Décision

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Latouche c. Samsung Canada

2014 QCCQ 4267

 COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE QUÉBEC

« Chambre civile »

N° :

200-32-057808-122

 

DATE :

3 juin 2014

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L'HONORABLE  DOMINIQUE LANGIS, J.C.Q. (JL 4155)

______________________________________________________________________

 

CAROLE LATOUCHE, […], Sainte-Anne-de-Beaupré (Québec)  […]

 

 

Demanderesse

c.

 

SAMSUNG CANADA, 55, Standish Court, Mississauga (Ontario)  L5R 4B2

 

Défenderesse

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JUGEMENT

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Carole Latouche réclame 1 499,96$ à Samsung Canada (Samsung) au motif que son réfrigérateur ne fonctionne plus après six ans d'utilisation.

Samsung plaide que la réclamation est exagérée et que Mme Latouche a déjà refusé son offre de 568,40$.

Le 13 octobre 2005, Mme Latouche achète de Future Shop un réfrigérateur Samsung, deux portes, avec un distributeur d'eau et un autre de glace, au prix de 1 499,96$.

Au début de l'année 2011, elle constate que le congélateur ne congèle plus, le réfrigérateur ne refroidit plus, l'eau du distributeur gèle et le distributeur de glace ne fonctionne plus.

Le 11 janvier 2011, un premier réparateur se présente chez elle. Elle contacte Samsung par la suite qui lui suggère des réparateurs dans la région de Québec. Elle devra d'ailleurs faire appel à deux autres réparateurs au cours de l'année 2011 mais sans succès. Aucun d'eux n'est en mesure de faire la réparation correctement car ils ignorent les raisons pour lesquelles, de façon récurrente, l'appareil présente ces problèmes.

Le 28 décembre 2011, à la suite de ces visites, cinq au total qui s'échelonnent de janvier à novembre 2011, Mme Latouche transmet une mise en demeure à Samsung et requiert qu'elle fournisse à ses frais pièces et main-d'œuvre pour réparer son réfrigérateur.

En janvier 2012, elle accepte la proposition de Samsung qui se dit prête à assumer le coût des pièces si elle acquitte le coût de la main-d'œuvre.

Samsung lui envoie un technicien du Centre de pièces et services Expert inc. (Centre Expert).

Après cinq visites chez Mme Latouche, le réfrigérateur n'est toujours pas réparé et elle assume déjà 218,40$ pour le coût de la main-d'œuvre.

La facture de Centre Expert indique :

«L'appareil a plusieurs problemes.  L'element de drain du frigo et de degivrage du congelateur sont defectueux.  Le board lit mal les infos.  Le frame est fondu et ondulé à plusieurs places. Le frame n'est pas remplacable. Lumiere eclaire pas bien j'ai changé toutes les pieces possibles qui a rapport au probleme et ca ne fonctionne pas. Le liner du congelateur et du frigo est craqué. Je n'ai jamais vu un frigo avec au temps de problèmes. Ca fait près de 2 ans que la dame a des problèmes. Je suis le 5 e».

[Texte repris intégralement]

De guerre lasse, Mme Latouche achète un nouveau réfrigérateur. Elle déclare avoir subi de nombreux inconvénients. Notamment :

-     elle a perdu de la nourriture à plusieurs reprises;

-     elle a dû s'absenter du travail pour recevoir les réparateurs;

-     les défectuosités du réfrigérateur ont provoqué un dégât d'eau sur le plancher, ce qui a abîmé les armoires neuves de la cuisine;

-     elle a assumé 218,40 $ pour le coût de la main-d'œuvre.

Le 6 septembre 2012, Mme Latouche refuse l'offre de 350,00$ que lui fait Samsung en contrepartie du réfrigérateur défectueux.

Le 25 septembre 2012, elle refuse l'offre de lui rembourser en plus le coût de la main-d'œuvre qu'elle a supporté.

ANALYSE ET DÉCISION

Mme Latouche réclame 1 499,96 $, ce qui correspond au prix d'achat du réfrigérateur en octobre 2005.

La preuve révèle qu'elle ne réclame pas, en tant que tel, le prix du réfrigérateur mais des dommages à la suite de la défectuosité du réfrigérateur et des inconvénients qu'elle a subis.

En fait, Mme Latouche réclame pour la perte de jouissance de l'appareil, pour la perte de nourriture, la perte de journées de travail, pour le bris d'armoires et pour les frais encourus.

Elle fonde son recours sur la garantie légale de durabilité prévue à la Loi sur la protection du consommateur[1] (LPC) :

37.  Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à l'usage auquel il est normalement destiné.

38.  Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation du bien.

[…]

53. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d'exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l'objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire.

Il en est ainsi pour le défaut d'indications nécessaires à la protection de l'utilisateur contre un risque ou un danger dont il ne pouvait lui-même se rendre compte.

Ni le commerçant, ni le fabricant ne peuvent alléguer le fait qu'ils ignoraient ce vice ou ce défaut.

Le recours contre le fabricant peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien.

 

Il faut déterminer si le bien vendu faisant l'objet du contrat a servi à un usage normal pendant une durée raisonnable eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation de ce bien.

À l'évidence, ces défectuosités ne peuvent être reliées à une utilisation abusive du réfrigérateur.

Le Tribunal conclut que les problèmes subis par Mme Latouche entre janvier 2011 et mai 2012 ne sont pas normaux. Ils sont tellement peu normaux que Samsung l'a reconnu en lui proposant un dédommagement, même si la garantie conventionnelle est terminée.

Mme Latouche est donc bien fondée d'exercer son recours contre Samsung pour absence de durabilité du bien vendu et surtout pour dommages résultant des inconvénients qui ont duré pendant de très nombreux mois.

L'article 272 LPC permet d'accorder ces dommages-intérêts. Mme Latouche a prouvé sa réclamation et le Tribunal lui accorde le montant de 1 499,96$.

           POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

      ACCUEILLE la réclamation de la demanderesse;

      CONDAMNE la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de  1 499,96$, avec en plus l'intérêt au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 25 septembre 2012, date de la demeure, ainsi que les frais judiciaires fixés à 103 $.

 

 

 

DOMINIQUE LANGIS, J.C.Q.

 

 

Date d’audience :

27 janvier 2014

 



[1]    LRLQ, c. P-40, art. 37, 38 et 53.

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