JV 0375

 

 

 

 

 

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

Canada

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

LOCALITÉ DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-32-076108-036

 

 

 

DATE :

23 juin 2004

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

CLERMONT VERMETTE,  J.C.Q.

 

 

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3268357 CANADA INC.

Faisant affaires sous le nom

CARLTON CENTRE DE RÉCEPTION

8860 Langelier

St-Léonard, Montréal (Québec)  H1P 3C8

 

          Demanderesse et

          Défenderesse reconventionnelle

 

c.

 

SARA ESTEVES

318 Rideau

Châteauguay (Québec)  J6J 1R9

 

          Défenderesse et

          Demanderesse reconventionnelle

et

DANIEL PHANEUF

302 St-Francis, app. 2

Châteauguay (Québec)  J6J 1Z2

 

Défendeur

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JUGEMENT

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[1]                La demanderesse réclame aux défendeurs le paiement de 2 987,50$ à titre de frais d’annulation supplémentaires à une somme de 3 200$ déjà déposée par les défendeurs pour la réservation des services de la demanderesse pour la réception prévue pour leur mariage dans une salle de la demanderesse pour le 28 juin 2003.

[2]                C’est le 19 juillet 2002, soit près d’un an avant la date prévue pour le mariage, que la réservation a été consignée sur la formule d’une seule page de la demanderesse (Pièce P-1).  Le document indique qu’une réception pour 150 personnes minimum est prévue au prix unitaire de 75$ tout compris pour le menu qui y est détaillé comprenant les boissons et la fourniture de fleurs et chandelles.  Le document énonce que deux dépôts ont été versés totalisant 3 200$.  La formule contient une section pour les modifications entre autres quant au nombre de personnes et au prix unitaire.  Cette section a été laissée en blanc.

[3]                Le projet de mariage étant abandonné, la défenderesse est retournée voir la demanderesse le 22 avril 2003 afin d’annuler la réservation.

[4]                C’est alors que les représentants de la demanderesse informent la défenderesse qu’elle ne peut ainsi annuler sans frais.  On explique à la défenderesse que la demanderesse compte sur un profit de 55% du coût total qui s’établit ici à 11 250$ (150 x 75$ et qu’ainsi la pénalité que doit encourir la défenderesse à 55% est de 6 187,50$ et ce, même si l’annulation survient plus de deux mois avant la date prévue pour l’événement.  On explique alors à la défenderesse qu’elle doit des frais d’annulation supplémentaires de 2 987,50$ pour laquelle somme la demanderesse est prête à accepter le paiement par chèques postdatés.

[5]                La demanderesse insiste que c’est là la responsabilité de la défenderesse et que si la défenderesse ne la croit pas, elle va faire venir immédiatement son avocat.

[6]                La demanderesse rédige alors le document (Pièce P-2) se lisant comme suit :

«Si on a une soirée qui remplace le marriage de Sara et Daniel, le 28 juin 2003 pour une valeur de 9000$ ou plus on va rembourser le dépôt de 3200$ plus les frais d’annulation supplémentaires de 2987.50$ en note de crédit pour des futures événements de Sara Esteves ou quelqu’un d’autre de sa famille immédiate.  La balance qui reste d’être payé sur l’evenement est 2987.50$.  Ca va être payé en 6 cheques post-daté, chaqu’un de 497.92$.  Si on n’est pas capable de remplacer l’evenement pour le 28 juin 2003 d’une soirée qui a un valeur de 9000$ ou plus, ½ des frais d’annulation va être donner comme un note de crédit de 3100.00$ comme un depot d’un evenement futur.» (sic)

[7]                Ce document est signé par la demanderesse et par la défenderesse seule; il faut noter que le défendeur n’a pas signé, il n’était pas présent.  La défenderesse émet les 6 chèques datés du 1er de chaque mois à compter du 1er mai 2003 jusqu’au 1er octobre 2003 inclusivement.

[8]                Suite à une consultation par la défenderesse auprès de l’Office de protection du consommateur, la défenderesse émet un arrêt de paiement sur les chèques.  La demanderesse intente la présente poursuite dès le 16 juin 2003 après la mise en demeure du 20 mai 2003 (P-4), soit avant même la date du 28 juin 2003.

[9]                Les défendeurs ont contesté par des contestations séparées et la défenderesse Sara Esteves a produit une demande reconventionnelle réclamant le remboursement des dépôts totalisant 3 200$.

[10]            Le Tribunal ne peut accorder la demande de frais d’annulation supplémentaires mentionnée au document P-2 puisqu’à la base, le document de réservation P-1 ne prévoyait et ne prévoit aucuns frais d’annulation ni pénalité en cas d’annulation.

[11]            Nous sommes ici dans le cadre d’une relation contractuelle à laquelle la Loi sur la protection du consommateur s’applique.[1]

[12]            Assumant que la feuille de réservation P-1 constituait un contrat et qu’il n’y est pas prévu de frais d’annulation ou de pénalité en cas d’annulation, aucuns frais ni aucuns frais d’annulation supplémentaires ne pouvaient être exigés selon que prévu aux articles 12 et 13 de la Loi sur la protection du consommateur.  L’article 12 énonce :

«12.  Aucuns frais ne peuvent être réclamés d’un consommateur, à moins que le contrat n’en mentionne de façon précise le montant.»

[13]            La Loi sur la protection du consommateur est une loi d’ordre public, on ne peut donc y déroger par une convention particulière tel qu’il est énoncé à l’article 261 de cette loi.  Dans les circonstances, toute entente conclue à propos du paiement de frais d’annulation qui n’étaient pas mentionnés au contrat qui a été annulé est contraire à la loi et nulle.  La demande de 2 987,50$ au titre de frais d’annulation supplémentaires doit donc être rejetée.

[14]            Qu’en est-il de la demande reconventionnelle portant sur le remboursement du dépôt de 3 200$?

[15]            Il apparaît que la demanderesse-défenderesse reconventionnelle veut conserver ce dépôt à titre de frais d’annulation puisqu’elle qualifiait le montant réclamé de 2 987,50$ de frais d’annulation supplémentaires.  La réservation P-1 ne contient aucune clause pouvant justifier la demanderesse de conserver ce dépôt.

[16]            Il n’y a pas non plus de preuve fiable pouvant permettre d’établir un montant quelconque de dommages auquel pourrait avoir droit la demanderesse.

[17]            Les témoignages des défendeurs sont à l’effet que le nombre de personnes prévu indiqué sur la formule de réservation P-1 comme étant 150 minimum n’était pas réellement un nombre minimum puisque la demanderesse leur avait répondu sur la remarque que ce nombre de 150 semblait élevé, que ce nombre pouvait être réduit jusqu’à deux semaines avant la date prévue pour l’événement.

[18]            Le document P-1 prévoyant un «montant après modifications» corrobore que ce nombre de personnes pouvait être modifié.

[19]            De toute manière, le représentant de la demanderesse a reconnu que la demanderesse a, à la date prévue du 28 juin 2003, utilisé la salle qui était destinée aux défendeurs pour un groupe de 90 personnes qui devait avoir, selon ce témoin, la salle en bas mais à qui on a attribué la salle prévue pour les défendeurs en haut parce que, dit le témoin, c’était plus économique pour nous de les avoir sur le même plancher où se trouvait un autre groupe qui tenait un événement ce soir-là.

[20]            Quelle que soit la justification invoquée par la demanderesse, la salle qui avait été réservée par les défendeurs a été utilisée par la demanderesse pour d’autres.

[21]            La prétention à un profit de 55% du coût n’a pas fait l’objet d’une preuve corroborée par quelque écrit, état ou démonstration autre que la simple affirmation des représentants de la demanderesse.

[22]            Pour les motifs déjà invoqués quant à l’application de la Loi sur la protection du consommateur ayant amené le Tribunal à rejeter la demande des frais d’annulation supplémentaires réclamés, le Tribunal conclut que la demanderesse n’a pas droit non plus de conserver le dépôt de 3 200$.

[23]            La demande reconventionnelle doit donc être maintenue.

[24]            PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[25]            REJETTE la demande principale avec dépens.

[26]            CONDAMNE la demanderesse principale à payer à chacun des deux défendeurs la somme de 78$ pour les frais judiciaires.

[27]            ACCUEILLE la demande reconventionnelle de la demanderesse reconventionnelle Sara Esteves.

 

 

[28]            CONDAMNE la défenderesse reconventionnelle à payer à la demanderesse reconventionnelle la somme de 3 200$ avec intérêts au taux de 5% l’an et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec depuis la mise en demeure du 9 mai 2003.

[29]            CONDAMNE la défenderesse reconventionnelle à payer à la demanderesse reconventionnelle, pour les frais judiciaires sur la demande reconventionnelle, la somme de 62$

 

 

 

 

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CLERMONT VERMETTE,  J.C.Q.

 

 

Date d’audience :

9 juin 2004

 



[1] Article 2 , Loi sur la protection du consommateur, L.R.Q. c. P-40.1.

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