds de la part de Nowlan malgré les démarches incessantes de Kaufman auprès de Larocque depuis plusieurs jours. Les défendeurs étaient de plus en plus incertains que Nowlan disposait des ressources financières nécessaires pour permettre la conclusion de la transaction envisagée dans l’Offre Nowlan. La Preuve de disponibilité des fonds était une condition cruciale pour eux vu l’importance du prix de vente payable en argent sans aucun financement et cette exigence avait été communiquée à Larocque bien avant le dépôt de l’Offre Nowlan.

[22]        Le 4 août 2020, Mellon Trust effectue le dépôt de 500 000 $ comme convenu dans l’Offre Mellon Trust.

[23]        Par ailleurs, le dossier révèle de nombreux échanges textos entre Larocque et Kaufman[10] dès le début de juin 2020. Le Tribunal note à même ces échanges de textos qu’en juin 2020, Kaufman avise Larocque que si sa cliente entend soumettre une offre d’achat la preuve de l’existence de fonds disponibles sera essentielle[11]. En fait, ces échanges de textos entre les deux courtiers ne laissent aucun doute dans l’esprit du Tribunal quant à l’importance pour les défendeurs d’une preuve de disponibilité des fonds devant servir à acquitter le prix de vente.

[24]         Au fur et à mesure que le temps avance, Kaufman communique à Larocque l’inquiétude de ses clients face à la capacité de Nowlan de les satisfaire quant à la disponibilité des fonds[12].

[25]        Le 31 juillet 2020 en matinée, Larocque informe Kaufman qu’il a parlé à l’avocat de Nowlan sans pour autant l’identifier[13] et qu’il s’attend de recevoir une lettre au cours de la journée, mais il lui demande de ne pas le mentionner à ses clients tant que le document n’est pas arrivé. Kaufman lui demande ce que l’avocat lui a dit exactement. Larocque répond que l’avocat doit respecter la confidentialité de ses échanges avec ses clients. Il ne peut rien dévoiler si ce n’est ce qu’il a déjà effectué des transactions pour « ses clients[14] » et que leur comptable et lui-même ont toujours été payés :

Il est tenu de respecter la confidentialité de ses clients. But he confirmed that he made transactions with them and he was always paid same as the accountant.[15]

[26]        Plus tard au début de l’après-midi, Kaufman réitère à Larocque l’inquiétude qui habite ses clients qui doutent que Nowlan dispose réellement des fonds requis et qu’elle puisse satisfaire cette condition. Ses clients s’étonnent que cette compagnie ait tant de difficultés à offrir la Preuve de disponibilité des fonds qui, selon Larocque, devait être produite initialement dans un délai de quatre jours de l’acceptation de l’Offre Nowlan malgré le délai plus long accordé. Kaufman avertit Larocque que ses clients ne prolongeront pas les délais de l’Offre Nowlan[16].

[27]        Du 31 juillet en soirée jusqu’au dimanche 2 août également en soirée, Larocque ne répond pas aux textos de Kaufman au sujet de la Preuve de disponibilité des fonds. Le dimanche 2 août vers 20 h, Larocque répond qu’il n’a toujours pas aucun document et qu’il espère l’avoir le lendemain.

[28]        Selon les textos produits sous la cote R-9, le 3 août 2020 vers 11 h 24, Larocque transmet à Kaufman ce qui apparait être vraisemblablement un échange de textos Larocque et sa cliente lui demandant de lui transmettre la « lettre ». L’interlocuteur répond avoir parlé avec « l’avocat » sans l’identifier et que la « lettre » arrivera au courant de l’après-midi.[17]

[29]        Kaufman demande si Larocque parle avec l’avocat de Gowling. Larocque ne répond pas.

[30]        À 16 h 18, Kaufman reçoit un nouvel extrait de textos entre Larocque et son interlocuteur :

 « Will we get it soon? » 

« I will look into it »

“OK, Because Kaufman just called me. Vendor is impatient and wants to cancel the offer today if we don’t provide it…”

“You will be receiving it today as discussed.”[18]

[31]        Dès ce moment, Larocque est au courant de l’impatience et de l’inquiétude des vendeurs et qu’ils entendent annuler l’Offre Nowlan si la Preuve de disponibilité des fonds n’arrive pas aujourd’hui.  

[32]        À 23 h 23, Larocque transmet un texto à Kaufman : « I have the proof of funds » auquel est attachée une lettre en deux versions différentes.[19]

[33]        La preuve est nébuleuse quant au moment auquel les défendeurs ont reçu la lettre mentionnée précédemment étant donné que Larocque ne l’a reçue que le 3 août 2020 vers 23 h 23.

[34]        Quoi qu’il en soit, la Preuve de disponibilité des fonds alors transmise est sous forme d’une lettre de CBR Law Group de la Floride datée du 3 août 2020 adressée à Larocque, le courtier de Nowlan :

Dear Mr. Larocque;

This letter is to confirm that Nowlan Enterprises Inc (Quebec Incorporated company) is our client and that they have available funds ready for the purchase of the above aforementioned property[20] in the amount on deposit in excess of $18,000,000 USD.

These funds are available and are of good, clean, clear and free of non-criminal origin, and are free and clear of all liens, encumbrances and third-party interest.

These funds will be transferred to our client's designated Canadian Notary Trust Account seven (7) business days prior to closing date to conclude the purchase.

If you have any question, please feel free to contact me (sic) Frederick Morgenstern at 305-587-4850, who (sic) the Chief Compliance and Diligence Officer of our firm.

Sincerely,

James L. Bearden, Attorney at Law[21]

[35]        Les défendeurs ne connaissent ni cette personne qui se représente comme étant un avocat américain ni la firme CBR Law Group. Ils ont toujours été informés que l’avocat de Nowlan était Me Jean-François Pelland de Gowling WLG Canada à Montréal. En fait, les défendeurs ont découvert que l’avocat Pelland n’était plus chez Gowling depuis mars 2020[22].  

[36]        Les défendeurs considèrent que la lettre du 3 août 2020 ne constitue pas une Preuve de disponibilité des fonds sérieuse et acceptable compte tenu de son origine, de son libellé peu rassurant et de l’importance de la transaction de 18 000 000 $ ne devant comporter aucune forme de financement d’autant plus que les fonds ne seront transférés au notaire instrumentant que sept jours ouvrables avant la date de signature de l’acte de vente prévue pour le 30 octobre 2020 au plus tard.

[37]        Le 4 août 2020, les défendeurs avisent Nowlan par écrit que cette dernière est en défaut de respecter la condition ayant trait à la Preuve de disponibilité des fonds dans le délai requis. Ils résilient donc l’Offre Nowlan. Par ailleurs, ils soulignent qu’ils sont néanmoins disposés à considérer ainsi une nouvelle offre d’achat d’ici midi aux conditions y énoncées :

Dear Ms. Nowlan,

Further to clause F2.1 of AF88599 & clause p2.3.4 Para (1) of CP 44621 we as Sellers hereby declare that we are not satisfied with the letter we received from Mr. James L. Bearden at CBR Law Group LLP and therefore render PP 00249 null and void.

However, we are willing to reconsider a new offer if submitted before noon today with an appropriate Proof of Funds letter from a recognized Canadian financial institution confirming that the EIGHTEEN MILLION CANADIAN DOLLARS are fully accessible for the purchase of our house and that the funds are 'free and clear'.[23]

[l’”Avis de résiliation”]

[38]        L’Avis de résiliation est transmis à Larocque et à Nowlan par courriel le 4 août 2020 en matinée. Les défendeurs tentent également de le signifier par huissier à Nowlan à l’adresse mentionnée dans l’Offre Nowlan.

[39]        La tentative de signification de l’Avis de résiliation par huissier a été effectuée le 4 août 2020 à l’adresse fournie par Nowlan représentée par Madame Patricia Nowlan dans l’Offre Nowlan à savoir au douzième étage du 1555 rue Peel à Montréal.

[40]        Or, le rapport de signification de l’huissier indique que le 12e étage du 1555 Peel est vide[24]. L’Avis de résiliation est néanmoins remis au garde de sécurité qui a confirmé l’information au sujet du 12e étage. Ce constat inattendu n’a fait qu’accentuer dans l’esprit du défendeur ses doutes quant au sérieux de Nowlan dans cette affaire.

[41]        Au sujet de l’Avis de résiliation et de l’offre y contenue, la série de textos produits sous la cote R-9 révèle que Nowlan et Larocque ont bel et bien reçu l’Avis de résiliation par courriel ainsi que l’offre de considérer une nouvelle offre d’achat et qu’ils savaient qu’une autre offre avait été présentée aux vendeurs. Ils ignoraient cependant jusqu’alors que cette autre offre venait d’être acceptée.

[42]        Dans cet échange de textos, Kaufman mentionne à Larocque qu’il n’en tient qu’à Nowlan pour que sa nouvelle offre devienne prioritaire par rapport à l’autre offre [l’Offre Mellon Trust] [25].

[43]        Larocque réplique que sa cliente entend modifier les conditions de l’Offre Nowlan pour ne transférer le dépôt de 500 000 $ à son notaire que le 7 août 2020, puis transférer le 14 août le solde du prix de vente (17 500 000 $) et signer l’acte de vente le 21 août avec le 30 octobre 2020 comme date d’occupation[26]

[44]        Kaufman écrit à Larocque que le vendeur demande que cette proposition soit consignée par écrit[27]

[45]        Malgré l’invitation de Monsieur, Nowlan n’a jamais soumis aux défendeurs aucune offre comportant ces nouvelles conditions.

[46]        Le 5 août 2020, constatant que Nowlan est également en défaut d’avoir effectué le dépôt de 500 000 $ conformément à l’Offre Nowlan, les défendeurs confirment au Mellon Trust que l’Offre Nowlan est maintenant nulle et de nul effet[28].

[47]        Le 8 août 2020, les défendeurs confirment que les conditions préalables prévues à l’Offre Mellon Trust ont été satisfaites[29].

[48]        Le 13 août 2020, Nowlan signifie à Monsieur[30] sa Demande en passation de titre intitulée Motion for forced surrender déposée à la cour le 7 août sans qu’il n’ait eu aucune communication avec Nowlan depuis le 4 août 2020 et sans que cette dernière n’ait préalablement mis en demeure les défendeurs de respecter l’Offre Nowlan et de procéder à la signature d’un acte de vente qui ne leur a jamais été soumis.

[49]        L’Avis de préinscription est publié le 7 août 2020.

[50]        Les conclusions recherchées par la demanderesse dans la Demande en passation de titre sont les suivantes :

DECLARE valid the promise to purchase duly accepted between the parties;

DECLARE that the selling price of the immovable is eighteen million dollars ($18 000 000.00);

CONDEMN Defendants to pay to Plaintiff the sum of twenty-five thousand dollars ($25 000.00), as damages;

ORDER compensation between the selling price of the immovable and the granted damages;

ORDER Plaintiff to pay to Defendants the selling price, deducting the ordered compensation, the fees of the sale, and the reimbursement of the Mis-en-cause Royal Bank of Canada the balance of the hypothecary loan to be paid to the office of the Court;

ORDER Defendants to sign the deed of sale in the thirty (30) days of the judgment to be rendered, concerning the immovable hereby described:

Lot number ONE MILLION THREE HUNDRED AND FORTY-ONE THOUSAND ONE HUNDRED AND SEVENTY-SICX (sic) ( 1 341 176) on the Cadastre of Quebec, registration division of Montreal.

Lot number ONE MILLION THREE HUNDRED AND FORTY -ONE THOUSAND ONE HUNDRED AND SEVENTY-FIVE (1 341 175) on the Cadastre du Quebec, registration division of Montreal.

With the building thereon erected bearing civil number [...], Montreal, Quebec, [...].

DEFAULT of which, the present judgment equals to its signature;

ORDER the Mis-en-cause, L'officier de la Publicité des droits de la circonscription foncière de Montréal, to publish the present judgment;

RESERVE to Plaintiff all other rights and recourses, including adding additional conclusions;

RESERVE to Plaintiff the right to claim additional fees related to the present;

THE WHOLE with costs.

2.            LES QUESTIONS EN LITIGE

[51]        Rappelant que la procédure déposée par la demanderesse s’intitule « Motion for forced surrender », l’avocat du défendeur[31] soutient qu’en l’espèce, il ne s’agit pas réellement d’une Demande en passation de titre valable, car la demanderesse n’est aucunement en mesure de passer titre puisque les conditions de l’Offre Nowlan n’ont pas été réalisées et que par surcroît, les critères requis pour prétendre pouvoir passer titre n’étaient pas satisfaits par Nowlan au moment du dépôt de cette procédure judiciaire et ne le sont toujours pas.

[52]       Bref, la Demande introductive d’instance en passation de titre déposée par la demanderesse serait irrecevable en droit quoique les faits allégués puissent être tenus pour avérés.

[53]        Ainsi, y a-t-il lieu pour le Tribunal de prononcer le rejet de la Demande en passation de titre de la demanderesse au motif que celle-ci est mal fondée en droit et par conséquent, abusive ?

[54]        Le Tribunal doit donc déterminer en premier lieu s’il y a lieu de rejeter la Demande en passation de titre à cette étape préliminaire sans la tenue d’un débat contradictoire au fond après avoir déclaré celle-ci abusive, car manifestement non fondée en droit.

[55]        Y a-t-il également lieu de constater l’absence d’un droit réel de la demanderesse Nowlan relativement à l’Immeuble et par conséquent, d’ordonner la radiation de l’Avis de préinscription publié sur l’Immeuble visé par l’Offre Nowlan ?

[56]        Enfin, y a-t-il lieu de prononcer l’exécution provisoire nonobstant appel, le cas échéant ?

3.            L’ANALYSE

[57]        D’entrée de jeu, le Tribunal fait siens les propos du juge André Prévost dans l’affaire de Lammam c. Succession de Preston[32] quant au droit applicable en l’espèce :

[20] Les principes juridiques s’appliquant à une demande en irrecevabilité selon le 2e alinéa de l’article 168 CPC (autrefois l’article 165 (4) CPC) sont clairement établis et ont été repris par la Cour d’appel dans Bohémier c. Barreau du Québec[33] :

[17]   La juge de première instance a correctement énuméré les principes juridiques qui sous-tendent l’irrecevabilité d’un recours sous l’article 165 (4) CPC au paragraphe 66 du jugement attaqué : 

[66]      Les principes juridiques liés à l’irrecevabilité sont les suivants :

·       Les allégations de la requête introductive d’instance sont tenues pour avérées, ce qui comprend les pièces déposées à son soutien;

·       Seuls les faits allégués doivent être tenus pour avérés et non pas la qualification de ces faits par le demandeur;

·       Le Tribunal n’a pas à décider des chances de succès du demandeur ni du bien-fondé des faits allégués. Il appartient au juge du fond de décider, après avoir entendu la preuve et les plaidoiries, si les allégations de faits ont été prouvées;

·       Le Tribunal doit déclarer l’action recevable si les allégations de la requête introductive d’instance sont susceptibles de donner éventuellement ouverture aux conclusions recherchées;

·       La requête en irrecevabilité n’a pas pour but de décider avant procès des prétentions légales des parties. Son seul but est de juger si les conditions de la procédure sont solidaires des faits allégués, ce qui nécessite un examen explicite, mais également implicite du droit invoqué;

·       On ne peut rejeter une requête en irrecevabilité sous prétexte qu’elle soulève des questions complexes;

·       En matière d’irrecevabilité, un principe de prudence s’applique. Dans l’incertitude, il faut éviter de mettre prématurément à un procès;

·       En cas de doute, il faut laisser au demandeur la chance d’être entendu au fond.

[21] Il convient aussi de rappeler les formalités requises en matière de passation de titre soit :

a) l’existence d’une promesse bilatérale liant les parties;

b) la transmission d’une mise en demeure de passer titre;

c) la présentation au vendeur d’un acte de vente conforme à la promesse;

d) l’offre et la consignation du prix de vente indiqué à la promesse; et

e) la prise de l’action dans un délai raisonnable.

[22] Ces formalités qui étaient autrefois appliquées de façon stricte ont été considérablement assouplies par la jurisprudence récente[34].

[23] Ainsi, l’existence d’une mise en demeure n’est pas toujours fatale, la déclaration accompagnant la demande introductive d’instance pouvant y suppléer[35].

[24] L’assouplissement des conditions restreint aussi la conformité des conditions de l’acte de vente proposé à une conformité de substance[36].

[25] Enfin, l’obligation de consigner le prix d’achat a aussi été assouplie par la jurisprudence[37]. Baudouin et Jobin commentent ainsi cet assouplissement[38] :

L’exigence des offres réelles et de la consignation présente toutefois, dans certaines circonstances, le risque d’entraîner le rejet de demandes en passation de titre fort légitimes, alors que le défaut du demandeur de présenter des offres valables pouvait s’expliquer en fonction de circonstances particulières. En 1997, dans l’arrêt Houlachi, la Cour d’appel a donné un coup de barre dans le but d’assouplir les exigences en la matière. Rejetant un formalisme qu’elle avait déjà qualifié de désuet, tout en faisant valoir les principes de bonne foi et d’équité, la Cour y affirme que l’omission d’offrir et de consigner ne doit plus entraîner une fin de non-recevoir automatique et il est possible d’y remédier en tout état de cause, avec la permission du juge, quand la demande est sérieuse et que cela ne cause pas d’injustice. Comme le but des offres et de la consignation est alors de s’assurer que les parties sont disposées à exécuter leurs obligations, le tribunal peut ordonner le transfert de propriété après que la consignation du prix ait été effectuée dans le délai qu’il fixe, dans le contexte d’une action intentée par le promettant-acheteur, quitte à ce que l’action soit rejetée si la consignation n’est pas effectuée dans le délai imparti.

[…]

[…] Deux précisions méritent toutefois d’être apportées. D’une part, l’assouplissement préconisé en vertu de ce courant jurisprudentiel n’est pas illimité; le tribunal peut refuser de l’appliquer ou lui donner une portée plus restreinte en fonction des circonstances, notamment en cas de défaut du demandeur de soumettre un acte conforme à la promesse ou de sérieux dans les démarches visant à corriger les offres. D’autre part, cet assouplissement ne signifie pas pour autant que le demandeur soit désormais dispensé d’offrir sa prestation; dans le contexte où le litige concerne un contrat synallagmatique, l’exception d’inexécution demeure un mécanisme fondamental du droit des obligations et l’offre du demandeur de s’exécuter présente un caractère préjudiciel. En somme, l’approche développée par les tribunaux permet simplement d’éviter que l’exception d’inexécution soit employée de façon à faire primer le formalisme au détriment de la bonne foi des parties.

[références omises et soulignement par le juge Prévost]

[26] Cependant, lorsque la demande est précédée d’une préinscription au Bureau de la publicité des droits, comme c’est ici le cas[39] :

[…] alors le « TEST » pour savoir si les mêmes conditions ont été rencontrées est beaucoup plus strict, formel et sans flexibilité puisque la préinscription contestée est assimilée à une saisie avant jugement.[40]

[Caractères gras ajoutés]

[58]        D’emblée, le Tribunal estime que même en prenant pour avérées les allégations de la Demande en passation de titre qui contient des contradictions à certains égards et le contenu des pièces qui l’accompagnent, le présent recours de la demanderesse est insoutenable et doit être rejeté.

[59]        En premier lieu, il est évident que ce type de recours judiciaire n’est ouvert que si le promettant-vendeur a accepté de s’obliger et que l’offre d’achat n’est pas conditionnelle, mais ferme et finale.

[60]        En l’espèce, il n’existe aucune promesse bilatérale liant de façon définitive les parties.

[61]        Ainsi, la formalité la plus importante pour appuyer la Demande en passation de titre n’est pas satisfaite.

[62]        Qui plus est, l’ensemble des circonstances de cette affaire convainquent le Tribunal qu’il n’y a pas lieu d’appliquer la souplesse proposée dans l’arrêt Houlachi[41] relativement, entre autres, à l’absence de mise en demeure de passer titre, l’absence de présenter aux défendeurs un acte de vente conforme aux conditions de l’Offre Nowlan et l’absence d’offrir et de consigner le prix de vente de 18 000 000 $ indiqué à l’Offre Nowlan.

[63]        Le Tribunal reconnait qu’en principe, il est opportun d’exercer une certaine flexibilité à l’endroit d’une des cinq formalités donnant ouverture à un recours en passation de titre, et possiblement à deux d’entre elles, mais tout dépend du contexte[42].

[64]        Par ailleurs, lorsque toutes les conditions sont absentes sauf l’institution du recours en passation de titre dans un délai raisonnable, la flexibilité doit céder le pas à l’interprétation stricte, mais encore là, tout dépend évidemment du contexte qui doit s’apprécier selon l’ensemble des circonstances.

[65]        Qu’en est-il en l’espèce ?

[66]        Nowlan a-t-elle satisfait les conditions préalables qui auraient converti l’Offre Nowlan d’offre conditionnelle en offre ferme liant définitivement les vendeurs ?

[67]        Le Tribunal répond à cette question par la négative.

[68]        En l’absence d’une clause de financement dans l’Offre Nowlan, la transaction immobilière comportait le versement à la signature de l’acte de vente d’une somme totale de 18 000 000 $ et les défendeurs avaient exigé comme conditions préalables (i) un dépôt de 500 000 $ d’ici au 4 août 2020 et (ii) une Preuve de disponibilité des fonds devant être fournie au plus tard le 3 août 2020, ceux-ci ne désirant pas attendre jusqu’à la date de séance de signature prévue au plus tard le 30 octobre 2020 pour s’assurer que Nowlan disposait bel et bien de tous les fonds requis.

[69]        Cette dernière exigence avait été communiquée dès juin 2020 par Kaufman à Larocque le courtier de Nowlan soit bien avant l’Offre Nowlan et elle fut manifestement acceptée par Nowlan tel qu’en fait foi son offre. Qui plus en acceptant la contre-offre des défendeurs du 26 juillet 2020, Nowlan convenait de fournir cette preuve au plus tard le 3 août 2020.

[70]        Toujours selon l’Offre Nowlan, Nowlan s’était aussi engagée à verser d’ici au 4 août 2020 un dépôt de 500 000 $ auprès de son notaire ou de son avocat chez Gowling.    

[71]        Malgré tous les efforts déployés avant la date limite du 3 août 2020 auprès de Larocque par Kaufman, le courtier représentant les vendeurs, ainsi que les avertissements formulés relativement aux doutes croissants des vendeurs face à la capacité financière de l’acheteur et à leur détermination de ne pas accorder de délai additionnel à Nowlan tel qu’en font foi les multiples textos échangés sous la cote R-9, la Preuve de disponibilité des fonds est transmise in extremis de Floride par texto quelques minutes avant minuit le 3 août 2020, et ce, en deux versions vu les erreurs y contenues.

[72]        De l’avis du Tribunal, ce document ne répondait pas de façon raisonnable aux attentes légitimes des défendeurs qui faisant face à une offre identique concurrente, désiraient être certains que le prix de vente de quelque 18 000 000 $ pour leur résidence de Westmount allait leur être bel et bien versé entièrement par Nowlan au moment de la signature de l’acte de vente quelque deux mois plus tard.

[73]        L’Immeuble était sur le marché immobilier depuis plus d’un an et les circonstances personnelles des défendeurs faisaient en sorte qu’ils étaient intéressés à enfin conclure une vente de leur résidence familiale tout en étant raisonnablement assurés que le prix inusité exigé pour un immeuble résidentiel à Montréal puisse être acquitté par l’acheteur éventuel sans aucun solde de prix de vente.    

[74]        Nowlan était au courant qu’il y avait au moins une autre partie intéressée (bidding war) sans pour autant connaitre son identité ou la teneur de son offre, le cas échéant[43]

[75]        Prima facie, la lettre du 3 août 2020 transmise de Floride en deux exemplaires différents pour compléter une partie des erreurs y constatées dans la première n’apparait pas aux yeux du Tribunal constituer une preuve sérieuse et acceptable de disponibilité des fonds au sens de l’Offre Nowlan. Il n’était pas nécessaire de décrire en détail dans l’Offre Nowlan le type de confirmation financière à laquelle s’attendaient raisonnablement les vendeurs.

[76]        À l’audience, l’avocat de la demanderesse a affirmé que la lettre du 3 août 2020 d’un avocat de Floride était amplement suffisante pour respecter l’exigence contractuelle de la Preuve de disponibilité des fonds compte tenu du libellé de l’Offre Nowlan.

[77]        Avec égards, le Tribunal ne partage pas l’avis de l’avocat de la demanderesse qu’il n’en tenait qu’aux défendeurs d’effectuer à la réception de la lettre les vérifications requises auprès du cabinet d’avocats de Floride pour s’assurer du sérieux et de la véracité des représentations faites dans cette lettre au courtier Larocque et non pas aux vendeurs. Il est évident que cette lettre fut rédigée à la hâte à la toute dernière minute.

[78]        Les circonstances, l’importance et la nature particulière de la transaction immobilière envisagée n’excluaient pas l’application du gros bon sens.

[79]        Le Tribunal est convaincu que si Nowlan s’était retrouvée à la place des vendeurs et s’attendait à recevoir 18 000 000 $ en argent sans aucun financement, elle n’aurait jamais été satisfaite de recevoir une telle soi-disant preuve provenant d’un inconnu à l’étranger avec une simple affirmation que les fonds seraient transférés au Canada sept jours ouvrables avant la séance de signature prévue pour le 30 octobre 2020, soit quelque 89 jours plus tard.     

[80]        Pourtant, cette exigence fondamentale des vendeurs était connue de Nowlan bien avant qu’elle ne dépose l’Offre Nowlan le 25 juillet 2020. La contre-offre acceptée du 26 juillet ne faisait que préciser la date d’échéance du 3 août 2020 pour la remise de la Preuve de disponibilité des fonds.                   

[81]        Bien que la lettre du 3 août 2020 soit, à son avis, amplement suffisante pour satisfaire et lier les vendeurs, l’avocat de la demanderesse a néanmoins obtenu une nouvelle lettre du même avocat de Floride en date du 14 septembre 2020[44] :

Dear Mr. Mongeau,

Please be advised that we represent Nowlan Enterprises, a legally registered company in Canada and the United States. This company has been created as a sub entity to a larger parent Real Estate investment fund that owns and finances income-producing and asset based residential and commercial properties in Florida as well as soon to be purchased assets located in Quebec and other parts of Canada.

There are currently available funds on deposit in our firm's ESCROW ATTORNEY TRUST ACCOUNT at Citibank, N.A., located in Coral Gables, Florida under the account number [...], in the amount of $16,000,000.00 USD, that are reserved and earmarked for the purchase of the above referenced real estate transaction by Nowlan Enterprises.

These funds are available to be transferred to a Canadian Financial Institution for the purchase of the [...] residence.

Feel free to contact me if you have any questions.

Regards,

CBR LAW GROUP, LLLP,[45]

[82]        Pourquoi avoir attendu 43 jours pour tenter de « rassurer » les vendeurs avec une autre lettre qui ne prouve aucunement que son contenu est véridique avec des fonds soi-disant disponibles aux États-Unis ?

[83]        Par ailleurs, alors que le dépôt de 500 000 $ devait être effectué au plus tard le 4 août 2020, la preuve révèle qu’à cette date, Larocque informe Kaufman que Nowlan entendait proposer aux vendeurs des modifications à l’Offre Nowlan afin de reporter au 7 août 2020 le dépôt de 500 000 $ auprès de la notaire Komateros[46]. Cette position annoncée à la dernière minute étonne, car Kaufman avait déjà informé Larocque auparavant que dans un contexte de « bidding war[47] » connu, les vendeurs n’entendaient pas prolonger les délais de l’Offre Nowlan[48] et surtout, qu’en cas de non-respect par Nowlan des exigences préalables essentielles de l’Offre Nowlan, ils allaient résilier celle-ci.

[84]        Rappelons que dans ce même échange de textos du 4 août 2020, Larocque informe Kaufman que parmi les nouvelles conditions à être proposées, sa cliente entend également transférer le solde de 17 500 000 $ dès le 14 août 2020 sans pour autant préciser à qui, puis procéder à la signature de l’acte de vente le 21 août 2020 tout en prévoyant toujours une occupation de l’Immeuble au 30 octobre suivant.[49]    

[85]        Kaufman informe aussitôt Larocque que Monsieur demande d’avoir cette nouvelle offre par écrit[50] d’autant plus qu’il avait écrit dans l’Avis de résiliation que les vendeurs étaient disposés à considérer une nouvelle offre de Nowlan aux conditions y énoncées.

[86]        Étonnamment, outre que de déposer le 7 août 2020 la Demande en passation de titre, la demanderesse n’a jamais donné suite à l’invitation de Monsieur bien qu’en se fiant aux déclarations de Nowlan qui précèdent, cette dernière semblait être en mesure et même désireuse de compléter rapidement la transaction de 18 000 000 $ avec tous les fonds entre les mains du notaire instrumentant dès le 14 août 2020 et une séance de signature de l’acte de vente chez la notaire Komateros, le 21 août 2020.

[87]        Bref, outre le fait de ne pas avoir respecté la condition préalable de la Preuve de disponibilité des fonds, force est de constater que la demanderesse n’a jamais satisfait l’autre condition préalable de procéder au dépôt de 500 000 $ auprès de la notaire Anna Komateros ou de l’avocat Jean-François Pelland[51] au plus tard le 4 août 2020 comme convenu dans l’Offre Nowlan qu’elle considère néanmoins comme liant définitivement les vendeurs.

[88]        À l’audience, interpelé par le Tribunal, l’avocat de la demanderesse a expliqué qu’en raison de l’Avis de résiliation des défendeurs du 4 août 2020, sa cliente considérait qu’elle n’était plus obligée de procéder au dépôt de 500 000 $, ni de les mettre en demeure de signer chez Me Komateros un acte de vente conforme à l’Offre Nowlan, ni de consigner de quelle que façon que ce soit le solde du prix de vente de 17 500 000 $.

[89]        En d’autres termes, les défendeurs auraient « empêché » la demanderesse d’effectuer le dépôt de 500 000 $ par le simple envoi de l’Avis de résiliation[52].

[90]        Selon l’avocat, ceci s’inscrit dans la flexibilité attendue des tribunaux depuis l’Arrêt Houlachi.

[91]        Ainsi, depuis la réception de l’Avis de résiliation dont elle ne reconnait manifestement pas la validité, la demanderesse veut toujours obliger les vendeurs à passer titre, mais elle considère qu’elle n’a plus aucune obligation légale de satisfaire les critères requis en pareilles circonstances. Il ne suffirait que de déposer la Demande en passation de titre dans un délai dit raisonnable pour lui permettre d’obtenir gain de cause vu le refus des défendeurs de s’exécuter en fonction de l’Offre Nowlan.

[92]        Encore faudrait-il que toutes les conditions de l’Offre Nowlan aient été satisfaites par la demanderesse, ce qui n’est aucunement le cas.

[93]        Dans un contexte où les parties doivent toujours agir de bonne foi et tenter de trancher leur différend à l’amiable dans la mesure du possible selon les principes directeurs énoncés au Code de procédure civile, on peut se questionner sur le caractère « raisonnable » lié à la date du dépôt de la Demande en passation de titre le 7 août 2020 alors que le 4 août 2020 les vendeurs se déclaraient désireux et ouverts à recevoir une nouvelle offre de la part de Nowlan aux conditions déjà connues de cette dernière et surtout, que cette dernière était, semble-t-il, prête à formuler une nouvelle offre comportant de nouvelles conditions qui pouvaient difficilement être refusées par les vendeurs vu les courts délais à être proposés et l’assurance tangible de la disponibilité de tous les fonds dès le 14 août 2020.  

[94]        Outre la question du dépôt des procédures dans un délai raisonnable, le défaut objectif le plus percutant est l’omission incontestable de déposer les 500 000 $ convenus au plus tard le 4 août 2020 et même par la suite…

[95]        Qui plus est, certaines des conclusions recherchées dans la Demande en passation de titre sont difficilement exécutoires considérant qu’on demande à la Cour d’ordonner aux défendeurs de signer un acte de vente inexistant :

ORDER Defendants to sign the deed of sale in the thirty (30) days of the judgment to be rendered, concerning the immovable hereby described:

[Soulignement ajouté]

[96]        Aucun acte de vente n’a jamais été soumis auparavant aux défendeurs pour fins de signature et la demanderesse n’a même pas proposé dans sa Demande en passation de titre un projet d’acte de vente conforme à l’Offre Nowlan qui aurait pu servir au juge du fond à rendre une telle ordonnance.

[97]        Dans l’affaire de Ferme Clavelle c. 134455 Canada inc.[53], la juge Claude Dallaire exprimait l’opinion que le droit à la passation de titre doit être né et actuel au moment de l’introduction du recours, car la demande vise l’exécution forcée d’une obligation :

[174] Le constat que la condition n’est pas réalisée lors de l’institution de l’action de la demanderesse n’est pas sans conséquence sur le sort de son recours, puisque le droit à la passation de titre doit être né et actuel selon les enseignements de la jurisprudence, puisqu’il s’agit de l’exécution forcée d’une obligation[54].

[175] Le recours en passation de titre ne permet pas la marge de manœuvre que la demanderesse demande au Tribunal d’adopter eu égard à cette condition. Les conditions de l’offre sont remplies ou elles ne le sont pas.

[176] Si elles ne le sont pas, le Tribunal a les mains liées et n’a aucune discrétion pour en modifier le contenu ni pour suspendre le sort de l’instance d’ici à ce qu’un événement futur incertain se produise, comme c’est le cas avec la décision attendue de la part de la CPTAQ.

[177] De plus, le Tribunal croit opportun d’ajouter qu’intervenir comme le propose la demanderesse serait faire fi de deux valeurs importantes : la liberté contractuelle et la libre disposition de ses biens. La première est la pierre angulaire en matière de relations contractuelles, alors que la deuxième est protégée par l’article 6 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne.

[178] Le Tribunal est d’avis que les principes applicables en matière de recours en passation de titre imposent de décider d’un tel recours sur la foi d’une photographie du dossier prise le jour de l’institution du recours, lorsqu’il est question de la réalisation ou non d’une condition de fond. Cette photo doit démontrer que la condition fondamentale contenue dans l’offre d’achat était satisfaite dès ce moment.

[179] Or, au jour de l’institution du recours de la demanderesse, la condition n’était clairement pas encore remplie et cela n’était pas causé par la faute ni par la négligence de la défenderesse. Comme cette dernière n’a jamais renoncé à cette condition, le Tribunal ne peut en faire fi.

[180] L’argument de la demanderesse voulant que la jurisprudence reconnaisse un certain assouplissement au principe que toutes les conditions de l’action en passation à de titre doivent être rencontrées dès le jour de l’institution du recours ne lui est pas utile puisqu’il est ici question d’une condition essentielle qui n’était toujours pas réalisée lors du jugement. Nous sommes loin de certains détails facilement corrigeables.

[Soulignement et caractères gras ajoutés]

[98]         Bien que les constats de la juge Dallaire s’inscrivent sur le fond d’une demande en passation de titre, il n’en demeure pas moins que le juge saisi d’une demande en rejet peut examiner les conditions de recevabilité du recours en passation de titre et conclure à sa non-viabilité s’il existe une démonstration claire que les conditions essentielles d’une action en passation de titre n’existent pas. En pareilles circonstances, le juge doit intervenir pour accorder la réparation demandée[55].

[99]        Avec respect pour l’opinion contraire, c’est précisément le cas en l’espèce.

[100]     Avec égards, l’approche de la demanderesse dans cette affaire est tout simplement ahurissante et dénote dans un contexte de passation de titre un manque caractérisé de sérieux tant à l’endroit des défendeurs que du système judiciaire.

[101]         Bref, la demanderesse a tenté en vain de convaincre le Tribunal que la réception de l’Avis de résiliation la libérait entièrement de son obligation de satisfaire les formalités essentielles liées à une demande judiciaire en passation de titre à savoir :

a)     l’existence d’une promesse bilatérale liant les parties;

b)     la transmission d’une mise en demeure de passer titre;

c)      la présentation au vendeur d’un acte de vente conforme à la promesse;

d)     l’offre et la consignation du prix de vente indiqué à la promesse; et

e)     la prise de l’action dans un délai raisonnable.

[102]     Si Nowlan était effectivement et réellement en mesure de déposer les 500 000 $ le 7 août 2020 et de transférer le solde de 17 500 000 $ sept jours plus tard pour signer l’acte de vente le 21 août 2020, le tout dans un délai global de 14 jours, pourquoi n’a-t-elle rien fait à cet égard préférant plutôt déposer le 7 août la Demande en passation de titre sans accomplir aucune des formalités préalables requises sauf la prise du recours judiciaire dans un délai soi-disant raisonnable ? 

[103]     Le comportement étonnant de la demanderesse porte le Tribunal à croire que sachant que les défendeurs avaient accepté une offre identique soumise par un autre acheteur qui avait dûment satisfait les mêmes prérequis que Nowlan avait fait défaut de respecter, le dépôt de la Demande en passation de titre servait de prétexte pour pouvoir publier concurremment sur l’Immeuble l’Avis de préinscription.

[104]     Nowlan avait-elle réellement accès aux fonds requis à l’époque ?

[105]     Tout semble indiquer que le but réellement recherché est de bloquer et ainsi faire échec à la vente de l’Immeuble à Mellon Trust au moyen de la Demande en passation de titre assortie de la publication de l’Avis de préinscription le même jour et par conséquent, de bénéficier des délais inhérents au recours judiciaire au préjudice des défendeurs tout en les forçant à négocier avec elle alors que Nowlan n’a jamais daigné effectuer le dépôt de 500 000 $.

[106]     Il y a fort à parier que si Nowlan avait réellement soumis aux vendeurs sa « nouvelle proposition » annoncée par Larocque le 4 août 2020 selon les textos alors échangés avec Kaufman, prévoyant une vente entièrement conclue dès le 21 août suivant, les parties ne seraient vraisemblablement pas devant la Cour aujourd’hui.    

[107]     Force est de constater qu’en adoptant la position que l’Avis de résiliation libérait Nowlan de toute obligation d’effectuer le dépôt de 500 000 $, de satisfaire sérieusement les vendeurs que le solde de 17 500 000 $ était réellement liquide et disponible et de les mettre en demeure de signer un acte de vente conforme à l’Offre Nowlan, la demanderesse a choisi de n’encourir aucun risque et débours financier d’importance pendant la durée du recours judiciaire, tout en tentant d’empêcher les défendeurs de disposer de leur résidence familiale et de relocaliser leurs enfants dans le cadre de leur divorce.      

[108]     Ainsi, le Tribunal ayant déjà conclu que la demanderesse ne bénéficie même pas d’une offre d’achat ferme liant les défendeurs, Nowlan n’ayant pas respecté certaines des conditions préalables essentielles et que par conséquent, la Demande en passation de titre est clairement vouée à un échec certain et est donc irrecevable, ce constat devrait suffire à disposer de la demande en rejet de Monsieur.

[109]     Il importe néanmoins de se pencher sur la validité de l’Avis de préinscription publié le 7 août 2020.

[110]     Le Tribunal est d’avis que la publication de l’Avis de préinscription sur l’Immeuble concurremment au dépôt de la Demande en passation le 7 août 2020 engendre une incidence sur le « test » qui doit être effectué pour déterminer si les conditions donnant ouverture à la passation de titre ont été satisfaites ou non.

[111]     Le Tribunal a déjà cité les propos du juge Prévost dans l’affaire Lammam que lorsqu’une demande en passation de titre est précédée ou accompagnée d’une préinscription au Bureau de la publicité des droits, le « test » est beaucoup plus strict, formel et sans flexibilité puisque la préinscription contestée est assimilée à une saisie avant jugement.[56]

[112]     Le juge Prévost se fondait alors sur le jugement du juge Frank G. Barakett dans l’affaire de Cimon c. Immeubles Paul-E. Richard inc.[57] lequel comporte des similarités avec la présente cause.

[113]     À notre instar, dans cette affaire, le juge Barakett devait se prononcer sur l’irrecevabilité de la demande en passation de titre et celle de la publication d’une préinscription sur l’immeuble visé.

[114]     Le juge Barakett citant l’arrêt Aéroterme de Montréal inc.[58] rappelle que [d] ans cette affaire, la Cour d’appel constate que les articles du Code civil se rapportant à la préinscription doivent être interprétés de façon stricte et non de façon large et libérale car celle-ci ne requiert pas d’autorisation au préalable contrairement à la saisie avant jugement en matière d’action en passation de titre, sans oublier que le propriétaire de l’immeuble visé ne bénéficie d’aucun moyen préliminaire pour l’attaquer[59].

[115]     Le juge Barakett tire alors les conclusions suivantes :

[24] Le Tribunal en l’espèce conclut de ces enseignements constants qu’on ne peut, en matière de préinscription, interpréter les conditions requises avec autant de libéralité et de flexibilité qu’on peut le faire pour les conditions de l’action en passation de titre, lorsqu’il y a absence de préinscription.

[…]

[26] Plus récemment, dans l’affaire Re/Max 2001 inc. c. Renée El Hayek et Jaymie El Sabbagh[60], la Cour d’appel, sous la plume du juge André Forget, réaffirmait cette même interprétation qui doit prévaloir, soit celle que la préinscription ne peut avoir pour effet d’esquiver les exigences de la saisie avant jugement prévues au Code de procédure civile et l’enseignement qu’en tire ce Tribunal en l’espèce est qu’on ne peut faire indirectement ce que le Code de procédure civile empêche de faire directement par saisie avant jugement.

[Soulignement du juge Barakett]

[27] Cette interprétation est donc constante et ce Tribunal conclut donc qu’il y a deux règles d’interprétation qui doivent s’appliquer au présent cas.

[28] Ainsi, la requête en irrecevabilité visant la préinscription doit être accueillie pour le motif qu’une interprétation stricte doit s’appliquer et que l’action en passation de titre ne comporte:

·                  aucune mise en demeure détaillée,

·                  aucun acte formel de promesse de vente (signé ou même allégué),

·                  aucune offre de consignation du prix de vente, et,

·                  il n’y a aucun lien de droit entre les demandeurs et la compagnie défenderesse selon l’acte notarié P-4.

[29] Si l’on s’en tient à une interprétation stricte des conditions requises pour l’action en passation de titre, l’action en l’espèce n’en rencontre aucune. La prescription est donc irrecevable et doit être radiée.

[116]     Sur le fond, le juge Barakett conclut également à l’irrecevabilité de la demande en passation de titre, car même en interprétant de façon flexible et libérale les formalités requises en pareille matière, telle que développée depuis l’arrêt Houlachi, une telle interprétation ne peut s’appliquer lorsque toutes les conditions sont absentes les unes après les autres, à l’exception possible du délai dans lequel l’action fut intentée[61].

[117]     En l’espèce, Nowlan n’a même pas respecté les conditions essentielles prévues à l’Offre Nowlan soit de fournir une Preuve de disponibilité des fonds acceptable et surtout, le défaut d’effectuer le dépôt de 500 000 $ dans les délais convenus et même par la suite.

[118]     Par la suite, Nowlan n’a jamais mis en demeure les vendeurs de procéder à la vente ni de signer un acte de vente conforme aux conditions de l’Offre Nowlan lequel est même absent de la Demande en passation de titre malgré les conclusions recherchées.

[119]     Enfin, outre le défaut de déposer les 500 000 $ convenus lequel est fatal, Nowlan n’a jamais offert ou consigné de quelque façon que ce soit le solde du prix de vente de 17 500 000 $, le Tribunal considérant que les deux lettres émises par un avocat de Floride ne comblent pas cette lacune importante. 

[120]     Bien que ce ne soit pas expressément allégué dans la Demande en passation de titre, la délivrance de l’Avis de résiliation ne pouvait sérieusement servir à justifier l’allégation que ce sont les défendeurs qui ont « empêché » Nowlan d’effectuer le dépôt de 500 000 $.  Tel que susmentionné, l’avocat de la demanderesse a reconnu devant le Tribunal que le soi-disant « empêchement » découlait de l’envoi de l’Avis de résiliation dont il a été amplement question précédemment.    

[121]     Il s’avère donc qu’au moment de déposer la Demande en passation de titre et de publier l’Avis de préinscription, le lien juridique était clairement absent, car la demanderesse n’a jamais disposé d’une promesse d’achat ferme liant les vendeurs.

[122]     Si, comme le prétend l’avocat de la demanderesse qui invite à la flexibilité de l’arrêt Houlachi, le refus qualifié d’injustifié et d’illégal des vendeurs de procéder à la vente qu’il soit constaté par l’Avis de résiliation ou par tout autre moyen, libérait tout acheteur désireux d’obtenir la passation du titre, de sa propre obligation d’accomplir les formalités précédemment mentionnées, ces formalités seraient rarement utiles ou requises, car en matière de recours en passation de titre, il y a généralement une des parties qui refuse à bon ou à mauvais droit de compléter la transaction immobilière projetée.     

[123]     Bref, l’examen de l’ensemble des circonstances propres à chaque cas est donc crucial pour déterminer si l’ensemble de ces circonstances se prête ou justifie l’application d’une certaine flexibilité à l’égard d’une ou de peut-être deux des cinq formalités donnant ouverture au recours en passation de titre.

[124]     Le Tribunal abonde dans le même sens que le juge Barakett que lorsqu’au moment du dépôt de la Demande en passation de titre et de la publication de la préinscription aucune des formalités n’est satisfaite sauf celle de l’institution du recours dans un délai raisonnable, un tel recours est manifestement et clairement voué à un échec certain. 

[125]     Ainsi, il importe de préciser que même si le Tribunal avait décidé de ne pas rejeter la Demande en passation de titre au fond par mesure de prudence, ce qui n’est pas nécessaire en l’espèce, il aurait néanmoins ordonné la radiation de l’Avis de préinscription en se fondant sur l’arrêt Aéroterme et les autres décisions citées précédemment et en appliquant une interprétation stricte qui est de mise en pareilles circonstances.

4.            LES CONCLUSIONS

[126]     En conclusion, Monsieur soutient à juste titre que la Demande en passation de titre doit être déclarée abusive, car elle est manifestement mal fondée en droit.

[127]     La même conclusion s’applique à la publication de l’Avis de préinscription qui vise essentiellement à bloquer toute vente de l’Immeuble résidentiel des défendeurs pendant la durée des présentes procédures judiciaires.  

[128]     En effet, Nowlan ne peut prétendre avoir agi de bonne foi face aux défendeurs, car la demanderesse n’a jamais respecté :

-       d’une part les conditions préalables essentielles prévues à l’Offre Nowlan ce qui lui aurait permis de prétendre détenir une offre d’achat ferme opposable aux défendeurs; et

-       d’autre part, outre le dépôt de la Demande en passation de titre dans un délai soi-disant raisonnable, la demanderesse n’a satisfait aucune des autres formalités essentielles pour donner ouverture à la passation de titre demandée. 

[129]     Dans les circonstances, la Demande en rejet du défendeur sera donc accueillie.

[130]     Les avocats de Monsieur et de Madame ont également satisfait le Tribunal qu’il y a lieu de prononcer l’exécution provisoire du présent jugement. En effet, les défendeurs ont accepté une offre aux conditions essentiellement identiques à la seule exception que contrairement à Nowlan, Mellon Trust a rapidement satisfait toutes les conditions préalables requises.

[131]     Outre de devoir signer un acte de vente en faveur de Mellon Trust, les défendeurs devaient préalablement confirmer que l’Offre Nowlan est bel et bien nulle et de nul effet. Ils l’ont déjà fait, mais le dépôt de la Demande en passation de titre et la publication de l’Avis de préinscription bloquent la conclusion de la vente de leur résidence familiale pour une période indéterminée alors que les défendeurs sont impliqués dans un divorce qui implique la relocalisation de Madame qui y habite avec les enfants sans oublier le partage du patrimoine familial dont l’Immeuble constitue manifestement un élément très important en raison de sa valeur inusitée fort élevée pour le marché résidentiel montréalais.

[132]     De l’avis de la Cour, un appel éventuel du présent jugement risquerait de causer ici un préjudice sérieux aux défendeurs.

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[133]     ACCUEILLE la Demande du défendeur Mehrzad Peyrow intitulée « Amended Application for Dismissal of the Motion for Forced Surrender and in Judicial Cancellation of a Registration in the Land Registry »;

[134]     DÉCLARE que la demanderesse Entreprises Nowlan inc. ne détient aucun droit réel valable à l’égard de l’immeuble ci-après décrit appartenant aux défendeurs lui permettant, entre autres, de publier le 7 août 2020 au Bureau de la publicité des droits de la circonscription foncière de Montréal l’Avis de préinscription sous le numéro 25 593 535 (l’« Avis de préinscription »);

[135]     DÉCLARE ABUSIFS au sens des articles 51 et suivants du Code de procédure civile, la Demande en passation de titre de la demanderesse Entreprises Nowlan inc. intitulée Motion for forced surrender (la « Demande en passation de titre ») ainsi que l’Avis de préinscription;

[136]     REJETTE la Demande en passation de titre de la demanderesse Entreprises Nowlan inc.;

[137]     ORDONNE la radiation de l’Avis de préinscription publié le 7 août 2020 sous le numéro [...] au Bureau de la publicité des droits de la circonscription foncière de Montréal contre l’immeuble suivant :

Lot number [...] on the Cadastre of Québec, registration division of Montréal.

Lot number [...] on the Cadastre du Québec, registration division of Montréal.

With the building thereon erected commonly referred to by the civic address [...], Montréal, Québec, [...].

[138]     ORDONNE à l’Officier de la publicité des droits de la circonscription foncière de Montréal de procéder à la radiation dudit Avis de préinscription sur paiement des droits prescrits;

[139]     ORDONNE l’exécution provisoire du présent jugement nonobstant appel;

[140]     VU le constat de procédures abusives au sens des articles 51 et suivants du Code de procédure civile, RÉSERVE le droit du défendeur Mehrzad Peyrow de demander l’adjudication des honoraires et débours extrajudiciaires engagés dans la présente instance en vertu de l’article 54 du Code de procédure civile en notifiant une telle demande à la demanderesse Entreprises Nowlan inc. dans un délai venant à échéance le 27 novembre 2020;

[141]     LE TOUT avec les frais de justice payables par la demanderesse Entreprises Nowlan inc.

 

 

 

__________________________________MICHEL A. PINSONNAULT, j.c.s.

 

Me Alain Mongeau

Alain Mongeau, Avocats

Procureurs de la demanderesse Entreprises Nowlan inc.

 

Me Paul Déry-Goldberg

Spiegel, Sohmer, inc.

Procureures du défendeur Mehrzad Peyrow

 

Me Aline Kordzian

Devine Schachter Polak

Procureurs de la défenderesse Latifkar Sepideh

 

Me Annie-Claude Authier

Osler, Hoskin & Harcourt, S.E.N.C.R.L./s.r.l.

Procureurs de l’intervenante Fiducie de crédit Mellon Trust

 

Date d’audience :

15 septembre 2020

 



[1] Ce prix visait la résidence et un terrain adjacent. Le 26 juin 2019, en raison d’un problème de zonage, les défendeurs ont scindé les deux propriétés demandant alors 15 000 000 $ pour la résidence et 5 000 000 $ pour le terrain adjacent. Le 25 juin 2020, le prix de la résidence est révisé à 20 000 000 $. En l’espèce, l’Immeuble ne vise que la résidence.

[2] P-3.

[3] Id.

[4] P-4.

[5] Id.

[6] Comportant un prix de 18 000 000 $ avec un dépôt de 500 000 $.

[7] R-10.

[8] R-11.

[9] R-12.

[10] R-9.

[11] Id., page 6, extrait du 2 juillet 2020: « But most importantly are the funds finally here and verified ».

[12] Id., page 21.

[13] Selon la pièce R-9, Larocque avait indiqué à Kaufman en juin que l’avocat de la demanderesse était Me Jean-François Pelland de Gowling. Le 31 juillet 2020, Larocque ne l’identifie pas l’avocat à qui il parle au téléphone. 

[14] Ceux-ci ne sont pas identifiés.

[15] Id.

[16] Id., page 22.

[17] Id., page 24.

[18] Id., pages 24 et 25.

[19] Id. pages 25 à 27.

[20] La première version de la lettre ne mentionne nulle part l’identité de l’Immeuble (« the above aforementioned property »). Dans la seconde version, l’adresse de l’Immeuble y a été ajoutée en rubrique.

[21] P-5.

[22] R-8.

[23] P-6 and R-15.

[24] R-16.

[25] R-9 pages 29 et 30.

[26] Id., pages 28 et 29.

[27] Id., page 29.

[28] R-17.

[29] R-18.

[30] Madame fut signifiée le 12 août 2020.

[31] Avec l’appui des avocates de Madame et de Mellon Trust.

[32]    2019 QCCS 1311.

[33]    2012 QCCA 308.

[34]    Jacques DESLAURIERS, Vente, louage, contrat d’entreprise ou de service, 2e éd., Wilson & Lafleur, paragr. 177 à 179.

[35]    Id., paragr. 180.

[36]    T.L. c. Y.L., 2011 QCCA 1205, paragr. 16.

[37]    Houlachi c. Bray, 1997 CanLII 10151 ( QC CA).

[38]    Jean-Louis BAUDOUIN et Pierre-Gabriel JOBIN, Les Obligations, 7e éd., Éditions Yvon Blais, 2013, paragr. 685.

[39]    D-1. Il est quelque peu surprenant que tant dans la demande originale que dans la demande modifiée, M. Lammam ne fasse aucune référence à la préinscription de sa demande le 7 février 2019 et s’abstienne de mettre en cause l’Officier de la publicité des droits de la circonscription foncière de Montréal.

[40]    Cimon c. Immeubles Paul-E. Richard inc., 2010 QCCS 3350, paragr. 12. Au même effet : Secosan c. McMullen (Succession de), 2014 QCCS 4881, paragr. 7 à 11.

[41]    Précité, note 37.

[42] Cimon c. Immeubles Paul-E. Richard inc., Note 37, par. 16.

[43] R-9, page 30.

[44] P-5A.

[45] P-5A.

[46] R-9, pages 28 et 29.

[47] Id.,

[48] Id., page 22.

[49] Id., page 29.

[50] “The vendor says please put it in writing.” (R-9, page 29 et 30)

[51] Selon Larocque en juin 2020, Me Pelland travaillait chez Gowling (R-7) alors qu’il avait quitté Gowling en mars 2020 (R-8).

[52] Paragraphe 15 de la procédure intitulée « Motion for forced surrender ».

[53] 2010 QCCS 3995.

[54] Penterman c. Ferme brune des Alpes inc., 2006 QCCA 1318, par.83 à 91; Charette c. Charbonneau, 2009 QCCS 5159, paragraphe 41 à 52, décision de la juge Tessier.

[55] 8789622 Canada inc. c. 9340513 Canada inc., 2020 QCCS 186 par. 55.

[56] Paragraphe 26 du jugement Lammam (Note 29).

[57] 2010 QCCS 3350.

[58] 1998 CanLII 12730

[59] Id., par. 23.

[60] Re/Max 2001 inc. c. Renée El Hayek & Jaymie El Sabbagh, REJB 2001-27134 (C.A.)

[61] Jugement Cimon, par. 40.

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