Jean et Constructions Louisbourg ltée |
2014 QCCLP 1712 |
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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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Sept-Îles |
17 mars 2014 |
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Région : |
Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, Bas-Saint-Laurent et Côte - Nord |
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Dossier CSST : |
139513873 |
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Commissaire : |
Daniel Jouis, juge administratif |
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Membres : |
Marcel Beaumont, associations d’employeurs |
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François Pilon, associations syndicales |
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Partie requérante |
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Constructions Louisbourg ltée Coop forestière de la Matapédia Entreprises forestières F.G.O. inc. Les constructions Jalbert & Pelletier inc. Les constructions du Saint-Laurent ltée Les entreprises Rioux & Nadeau inc. Les entreprises Yvon D’Astous & fils inc. Transports Jacques Rioux inc. |
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Parties intéressées |
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Commission de la santé et de la sécurité du travail |
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Partie intervenante |
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[1] Le 12 avril 2013, monsieur Jacques Jean (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 28 mars 2013 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 14 février 2013 et déclare irrecevable la réclamation du travailleur du 11 décembre 2012 car produite après l’expiration du délai prévu par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi). Elle conclut également que le travailleur n’a pas démontré l’existence d’un motif raisonnable permettant de le relever de son défaut.
[3] À l'audience tenue à Matane le 17 février 2014, le travailleur est présent et représenté. La Coop Forestière de la Matapédia et Transports Jacques Rioux inc. y sont également représentés, mais absents. L’affaire est mise en délibéré le jour même.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] L’audience devant le tribunal portait uniquement, à la demande des parties, sur la question du délai à produire une réclamation à la CSST en vertu de l’article 272 de la loi et son corollaire, l’existence d’un motif raisonnable.
[5] Le travailleur demande au tribunal de déclarer sa réclamation recevable puisque, selon lui, il a eu connaissance de l’existence d’une possible maladie professionnelle seulement le 14 septembre 2012. Si le tribunal devait considérer sa réclamation hors délai, il demande alors à celui-ci de reconnaître qu’il avait un motif raisonnable pour expliquer son retard à agir.
LES FAITS
[6] Aux fins de sa décision, le tribunal retient de la preuve entendue et produite les faits relatés au cours des prochains paragraphes.
[7] Le travailleur, un homme de 59 ans, est un opérateur de machinerie lourde depuis 1995, il conduit une niveleuse, soit un appareil composé de plusieurs manettes qu'il actionne la journée durant dans le cadre de son travail.
[8] À compter de 2004, chez l'employeur Transport Jacques Rioux inc., il effectue ses tâches sur des chemins forestiers. Il s'agit d'un travail saisonnier qu’il effectue du début mai jusqu'à la période des fêtes en décembre.
[9] Le travailleur ressent des douleurs aux épaules et consulte le docteur Didier, son médecin de famille, une première fois le 29 octobre 2009. Ce dernier note alors des douleurs récidivantes plus importantes à gauche qu'à droite et a comme impression diagnostique qu'il s'agit d’une bursite légère. Des traitements de physiothérapie sont recommandés.
[10] Le travailleur informe son employeur de ses douleurs aux épaules au cours de l’année, mais sans plus.
[11] En février 2010, il consulte à nouveau le docteur Didier qui note que celui-ci fait de la physiothérapie pour ses épaules, surtout celle de droite, car il travaille de ce côté. Le médecin s'interroge alors sur le lien possible entre ses douleurs et son travail. Lors de son témoignage, le travailleur indique que déjà à cette époque il ne voit pas d'autre raison pour sa douleur. Il identifie comme cause la manipulation de plusieurs manettes, les bras tendus vers l'avant.
[12] Le 17 mai 2010, le travailleur rencontre le docteur Jean Cournoyer, chirurgien-orthopédiste. Celui-ci note que le travailleur a des douleurs au niveau des deux épaules depuis plusieurs années. Il note comme impression diagnostique un syndrome d'accrochage à l'épaule droite. Le travailleur reçoit alors une infiltration de cortisone et reprend son travail malgré ses douleurs, il ne se rappelle pas avoir pris de la médication ni avoir payé de la cortisone et en l'absence de perte monétaire, il n’effectue pas de réclamation à la CSST.
[13] Le travailleur est revu au mois de septembre 2010 par le docteur Didier qui note que les douleurs demeurent présentes malgré l’infiltration et les traitements de physiothérapie qu’il continue. À l’égard de ceux-ci, le travailleur indique ne pas avoir assumé de coûts, puisque reçues dans un établissement hospitalier public.
[14] L'année suivante se déroule comme les précédentes et le travailleur revoit le docteur Didier le 16 décembre 2011. Ce dernier note que malgré la physiothérapie, le travailleur a toujours ses douleurs aux épaules et prend soin d'indiquer leur utilisation fréquente au travail. Le travailleur maintient lors de son témoignage que ses douleurs sont plus importantes lorsqu’il travaille et que le phénomène s'amenuise pendant les congés et la pause hivernale. Il n'effectue toujours pas de réclamation à la CSST, bien qu'il mentionne à l'employeur avoir mal aux épaules.
[15] Le travailleur rencontre le docteur Didier le 26 avril 2012 et les notes au dossier révèlent qu'il a toujours des douleurs aux épaules malgré la physiothérapie. Il demande alors une résonance magnétique, laquelle est effectuée le 12 août 2012 par le docteur Luc Mainville, radiologiste.
[16] Plus avance la saison de travail 2012, plus ses douleurs augmentent.
[17] Le résultat de la résonance magnétique révèle pour sa part des déchirures quasi complètes du sus et sous-épineux côté gauche et du sus-épineux côté droit, de même qu'une arthrose acromio-claviculaire légère à modérée pour les deux épaules. Cette information est communiquée au travailleur lors de sa rencontre du 14 septembre 2012 avec le docteur Didier.
[18] Le travailleur est mis en arrêt de travail par le docteur Didier le 5 octobre 2012. Il indique lors de son témoignage ne plus être en mesure de travailler en raison des douleurs à ses épaules.
[19] Il effectue finalement sa réclamation auprès de la CSST le 11 décembre 2012.
[20] À l'audience, le travailleur indique ne pas avoir effectué de réclamation auprès de la CSST plus tôt puisqu'il n'a pas d'intérêt à le faire tant qu'il est au travail. Il n’a pas de perte de salaire et n'assume pas les coûts pour ses traitements et médicaments.
[21] Il réitère avoir parlé à son employeur de ses problèmes aux épaules à plusieurs reprises et n'avoir eu aucun support de celui-ci. Il n'a pas retravaillé depuis, malgré une tentative d'une journée en 2013.
[22] Contre interrogé par le procureur de l'employeur, le travailleur mentionne, au sujet des douleurs à ses épaules, que dès 2009 « il ne voit pas autre chose » que les mouvements répétitifs à son travail pour expliquer ses douleurs. Il réitère ne pas avoir dû assumer de coûts en lien avec de la médication ou des traitements, étant couvert par l'assurance médicale du secteur de la construction.
[23] L'argumentation du procureur du travailleur porte sur deux aspects. Par le premier, il soutient que la réclamation a été produite à l'intérieur du délai prévu à l'article 272 de la loi. À cet égard, il plaide que le travailleur a connu le lien entre sa maladie et son travail seulement le 14 septembre 2012, soit au moment de recevoir le résultat de la résonance magnétique par son médecin. Deuxièmement, si le tribunal devait en venir à une conclusion contraire, il prétend que l'absence d'intérêt à réclamer permet de conclure que son client avait des motifs raisonnables pour produire sa réclamation hors délai, tel que le reconnaît l'article 352 de la loi.
[24] Pour sa part, le procureur des employeurs soutient que le travailleur connaissait le lien entre ses douleurs à l’épaule et son travail depuis 2010. Il souligne que le syndrome d’accrochage à l’épaule droite est déjà identifié par le docteur Cournoyer le 17 mai 2010. Quant à lui, l'objet de la loi étant d'indemniser, non seulement pour des pertes monétaires, mais aussi, entre autres, pour des traitements et soins, l'intérêt de sa réclamation a débuté en 2010.
L’AVIS DES MEMBRES
[25] Le membre issu des associations syndicales est d’avis d'infirmer la décision rendue le 28 mars 2013 par la CSST à la suite d'une révision administrative. Il considère que bien que la réclamation du travailleur a été produite à l'extérieur du délai de six mois prévu par la loi, celui-ci n'avait pas d'intérêt à effectuer de réclamation avant son arrêt de travail d'octobre 2012 et qu'il y a lieu de le relever de son défaut.
[26] Le membre issu des associations d'employeurs est d'avis de confirmer la décision de la CSST, la réclamation ayant été produite hors délai et les motifs invoqués pour justifier ce retard n'étant pas raisonnables.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[27] Le tribunal doit déterminer si le travailleur respecte le délai pour produire à la CSST une réclamation pour maladie professionnelle. Dans la négative, elle doit déterminer si ce dernier présente un motif raisonnable pour expliquer son retard et être relevé de son défaut.
[28] Les articles 272 et 352 de la loi sont pertinents concernant la présente affaire. Ces articles se lisent comme suit :
272. Le travailleur atteint d'une maladie professionnelle ou, s'il en décède, le bénéficiaire, produit sa réclamation à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, dans les six mois de la date où il est porté à la connaissance du travailleur ou du bénéficiaire que le travailleur est atteint d'une maladie professionnelle ou qu'il en est décédé, selon le cas.
Ce formulaire porte notamment sur les nom et adresse de chaque employeur pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle.
La Commission transmet copie de ce formulaire à chacun des employeurs dont le nom y apparaît.
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1985, c. 6, a. 272.
352. La Commission prolonge un délai que la présente loi accorde pour l'exercice d'un droit ou relève une personne des conséquences de son défaut de le respecter, lorsque la personne démontre un motif raisonnable pour expliquer son retard.
__________
1985, c. 6, a. 352.
[29] Voyons d'abord si le travailleur a déposé sa réclamation dans les six mois du moment où il a été porté à sa connaissance qu'il était atteint, selon lui, d'une maladie professionnelle.
[30] Le point de départ du délai de six mois prévu à l’article 272 de la loi a donné lieu à différents courants jurisprudentiels.
[31] À cet égard, le tribunal partage l’opinion émise dans l’affaire Viger et CHUQ (Pavillon Hôtel-Dieu)[2] pour qui la détermination du point de départ d’un délai est une question de fait et que les faits pertinents qui servent à déterminer celui de l’article 272 de la loi sont ceux qui permettent de cerner le moment où le travailleur a acquis une connaissance suffisante pour déposer une réclamation pour maladie professionnelle.
[32] En ce qui concerne l’appréciation des faits pertinents dans de tels cas, le tribunal s’exprime ainsi dans l’affaire Beaulieu et Alcoa[3] :
[45] Ainsi, il peut arriver dans certains cas qu’un travailleur, connaissant la nature de la maladie dont il est atteint, demeure dans l’ignorance du lien qui peut exister entre la maladie et son travail jusqu’à ce qu’il en soit informé par un médecin. En pareil cas, il est juste de retenir que le travailleur n’a pas la connaissance requise par l’article 272 tant que le lien de causalité n’aura pas fait l’objet d’un avis formel par un médecin.
[46] Cependant, lorsque comme dans le présent cas, le travailleur acquiert à partir de ses connaissances personnelles la conviction que la maladie, dont il connaît la nature, peut être associée à son travail, il faut conclure qu’il a la connaissance nécessaire pour lui permettre de revendiquer ses droits.
[47] S’il choisit de ne pas les exercer, le délai de six mois court néanmoins et le travailleur devra justifier son retard.
[48] En pareil cas en effet, la consultation d’un médecin ne peut que servir à prouver le lien de causalité requis entre le travail et la maladie. La consultation médicale dans ce contexte n’apporte rien de plus au travailleur au niveau de la connaissance requise. Il est déjà en possession de l’information nécessaire lui permettant de choisir s’il fera ou non valoir ses droits.
[33] La preuve révèle que le travailleur se savait porteur de problèmes aux épaules depuis l'année 2009. Très candidement, lors de son témoignage, il affirme sans détour que déjà à cette époque il savait que ceux-ci étaient en lien avec son travail. Il ne pouvait voir autre chose dit-il. D'ailleurs, les douleurs intermittentes fluctuaient en fonction de ses activités professionnelles. Lorsqu’il était en congé, celles-ci étaient peu présentes et elles s'activaient lors d'un retour au travail. Il en parle d'ailleurs à son employeur dès 2009.
[34] La preuve médicale au dossier dévoile que le travailleur est déjà porteur d’un syndrome d’accrochage à l’épaule droite en 2010.
[35] En 2011, le docteur Didier, en lien avec les douleurs aux épaules du travailleur, note que ces dernières sont souvent utilisées au travail.
[36] Ainsi, le tribunal est convaincu que le travailleur a eu connaissance d’un lien entre son travail et ses douleurs aux épaules depuis plus d’un an avant sa réclamation du 11 décembre 2012. Elle n'a donc pas été effectuée à l'intérieur du délai de six mois prévu à la loi.
[37] Cette conclusion est-elle fatale?
[38] Pas nécessairement, car malgré le dépôt tardif d’une réclamation selon l'article 272 de la loi, le législateur prévoit néanmoins à l'article 352 la possibilité pour le travailleur de prolonger ce délai ou de le relever de son défaut de le respecter s'il présente un motif raisonnable.
[39] Voyons dans un deuxième temps si nous sommes en présence d’un motif raisonnable.
[40] Dans l’affaire Les Structures G.B. ltée et Fiola[4], le tribunal définit en ces termes la notion de « motif raisonnable » à laquelle l’article 352 fait référence :
[21] La notion de « motif raisonnable » est vaste et, de ce fait, sujette à beaucoup d’interprétation et à l’exercice d’une discrétion importante de la part du décideur qui doit examiner toutes les circonstances du cas particulier qui lui est soumis6. Le motif raisonnable a par ailleurs déjà été décrit par la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles comme étant « un motif non farfelu, crédible et qui fait preuve de bon sens, de mesure et de réflexion.7».
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6 Roy et Communauté urbaine de Montréal, [1993] C.A.L.P. 1974 (C.A.); Dansereau et
Hôpital Maisonneuve-Rosemont, [1993] C.A.L.P. 1074 (C.S.); Lussier et Godin et als,
[1987] R.J.Q. 1328 (C.S.); C.S.S.T. et Groupe Paré-Brosset ltée, [1998] C.L.P. 617;
Raymond et Pharmacie Jean-Coutu, C.L.P.E. 99LP-65.
7 Purolator ltée et Langlais, C.A.L.P. 87109-62-9703, 11 décembre 1997, R. Jolicoeur.
[41] Sur cet aspect, le travailleur n'a jamais arrêté de travailler malgré ses douleurs aux épaules. Les seuls traitements de physiothérapie, dont il n'a pas eu à assumer les coûts, et l'achat d'un petit tube d'onguent, par ailleurs remboursé par son assurance, ne justifiaient pas un intérêt à effectuer une réclamation à la CSST.
[42] Le soussigné fait siens les propos énoncés par la décision préalablement citée et considère raisonnable qu'un travailleur puisse attendre un arrêt de travail pour produire sa réclamation.
[43] Sauf respect pour l'opinion contraire, le tribunal ne croit pas qu'il faille donner une interprétation aussi large du mot intérêt que celle soumise par le procureur des employeurs. Le tribunal croit que cet intérêt doit surtout être réel et actuel. Placée dans les mêmes circonstances, la personne raisonnable attendrait d'avoir un besoin à combler avant d'amorcer un processus médico-légal visant à l'indemniser. Il n'apparaît pas conséquent et réaliste d'entreprendre une réclamation afin d'obtenir un éventuel bénéfice de la loi sans savoir s'il se manifestera, même si cette éventualité est possible.
[44] Dans l’affaire Cloutier et 9015-8148 Québec inc.[5], le tribunal s’exprimait de la façon suivante sur la question de l’intérêt à produire une réclamation :
[24] En matière de délai, il faut privilégier une interprétation qui favorise l’exercice des droits5, l’achat de médicaments ou d’une prothèse peut faire naître l’intérêt à réclamer, mais cela n’empêche pas de reconnaître l’existence d’un motif raisonnable permettant de relever la travailleuse de son défaut6. Le tribunal doit alors apprécier le contexte et mesurer l’importance de l’intérêt de la travailleuse.
[25] La travailleuse n’a pas cessé de travailler à la suite de sa visite médicale du 21 octobre 2011. Elle n’a donc subi aucune perte salariale. Le seul intérêt de la travailleuse avant que son état ne se détériore et qu’une chirurgie soit prescrite est de se faire rembourser une partie du coût d’achat d’une orthèse et du médicament « celebrex ». À première vue, il s’agit d’une dépense peu importante.
[26] De l’avis du soussigné, l’intérêt à produire une réclamation doit être suffisamment significatif pour justifier les procédures administratives d’usage. Il est compréhensible que la travailleuse ne se soit pas engagée dans une procédure de réclamation pour quelques dollars alors qu’elle ne subissait aucune perte salariale. Le véritable intérêt de la travailleuse est né lorsque sa condition s’est détériorée et qu’elle est devenue invalidante, soit au 1er juin 2012 alors qu’une intervention chirurgicale a été prescrite. La travailleuse a fait preuve de diligence par la suite puisqu’elle a produit sa réclamation à la CSST quelques jours plus tard.
5 Martel et Ville de Québec, C.L.P. 312504-31-0703, 7 octobre 2008, H. Thériault.
6 Carrière et S.G.L. Canada inc., C.L.P. 384444-64-0907, 23 mars 2012, L. Nadeau.
[45] Des décisions récentes citées par le procureur du travailleur confirment cette approche[6], laquelle est retenue dans le présent cas.
[46] Enfin, sur cette question de l’intérêt, le tribunal s’en remet à la décision déjà rendue dans l’affaire Raposo et Les Vêtements Peerless inc.[7] qui, en matière de délai, retient qu’il faut privilégier une interprétation qui favorise l’exercice des droits plutôt que l’inverse.
[47] De l’avis du tribunal, l'intérêt naît avec le besoin. En l’espèce, celui-ci s'est manifesté à compter de l'arrêt de travail du 4 octobre 2012, moment où la condition du travailleur est devenue invalidante. Le travailleur a démontré un motif raisonnable de ne pas avoir produit sa réclamation dans le délai de six mois prévus à l'article 272 de la loi, d'autant plus qu'il a été diligent en faisant des démarches dans les semaines suivantes.
[48] Dans les circonstances de l’espèce, en raison du motif raisonnable mis en preuve, il y a lieu de relever le travailleur de son défaut.
[49] Compte tenu de cette conclusion, le tribunal indique aux parties qu’elles seront convoquées à nouveau devant la Commission des lésions professionnelles pour être entendues sur le mérite de la réclamation du travailleur.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête du travailleur, monsieur Jacques Jean;
INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 28 mars 2013 à la suite de sa révision administrative ;
DÉCLARE recevable la réclamation du travailleur du 11 décembre 2012;
DÉCLARE que les parties seront convoquées à nouveau devant la Commission des lésions professionnelles pour être entendues sur le mérite de la réclamation.
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Daniel Jouis |
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Me Denis Tremblay |
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Tremblay & Tremblay |
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Représentant de la partie requérante |
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Me Jean-François Dufour |
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ASSPP Qc inc. |
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Représentant des parties intéressées : Coop. Forestière de la Matapédia & Transport Jacques Rioux inc. |
[1] L.R.Q., c. A-3.001.
[2] C.L.P. 215083-31-0308, 29 janvier 2004, M. Beaudoin.
[3] C.L.P. 215125-09-0308, 19 novembre 2004, G. Tardif.
[4] C.L.P. 160639-01A-0105, 18 juillet 2002, L. Desbois.
[5] 2013 QCCLP 7221.
[6] Grandbois et Centre dentaire Garon-Sauvé & Ass., 2014 QCCLP 319; Dufour et Elkem Métal Canada inc., 2013 QCCLP 6624; Cloutier et Groupe Montoni (1995) inc., 2013 QCCLP 2047.
[7] C.L.P. 161653-61-0105, 11 septembre 2002, L. Nadeau.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.