Décision

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Gabarit EDJ

 

 

 

 
CONSEIL DE DISCIPLINE

ORDRE DES CHIROPRATICIENS DU QUÉBEC

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

08-15-00357

 

DATE :

22 novembre 2016

______________________________________________________________________

 

LE CONSEIL :

Me LYDIA MILAZZO

Présidente

MME MARIE-PERLE HÉNAULT

Membre

MME MARIE-HÉLÈNE NICOLAS

Membre

______________________________________________________________________

 

CHANTAL PINARD, en sa qualité de syndique de l’Ordre des chiropraticiens du Québec

Partie plaignante

c.

SHAWN VERREAULT, D.C.

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

S’AUTORISANT DES DISPOSITIONS DU DEUXIÈME ALINÉA DE L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE CONSEIL DE DISCIPLINE A PRONONCÉ UNE ORDONNANCE DE NON-PUBLICATION, DE NON-DIFFUSION ET DE NON-DIVULGATION DU NOM DU PATIENT MENTIONNÉ DANS LA PLAINTE ET DANS LES DOCUMENTS DÉPOSÉS EN PREUVE AINSI QUE DE TOUT RENSEIGNEMENT PERMETTANT DE L’IDENTIFIER.

INTRODUCTION

[1]           Le Conseil s’est réuni le 21 juin 2016 pour disposer d’une plainte déposée par la plaignante en sa qualité de syndique de l’Ordre des chiropraticiens du Québec contre l’intimé, M. Shawn Verreault.

LA PLAINTE ET LA DÉCLARATION DE CULPABILITÉ

[2]           La plainte datée du 10 décembre 2015 est ainsi libellée :

1.    Le ou vers le 23 octobre 2013 l’intimé, alors régulièrement inscrit au tableau de l’Ordre des chiropraticiens du Québec, à son cabinet de Joliette, a omis d’effectuer tous les examens qui étaient requis à l’endroit de son patient M. […], compte tenu des signes et symptômes de celui-ci;

Commettant par une infraction aux articles 22 et 31 du Code de déontologie des chiropraticiens (L.R.Q., C. c-16, r. 5.1) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions (L.R.Q., C. c-26).

2.    Le ou vers le 23 octobre 2013 l’intimé, alors régulièrement inscrit au tableau de l’Ordre des chiropraticiens du Québec, à son cabinet de Joliette, a posé un acte dérogatoire à la dignité de la profession de chiropraticien en donnant instruction à son assistante, Mme Mireille Martin, d’effectuer une partie des examens cliniques et radiologiques de son patient M. […], alors que celle-ci n’était pas membre de l’Ordre et n’était donc pas autorisée à exercer ces activités professionnelles;

Commettant par une infraction au paragraphe 3 de l’article 84 du Code de déontologie des chiropraticiens (L.R.Q., C. c-16, r. 5.1) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions (L.R.Q., C. c-26).

Commettant par une infraction une infraction à l’article 59.2 du Code des professions (L.R.Q. C. c-26) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 dudit Code des professions.

3.    Le ou vers le 23 octobre 2013 l’intimé, alors régulièrement inscrit au tableau de l’Ordre des chiropraticiens du Québec, à son cabinet de Joliette, a remis à son patient M. […], un document contenant de fausses représentations sur l’efficacité des soins chiropratiques en lien avec les dangers de la subluxation vertébrale;

Commettant par une infraction à l’article 41 du Code de déontologie des chiropraticiens (L.R.Q. C. c-16, r. 5.1) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions (L.R.Q., C. c-26).

4.    Le ou vers le 8 décembre 2014 l’intimé, alors régulièrement inscrit au tableau de l’Ordre des chiropraticiens du Québec, à son cabinet de Joliette, a omis d’effectuer tous les examens qui étaient requis à l’endroit de sa patiente Mme M... S... alias M... V..., compte tenu des signes et symptômes de celle-ci;

Commettant par une infraction aux articles 22 et 31 du Code de déontologie des chiropraticiens (L.R.Q. C. c- 16, r. 5.1) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions (L.R.Q., C. c-16).

5.    Le ou vers le 8 décembre 2014 l’intimé, alors régulièrement inscrit au tableau de l’Ordre des chiropraticiens du Québec, à son cabinet de Joliette, a posé un acte dérogatoire à la dignité de la profession de chiropraticien en donnant instruction à son assistante, Mme Mireille Martin, d’effectuer une partie des examens cliniques et radiologiques de sa patiente Mme M... S... alias M... V..., alors que celle-ci n’était pas membre de l’Ordre et n’était donc pas autorisée à exercer ces activités professionnelles;

Commettant par une infraction au paragraphe 3 de l’article 84 du Code de déontologie des chiropraticiens (L.R.Q., C. c-16, r. 5.1) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions (L.R.Q., C. c-26).

6.    Le ou vers le 8 décembre 2014 l’intimé, alors régulièrement inscrit au tableau de l’Ordre des chiropraticiens du Québec, à son cabinet de Joliette, a omis de donner à sa patiente Mme M... S... alias M... V..., des informations suffisantes sur les traitements qu’il envisageait lui donner;

Commettant par une infraction à l’article 43 du Code de déontologie des chiropraticiens  (L.R.Q., C. c-16, r. 5.1) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions (L.R.Q., C. c-26).

7.    Le ou vers le 8 décembre 2014 l’intimé, alors régulièrement inscrit au tableau de l’Ordre des chiropraticiens du Québec, à son cabinet de Joliette, a posé un acte dérogatoire à la dignité de la profession de chiropraticien en mettant à la disposition de ses patients, dans la salle d’attente de son cabinet, des dépliants d’informations portant sur des sujets qui ne relèvent pas de la compétence légalement reconnue aux chiropraticiens, telles des recettes à l’argile grise, des recettes naturelles pour la guérison de problèmes de santé et des recettes pour guérir naturellement les maux d’oreille;

Commettant par une infraction à l’article 59.2 du Code des professions (L.R.Q. C. c-26) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 dudit Code des professions.

8.    Le ou vers le 8 décembre 2014 l’intimé, alors régulièrement inscrit au tableau de l’Ordre des chiropraticiens du Québec, à son cabinet de Joliette, a remis à sa patiente Mme M... S... alias M... V..., un document contenant de fausses représentations sur l’efficacité des soins chiropratiques en lien avec les dangers de la subluxation vertébrale;

Commettant par une infraction à l’article 41 du Code de déontologie des chiropraticiens (L.R.Q. c-16, r. 5.1) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions (L.R.Q., C. c-26).

Commettant par une infraction à l’article 59.2 du Code des professions (L.R.Q. C. c-26) et se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 dudit Code des professions (L.R.Q., C. c-26).

[3]           L’intimé enregistre un plaidoyer de culpabilité sur tous les chefs de la plainte telle que libellée.

[4]           Le Conseil de discipline, séance tenante et unanimement, déclare l’intimé coupable des infractions reprochées à la plainte, et ce, de manière plus amplement décrite au dispositif de la présente décision.

LES SANCTIONS PROPOSÉES PAR LES PARTIES

[5]           Les parties suggèrent au Conseil d’imposer à l’intimé les sanctions suivantes :

Chef 1 : une amende de 1 000 $;

Chef 2 : une amende de 1 000 $;

Chef 3 : une amende de 1 000 $;

Chef 4 : une réprimande;

Chef 5 : une réprimande;

Chef 6 : une réprimande;

Chef 7 : une amende de 1 000 $;

Chef 8 : une réprimande.

Le paiement de l’ensemble des déboursés.

[6]           L’intimé demande un délai de 6 mois pour acquitter les amendes et déboursés, ce à quoi la plaignante ne s’objecte pas.

QUESTION EN LITIGE

Les sanctions conjointes proposées par les parties sont-elles raisonnables dans les circonstances propres à ce dossier?

CONTEXTE

[7]           L’intimé est membre de l’Ordre des chiropraticiens du Québec (l’Ordre) depuis 1999.

[8]           Il exerce sa profession au sein de la Clinique Chiropratique Verreault (la Clinique).

[9]           La plaignante fait plusieurs reproches à l’intimé en lien avec une visite d’un patient ayant eu lieu le ou vers le 23 octobre 2013 :

a)    avoir omis d’effectuer les examens neurologiques et orthopédiques requis selon les symptômes du patient, ce dernier se plaignant d’une douleur au cou (chef 1);

b)    avoir permis que certains examens cliniques, soit l’EMG et le scan de la colonne vertébrale, les amplitudes de mouvements et les examens radiologiques, soient effectués par son assistante, laquelle n’est pas membre de l’Ordre (chef 2);

c)    avoir remis à ce patient un document sur le danger de la subluxation vertébrale, lequel contient des fausses représentations sur l’efficacité des soins chiropratiques à cet égard; entre autres, ce document indique que les subluxations peuvent être corrigées afin de « renverser les effets du vieillissement », ainsi qu’une liste des autres avantages des soins de correction, tels la prévention de blessures et maladies et la gestion efficace du stress (chef 3).

[10]        À la demande de la plaignante, une enquêtrice consulte l’intimé sous le nom fictif de Mme S… V…, pour une douleur à l’omoplate gauche.

[11]         Cette visite a lieu le ou vers le 8 décembre 2013 et permet de valider les informations détenues par la plaignante concernant le patient visé aux chefs 1, 2 et 3, donnant lieu ainsi aux chefs 4, 5, et 8.

[12]        De plus, lors de cette visite l’enquêtrice constate que l’intimé lui fait signer un formulaire de consentement en même temps que le questionnaire sur les motifs de la consultation, sans lui fournir auparavant toutes les informations pertinentes au niveau des traitements qu’il entendait dispenser et des symptômes visés par ces traitements. Ce dernier n’a pas, non plus, validé auprès de l’enquêtrice si celle-ci avait des questions à poser (chef 6).

[13]        Il fut aussi noté que l’intimé mettait à la disposition de ses patients des dépliants d’information portant sur la guérison des otites, les recettes naturelles pour divers problèmes de santé, incluant des problèmes de foie, de rein, de cholestérol et de ménopause, soit des sujets ne relevant pas de la compétence d’un chiropraticien. Il fournit aussi les instructions (avec photos) pour la préparation d’une recette à l’argile grise (chef 7).

[14]        La plaignante reconnaît que l’intimé a bien collaboré à l’enquête.

[15]        Il n’a aucun antécédent disciplinaire.

[16]        Selon la plaignante, l’intimé a bien compris la nature des infractions qu’elle lui reproche et démontre une bonne volonté de s’amender.

[17]        Elle considère qu’il y a absence de risque de récidive.

[18]        L’intimé confirme son accord avec la preuve présentée par la plaignante.

ANALYSE

[19]        La sanction en droit disciplinaire ne vise pas à punir le professionnel[1], son but est avant tout de protéger le public, de dissuader le professionnel de récidiver et de servir d’exemple aux autres membres de la profession, considérant en dernier lieu, le droit par le professionnel visé d'exercer sa profession [2].

[20]    La jurisprudence a cependant apporté une précision à l’effet que c’est un privilège, et non un droit, pour le professionnel d’exercer sa profession et que ce privilège comporte des obligations corrélatives, notamment celle de respecter les exigences de son Ordre[3].

[21]        Ceci étant dit, chaque cas est un cas d’espèce.  Le Conseil impose la sanction seulement après avoir pris en considération tous les facteurs, objectifs et subjectifs, propres au dossier[4] :

« [39]   Le Comité de discipline impose la sanction après avoir pris en compte tous les facteurs, objectifs et subjectifs, propres au dossier.   Parmi les facteurs objectifs, il faut voir si le public est affecté par les gestes posés par le professionnel, si l'infraction retenue contre le professionnel a un lien avec l'exercice de la profession, si le geste posé constitue un acte isolé ou un geste répétitif, …  Parmi les facteurs subjectifs, il faut tenir compte de l'expérience, du passé disciplinaire et de l'âge du professionnel, de même que sa volonté de corriger son comportement.   La délicate tâche du Comité de discipline consiste donc à décider d'une sanction qui tienne compte à la fois des principes applicables en matière de droit disciplinaire et de toutes les circonstances, aggravantes et atténuantes, de l'affaire.  »

[Nos soulignements]

[22]        La suggestion conjointe dispose d’une «force persuasive certaine» de nature à assurer qu’elle sera respectée en échange du plaidoyer de culpabilité[5].

[23]        Lorsque les parties présentent une recommandation conjointe sur sanction, le Conseil de discipline n’est pas lié par cette suggestion, mais ne peut l’écarter à moins qu’elle soit déraisonnable, contraire à l’intérêt public, inadéquate ou de nature à déconsidérer la justice, dans la mesure où elle s’inscrit dans le spectre des sanctions imposées en semblable matière[6].

Chefs 1 et 4 : omission d’effectuer certains examens

[24]        Par son plaidoyer de culpabilité, l’intimé reconnait avoir contrevenu à l’article 31 du Code de déontologie des chiropraticiens[7] (Code de déontologie) lequel se lit comme suit :

« 31. Avant de procéder à un traitement chiropratique, le chiropraticien doit effectuer des examens de son patient, lesquels doivent comporter entre autres, les éléments suivants:

1°   l’histoire appropriée du cas;

2°   les examens cliniques et radiologiques requis par l’état du patient;

3°   une recherche suffisante de toute pathologie et anomalie sous-jacente par les moyens diagnostiques indiqués et conformes aux normes de la science chiropratique;

4°   une indication non équivoque d’une thérapie chiropratique appropriée. »

[25]        Les examens manquants à l’égard des patients visés à ces chefs étaient requis, selon les normes scientifiques applicables, dans le cadre d’un examen de base, compte tenu de leurs symptômes, et ce, avant d’effectuer un traitement chiropratique à leur égard.

[26]        Ces examens permettent d’éliminer une pathologie sous-jacente et de valider un diagnostic.

[27]        Le défaut d’effectuer certains de ces examens risque de compromettre la validité du diagnostic et le traitement qui s’ensuit, de sorte que la protection du public est à risque.

[28]        De manière objective, il s’agit de manquements déontologiques graves, intimement liés à l’exercice de la profession de chiropraticien.

[29]        Le fait que les examens requis n’ont pas été effectués à l’égard de l’enquêtrice lors d’une visite quelques semaines suivant celle visée au chef 1, démontre que l’infraction au chef 1 n’est pas un cas isolé.

[30]        La plaignante souligne qu’il ne s’agit pas d’un manque de connaissances de la part de l’intimé par rapport à ces examens.  Ce dernier ne croyait simplement pas que ces examens étaient nécessaires dans les circonstances.

[31]        Lorsqu’il y a absence d’effectuer certains examens, les Conseils ont généralement imposé des amendes de 1 000 $ pour une première infraction de ce type, tel qu’il appert des décisions Lapointe[8] et Cadieux[9].

[32]        La plaignante témoigne que l’intimé a bien compris la nécessité de faire tous et chacun de ces examens.

[33]        D’ailleurs, suite au dépôt de la plainte, l’intimé a modifié sa pratique. Il a recommencé à faire les examens neurologiques et orthopédiques requis selon les normes applicables.  Il a aussi consulté l’Association des Chiropraticiens du Québec afin d’améliorer sa pratique à cet égard.

[34]        Le Conseil considère que l’imposition d’une amende minimale de 1000 $, telle que proposée par les parties est raisonnable dans le cas du chef 1, eu égard à la volonté de l’intimé de s’amender et des mesures concrètes prises par ce dernier à cet égard.

[35]        En application du principe de la globalité des sanctions, le Conseil accepte d’imposer une réprimande pour le deuxième chef de cette nature[10].

Chefs 2 et 5 : délégation d’actes réservés au chiropraticien

[36]        L’intimé a permis que son assistante, laquelle n’est pas membre de l’Ordre, d’effectuer une partie des examens cliniques et radiologiques des patients visés à ces chefs, contrevenant ainsi à l’article 84 (3) du Code de déontologie, lequel se lit comme suit :

« 84 (3) En outre des actes mentionnés aux articles 57, 58, 59.1 et ceux qui peuvent être déterminés en application du deuxième alinéa de l’article 152 du Code des professions (chapitre C-26), les actes suivants posés par le chiropraticien sont dérogatoires à la dignité de la profession:

[…]

3°   inciter, par une autorisation, un conseil, un ordre ou un encouragement, une personne qui n’est pas membre de l’Ordre à exercer une activité professionnelle réservée à ses membres; »

[37]        Or, ces actes sont réservés aux chiropraticiens en vertu de la Loi sur la Chiropratique[11].

[38]        Bien que son assistante puisse bénéficier d’une formation à cet égard, l’intimé ne pouvait lui déléguer la responsabilité d’effectuer ces examens.

[39]        Il y a un risque d’erreur au niveau des mesures prises ou d’exposition excessive au cas où les radiographies seraient à refaire.

[40]        Les membres du public sont en droit de s’attendre que ces actes soient posés par un professionnel ayant la formation requise par l’Ordre à cet effet et étant assujetti à l’encadrement de ce même Ordre.

[41]        Ces infractions sont graves et touchent l’essence même de la profession.

[42]        Il ne s’agit pas d’un cas isolé, tel que démontré par le chef 5.

[43]        En revanche, la preuve est à l’effet que l’intimé a mis fin à cette pratique dès le dépôt de la plainte. Il s’engage dorénavant à assumer entièrement la responsabilité d’effectuer tous ces examens.

 

[44]        Dans l’affaire Laliberté[12], une partie des radiographies étaient effectuées par le personnel auxiliaire, mais l’intimé opérait l’appareil à radiographie. Le Conseil lui a imposé tout de même une amende de 1 000 $ pour chacune des trois infractions de cette nature.

[45]        Il en est de même dans l’affaire Pangakis[13].

[46]        Dans l’affaire Lagacé[14], l’intimé avait délégué la responsabilité complète d’exécution d’examens radiologiques à son personnel lequel n’avait ni le permis, ni la formation requise à cet égard. Le plaignant a pu constater des lacunes graves dans la qualité de nombreuses radiographies effectuées à la clinique de l’intimé. Soulignant la gravité objective de l’infraction, le Conseil a tout de même pris en considération l’absence de risque de récidive et a imposé à l’intimé une amende 1 000 $ et une réprimande pour le premier chef de cette nature, ainsi qu’une amende de 2 000 $ et une réprimande pour le deuxième chef.

[47]        Dans le présent cas, une partie seulement des examens a été effectuée par l’assistante de l’intimé. Le Conseil considère que dans le contexte de la sanction globale et eu égard au faible risque de récidive, l’imposition d’une amende de 1 000 $ pour le chef 2 et une réprimande pour le chef 5, tel que proposé par les parties, n’est pas déraisonnable, contraire à l’intérêt public, inadéquate ou de nature à déconsidérer la justice.

Chefs 3, 7 et 8 : la documentation fournie aux patients

[48]        Les chefs 3 et 8 concernent le même document, dans lequel l’intimé donne aux patients des informations fausses sur l’efficacité des soins chiropratiques reliés à la correction de subluxations.

[49]        Par ces gestes, l’intimé a enfreint l’article 41 du Code de déontologie, lequel se lit comme suit :

« 41. Le chiropraticien doit éviter toute fausse représentation quant à son niveau de compétence ou quant à l’efficacité de ses services, de ceux généralement assurés par les membres de sa profession ou, le cas échéant, quant au niveau de compétence et à l’efficacité des services des personnes qui exercent leurs activités professionnelles au sein de la même société que lui. »

[50]        Or, il n’existe pas de données probantes permettant à l’intimé d’affirmer que les corrections qu’il propose au niveau des subluxations vertébrales puissent donner les résultats qu’il mentionne, tel le ralentissement des effets du vieillissement.

[51]         Au chef 7, il s’agit d’un dépliant d’informations visant la guérison de plusieurs maladies par des méthodes naturelles.

[52]        Or, l’article 31 de la Loi Médicale[15] réserve le diagnostic et traitement de maladies aux médecins.

[53]        Par ces gestes, l’intimé a contrevenu à l’article 59.2 du Code des professions.

[54]        Ces infractions sont graves et en lien avec l’exercice de la profession. Elles visent deux documents fournis ou mis à la disposition des patients de l’intimé.

[55]        En conséquence le public a reçu des informations incomplètes, voire inexactes.

[56]        En revanche, non seulement l’intimé a retiré les documents en question, mais ce dernier s’est engagé à porter dorénavant attention au contenu des documents qu’il met à la disposition des patients, et ce, tant au niveau des représentations faites quant à l’efficacité de ses services, qu’au niveau des limites de son champ de compétence.

[57]        En ce qui a trait aux chefs 3 et 8, la plaignante soumet l’affaire Laliberté[16], dans laquelle une amende minimale fût imposée pour ce type d’infraction.

[58]        Pour ce qui est du chef 7, dans les affaires Philippon[17] et Raymond[18], des infractions semblables ont donné lieu à l’imposition d’une amende de 1 000 $.

[59]        Le Conseil considère que les sanctions proposées par les parties, soit l’imposition d’une amende de 1 000 $ pour le chef 3 et d’une réprimande pour le chef 8, sont raisonnables dans les circonstances du présent dossier et dans le contexte de la sanction globale.

[60]        Il en est de même pour l’imposition d’une amende de 1 000 $ pour le chef 7.

 

Chef 6 : le consentement éclairé

[61]        En omettant de fournir préalablement des informations suffisantes sur les traitements qu’il envisageait donner à l’enquêtrice, l’intimé a contrevenu à l’article 43 du Code de déontologie, lequel se lit comme suit :

« 43. Préalablement à l’examen ou au traitement qu’il lui propose, le chiropraticien doit obtenir du patient un consentement écrit, libre et éclairé, après l’avoir informé de la nature du problème à traiter, de la procédure du traitement ainsi que de ses bienfaits potentiels et de ses risques.

Le chiropraticien doit en outre informer son patient qu’il peut en tout temps révoquer son consentement et que tout changement significatif au plan de traitement consenti requiert un consentement distinct. »

[62]        Le défaut de respecter cette obligation constitue une infraction grave laquelle se situe au cœur même de l’exercice de sa profession.

[63]        Les conséquences se situent au niveau du lien de confiance entre le chiropraticien et son patient.

[64]        La plainte fait état d’un seul cas au chef 5 et selon la plaignante, il s’agit d’un cas isolé d’inadvertance de la part de l’intimé.

[65]        Le Conseil considère que la sanction proposée par les parties pour ce chef, soit une réprimande, n’est pas déraisonnable dans les circonstances, et ce, eu égard au faible risque de récidive associé à l’intimé à cet égard.

[66]        Cette sanction est appuyée par la jurisprudence en semblable matière, dont notamment les affaires Cifola[19] et Makohoniuk[20].

[67]        A la lumière de ce qui précède, le Conseil estime que l’ensemble des sanctions suggérées par les parties, considérées dans leur globalité, ne sont pas déraisonnables, contraires à l’intérêt public, inadéquates ou de nature à déconsidérer la justice, celles-ci s’inscrivant dans le spectre des sanctions imposées en semblable matière.

[68]        Le Conseil est d’avis que les sanctions proposées permettent d’atteindre les objectifs de la sanction disciplinaire, soit la protection du public, la dissuasion de l’intimé de récidiver et l’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession.

[69]        Le Conseil de discipline autorise l’intimé à payer les amendes imposées dans un délai de 6 mois.

DÉCISION

EN CONSÉQUENCE, LE CONSEIL, UNANIMEMENT LE 21 JUIN 2016 :

A DÉCLARÉ l’intimé coupable sous le chef 1 à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 31 du Code de déontologie des chiropraticiens;

A PRONONCÉ sous le chef 1, la suspension conditionnelle des procédures à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 22 du Code de déontologie des chiropraticiens;

A DÉCLARÉ l’intimé coupable sous le chef 2 à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 84 (3) du Code de déontologie des chiropraticiens;

A DÉCLARÉ l’intimé coupable sous le chef 3 à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 41 du Code de déontologie des chiropraticiens;

A DÉCLARÉ l’intimé coupable sous le chef 4 à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 31 du Code de déontologie des chiropraticiens;

A PRONONCÉ sous le chef 4, la suspension conditionnelle des procédures à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 22 du Code de déontologie des chiropraticiens;

A DÉCLARÉ l’intimé coupable sous le chef 5 à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 84 (3) du Code de déontologie des chiropraticiens;

A DÉCLARÉ l’intimé coupable sous le chef 6 à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 43 du Code de déontologie des chiropraticiens;

A DÉCLARÉ l’intimé coupable sous le chef 7 à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 59.2 du Code des professions;

A DÉCLARÉ l’intimé coupable sous le chef 6 à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 41 du Code de déontologie des chiropraticiens;

A PRONONCÉ sous le chef 8, la suspension conditionnelle des procédures à l’égard de l’infraction fondée sur l’article 59.2 du Code des professions;

ET CE JOUR :

IMPOSE à l’intimé sous le chef 1, une amende de 1 000 $;

IMPOSE à l’intimé sous le chef 2, une amende de 1 000 $;

IMPOSE à l’intimé sous le chef 3, une amende de 1 000 $;

IMPOSE à l’intimé sous le chef 4, une réprimande;

IMPOSE à l’intimé sous le chef 5, une réprimande;

IMPOSE à l’intimé sous le chef 6, une réprimande;

IMPOSE à l’intimé sous le chef 7, une amende de 1 000 $;

IMPOSE à l’intimé sous le chef 8, une réprimande.

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés en vertu de l‘article 151 du Code des professions.

ACCORDE à l’intimé un délai de 6 mois pour s’acquitter du paiement des amendes et déboursés.

 

 

__________________________________

Me LYDIA MILAZZO, présidente

 

 

 

__________________________________

MME MARIE-HÉLÈNE NICOLAS, membre

 

 

 

__________________________________

MME MARIE-PERLE HÉNAULT, membre

 

 

Me Louise Taché-Piette

Avocate pour la partie plaignante

 

Shawn Verreault

Partie intimée

 

Date d’audience :

21 juin 2016

 



[1]     POIRIER, Sylvie, L’objectif de protection du public : quand la fin justifie les moyens - Variations sur un thème, Développements récents en déontologie, droit professionnel et disciplinaire, Service de la formation permanente du Barreau du Québec, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais inc., 2005, p. 154.

[2]     Pigeon c. Daigneault, 2003 CanLII 32934 (QC CA).

[3]     Dentistes (Ordre professionnel des) c. Dupont, QCTP 077; Infirmières et infirmiers (Ordre professionnel des) c. Quintin, 2011 CanLII 24121 (QC ODII)

[4]     Pigeon, supra note 2.

[5]     Dumont c. R, 2013 QCCA 576, Gagné c. R, 2011 QCCA 2387.

[6]     Gauthier c. Médecins (Ordre professionnel des), 2013 QC TP 82189 (CanLII); Chan c. Médecins (Ordre professionnel des), 2014 QCTP 5 (CanLII); Infirmières et infirmiers auxiliaires (Ordre professionnel des) c. Ungureanu, 2014 QCTP 20 (CanLII).

[7]     R.L.R.Q., c. C-16, r. 5.1.

[8]     Chiropraticiens (Ordre professionnel des) c. Lapointe, 2006, no 08-06-00228.

[9]     Chiropraticiens (Ordre professionnel des) c. Cadieux, 2009, no 08-08-00252.

[10]  Néron c. Médecins (Ordre professionnel des), 2015 QCTP 31 (CanLII); Bultz c. Dentistes (Ordre professionnel des), 2005 QCTP 17 (CanLII); Chiropraticiens (Ordre professionnel des) c. Jean, 2016 CanLII 19384 (QC OCQ).

[11]    R.L.R.Q., c. C-16, articles 6 et 7.

[12]    Chiropraticiens (Ordre professionnel des) c. Laliberté, AZ-50364554.

[13]    Chiropraticiens (Ordre des) c. Pangakis, No. 08-14-00330, 1er septembre 2016.

[14]    Chiropraticiens (Ordre professionnel des) c. Lagacé, No. 08-97-00182, 17 décembre 1997.

[15]    R.L.R.Q., c. M-15.

[16]    Chiropraticiens (Ordre des) c. Laliberté, AZ-50510690.

[17]    Chiropraticiens (Ordre professionnel des) c. Philippon, 2013 CanLII 69059 (QC OCQ).

[18]    Chiropraticiens (Ordre professionnel des) c. Raymond, CD 08-15-00353, 16 mars 2016.

[19]    Chiropraticiens (Ordre des) c. Cifola, 2015 CanLII 70555 (QC OCQ).

[20]    Chiropraticiens (Ordre professionnel des) c. Makohoniuk, 08-99-00190, 17 décembre 1999.

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