Koutsoukos et Produits alimentaires italiens Milano inc. |
2014 QCCLP 1381 |
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DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION
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[1] Le 20 mars 2013, monsieur Aristomenis Koutsoukos (le travailleur) dépose une requête en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), par laquelle il demande la révision d’une décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 13 mars 2013.
[2] Par sa décision, la Commission des lésions professionnelles :
REJETTE la requête de monsieur Aristomenis Koutsoukos, le travailleur;
CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 27 septembre 2012, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que monsieur Aristomenis Koutsoukos, le travailleur, n’a pas subi de lésion professionnelle le 8 mars 2012, et qu’il n’a pas droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Par conséquent, la réclamation par la Commission de la santé et de la sécurité du travail de la somme de 1 332, 58 $ est justifiée.
[3] Le travailleur était présent et assisté par un procureur à l’audience tenue sur la requête en révision, le 19 décembre 2013, à Laval. Produits Alimentaires Italiens Milano inc. (l’employeur) n’y a mandaté aucun représentant et n’a pas fait valoir de motif justifiant son absence.
[4] Le procureur du travailleur a demandé et obtenu l’autorisation de déposer après audience des commentaires écrits additionnels. Ces commentaires ont été expédiés à la Commission des lésions professionnelles le 30 janvier 2014. L’affaire a été mise en délibéré à compter de cette date.
L’OBJET DE LA REQUÊTE
[5] Le travailleur demande de réviser la décision du 13 mars 2013 et de déclarer qu’il a subi une lésion professionnelle, le 8 mars 2012. Alternativement, le travailleur demande de révoquer ladite décision et de convoquer les parties de nouveau à une audience sur le fond de sa contestation.
L’AVIS DES MEMBRES
[6] Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont tous deux d’avis que la requête devrait être rejetée.
[7] Le travailleur n’a pas démontré que la décision rendue comporte un vice de fond de nature à l’invalider. En réalité, le travailleur recherche une nouvelle appréciation de la preuve. Or, le recours en révision ou révocation ne peut servir à une telle fin.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[8] La requête en révision déposée le 20 mars 2013[2] expose les motifs invoqués à son soutien et comporte certains éléments d’argumentation élaborés sur trois pages. À l’audience du 19 décembre 2013, le procureur du travailleur a déposé une argumentation écrite portant la date du 18 décembre 2013, elle comporte 14 pages. Le procureur a aussi plaidé oralement séance tenante, pendant 48 minutes. Puis, le 30 janvier 2014, il a transmis certains commentaires additionnels couvrant deux pages.
[9] Dans la requête en révision, le procureur du travailleur allègue la présence de « nombreuses erreurs dans la décision ». Il cite ensuite le texte de l’article 429.56 de la loi, puis se dit « d’avis que l’alinéa 1, 2 et 3 trouve pleinement application, pour les éléments précités - les motifs de notre demande sont que la décision comporte des fautes importantes, que la CLP à [sic] omis de statuer sur des éléments de preuve et/ou écarté des éléments de preuve », le tout équivalant à une « erreur manifeste » :
429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :
1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;
2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;
3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.
Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.
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1997, c. 27, a. 24.
La découverte alléguée d’un fait nouveau
[10] Le 22 avril 2013, soit après que la décision dont il réclame la révision ait été rendue, le procureur du travailleur a déposé au greffe du tribunal une transcription dactylographiée des notes de consultation prises par le médecin ayant charge du travailleur, le docteur Daniel Émond, lors des visites des 22 mars et 10 avril 2012, à titre de « dépôt de preuve pour révocation et/ou révision pour cause ».
[11] Le travailleur allègue que deux extraits de cette transcription dactylographiée « démontrent bien que la [première juge administrative] a commit [sic] une erreur de lecture, donc une erreur de faits » dans sa lecture des notes manuscrites mises en preuve devant elle :
Notes du 22 mars 2012 :
douleur lombaire depuis environ 3 semaines
Notes du 10 avril 2012 :
douleur au MI (membre inférieur)
au niveau des cuisses
qui persiste depuis plus de 1 mois
[nos soulignements]
[12] En effet, il faut noter qu’à l’enquête présidée par la première juge administrative, pareille transcription dactylographiée des susdites notes de consultation prise par le docteur Émond n’avait pas été déposée; seule une copie des notes manuscrites originales l’a été.
[13] Dans les notes manuscrites déposées en preuve devant la première juge administrative,
- pour ce qui est de celles du 22 mars 2012, le mot « environ » n’était pas écrit; c’est plutôt le caractère « ~ » - dont la signification est la même, selon le procureur - qui y apparaissait, et
- pour ce qui est de celles du 10 avril 2012, les mots « plus de » étaient remplacés par le caractère « > »; d’autre part, de l’avis du tribunal[3], la calligraphie du médecin fait en sorte qu’il était parfaitement raisonnable de lire « 1 an » plutôt que « 1 mois ».
[14] Selon le procureur du travailleur, la première juge administrative s’est trompée dans sa lecture de ces éléments de preuve puisqu’au paragraphe 25 de sa décision, elle omet la « nuance »[4] « environ » en référant à la durée de la douleur lombaire, d’une part, et elle mentionne une douleur au membre inférieur droit persistant depuis plus d’un an, plutôt que depuis plus d’un mois seulement, d’autre part :
[25] Les notes cliniques du 22 mars 2012 font mention d’une impression de lombalgie chronique et d’une douleur lombaire présente depuis trois semaines. Les notes cliniques du 10 avril 2012 font état de douleurs aux membres inférieurs qui persistent depuis plus d’un an. Les notes cliniques du 3 juillet 2012 mentionnent de la douleur au dos depuis avril et une chute +.
[nos soulignements]
[15] Toujours selon le procureur du travailleur, l’erreur serait conséquente parce que « cette fausse prémisse de lecture […] a nuit [sic] à la reconnaissance de l’application de l’Article 28 », tel qu’il appert des paragraphes 61, 79 et 83 de la décision du 13 mars 2013 :
[61] Cependant, les explications du travailleur ne concordent pas avec les notes cliniques. Selon les notes de consultation du 22 mars 2012, le travailleur ressent une douleur lombaire depuis trois semaines déjà, soit depuis le tout début de mars 2012 et donc, antérieurement à l’évènement du 8 mars 2012. Selon les notes du 10 avril 2012, le travailleur se plaint de douleur persistante au membre inférieur depuis plus d’un an.
[…]
[79] À l’audience, le travailleur nie toute douleur lombaire ou problème au dos avant le 8 mars 2012, alors que les notes de consultation médicale vont en sens contraire. Le travailleur associe la douleur à la chute, mais la preuve médicale indique qu’il n’est pas asymptomatique le 8 mars 2012. La douleur est déjà présente avant la chute.
[…]
[83] Le travailleur ne peut bénéficier de l’application de la présomption, car sa version des faits présente des contradictions, est peu crédible et ne convainc pas le tribunal qu’il a subi une hernie discale avec sténose spinale le 8 mars 2012 sur les lieux du travail alors qu’il était à son travail.
[16] En ouverture de l’audience tenue sur la requête en révision, le 19 décembre 2013, le procureur du travailleur s’est déclaré conscient qu’il lui fallait faire la démonstration que la transcription dactylographiée des notes de consultation déposée postérieurement à la décision visée par sa requête en révision constitue un « fait nouveau » au sens de la jurisprudence en la matière.
[17] Le soussigné a alors précisé que pareille démonstration devait, entre autres, référer à ce qui avait été mis en preuve et/ou argumenté de façon explicite devant la première juge administrative. C’est à ces fins que le tribunal a autorisé le procureur du travailleur à obtenir copie de l’enregistrement de l’audience tenue le 25 février 2013 pour ensuite en commenter le contenu par écrit, à ce sujet précis.
[18] Dans ses commentaires additionnels du 30 janvier 2014, le procureur du travailleur ne réfère à aucun extrait de la preuve administrée devant la première juge administrative dans lequel il serait question du délai d’« environ 3 semaines » apparaissant aux notes de consultation du 22 mars 2012 ou encore de la persistance des douleurs aux membres inférieurs depuis « plus d’un mois » (plutôt que « plus d’un an ») mentionnée à celles du 10 avril 2012.
[19] Par contre, le procureur réfère à deux passages de son argumentation où il aurait fait spécifiquement allusion à ces aspects de la preuve :
15h08m13s - 15h09m04s : plaidoyer sur la page 15 dans le dossier initial (consultation du 22 mars 2012). 15h0824s-27s, mention de l’écrit de la « douleur depuis approximativement 3 semaines ». […]
15h09m05 - 15h09m40s : plaidoyer sur la page 16 dans le dossier initial (consultation du 10 avril 2012). Nous soulignons la mention « renouveler la prescription ». Nous soulignons la 3e ligne (15h09m20s-27s : « pain is persistent for approximately 1 month » (qui persiste depuis 1 mois).
[20] La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision est d’avis que ni la transcription dactylographiée des notes de consultation du docteur Émond ni son contenu ne constituent un « fait nouveau » au sens de l’article 429.56 de la loi précité.
[21] En effet, la Commission des lésions professionnelles a maintes fois eu l’occasion de rappeler les caractéristiques essentielles d’un « fait nouveau » au sens de la loi. La décision rendue dans l’affaire Résidences Le Monastère-SEC enr. et Lavoie[5] les décrit comme suit :
[32] La jurisprudence12 a établi trois critères afin de conclure à l’existence d’un fait nouveau soit :
1- la découverte postérieure à la décision d’un fait qui existait au moment de l’audience;
2- la non-disponibilité de cet élément de preuve au moment où s’est tenue l’audience initiale;
3- le caractère déterminant qu’aurait eu cet élément sur le sort du litige, s’il eut été connu en temps utile.
[33] Cette même jurisprudence enseigne que le « fait nouveau » ne doit pas avoir été créé postérieurement à la décision du premier juge administratif. Il doit plutôt avoir existé avant cette décision, mais avoir été découvert postérieurement à celle-ci, alors qu’il était impossible de l’obtenir au moment de l’audience initiale. Il doit également avoir un effet déterminant sur le sort du litige13.
[34] Dans le cas qui nous occupe, la visite médicale postérieure à la décision, à laquelle la travailleuse était en attente depuis plus d’un an et demi, et le traitement chirurgical proposé, ne peuvent manifestement pas être considérés comme étant deux faits nouveaux au sens de la Loi.
[35] Il ne s’agit ni d’une « découverte » postérieure d’un élément non disponible, puisque la travailleuse savait qu’elle consulterait un chirurgien, ni un élément déterminant dans l’établissement du lien de causalité, question qu’avait à répondre le Tribunal. Il s’agit d’un simple traitement proposé postérieurement à une condition qui existait depuis longtemps et qui était déjà prouvée. La travailleuse aurait très bien pu demander de ne pas fixer la cause en audience tant que sa consultation médicale n’avait pas été faite, si cet élément pouvait être déterminant à ce que le Tribunal avait à trancher.
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12 Bourdon c. Commission des lésions professionnelles, [1999] C.L.P. 1096 (C.S.); Pietrangelo et Construction NCL, 107558-73-9811, 17 mars 2000, Anne Vaillancourt; Nadeau et Framatome Connectors Canada inc., 110308-62C-9902, 8 janvier 2001, D. Rivard, 2000LP-165; Soucy et Groupe RCM inc., 143721-04-0007, 22 juin 2001, M. Allard, 2001LP-64; ProvIgo Dist. (Maxi Cie) et Briand, 201883-09-0303, 1er février 2005, M. Carignan; Lévesque et Vitrerie Ste-Julie, 200619-62-0302, 4 mars 2005, D. Lévesque; Roland Bouchard (succession) et Construction Norascon inc. et als, 210650-08-0306, 18 janvier 2008, L. Nadeau.
13 Bourdon c. C.L.P., Id.
[nos soulignements]
[22] La susdite transcription dactylographiée est un document « créé postérieurement à la décision du premier juge administratif » qu’il aurait été possible d’« obtenir au moment de l’audience initiale » pour peu que le travailleur ou son représentant en aient fait la demande au docteur Émond lorsqu’ils ont constaté que les inscriptions manuscrites pouvaient porter à confusion ou, à tout le moins, étaient susceptibles d’être interprétées de façon contraire à la réalité telle qu’ils la percevaient.
[23] Reprenant le raisonnement élaboré dans la décision précitée pour l’adapter aux circonstances de l’espèce à l’étude, on peut dire que le travailleur aurait très bien pu demander soit de ne pas fixer la cause pour audience, soit qu’on lui accorde un délai pour compléter sa preuve après l’audience en déposant ladite transcription, si cet élément lui apparaissait être déterminant au litige que le tribunal avait à trancher.
[24] Bref, au moment où la décision a été rendue, il n’y a pas eu erreur puisque les notes manuscrites alors disponibles pouvaient très bien être lues comme la première juge administrative l’a fait. S’il y a eu erreur à ce moment-là, elle réside bien davantage dans le fait que le travailleur et/ou son représentant n’ont pas, en cours d’administration de la preuve, porté à l’attention de la première juge administrative le fait que les notes manuscrites ne devaient pas être comprises comme ce qu’elles semblaient révéler à leur face même.
[25] Quant au contenu de la transcription, il est évident qu’il ne décrit pas la « découverte » d’un état de fait « qui existait au moment de l’audience » à l’insu du travailleur. Au contraire, tout indique qu’au moment de l’audience, le travailleur et son représentant connaissaient cette situation, mais qu’ils ont tout simplement omis d’en faire la démonstration devant la première juge administrative.
[26] Enfin, le travailleur n’a pas démontré « le caractère déterminant qu’aurait eu cet élément sur le sort du litige, s’il eut été connu en temps utile », troisième critère d’identification du « fait nouveau » retenu par la jurisprudence.
[27] En effet, le procureur du travailleur argue que cette soi-disant erreur de lecture commise par la première juge administrative a « nuit [sic] à la reconnaissance de l’application de l’article 28 » de la loi.
[28] Mais, la première juge administrative n’a pas conclu à l’inapplicabilité de la présomption légale de lésion professionnelle prévue à l’article 28 de la loi pour ce seul motif.
[29] D’abord, elle a constaté, à la lumière de la preuve, que la condition diagnostiquée chez le travailleur ne constitue pas une « blessure » au sens de l’article 28 de la loi :
[51] Cette présomption légale s’applique-t-elle dans ce cas-ci?
[52] La première condition nécessaire est la présence d’une blessure. Le tribunal doit donc regarder quel est le diagnostic à retenir en l’espèce ?
[…]
[54] Le tribunal retient donc que les lésions diagnostiquées par les médecins qui ont charge du travailleur sont une hernie discale L3-L4 et sténose spinale.
[…]
[57] La Commission des lésions professionnelles a aussi statué qu’en ce qui a trait à l'application de la présomption de l’article 28 de la Loi, la hernie discale constitue habituellement une maladie, et non une blessure, puisqu'elle est l'aboutissement, en règle générale, d'une dégénérescence discale et qu'il est extrêmement rare qu'une hernie survienne sur un disque sain. Cependant, la jurisprudence a reconnu à maintes reprises qu'un diagnostic constituant de prime abord une maladie peut être considéré comme une blessure en présence d'un traumatisme ou d'un agent vulnérant extérieur.6
[58] À l’étape de l’application de la présomption, dans le cas de pathologies de nature mixte comme une hernie discale, précise la Commission des lésions professionnelles, un travailleur n’a pas à démontrer l’existence d’un événement traumatique aux fins de prouver qu’il a subi une blessure. Il n’a qu’à démontrer, par une preuve prépondérante, que sa blessure de nature mixte est apparue à un moment précis dans le temps plutôt que sur une période plus ou moins longue, de manière subite et non de façon progressive et insidieuse, comme ce que l’on retrouve habituellement dans le cas d’une maladie.7
[…]
[61] Cependant, les explications du travailleur ne concordent pas avec les notes cliniques. Selon les notes de consultation du 22 mars 2012, le travailleur ressent une douleur lombaire depuis trois semaines déjà, soit depuis le tout début de mars 2012 et donc, antérieurement à l’évènement du 8 mars 2012. Selon les notes du 10 avril 2012, le travailleur se plaint de douleur persistante au membre inférieur depuis plus d’un an.
[62] Il s’agit des notes des deux premières consultations médicales intervenues dans le présent dossier alors que le médecin fait état d’une lombalgie chronique sans mentionner de chute ou d’accident du travail. Selon ces notes, le travailleur est déjà symptomatique le 8 mars 2012, avant la chute.
[63] De plus, les résultats de l’examen par résonance magnétique révèlent une maladie discale chronique qui par définition ne cadre pas avec une lésion subite, de nature traumatique.
[…]
[65] Cependant, le travailleur est en mesure de poursuivre le travail pendant six semaines, soit du 8 mars au 20 avril 2012. En vertu des dispositions de l’article 46 de la Loi, le travailleur est présumé incapable d'exercer son emploi tant que la lésion professionnelle dont il a été victime n'est pas consolidée. À l’inverse, poursuivre le travail régulier pendant les six semaines suivantes ne démontre pas que le travailleur est incapable de travailler ou que la chute a été incapacitante.
[66] Pour ces raisons, le tribunal retient que la hernie discale L3-L4 et la sténose spinale ne répondent pas à la définition de blessure dans le présent cas. La première condition d’application de la présomption légale n’est pas satisfaite.
[nos soulignements]
[30] Ensuite, le tribunal explique pourquoi, même si la condition du travailleur avait été considérée comme étant une « blessure » au sens de l’article 28 de la loi, la présomption légale de lésion professionnelle n’aurait pas été applicable pour autant, vu l’absence de preuve démontrant que lesdites lésions étaient survenues « sur les lieux du travail » :
[67] Même si le tribunal concluait que les lésions en cause correspondent à la notion de blessure au sens de l’article 28 de la Loi, le travailleur ne pourrait bénéficier de la présomption légale car il n’y a pas de preuve prépondérante démontrant que ces lésions sont survenues sur les lieux du travail alors que le travailleur est à son travail.
[68] Le travailleur soutient qu’il a subi une hernie discale avec une sténose spinale le 8 mars 2012, pourtant il ne consulte un médecin que 14 jours après l’évènement et continue le travail régulier durant cette période.
[69] En vertu des dispositions des articles 267 et 199 de la Loi, le travailleur victime d'une lésion professionnelle qui le rend incapable d'exercer son emploi au-delà de la journée au cours de laquelle s'est manifestée sa lésion doit remettre à son employeur une attestation médicale. Dans ce cas-ci, le travail cesse le 20 avril 2012 et le premier rapport médical CSST produit est en date du 4 mai 2012, soit 57 jours après l’évènement.
[70] Les délais dans la première consultation médicale et dans le premier rapport médical adressé à la CSST ne documentent pas que l’évènement allégué par le travailleur est arrivé le jour dit, soit le 8 mars 2012 et dans les circonstances décrites.
[71] En vertu des dispositions de l’article 265 de la Loi, le travailleur victime d'une lésion professionnelle doit en aviser son employeur, avant de quitter l'établissement. Le travailleur confirme qu’il n’a pas déclaré l’évènement le jour même.
[72] Il suggère à l’audience que son contremaître a été témoin de la scène ce qui correspond à une déclaration puisque le contremaître sait qu’il s’est blessé, il l’a vu. Avec égard, se trouver trois pieds en arrière ne veut pas dire que le contremaître regarde dans cette direction ou qu’il a vu le travailleur chuter. Il est possible qu’il soit occupé à une autre tâche ou ait le dos tourné.
[73] Même si le tribunal retenait que le contremaître a bien été témoin de la chute, il ne pourrait conclure qu’il s’agit d’une déclaration d’évènement à l’employeur. Le travailleur tombe, se relève deux ou trois minutes après et reprend le travail. Il ne discute de rien avec son contremaître. Il ne déclare pas l’évènement le jour même ou dans les semaines suivantes. Il n’y a pas de raison pour l’employeur de croire que le travailleur s’est fait mal à l’occasion de cette chute.
[74] Le 20 avril 2012, le travailleur cesse le travail, mais il ne déclare pas d’évènement à l’employeur. Il prend une semaine de vacances, puis une seconde. Ce n’est que par la suite que le travailleur déclare l’évènement à son employeur et dit qu’il s’est blessé à cette occasion.
[75] La Commission des lésions professionnelles a maintes fois décidé que l’omission par un travailleur de rapporter immédiatement un évènement accidentel à son employeur ou son omission de consulter rapidement un médecin ne constitue pas en soi un obstacle à l’application de la présomption.8
[76] La dénonciation à l’employeur et la consultation médicale sont des éléments qui pourront servir à apprécier la crédibilité de la version des faits donnée par le travailleur, à colorer l’appréciation de la preuve des éléments requis à l’article 28 de la Loi.9
[77] Afin d’expliquer le retard à consulter un médecin et à déclarer la lésion professionnelle à son employeur, le travailleur dit qu’il croyait que la douleur s’estomperait. À l’audience, le travailleur précise que cette douleur se mesure à 9/10. Comment expliquer que le travailleur est en mesure de poursuivre le travail régulier, incluant manipuler 250 livres de viande, pendant six semaines, et ce, du 8 mars jusqu’au 20 avril 2012, alors qu’il ressent une douleur aussi importante ?
[78] Le travailleur prend ses vacances pour suivre des traitements de physiothérapie et ne déclare pas l’évènement à son employeur. Comment expliquer que le travailleur ait besoin de traitements en lien avec un accident du travail allégué, mais qu’il ne réclame pas à la CSST et puise plutôt dans sa banque de vacances?
[…]
[80] À la première consultation médicale, il n’est pas question d’une chute et le travailleur refuse le certificat médical CSST. La seconde consultation médicale ne donne pas lieu à un rapport médical CSST.
[81] Dans les explications données à la CSST, il est question de douleur, mais jamais de claudication ou de boiterie. Puis, dans les déclarations des collègues, le travailleur boitait.
[82] Comment expliquer que le travailleur ressent le 8 mars 2012 une douleur 9/10, avec boiterie, mais qu’il ne consulte pas un médecin avant le 22 mars 2012?
[83] Le travailleur ne peut bénéficier de l’application de la présomption, car sa version des faits présente des contradictions, est peu crédible et ne convainc pas le tribunal qu’il a subi une hernie discale avec sténose spinale le 8 mars 2012 sur les lieux du travail alors qu’il était à son travail.
[nos soulignements]
[31] Le travailleur n’a, par conséquent, pas démontré que la décision aurait été différente même si les notes de consultation telles que modifiées par la transcription dactylographiée avaient été connues en temps utile.
[32] En résumé, la transcription dactylographiée des notes de consultation du docteur Émond offerte par le travailleur après l’enquête close devant la première juge administrative ne constitue pas un « fait nouveau » au sens de l’article 429.56 de la loi précité parce qu’elle ne comporte aucune des caractéristiques retenues par la jurisprudence à cet égard.
La règle de justice naturelle
[33] Pour ce qui est des références à ces notes de consultation que le procureur du travailleur a faites dans le cadre de son argumentation verbale, il n’a pas été démontré - ni même argumenté - que la première juge administrative a commis une erreur en ne soulignant pas au procureur que son récit de la preuve ne correspondait pas à ce que le tribunal en avait retenu.
[34] Dans l’affaire Rivest c. Bombardier inc. (centre de finition)[6], la Cour d’appel a rappelé que le tribunal n’a pas à partager avec les parties les conclusions qu’il tire d’une preuve administrée en leur présence avant d’en faire mention dans sa décision, puisque de telles conclusions relèvent, « bien évidemment, du délibéré » :
[63] L'intimée reprochait à la CLP d'avoir excédé sa compétence et violé les règles de justice naturelle en ne communiquant pas aux parties la teneur des faits retenus lors de la visite du poste de travail pour leur permettre de les commenter ou d'en contredire la substance, le cas échéant.
[64] J'estime que c'est à tort que la juge de première instance retient ce reproche en s'appuyant sur l'article 29 des Règles de preuve, de procédure et de pratique de la Commission des lésions professionnelles.
[65] L'article 29 édicte la règle voulant que le tribunal ne puisse pas appuyer sa décision sur un élément de preuve que les parties n'auraient pas été à même de commenter ou de contredire. Par exemple, le témoignage d'un travailleur qui aurait été transmis par lettre à la CLP, à l'insu des parties; ou encore, un article portant sur une maladie professionnelle publié dans une revue scientifique alors que l'affaire était en délibéré. En l'espèce, les parties étaient présentes lors de la visite du poste de travail; elles étaient donc à même de voir ce que le commissaire voyait et entendait. Personne ne peut prétendre que cette visite a permis la mise en preuve, à son insu, de faits qu'il ou elle aurait souhaité commenter ou contredire. D'ailleurs, au terme de la visite, les experts de l'intimée ont témoigné sur ce qu'ils avaient vu et ils ont pu faire tous les commentaires voulus.
[66] Quant aux conclusions que la CLP a inférées de la preuve, elles sont consignées dans la décision qui a été rendue le 31 août 2005. Elles n'avaient pas à être révélées à qui que ce soit avant, cela relevant, bien évidemment, du délibéré.
[nos soulignements]
[35] La première juge administrative n’a donc pas commis d’erreur en n’intervenant pas dans le cadre de la plaidoirie du représentant du travailleur pour lui souligner que les notes de consultation du docteur Émond avaient pour elle une signification différente de celle qu’il semblait leur attribuer. Elle n’avait pas, à cette étape, à partager avec l’une des parties les conclusions qu’elle en tirerait dans le cadre de son délibéré.
[36] Les moyens relatifs à la soi-disant erreur de lecture des notes de consultation du docteur Émond ne peuvent donc être retenus comme motifs de révision ou révocation de la décision du 13 mars 2013.
L’impossibilité de se faire entendre
[37] Au paragraphe 12 de sa requête, le travailleur invoque le fait que « le paragraphe 71 [de la décision rendue le 13 mars 2013] ne mentionne pas que le contremaître était convoqué par Subpoena ». Au début de son argumentation écrite du 18 décembre 2013, le procureur du travailleur mentionne que « la Juge ne souligne pas la convocation par subpoena de 6 collègues de travail (dont un supérieur), et un seul se sera présenter à l’audience (le seul qui ne serait plus a l’emploi de l’employeur) » [sic]. Plus loin dans le même document, il écrit : « 3. La Juge omet de souligner le Subpoena a l’employeur, et donc la demande de faire témoigner le contremaître » [sic].
[38] L’écoute de l’enregistrement audionumérique de l’audience tenue le 25 février 2013 permet de constater l’échange suivant intervenu entre la première juge administrative et le procureur du travailleur[7] :
JA : Do you need these people as witnesses ?
PT : Well, my client will make a testimony and Mr Adamopoulos will be making the testimony about all these things I have requested. But, I’m able to make my court case without them.
[…]
JA : So, do you want to proceed or do you want to postpone ?
PT : I, well, I think we are going to proceed because my client … The subpoena is not being followed by the employer, but still with Mr Adamopoulos I have the testimony that will be confirming what we need to prove …
JA : OK. Because, I don’t want to start and the find out in the end that we can’t finish today. OK ? …
PT : I understand …
JA : If that’s the case ask me for a posponent. If not, then I want to finish today.
PT : We will finish today.
[nos soulignements]
[39] Clairement, la première juge administrative a donné l’occasion au travailleur de demander la remise de l’audience s’il estimait ne pas être en mesure de procéder ce jour-là, notamment en raison de l’absence de certains témoins assignés. Il ne fait pas de doute que le travailleur a choisi, en toute connaissance de cause, de se dispenser des témoignages des personnes assignées, estimant pouvoir faire sa preuve avec celles qui étaient présentes.
[40] Les dispositions du deuxième alinéa du paragraphe premier de l’article 429.56 de la loi précité ne trouvent donc pas application en l’espèce.
Le vice de fond de nature à invalider la décision rendue
[41] Qu’en est-il maintenant des allégations de « vice de fond » affectant la décision rendue ? Il s’agit là d’une matière visée par le troisième paragraphe de l’article 429.56 de la loi précité.
[42] Interprétant le sens des mots « vice de fond [...] de nature à invalider la décision » dans les affaires Donohue inc. et Franchellini[8], la Commission des lésions professionnelles a jugé qu’ils font référence à une erreur manifeste, de droit ou de fait, ayant un effet déterminant sur l’issue de la contestation. Ces décisions ont été suivies à maintes reprises dans la jurisprudence subséquente.
[43] Il a également été jugé que le recours en révision ne doit pas être un appel déguisé, compte tenu du caractère final des décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles, ainsi que le prévoit le troisième alinéa de l’article 429.49 de la loi précitée :
429.49. Le commissaire rend seul la décision de la Commission des lésions professionnelles dans chacune de ses divisions.
Lorsqu'une affaire est entendue par plus d'un commissaire, la décision est prise à la majorité des commissaires qui l'ont entendue.
La décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel et toute personne visée doit s'y conformer sans délai.
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1997, c. 27, a. 24.
[nos soulignements]
[44] Siégeant en révision à plusieurs reprises l’interprétation des textes législatifs pertinents que celle-ci retient.
[45] Ainsi, en 2003, dans l’affaire Bourassa, la Cour d’appel a en outre rappelé qu’« il [le recours en révision] ne saurait non plus être une invitation faite à un commissaire de substituer son opinion et son appréciation de la preuve à celle de la première formation »[9].
[46] Dans l’arrêt Godin[10], l’honorable juge Fish précise qu’une décision ne peut être révisée pour le simple motif que la formation siégeant en révision ne partage pas l’opinion du premier juge administratif, que ce soit à l’égard de l’appréciation de la preuve, de l’interprétation de la règle de droit applicable ou même du résultat de l’analyse ; dans chaque cas, conclut-il, là où plus d’une issue raisonnable est possible, c’est celle retenue par le premier juge administratif qui doit prévaloir :
[51] Accordingly, the Tribunal commits a reviewable error when it revokes or reviews one of its earlier decisions merely because it disagrees with its findings of fact, its interpretation of a statute or regulation, its reasoning or even its conclusions. Where there is room on any of these matters for more than one reasonable opinion, it is the first not that last that prevails.
[47] Dans son arrêt Amar c. CLP[11], la Cour d’appel réitère qu’une divergence d’opinions quant à l’interprétation du droit ne constitue pas un motif de révision.
[48] Dans l’affaire CSST c. Fontaine[12], sous la plume de l’honorable juge Morissette, la Cour reprend avec approbation les propos du juge Fish et ajoute que le vice de fond de nature à invalider dont parle la loi réfère à une « faille » dans la première décision telle qu’elle dénote de la part de son auteur une « erreur manifeste, donc voisine d’une forme d’incompétence, ce dernier terme étant entendu ici dans son acception courante plutôt que dans son acception juridique ».
[49] La même règle fut répétée dans l’arrêt Touloumi[13] :
[5] Il ressort nettement de l’arrêt Fontaine qu’une décision attaquée pour motif de vice de fond ne peut faire l’objet d’une révision interne que lorsqu’elle est entachée d’une erreur dont la gravité, l’évidence et le caractère déterminant ont été démontrés par la partie qui demande la révision.
[50] Cette approche a toujours cours à la Commission des lésions professionnelles[14].
[51] Il ressort notamment de ce qui précède qu’une décision exhibant un « raisonnement parfaitement intelligible » n’est pas sujette à révision[15].
[52] Ainsi, dans le présent cas, la décision initialement rendue par la Commission des lésions professionnelles fait autorité. Elle ne saurait être révisée pour le motif que le soussigné ne partagerait pas l’opinion de la première formation quant à l’appréciation de la preuve ou l’interprétation du droit ou encore quant à l’issue du litige, à moins qu’à l’égard de l’un de ces sujets, la partie requérante en révision ne démontre qu’elle est entachée d’une erreur grave, évidente (manifeste) et déterminante.
[53] Le recours en révision n’est pas un appel.
[54] Le travailleur reproche à la première juge administrative d’avoir fait référence à l’article 46 de la loi au paragraphe 65 de sa décision déjà cité[16]; il écrit à ce sujet : « l’article 46 est attribuable à l’indemnisation, pas à l’admissibilité d’une lésion - La Juge ajoute des critères supplémentaires et un fardeau supplémentaire au travail, ce qui est contraire à la LATMP ».
[55] La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision ne voit pas en quoi la première juge administrative aurait imposé au travailleur un fardeau de preuve additionnel en tenant les propos mentionnés au paragraphe 65 de sa décision. Elle s’est tout simplement contentée de souligner que, dans les circonstances propres à l’espèce, il n’a pas été démontré « que la chute a été incapacitante », et ce, compte tenu d’un diagnostic lésionnel de « hernie discale L3-L4 et sténose spinale ». Ce faisant, elle a tout simplement apprécié la preuve offerte.
[56] Le procureur du travailleur fait grand état du fait que la première juge administrative reconnaît, au paragraphe 86 de sa décision, qu’un accident est bel et bien survenu le 8 mars 2012, mais refuse tout de même la réclamation du travailleur. Il soutient que la seule explication à ce phénomène tient dans le fait que, selon la première juge administrative, le travailleur ressentait des douleurs avant l’accident, ce qui est inexact au regard de la preuve offerte, selon lui.
[57] Le soussigné estime que la première juge administrative motive plutôt son rejet de la réclamation, sous l’empire de l’article 2 de la loi, en raison de l’absence de démonstration d’un lien de causalité entre la chute et la lésion diagnostiquée :
[84] Le travailleur a-t-il subi un accident du travail au sens de l’article 2 de la Loi?
[85] Afin d’établir qu’il a subi un accident du travail, le travailleur doit démontrer par une preuve prépondérante : 1- un évènement imprévu et soudain, 2- attribuable à toute cause, 3- survenu au travailleur par le fait ou à l’occasion de son travail, 4- et qui entraîne pour lui une lésion professionnelle. Il s’agit là de la preuve de la causalité entre la lésion diagnostiquée et l’évènement imprévu et soudain.
[86] Le travailleur soutient qu’il a chuté au travail le 8 mars 2012, et donc qu’il a subi un évènement imprévu et soudain. Le tribunal croit que le travailleur a chuté ce jour-là au travail.
[87] Néanmoins, la preuve médicale montre que la douleur au dos et aux membres inférieurs est déjà présente le 8 mars 2012 et que le travailleur n’est pas asymptomatique.
[88] Rappelons qu’il a continué le travail régulier pendant six semaines sans déclarer l’évènement à l’employeur et que la première consultation médicale ne donne pas lieu à un rapport CSST. Au départ, il prend des vacances sans déclarer un évènement. La preuve ne montre pas que la douleur est consécutive ou secondaire à la chute ou la lésion en relation avec l’évènement.
[89] Il n’y a pas de preuve médicale de causalité entre le diagnostic de hernie discale L3-L4 et sténose spinale et la chute au travail. Les médecins du travailleur parlent au début de lombalgie chronique, puis informés des résultats de l’examen par résonance magnétique, ils posent le diagnostic de hernie discale L3-L4 et sténose spinale de nature dégénérative. Rappelons que le protocole opératoire fait état d’un ligament hypertrophique et l’examen par résonance magnétique d’ostéophyte et d’ostéoarthrose. Les médecins ne se sont pas prononcés sur la relation entre la lésion diagnostiquée et la chute au travail.
[90] Le travailleur n’a pas établi qu’il a subi un accident du travail en vertu des dispositions de l’article 2 de la Loi.
[nos soulignements]
[58] Avec respect pour l’opinion contraire, la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision considère qu’il n’y a aucune contradiction entre les paragraphes 86 et 90 de la décision rendue le 13 mars 2013. Aux termes de la définition apparaissant à l’article 2 de la loi, l’accident du travail ne se définit pas qu’à la seule survenance d’un événement imprévu et soudain, encore faut-il qu’il soit aussi démontré que cet événement a « entraîné » la lésion du travailleur (le lien causal) :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« accident du travail » : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle;
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1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.
[59] Référant à certains passages de l’extrait de littérature médicale déposé comme pièce T-2, le procureur du travailleur argue que la conclusion exprimée au paragraphe 89 de la décision précité est erronée. Mais, il n’explique pas en quoi ce serait précisément le cas. En somme, il voudrait que la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision substitue sa propre appréciation de la preuve à celle de la première juge administrative. Le recours en révision/révocation ne permet pas pareille intrusion dans le champ réservé au décideur qui a présidé à l’enquête.
[60] À la lecture des extraits précités de la décision rendue le 13 mars 2013, force est de conclure qu’elle est amplement motivée, et ce, de façon claire et parfaitement intelligible, contrairement à ce que prétend le procureur du travailleur. Il ne s’agit pas d’un cas d’absence de motivation comme celui dont il était question dans l’affaire Centre de santé et de services sociaux Baie-des-Chaleurs et Service Secours Baie-des-Chaleurs ltée[17] citée par le procureur du travailleur. Il ne s’agit pas, non plus, d’un cas où la première juge administrative se serait appuyée « sur des faits non prouvés ou inexacts » « pour justifier sa décision » comme dans l’affaire Cyr et Club Automobile Québec et CSST[18] également citée par le procureur.
[61] La requête en révision/révocation n’est pas fondée.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la requête de monsieur Aristomenis Koutsoukos, le travailleur.
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Jean-François Martel |
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Me Éric Marsan |
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Léger & Marsan, associés |
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Procureur de monsieur Aristomenis Koutsoukos |
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[1] L.R.Q., c. A-3.001.
[2] À sa face même, elle porte la date du « 19 mars 2012 », mais il s’agit sans doute d’une erreur - quant à l’année, à tout le moins - puisque la décision dont elle demande la révision a, pour sa part, été rendue le 13 mars 2013.
[3] En réalité, il faut voir la note manuscrite pour se faire une opinion.
[4] C’est le terme employé par le procureur dans son argumentation écrite du 18 décembre 2013.
[5] 2010 QCCLP 8259.
[6] [2007] C.L.P. 345 (C.A.).
[7] Les échanges ont eu lieu en anglais pour permettre au travailleur de suivre plus facilement les débats, étant donné qu’il était plus familier avec cette langue qu’avec le français. Les lettres « JA » désignent la première juge administrative alors que les lettres « PT » désignent le procureur du travailleur.
[8] Produits forestiers Donohue inc. et Villeneuve, [1998] C.L.P. 733; Franchellini et Sousa, [1998] C.L.P. 783.
[9] Bourassa c. CLP, [2003] C.L.P. 601 (C.A.).
[10] Tribunal administratif du Québec c. Godin, [2003] R.J.Q. 2490 (C.A.). Voir au même effet : I.M.P. Group ltd (Innotech-Execaire Aviation Group) c. Commission des lésions professionnelles, C.S. Montréal, 500-17-041658-082, 2 décembre 2008, j. Le Bel, requête pour autorisation d'appeler accueillie, C.A. Montréal, 500-09-019249-085.
[11] [2003] C.L.P. 606 (C.A.).
[12] [2005] C.L.P. 626 (C.A.).
[13] CSST c. Touloumi, [2005] C.L.P. 921.
[14] Victoria et 3131751 Canada inc. (Fermé), C.L.P. 166678-72-0108, 1er décembre 2005, B. Roy (décision sur requête en révision) ; Louis-Seize et CLSC-CHSLD de la Petite-Nation, C.L.P. 214190-07-0308, 20 décembre 2005, L. Nadeau (décision sur requête en révision) ; Ricard et Liquidation Choc, C.L.P. 217112-62C-0310, 10 février 2006, C. - A. Ducharme (décision accueillant la requête en révision) ; Coopérative forestière Hautes-Laurentides et Aubry, [2008] C.L.P. 763.
[15] Commission scolaire des Phares c. CLP, C.S. Rimouski, 100-17-000616-062, 23 avril 2007, j. Blanchet.
[16] Au paragraphe 29 des présentes.
[17] C.L.P. 302030-01C-0611-R, 3 septembre 2009, J.-F. Clément (2009 QCCLP 6014).
[18] C.L.P. 273928-31-0510-R, 1er mars 2007, S. Sénéchal (2007 QCCLP 1329).
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.