Second Cup Ltd. c. 8702934 Canada inc. (Café Vasanti) |
2016 QCCS 274 |
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JT 1409 (Chambre civile) |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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N° : |
500-17-090229-157 |
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DATE : |
19 janvier 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
FRANÇOIS TÔTH, j.c.s. |
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THE SECOND CUP LTD, |
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Demanderesse, |
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c. |
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8702934 CANADA INC., corporation légalement constituée faisant affaires sous le nom de CAFÉ VASANTI, et 8407304 CANADA INC., |
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Défenderesses, et DARMEL CAFÉ INC., Mise en cause. |
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J U G E M E N T |
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[1] La demanderesse The Second Cup ltd (ci-après appelée « Second Cup ») est locataire d’un immeuble commercial (le « Centre commercial »). Elle allègue que son exclusivité de commerce que lui a consentie le Locateur est battue en brèche depuis le début de l’exploitation du Café Vasanti par un autre locataire.
[2] Second Cup requiert du Tribunal une ordonnance d’injonction interlocutoire afin que cesse la violation de ses droits.
CONTEXTE
[3] Second Cup se décrit comme l’un des plus gros vendeurs au détail de café de spécialité au Canada et détient la bannière Second Cup qu’elle exploite sous la forme d’un réseau de franchises (plus de 325 « specialty coffee shops » au Canada). Dans ces établissements, on trouve toute une variété de café, thé, breuvages et aliments, dans ce dernier cas, du genre croissants, muffins, brioches et sandwichs.
[4] La mise en cause Darmel Café inc. (ci-après appelée « Darmel ») est un franchisé de Second Cup qui exploite un établissement Second Cup dans un local du Centre commercial situé rue Eddy à Gatineau.
[5] La défenderesse 8407304 Canada inc. (ci-après appelée « le Locateur ») est le propriétaire du Centre commercial et locateur de l’emplacement de Second Cup depuis le 24 septembre 2013, lequel emplacement a été subséquemment sous-loué à Darmel pour l’exploitation de l’établissement Second Cup.
[6] En février 2015, la défenderesse 8702934 Canada inc. (ci-après appelée « Café Vasanti ») a débuté l’exploitation d’un commerce, le Café Vasanti, dans le Centre commercial et à proximité du commerce de Second Cup.
Le bail Second Cup / Locateur[1]
[7] Le bail entre Second Cup et le Locateur accorde au locataire une exclusivité d’exploitation dans les termes suivants :
13.13 For so long as The Second Cup Ltd. (or a Permitted Transferee retaining the status and relationship to The Second Cup Ltd. which is a Permitted Transfer in its favour in virtue of Section 18.9) is the tenant of and is occupying the Premises for the purposes of operating a coffee shop selling gourmet coffees and espresso from the whole of the Premises and provided that the Tenant is not in default of its obligations to the Landlord under this Lease beyond the applicable cure period, Landlord shall not lease or permit the operation of any premises in the Commercial Area, in whole or in part, to any tenant or occupant who will use the premises for the principal business of a specialty coffee shop selling coffees, specialty coffees, and espresso-based drinks, such as, by way of example, a Starbucks, Tim Horton’s, Dunkin Donuts, Café Dépôt, and AL Van Houtte. For greater certainty, the Tenant acknowledges and declares that the use clause granted by the Landlord in favor of 30793139 Canada Inc. (doing business under the name “La Prep”) and more fully detailed in Schedule 13.13 hereto does not infringe in any way this Section 13.13.
Schedule 13.13 [restaurant La Prep]
«Permitted use» means the purpose of operation a European style counter service bistro-café offering the sale, at retail, of a wide variety of gourmet salads, sandwiches such as paninis, wraps and pitas (...) hot and cold beverages such as espresso based drinks, fresh brewed liquid coffees and teas, ice blended drinks, ground coffee and whole bean coffee and tea and coffee related supplies and equipment such as mugs, cups and coffee brewing equipment, and for no other purpose.
[gras ajouté, notre ajout]
[8] Cette clause n’est pas un chef-d'œuvre de concision ni de précision. On réussit dans la même clause à dire que Second Cup est un café offrant des « gourmet coffees » alors que l’exclusivité est accordée pour des « specialty coffees ». Synonymes? Probablement.
[9] Selon le grand dictionnaire terminologique[2], un café (« coffee shop ») est un « établissement où l'on sert principalement des boissons chaudes, particulièrement du café et des repas légers ».
[10] Dans la clause 13.13 de son bail, Second Cup reconnaît, for greater certainty, que l’exploitation du commerce La Prep ne viole pas sa clause malgré toutes les variétés de café offertes. Cette exception s’explique par le fait que La Prep avait des velléités d’exploiter un bistro-café dans le Centre commercial avant l’arrivée de Second Cup. Elle a finalement abandonné l’idée. En tout temps pertinent au litige, aucun établissement La Prep n’était exploité dans le Centre commercial. Le Tribunal ne croit pas que l’on puisse utiliser cette exception ou admission en faveur d’un établissement précis pour restreindre la portée de la clause d’exclusivité de Second Cup face à un tiers tel Café Vasanti. Notamment, le « menu » ou l’offre de La Prep ne devient pas une exception ou une permission applicable à tous.
[11] On remarque que la clause d’exclusivité de Second Cup ne concerne que des types précis de breuvages. La vente de nourriture dans d’autres établissements du Centre commercial n’est pas prohibée et est, en fait, tout à fait prévisible.
Le bail Café Vasanti / Locateur[3]
[12] Ce bail prévoit tout d’abord l’usage des lieux loués :
(oo) “Permitted Use” means the purposes of a take-out delicatessen and a buffet style restaurant serving cold and hot meals and for no other purpose.
[gras ajouté]
[13] Quant aux droits de Second Cup, le bail indique spécifiquement :
13.12 The Tenant [Café Vasanti] will not use or permit or suffer the use of the Premises for a sale or business conduct which would, in the Landlord’s opinion, interfere with or otherwise harm the business of any other tenant of the Building. The Tenant acknowledges that other tenants of the Building have been granted restrictive or exclusive covenants (including, without limitation, those exclusive covenants set forth in Schedule “J” attached hereto), and accordingly, no part of the Premises will be used for a sale or business conduct which would violate any restrictive or exclusive covenant granted to a tenant or occupant of the Building. The Tenant shall not introduce new product lines, or offer new services to its customers without first obtaining the written consent of the Landlord. The Tenant acknowledges that it would be reasonable for the Landlord to withhold its consent, if the introduction by the Tenant of such service would compete with the business of other tenants in the Building or infringe on exclusivity rights that have already been granted.
[gras ajouté, notre ajout]
[14] À la « schedule J » du bail de Café Vasanti, il est mentionné :
Second Cup
For so long as The Second Cup Ltd. (or a Permitted Transferee retaining the status and relationship to The Second Cup Ltd. which is a Permitted Transfer in its favor in virtue of Section 18.9) is the tenant of and is occupying the Premises for the purposes of operating a coffee shop selling fourmet (sic) coffees and espresso from the whole of the Premises and provided that the Tenant is not in default of its obligations to Landlord under the Lease, Landlord shall not lease or permit the operation of any premises in the Commercial Area, in whole or in part, to any tenant or occupant who will use the premises for the principal business of a specialty coffee shop selling coffees, specialty coffees and espresso-based drinks, such as, by way of example a Starbucks, Tim Horton’s, Dunkin Donuts, Café Dépot, and AL Van Houtte. […]
[gras ajouté]
LA GENÈSE DU LITIGE
L’ouverture du Café Vasanti
[15] En octobre 2014, Second Cup apprend, via Darmel, l’ouverture prochaine du Café Vasanti dans le Centre commercial. Il s’en inquiète auprès de son Locateur.
[16] Le Locateur lui fait parvenir un menu de Café Vasanti et le rassure : il garantit par écrit que le Café Vasanti sera une cafétéria qui ne vendra pas de café de spécialité (ou café spécialisé[4]). Il écrit :
« I can guarantee you it is a cafeteria style place where you pick up food like sandwiches, pizza, lasagna and sodas and you take away. There is no seats in the place and they know they are not allowed to sell any specialty coffee[5] ».
[17] Cette affirmation catégorique de Monsieur Nihon tranche avec sa valse-hésitation lorsqu’il est interrogé sur sa visite du Café Vasanti situé au Centre commercial Promenades du Portage où Madame Gryzcon lui a montré son « concept ». Il ne se souvient pas d’avoir vu les 20 thermos de café qui sont dans cet établissement. Il s’embrouille aussi sur la question de savoir s’il a consulté ou non le site web de Café Vasanti qui s’y décrit comme un Premium Coffee House[6].
[18] Le menu[7] de Café Vasanti indique :
COFFEE : freshly brewed organic and fair trade;
Small 1,79 $ Large 2,19 $.
[19] Le menu fait aussi état des autres produits offerts :
· paninis (neuf variétés);
· neuf choix de pizza;
· choix de déjeuners (rôties, œufs, bacon, fromage, saumon fumé, patates, yogourt, salade de fruits);
· crêpes (quatre variétés);
· omelettes;
· produits de boulangerie : croissants, scones, gâteaux Cupcakes, pain, pâtisseries, tartes, biscuits;
· salades (13 choix);
· produits laitiers;
· soupes (10 variétés);
· repas chauds (lasagne, hamburgers, poulet au beurre, raviolis, sautés, boulettes de viande, perogies[8], rosbif, légumes vapeur).
[20] À la lumière de ce menu et devant les garanties du Locateur, Second Cup ne pousse pas plus loin ses recherches. Il conclut que Café Vasanti est un « food establishment » et que cela n’enfreint pas la clause d’exclusivité[9].
[21] Le Café Vasanti ouvre ses portes en février 2015. Dans les jours suivant l’ouverture, à au moins une occasion, Café Vasanti distribue gratuitement du café aux clients. Selon Madame Gryzcon de Café Vasanti, ce ne serait pas une promotion : la machine à café fonctionnant mal, on donnait un café noyé à ceux qui en voulaient…, ce qui est une bien drôle de façon de se bâtir une clientèle[10]…
[22] Dès l’ouverture du Café Vasanti, Darmel voit ses ventes chuter de 25 % et s’en plaint au franchiseur Second Cup[11].
[23] Le 24 février 2015, l’avocat ontarien de Second Cup écrit au Locateur pour dénoncer la situation[12]. Plus particulièrement, Second Cup se plaint que :
The Second Cup was advised that the space leased by Café Vasanti would be operated as a restaurant use, not for a use in direct competition to The Second Cup, selling primarily the same or similar type of products with the exception of the buffet style salads and pastas. My client was never advised of Café Vasanti’s café coffee design nor of its focus on coffee. In fact, the Landlord provided my client with a copy of Café Vasanti’s menu to attempt to assure my client it had no worry Café Vasanti was a direct competitor. In no way did the menu indicate the products being sold would focus on coffee and the same or similar food products as those sold by my client’s franchisee.
[24] Le 5 mars 2015, l’avocate du Locateur répond à son confrère[13]. Elle précise qu’il n’y a pas d’espace dédié à la vente de café chez Café Vasanti, mais seulement six thermos de café filtre près de la caisse, ce qui ne serait pas du café de spécialité[14]. Elle confirme qu’il n’y a pas de machine à espresso à la succursale de la rue Eddy.
[25] Le 16 mars 2015, Darmel fait expédier une mise en demeure au franchiseur Second Cup[15]. Il se plaint de l’ouverture du Café Vasanti, ce qui viole sa clause d’exclusivité en ce que :
1) Café Vasanti se désigne dans sa raison sociale comme « café »;
2) Café Vasanti vend la marque de café Seattle’s Best et de thé Tazo qui sont des produits mis en marché par Starbucks;
3) Café Vasanti vend du café en grains;
4) Café Vasanti offre gratuitement du café à ses clients.
[26] Darmel allègue que cette situation illégale lui fait subir des pertes pécuniaires importantes et la forcera à résilier ses contrats avec Second Cup et à lui réclamer des dommages importants (1,35 M$), à moins que Second Cup ne fasse le nécessaire pour faire cesser cette concurrence illégale.
[27] Quatre mois plus tard, Darmel revient à la charge le 10 juillet 2015[16] avec une nouvelle mise en demeure à Second Cup. Devant les pertes qui continuent de s’accumuler, Darmel annonce son intention de fermer boutique le 31 juillet 2015 et de poursuivre Second Cup en résiliation de contrat et dommages.
[28] Second Cup répond à Darmel par la voix de son avocat[17]. L’avocat explique pourquoi il est d’avis que Café Vasanti ne viole pas la clause d’exclusivité de Darmel :
Amongst other factors tending against the possibility of an injunction to enforce the exclusivity clause, are the following :
1. The principal activity of Vasanti does not seem to be the sale of coffee and espresso based drinks. Indeed, Vasanti does not have an espresso machine;
2. Vasanti’s menu is quite different from that of Second Cup;
3. Although Vasanti sells products that can be found in Dunkin Donuts, Tim Horton’s, Café Dépôt or Van Houtte, these products are sold in all such restaurants that serve breakfasts and lunches. Second Cup cannot argue to have an exclusivity in relation to the sale of these products. This is evidenced by the fact that the clause does not prohibit a type of product.
4. Vasanti’s menu clearly does not focus on coffee;
5. The general impression one gets when comparing Second Cup and Vasanti is that they are not similar. Vasanti does not have tables or chairs. It is for take-out only. Nothing in their logos, colors, and decoration create a resemblance. The layout is also different.
6. The opening hours of Second Cup are 6am to 11pm daily and the opening hours of Vasanti are 6am to 4pm.
[nos soulignés]
Chassé-croisé de procédures judiciaires
[29] En juillet 2015, Darmel cesse de payer son loyer. Une saga judiciaire débute.
1) Darmel c. Second Cup
[30] Le 3 août 2015, Darmel intente dans le district de Gatineau une action en résiliation des contrats de sous-location et de franchise contre Second Cup et réclame 1,5 M$ en dommages[18]. Un des motifs allégués est le refus ou l’inaction de Second Cup de faire respecter la clause d’exclusivité.
2) Locateur c. Second Cup
[31] Le 21 août 2015, le locateur réclame en justice de Second Cup les loyers de mai, juin et juillet 2014 et les loyers de juillet et août 2015 (total 39 500 $) que le franchisé Darmel n’a pas payés[19]. L’action est intentée devant la Cour du Québec du district de Montréal[20].
[32] Le 22 septembre 2015, le juge Richard prononce une ordonnance de sauvegarde réduisant le loyer de 10 000 $ par mois à 4 000 $ par mois[21] à compter d’octobre 2015 afin « de rétablir un équilibre temporaire jusqu'à la tenue du procès au fond ou d'un règlement entre les parties[22] ».
3) Second Cup c. Locateur et Café Vasanti
[33] Devant la Cour supérieure du district de Montréal, Second Cup introduit une demande d’injonction le 3 septembre 2015 contre le Locateur et Café Vasanti. Elle réclame l’exécution en nature de la clause d’exclusivité stipulée en sa faveur.
[34] Pour expliquer le délai pour agir en justice[23], Second Cup plaide qu’elle n’a connu certains éléments de preuve, telle la page web de Café Vasanti, qu’à l’occasion de la poursuite intentée contre elle par Darmel en juillet 2015. Elle aurait alors réalisé qu’elle s’était fait rouler dans la farine par les propos bienveillants du Locateur[24].
Les reproches de Second Cup
[35] Second Cup se plaint que :
1) Café Vasanti se présente au public comme un « specialty coffee shop » selon sa page internet[25];
2) Le local de Café Vasanti est aménagé comme un « specialty coffee shop » qui offre des cafés de spécialité;
3) Café Vasanti offre six variétés de café dont les marques Seattle’s Best et Tazo de Starbucks ainsi que des moutures de café et du café en grains;
4) Ainsi, Café Vasanti est un café dont les activités sont de la même nature que celles de Starbucks, Tim Hortons, Dunkin Donuts, Café Dépôt, et AL Van Houtte.
[36] Second Cup réclame diverses ordonnances notamment que Café Vasanti s’abstienne de vendre du café moulu et du café de spécialité tels que cafés aromatisés, café colombien, café noir corsé (« dark blend ») ou café brun velouté (« light blend »), breuvages à base d’espresso, retire le mot « café » du nom de sa place d’affaires, cesse de s’afficher comme un « specialty coffee shop » et élimine son comptoir à café[26].
LA PREUVE
[37] Les parties ont fait leur preuve au moyen d’affidavits, d’interrogatoires, de documents et de preuves matérielles.
[38] Voici ce que la preuve révèle.
[39] Café Vasanti se présente comme un « coffee shop » ou café, tant par sa raison sociale (Café) que par sa page web. Qui plus est, sur la page web du Café Vasanti, ce dernier se décrit comme un « Premium Coffee House »[27] pour décrire sa succursale de la rue Montcalm qui avait été visitée par le représentant Nihon du Locateur. Sur une photo affichée sur ce site, on peut voir les exploitants du Café Vasanti devant des thermos de café Van Houtte.
[40] Ce n’est que le 8 septembre 2015, lors de l’audience devant la juge Cohen de la Cour supérieure que l’on apprend que le site web serait finalement fermé. Il semblerait que Café Vasanti tentait de le fermer depuis décembre 2014. Les explications embrouillées de Madame Gryczon qu’il s’agissait d’un site web ouvert à son insu[28] pourront être appréciées par le juge du fond.
[41] Selon Second Cup, l’aménagement du local du Café Vasanti est celui d’un café.
[42] Sur les plans d’aménagement du Café Vasanti, on peut voir un comptoir « coffee area » près de la caisse enregistreuse avec six thermos de café[29]. On y servait du café Starbucks (« Seattle’s Best ou Mother’s Parker »[30]). Du café moulu serait aussi vendu en sac.
[43] Au Café Vasanti, les clients ne mangent pas sur place. Il n’y a pas de chaises ni tables. Les clients se servent eux-mêmes (ex. bar à salade, comptoirs réfrigérés, comptoir à café) ou sont servis par le personnel derrière le comptoir, et passent à la caisse. C’est un libre-service pour emporter (« take out »)[31].
[44] Alors que le menu transmis à Second Cup à l’automne 2014 indique que Café Vasanti vend du café fraîchement infusé, bio et équitable, dans deux formats et à deux prix, il a été constaté à l’ouverture que Café Vasanti offre en fait six saveurs de café (velouté, medium, corsé, colombien, décaféiné et saveur de noisette[32]) dont des marques de café réputées tels Seattle’s Best et Mother’s Parker de Starbucks.
[45] Au moment d’ouvrir la succursale rue Eddy qui nous concerne, il y avait deux autres Café Vasanti :
· Rue Montcalm qui offre 20 variétés de café en thermos;
· Promenade du Portage qui offre six variétés de café en thermos.
[46] Au temps de l’audience, il a maintenant cinq Café Vasanti dans la ville de Gatineau. Dans tous ces établissements, sauf celui de la rue Eddy, la marque de café est affichée sur les thermos (AL Van Houtte ou Mother’s Parker de Starbucks).
· Second Cup
[47] Si on a fait une preuve de l’entreprise de Café Vasanti (page web, photos, menu), on n’a rien présenté en ce qui concerne Second Cup; pas de photos, pas de menu, pas de page web. Bref, on ne sait pas ce qu’est le « specialty coffee shop » Second Cup.
[48] Alors que Second Cup se présente comme le spécialiste du café, on a eu bien du mal à définir ce qu’était un café gourmet ou un café de spécialité. Cela était essentiel pour déterminer si les cafés filtres de Café Vasanti sont des cafés de spécialité.
[49] Enfin, on n’a rien présenté non plus en ce qui concerne les autres chaînes considérées comme des « specialty coffee shop » selon la clause d’exclusivité : Starbucks, Tim Hortons, Dunkin Donuts, Café Dépôt, et AL Van Houtte qui semblent être un (des?) modèle(s) d’affaires dont on veut éviter la concurrence.
[50] Tous semblent tenir pour acquis que c’est de connaissance judiciaire. La connaissance judiciaire, si vaste soit-elle, n’inclut pas les aspects typiques ou particuliers d’un type d’entreprise ou d’une chaîne d’établissements ou encore un modèle d’affaires ou « concept ».
ANALYSE
[51] Pour avoir droit au remède recherché, Second Cup doit démontrer :
1) une apparence de droit;
2) un préjudice irréparable;
3) le cas échéant, une balance des probabilités en sa faveur.
[52] Le Tribunal est d’avis que Second Cup ne s’est pas déchargé de son fardeau de prouver une apparence de droit. Voici pourquoi.
[53] La première question à trancher est celle de déterminer si Café Vasanti utilise ses locaux « for the principal business of a specialty coffee shop selling coffees, specialty coffees, and espresso-based drinks » et non pas de déterminer si Café Vasanti est simplement un concurrent de Second Cup. Dans la mesure où les deux commerces offrent des repas légers, c’est clairement le cas. Rien dans la clause d’exclusivité ne le prohibe toutefois.
[54] Si Second Cup ne réussit pas à démontrer une apparence de droit suffisante au remède qu'il recherche, l’analyse s’arrête là.
[55] Si on a décrit en long et en large les activités de Café Vasanti, il n’y a pas eu un iota de preuve sur le type d’activités tenues chez Second Cup, bref pas de preuve du « principal business » de Second Cup qu’on veut protéger par la clause d’exclusivité.
[56] Dans ses procédures, Second Cup se décrit comme un « specialty coffee shop[33] selling specialty coffees » : or, Second Cup a été incapable de donner une définition précise de ce qu’est un café de spécialité[34].
[57] Cette question de café de spécialité est au cœur du litige[35]. On ne sait pas si les six thermos de café filtre de Café Vasanti sont des cafés de spécialité, Second Cup admettant toutefois d’emblée que Café Vasanti peut vendre du café « régulier » et décaféiné sans problème[36].
[58] Cela est d’autant plus important que Second Cup veut se protéger de la concurrence d’un type de commerce (ou d’un modèle d’affaires) qu’il identifie nécessairement comme des « specialty coffee shop » et qu’il énumère de façon non limitative (Starbucks, Tim Hortons, Dunkin Donuts, Café Dépôt, et AL Van Houtte).
[59] Sans cette preuve, comment alors comparer les deux « principal business » des deux belligérants[37]? Cette omission est fatale.
[60] Cette omission n’est pas comblée par le fait que la clause 13.13 du bail de Second Cup indique que le « Landlord shall not lease or permit the operation of any premises in the Commercial Area, in whole or in part, to any tenant or occupant who will use the premises for the principal business of a specialty coffee shop ». Pour le Locateur, « In whole or in part » qualifie « Commercial Area » qui est défini au bail[38]. Cela est loin d’être sûr quand on considère le reste de la clause qui mentionne : « For so long as The Second Cup Ltd. […] is the tenant of and is occupying the Premises for the purposes of operating a coffee shop selling gourmet coffees and espresso from the whole of the Premises… ». Bref, si toutes et chacune des parties du local de Second Cup doivent être exploitées selon la destination prévue au bail, il est raisonnable de penser que toutes et chacune des parties du Centre commercial ne doivent pas enfreindre non plus la clause d’exclusivité de Second Cup.
[61] Le bail de Café Vasanti ne vient pas non plus au secours de Second Cup. Café Vasanti s’engage à ce qu’aucune partie des lieux loués ne contrevienne à la clause d’exclusivité de Second Cup[39]. Toutefois, il faut référer à cette clause pour connaître les droits de ce dernier. C’est ainsi que l’établissement de Café Vasanti ne doit pas avoir comme activité principale celle de « specialty coffee shop ». C’est donc globalement qu’on doit apprécier l’établissement de Café Vasanti pour déterminer s’il a comme activité principale celle de « specialty coffee shop ».
[62] L’expression « principal business» n’est pas définie au bail[40]. Les tribunaux québécois se sont souvent penchés sur ce type de clause d’exclusivité où il est question d’une « activité principale[41] » ou d’un « usage principal ».
[63] Ainsi, on a déterminé qu’il ne s’agissait pas seulement d’une question de pourcentage de superficie locative, d’inventaire ou de revenu[42].
[64] Dans l’affaire[43] Muffins Probec inc. c. 9008-3817 Québec inc., il s’agissait d’une clause d’usage et d’exclusivité rédigée comme suit :
2 - USE - The Leased Premises shall be used mainly for a restaurant/café, selling retail foods in the nature of, bakery products, muffins, sandwiches, soups, salads, desserts, yogurt, coffees, teas, juices, milk, soft-drinks, and other products as they are normally found or developed and sold by "mmmuffins".
2a - EXCLUSIVITY - The LANDLORD will not lease to any other operation similar to that of "mmmuffins", (i.e. Café-Supreme, Van Houtte et al., Cultures, Croissants Plus) in the building. It is agreed and understood that "mmmuffins" will be the only operation of this kind in the building.
[65] Dans le local voisin de celui occupé par "mmmuffins", le locateur a consenti un bail à un tiers pour exploiter un restaurant sous le nom de "PizzAmour". Le locataire "mmmuffins", alléguant que l'exploitation de "PizzAmour" enfreint sa clause d'exclusivité, a requis du Tribunal une injonction permanente pour faire cesser cette exploitation.
[66] Le juge de la Cour supérieure a interprété la clause d'exclusivité avec la clause d'usage pour conclure qu'un établissement qui vend des produits semblables à ceux énumérés à la clause 2 mène une opération semblable à celle de "mmmuffins" et a accordé l’injonction permanente.
[67] La Cour d’appel accueille le pourvoi. Elle écrit :
6 Avec égards pour son opinion, la Cour estime que la première juge a accordé trop d'importance à la comparaison des produits vendus dans chacun des deux établissements plutôt qu'à la comparaison des opérations menées. En somme, les intimées n'ont pas l'exclusivité de la vente de sandwiches, soupes, salades, desserts et cafés mais plutôt l'exclusivité d'exploitation d'un restaurant-café semblable à ceux que Muffins Probec inc. et ses franchisés exploitent sous la bannière "mmmuffins". D'ailleurs, toutes les parties s'entendent pour reconnaître que la clause d'exclusivité n'empêche pas l'exploitation d'un autre restaurant sous l'édifice.
7 Ce n'est pas seulement le menu qui permet de conclure ou non à la similarité dans l'exploitation d'une entreprise de ce type, mais bien, comme on l'a décrit dans une affaire similaire[44], "son allure générale, son décor, le service qu'on y donne, ses caractéristiques distinctives comme la multiplicité des denrées qu'on y offre", et ajoutons ici, les prix, la clientèle cible et les heures d'affluence. En l'espèce, la preuve établit nettement que l'appelante "PizzAmour" n'exploitait pas une entreprise semblable (au sens de la clause 2a) à celle des intimées.
[nos soulignés]
[68] Dans l’affaire Café Tai-Tai inc. c. 9046-1419 Québec inc. citée par la Cour d’appel, le litige opposait un établissement Dunkin’ Donuts à un commerce du nom de Presse-Café.
[69] Dunkin’ Donuts s’était vu consentir une exclusivité dans les termes suivants :
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Exclusivity :
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The landlord shall grant the Tenant exclusive right to operate a Donut Shop style restaurant and a Baskin-Robbins ice cream parlor within the commercial property.
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[70] De son côté, le bail de Presse-Café contenait les clauses suivantes :
6.08 Usage des Lieux
Le LOCATAIRE utilisera les Lieux pour opérer un commerce de restaurant avec permis d'alcool et vente de café.
Le LOCATAIRE devra respecter la clause d'exclusivité que détient Dunkin' Donut et qui se lit comme suit : "The tenant have exclusive right to operate a Donut Shop style restaurant and a Baskin-Robbins ice cream parlor within the commercial property."
[71] Dunkin’ Donuts a mis en preuve les divers produits et denrées offerts dans les deux établissements pour démontrer que Presse-café violait la clause d’exclusivité. Le juge Côté écrit :
[12] …On compare ainsi, objet par objet, ce qu'offre le DUNKIN' DONUTS par rapport au PRESSE CAFÉ, pour conclure à une similitude du menu de l'un par rapport à celui de l'autre. Mais, ce faisant, on n'a pas nécessairement défini ce qu'est un Donut Shop style restaurant, car le menu - à l'exclusion de tous autres facteurs - ne suffit pas à décrire un type ou un genre de restaurant; son allure générale, son décor, le service qu'on y donne, ses caractéristiques distinctives comme la multiplicité des denrées qu'on y offre, ainsi que le fait qu'on y serve des boissons alcoolisées sont tous des facteurs qui, pris individuellement comme dans leur ensemble, peuvent servir à déterminer le genre ou type de restaurant dans lequel pénètre la clientèle.
[…]
15 Il y a plus. On lit souvent, en jurisprudence, décisions et arrêts qui, en la matière, comparent les menus des établissements en conflit pour juger s'ils sont similaires ou encore concurrentiels, puisque le but de ces clauses d'exclusivité, que l'on retrouve incorporées aux baux commerciaux, est justement d'éviter une concurrence appréhendée. Il faut noter, à cet égard, que ces clauses contiennent très souvent une énumération, parfois élaborée, des denrées qui ne peuvent être offertes dans les autres établissements d'un immeuble ou complexe commercial. Or, ce n'est pas le cas en l'espèce. Dans l'offre de location R-1, qui tient lieu de bail à Québec, on a plutôt voulu décrire un genre ou type d'établissement de restauration rapide; pour ce faire, on s'est arrêté à un genre d'établissement typiquement nord-américain, alors que le PRESSE CAFÉ qu'exploite Québec est nettement à saveur européenne. Il faut donc éviter de suivre aveuglément les décisions et arrêts qui affirmeraient que le style et le décor n'entrent pas en ligne de compte dans la comparaison qui vise à évaluer le caractère clair ou apparent du droit dont se réclame la partie requérante. Cette jurisprudence ne trouve pas application dans une affaire où les parties au bail ont justement voulu décrire les établissements exclus à partir de tels critères.
[72] La clause d’exclusivité de Second Cup vise à la fois un type d’établissement (« specialty coffee shop »), une énumération de produits (« coffees, specialty coffees, and espresso-based drinks ») et un modèle d’affaires ou un concept de restauration (« by way of example, a Starbucks, Tim Horton’s, Dunkin Donuts, Café Dépôt, and AL Van Houtte »). La preuve est lacunaire sur ces trois aspects.
[73] La requête en injonction interlocutoire est en conséquence rejetée.
ÉPILOGUE
[74] Depuis l’ouverture du Café Vasanti en février 2015, ce dernier a :
[75] Pour Second Cup, il s’agissait de manœuvres pour corriger le tir après coup. Café Vasanti continue toutefois de vendre six sortes ou saveurs de café filtre. Remarquons que la clause d’exclusivité de Second Cup ne précise pas que du café filtre ne peut pas être du café de spécialité comme le prétend le Locateur[45].
[76] Afin que la décision soit claire pour les parties, le Tribunal ne détermine pas que Second Cup n’a aucun droit à faire valoir. Elle a une clause d’exclusivité en sa faveur et tant le Locateur que Café Vasanti se sont engagés à la respecter.
[77] Si Second Cup échoue, c’est que la preuve qu’il a présentée est incomplète et ne permet pas au Tribunal de déterminer si le Locateur et Café Vasanti ont violé leur engagement.
[78] Café Vasanti est-il une chaîne de cafés qui s’affiche comme tel[46], qui fait sa réputation et attire sa clientèle avec une grande variété de cafés à l’instar des Starbucks, Tim Horton’s, Dunkin Donuts, Café Dépôt, et AL Van Houtte ? Le débat reste à faire.
[79] Vu ces conclusions, cela fait en sorte que la requête du Locateur en rejet pour motif de procédure abusive doit aussi être rejetée avec dépens.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[80] REJETTE la requête en injonction interlocutoire de la demanderesse, avec dépens;
[81] REJETTE la requête en rejet de la défenderesse 8407304 Canada inc., avec dépens.
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__________________________________ FRANÇOIS TÔTH, j.c.s. |
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Me Michèle Frenière |
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LAPOINTE ROSENSTEIN MARCHAND MELANÇON |
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Procureure de la demanderesse |
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Me Katarina Kovacevic |
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LETELLIER GOSSELIN AVOCATS |
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Procureure de la défenderesse 8702934 Canada inc.
Me Jacques S. Darche BORDEN LADNER GERVAIS, s.e.n.c.r.l., s.r.l. Procureur de la défenderesse 8407304 Canada inc.
Me Joelle Maurais BEAUDRY, BERTRAND, s.e.n.c.r.l. Procureure de la mise en cause |
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Dates d’audience: |
11 et 24 novembre 2015 |
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[1] Pièce P-4.
[2] http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/.
[3] Pièce P-8.
[4] C’est du moins le secteur d’activité déclaré de Second Cup au registraire des entreprises, pièce P-1.
[5] Pièce DL-1.
[6] Pièce P-9.
[7] Pièce DL-2.
[8] Plat typique de la cuisine polonaise.
[9] Pièces DL-3 et P-7 de P-13.
[10] Cela est contredit par le Locateur qui affirme qu’il s’agissait d’une promotion, pièce P-21.
[11] Pièces P-11 de P-13.
[12] Pièces P-12 de P-13.
[13] Pièce P-15 de P-13.
[14] Pièce P-14 de P-13.
[15] Pièce P-27 de P-13.
[16] Pièce P-28 de P-13.
[17] Pièce P-29 de P-13.
[18] Cette procédure et ses 32 pièces sont produites sous la cote P-13.
[19] L’amendement au bail pièce P-5, art. 7 « Article IX Free Rent Period » prévoit que le loyer du mois de mai 2014 est gratuit…
[20] Pièce P-16 a).
[21] 2015 QCCQ 8695.
[22] Id. par. 34.
[23] Café Vasanti a ouvert ses portes en février 2015.
[24] Courriel DL-1 de Monsieur Nihon du 8 octobre 2014. Le locateur avait garanti à Second Cup que Café Vasanti était une cafétéria qui ne vendra pas de café de spécialité.
[25] Pièce P-9.
[26] La conclusion B) 2 va au-delà de la clause d’exclusivité en demandant qu’il soit défendu à Café Vasanti de vendre du thé, ce qui n’est pas interdit. La conclusion B) 3 est surprenante quand on considère que Second Cup n’utilise même pas le terme « café » dans sa propre raison sociale pour se décrire.
[27] Pièce P-9.
[28] Affidavit de Donata Gryczon, par. 22-23. Interrogatoire de Donata Gryczon par Me Frenière, p. 30-35.
[29] Sur les photos pièce P-10 : on peut compter sept thermos de café; ces thermos sont identifiés avec le logo Café Vasanti.
[30] Affidavit de Donato Gryczon, par. 17.
[31] Photos pièce DV-4.
[32] Affidavit de Donata Gryczon, par. 15. On remarque que ces types de café concernent soit le degré de torréfaction (velouté, medium, corsé), l’origine géographique (colombien), le procédé de transformation (décaféiné) ou l’arôme ajoutée (noisette).
[33] Interrogatoire de Dean Michaels de Second Cup par Me Katarina Kovacevic, p. 18-21 sur le sens de coffee shop où la variété de cafés offerts serait déterminante pour avoir cette qualification selon lui (plus de 2, p. 47).
[34] Interrogatoire de Dean Michaels de Second Cup par
Me Katarina Kovacevic, p. 12-13. Interrogatoire de Dean Michaels de Second Cup
par Me Lassiseraye Mathieu p. 73-79. Interrogatoire de Donata Gryczon par Me
Frenière, p. 26. Sur l’importance de définir le produit protégé : 4153171
Canada inc. c. Desjardins Sécurité financière compagnie d'assurance-vie,
[35]
Voir l’opinion du juge Mayrand dans 9018-0928 Québec inc. c. Café Suprême Canada inc.,
[36] Conclusion B) 5.
[37] Voir par exemple le par. 35 de l’affidavit de Dana Vaughan de Darmel. Relire aussi l’opinion de l’avocat de Second Cup au par. [28] du présent jugement.
[38] Pièce P-4, art. 1.1 j).
[39] Pièce DV-3, art. 13.12.
[40]
À l’instar de l’affaire Immeubles Régime XV inc. c. Indigo Books
& Music Inc.,
[41] Riocan Holdings (Québec) Inc.
c. Summum Nutrition inc. (Ez
Games)
[42]
Riocan
Holdings (Québec) Inc. c. Summum Nutrition inc. (Ez Games),
[43]
[1998]
R.J.Q. 42 (C.A.). Voir aussi Riocan Holdings (Quebec) Inc. c. Summum
Nutrition inc. (EzGames)
[44]
Café Tai-Tai inc. c. 9046-1419 Québec inc.,
[45] Pièce P-14 de P-13. Affidavit de Donata Gryczon, par. 10.
[46] Le site web pièce P-9 était en ligne depuis 2012.
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