Décision

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Commission scolaire des Patriotes c. Quenneville

2015 QCCS 4598

 

JC0BM5

 
COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

 

 

N :

500-17-082653-141

500-17-082645-147

 

 

DATE :

Le 6 octobre 2015

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

suzanne courchesne, J.C.S.

 

 

cs#500-17-082653-141

 

COMMISSION SCOLAIRE DES patriotes

et

COMMISSION SCOLAIRE MARIE-VICTORIN 

et

COMMISSION SCOLAIRE DE LAVAL

et

COMMISSION SCOLAIRE DES GRANDES-SEIGNEURIES

Demanderesses

c.

 

L’HONORABLE DIANE QUENNEVILLE, ès qualités de juge de la Cour du Québec,

Défenderesse

et

 

GEORGE KALOGERAKIS (en reprise d’instance pour SERGE LAPLANTE)

et

COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION

Mise en cause

 

 

cs#500-17-082645-147

 

VILLE DE TERREBONNE

Demanderesse

c.

 

COUR DU QUÉBEC - DIVISION ADMINISTRATIVE ET D’APPEL

Défenderesse

et

GEORGE KALOGERAKIS

Mis en cause

et

COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION DU QUÉBEC

Mise en cause

 

 

JUGEMENT

 

 

      I.    APERÇU

[1]           Le secret professionnel de l’avocat peut-il faire obstacle à une demande d’accès à l’information visant à obtenir le montant des honoraires professionnels d’avocats facturés à des organismes publics? Il s’agit de la question principale que soulève le présent litige.

[2]           Les demanderesses Commissions scolaires et Ville de Terrebonne se pourvoient en révision judiciaire d’un jugement de la Cour du Québec qui leur ordonne de communiquer au journaliste George Kalogerakis (le demandeur d’accès), les documents requis permettant d’établir le montant des honoraires professionnels d’avocats qui leur ont été chargés dans le cadre de divers litiges.

[3]           La Cour du Québec infirme les décisions de la Commission d’accès à l’information (CAI) rendues en faveur des Commissions et de la Ville, qui rejettent les demandes d’accès à l’information du demandeur d’accès, statuant que le montant des honoraires professionnels d’avocats constitue une information couverte par le secret professionnel et ne peut ainsi être communiqué.

    II.    CONTEXTE

1.    Le dossier impliquant les Commissions[1]

- Les recours judiciaires impliquant les Commissions

[4]           En 2006, un recours collectif est entrepris contre les Commissions et d’autres défendeurs par des élèves atteints de dyslexie et leurs parents (le recours collectif Desgagnés )[2]. Les demandeurs requièrent la mise en œuvre de mesures de dépistage de la dyslexie et de moyens pédagogiques adaptés pour les élèves atteints de ce trouble d’apprentissage, ainsi que la condamnation des Commissions à des dommages compensatoires et  punitifs.

[5]           En 2008, parallèlement à ce recours, les parents d’une enfant atteinte de dyslexie déposent une plainte auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) contre la Commission scolaire de Laval[3].

[6]           En septembre 2010, la CDPDJ introduit devant le Tribunal des droits de la personne une demande introductive d’instance contre la Commission scolaire de Laval[4] (dossier du Tribunal des droits de la personne). Les conclusions de cette procédure sont de même nature que celles recherchées par le recours collectif Desgagnés, soit une condamnation à des dommages matériels et moraux et des ordonnances visant l’évaluation de l’enfant, l’adaptation des services à sa condition et la mise en place des mesures nécessaires et des services adaptés pour les élèves du territoire de la Commission scolaire de Laval.

[7]           En octobre 2010, la Cour supérieure rejette au mérite le recours collectif Desgagnés[5]. Ce jugement n’est pas porté en appel.

[8]           En avril 2011, la Commission scolaire de Laval dépose une requête en jugement déclaratoire afin que la CDPDJ soit tenue de cesser d’agir dans le dossier du Tribunal des droits de la personne, parce que les parents plaignants font partie du groupe visé par le recours collectif Desgagnés et ne s’en sont pas exclus[6].

- Les demandes d’accès à l’information

[9]           Le 31 août 2010, le journaliste Serge Laplante[7] invoque les dispositions de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels[8] (Loi sur l’accès) et s’adresse à chacune des Commissions dans le but d’obtenir le sommaire détaillé de l’ensemble des frais et des honoraires professionnels assumés par elles en lien avec le recours collectif Desgagnés[9].

[10]        Les Commissions refusent de communiquer le document requis par M. Laplante pour le motif que les comptes d’honoraires sont protégés par le secret professionnel[10].

[11]        Le 13 octobre 2010, M. Laplante demande à la CAI la révision du refus des Commissions de lui donner accès au sommaire demandé[11].

- Les comptes d’honoraires professionnels de l’avocat des Commissions

[12]        Le recours collectif Desgagnés s’échelonne de 2003, année du dépôt de la requête pour autorisation d’exercer un recours collectif[12], à 2010, année du jugement final. Tout au long de ce recours, les Commissions sont représentées par le même avocat, Me Bernard Jacob. Au début du litige, neuf commissions scolaires sont poursuivies; ce nombre est éventuellement réduit à six, à cinq et finalement à quatre. Un historique du recours collectif Desgagnés, de la phase pré-autorisation au jugement au mérite, est déposé devant la CAI[13].

[13]        Il est convenu que les comptes d’honoraires de l’avocat ne soient transmis qu’à une seule des commissions scolaires pour paiement et que les honoraires soient partagés en parts égales entre elles. Après paiement, le compte est acheminé aux autres commissions scolaires, deux fois par année, accompagné d’une lettre, pour le remboursement de leur part respective. La Commission scolaire Marie-Victorin assume la coordination du paiement des comptes de Me Jacob jusqu’en 2006, suivie de la Commission scolaire des Grandes-Seigneuries[14].

[14]        Lorsque le paiement des honoraires de Me Jacob est assumé par la Commission scolaire des Grandes-Seigneuries, les informations sont transposées dans un tableau permettant le suivi des paiements. Ce tableau énonce la date et le numéro de chaque facture de l’avocat, le nom du fournisseur (avocat ou expert), l’année scolaire, les commissions scolaires impliquées, le montant dû par chacune d’elles et le total des honoraires professionnels par année[15]. Il inclut également les frais d’experts retenus par le procureur[16].

[15]        Pour l’ensemble des Commissions, peu de personnes à l’interne sont informées du montant des honoraires professionnels payés. Elles se limitent généralement, selon le cas, au secrétaire général, une avocate à l’interne, une adjointe administrative et un agent de bureau du service des ressources financières[17].

[16]        Personne à l’extérieur des Commissions n’a accès aux comptes d’honoraires, ni aux montants des honoraires professionnels payés. Les commissaires et les membres de l’Assemblée générale des commissaires n’ont pas non plus accès à cette information[18].

[17]        Les états financiers des Commissions sont publics et incluent le total des honoraires professionnels payés par chacune d’elles, sans qu’ils ne soient ventilés de manière spécifique. Ils sont incorporés dans diverses catégories générales, tels que services, honoraires et contrat, frais corporatifs ou activités administratives[19].

2.    Le dossier impliquant la Ville

- Les recours judiciaires impliquant la Ville

[18]        À la suite d’événements survenus en 2006, un citoyen, Normand Dubé, intente un recours contre la Ville en responsabilité civile et dépose une plainte en déontologie policière[20].

[19]        Dans le cadre du recours en responsabilité, la Ville est représentée par les avocats mandatés par son assureur. Aucun compte d’honoraires professionnels n’est transmis à la Ville par ces avocats[21].

[20]        La Ville est également représentée par un avocat qu’elle retient pour la portion non couverte par sa police d’assurance, soit la réclamation pour dommages punitifs[22]. Les comptes d’honoraires transmis à la Ville par cet avocat s’échelonnent de novembre 2006 à janvier 2011[23].

[21]        Dans le cadre du dossier en déontologie policière, l’avocat est mandaté par la Fédération des policiers et la Ville acquitte les honoraires de cet avocat[24]. Les comptes d’honoraires transmis couvrent la période de février 2007 à février 2009[25].

[22]        Normand Dubé est également impliqué dans un litige en Cour municipale. Les honoraires d’avocat sont payés par la Ville selon une formule d'avance d’honoraires[26].

- Les demandes d’accès à l’information

[23]       Le 11 février 2011, le journaliste Serge Laplante invoque la Loi sur l’accès et s’adresse à la Ville afin d’obtenir le sommaire ou le total des frais d’avocats payés par elle dans la cause qui l’oppose au citoyen Dubé depuis 2006 dans différentes instances judiciaires[27].

[24]       La Ville refuse de communiquer cette information pour le motif que le compte d’honoraires d’un avocat est protégé par le secret professionnel. Le refus est également basé sur les articles 53 et 54 de la Loi sur l’accès, qui protègent les renseignements personnels d’une personne physique, en l’occurrence le citoyen Dubé[28].

[25]       Le 16 mars 2011, M. Laplante demande à la CAI la révision du refus de la Ville de donner accès aux documents requis[29].

- La facturation des honoraires professionnels à la Ville

[26]       Lors de la réception d’un compte d’honoraires par le greffe de la Ville, le nom du fournisseur et le montant à payer sont saisis au système informatique. Lorsque le compte est approuvé, un bon de commande indiquant le montant à payer est imprimé et transmis à la trésorerie pour paiement[30].

[27]       Les comptes d’honoraires sont classés globalement, par fournisseur et non par dossier. Il n’est pas possible d’identifier le total des honoraires chargés à la Ville dans les litiges l’opposant spécifiquement à Normand Dubé[31]. Un même bon de commande peut concerner plusieurs factures et différents dossiers et contient la date, les numéros de facture, le montant autorisé pour paiement et un descriptif de la nature de la dépense[32].

[28]       La possibilité d’analyser les bons de commandes et chèques pour en extraire uniquement le total des honoraires chargés dans les dossiers visant le citoyen Dubé n’a pas été évaluée par la Ville[33].

[29]       Un échantillon de la facturation, une copie des bons de commande et des chèques émis en rapport avec celle-ci, sont déposés sous le sceau de la confidentialité au dossier de la CAI[34].

3.    Les décisions de la CAI

[30]       Le 12 juin 2012 et le 10 août 2012, la CAI rend ses décisions sur les demandes de révision formulées par le demandeur d’accès : la première[35] dans les quatre dossiers impliquant les Commissions, par la commissaire Me Diane Poitras; la seconde[36] dans le dossier concernant la Ville, par la commissaire Me Line Desbiens.

[31]       Dans les deux cas, la demande de révision formulée par le demandeur d’accès est rejetée et la CAI conclut que le montant des honoraires professionnels de l’avocat constitue une information protégée par le secret professionnel.

- Décision de la CAI impliquant les Commissions

[32]       Le litige est circonscrit par les parties au seul montant total des honoraires professionnels encourus[37].

[33]       La commissaire Poitras indique d’entrée de jeu que le secret professionnel peut être invoqué pour refuser l’accès à un document et que la CAI peut se prononcer en révision d’un tel refus. Elle confirme également, ce qui n’est pas contesté par les parties, que les conditions d’application du secret professionnel sont respectées soit que : 1) Me Jacob a été consulté par les Commissions en sa qualité d’avocat; 2) cette consultation se voulait confidentielle et 3) l’opinion de Me Jacob était recherchée en raison de sa qualité d’avocat.

[34]       Elle procède ensuite à l’étude de la jurisprudence soumise par les parties et, à la lumière des principes qui s’en dégagent, elle analyse la demande d’accès au montant des honoraires professionnels de l’avocat des Commissions. Dans sa décision, la Cour du Québec résume bien le raisonnement de la commissaire Poitras et il convient d’en reproduire intégralement le compte-rendu :

« [58] La commissaire, Me Poitras, rappelle que les comptes d’honoraires professionnels des avocats font partie de la relation avocat-client et qu'ils bénéficient de la protection du secret professionnel. À ce sujet, elle s’appuie sur les décisions de Maranda, Chambre des notaires c. Canada (Procureur général) et Stevens c. Canada (Premier ministre).

[59] Elle reconnaît par ailleurs que, lorsque l’information demandée ne révèle pas de détail quant aux services rendus ou ne porte que sur la question du montant des honoraires professionnels, la jurisprudence est plus nuancée.

[60] Pour la CAI, ces décisions se distinguent de l'affaire dont elle était saisie. Elle préfère retenir les propos énoncés dans la décision Chambre des notaires et surtout ceux énoncés dans la décision Gagnier.

[61] Se fondant sur la décision Chambre des notaires, où la Cour supérieure résume les arrêts de la Cour suprême de Maranda et Société d'énergie Foster Wheeler ltée c. Société intermunicipale de gestion et d'élimination des déchets (SIGED) inc., la CAI dégage les éléments suivants :

·           Qu’il n’y a pas lieu, à priori, de tracer une distinction entre le droit criminel et le droit civil;

·           Dès qu’une relation professionnelle légitime s’établit entre un professionnel du droit et un client, tous les gestes, documents et toutes les informations sont, prima facie, couverts par le secret professionnel;

·           C’est à la personne qui conteste l’existence soit de l’immunité de divulgation, soit de l’obligation de confidentialité, à démontrer pourquoi tel n’est pas le cas;

·           Les exceptions permettant de passer outre au secret professionnel sont rarissimes et ne doivent être utilisées qu’en dernier recours;

·           Tout texte législatif susceptible de porter atteinte au secret professionnel s’interprète restrictivement.

[62] La CAI rejette l’argument mis de l’avant par l’appelant, qu’il faille distinguer l’arrêt Maranda, vu le contexte criminel dans lequel il fut prononcé.

[63] Tout comme l’argument que l’arrêt Kruger constituerait l’arrêt de principe, la jurisprudence ayant considérablement évolué depuis 1988. Que cette décision doit être replacée dans son contexte puisque la Cour d’appel devait concilier le secret professionnel avec les impératifs de la recherche de la vérité, objet d’un procès civil.

[64] La CAI se rallie à la position adoptée par la Cour du Québec dans Gagnier, qui précise que le compte d'honoraires professionnels de l'avocat est dans sa totalité protégé par le secret professionnel et qu'il ne faut pas en distinguer les différentes parties.

[65] Le tableau préparé par les Commissions, ainsi que les lettres transmises pour réclamer leur quote-part, sont des documents confectionnés dans le cadre de la relation professionnelle, ces documents contenant des informations protégées par le secret professionnel.

[66] Il serait incongru de conclure que les renseignements contenus aux comptes d’honoraires, reproduits dans le tableau, perdent pour cette seule raison la protection que leur confère le secret professionnel.

[67] La CAI dit ne détenir aucune preuve permettant de réfuter la présomption voulant que ces informations soient protégées par le secret professionnel ou que les Commissions aient renoncé au respect de ce privilège.

[68] Ces informations ne revêtent pas un caractère public du fait qu’elles sont incluses dans les états financiers. Les honoraires étant inclus de façon agglomérée, ce qui n’est pas contraire à la Loi sur l’instruction publique.

[69] Compte tenu de la conclusion à laquelle elle arrive, la CAI ne se prononce pas sur l’argument soulevé par les Commissions quant au privilège du litige. »

(Citations et références omises)

- Décision de la CAI impliquant la Ville

[35]       A l’instar du dossier impliquant les Commissions, la demande d’accès formulée à l’égard de la Ville se limite à l’obtention du montant total des frais d’avocats payés par celle-ci, dans le cadre de divers recours exercés par un citoyen[38].

[36]       La commissaire Desbiens approuve l’analyse de la jurisprudence effectuée par la commissaire Poitras, qu’elle cite textuellement dans sa décision, concluant que les comptes d’honoraires professionnels d’avocats font partie de la relation avocat-client et bénéficient de la protection du secret professionnel, avec les nuances apportées lorsque l’information ne porte que sur le montant total des honoraires.

[37]       Appliquant ces principes aux documents en litige, soit les comptes d’honoraires d’avocats, les bons de commande et les chèques, elle conclut comme suit :

·           les relevés d’honoraires professionnels bénéficient de la protection du secret professionnel et ne sont pas accessibles au journaliste;

·           la même protection s’applique aux renseignements provenant des comptes d’honoraires, reproduits sur les bons de commande et les chèques;

·          la Ville n’a pas renoncé au secret professionnel et on ne peut présumer d’une telle renonciation par la Fédération des policiers;

·           le droit d’accès à l’information n’est pas automatiquement inclus dans le droit à la liberté d’expression et le journaliste n’a pas démontré que l’accès au sommaire des frais d’avocats payés par la Ville dans la cause qui l’oppose à un citoyen est nécessaire afin qu’il puisse s’exprimer de manière significative;

4.    Le jugement de la Cour du Québec

[38]       Les décisions de la CAI sont portées en appel devant la Cour du Québec et les deux dossiers sont réunis pour fins d’audition. Jugement est rendu le 21 mai 2014[39] et infirme les décisions de la CAI.

[39]       La Cour du Québec applique la norme de la décision correcte pour le motif que les questions soulevées par l’appel revêtent une importance capitale pour le système juridique et qu’il s’agit de questions étrangères au domaine d’expertise du décideur.

[40]       Au terme d’un énoncé des principes rappelant la portée et l’importance du secret professionnel dans le système de justice canadien[40], la Cour du Québec expose comme suit la question soulevée par l’appel:

« [110] La question à laquelle le Tribunal doit répondre s'articule en trois volets. Tout d'abord, est-ce que l'information demandée, limitée au montant des honoraires professionnels payés par un client à son avocat, doit, en toute circonstance, être qualifiée d'information protégée par le privilège du secret professionnel? S'agit-il d'une information qui est prima facie protégée? Si oui, qui a le fardeau de réfuter la présomption? Ce fardeau appartient-il toujours à la personne qui cherche à obtenir l'information? »

[41]       Elle procède ensuite à l’analyse des arrêts de principe, en matière de secret professionnel,  de la Cour Suprême[41], de la Cour d’appel[42], de la Cour Fédérale[43], de la Cour Supérieure[44] et de la Cour du Québec[45] et en retire les conclusions suivantes :

« [175] De cette analyse de la jurisprudence, le Tribunal résume ainsi les principes qui se dégagent de ces affaires :

·           Il n'est pas opportun pour un tribunal de décréter sommairement et dans toutes circonstances qu'un compte d'honoraires d'avocat est automatiquement protégé par le privilège du secret professionnel;

·           Il en est de même lorsque le paiement ou le non-paiement des honoraires est requis;

·           Ce principe vaut d'autant plus lorsque seul le montant des honoraires payés à un avocat, sans autre information, est demandé;

·           Chaque cas est un cas d'espèce. Le tribunal doit en premier lieu déterminer si l'on est entré dans la sphère du secret professionnel. Il est donc nécessaire d'examiner le contexte juridique dans lequel l'information est demandée;

·           À cette fin, il est nécessaire de déterminer si l'information demandée révèle ou non la nature des services rendus, les conseils ou les avis donnés ou si l'information met en cause le caractère confidentiel de la relation professionnelle entre le client et l'avocat;

·           On ne peut établir une distinction entre le domaine du droit criminel et le domaine du droit civil. Dans les deux situations, on doit décider si l'information est privilégiée et si la réponse est affirmative, pour passer outre au privilège il faut la preuve que l'on est en présence d'une exception reconnue;

·           Dans le domaine du droit civil, lorsque l'acte professionnel est ponctuel et que le mandat confié ne peut être qualifié de complexe, une preuve simple et sommaire suffit pour établir la confidentialité des informations recherchées et son droit à une immunité de divulgation;

·           Dans de telles circonstances, c'est à celui qui invoque le privilège du secret professionnel à le démontrer;

·           Dans le cas de mandats complexes, dont l'exécution est prolongée, une présomption de faits réfragables existe, selon laquelle l'ensemble des communications entre le client et l'avocat et les informations sont prima facie confidentiels;

·           Dans de tels cas, c'est à celui qui veut obtenir l'information à renverser cette présomption. »

[42]       Appliquant ces principes, la Cour du Québec statue sur la question soumise et sur son appréciation du raisonnement de la CAI, dans le cadre des paragraphes suivants :

« [176] Le Tribunal est d’opinion que dans les présentes circonstances, la CAI aurait dû, en tout premier lieu, se demander si le montant des honoraires professionnels payés par les Commissions et la Ville à ses avocats était protégé par le secret professionnel. Le contexte est un élément fondamental de la question.

[177] La CAI a erré parce qu’elle a procédé par automatisme, en décrétant que l’information demandée était nécessairement protégée par le secret professionnel, alors qu’elle ne révèle en rien des confidences faites aux avocats ou les conseils reçus.

[178] La CAI a également erré en affirmant qu’il appartenait à l’appelant de prouver que l’information demandée n’était pas protégée par le secret professionnel.

[179] On peut conclure que le compte d’honoraires professionnels est prima facie protégé par le secret professionnel parce que généralement, il contient une description des tâches accomplies, des services rendus et souvent des conseils donnés. Mais on ne peut conclure dans le même sens lorsqu’il s’agit du montant des honoraires professionnels seulement. »

[43]       En conséquence, la Cour du Québec ordonne aux Commissions de transmettre au demandeur d’accès le tableau de suivi des honoraires professionnels confectionné par la Commission scolaire des Grandes-Seigneuries, qui contient l’information requise. Elle retourne le dossier des Commissions devant la CAI afin qu’elle statue, si nécessaire, sur l’application du privilège relatif au litige.

[44]       Elle ordonne à la Ville de transmettre au demandeur d’accès copie des bons de commande et des chèques émis en paiement des honoraires professionnels dans le cadre des dossiers qui opposent la Ville au citoyen Normand Dubé. Ces documents comportent également l’information requise par le demandeur d’accès.

   III.    LA position DES PARTIES

[45]       Les Commissions et la Ville plaident que la Cour du Québec a erré en concluant que le montant des honoraires professionnels d’avocats ne bénéficie pas d’une présomption prima facie voulant qu’il soit protégé par le secret professionnel et en leur imposant le fardeau de faire cette démonstration dans leur cas respectif. Elles soutiennent qu’il appartenait plutôt au demandeur d’accès d’établir que le montant des honoraires professionnels d’avocats ne se situait pas dans l’aire d’application du secret professionnel, ce qu’il a omis de faire.

[46]       Les Commissions reprochent à la Cour du Québec d’avoir implicitement demandé à la CAI, en lui retournant le dossier, d’analyser l’application du privilège relatif au litige au regard de la situation prévalant actuellement dans le dossier du Tribunal des droits de la personne, plutôt qu’en fonction de celle existant au moment des demandes d’accès.

[47]       Elles soumettent également que la Cour du Québec a jugé ultra petita en ordonnant la communication du tableau de suivi des honoraires professionnels confectionnée par l’une des Commissions.

[48]       La Ville lui reproche finalement de ne pas avoir retourné le dossier à la CAI afin qu’elle tranche ses arguments subsidiaires fondés sur la restriction d’accès visant des renseignements personnels du citoyen Dubé, basée sur certaines dispositions de la Loi sur l’accès.

[49]       Le demandeur d’accès soutient pour sa part que la décision de la Cour du Québec ne comporte aucune erreur, qu’elle est bien motivée et rendue au terme d’une analyse minutieuse et étoffée de la jurisprudence.

  IV.    LES QUESTIONS EN LITIGE

1)    La Cour du Québec a-t-elle erré en concluant que le montant des honoraires professionnels d’avocats encourus par les Commissions et par la Ville n’est pas protégé par le secret professionnel de l’avocat ?

2)    Dans le dossier impliquant les Commissions, la Cour du Québec a-t-elle suggéré que l’application du privilège relatif au litige est une question qui doit être appréciée par la CAI en fonction de la situation qui prévaut actuellement dans le dossier du Tribunal des droits de la personne plutôt qu’à la lumière de la situation existant au moment de la demande d’accès? Le cas échéant, a-t-elle erré à cet égard?

3)    La Cour du Québec a-t-elle rendu une décision ultra petita en ordonnant la communication du tableau de suivi des honoraires professionnels confectionné par la Commission scolaire des Grandes-Seigneuries ?

4)    La Cour du Québec a-t-elle excédé sa compétence en statuant sur les demandes d’accès sans retourner le dossier à la CAI pour qu’elle se prononce sur les arguments subsidiaires de la Ville?

   V.    LA NORME DE CONTRÔLE APPLICABLE 

[50]       Les Commissions et la Ville soumettent que les questions en litige devraient être assujetties à la norme de la décision correcte. Selon le demandeur d’accès, la norme applicable est plutôt celle de la décision raisonnable.

[51]       Il importe d’abord de déterminer si la Cour du Québec, en retenant la norme de la décision correcte quant aux décisions de la CAI, a choisi la norme de contrôle  appropriée et, si tel est le cas, si elle l’a bien appliquée[46].

[52]       La CAI est un tribunal administratif détenant une expertise relative[47] qui doit être respectée lorsqu’elle examine des questions qui relèvent directement de son champ de spécialité.

[53]       Toutefois en l’instance, la question principale en litige soulevée devant la CAI se rattache directement à la portée et à l’interprétation du secret professionnel de l’avocat. La Cour d’appel, citant la Cour Suprême dans l’arrêt Dunsmuir[48], rappelle qu’il importe qu’il soit statué sur de telles questions, par les instances administratives, de manière cohérente et uniforme et que la norme de la décision correcte s’applique ainsi à leurs décisions en pareille matière :

Il en va autrement en matière de secret professionnel de l’avocat. Peu importe le contexte, en pareille matière, les conditions d’application et de renonciation à un tel droit fondamental demeurent les mêmes. Les organismes administratifs aux prises avec une question de renonciation au secret professionnel doivent statuer correctement sur ce point. L'importance de la question du respect du secret professionnel pour le système juridique est fondamentale et doit être tranchée de manière uniforme et cohérente, étant donné ses répercussions sur l'administration de la justice dans son ensemble (…)[49]

[54]       Malgré la compétence de la CAI en matière d’accès à l’information, la question soumise, capitale pour le système juridique, outrepasse sa connaissance en ce qu’elle ne relève pas de sa mission spécialisée. Elle requiert l’application d’une norme d’intervention rigoureuse[50]. La Cour du Québec a adéquatement retenu la norme de la décision correcte pour sa révision des décisions de la CAI.

[55]       Le même raisonnement s’applique quant à la norme applicable pour la révision de la décision de la Cour du Québec sur cette question. Lorsque la jurisprudence établit de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier, la Cour suprême enseigne qu’il n’est pas nécessaire de se livrer à une analyse exhaustive pour arrêter la bonne norme de contrôle[51].

[56]       Or, la jurisprudence québécoise[52] et canadienne[53] est bien arrêtée quant à l’application de la norme de la décision correcte à la révision d’une décision portant sur le secret professionnel de l’avocat. Les questions qui ont des répercussions sur l’administration de la justice dans son ensemble et qui doivent, afin d’assurer l’ordre juridique, être décidées d’une manière uniforme et cohérente, doivent être tranchées en fonction de la norme de la décision correcte[54]. Cette norme de contrôle s’applique donc à la révision de la décision de la Cour du Québec sur la question visant à déterminer si le secret professionnel de l’avocat protège le montant des honoraires encourus par les Commissions et la Ville.

[57]       La question visant à statuer si la Cour du Québec a erronément soumis une directive à la CAI d’analyser l’application du privilège relatif au litige à la lumière de la situation actuelle est soumise à la même norme d’intervention. Il s’agit d’une question de compétence ou à tout le moins, d’une question de droit qui mérite un traitement selon la norme de la décision correcte. Le Tribunal devra préalablement déterminer si, comme le soutiennent les Commissions, la juge a effectivement émis les directives qui lui sont reprochées.

[58]       Les deux dernières questions en litige constituent l’accessoire de la première et mettent en cause la compétence de la Cour du Québec. Elles visent à déterminer s’il y a eu décision ultra petita et ainsi excès de compétence par la Cour du Québec comme le soutiennent les Commissions et la Ville. La norme de la décision correcte s’y applique également[55].

[59]       Par conséquent, le Tribunal doit conduire sa propre analyse et rendre la décision appropriée à l’égard de chacune des questions en litige s’il n’est pas en accord avec celle rendue par la Cour du Québec :

[60]       Rappelons que dans le cas d’une question de droit générale « à la fois, d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et étrangère au domaine d’expertise de l’arbitre » (Toronto (Ville) c. S.C.F.P., par. 62, le juge LeBel), la cour de révision doit également continuer de substituer à la décision rendue celle qu’elle estime constituer la bonne.  Pareille question doit être tranchée de manière uniforme et cohérente étant donné ses répercussions sur l’administration de la justice dans son ensemble (…)[56]

  VI.    ANALYSE ET DÉCISION

1. La Cour du Québec a-t-elle erré en concluant que le montant des honoraires professionnels d’avocats encourus par les Commissions et par la Ville n’est pas protégé par le secret professionnel de l’avocat ?

[60]       Il est acquis au débat que le demandeur d’accès ne recherche que le fait brut du montant des honoraires d'avocats chargés aux Commissions et à la Ville dans les dossiers identifiés. La question soulevée se résume donc à déterminer si le montant des honoraires appartient à la sphère privilégiée et confidentielle de la relation entre l’avocat et son client dans le cadre spécifique de ces dossiers.

[61]       Pour les motifs qui suivent, la juge Cour du Québec a fait erreur lorsqu’elle conclut que le montant des honoraires professionnels n’est pas prima facie protégé par le secret professionnel et qu’il incombe à la partie qui soutient que cette information est soumise au privilège du secret professionnel de le démontrer. 

1.1 Le privilège du secret professionnel de l’avocat

[62]       Aucune des parties ne remet en cause l’importance fondamentale du droit au secret professionnel découlant de la relation avocat-client. Le privilège du secret professionnel de l’avocat s’entend du lien privilégié existant entre un client et son avocat et vise à favoriser une communication franche et complète entre ceux-ci. Le client doit sentir qu’il peut s’exprimer de façon complète, libre et franche sur les éléments nécessaires à sa bonne représentation devant la justice et qu’il bénéficie d’une protection à cet égard[57].

[63]       Depuis les arrêts Solosky et Descôteaux rendus au début des années 1980, la Cour suprême reconnaît que le caractère confidentiel des communications entre un avocat et son client constitue non seulement une règle de preuve mais également une règle de fond et un principe de droit fondamental[58].

[64]       Au Québec, le secret professionnel est expressément enchâssé dans la Charte des droits et libertés de la personne[59], l’élevant ainsi au rang de droit fondamental, qui jouit d’une protection quasi-constitutionnelle. Le Code des professions, la Loi sur le Barreau et le Code de déontologie des avocats[60] imposent également le respect du secret professionnel[61]. Découle de cette obligation de confidentialité, une immunité de divulgation qui protège, sauf exceptions limitées, le contenu de l’information contre sa communication forcée, même dans le cadre d’instances judiciaires.

[65]       En common law, les communications entre un conseiller juridique et son client sont considérées protégées par un privilège « générique », soit une forme d'immunité prima facie de divulgation en justice. Un privilège générique justifie ainsi l’application d’une présomption prima facie d’inadmissibilité[62].

[66]        Le privilège appartient au client et seul celui-ci peut l’invoquer ou y renoncer, directement ou par consentement éclairé[63]. Si la renonciation à ce droit fondamental peut être implicite, il n'en faut pas moins que le consentement à cette fin soit éclairé, libre et sans équivoque[64].

[67]       La preuve de l'existence de trois critères particuliers doit être établie pour qu'une information soit considérée comme protégée par le secret professionnel de l'avocat : (i) « une communication entre un avocat et son client »; (ii) « qui comporte une consultation ou l'obtention d'un avis juridique »; et (iii) « que les parties considèrent de nature confidentielle »[65].

[68]       Malgré son importance, le secret professionnel de l’avocat n’est pas absolu et est assujetti à des exceptions dans de rares circonstances, notamment pour permettre à un accusé de présenter une défense pleine et entière[66] ou pour prévenir la mise en péril de la sécurité publique[67]. Le secret professionnel ne cède le pas que dans certaines circonstances bien définies et ne nécessite pas une évaluation des intérêts dans chaque cas[68].

-fardeau de preuve

[69]       Dans Foster Wheeler, la Cour suprême se prononce sur l’étendue et les modalités d’exercice du secret professionnel en droit civil québécois et de l’une de ses composantes, l’immunité de divulgation. Elle statue sur les fardeaux de preuve qui permettent d’invoquer le secret professionnel ou d’en limiter la portée.

[70]       Ainsi, lorsque comme dans le cas Foster Wheeler, la relation professionnelle découle d’un mandat complexe à exécution prolongée, la délimitation de l’aire d’application de l’obligation de confidentialité exige du tribunal une analyse parfois poussée des rapports entre les parties, comme de la nature et du contexte des services professionnels rendus[69]. Le secret professionnel ne couvre pas nécessairement tous les faits ou tous les événements que constate l’avocat au cours de l’exécution de son mandat[70].

[71]       Les solutions proposées par la Cour suprême varient ainsi en fonction des circonstances :

-       lorsqu'il est question d'actes professionnels ponctuels, une preuve simple ou sommaire est nécessaire au titulaire du secret professionnel pour établir la confidentialité de chacune des informations recherchée et son droit à une immunité de divulgation[71].

-       Dans les cas de mandats complexes et à exécution prolongée, la partie qui invoque le secret professionnel peut généralement se limiter à démontrer l'existence d'un mandat général, pour qu'une présomption de confidentialité s'applique à l'ensemble des communications entre le client et son avocat. Cette présomption de fait peut cependant être renversée si la partie qui demande la divulgation des informations démontre que celles-ci ne constituent pas des communications de nature confidentielle[72].

- Portée du secret professionnel

[72]       Si important que soit le secret professionnel, il connaît des limites et tout n’est pas nécessairement confidentiel lorsqu’un avocat est entré en rapport avec le client[73]. Le secret professionnel ne couvre pas nécessairement tous les faits ou tous les événements que constate l'avocat au cours de l'exécution de son mandat[74] ni tous les documents en la possession de l’avocat[75]. Il serait cependant inapproprié de tenter de réduire le contenu de l’obligation à celui de l’opinion, de l’avis ou du conseil juridique[76].

[73]       Le nom du client peut notamment être protégé par le secret professionnel mais ce n’est pas toujours le cas[77]. Le conseil de l’avocat sur de pures questions d’affaire ne sera pas couvert par le secret professionnel[78].

[74]       Qu’en est-il du compte d’honoraires professionnel de l’avocat et plus spécifiquement, du montant des honoraires?

1.2 Le compte d’honoraires professionnels de l’avocat et le montant des honoraires

[75]       Les tribunaux se sont prononcés dans le cadre de litiges de nature criminelle, civile ou commerciale, ainsi que dans celui de demandes d’accès à l’information, sur la protection que confère le secret professionnel au compte d’honoraires professionnels de l’avocat. Le Tribunal retient de ces décisions que, bien que le compte d’honoraires de l’avocat bénéficie d’une présomption de confidentialité basée sur le secret professionnel, celle-ci peut être renversée au terme d’une analyse du contexte et des circonstances dans lesquels se situe la demande formulée, permettant de déterminer si, dans le cas en l’espèce, le secret professionnel protège effectivement l’information requise.

- arrêt Maranda

[76]       Dans la décision Maranda, la Cour suprême se penche, dans le cadre d’une perquisition exercée au sein du bureau d’un avocat, sur le caractère privilégié que revêt le montant des honoraires de l’avocat chargés à un client qui fait l’objet d’une enquête criminelle menée par les autorités policières. La Cour suprême, sous la plume du juge LeBel, conclut qu’en droit, lorsqu’il s’agit d’autoriser une perquisition dans un cabinet d’avocats, le fait même du montant des honoraires doit être considéré comme un élément d’information protégé, en règle générale, par le privilège avocat-client[79]. Le juge Lebel prend bien soin de situer le débat dans le contexte de la règle interdisant la délivrance de tout mandat de perquisition touchant des informations à caractère privilégié, telle que précisée dans l’arrêt Lavallée.[80]. Il énonce également que la solution à la question soulevée doit respecter les principes fondamentaux de la procédure criminelle, dont le droit au silence et la protection constitutionnelle contre l’auto-incrimination[81].

- arrêt Cunningham

[77]       Dans Cunningham, la Cour suprême circonscrit la portée de l’arrêt Maranda en précisant :

Dans le contexte d’une perquisition, les renseignements sur les honoraires sont protégés prima facie, car leur communication pourrait être préjudiciable au client. Lorsque le ministère public demande leur communication, il appartient au tribunal, et non à la police, de déterminer s’ils sont effectivement protégés[82].

(nos reliefs)

[78]       La Cour suprême devait déterminer si dans cette affaire pénale, un tribunal pouvait refuser d’autoriser un avocat de la défense à cesser d’occuper pour cause de non-respect par l’accusé des conditions financières du mandat. Dans ce contexte, l’avocate de l’accusé  faisait valoir que la simple divulgation que son client n’avait pas acquitté ses honoraires violait le droit de celui-ci au secret professionnel. Le juge Rothstein, s’exprimant pour la Cour, tient en considération le contexte dans lequel s’inscrit la demande pour statuer sur l’argument de l’accusé:

[29] La demande présentée par un avocat pour cesser d’occuper en raison du non - paiement de ses honoraires s’inscrit dans un contexte nettement différent de celui de la perquisition policière visant les dossiers et les comptes d’un avocat.  La plus grande différence tient à la teneur des renseignements mis au jour.  L’avocat qui demande à cesser d’occuper ne révèle qu’une bribe d’information, à savoir que l’accusé n’a pas acquitté ses honoraires ou qu’il ne les acquittera pas.  En quoi la communication de ce minime élément d’information pourrait-elle en l’espèce être préjudiciable à l’accusé?  Nulle explication n’est avancée.  On voit d’ailleurs difficilement comment ce simple fait pourrait être utilisé contre l’accusé pour établir le fondement de la poursuite pénale : il n’a de lien ni avec les renseignements donnés à l’avocat ni avec les conseils obtenus de ce dernier.  On ne pourrait inférer du seul non-paiement des honoraires que l’accusé s’est livré à quelque activité particulière liée aux accusations portées contre lui.

[30] Tel est assurément le cas lorsque le non-paiement des honoraires n’a pas de lien avec le fondement de l’affaire et que sa mise au jour n’est pas préjudiciable à l’accusé.  Toutefois, dans d’autres contextes juridiques, le paiement ou le non-paiement des honoraires peut être pertinent pour ce qui concerne le fondement de l’affaire lorsque, par exemple, en droit de la famille, une pension alimentaire est demandée et que le client allègue l’impécuniosité.  Révéler le non-paiement des honoraires de l’avocat peut aussi infliger un préjudice au client lorsque, par exemple, le défendeur décide alors de présenter une demande de cautionnement pour dépens.  Dans le cas où le paiement des honoraires ou leur non-paiement est pertinent pour ce qui est du fondement de l’affaire ou que sa mise au jour peut être préjudiciable au client, le secret professionnel de l’avocat peut s’y appliquer.

(nos reliefs)

- arrêt Chambre des notaires

[79]       La Cour d’appel du Québec dans Chambre des notaires, se prononce sur une requête en jugement déclaratoire de l’ordre professionnel des notaires visant à faire déclarer inconstitutionnels certains articles de la loi fédérale de l’impôt sur le revenu qui imposait à ses membres, sur demande péremptoire, de transmettre certaines informations ou documents quant à leurs clients. La Cour y confirme que les comptes d’honoraires des avocats bénéficient prima facie d’une présomption de confidentialité liée au secret professionnel[83].

[80]       Par ailleurs, la Cour ajoute que la détermination de la protection par le secret professionnel, d’un document ou d’un renseignement, dépend des circonstances et s’effectue au cas par cas :

(…) D’ailleurs, il se peut bien que, dans telle ou telle circonstance, un renseignement ou un document précis ne soit pas protégé par le secret professionnel, mais puisse l’être en d'autres circonstances. Il est donc difficile de dire à l'avance ce qui relève ou ne relève pas du secret professionnel du notaire (ou de l'avocat), affaire qui se détermine forcément au cas par cas(…).[84]

(nos reliefs)

[81]       Les auteurs Royer et Lavallée, dans la section sur le secret professionnel de leur ouvrage sur la preuve civile, résument comme suit l’état de la jurisprudence quant aux comptes d’honoraires des avocats:

Les comptes d’honoraires sont souvent protégés par le secret professionnel. En matière pénale, une demande d’information sur les comptes d’honoraires d’un avocat de la défense remet en cause des droits fondamentaux, notamment le privilège contre l’auto-incrimination. Ainsi, le montant des honoraires est généralement protégé par le privilège avocat-client. Par ailleurs, en matière civile, un avocat ou un expert consulté par cet avocat peuvent être forcés de produire des comptes d’honoraires qui ne décrivent pas en détail la nature des services rendus.[85]

(références omises)

[82]       Ainsi, si le compte d’honoraires bénéficie d’une présomption de confidentialité rattachée au secret professionnel, celle-ci peut être renversée par notamment, la démonstration que la communication du compte d’honoraires ne violera pas la confidentialité de la relation client-avocat par la révélation, directe ou indirecte, d’une communication protégée par le privilège.

[83]       Dans les décisions suivantes, la Cour d’appel du Québec statue que le secret professionnel ne protège pas la note d’honoraires de l’avocat ou certaines de ses composantes, selon les faits propres à l’affaire.

- arrêt Kruger

[84]       L’arrêt Kruger rendu par le juge LeBel alors à la Cour d’appel, se situe dans le contexte d’un recours en oppression dans le cadre duquel il était reproché à la défenderesse, notamment, d’avoir payé des honoraires professionnels pour des services rendus en réalité au bénéfice des actionnaires majoritaires. La communication de comptes d’honoraires d’avocats était requise auprès d’un témoin au procès et une objection à cet égard, basée sur le secret professionnel, était soulevée.

[85]       Le juge LeBel situe d’emblée le débat en énonçant qu’il s’agit « plus simplement de déterminer si les informations recherchées sont couvertes par le secret professionnel, dans les circonstances de cette affaire[86]  (nos reliefs)

[86]       Précisant que dans certains cas, l’information sur la nature même des services posés pourrait violer le secret professionnel, notamment si le compte relate en détails la nature et la date des services rendus, le juge LeBel statue que dans le cas en l’espèce, les comptes d’honoraires en litige ne comportent aucune information permettant de déterminer la nature des services rendus, ni des avis ou conseils donnés. La Cour conclut que rien dans le contexte de ce dossier n’affecte le secret professionnel.

- arrêt Nortel

[87]        Dans le cadre du règlement hors Cour du recours collectif impliquant Nortel[87], les avocats des recours collectifs demandaient, par requête en homologation, d’approuver les montants de leurs honoraires extrajudiciaires. La Cour d’appel avait, dans ce contexte, à se prononcer sur le refus de ces avocats, fondé sur le secret professionnel, d’accorder l’accès à leurs relevés d’honoraires professionnels. Le litige se résumait essentiellement, sous réserve de certaines nuances propres au recours collectif, à une réclamation d'honoraires professionnels des avocats envers leurs clients au sens large du terme.

[88]       La Cour d’appel rappelle que le contenu de l’obligation de confidentialité, en particulier en ce qui concerne les honoraires professionnels de l’avocat, n’est pas sans limite et qu’il est susceptible de varier en fonction des circonstances[88].

- arrêt Ruffo[89]

[89]       Par requête préliminaire présentée devant cinq juges de la Cour d’appel en marge d’une enquête sur sa conduite, la juge Ruffo de la Cour du Québec demandait l’arrêt des procédures. Elle plaidait notamment avoir subi une atteinte irrémédiable à son droit au secret professionnel par la divulgation d’informations relatives aux honoraires professionnels de ses avocats. Seul le montant total payé aux avocats de la juge Ruffo à même les fonds publics avait été révélé aux termes d’une demande formulée en vertu de la Loi sur l’accès.

[90]       Établissant une distinction entre le contexte de l’affaire Maranda et celles soumises par la juge Ruffo, la Cour d’appel réitère que les circonstances sont déterminantes dans l’appréciation d’une violation du droit au secret professionnel :

Or, le contexte de la présente affaire est tout autre que celui d’une perquisition exécutée au bureau de l’avocat d’un accusé dans un procès criminel. Les notes d’honoraires des avocats de madame la juge Ruffo ont été préparées par ceux-ci dans le but exprès d’être communiquées à l’administration québécoise pour paiement. On peut présumer qu’ils ont pris les précautions nécessaires pour éviter que la description des services ne compromette le droit de leur cliente au secret professionnel. La divulgation du montant des notes d’honoraires a pu être une cause d’embarras pour madame la juge Ruffo, mais elle ne constitue pas, en soi, une violation de son droit au secret professionnel dans les circonstances de l’espèce[90].

(nos reliefs)

[91]       Les tribunaux d’autres provinces se sont également penchés sur des questions similaires à celle en litige, soulevées dans le cadre de demandes d’accès à l’information.

[92]       La Cour d’appel de Colombie Britannique, dans le contexte d’une demande d’accès par une journaliste à la liste des 10 avocats ayant le plus facturé l’aide juridique de la province en droit de l’immigration et en droit criminel pendant une période circonscrite[91], statue que l’information est protégée par le secret professionnel. Les montants avaient été révélés suite à la demande d’accès mais les noms des avocats avaient été omis en raison du secret professionnel que cette divulgation risquait de compromettre, selon la Legal Aid Society. La Cour conclut que le risque que la communication du nom des avocats puisse permettre d’identifier les clients qu’ils représentaient est important et justifie la protection de l’information.

[93]       Quelques années plus tard, la Cour d’appel d’Ontario se prononce sur une demande d’accès à l’information soumise par des journalistes auprès du Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée[92]. Cette demande portait sur le montant total des honoraires versés par le Procureur général à deux avocats ayant agi pour deux intervenants dans le cadre de procédures criminelles. La Cour, après avoir statué que le montant des honoraires constituait une information présumée couverte par le secret professionnel de l’avocat, conclut au renversement de la présomption:

The presumption can be rebutted if there is no reasonable possibility that disclosure of the amount of the fees paid will directly or indirectly reveal any communication protected by the privilege. In determining whether disclosure of the amount paid could compromise the communications protected by the privilege, we adopt the approach in Legal Services Society v. Information and Privacy Commissioner of British Columbia (2003), 226 D.L.R. (4th) 20 at 43-44 (B.C.C.A.). If there is a reasonable possibility that the assiduous inquirer, aware of background information available to the public, could use the information requested concerning the amount of fees paid to deduce or otherwise acquire communications protected by the privilege, then the information is protected by the client/solicitor privilege and cannot be disclosed (…)[93]

We see no reasonable possibility that any client/solicitor communication could be revealed to anyone by the information that the IPC ordered disclosed pursuant to the two requests in issue on this appeal. The only thing that the assiduous reader could glean from the information would be a rough estimate of the number of hours spent by the solicitors on behalf of their clients. In some circumstances, this information might somehow reveal client /solicitor communications. We see no realistic possibility that it can do so in this case (…)[94]

(nos reliefs)

[94]       La Cour Supérieure de l’Ontario tranche dans le même sens dans le cadre d’une demande d’accès formulée par un journaliste qui, comme en l’instance, ne visait qu’à obtenir le seul montant des honoraires versés aux avocats. Les services de ceux-ci avaient été retenus par le gouvernement provincial dans le cadre de recours judiciaires intentés contre certains ministères pour les services octroyés aux enfants atteints d’autisme[95]. Le tribunal autorise la divulgation de l’information puisqu’elle se limite au montant total des honoraires et qu’aucun renseignement quant aux détails des comptes, qui permettraient d’en retirer des informations privilégiées, n’est ainsi requis.

[95]       Cette revue de la jurisprudence permet de conclure que le compte d’honoraires professionnels de l’avocat bénéficie prima facie d’une présomption de confidentialité fondée sur le secret professionnel et que cette présomption est simple, donc réfragable. Ainsi, si la démonstration est faite que le compte d’honoraires ne contient aucune information dont la communication serait susceptible de porter atteinte à la confidentialité de la relation professionnelle, dans le contexte spécifique de l’affaire, le compte d’honoraires ne sera pas protégé par le secret professionnel.

[96]       Aucune distinction ne s’effectue eu égard aux différents éléments composant le compte d’honoraires, qui bénéficie de la protection dans sa totalité. Ainsi, la même présomption s’applique lorsque seul le fait brut du montant des honoraires et débours versés à un avocat dans le cadre d’un mandat juridique est recherché, sans autre information telle que la date précise des services rendus, leur nature ou leur contexte. La démonstration peut toutefois être faite, par la partie qui requiert l’information quant au montant des honoraires, du caractère non privilégié de celle-ci et qu’une telle communication peut être effectuée sans qu’il ne soit porté atteinte au secret professionnel.

[97]       Le contexte et les circonstances constituent un critère d’analyse central et permettent, dans certaines situations particulières, de statuer que le compte ou le montant des honoraires n’est pas couvert par le secret professionnel[96], et dans d’autres contextes, de déterminer le contraire[97].

1.3 analyse du jugement de la Cour du Québec

[98]       Rappelons que les décisions de la CAI sont protégées par une clause privative et qu’il s’agit d’une instance spécialisée. Le Tribunal doit faire preuve de déférence à l’égard des conclusions de faits puisque c’est la CAI qui a entendu la preuve[98]. La preuve soumise à l’audience devant la CAI, dans les deux dossiers, n’a pas été transcrite et aucune erreur dans l’analyse factuelle des commissaires n’est soulevée par les parties. Par conséquent, le Tribunal s’en remet à la preuve telle que rapportée par les commissaires Poitras et Desbiens.

[99]       Dans les deux cas, la CAI a correctement appliqué les enseignements des tribunaux supérieurs eu égard à l’application d’une présomption réfragable de confidentialité protégeant les comptes d’honoraires et les honoraires professionnels des avocats visés par les demandes d’accès. La CAI a suivi la méthode analytique enseignée par les tribunaux et soupesé la preuve soumise, de part et d’autre, pour  conclure que la présomption n’était pas renversée, ni dans l’un ni dans l’autre des dossiers.

[100]    Avec égards, la Cour du Québec commet une erreur en droit lorsqu’elle énonce que 1) la CAI a erré en affirmant qu’il appartenait à l’appelant (le demandeur d’accès) de prouver que l’information demandée n’était pas protégée par le secret professionnel et que 2) le compte d’honoraires professionnels est prima facie protégé par le secret professionnel parce que généralement, il contient une description des tâches accomplies, des services rendus et souvent des conseils donnés mais qu’on ne peut conclure dans le même sens lorsqu’il s’agit du montant des honoraires professionnels seulement[99]. La jurisprudence des tribunaux supérieurs n’établit pas cette distinction. La Cour du Québec a d’ailleurs correctement conclu en ce sens dans la décision Gagnier[100], invoquée par la CAI au soutien de son raisonnement dans les deux dossiers.

[101]    La Cour du Québec fait d’abord erreur dans l’attribution du fardeau de preuve à cet égard[101], pour les motifs suivants.

- nature des mandats juridiques

[102]    La décision de la Cour du Québec fondée sur les enseignements de l’arrêt Foster Wheeler quant à la nature du mandat confié par les Commissions à leur procureur dans le cadre du recours collectif Desgagnés s’avère, avec égards, déraisonnable et mal fondée. Elle compare la nature du mandat dans le recours collectif Desgagnés à celui de l’affaire Foster Wheeler pour déterminer que le litige impliquant les Commissions n’est pas complexe et à exécution prolongée. Elle en conclut que la présomption de confidentialité à l’égard de l’ensemble des communications entre Me Jacob et les Commissions est inapplicable[102].

[103]    La décision de la Cour du Québec à cet égard est insuffisamment motivée et ne s’appuie pas sur la preuve présentée devant la CAI.

[104]    La preuve soumise quant au déroulement du dossier, de 2003 à 2010, démontre plutôt que le recours collectif Desgagnés constitue ce qu’il convient de qualifier de mandat complexe, à exécution prolongée. Ce recours implique au départ neuf commissions scolaires et la présentation de la requête en autorisation d’exercer un recours collectif se déroule au cours d’une audition d’une semaine, au terme de laquelle un jugement d’autorisation est rendu en octobre 2004. De nombreuses procédures précèdent le procès au mérite, d’une durée de 59 jours entre octobre 2009 et mars 2010, durant lesquels 60 témoins ordinaires et 11 témoins experts sont entendus, et 430 pièces sont déposées[103].

[105]    Il convient donc d’appliquer, à l’égard de l’ensemble des communications entre les Commissions et leur procureur dans le cadre du recours collectif Desgagnés, une présomption de confidentialité fondée sur le secret professionnel. Cette présomption de fait peut cependant être renversée si la partie qui demande la divulgation des informations, le demandeur d’accès en l’occurrence, justifie que celles-ci ne constituent pas des communications de nature confidentielle[104].

[106]    Par ailleurs, la Cour du Québec omet de faire le même exercice pour le dossier de la Ville. D’ailleurs, il semble qu’aucune preuve n’ait été présentée à la CAI quant à la complexité des mandats dans ce dossier.

[107]    Quoi qu’il en soit, le compte d’honoraires professionnels de l’avocat et ses composantes sont protégés prima facie par une présomption réfragable de confidentialité, applicable tant à l’égard des demandes d’accès visant la Ville qu’à l’égard de celles impliquant les Commissions.

- présomption de confidentialité

[108]    Contrairement à ce qu’énonce la Cour du Québec, il appartient au demandeur d’accès de réfuter cette présomption.

[109]    La CAI a considéré dans le dossier des Commissions, à la lumière des éléments de preuve et des arguments soumis, qu’elle ne bénéficiait d’aucune preuve lui permettant de renverser la présomption à l'effet que ces informations soient protégées par le secret professionnel ou démontrant que les Commissions y aient renoncé[105].

[110]    Quant au recours collectif Desgagnés, elle a statué que les renseignements contenus aux comptes d’honoraires de Me Jacob ne perdaient pas la protection conférée par le secret professionnel du seul fait qu’ils étaient reproduits dans les tableaux pour fins de paiement. La CAI retient la preuve selon laquelle la communication du montant des honoraires versés à leur procureur serait préjudiciable aux Commissions parce qu’elle diminuerait leurs chances de régler les litiges connexes en procurant un avantage à l’autre partie dans leurs négociations de règlement[106]. Ce renseignement révèlerait à la partie adverse l’ampleur des moyens financiers que les Commissions peuvent déployer pour leur défense[107].

[111]    Dans le dossier de la Ville, la CAI conclut que les comptes d’honoraires des avocats mandatés par la Ville et par le syndicat, qui contiennent notamment une description des travaux effectués, bénéficient du secret professionnel[108]. Elle statue dans le même sens quant aux chèques et aux bons de commandes, lesquels incluent la date, les numéros de facture, le montant autorisé pour paiement et le descriptif de la nature de la dépense[109].

[112]    A tort, le demandeur d’accès soutient que, dans le contexte d’une demande basée sur la Loi sur l’accès, le fardeau de démontrer que l’information requise peut être communiquée sans qu’il ne soit porté atteinte au secret professionnel s’avère difficile sinon impossible à respecter, compte tenu du fait qu’en vertu de la loi, le demandeur d’accès n’a pas à exposer ses intentions ni les motivations qui supportent sa requête[110].

[113]    Le fardeau de réfuter la présomption applicable demeure le même, que la demande d’accès soit soumise sur la base de la Loi sur l’accès ou, par exemple, dans le contexte d’un litige civil ou commercial. Comme le plaident à juste titre les Commissions, il serait inapproprié que le secret professionnel reçoive une protection moins importante lorsque l’information protégée est requise dans le cadre d’une demande d’accès à l’information plutôt que par la voie d’une autre procédure.

[114]    Le demandeur d’accès invoque le fait que les Commissions et la Ville sont des organismes publics, qu’elles assument les honoraires professionnels des avocats qu’elles mandatent à même les fonds publics et que le droit à l’information et à la liberté d’expression doit être considéré dans l’analyse de cette demande.

[115]     La Cour suprême dans Criminal Lawyers Association[111] énonce que la protection constitutionnelle du droit à la liberté d’expression comporte un droit d’accès à des documents seulement si l’accès est nécessaire à la tenue pour le public d’une discussion significative sur une question d’importance et ce, sous réserve de contraintes fonctionnelles et de privilèges[112] :

L’alinéa 2b)  de la Charte canadienne des droits et libertés  garantit la liberté d’expression, mais il ne garantit pas l’accès à tous les documents détenus par le gouvernement.  En effet, l’accès à ces documents n’est protégé, sur le plan constitutionnel, que lorsqu’il est démontré qu’il s’agit d’une condition qui doit nécessairement être réalisée pour qu’il soit possible de s’exprimer de manière significative, qu’il n’empiète pas sur des privilèges protégés, et qu’il est compatible avec la fonction de l’institution en cause[113].

(nos reliefs)

[116]    Dans un premier temps, aucune preuve n’a été administrée devant la CAI quant à la nécessité pour le demandeur d’accès, afin qu’il puisse exercer son droit à la liberté d’expression, d’avoir accès aux montants des honoraires professionnels versés dans le cadre des dossiers visés par ses demandes. De plus, l’accès aux renseignements requis en l’espèce empiète sur le privilège du secret professionnel dont l’application n’a pas été renversée par le demandeur d’accès.

[117]    L’analyse des faits et de la preuve par la CAI, domaine relevant de sa compétence exclusive, l’a conduite dans l’un et l’autre cas à conclure que la présomption n’était pas réfutée. La Cour du Québec n’aurait pas dû intervenir et annuler les décisions de la CAI. Le raisonnement juridique de la Cour du Québec est incorrect et elle a erré en statuant que le montant des honoraires de l’avocat dans les dossiers soumis et dans les circonstances particulières établies devant la CAI, n’était pas protégé par le privilège du secret professionnel.

2. Dans le dossier impliquant les Commissions, la Cour du Québec a-t-elle suggéré que l’application du privilège relatif au litige est une question qui doit être appréciée par la CAI en fonction de la situation qui prévaut actuellement dans le dossier du Tribunal des droits de la personne plutôt qu’à la lumière de la situation existant au moment de la demande d’accès? Le cas échéant, a-t-elle erré à cet égard?

[118]    Les Commissions plaident qu’aux paragraphes 14 et 181 de sa décision, la Cour du Québec laisse entendre, quoique indirectement, que la question du privilège relatif au litige doit être appréciée au regard de la situation actuelle du litige connexe dans le dossier du Tribunal des droits de la personne plutôt qu’à la lumière de la situation existant au moment de la demande d’accès.

[119]    Le Tribunal n’est pas de cet avis. La Cour du Québec n’émet aucune directive spécifique ni même implicite, ni aux paragraphes 14, 180 et 181 ni à ses conclusions, lorsqu’elle retourne le dossier à la CAI pour qu’elle se prononce sur l’argument du privilège relatif au litige :

(180) La CAI, dans le dossier impliquant les Commissions, ne s’est pas prononcée sur cette question, puisqu’elle conclut que l’information ne serait pas fournie, parce que protégée par le privilège du secret professionnel.

(181) Compte tenu de la conclusion à laquelle le Tribunal arrive, la question peut être pertinente, mais c’est à la CAI à y répondre. Si les Commissions maintiennent leur position à cet égard, le dossier doit alors être retourné à la CAI pour qu’elle tranche la question.

(…)

SOUS RÉSERVE de la décision que pourrait rendre la Commission d'accès à l'information du Québec, quant au privilège relatif au litige; À cet égard,

RETOURNE le dossier à la Commission d'accès à l'information du Québec afin qu’elle statue, si nécessaire, sur cette question.

(…)

(nos reliefs)

[120]     L’emploi des mots « si nécessaire » à sa conclusion à cet égard, relève manifestement de la condition préalable, énoncée au paragraphe 181 : « (s)i les Commissions maintiennent leur position à cet égard, le dossier doit alors être retourné à la CAI pour qu’elle tranche la question. » (nos reliefs).

[121]    Il va de soi que la question de l’application du privilège relatif au litige ne devra être analysée par la CAI que si les Commissions réitèrent leur intention de la lui soumettre. La Cour du Québec ne dit rien de plus. Les Commissions tentent à cet égard de faire corriger une erreur qui n’existe pas et pour ces motifs, il n’y a pas lieu d’intervenir.

3. La Cour du Québec a-t-elle rendu une décision ultra petita en ordonnant la communication du tableau de suivi des honoraires professionnels confectionné par la Commission scolaire des Grandes-Seigneuries ?

[122]    Compte tenu de la décision du Tribunal eu égard à la protection du montant des honoraires professionnels par le secret professionnel dans le présent dossier, cette question devient sans objet.

[123]    Subsidiairement, il est établi devant la CAI que le tableau de suivi des honoraires professionnels confectionné par la Commission scolaire des Grandes-Seigneuries contient l’information requise, à savoir le montant des honoraires professionnels versé par les Commissions dans le cadre du recours collectif Desgagnés[114].

[124]    Ce tableau énonce, en plus du total des honoraires professionnels par année, la date et le numéro de chaque facture de l’avocat, le nom du fournisseur (avocat ou expert), l’année scolaire, les commissions scolaires impliquées et le montant dû par chacune d’elles[115]. Il inclut également les frais d’experts retenus par le procureur[116].

[125]    Ce document contient plus que l’information demandée et la communication intégrale de ce tableau, qui reproduit certaines informations provenant des comptes d’honoraires professionnels de l’avocat des Commissions, n’est pas requise pour respecter les demandes d’accès, restreintes au seul montant des honoraires.

[126]    La Cour du Québec, en ordonnant aux Commissions de transmettre au demandeur d’accès le tableau de suivi des honoraires dans son intégralité, a rendu une décision ultra petita. Elle aurait dû ordonner la communication de l’information demandée seulement, en caviardant l’information supplémentaire contenue au tableau.

4. La Cour du Québec a-t-elle excédé sa compétence en statuant sur les demandes d’accès sans retourner le dossier à la CAI pour qu’elle se prononce sur les arguments subsidiaires de la Ville?

[127]    La Ville invoque, en plus du moyen principal fondé sur le privilège du secret professionnel, des arguments secondaires basés sur d’autres dispositions de la Loi sur l’accès, qui n’ont pas fait l’objet d’une décision ni par la CAI, ni par la Cour du Québec. Compte tenu de la décision du Tribunal eu égard à la protection du montant des honoraires professionnels par le secret professionnel dans le présent dossier, cette question devient sans objet.

[128]    Néanmoins, plutôt que d’ordonner à la Ville de communiquer au demandeur d’accès les bons de commande et les chèques émis en paiement des honoraires professionnels dans le cadre des dossiers l’opposant au citoyen Dubé, la Cour du Québec aurait dû retourner le dossier à la CAI, pour qu’elle se prononce sur les arguments subsidiaires de la Ville, puisque le sort de la demande aurait pu différer.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

Dans le dossier 500-17-082653-141 :

[129]    ACCUEILLE la requête introductive d’instance en révision judiciaire;

[130]    INFIRME le jugement rendu par la Cour du Québec le 21 mai 2014;

[131]    RÉTABLIT la décision de la Commission d’accès à l’information du 12 juin 2012;

[132]    AVEC DÉPENS contre le mis-en-cause George Kalogerakis;

Dans le dossier 500-17-082645-147 :

[133]    ACCUEILLE la requête introductive d’instance en révision judiciaire;

[134]    INFIRME le jugement rendu par la Cour du Québec le 21 mai 2014;

[135]    RÉTABLIT la décision de la Commission d’accès à l’information du 10 août 2012;

[136]    AVEC DÉPENS contre le mis-en-cause George Kalogerakis;

 

 

 

 

Suzanne courchesne, J.C.S.

 

Me Raymond Doray

Me Guillaume Laberge

Lavery, de Billy 

Procureurs des Commissions scolaires des Patriotes, Marie-Victorin, Laval et des Grandes-Seigneuries

 

Me Francis Gervais

Deveau Bourgeois Gagné Hébert

Procureur de la Ville de Terrebonne

 

Me Éric Meunier

Procureur de Monsieur George Kalogerakis

 

Me Marie-Josée Brunelle

Desmeules & Associés

Procureure de la Commission d’accès à l’information

 

 

Dates d’audience :

Les 5 et 6 mars 2015   

 



[1]     Afin de distinguer les pièces déposées et la décision de la CAI rendue dans le dossier impliquant les Commissions, de celles du dossier impliquant la Ville, le Tribunal utilise l’initiale C lorsqu’il réfère au premier et l’initiale V lorsqu’il réfère au second.

[2]     Requête introductive d’instance amendée d’un recours collectif, pièce PC-8.

[3]     Plainte du 7 août 2008, pièce PC-9.

[4]     Demande introductive d’instance de la CDPDJ, pièce PC-11.

[5]     Jugement Desgagnés c. Québec (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport) 2010 QCCS 4838, pièce PC-12.

[6]     Requête introductive d’instance en jugement déclaratoire amendée, pièce PC-14.

[7]     Il est remplacé en cours d’instance par le journaliste et directeur de l’information George Kalogerakis.

[8]     R.L.R.Q. c. A-2.1.

[9]     Demandes d’accès du 31 août 2010, pièce PC-1.

[10]    Lettres de refus de septembre 2010, pièce PC-2.

[11]    Demandes de révision du 13 octobre 2010, pièce PC-3.

[12]    Requête pour autorisation d’exercer un recours collectif et pour être représentants, pièce PC-7.

[13]    Pièce PC-13.

[14]    Décision CAI-C, pièce PC- 4, para. 10.

[15]    Id., para. 24.

[16]    Id., para. 26.

[17]    Id., para. 13, 28, 44 et 55.

[18]    Id., para. 13, 14, 30, 45, 46, 47 et 55.

[19]    Id., para. 17, 33, 50, 60 et 116 et pièce P-15.

[20]    Décision CAI-V, pièce PV-4, para. 8.

[21]    Id., para. 51 et 52.

[22]    Id., para. 15.

[23]    Id., para. 10.

[24]    Id., para. 52.

[25]    Id., para. 10.

[26]    Id., para. 10 et 51.

[27]    Demande d’accès du 11 février 2011, pièce PV-1.

[28]    Lettre de refus du 25 février 2011, pièce PV-2.

[29]    Demande de révision du 16 mars 2011, pièce PV-3.

[30]    Décision CAI-V, pièce PV- 4, para.17, 18, 24 et 25.

[31]    Id., para. 20, 21 et 51.

[32]    Id., para. 27 et 71.

[33]    Id., para. 58.

[34]    Id., para. 55.

[35]    Décision CAI-C, dossiers 10 19 59, 10 19 60, 10 19 61 et 10 19 62.

[36]    Décision CAI-V, dossier 11 05 74.

[37]    Décision CAI-C, para. 3 et 86.

[38]    Décision CAI-V, para. 50.

[39]    Kalogerakis c. Commission scolaire des Patriotes, 2014 QCCQ 4167 (Jugement Cour du Québec)

[40]    Jugement Cour du Québec, para. 106 à 109 inclusivement.

[41]    Maranda c. Richer, [2003] 3 R.C.S. 193; Société d'énergie Foster Wheeler ltée c. Société intermunicipale de gestion et d'élimination des déchets (SIGED) inc, [2004] 1 R.C.S. 456; R. c. Cunningham, [2010] 1 R.C.S. 331.

[42]    Kruger inc. c. Kruco inc., [1988] R.J.Q. 2323 (C.A.); Re: Ruffo 2005 QCCA 647; Chambre des notaires c. Canada (Procureur général), 2014 QCCA 552 (requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême accueillie, C.S. Can., 2014-12-18); Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec (APEIQ) c. Corporation Nortel Networks, 2007 QCCA 12085 (CanLII).

[43]    Stevens c. Canada (Premier ministre) [1998] 4 C.F. 89.

[44]    Chambre des notaires c. Canada (Procureur Général), 2010 QCCS 4215 (conf. en appel, préc. note 42).

[45]    Commission des services juridiques c. Gagnier, 2004 C.A.I. 568 (C.Q); Greenbaum c. Hôpital général juif - Sir Mortimer B. Davis, 2011 QCCQ 2149.

[46]    Boerboom c. Commission de protection du territoire agricole du Québec, 2008 QCCA 241, para. 2;  St-Pie (Municipalité de) c. Commission de protection du territoire agricole du Québec, 2009 QCCA 2397, para. 38 et 39.

[47]    MacDonell c. Québec (C.A.I.) [2002] 3 R.C.S. 661.

[48]    Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, para. 60.

[49]    Association des pompiers professionnels inc. c. Québec (Ville de), 2013 QCCA 2084, para.20.

[50]    Fédération autonome de l’enseignement c. Commission scolaire de Laval, 2014 QCCA 591, para.33 et 39.

[51]    Dunsmuir, préc., note 48; Nor-Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, [2011] 3 RCS 616, para. 30.

[52]    Association des pompiers professionnels de Québec, préc., note 49, para. 20; Longueuil (Ville de) c. Tribunal administratif du Québec, 2013 QCCS 5461, para. 22 et 23; Protection de la jeunesse - 1271, 2012 QCCS 1092, para. 66; Érablière G.F. Marois inc. c. Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec, 2009 QCCS 3686 (requête pour permission d'appeler accueillie, C.A., 2009-10-01, désistement des appels principal et incident, C.A., 2011-09-27), para. 97-98.

[53]    Canada (Procureur général) c. Quadrini, 2011 CAF 115, para 45; Section locale 1-306 des Métallurgistes unis d'Amérique c. Irving et autres et Fortis properties Corporation, 2007 NBCA 16, para. 26.

[54]    Fédération autonome de l'enseignement c. Commission scolaire de Laval, préc., note 50, para. 42.

[55]    Société canadienne des postes c. Dulude 2011 QCCS 1970, para. 25 et 26; United Parcel Service du Canada c.Foisy 2006 QCCS 1466, para.38; Trois-Rivières (Ville de) c. S.L., 2009 QCCQ 1237.

[56]    Dunsmuir, préc., note 48.

[57]    Pritchard c. Ontario (Commission des droits de la personne) [2004] 1 R.C.S. 809, para. 14; Smith c. Jones [1999] 1 R.C.S. 455, para. 46 ; Blank c. Canada (Ministre de la Justice) [2006] 2 R.C.S. 319, para. 26; Foster Wheeler, préc., note 41, para. 34.

[58]    Solosky c. La Reine [1980] 1 R.C.S. 821, p.839; Descôteaux c. Mierzwinski [1982] 1 R.C.S. 860, p.893.

[59]    R.L.R.Q., c. C-12, article 9.

[60]    Respectivement, R.L.R.Q., c. C-26, article 60.4; R.L.R.Q. c. B-1, article 131 et R.L.R.Q., c. B-1, r.3, articles 3.06.01 et 3.06.03. 

[61]    Foster Wheeler, préc., note 41, para.18 à 22.

[62]    R. c. McClure, [2001] 1 R.C.S. 445, para. 28; Maranda, préc., note 41, para 11.

[63]    Lavallée, Rackel & Heintz c. Canada (Procureur général) [2002] 3 R.C.S. 209, para. 39.

[64]    Schenker du Canada ltée c. Groupe Interstad Canada inc., J.E. 2012-328 (C.A.), para. 25.

[65]    Solosky, préc., note 58 , p.837.

[66]    R. c. McClure, préc., note 62, para.4.

[67]    Smith c. Jones, préc., note 57, p.486.

[68]    R. c. McClure  préc., note 62 , para.35.

[69]    Foster Wheeler, préc., note 41, para.38.

[70]    Id., para.39.

[71]    Id., para 40.

[72]    Id., para 41 et 42.

[73]    Id., para. 37.

[74]    Id., para 39.

[75]    Canada (Procureur général) c. Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, 2015 CSC 7, para. 42.

[76]    Foster Wheeler, préc., note 41, para.38.

[77]    Lavallée, préc., note 63, para.28.

[78]    R. c. Campbell, [1999] 1 R.C.S. 565, p.602.

[79]    Maranda, préc., note 41, para. 33.

[80]    Id., para. 21.

[81]    Id., para. 28 et 29; bien qu’en accord avec les conclusions des juges majoritaires, la juge Deschamps propose une analyse distincte de la question soumise et conclut que le montant des honoraires de l’avocat ne mérite pas la protection du privilège du secret professionnel. Elle énonce que c’est le contexte de la communication qui justifie d’en reconnaître le caractère privilégié et que d'accorder un caractère déterminant à la divulgation des honoraires équivaudrait à protéger toutes les informations qu’un client veut confidentielles, sans égard à leur lien avec le contenu d’un avis juridique, deuxième condition préalable à l’existence du privilège telles qu’établies dans Solosky (para 42, 53, 54, et 56 de l’arrêt Maranda, préc. note 41).

[82]    Cunningham, préc., note 41, para. 28.

[83]    Chambre des notaires, préc., note 42, para. 79 et 81.

[84]    Id., para. 89.

[85]    Jean-Claude Royer et  Sophie Lavallée, La preuve civile, 4ème édition, Éditions Yvon Blais, para. 1204.

[86]    Kruger c. Kruco, préc., note 42, p. 2325.

[87]    Arrêt Nortel, préc., note 42.

[88]    Id., para. 49.

[89]    Ruffo (Re), préc., note 42.

[90]    Id., para. 69.

[91]    Legal Services Society v. British Columbia (Information and Privacy Commissioner) 2003 BCCA 278.

[92]    Ontario (Attorney General) v. Ontario (Assistant Information and Privacy Commissioner) [2005] O.J. No. 941.

[93]    Id., para. 12.

[94]    Id., para. 13.

[95]    Ontario (Ministry of the Attorney General) v. Ontario (Information and Privacy Commissioner) [2007] O.J. No. 2769.

[96]    Voir notamment les décisions Kruger, Ruffo et Nortel, précitées note 42.

[97]    Voir notamment l’arrêt Maranda, précité note 41.

[98]    Montréal (Ville de) c. Gyulai [2008] QCCA 238 para. 34.

[99]    Jugement Cour du Québec, para. 178 et 179.

[100]   Commission des services juridiques c. Gagnier, préc., note 45.

[101]   Jugement Cour du Québec, para. 178.

[102]   Id., para. 134 à 140.

[103]   Pièce PC-13.

[104]   Foster Wheeler, préc., note 41, para. 42.

[105]   Décision CAI-C, para. 110 et 111.

[106]   Id., para. 15, 32 et 59.

[107]   Id., para. 49.

[108]   Décision CAI-V, para. 64 et 66.

[109]   Id., para. 69 et 71.

[110]   Blainville (Ville de) c. Lamarre, 2010 QCCA 1213, para.9; J.M.O. Climatisation inc. c. Commission hydro-électrique du Québec, 2009 QCCQ 2688, para. 64.

[111] Ontario (Sûreté et Sécurité publique) c. Criminal Lawyers Association [2010] 1 R.C.S. 815.

[112]   Id., para. 31.

[113]   Id., para. 5.

[114]   Décision CAI-C, para. 24.

[115]   Id., para. 24.

[116]   Id., para. 26.

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