Décision

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LSJPA — 157

2015 QCCA 283

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

MONTRÉAL

N° :

500-08-000469-140

(525-03-054097-126)

 

DATE :

 LE 26 FÉVRIER 2015

 

 

CORAM :

LES HONORABLES

FRANÇOIS PELLETIER, J.C.A.

FRANÇOIS DOYON, J.C.A.

MARIE ST-PIERRE, J.C.A.

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

APPELANTE - Poursuivante

c.

 

X

INTIMÉ - Accusé

 

 

ARRÊT RECTIFICATIF

 

 

[1]           Une erreur s’est glissée dans le texte de l’arrêt rendu le 13 février 2015. Il y a lieu en conséquence de rectifier cet arrêt en y ajoutant les deux paragraphes qui suivent :

[21] PRONONCE une ordonnance de probation d’une durée de 18 mois à compter de la fin de l’ordonnance de placement et de surveillance dont l’application est différée, conformément au paragraphe 42(2)k) de la Loi, aux conditions prescrites par le juge de première instance;

[22] Les ordonnances de prélèvement aux fins d’analyse génétique et d’interdiction de possession d’armes rendues par le juge de première instance demeurent en vigueur.

 

 

 

 

 

FRANÇOIS PELLETIER, J.C.A.

 

 

 

 

 

FRANÇOIS DOYON, J.C.A.

 

 

 

 

 

MARIE ST-PIERRE, J.C.A.

 

Me Marie-Ève Dubeau

Procureure du directeur des poursuites criminelles et pénales

Pour l’appelante

 

Me Richard Brunet

Pour l’intimé

 


LSJPA — 157

2015 QCCA 283

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

MONTRÉAL

N° :

500-08-000469-140

(525-03-054097-126)

 

DATE :

 LE 13 FÉVRIER 2015

 

 

CORAM :

LES HONORABLES

FRANÇOIS PELLETIER, J.C.A.

FRANÇOIS DOYON, J.C.A.

MARIE ST-PIERRE, J.C.A.

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

APPELANTE - Poursuivante

c.

 

X

INTIMÉ - Accusé

 

 

ARRÊT

 

 

[1]           L’appelante veut être autorisée à se pourvoir contre un jugement sur la peine prononcé le 3 octobre 2014 par la Cour du Québec, chambre de la jeunesse, district A (l’honorable Denis Asselin) qui, à la suite d’agressions sexuelles et d’attouchements de nature sexuelle comportant plusieurs actes de sodomie, infractions commises sur une période de deux ans, inflige à l’intimé une probation assortie d’une ordonnance de travail bénévole de 75 heures.

[2]           L’intimé était âgé entre 13 et 15 ans durant la période des infractions alors que la victime en avait entre 5 et 7. L’intimé admet que les pénétrations anales étaient très douloureuses.

[3]           En interprétant le paragr. 39(1)a) de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (la « Loi »), qui requiert la perpétration d’une infraction avec violence avant de pouvoir ordonner le placement sous garde, le juge de première instance exige une preuve « directe » de préjudice, sans quoi il estime que la violence n’est pas démontrée. Il se fonde alors notamment sur l’arrêt R. c. McDonnell, [1997] 1 R.C.S. 948. Comme il n’y aurait pas, selon lui, une telle preuve directe en raison de l’absence de témoignages ou de preuve matérielle à cet effet, il se dit dans l’impossibilité d’ordonner le placement sous garde.

[4]           Les parties ont demandé la tenue d’une conférence de facilitation pénale et l’intimé concède qu’il y a lieu d’accueillir l’appel. Ce dernier admettait d’ailleurs, en première instance, qu’il y avait infraction avec violence. De plus, les parties acceptent de procéder sur la foi du dossier et de leurs exposés, sans audition, comme le permet l’article 84 des Règles de la Cour en matière criminelle.

[5]           Il faut noter que la modification récente à l’article 2 de la Loi en ce qui a trait à la définition d’infraction avec violence n’était pas en vigueur, de sorte qu’il faut s’en rapporter aux règles applicables avant cette modification.

[6]           Selon l’arrêt R. c. C.D. et R. c. C.D.K., [2005] 3 R.C.S. 668, paragr. 70, 85 et 87, l’infraction avec violence est celle au cours de laquelle l’adolescent « cause des lésions corporelles ou tente ou menace d'en causer ». Il faut préciser que l’expression « lésions corporelles » ne se limite pas aux blessures physiques et inclut, selon les mots du juge de première instance, le « préjudice psychologique ».

[7]           En effet, l’article 2 C.cr. précise d’ailleurs que « lésions corporelles » s’entend d’une « blessure qui nuit à la santé ou au bien-être d’une personne et qui n’est pas de nature passagère ou sans importance », sans préciser que ce doive nécessairement être une blessure physique. Il est acquis qu’une blessure psychologique fait partie de cette définition : R. c. McCraw, [1991] 3 R.C.S. 72, page 81 (ou paragr. 22 et 23) et R. c. C.D. et R. c. C.D.K., précité, paragr. 66.

[8]           Or, en raison des circonstances de l’affaire, on peut tirer l’inférence que les actes de l’intimé ont nécessairement causé à la victime un traumatisme psychologique dont les séquelles se manifesteront à plus ou moins long terme. C’est ce que rappelait cette Cour dans R. c. Hamelin, 1991 J.E. 1285, une affaire où l’accusé avait commis des agressions sexuelles sur un enfant :

Le dossier ne nous apprend rien sur le traumatisme que ces actes ont pu causer chez la victime.  Je pense cependant qu'on doit prendre pour acquis que la victime, vu le jeune âge auquel elle a été soumise aux gestes de l'appelant et la durée de ceux-ci, a sûrement subi un traumatisme psychologique et que, même si les séquelles sont difficiles à prévoir, elle restera marquée par cette douloureuse épreuve.

[9]           Même si cet arrêt ne porte pas sur le paragr. 39(1)a) de la Loi, il demeure que la Cour y reconnaît que l’on peut parfois, selon les circonstances, et par inférence, conclure à l’existence d’un traumatisme psychologique, qui constitue des lésions corporelles, lorsqu’il y a eu agressions sexuelles. (Voir également R. c. D.W., 2006 SKQB 460, paragr. 19)

[10]        Par ailleurs, les gestes posés par l’intimé constituent des actes de violence. La sodomie pratiquée à répétition pendant deux ans sur un enfant de moins de 8 ans est, à n’en pas douter, une infraction qui, intrinsèquement, comporte un élément de violence. Comme le mentionne la Cour suprême, la violence est inhérente à l’agression sexuelle : R. c. McCraw, précité, pages 83 et 84 ou paragr. 28 à 31. C’est le cas ici, même si le paragr. 39(1)a) de la Loi constitue une disposition spécifique qui n’était pas en cause dans R. c. McCraw.

[11]        Si, dans R. c. McDonnell, précité, la Cour suprême rappelle, dans un autre contexte, que la poursuite doit prouver l'existence d'un préjudice psychologique, cela ne signifie pas qu’il doit le faire par preuve « directe ».

[12]        Vu les circonstances de ce dossier, une preuve directe ou extrinsèque n’était pas nécessaire pour conclure à l’infraction avec violence et, en tenant compte de toute la preuve, dont la nature de l’agression sexuelle, l’âge de la victime, la durée des infractions et la douleur ressentie par la victime, c’était la seule conclusion à tirer.

[13]        Cela étant, il faut décider si une ordonnance de placement sous garde doit être prononcée.

[14]        En première instance, l’intimé, qui reconnaissait le caractère violent des infractions, suggérait lui-même une peine de placement et de surveillance d’une période de six mois dont l’application serait différée (paragr. 42(2)p) de la Loi). Les deux parties réitèrent cette suggestion devant nous.

[15]        Vu les circonstances de la perpétration des infractions, la situation de l’intimé et l’ensemble de la preuve, de même que les conclusions du rapport sexologique et du rapport prédécisionnel, qui recommandait une peine six mois de placement et de surveillance, cette suggestion est raisonnable.

[16]        POUR CES MOTIFS, la Cour :

[17]        ACCUEILLE la requête pour permission d’appeler;

[18]        ACCUEILLE l’appel;

[19]        INFIRME le jugement de première instance;

[20]        ASSUJETTIT l’intimé à une ordonnance de placement et de surveillance d’une durée de six mois, dont l’application est différée, aux conditions obligatoires décrites au paragr. 105(2) de la Loi et, conformément au paragr. 105(3) de la Loi, aux conditions qui suivent :

1) fréquenter l'école ou un établissement d'enseignement ou de formation, sauf sur autorisation médicale écrite, y faire les travaux à la satisfaction des autorités et respecter les règlements de l'institution;

2) ne pas communiquer directement ou indirectement avec la victime Y et ne pas se trouver en sa présence;

 3) ne pas se trouver en présence d’une personne âgée de moins de quatorze ans (14) ans sans la présence immédiate d'un adulte responsable;

4) participer aux activités cliniques en lien avec la délinquance sexuelle, que ce soit dans le cadre du suivi avec son éducateur, avec l'aide du programme Sentiers et/ou d'ateliers donnés par le Centre d'intervention en délinquance sexuelle;

5) participer aux activités cliniques proposées par le délégué à la jeunesse aux dates, heures et endroits désignés par ce dernier;

6) se présenter au délégué à la jeunesse aux dates, heures et endroits fixés par ce dernier et se soumettre à sa surveillance.

 

 

 

 

FRANÇOIS PELLETIER, J.C.A.

 

 

 

 

 

FRANÇOIS DOYON, J.C.A.

 

 

 

 

 

MARIE ST-PIERRE, J.C.A.

 

Me Marie-Ève Dubeau

Procureure du directeur des poursuites criminelles et pénales

Pour l’appelante

 

Me Richard Brunet

Pour l’intimé

 

 

 

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