Bisson c. P.E. Boisvert Auto ltée |
2021 QCCQ 1501 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
LONGUEUIL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
505-32-037546-190 |
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DATE : |
25 janvier 2021 |
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MARC BISSON ET DENISE DESCOEURS |
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Demandeurs |
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c. |
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P.E. BOISVERT AUTO LTÉE |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Denise Descoeurs et Marc Bisson réclament des dommages de 9 057,50 $[1] découlant de la responsabilité de P.E. Boisvert auto ltée (Boisvert Auto) à la suite d’un bris mécanique d’une automobile vendue quelques années auparavant.
[2] Boisvert Auto conteste, alléguant que la garantie du manufacturier est échue au moment du bris mécanique et, en raison de l’absence de mise en demeure préalable aux travaux correctifs.
a) Boisvert Auto peut-elle être tenue responsable du bris mécanique du véhicule?
b) Le cas échéant, quels sont les dommages subis?
[3] Le 30 mai 2015, Marc Bisson achète de Boisvert Auto un véhicule de marque Ford Fusion de l’année 2015[2]. Il acquiert également, à cette occasion, un programme d’entretien programmé Ford (PEP)[3]. Ce programme comporte le paiement forfaitaire à l’avance des entretiens recommandés par le fabricant.
[4] Le 28 novembre 2018 en matinée, le véhicule alors conduit par la conjointe de Marc Bisson, Denise Descoeurs, montre des signes de mauvais fonctionnement au niveau de la direction. Le voyant lumineux «anomalie service requis» s’affiche au tableau de bord. Elle se trouve en Outaouais en visite chez sa fille.
[5] Elle communique alors avec Boisvert Auto[4] qui la réfère au service d’assistance routière Ford et lui envoie un remorqueur dont l’intervention s’avère inutile puisque le problème semble alors s’être résorbé.
[6] Toutefois, le même problème se manifeste vers 12h30 et le volant ne tourne plus. Denise Descoeurs contacte à nouveau l’assistance routière et est également mise en communication avec le concessionnaire Ford de la région, Dupont & Dupont, qui lui recommande de faire remorquer le véhicule à son établissement.
[7] Le véhicule est remorqué vers 16h45 et elle doit attendre pour connaître le diagnostic.
[8] Elle est informée, le lendemain, que la crémaillère est à changer. Le véhicule compte alors plus de 75 000 km au compteur et la garantie de base 3 ans/60 000 km est échue.
[9] Après avoir conféré avec son conjoint qui est à ce moment à l’extérieur du pays, il est convenu de contacter Boisvert Auto pour vérifier s’il bénéficie d’un programme pouvant couvrir cette réparation.
[10] Après avoir laissé un premier message chez Boisvert Auto, Denise Descoeurs peut s’entretenir avec Danielle Viau qui l’informe que le programme de garantie étendue ne s’applique pas.
[11] Denise Descoeurs lui demande alors si le véhicule peut être remorqué chez Boisvert Auto puisque ce concessionnaire en a toujours fait l’entretien et les réparations requises. Danielle Viau n’est pas en mesure de lui répondre et doit valider avec son supérieur hiérarchique. Elle rappelle dans les minutes suivantes pour lui annoncer que cela n’est pas possible notamment parce que les coûts de remorquage de Gatineau jusqu’à Boucherville seraient trop dispendieux.[5]
[12] Le concessionnaire Ford Dupont & Dupont remplace la crémaillère le jour même pour la somme de 2 557,50 $[6]. La crémaillère originale défectueuse est disposée dans le coffre de la voiture pour examen ultérieur, le cas échéant.
[13] Le 6 janvier 2019, Marc Bisson met Boisvert Auto en demeure de lui rembourser le coût des réparations ainsi qu’une somme de 1 000 $ pour les troubles et inconvénients sur la base du fait que cette crémaillère n’a pas eu un fonctionnement normal considérant la durée de vie utile évaluée à 300 000 km[7]. Il offre également l’opportunité d’examiner la crémaillère.
[14] Le 9 janvier 2019, Marc André Bleau, directeur général chez Boisvert Auto lui répond en ces termes :
(…) vous faites état que le véhicule aurait, selon vos prétentions, un problème de conception et de fabrication du véhicule notamment quant à la crémaillère. En ce sens, nous vous invitons fortement à transmettre votre mise en demeure à Ford du Canada limité qui sont les seuls responsables de l’application ou non de la garantie du constructeur de même que la fabrication et conception de votre véhicule.
Nous constatons également que vous avez déjà procédé aux travaux chez une autre concessionnaire Ford, et ce, sans nous mettre en demeure au préalable, nous laissant ainsi devant le fait accompli, ce qui est en soi une fin de non-recevoir à votre réclamation envers notre concession. Qui plus est, il s’agit du concessionnaire qui a effectué les réparations qui a erré en omettant de soumettre votre réclamation au constructeur pour une éventuelle participation de ce dernier dans la réparation, ce que nous convenons d’appeler un goodwill, alors que le véhicule est hors garantie. Nous ne pouvons pas être tenus responsables de l’inaction de ce concessionnaire.
Contenu de vos allégations, nous comprenons que vous verrez à poursuivre vos démarches directement auprès du constructeur Ford du Canada limité, à qui vous avez d’ailleurs écrit, ou contre Dupont et Dupont Ford.
En ce qui nous concerne, soyez avisé que toute autre démarche ou procédure judiciaire entreprises contre nous dans ce dossier seront vivement et énergiquement contestées[8].
(orthographe non rectifiée)
[15] Le 14 mai 2019, Marc Brisson et Denise Descoeurs déposent leur demande introductive d’instance contre Boisvert Auto devant la Division des petites créances de la Cour du Québec en réclamation d’une somme de 7 057,50 $, dont notamment 3 000 $ en dommages punitifs.
[16] Le 25 juillet 2019, la greffière spéciale de la Cour du Québec rend jugement par défaut contre Boisvert Auto pour la somme de 6 057,50 $ plus les frais de justice.
[17] Le 29 août 2019, Boisvert Auto demande la rétractation du jugement alléguant notamment qu’en raison d’une erreur de classement d’une employée, la demande n’a jamais été acheminée à ses dirigeants.
[18] Le 27 septembre 2019, Madame la juge Monique Dupuis J.C.Q. rend jugement, qui pour l’essentiel conclut que les motifs allégués au soutien de la demande en rétractation apparaissent suffisants et :
Ordonne au greffier de convoquer les parties afin qu’il soit procédé à une audience portant sur le pourvoi en rétractation et sur le fond du litige;
Ordonne à la partie défenderesse de produire une contestation dans un délai de 20 jours de la date de la présente décision. À défaut de produire la contestation dans ce délai, le pourvoi en rétractation pourra être rejeté.
[19] Le 5 décembre 2019, Monsieur le juge Claude Laporte J.C.Q. rejette le pourvoi en rétractation considérant que «le dossier, tel que constitué en date de ce jour, ne contient aucune contestation alors que la défenderesse avait 20 jours pour la produire, et ce, à compter du 26 septembre 2019».
[20] Boisvert Auto demande la révision judiciaire du jugement du 5 décembre 2019 devant la Cour supérieure. Dans son jugement du 7 mai 2020[9], le juge Steve J. Reimnitz J.C.S. accueille le pourvoi en contrôle judiciaire, annule le jugement rendu par la Cour du Québec le 5 décembre 2019 et renvoie le dossier devant la Division des petites créances afin d’être fixé pour instruction et jugement.
[21] L’instruction procède donc finalement au mérite devant le soussigné le 16 novembre 2020.
[22] À cette occasion, Marc Bisson demande la modification de la réclamation afin de porter les dommages punitifs de 3 000 $ à 5 000 $ sur la base principalement d’une contestation acharnée et excessive de la part de Boisvert Auto.
[23] Selon François Boisvert, vice-président de Boisvert Auto, la demande introductive d’instance été mal classée par l’employée l’ayant reçue à l’origine, de sorte qu’elle ne fut jamais portée à son attention alors que l’entreprise avait l’intention de la contester.
[24] Cette preuve n’est pas contredite. Il s’agit d’un motif suffisant justifiant la rétractation du jugement par défaut rendu par la greffière spéciale de cette cour le 25 juillet 2019.
a) Boisvert Auto peut-elle être tenue responsable du bris mécanique du véhicule?
[25] Le contrat[10] entre un consommateur et un commerçant pour la vente d’un véhicule est un contrat de consommation assujetti à la Loi sur la protection du consommateur[11] (la LPC).
[26] Cette réclamation doit être étudiée en fonction des dispositions suivantes du Code civil du Québec et de la Loi sur la protection du consommateur relativement à la garantie de qualité.
Code civil du Québec
[1726] Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus.
Il n’est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.
[1727] Lorsque le bien périt en raison d’un vice caché qui existait lors de la vente, la perte échoit au vendeur, lequel est tenu à la restitution du prix; si la perte résulte d’une force majeure ou est due à la faute de l’acheteur, ce dernier doit déduire, du montant de sa réclamation, la valeur du bien, dans l’état où il se trouvait lors de la perte.
[1728] Si le vendeur connaissait le vice caché ou ne pouvait l’ignorer, il est tenu, outre la restitution du prix, de réparer le préjudice subi par l’acheteur.
[1729] En cas de vente par un vendeur professionnel, l’existence d’un vice au moment de la vente est présumée, lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa détérioration survient prématurément par rapport à des biens identiques ou de même espèce; cette présomption est repoussée si le défaut est dû à une mauvaise utilisation du bien par l’acheteur.
[1730] Sont également tenus à la garantie du vendeur, le fabricant, toute personne qui fait la distribution du bien sous son nom ou comme étant son bien et tout fournisseur du bien, notamment le grossiste et l’importateur.
[1731] La vente faite sous contrôle de justice ne donne lieu à aucune obligation de garantie de qualité du bien vendu.
[1732] Les parties peuvent, dans leur contrat, ajouter aux obligations de la garantie légale, en diminuer les effets, ou l’exclure entièrement, mais le vendeur ne peut, en aucun cas, se dégager de ses faits personnels.
[1733] Le vendeur ne peut exclure ni limiter sa responsabilité s’il n’a pas révélé les vices qu’il connaissait ou ne pouvait ignorer et qui affectent le droit de propriété ou la qualité du bien.
Cette règle reçoit exception lorsque l’acheteur achète à ses risques et périls d’un vendeur non professionnel.
Loi sur la protection du consommateur (LPC)
[34] La présente section s’applique au contrat de vente ou de louage de biens et au contrat de service.
[35] Une garantie prévue par la présente loi n’a pas pour effet d’empêcher le commerçant ou le fabricant d’offrir une garantie plus avantageuse pour le consommateur.
[36] Dans le cas d’un bien qui fait l’objet d’un contrat, le commerçant qui transfère la propriété du bien à un consommateur doit libérer ce bien de tout droit appartenant à un tiers, ou déclarer ce droit lors de la vente. Il est tenu de purger le bien de toute sûreté, même déclarée, à moins que le consommateur n’ait assumé la dette ainsi garantie.
[37] Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné.
[38] Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.
[53] Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d’exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l’objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire.
Il en est ainsi pour le défaut d’indications nécessaires à la protection de l’utilisateur contre un risque ou un danger dont il ne pouvait lui-même se rendre compte.
Ni le commerçant, ni le fabricant ne peuvent alléguer le fait qu’ils ignoraient ce vice ou ce défaut.
Le recours contre le fabricant peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien.
[54] Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d’exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur une obligation résultant de l’article 37, 38 ou 39.
Un recours contre le fabricant fondé sur une obligation résultant de l’article 37 ou 38 peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien.
[261] On ne peut déroger à la présente loi par une convention particulière.
[262] À moins qu’il n’en soit prévu autrement dans la présente loi, le consommateur ne peut renoncer à un droit que lui confère la présente loi.
[272] Si le commerçant ou le fabricant manque à une obligation que lui impose la présente loi, un règlement ou un engagement volontaire souscrit en vertu de l’article 314 ou dont l’application a été étendue par un décret pris en vertu de l’article 315.1, le consommateur, sous réserve des autres recours prévus par la présente loi, peut demander, selon le cas:
a) l’exécution de l’obligation;
b) l’autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;
c) la réduction de son obligation;
d) la résiliation du contrat;
e) la résolution du contrat; ou
f) la nullité du contrat,
sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs.
[27]
Ces dispositions allègent le fardeau du consommateur qui n’est pas tenu
de faire une preuve directe d’un vice caché, mais que le bien n’a pas servi
pendant une durée raisonnable considérant les critères énumérés à l’article
[28]
Dans un arrêt récent de la Cour d’appel du Québec[12], on y explique que pour les
contrats de consommation, les articles
[29] Pour bénéficier de la présomption de responsabilité découlant de ses articles, le consommateur doit donc satisfaire les deux conditions suivantes :
1) Qu’il a acquis le bien d’un commerçant;
2) Que le bien n’a pas servi à l’usage auquel il est normalement destiné ou n’a pas servi à un usage normal pendant une durée raisonnable eu égard au prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.[13]
[30] Évidemment, le premier élément de la condition s’applique puisque Boisvert Auto est un commerçant assujetti à la LPC.
[31] Quant à la deuxième condition, Marc Bisson tente d’établir le bris prématuré de la crémaillère par le dépôt de littérature colligée sur le Web soutenant sa position quant à une durée de vie utile d’environ 300 000 km[14]. Ce type de littérature d’auteurs inconnus et dont le Tribunal ignore les compétences ne peut, dans les circonstances, être considérée comme un ouvrage de référence et sa valeur probante est des plus limitée.
[32] Toutefois, lors de son témoignage, François Boisvert convient que la réparation effectuée par Dupont & Dupont est conforme. Il ajoute que la crémaillère, même s’il s’agit d’un modèle électronique, aurait dû avoir une durée de vie utile d’au moins 150 000 km.
[33] Ce type de problématique ne survient à sa connaissance que dans un ratio de 5/500. Il reconnaît également que le véhicule n’a pas fait l’objet d’un usage excessif et qu’il a bénéficié du programme d’entretien préventif dont s’était muni Marc Bisson.
[34] François Boisvert qui a toujours œuvré dans le domaine automobile livre, sur cette question, un témoignage crédible, sincère et transparent.
[35] Pour le Tribunal, la deuxième condition est satisfaite; le bris de la crémaillère est survenu de façon prématurée et ne respecte pas la garantie de durabilité énoncée à l’article 38 LPC[15].
[36] Boisvert Auto a tort d’invoquer que l’absence de mise en demeure équivaut à une fin de non-recevoir. À ce sujet, le témoignage de Denise Descoeurs est crédible, probant et corroboré par l’historique des appels cellulaires du 29 novembre 2018[16].
[37] Elle s’est enquise de la possibilité de faire exécuter les réparations chez Boisvert Auto qui a décliné cette opportunité.
[38]
L’article
b) Quels sont les dommages subis?
1. Les réparations
[39] La réclamation pour le remboursement des réparations au montant de 2 557,50 $ est bien fondée.
[40] François Boisvert ne conteste pas que cette réparation fut nécessaire mais plutôt que Boisvert Auto aurait pu l’effectuer à moindre coût. Boisvert auto ayant décliné l’offre d’exécuter les réparations en temps opportun est forclose de plaider un tel moyen.
[41] Que Boisvert Auto puisse bénéficier d’un programme Goodwil avec le fabricant est hypothétique dans les circonstances et n’a pas fait la preuve que le fabricant aurait accepté ni du coût final de la réparation.
2. Les troubles et inconvénients
[42] Denise Descoeurs réclame 1 000 $ pour troubles et inconvénients. Il n’y a pas de lien contractuel entre elle et Boisvert Auto.
[43] Il n’y a pas de faute extracontractuelle de Boisvert Auto prouvée à l’encontre de Denise Descoeurs.
[44]
Par ailleurs, l’octroi de dommages-intérêts découlant de l’article
[45] Marc Bisson réclame 500 $ pour des troubles et inconvénients. Même s’il est à l’extérieur du pays au moment du bris mécanique, il demeure en communication avec Denise Descoeurs pour gérer l’épisode.
[46] Il doit également consacrer un certain temps à la rédaction de la mise en demeure et les recherches afin de connaître la durée de vie utile d’une crémaillère.
[47] Enfin, il reçoit la réponse écrite du 9 janvier 2019 dans laquelle Boisvert Auto se déresponsabilise complètement de la situation allant même jusqu’à blâmer Dupont & Dupont.
[48] Il s’agit de tracas et inconvénients qui découlent du défaut de Boisvert Auto d’honorer la garantie de durabilité envers Marc Bisson, un consommateur. Le Tribunal évalue les dommages qu’il subit à 300 $.
3. Les dommages punitifs.
[49]
La Cour suprême dans Richard c. Time inc.[17]
établit la méthode pour analyser les demandes de dommages-intérêts punitifs
fondées sur l’article
[180] Dans le cas d’une demande de dommages-intérêts
punitifs fondée sur l’art.
· Les dommages-intérêts punitifs prévus
par l’art.
· Compte tenu de cet objectif et des objectifs de la L.p.c., les violations intentionnelles, malveillantes ou vexatoires, ainsi que la conduite marquée d’ignorance, d’insouciance ou de négligence sérieuse de la part des commerçants ou fabricants à l’égard de leurs obligations et des droits du consommateur sous le régime de la L.p.c. peuvent entraîner l’octroi de dommages-intérêts punitifs. Le tribunal doit toutefois étudier l’ensemble du comportement du commerçant lors de la violation et après celle-ci avant d’accorder des dommages-intérêts punitifs.
[50] L’attribution de dommages punitifs à la suite d’une violation de la LPC n’est pas automatique. Rappelons également que la Cour suprême dans cette affaire a réduit les dommages punitifs attribués de 100 000 $ à 15 000 $.
[51] En l’occurrence, Marc Bisson fonde la demande en dommages punitifs pour sanctionner le comportement du commerçant dans sa réponse à la demande d’indemnisation suivant la garantie de durabilité d’une part, et pour sa contestation abusive et excessive d’autre part.
[52] C’est dans ce contexte qu’il modifie la demande de dommages punitifs de sa réclamation initiale au montant de 3 000 $ à une demande lors de l’instruction à 5 000 $.
[53] Pour Marc Bisson, la demande de rétractation de jugement et le pourvoi en révision judiciaire constituent un comportement abusif qui doit être sanctionné. Le Tribunal n’est pas d’accord.
[54] Tout d’abord, cet argument a été plaidé et rejeté par la Cour supérieure à l’occasion du pourvoi en contrôle judiciaire. Le juge Reimnitz conclut qu’ «il n’y a aucun abus à exiger que le droit fondamental d’être entendu soit respecté»[18].
[55] La Cour du Québec, Division des petites créances, ne peut revenir sur cette conclusion alors que Boisvert Auto a eu gain de cause dans sa quête d’exiger le droit d’être entendue.
[56] Il en va autrement de sa conduite en rapport avec la garantie de durabilité.
[57] La lettre du 9 janvier 2019 écrite par le directeur général de Boisvert Auto démontre une déresponsabilisation complète du commerçant face à ses obligations.
[58] André Bleau y allègue erronément l’absence de mise en demeure alors que Boisvert auto s’est vu offrir de façon préalable l’opportunité d’effectuer les réparations.
[59]
Boisvert Auto pointe par la suite vers une responsabilité potentielle du
fabricant et même de l’autre concessionnaire Dupont et Dupont alors que l’article
[60] Ce type de comportement occulte complètement la garantie de durabilité en prenant l’excuse facile que la garantie de base du manufacturier est échue.
[61] L’annonce d’une contestation vive et énergique vise à décourager le consommateur de l’exercice de ses droits.
[62] Par ailleurs, l’attitude de François Boisvert lors de l’instruction était beaucoup moins intransigeante que celle de son directeur général. Le Tribunal considère favorablement son admission quant à la durée de vie utile de la crémaillère, laquelle a un impact déterminant sur le sort du litige.
[63] Toutefois, François Boisvert, qui a œuvré toute sa vie professionnelle dans le domaine automobile ignore que le commerçant demeure assujetti à la garantie de durabilité en première ligne au même titre que le manufacturier.
[64] Il s’agit des catégories d’agissements tels que définis par la Cour suprême qui peuvent être sanctionnées par l’attribution de dommages punitifs.
[65]
Quant aux critères de l’article
[66] Le Tribunal considère également que les dommages réels subis par Marc Bisson sont entièrement compensés par la présente décision.
[67] Enfin, quant à la situation patrimoniale, Boisvert Auto admet être en mesure d’honorer une condamnation pour dommages punitifs de la mesure de celle requise par Marc Bisson.
[68] Le Tribunal est d’avis qu’une condamnation en dommages punitifs de 2 000 $ respecte les critères d’attribution et représente un montant suffisant pour assurer leur fonction préventive.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[69] RÉTRACTE le jugement rendu le 25 juillet 2019 par la greffière spéciale Me Renée Giroux;
[70] ACCUEILLE en partie la demande de Marc Bisson;
[71]
CONDAMNE P.E. Boisvert Auto Ltée à payer à Marc Bisson 4 875,50 $
avec intérêt au taux légal et l’indemnité additionnelle de l’article
[72] CONDAMNE P.E. Boisvert Auto Ltée au paiement des frais judiciaires limités à la somme de 190 $ représentant les droits de greffe quant au dépôt de la demande;
[73] REJETTE sans frais la demande de Denise Descoeurs.
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__________________________________ PATRICK CHOQUETTE, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
16 novembre 2020 |
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[1] Modifié lors de l’instruction par la hausse des dommages punitifs de 3 000 $ à 5 000 $.
[2] Contrat P-1.
[3] D-3.
[4] 8h07 au relevé cellulaire P-4.
[5] Relevé cellulaire P-4 lignes 41 et 42.
[6] Facture P-2.
[7] P-2.
[8] P-3.
[9] 505-17-011808-203.
[10] P-1.
[11] RLRQ, c. P-40.1.
[12] CNH
Industrial Canada Limited c. Promutuel Verchères, société mutuelle
d’assurances générales,
[13] Renaud
c. Auto Jean Yan,
[14] P-5.
[15] Fournier
c. Toyota Canada,
[16] P-4.
[17] 2012 1 RCS 265.
[18] Parag. 73 à 76.
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