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JL 3124 |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
TERREBONNE |
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N° : |
700-06-000001-000 |
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DATE : |
30 NOVEMBRE 2004 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
HÉLÈNE LANGLOIS, J.C.S. |
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COALITION POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT DU PARC LINÉAIRE « PETIT TRAIN DU NORD », |
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Demanderesse |
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-et- |
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GÉRARD ÉMOND, |
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ALINE THIBAULT-ÉMOND, |
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Personnes désignées |
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c. |
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LA MUNICIPALITÉ RÉGIONALE DE COMTÉ DES LAURENTIDES, |
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CLUB DE MOTONEIGES DIABLE ET ROUGE INC., CLUB DE MOTO-NEIGE DE LABELLE INC., |
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SOCIÉTÉ D'ASSURANCE TIG, |
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LE GROUPE COMMERCE COMPAGNIE D'ASSURANCES, |
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COMPAGNIE D'ASSURANCE LOMBARD, |
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Défenderesses |
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-et- |
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LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC, Représentant le Gouvernement du Québec, |
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Défendeur-Mis en cause |
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JUGEMENT |
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TABLE DES MATIÈRES |
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LE RECOURS................................................................................................................... |
3 |
QUESTIONS EN LITIGE.................................................................................................. |
4 |
LE CONTEXTE HISTORIQUE ET LÉGISLATIF............................................................a) L'historique du Parc Linéaire............................................................................. b) Les dispositions législatives pertinentes........................................................ |
55 9 |
L'AVIS EN VERTU DE L'ARTICLE 95 C.P.C.................................................................. |
11 |
LA JUSTICIABILITÉ DU RECOURS............................................................................... |
13 |
LA DÉFENSE D'AUTORITÉ LÉGISLATIVE.................................................................... |
13 |
LA NUISANCE...................................................................................................................a) Le droit.................................................................................................................. b) La preuve.............................................................................................................. ·La situation géographique et démographique............................................... ·Les témoins......................................................................................................... ·Les décomptes.................................................................................................... ·Les experts.......................................................................................................... Ø Agnès Renoux, Robert A. Bertrand, Phat Nguyen, Chantal Laroche et Jean-Luc Allard.................................................... Ø Les mesures........................................................................................... Ø La comparaison des résultats aux normes par les experts............. c) Discussion............................................................................................................. |
22 22 24 24 25 32 33
33 36 46 54 |
LA RESPONSABILITÉ DE LA MRCL ET DES CLUBS DE MOTONEIGES................ |
62 |
LES DOMMAGES............................................................................................................. |
66 |
LA COUVERTURE D'ASSURANCE................................................................................ |
69 |
L'EXÉCUTION PROVISOIRE NONOBSTANT APPEL ET LA RÉSERVE DE DROIT |
77 |
LES CONCLUSIONS........................................................................................................ |
78 |
[1] La circulation de motoneiges sur la section du Parc linéaire le Petit Train du Nord entre les bornes kilométriques 68.5 et 106.5, soit de St-Faustin-Lac-Carré à Labelle (la piste), et ce, entre le 1er décembre d'une année et le 14 avril de l'année suivante, est à l'origine du présent litige.
[2] La Coalition pour la protection de l'environnement du parc linéaire « Petit Train du Nord » (la Coalition) a plusieurs objets qui visent l'intérêt de ses Membres, entre autres de promouvoir la protection de l'environnement du Parc Linéaire « Le Petit Train du Nord », qui s'étend de la ville de St-Jérôme à la ville de Mont-Laurier (Parc Linéaire) et de ses environs.
[3] En janvier 2002, elle obtient l'autorisation d'intenter un recours collectif, pour le compte d'un groupe correspondant à[1] « toutes les personnes physiques résidant ou ayant résidé après le 7 novembre 1997, à titre de propriétaire ou de locataire, à moins de deux cents (200) mètres de chaque côté [du Parc Linéaire] entre la borne kilométrique 68.5 située à St-Faustin-Lac-Carré et la borne kilométrique 106.5 située à Labelle ».
[4] La description du groupe est ensuite amendée pour la suivante[2] :
Toutes les personnes physiques résidant ou ayant résidé après le 7 novembre 1997, à titre de propriétaire ou locataire, à moins de deux cents (200) mètres de chaque côté d'une bande de terrain connue comme étant le parc linéaire Le Petit Train du Nord, entre la borne kilométrique 68.5 située à St-Faustin-Lac-Carré et la borne kilométrique 106.5 située à Labelle, étant suffisant qu'une partie quelconque de l'habitation d'un résidant soit située à moins de deux cent (200) mètres en ligne droite du bord le plus rapproché de l'emprise du parc linéaire et étant compris que toutes les personnes physiques résidant ou ayant résidé de façon régulière avec le propriétaire ou locataire sont membres du groupe.
·
[5] Gérard Émond et Aline Thibault-Émond obtiennent le statut de personnes désignées.
·
[6] La Coalition intente un recours en dommages auquel se greffe une demande d'injonction permanente (l'action).
[7] Elle poursuit la Municipalité régionale de comté des Laurentides (MRCL) et les Club de motoneiges diable et rouge Inc. et Club de moto-neige de Labelle Inc. (Clubs de motoneige), respectivement à titre de locataire du Parc Linéaire et sous-locataires de la piste.
[8] Elle poursuit également, selon la période concernée, la Société d'assurance Tig (Tig), le Groupe commerce compagnie d'assurances (Groupe Commerce) et la Compagnie d'assurance Lombard (Lombard), à titre d'assureurs, soit de la MRCL, soit des Clubs de motoneige.
[9] Finalement, la Coalition poursuit le Procureur général du Québec (Procureur général) puisque le Gouvernement du Québec (Gouvernement), en vertu des décrets nos 750-2002, 1430-2002 et 1333-2003 émis les 19 juin 2002, 4 décembre 2002 et le 10 décembre 2003 (les décrets), assume jusqu'au 1er mai 2004 la responsabilité incombant à la MRCL en vertu du bail visant la location du Parc Linéaire, à la suite du refus des assureurs de maintenir ou de contracter pour l'avenir l'assurance-responsabilité civile.
·
[10] La Coalition réclame, à compter du 7 novembre 1997, à titre de dommages payables aux personnes désignées et à chaque membre du groupe, la somme de 5 000 $ pour chaque année que dure la nuisance reliée à la circulation de motoneiges sur la piste, plus l'intérêt et l'indemnité additionnelle.
[11] La Coalition réclame également le paiement de cette somme de Tig, Groupe Commerce et Lombard jusqu'à la saison hivernale 2001-2002 inclusivement et du Procureur général, pour les saisons hivernales 2002-2003 et 2003-2004.
[12] Finalement, la Coalition demande, à l'encontre de la MRCL, des Clubs de motoneige, de leurs administrateurs, dirigeants, représentants, employés et mandataires, que soit émise une ordonnance de cesser de porter atteinte, par l'accès aux motoneiges sur la piste, à la qualité de l'environnement de même qu'à la santé, la sécurité, au bien-être et au confort de ses Membres.
[13] Le présent litige soulève les questions suivantes :
· La Coalition, devait-elle préalablement transmettre un avis au Procureur général, conformément à l'article 95 C.p.c.?
· Le recours intenté est-il de la nature d'un recours justiciable?
· La défense d'autorité législative s'applique-t-elle dans les circonstances?
Dans la négative :
· la circulation de motoneiges sur la piste, cause-t-elle une nuisance au sens de l'article 976 C.c.Q.?
· Également, les conséquences d'une telle circulation entraînent-elles une contravention aux dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement[3] (LQE) et portent-elles atteinte à la santé, la sécurité, au bien-être et au confort des Membres en contravention avec la Charte des droits et libertés de la personne[4] (la Charte)?
· L'indemnisation collective est-elle possible?
· La MRCL et les Clubs de motoneige, pour la période où les contrats d'assurance sont en vigueur, bénéficient-ils, en rapport avec les faits en litige d'une couverture d'assurance?
·
[14] Au départ, les défenderesses allèguent également chose jugée et font référence au jugement rendu dans la cause L'Association des résidents du Lac Mercier Inc. c. L'honorable Pierre Paradis[5]. Cet argument n'a cependant pas été plaidé devant le Tribunal.
·
[15] L'obligation assumée par le Gouvernement, en vertu des décrets, n'est pas remise en question par le Procureur général.
a) L'historique du Parc Linéaire
[16] Pour fins de compréhension et en raison de la défense d'autorité législative, une revue de l'historique du Parc Linéaire s'impose.
·
[17] Le chemin de fer entre St-Jérôme et Mont-Laurier est construit au début du 19e siècle; l'emprise ferroviaire (l'emprise) appartient au Canadien Pacifique (CP).
[18] Après un grand essor, il subit, durant les années 1970, un déclin : la fréquence des convois hebdomadaires de marchandises diminue et le service de transport de passagers est abandonné.
[19] Durant les années 1980, le CP cesse complètement le transport de marchandises et obtient, éventuellement, l'autorisation d'abandonner les voies ferrées.
[20] Les rails sont démantelés[6] durant les années 1990.
·
[21] Le Gouvernement, dès la fin des années 1970, montre un intérêt à acquérir éventuellement l'emprise, tout comme d'autres emprises ferroviaires abandonnées, afin qu'elles soient utilisées à des fins publiques.
[22] La MRCL, le 12 janvier 1989, adopte une résolution se prononçant en faveur de l'abandon du service ferroviaire St-Jérôme/Mont-Laurier et de l'aménagement d'un parc linéaire sur l'emprise[7].
[23] En novembre 1989, l'Association touristique des Laurentides mandate la firme Sotar Inc. (Sotar) afin de procéder à une étude de faisabilité.
[24] En juin 1990, Sotar soumet un plan directeur de développement et d'aménagement d'un parc linéaire sur l'emprise, soulignant qu'un tel parc linéaire est susceptible à la fois de constituer un produit récréo-touristique d'importance et un outil de conservation d'un corridor de transport.
[25] Sotar écrit que, l'hiver, le ski de fond est de loin l'activité de randonnée ayant le plus haut taux de pénétration du marché; par ailleurs, la motoneige connaît un regain de popularité[8].
[26] Sotar MENTIONNE également que « si les craintes qu'entretiennent les riverains et certaines municipalités sur les impacts de la motoneige sur la qualité de l'air, sur le climat sonore, sur la qualité de vie des riverains, etc. pouvaient être dissipées par des moyens appropriés à la satisfaction générale, le parc linéaire pourrait constituer une piste de motoneige de Saint-Jérôme à Mont-Laurier »[9].
[27] Elle émet l'avis que le tronçon sud de l'emprise soit réservé l'hiver au ski de fond et, au nord, à la pratique de la motoneige.
[28] Le 14 mars 1991, la MRCL adopte une résolution dans laquelle il est résolu de reconnaître ce principe du plan directeur et d'appuyer toute démarche d'acquisition de l'emprise par le Gouvernement.
[29] En février 1991, le Comité interministériel sur les emprises ferroviaires abandonnées (Comité Interministériel) est formé. Ce comité est composé de représentants de huit ministères. Son mandat consiste « à analyser le dossier des emprises ferroviaires abandonnées et à dégager des orientations d'action gouvernementale […] »[10].
[30] Le Comité Interministériel, après huit audiences publiques et réception de 84 mémoires, soumet son rapport final en février 1993. Il y est écrit que le Gouvernement est la seule entité apte à négocier l'achat des emprises ferroviaires abandonnées au Québec, mais qu'il apparaît souhaitable, dans l'intérêt du public, que la détermination de la vocation de ces corridors et la responsabilité de leur aménagement et gestion reviennent aux tables de concertation municipale afin que les emprises soient réaffectées à des fins publiques[11].
[31] Le 15 janvier 1992, le Conseil des ministres autorise le ministère des Transports du Québec (ministère des Transports) à négocier avec le CP.
[32] Le 14 juillet 1993, le Conseil des ministres décide que le Gouvernement se portera acquéreur de l'emprise, en vue de sa conversion à des fins publiques et, en juin 1994, le Gouvernement l'acquiert.
[33] Le 1er mai 1993, entre en vigueur le chapitre 3 des lois de 1993, modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et autres dispositions législatives ayant pour effet d'insérer au Code municipal du Québec les articles 688 et suivants, qui autorisent toute municipalité régionale de comté à déterminer par règlement l'emplacement d'un parc régional sur des terrains dont elle n'est pas propriétaire et à en régler l'usage, qu'elle en soit propriétaire ou non.
[34] Le 8 juillet 1993, la MRCL adopte le règlement 102-93 en vertu duquel, le Parc Linéaire est créé sur l'emprise incluse sur son territoire. Celle-ci traverse les municipalités de Ivry-sur-le-Lac, La Conception, Labelle, Lac-Carré, Lac-Supérieur, Mont-Tremblant, St-Faustin, St-Jovite (paroisse), St-Jovite (ville), Ste-Agathe-des-Monts, Ste-Agathe-Nord, Ste-Agathe-Sud, Val-David et Val-Morin.
[35] Le 5 juillet 1994, intervient un bail entre la MRCL et le ministre des Transports, le ministre de l'Environnement et de la Faune et le ministre des Affaires municipales, agissant pour le Gouvernement, visant la location du Parc Linéaire, pour la période débutant le 16 juin 1994 jusqu'au 15 juin 2054[12].
[36] Le 9 septembre 1994, la MRCL amende son schéma d'aménagement; elle y reconnaît l'affectation récréo-touristique du Parc Linéaire et y autorise la pratique d'activités récréatives quatre saisons destinées principalement à la randonnée, à la bicyclette, au ski de fond ainsi qu'à la motoneige.
[37] Dès 1994, la pratique de la motoneige sur le Parc Linéaire est l'objet de controverses. En octobre 1993, l'Association des résidents du Lac Mercier dépose une requête pour jugement déclaratoire[13] soulevant un débat juridique sur la pratique de la motoneige sur la piste longeant le Lac Mercier.
[38] Dans ce contexte, le 15 novembre 1995, l'article 53 du Règlement sur la motoneige[14] est amendé de façon à permettre, à titre d'exception, la circulation de motoneiges sur une ancienne emprise ferroviaire à moins de 30 m d'une habitation.
[39] En décembre 1996, l'article 12 de la Loi sur les véhicules hors route[15] est également amendé en ce sens.
[40] Le 30 janvier 1997, la MRCL adopte le règlement portant le no 133-97 ayant pour objet de réglementer la circulation, la propreté, la sécurité, la paix et l'ordre sur le Parc linéaire. Ce règlement prévoit[16] :
ARTICLE 8 CIRCULATION AUTORISÉE ENTRE LE 15 AVRIL ET LE 30 NOVEMBRE
Entre le 15 avril et le 30 novembre d'une même année, le Parc régional linéaire est exclusivement réservé à la circulation des piétons, des bicyclettes et des véhicules de promenade électrique à trois ou quatre roues aménagés pour le transport de personnes handicapées.
ARTICLE 9 CIRCULATION AUTORISÉE ENTRE LE 1er DÉCEMBRE ET LE 14 AVRIL
Entre le 1er décembre d'une année et le 14 avril de l'année suivante, le Parc régional linéaire est exclusivement réservé à la circulation des motoneiges à l'exception de la partie située entre les bornes kilométriques 35.93 (Val-Morin) et 44.2 (Val-David) qui est réservée pour le ski de fond.
[41] Ensuite, elle confie à la Corporation du Parc Linéaire du Petit Train du Nord Inc. le mandat de gérer et d'encadrer les activités de ski de fond jusqu'à Ste-Agathe et aux Clubs de motoneige la gestion et l'encadrement des activités de motoneige au nord de Ste-Atathe.
[42] Depuis décembre 1997 intervient, pour la période s'étendant du 1er décembre d'une année au 14 avril de l'année suivante, entre la MRCL et les Clubs de motoneige un bail visant la piste.
[43] Le bail avec le Club de motoneiges diable et rouge Inc. vise la portion de la piste s'étendant du km 69.6 au km 96.3 et celui avec le Club de moto-neige de Labelle vise celle située entre le km 96.3 et le km 111.2.
8. [ Sur les terres du domaine de l'État, la circulation des véhicules hors route est permise, sous réserve des conditions, restrictions et interdictions imposées :
[…]
2° par règlement du gouvernement, par règlement municipal ou par règlement d'une municipalité régionale de comté édicté en vertu de l'article 688.2 du Code municipal du Québec ( chapitre C-27.1), ailleurs que sur un sentier visé par l'article 15 ou dans les lieux assujettis aux conditions, restrictions ou interdictions visées par le paragraphe 1°.
[
] De plus, sur les lieux où un bail, un droit d'occupation ou autre droit semblable a été accordé en vertu de l'une des lois précitées, elle est subordonnée à l'autorisation du titulaire de ce droit, si cette autorisation n'est pas déjà prévue par ces lois précitées.[…]
10. [ ] Sur les sentiers d'un club d'utilisateurs de véhicules hors route visés par l'article 15, la circulation des véhicules hors route est permise. Toutefois, le club peut, au moyen d'une signalisation conforme aux normes réglementaires et installée à ses frais, soit l'interdire, soit la restreindre à certains types de véhicules, à certaines catégories de personnes ou à certaines périodes de temps, sauf sur les tronçons situés sur les voies visées au premier alinéa de l'article 9 ou sur les autres chemins ou routes non régis par le Code de la sécurité routière ( chapitre C-24.2).
11. [ ] Sur un chemin public au sens du Code de la sécurité routière ( chapitre C-24.2), la circulation des véhicules hors route est interdite.
[…]
12. [ ] La circulation des véhicules hors route à une distance inférieure à celle fixée par règlement municipal ou, à défaut, à moins de 30 mètres d'une habitation, d'une installation exploitée par un établissement de santé ou d'une aire réservée à la pratique d'activités culturelles, éducatives, récréatives ou sportives est interdite, sauf :
[…]
4° sur un sentier établi dans une emprise ferroviaire désaffectée et indiqué à un schéma d'aménagement et de développement ou à un schéma métropolitain d'aménagement et de développement;
5° dans tout autre endroit déterminé par règlement du gouvernement.
[…]
15. [ ] L'aménagement et l'exploitation d'un sentier par un club d'utilisateurs de véhicules hors route sont subordonnés :
1° sur une terre du domaine privé, à l'autorisation expresse du propriétaire;
2° sur une terre du domaine de l'État, conformément à la loi, à l'autorisation expresse du ministre ou de l'organisme ayant autorité sur cette terre ou à qui la gestion ou l'administration de celle-ci a été confiée.
[…]
27. La vitesse maximale d'une motoneige est de 70 km/h et celle de tout autre véhicule hors route est de 50 km/h.
Cependant, sur un sentier visé par l'article 15, aux endroits où une signalisation conforme aux normes réglementaires l'indique, elle peut être respectivement de 90 km/h et de 70 km/h ou inférieure à celle fixée au premier alinéa.
Elle peut aussi être inférieure à celle fixée au premier alinéa aux endroits suivants, là où une signalisation conforme aux normes réglementaires l'indique :
1° sur un chemin ou une route privé ouvert à la circulation publique des véhicules routiers;
2° sur une terre du domaine de l'État ailleurs que dans les lieux assujettis aux conditions, restrictions ou interdictions visées par le paragraphe 1° de l'article 8;
3° sur un terrain municipal visé au paragraphe 2° de l'article 48.
Le présent article ne s'applique pas sur un chemin public.
Règlement sur la motoneige
27. La puissance sonore émise par une motoneige construite après le 1er janvier 1972 ne doit pas être supérieure à 82 décibels.
[…]
53. Nul ne peut circuler en motoneige à moins de 30 mètres d'une habitation, sauf sur le terrain de sa résidence pour la quitter ou y revenir, ou de la ligne périphérique d'une aire réservée à la pratique du ski alpin, de la glissade ou du patinage sur tout terrain aménagé à cette fin, sauf si le propriétaire de l'habitation ou de l'aire lui a donné préalablement l'autorisation expresse de circuler à une distance plus rapprochée de cette aire ou habitation.
L'autorisation prévue au premier alinéa n'est pas exigée pour circuler en motoneige, à moins de 30 mètres d'une habitation, dans un sentier établi dans une emprise ferroviaire désaffectée et indiqué au schéma d'aménagement d'une municipalité régionale de comté ou d'une communauté urbaine.
L'AVIS EN VERTU DE L'ARTICLE 95 C.P.C.
[44] Le Procureur général plaide que, dans les circonstances, un avis en vertu de l'article 95 C.p.c. était requis, mais n'a jamais été transmis.
[45] Il soutient que l'action intentée par la Coalition recherche une conclusion en injonction dont l'effet est l'arrêt de la circulation de motoneiges sur la piste. Dans l'éventualité où elle est accordée, elle aura pour effet, sans qu'un débat en conformité des prescriptions du Code de procédure ait été proposé, de rendre inopérantes plusieurs dispositions législatives et réglementaires, dont l'article 8 de la Loi sur les véhicules hors route qui permet la circulation des véhicules hors route sur les terres du domaine de l'État, l'article 12 de cette même loi et l'article 53 du Règlement sur la motoneige qui autorise la circulation de motoneiges à moins de 30 m d'une habitation sur une ancienne emprise.
[46] L'action serait en conséquence irrecevable.
·
[47] L'article 95 C.p.c. se lit :
Sauf si le procureur général a reçu préalablement un avis conformément au présent article, une disposition d'une loi du Québec ou du Canada, d'un règlement adopté en vertu d'une telle loi, d'un décret, arrêté en conseil ou proclamation du lieutenant-gouverneur, du gouverneur général, du gouvernement du Québec ou du gouverneur général en conseil ne peut être déclarée inapplicable constitutionnellement, invalide ou inopérante, y compris en regard de la Charte canadienne des droits et libertés (Partie I de l'annexe B de la Loi sur le Canada, chapitre 11 du recueil des lois du Parlement du Royaume-Uni pour l'année 1982) ou de la Charte des droits et libertés de la personne ( chapitre C-12), par un tribunal du Québec.
L'avis doit, de façon précise, énoncer la prétention et exposer les moyens sur lesquels elle est basée. Il doit être accompagné d'une copie des actes de procédure et être signifié par celui qui entend soulever la question au moins 30 jours avant la date de l'audition.
Le tribunal ne peut se prononcer que sur les moyens exposés dans l'avis.
[48] La juge Danielle Grenier, dans Pétro Canada c. Cour du Québec - chambre civile[17], fait une revue des décisions des tribunaux supérieurs portant sur l'interprétation de l'article 95 C.p.c. Elle y dégage les principes suivants[18] :
· L'avis au Procureur général n'est pas qu'une simple formalité;
· Le Procureur général a le droit d'intervenir dans toute instance où une question constitutionnelle fait l'objet de discussion peu importe l'issue de la contestation;
· Si une loi ou un règlement est déclaré invalide ou inopérant sans que le Procureur général n'ait été appelé et ait eu l'occasion de faire valoir son point de vue, la décision rendue est nulle (arrêt Eaton);
· La tardiveté de l'avis n'est pas nécessairement fatale. Tout dépend des circonstances. Si le retard entraîne pour le Procureur général un préjudice de droit ou de fait irréparable, la question constitutionnelle devra être occultée du débat judiciaire.
[49] La professeure Danielle Pinard, après avoir fait une revue exhaustive de l'historique des dispositions que l'on retrouve désormais à l'article 95 C.p.c., écrit que[19] « le législateur québécois a effectivement choisi de limiter la portée de l'obligation d'avis préalable au procureur général aux cas où une décision est vraiment rendue au fond quant à la question de la validité ou de la constitutionnalité de l'objet contesté. Cette intention législative, qui se dégage du texte utilisé et de l'histoire jurisprudentielle antérieure, est aussi tout à fait conforme à l'objet de la disposition. Les choix législatifs et gouvernementaux ne sont réellement mis en péril que par une déclaration judiciaire formelle et définitive ».
(soulignements ajoutés).
[50] Les conclusions recherchées à l'action ne soulèvent aucun débat de fond sur la validité ou la constitutionalité des dispositions législatives ou réglementaires concernées; l'action ne recherche aucune conclusion en ce sens.
[51] De plus, la demande d'injonction vise l'interdiction de pratiquer le sport de la motoneige sur la piste uniquement, soit un tronçon d'une des emprises ferroviaires acquise par le Gouvernement.
[52] L'ordonnance recherchée, si elle est accordée, ne rend pas inopérantes les dispositions législatives concernées qui s'appliquent à tout véhicule hors route de même qu'à d'autres lieux de circulation.
LA JUSTICIABILITÉ DU RECOURS
[53] Les défenderesses plaident que l'utilisation de la piste pendant la saison hivernale comme sentier de motoneige est le résultat d'un consensus ralliant les autorités politiques, locales, régionales et provinciales. Le présent litige porterait essentiellement sur l'opportunité de la décision politique de permettre la circulation de motoneiges sur la piste, et ce, à moins de 30 m des habitations. Cette question n'est pas justiciable.
·
[54] La justiciabilité d'un recours « a trait à l'aptitude d'une question ou d'un litige à faire l'objet d'un examen judiciaire et à être résolu ultimement par des techniques et des principes juridiques »[20].
[55] Un tribunal peut refuser de se saisir d'un débat lorsqu'il juge que, en répondant aux questions qui y sont soulevées, il dépasserait le rôle qui lui revient dans le cadre constitutionnel; autrement dit, s'il conclut ne pas être en mesure de trancher en appliquant la règle de droit[21].
[56] En effet, l'intervention d'un tribunal sur une question non justiciable, dont l'opportunité d'une décision politique, compromettrait la préséance de la volonté populaire et le droit des citoyens de participer au débat qui précède une telle décision et d'en orienter l'issue[22].
[57] Telle n'est pas la question dont le Tribunal est saisi.
[58] Dans le cadre du litige tel qu'il est engagé, le Tribunal est appelé à trancher un débat portant sur l'existence ou non d'une nuisance selon le droit commun ou d'une contravention à la LQE ou à la Charte, résultant de la circulation de motoneiges sur la piste. Il s'agit de questions qui relèvent des tribunaux[23].
LA DÉFENSE D'AUTORITÉ LÉGISLATIVE
[59] Les règles générales du droit civil s'appliquent à un corps publique, à moins qu'il ne démontre que « des principes de droit public pertinents priment sur les règles du droit civil »[24].
[60] La défense d'autorité législative qui origine du droit public, dans la mesure où elle trouve application, est un moyen de défense recevable en droit québécois[25].
[61] Une telle défense permet d'invoquer à l'encontre d'une action fondée sur la nuisance une immunité expressément ou implicitement accordée par le législateur.
·
[62] Les défenderesses plaident que le législateur permet expressément l'implantation de la piste à l'endroit où elle se trouve, adopte l'article 12 de la Loi sur les véhicules hors route et l'article 53 du Règlement sur la motoneige autorisant la circulation des motoneiges à moins de 30 m d'une habitation et l'article 27 du Règlement sur la motoneige qui fixe la norme de bruit maximal d'une motoneige à 82 décibels.
[63] La consultation et la réflexion politique qui précèdent l'acquisition de l'emprise par le Gouvernement et le fait qu'il n'a jamais hésité à intervenir pour favoriser l'utilisation de la piste par les motoneigistes montrent son intention d'accorder à la MRCL une immunité en regard des conséquences inévitables d'une telle circulation sur la piste, lesquelles incluent les inconvénients allégués par la Coalition.
[64] L'action de la Coalition serait en conséquence irrecevable.
·
[65] La défense d'autorité législative origine de l'arrêt City of Manchester c. Farnworth[26] et y est définie de la façon suivante :
[Traduction] Lorsque le Parlement a permis qu'une chose donnée soit faite à un endroit donné, il ne peut y avoir d'action fondée sur la nuisance causée par la chose qui est faite si la nuisance est le résultat inévitable de la chose autorisée. Le fardeau d'établir que le résultat est inévitable incombe à ceux qui désirent se dégager de leur responsabilité à l'égard de la nuisance, […].
[66] Le juge Sopinka, dans l'arrêt Nell Tock c. St-John's Metropolitan Area Board[27], en précise la portée :
Le raisonnement sur lequel repose le moyen de défense est que, si le législateur a dit expressément ou implicitement qu'un ouvrage peut être exécuté et qu'il ne peut l'être sans causer de nuisance, la loi autorise donc une violation des droits des particuliers. Si la loi ne contient aucune disposition d'indemnisation, toute réparation est refusée. Voir Fleming, The Law of Torts (6e éd. 1983), à la p. 407, et l'arrêt City of Campbellton v. Gray's Velvet Ice Cream Ltd., précité, à la p. 439. Il ne fait pas de doute qu'une loi peut autoriser expressément une violation des droits des particuliers si elle le fait en des termes explicites. Si la seule conclusion raisonnable qu'on peut tirer de la loi est que cette violation est autorisée, le même résultat peut donc être obtenu implicitement. C'est pourquoi la jurisprudence accueille le moyen de défense si la nuisance est autorisée expressément ou implicitement.
Un ouvrage est autorisé par une loi, peu importe que celle-ci soit de nature impérative ou facultative, si l'ouvrage est exécuté en conformité avec cette loi.
[…]
Les critiques sur l'état actuel du droit, qui sont à l'origine des modifications souhaitées, sont fondées en grande partie sur le fait que l'expression "conséquences inévitables" est trop vague et incertaine. Cette expression reflète la conclusion de fait que le lien de causalité nécessaire existe entre l'ouvrage autorisé et la nuisance. Si ce lien nécessaire existe, il s'ensuit donc que le législateur a autorisé ce qui constitue la conséquence inévitable de l'ouvrage prévu dans la loi en question.
Le fardeau de preuve relatif au moyen de défense fondé sur l'autorisation du législateur incombe à la partie qui l'invoque. Ce n'est pas un fardeau dont il est facile de s'acquitter. Les tribunaux répugnent à conclure qu'on a voulu que les droits des particuliers soient sacrifiés pour le bien commun.
[67] La Cour suprême, dans un jugement unanime, reprend cette approche dans l'arrêt Murray Ryan c. Corporation de la ville de Victoria[28].
[68] La défense d'autorité législative sera donc recevable si l'atteinte aux droits est permise par les termes clairs de la loi ou par déduction nécessaire de ces termes et que le préjudice allégué est la conséquence inévitable de ce que la loi ordonne ou permet à l'organisme de faire[29].
[69] Une autorisation explicite ou implicite peut découler d'une loi, d'un décret, de certains règlements ou même de certaines ententes contractuelles dont les termes sont cependant imposés par le législateur[30].
[70] La décision la plus récente traitant de la défense d'autorité législative est rendue en 2002 par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'arrêt Sutherland c. Canada (Attorney General)[31].
[71] Il s'agit d'une poursuite en dommages pour nuisance résultant de la construction d'une nouvelle piste d'atterrissage à l'aéroport de Vancouver sur l'île de Sea Island.
[72] La Cour d'appel confirme la décision du Tribunal de première instance à l'effet qu'il y a nuisance, mais reçoit la défense d'autorité législative.
[73] Quant au sens et à la portée de cette défense, la Cour d'appel cite avec approbation les commentaires suivants publiés dans la Revue du Barreau Canadien, à la suite de l'arrêt Tock[32]:
[66] In his Canadian Bar Review comment on the Tock case, Professor Hogg expressed the views (at p.595) that : "It is a fundamental principle of our law that an act that is authorized by statute cannot be tortious", and that "in every case where it is alleged that a public body has committed a tort, the first inquiry must be whether the act was committed without statutory (or prerogative) authority". He argued for the "relatively well settled rule of law that had been accepted prior the Supreme Court of Canada judgment in Tock". He said :
... The role of the inevitable result rule is to determine when a statute should be taken to authorize implicitly a tortious act. If the commission of a tort is the inevitable result of exercising the statutory power, then the statutory power must be taken to have authorized implicitly the commission of the tort. In such a case, where the statutory power cannot be exercised without interfering with private rights, the only reasonable inference is that the statute has authorized the interference with private rights.
[74] À la lumière de ces enseignements, elle détermine que « the central issue in this appeal is whether the runway's location, construction and operation are authorized by statute so as to render the defendants immune from suit[33].
[75] Ensuite, elle analyse le cadre législatif pertinent duquel elle infère dans les circonstances l'existence d'une autorisation législative. Ce contexte législatif, il est le suivant[34] :
[37] Three federal statutes, and a number of pieces of subordinate legislation - regulations and orders-in-council - are relevant. The statutes are : the Aeronautics Act, R.S.C., 1985, c.A-2 (as amended), the Public Lands Grants Act, R.S.C. 1985, c.P-30 (repealed 1991, c.50, s.50) and the Airport Transfer (Miscellaneous Matters) Act, S.C. 1992, c.5.
[…]
[42] […] On 19 March 1992, the Governor in Council authorized the Minister of Transport to enter into an Agreement to Transfer with the Authority to transfer to it the management, operation and maintenance of the airport by Order-in-Council No. P.C. 1992-18/501. This Order-in-Council was authorized by the Aeronautics Act, s.4.2(o).
[43] On 21 May 1992 the Governor in Council issued Order-in-Council No. P.C. 1992-1130 under the Airport Transfer (Miscellaneous Matters) Act, designating the Authority as the corporation to which the Minister was authorized to transfer the airport.
[44] On 18 June 1992 the Governor in Council issued Order-in-Council P.C. No. 1992-1376 authorizing the Minister, on behalf of the Crown, to enter into a lease with the Authority in the terms and conditions of a document annexed as a Schedule to the Order-in-Council. That document was a draft Ground Lease between the Minister of Transport and the Authority for a lease of the airport. The provisions of the draft Ground Lease are identical to the Ground Lease ultimately executed on 30 June 1992.
[45] Order-in-Council 1992-1376 was made pursuant to the Public Lands Grants Act.
[46] Section 4.10.01 of the draft Ground Lease expressly requires the Authority to "plan, design and construct the third runway", defined under the Lease to be the specific runway considered by the Environmental Assessment Review Panel. (See paragraph 12 above.) Section 4.10.01 states that the rent under the Ground Lease had been determined on the basis that the Authority had the obligation to construct the new runway by December 31, 1997. Section 4.10.13 further provides that if the Authority failed to construct the new runway as required under s.4.10.01, then the Authority would pay to the Minister additional rent of up to $101,795,000.
[47] Section 8.01.01 of the draft Ground Lease requires the Authority to use the leased lands as a Major International Airport. Sections 8.02.01 and 8.02.02(a) further require the Authority to manage, operate and maintain the airport at a level of service that meets the capacity demands at the airport.
[48] The Canadian Aviation Regulations, SOR/96-433, passed under s.4(9)(e) of the Aeronautics Act, set out the requirements for the issuance of an "airport certificate". An airport certificate provides the statutory authority to operate an airport in a specific location. The regulations provide that a person is prohibited from operating an aerodrome except in accordance with an airport certificate (s.302.10). Sections 302.01 to 302.11 apply to airports "within the built up area of a city or town" (s.302.01(1)(a)) and require an applicant for an airport certificate to submit a proposed "Airport Operations Manual" to the Minister of Transport for approval, which must contain many precise details for the airport's configurations specified by the regulations (s.302.08(4)).
[49] Section 302.03(1) provides that, subject to s.6.71(1) of the Aeronautics Act, "the Minister shall issue an airport certificate to an applicant authorizing the applicant to operate an aerodrome as an airport if the proposed airport operations manual ... is approved by the Minister ...". In making this determination, the Minister may consider whether the issuance of an airport certificate is in the public interest and not detrimental to aviation safety (s.302.03(1)). This is also subject to s.6.71(1) of the Aeronautics Act, which provides that the Minister may refuse to issue an airport certificate if "the Minister is of the opinion that the public interest and, in particular, the record in relation to aviation of the applicant or of any principal of the applicant warrant it".
[50] Supplementing the regulatory requirements for the Authority to hold an airport certificate and to comply with the Airport Operations Manual, s.8.02.02(f) of the draft Ground Lease also requires the Authority to obtain and maintain an airport certificate for the airport and to comply with its terms. Section 8.02.02(g) requires the Authority to comply with all the mandatory terms of the Airport Operations Manual.
[51] The Authority applied for an airport certificate in respect of the airport based on its proposed Airport Operations Manual. The Minister of Transport approved the Authority's Airport Operations Manual and granted it an airport certificate on 1 July 1992. As required by the regulations, the Authority's Airport Operations Manual provides precise details as to the location and specifications for each of the runways at the airport. This includes the North Runway, designated as "26R", and the Manual specifies its elevation to the nearest foot, linear dimensions to the nearest half metre, geographic coordinates (latitude and longitude to the nearest second), and bearings to the nearest one-tenth of a degree.
(soulignements ajoutés)
[76] Finalement, elle infère de ce contexte législatif ce qui suit[35] :
[95] […] so far as the location of the North Runway is concerned, there can be no doubt that it was authorized by the statutory scheme.
[96] […] statutory authority for the operation of the North Runway is equally clear. The Ground Lease requires the Authority to use the leased lands as a major international airport, and to manage, operate and maintain the airport at a level of service to meet the capacity demands at the airport. The North Runway was constructed specifically because the airport could not serve demands with its previous physical facilities.
[97] […] the legal effect of the certificate (Airport certificate) is to authorize the operation, in a specific location, of the airport, including the North Runway. It is quite true that the Canadian Aviation Regulations are designed to protect and enhance aviation safety. They, together with the Airport Operations Manual, provide a comprehensive network of rules for the safe and efficient operation of aircraft and airports. However, to look only at the many safeguards inherent in the regulations is to ignore the activities that they authorize. Those activities include landing at and taking off from the North Runway.
(soulignements ajoutés)
[77] Quelques années auparavant, la Cour supérieure de l'Ontario, dans Jagtoo c. 407 ETR Concession[36], saisie d'une poursuite en dommages pour nuisance alléguée être causée par la construction d'un tronçon de l'autoroute 407, accepte la défense d'autorité législative dans un contexte législatif similaire à celui dans l'affaire Sutherland.
[78] Par contre, dans l'arrêt City of Portage La Prairie c. B.C. Pea Growers[37], la Cour, statuant sur une poursuite en réclamation de dommages résultant d'inondations et d'odeurs nauséabondes ayant fait suite à l'implantation d'un bassin d'épuration près de la propriété du demandeur, refuse la défense d'autorité législative dans le contexte législatif qui suit :
The combined effect of these sections, in relation to the circumstances of this case, is that the appellant was granted the power to build and maintain a sewerage system, with a duty imposed upon its council to devise the necessary plans for the object of providing a water supply and to carry them out, including the provision of sewers. There was no direction to adopt any particular method of sewage disposal. The appellant was given the power to construct a sewage lagoon but it was not subject to a specific mandate to do so irrespective of whether a nuisance was thereby created or not. There is nothing in the City Charter expressly providing that it was to be exempted from its common law liability for maintaining a nuisance if, in fact, a nuisance did result.
(soulignements ajoutés)
[79] Bref, une immunité législative découle généralement de l'encadrement législatif d'une activité spécifique dans son ensemble, notamment quant à son lieu d'exercice, son étendue, ses modalités d'exercice duquel il est possible de déduire que le législateur en conséquence ne peut qu'y autoriser les effets inévitables qui en résultent[38].
·
[80] L'encadrement législatif auquel se réfère les défenderesses n'a pas, en l'espèce, une telle portée.
[81] Selon la preuve, l'intervention du Gouvernement à l'égard des emprises ferroviaires ne vise que la conservation de leur intégrité de même qu'à régler le problème qu'entraîne leur usage sans encadrement qui se développe au fil du temps.
[82] Le premier objectif est atteint lorsque le Gouvernement acquiert les emprises; le second, lorsqu'il confie au milieu la tâche d'en préciser l'utilisation.
·
[83] Aucune disposition, soit de la Loi sur les véhicules hors route, soit du Règlement sur la motoneige, ne vise ni n'encadre de façon particulière l'activité de la motoneige telle qu'elle est exercée sur la piste, en particulier quant à son intensité et son étendue. Cette loi et ce règlement constituent des dispositions d'ordre général qui s'appliquent à tout véhicule hors route et qui encadrent la pratique de ces activités à travers la province, incluant sur l'ensemble des emprises ferroviaires.
[84] Il n'est pas possible d'inférer de ces dispositions l'autorisation de causer des troubles de voisinage.
·
[85] Le bail entre le Gouvernement et la MRCL démontre ce choix du Gouvernement de ne pas s'ingérer dans l'implantation de l'activité de la motoneige sur la piste et, surtout, cette absence de toute immunité législative dont pourrait bénéficier la MRCL advenant que cette implantation nuise.
[86] À cet effet, les dispositions pertinentes du bail sont les suivantes[39] :
ATTENDU QU'aux termes de sa décision du 14 juillet 1993 sous le numéro 93-163, le Conseil des ministres a accepté que soit acquise de Canadien Pacifique Limitée l'emprise ferroviaire désaffectée s'étendant de la ville de Saint-Jérôme (point milliaire 13.6) à la ville de Mont-Laurier (point milliaire 138,2) inclusivement et qu'elle soit convertie à des fins publiques;
ATTENDU QU'il désire que cette affectation publique soit de nature récréo-touristique et que la gestion et l'aménagement de l'emprise ferroviaire soient pris en charge par le milieu supramunicipal aux termes d'une location;
[…]
ATTENDU QUE la municipalité régionale de comté des Laurentides par sa résolution numéro 94.05.1641 a signifié son intérêt de prendre en charge, en tant que "Locataire", la partie de l'emprise ferroviaire située entre la limite de division des municipalités de Sainte-Adèle et Val-Morin et la ligne de division des municipalités de Labelle et La Macaza, ainsi que les surlargeurs s'y trouvant.
[…]
ARTICLE 1 - DÉFINITIONS
[…]
1.2 « Complexe » ou « complexe récréo-touristique » : l'ensemble de toutes les améliorations, constructions ou de tout autre ouvrage effectué sur le terrain ainsi que l'ensemble des actifs immobiliers existant sur ce terrain à la date de la signature des présentes, à l'usage du public en général, destinés à l'établissement et à l'aménagement d'un parc linéaire à caractère régional.
[…]
1.4 « Emprise ferroviaire » : la totalité de l'emprise désaffectée, les surlargeurs, les structures et les huit (8) gares, en partant du point milliaire 13.6 jusqu'au point milliaire 138,2.
1.5 « Terrain » : le territoire loué tel que décrit à l'annexe "A", laquelle a été reconnue véritable et signée pour identification par les parties en présence du notaire soussigné.
ARTICLE 2 - OBJET DU BAIL
2.1 Le Locateur, par ces présentes, loue au Locataire un terrain ainsi que les immeubles, équipements ou ouvrages existants sur ce terrain, le tout tel que décrit à l'annexe "A".
[…]
ARTICLE 5 - NATURE ET LIMITE DU BAIL
5.1 Le Locataire ne peut occuper, aménager ou utiliser le terrain qu'aux fins d'y développer et d'y exploiter de façon continue le complexe récréo-touristique dans le but de permettre l'exercice d'activités de sports, de loisirs et de plein air, notamment la randonnée pédestre, le vélo et le ski de fond, tel que défini dans le programme d'aménagement prévu à l'article 9.
5.2 Considérant que le Locateur reconnaît l'importance de la pratique de la motoneige sur la section du parc linéaire comprise entre le village de Sainte-Agathe sud et la ville de Mont-Laurier, celui-ci, en collaboration avec le Locataire, doit veiller à la mise en place des moyens appropriés aux fins d'assurer, à l'intérieur du territoire de ce dernier, la continuité du sentier de motoneige entre ces deux municipalités.
ARTICLE 6 - OBLIGATIONS DU LOCATAIRE
[…]
6.3 Le Locataire doit faire en sorte que l'usage et l'occupation du complexe et du terrain soient en tout temps conformes à toute loi, règlement, règlement de zonage, ordonnance et directive applicables, provenant d'une autorité gouvernementale ayant juridiction relativement à la condition, l'entretien, l'utilisation ou l'occupation du complexe et du terrain.
(soulignements ajoutés)
[87] L'annexe A du bail définit le territoire loué comme étant le Parc Linéaire.
[88] Il appert du bail que la prise en charge du Parc Linéaire, sans encadrement spécifique par le Gouvernement, est confiée à la MRCL sous réserve, tel que le stipule l'article 6.3, que l'usage et l'occupation qui en seront faits seront conformes à toute loi ou réglementation applicable.
[89] Le bail n'impose pas l'implantation de la pratique de la motoneige sur la piste; il prévoit la collaboration des parties aux fins d'assurer, à l'intérieur du territoire de la MRCL, et non spécifiquement sur le terrain, soit le Parc Linéaire, la continuation d'un sentier de motoneige.
[90] Le Gouvernement en laisse ultimement le choix à la MRCL.
[91] D'ailleurs, la MRCL choisit dans la partie plus au sud du Parc Linéaire de ne pas y implanter une telle activité.
[92] Finalement, Jean-Guy Tessier, sous-ministre adjoint aux loisirs et aux sports à l'époque, témoigne que le Gouvernement a non seulement compris l'intérêt de la motoneige dans le Nord, mais aussi ses impacts possibles et veut s'assurer que tout l'aménagement se fasse dans les meilleures conditions, d'où les dispositions incluses au bail.
[93] La décision que prend la MRCL d'autoriser la circulation des motoneiges sur la piste relève ultimement de son pouvoir d'aménager son territoire.
[94] La défense d'autorité législative n'est donc pas recevable dans les circonstances.
LA NUISANCE
a) Le droit
[95] L'article 976 C.c.Q. édicte :
Les voisins doivent accepter les inconvénients normaux du voisinage qui n'excèdent pas les limites de la tolérance qu'ils se doivent, suivant la nature ou la situation de leurs fonds, ou suivant les usages locaux.
[96] Au sujet de cette disposition, l'Office de révision du Code civil[40] précise :
Cet article veut préciser l'obligation légale de bon voisinage, déjà annoncée à l'article 1057 C.c. en imposant, au-delà de l'obligation de diligence, l'obligation de ne pas causer des « gênes intolérables » et cela quelles que soient les mesures prises pour les éliminer.
Cette obligation est depuis longtemps reconnue en droit québécois, soit sous le couvert d'un abus de droit, soit sous le vocable de nuisance inspiré du common law. Récemment, on l'a plus justement appréciée comme une obligation légale particulière, distincte de celle de l'article 1053 C.c. et de la notion de faute qu'inspire cette dernière.
Cette disposition impose donc à tous, et non seulement aux propriétaires, l'obligation de ne pas nuire à son voisin. Cette obligation existe même en l'absence de faute et nonobstant autorisation administrative. »(50)
________________________
(50) Office de révision du Code civil - Rapport sur le Code civil du Québec, vol. 1, Québec, Éditeur officiel, 1977, p. 348. Le texte de l'article 96 du projet de Code civil du Québec sur lequel portaient les commentaires de l'Office de révision du Code civil du Québec se lisait : « Nul ne doit causer à autrui un préjudice qui dépasse les inconvénients normaux du voisinage. »
[97] L'article 976 C.c.Q. reconnaît donc une responsabilité sans faute fondée sur la mesure des inconvénients causés[41].
[98] Selon, l'auteur Pierre-Claude Lafond[42] :
[…] le principe n'est pas tant orienté vers l'obligation de réparer les inconvénients anormaux, que vers celle de supporter les inconvénients normaux.
[…]
Le devoir de tolérance s'applique entre voisins lorsque l'inconvénient subi peut être qualifié de « normal ». La mesure de cette qualification est objective et doit s'apprécier en regard des trois critères d'appréciation énoncés dans la disposition : la nature des fonds, leur situation et les usages locaux. Comme l'exprimait la Cour d'appel au siècle dernier :
« La loi ne dit pas quels sont ces actes de tolérance, mais les usages de la vie journalière les font assez connaître. » (St-Charles c. Doutre, [1874] L.C.J. 253 (B.R.).
[99] Bref, il s'agit de comparer la nuisance alléguée aux inconvénients normaux et inévitables de la vie en société tenant compte de la situation des fonds concernés et des usages de la collectivité dans le milieu.
[100] L'article 976 C.c.Q. sanctionne l'exercice antisocial ou anormal d'un fonds voisin[43] et le dépassement de la norme qui y est édictée constitue la nuisance. Ce régime s'applique sans distinction, que le voisin soit propriétaire ou locataire[44].
[101] Une activité même autorisée par l'administration publique peut être une source de responsabilité en vertu de l'article 976 C.c.Q. si elle est nuisible; l'antériorité de cette activité à l'occupation du fonds voisin ne constitue pas une fin de non-recevoir à un recours fondé sur la nuisance, bien que cela puisse être considéré dans l'évaluation du dommage, s'il en est, en raison de la prévisibilité raisonnable des inconvénients futurs[45].
[102] Finalement, une situation peut être considérée nuisible bien qu'elle ne se produise que sur une période dans l'année[46].
La situation géographique et démographique
[103] La MRCL comprend environ une vingtaine de municipalités.
[104] Le Parc Linéaire couvre 75 km sur le territoire de la MRCL. Il est généralement bordé de terrains privés et rencontre à intervalles réguliers un croisement routier.
[105] La piste couvre 38 km. Elle est partie d'un important réseau provincial de sentiers de motoneiges qui compte 33,640 km de sentiers. Elle est fréquentée par des motoneigistes qui proviennent non seulement de la région mais aussi d'un peu partout dans la province et même de l'étranger.
[106] La piste, comme tous les sentiers de motoneiges, est entretenue. La vitesse, la présence de courbes, les avertissements d'arrêts à 100 m à venir et les distances sont signalées; le droit de passage sur certaines propriétés est également encadré.
[107] Elle est patrouillée par des bénévoles des Clubs de motoneige et de la Fédération de motoneiges, par la Sûreté du Québec et, à Mont-Tremblant, par la Sûreté municipale de Mont-Tremblant.
[108] Les Clubs de motoneige sont affiliés à la Fédération des Clubs de motoneige du Québec. Ils sont des corporations sans but lucratif et voient à l'entretien des sentiers.
[109] À l'intérieur du 200 m bordant la piste de chaque côté, on retrouve environ 600 adresses civiques. La MRCL y recense en moyenne entre 40 et 50 mutations par année, ce qui représente environ 7 pour cent de l'ensemble des propriétés sur son territoire.
[110] Dans la région de St-Faustin, des habitations bordent la piste du km 68 aux km 75; aux km 76 et 77, la piste traverse un développement résidentiel appelé Domaine Lauzon.
[111] Dans le secteur Mont-Tremblant, les km 78 à 85 correspondent à un développement urbain; les environs du km 81 sont peu habités et les km 82, 83, se situent dans un secteur résidentiel. Du km 89 au km 93, soit la région du Lac Mercier, la piste passe entre le lac et le chemin principal et longe un secteur résidentiel.
[112] La région s'étendant des km 94 à 97 est peu habitée et il n'y a que quelques résidences isolées le long de la piste.
[113] Un développement résidentiel se trouve au niveau des km 98 et 99; aux km 100 à 103, il s'agit d'une zone surtout agricole. Finalement, un développement urbain s'étend des km 104 à 106 situés à Labelle.
[114] La Coalition a fait entendre 23 témoins résidant aux abords de la piste.
[115] Ils sont de tous les groupes d'âge; certains, originaires de la région, ont choisi de continuer à y résider, plusieurs s'y sont installés après leur retraite, ou pour d'autres, il s'agit de leur résidence secondaire.
[116] En général, l'environnement et la quiétude associés à la vie dans cette région expliquent le choix d'y vivre.
·
[117] Une fois l'emprise abandonnée par le CP et les rails enlevés, débute une période de cohabitation agréable entre les résidants le long de la piste, piétons ou skieurs de fond, et les quelques motoneigistes de la région qui, occasionnellement, se déplacent sur la piste. Les témoins parlent d'environ une quinzaine de motoneiges par jour la fin de semaine et beaucoup moins durant la semaine.
·
[118] À compter de l'hiver de l'année 1997, le trafic de motoneiges sur la piste augmente de façon significative. La quiétude dont jouissent les résidants désormais cesse à chaque année avec l'arrivée des motoneiges, soit généralement à compter de la mi-décembre à la mi-mars.
[119] Les motoneigistes circulent sur la piste tant la nuit que le jour, la semaine et la fin de semaine et, dans ce dernier cas, l'achalandage est tel que plusieurs qualifient la piste d'autoroute de motoneiges.
[120] La plupart témoigne ressentir de l'anxiété et du découragement à la perspective de l'arrivée des motoneiges et, pour plusieurs, le bruit qui en résulte finit par les rendre agressifs.
[121] Ces témoins qui résident dans différentes localités le long de la piste peuvent être regroupés à l'intérieur du 200 m de la piste en différentes zones établies selon la distance calculée du centre de la piste; la première située entre 0 et 20 m (zone 1); la seconde, entre 20 et 30 m (zone 2); la troisième, entre 30 et 60 m (zone 3); la quatrième, entre 60 et 100 m (zone 4) et, la cinquième, entre 100 et 200 m. (zone 5).
Zone 1
[122] Aline Émond est de Mont-Tremblant, et Michel Martin de Labelle. La semaine, le bruit qui résulte de la circulation de motoneiges ( le bruit ) est chose courante; la fin de semaine, il est constant et est perçu même à l'intérieur de leur résidence.
[123] M. Martin qualifie ce bruit d'infernal; à l'intérieur, comme il n'entend pas nécessairement venir les motoneiges, il est soudain, sourd et fort. Il lui a été nécessaire d'installer quatre niveaux de fenêtre dans la chambre des maîtres pour s'assurer de ne pas être réveillé.
[124] Mme Émond fait jouer de la musique ou fonctionner le téléviseur toute la journée pour tenter de couvrir le bruit. La nuit, le bruit la réveille; son mari et sa fille s'en sont régulièrement plaints. Une autre de ses filles, qui habitait en face de chez elle le long de la piste, a déménagé pour ce motif.
·
[125] Toutes deux témoignent de la présence constante durant l'hiver à l'extérieur sur leur propriété d'une odeur de gaz et d'huile ( l'odeur ) plus forte les fins de semaine.
[126] M. Martin ne fait plus de travaux ni d'activités à l'extérieur puisque cette odeur, à la longue, l'étourdit et lui donne des maux de cœur.
[127] Mme Émond prend une marche journalière dans un boisé situé à l'extrémité de sa propriété qui couvre plusieurs âcres. Afin de s'y rendre, elle marche le long de la piste; régulièrement, elle doit, ce faisant, se protéger de cette odeur en mettant un foulard devant la bouche.
·
[128] M. Martin s'est acheté un autre terrain ailleurs et considère vendre.
Zone 2
[129] Francis Trudel, Yvan et Claudette Bélanger, Jacques Bédard, Manny Agulnik, Luce Poirier, Réal Fournel et Dyane Laforest résident dans la zone 2.
[130] Ces témoins perçoivent le bruit non seulement à l'extérieur mais aussi à l'intérieur. Il est strident, généralement intermittent, quoique certaines journées de fin de semaine, elles ont l'impression d'entendre une motoneige à la minute. La nuit, il réveille. La piste et ses abords l'hiver sont envahis par le bruit et ils ne réussissent pas à s'y habituer.
·
[131] M. Trudel témoigne d'une journée de fin de semaine durant l'hiver 2002-2003 alors que, pendant une trentaine de minutes, il déneige le toit de sa résidence avec un ami. Durant cette période, environ 100 motoneiges passent sur la piste devant sa résidence et il lui est impossible durant tout ce temps de converser avec cette personne.
[132] La piste, à l'endroit où il réside est en ligne droite et il évalue que les motoneiges y circulent en général au-delà de la limite de 70 km sauf lorsqu'elles sont en caravanes.
[133] La fin de semaine, il préfère s'éloigner et se rendre skier. Il dort les fenêtres ouvertes; lui-même et sa conjointe sont réveillés presque toutes les nuits car le passage de quelques motoneiges suffit; le bruit, la nuit, paraît plus percutant.
·
[134] M. et Mme Bélanger ont déménagé à l'arrière la chambre des maîtres située à l'origine à l'avant de leur résidence avec vue sur le Lac Mercier et la piste. Ils ferment les portes des chambres situées à l'avant afin de s'assurer de ne pas être réveillés la nuit.
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[135] M. Bédard garde les fenêtres de sa résidence fermées tout l'hiver; malgré tout, il entend passer les motoneiges la nuit. Sa conjointe souffre de migraines et ne peut faire de sieste dans sa chambre le jour à cause du bruit.
[136] M. & Mme Bélanger, M. Bédard et M. Trudel témoignent de la présence durant l'hiver de l'odeur à l'extérieur à proximité de leur résidence; son intensité varie selon la journée ou le moment de la journée. Elle est occasionnelle pour les deux premières alors qu'elle est constante chez les deux dernières. M. Bédard perçoit également cette odeur à l'intérieur de sa résidence.
[137] Ils affirment tous ne pas pouvoir profiter de leur terrain à l'extérieur l'hiver, particulièrement la fin de semaine à cause du bruit et, pour certains, également à cause de l'odeur.
·
[138] M. Trudel ajoute que lui-même et sa conjointe ne peuvent plus supporter ce milieu bruyant durant l'hiver et ils envisagent un déménagement.
Zone 3
[139] Christian Fémy, Suzanne Bernardin, Normand Thibault, Monique Cartier-Lortie, Normand Lacroix, Sylvie Laflamme, Jean-Guy Trudel, Diane Naef et Louise Sigouin résident dans la zone 3.
[140] À l'exception de M. Fémy, tous témoignent être dérangés par le bruit, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur particulièrement les fins de semaine. Ils dorment généralement les fenêtres ouvertes et, pour la plupart, sont réveillés régulièrement par le bruit. Il en est de même de leur conjoint.
[141] Mme Bernardin tient un « bed and breakfast ». Elle reçoit souvent des plaintes de ses clients réveillés par le bruit durant la nuit. La conjointe de M. Thibault doit dormir avec des bouchons dans les oreilles et Mme Lortie tente de couvrir ce bruit la nuit en laissant la porte de la pièce où se trouve le compresseur préférant entendre un bruit continu plutôt que le bruit soudain et strident d'une motoneige.
[142] M. Lacroix précise que le bruit, le jour, a l'effet d'une centaine d'intrusions subites à l'intérieur de sa résidence.
[143] À l'extérieur, Mme Laflamme qualifie la situation d'invivable les fins de semaine et, selon M. Thibault, le bruit perturbe la conversation. Mme Lortie, qui possède une propriété de 90 âcres, entend passer une motoneige partout sur sa propriété malgré que son conjoint ait planté 3,000 arbres entre sa résidence et la piste.
·
[144] Ces témoins mentionnent aussi la présence à l'extérieur de l'odeur; selon la majorité, elle est présente tant la semaine et elle peut même être perçue à l'entrée de la propriété de Mme Lortie, soit à 100 m du Parc Linéaire.
[145] Cette odeur empêche, certaines journées, les familles de M. Fémy et de Mme Laflamme de faire des activités à l'extérieur et M. Trudel et son épouse ne peuvent plus prendre des marches à l'extérieur le long de la piste près de leur résidence; ils vont marcher à St-Jovite. Également, leurs petits-enfants, qui demeurent dans la région aussi à proximité de la piste, ne jouent pas à l'extérieur parce que l'odeur les dérange.
[146] Les petits-enfants de M. Lacroix, lorsqu'ils le visitent, préfèrent jouer à l'intérieur puisque l'odeur à l'extérieur aussi les dérange.
[147] Cette odeur empêche M. Lacroix de travailler sur son terrain.
·
[148] Mme Naef et son mari travaillent la semaine et vont ailleurs les fins de semaine pendant la période de pointe du trafic, soit entre 10 h et 15 h. Ils ont mis leur maison en vente voulant s'éloigner de la piste.
[149] Mme Lortie envisage également déménager.
Zone 4
[150] Chantal Pigeon et son conjoint Normand St-Pierre, Judy Girvan, Martine Léonard et Hortense Roy résident dans la zone 4.
[151] Mme Pigeon, M. St-Pierre et Mme Girvan entendent le bruit tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, la semaine comme les fins de semaine. Mme Roy demeure non loin du seul stationnement de motoneiges situé le long de la piste et c'est le bruit de motoneiges qui arrivent et repartent qui la dérange.
[152] Mme Pigeon travaille à Montréal et se rend à sa résidence à St-Faustin les fins de semaine, deux semaines à Noël et durant le mois d'août, afin de rejoindre son conjoint M. St-Pierre qui y réside toute l'année. À cause du bruit, elle cesse de s'y rendre la semaine de relâche et certaines fins de semaine; il lui arrive souvent, pour cette même raison, de quitter plutôt le dimanche après-midi.
[153] Selon Mme Pigeon, il s'agit d'un bruit strident, répétitif qui finit par l'exaspérer et il la réveille le jour en sursaut lorsqu'elle tente de faire la sieste. La fin de semaine, la musique joue à tue-tête dans la maison pour couvrir le bruit. Elle dort avec des bouchons dans les oreilles.
[154] Mme Girvan a vendu sa propriété en septembre 2003 pour s'éloigner de la piste. Le bruit, l'hiver, était chose courante et il a augmenté au fil du temps. Il la rendait agressive et elle trouvait particulièrement difficile de vivre une partie de l'année dans la quiétude et l'autre dans le bruit. En moyenne, le bruit la réveillait 5 à 6 fois par semaine.
·
[155] Mme Léonard sent constamment l'hiver, à l'extérieur sur sa propriété, l'odeur et, parfois cette odeur, la force à se couvrir la bouche d'un foulard afin d'être moins incommodée. Elle aime marcher mais doit se rendre dans un autre secteur pour prendre une marche.
Zone 5
[156] François-Hubert Desparois réside à 199 m du Parc Linéaire.
[157] À l'occasion, le bruit atteint un niveau tel à l'intérieur qu'il perturbe la conversation et il est nécessaire d'augmenter le son du téléviseur. Ses enfants, parfois, se sont plaints d'être réveillés. Les caravanes de motoneiges, en soirées, dérangent. À une occasion, compte tenu qu'il souffre d'asthme, il n'a pu rester à l'extérieur à cause de l'odeur.
·
[158] La présence dans le secteur de la route 117, d'un moulin à scie à Labelle ou de la Scierie Forget à Mont-Tremblant jusqu'en avril 2004 alors qu'elle est déménagée, ne dérange pas comparativement à la circulation de motoneiges sur la piste.
[159] Finalement, la nuit, le bruit de la surfaceuse qui entretient la piste gêne aussi.
·
[160] Les défenderesses ont fait entendre 14 témoins qui résident, en général, en permanence le long de la piste.
Zone 1
[161] M. Lacasse réside à 18.5 m de la piste; à l'extérieur, le bruit ne le dérange pas plus que celui des voitures qui circulent sur le chemin sur lequel il demeure et qui longe la piste.
[162] Les fenêtres de sa résidence sont fermées l'hiver et, à l'intérieur, il n'entend pas le bruit des motoneiges; aucun de ses locataires ne s'est plaint du bruit. Il n'a jamais senti d'odeur.
Zone 2
[163] Claudette Alarie et Réjean Doré résident dans la zone 2. Philippe Laudat y travaille.
[164] Mme Alarie sort tous les jours à l'extérieur sur sa propriété; elle qualifie le bruit d'ordinaire. La circulation de motoneiges ne la dérange pas plus que les cyclistes sur la piste l'été.
[165] M. Doré dort les fenêtres fermées et il ne perçoit, qu'exceptionnellement et à peine, le bruit la nuit lorsque tout est tranquille.
[166] M. Laudat opère un hôtel à Mont-Tremblant, passe 12 heures (h) par jour dans son bureau et le bruit ne l'incommode pas.
[167] Mme Alarie et M. Doré mentionne la présence d'une odeur résiduelle occasionnelle à la suite du passage de plusieurs motoneiges circulant en groupe ou par temps humide.
Zone 3
[168] Monique Ricard, Christian Auger, Andrée Nantel, Sylvie Robidoux, Gilles Labonté, Rita Rock et Tawence Rock résident dans la zone 3.
[169] Tous témoignent que, même à l'extérieur, le bruit ne les gêne pas. Le bruit à l'intérieur est occasionnel et à peine perceptible. M. Labonté, quant à lui, n'entend jamais de bruit à l'intérieur. Ils dorment généralement les fenêtres fermées et ne sont pas réveillés.
[170] Tawence Rock, à tout événement, ne sort pas sur son terrain l'hiver; ses enfants, par contre, y jouent les fins de semaine.
[171] Mme Ricard fait du ski la semaine et la fin de semaine préfère demeurer à la maison; à l'occasion lorsqu'elle sort, entre autres pour pelleter, le bruit ne la dérange pas.
[172] Mme Robidoux réside à Labelle et le bruit de la circulation de camions quittant ou se rendant à la scierie située non loin de chez elle la dérange plus que celui des motoneiges.
[173] Aucun des ces témoins ne se plaint de l'odeur.
Zone 5
[174] René Lecompte et Sophie Léonard résident dans la zone 5; le premier à St-Faustin et la seconde à Labelle.
[175] Ces personnes témoignent ne pas être dérangées par le bruit l'hiver.
[176] M. Lecompte garde les fenêtres de sa résidence fermées durant tout l'hiver. Il n'entend jamais le bruit des motoneiges à l'intérieur ou à l'extérieur; les sources de bruit qui le gênent proviennent des véhicules lourds qui circulent sur la rue principale et du terrain de jeu fréquenté par les enfants d'une garderie située non loin de chez lui.
[177] Mme Léonard, également, n'est jamais incommodée par le bruit.
[178] Ni l'un ni l'autre ne perçoivent l'odeur.
Les décomptes
[179] SNC Lavalin, Environnement (SLEI), Club de motoneiges diable et rouge Inc, Transport Québec et quelques Membres de la Coalition ont effectué des décomptes du trafic de motoneiges, soit par observation ou à l'aide d'un compteur électrique.
[180] SLEI, Club de motoneiges diable et rouge et Transport Québec y procèdent du 13 décembre au 31 décembre 2002, du 4 janvier au 15 mars 2003 et du 23 février au 4 mars 2004. Les relevés sont effectués au niveau du Domaine Lauzon au Lac-Carré, à l'intersection de la route 327 à St-Jovite et à l'intersection de la Montée Kavanagh à Mont-Tremblant.
[181] La période la plus achalandée de la saison s'étend du congé des Fêtes à la relâche scolaire, généralement au début du mois de mars.
[182] La journée du samedi est la plus achalandée : il passe en moyenne 300 à 700 motoneiges; les dimanches et les autres jours de congé, le trafic varie entre 150 et 650 passages; le vendredi, entre 240 et 612 passages sont notés durant la journée. Les journées de semaine sont moins achalandées; cependant, plus d'une centaine de passages sont dénombrés et parfois jusqu'à 300 pour une journée sont comptés. La nuit ou tard en soirée, le décompte indique une variation entre 3 et 24 passages et, à une occasion, 54 passages.
·
[183] Les Membres de la Coalition effectuent des décomptes l'hiver de l'année 2000 et celui de l'année 2004[47].
[184] Durant l'année 2000, ils ont lieu les fins de semaine des 15 et 16 janvier, 29 et 30 janvier, 5 et 6 février, 12 et 13 février, 19 et 20 février et 26 et 27 février, de 9 h à 19 h. Le nombre de passages enregistrés le samedi varie entre 523 et 874, et le dimanche entre 427 et 567, à l'exception des 26 et 27 février alors que, entre 90 et 260 motoneiges sont comptées; les observateurs indiquent que la fin de semaine du 26 et 27 février, la température élevée et la fonte de la neige rendent la circulation de motoneiges difficile.
[185] En 2004, ils ont lieu le vendredi, samedi et dimanche, de 8 h à 20 h aux dates suivantes : 31 janvier, 14, 15, 20 et 21 février. Le vendredi, le nombre de passages enregistrés varie entre 199 et 237; le samedi, entre 293 et 487 et le dimanche, entre 111 et 434.
[186] Également, le vendredi 16 et samedi 17 janvier 2004, un décompte est réalisé sur une période de 24 h : entre 476 et 528 passages sont notés. La période la plus achalandée se situe entre 11 h et 18 h; la nuit, soit entre 22 h et 7 h, le nombre de passages est de 7.
[187] Les relevés sont faits à Mont-Tremblant - Labelle, Mont-Tremblant - Village de la Conception Labelle, Mont-Tremblant - St-Jovite et St-Faustin.
[188] Agnès Renoux, Dr Robert A. Bertrand, Phat Nguyen, Chantal Laroche et Jean-Luc Allard témoignent à titre d'experts.
·
[189] Agnès Renoux est toxicologue et, à la demande de la Coalition, procède d'abord à une étude semi-qualitative du potentiel de risques à la santé reliés à l'émission de substances toxiques par les motoneiges sur la piste.
[190] Au mois d'août 2003, elle émet un avis toxicologique à l'effet qu'elle peut théoriquement représenter un risque toxicologique et être nuisible à la santé.
[191] Ensuite, elle procède, par voie de modélisation, à l'analyse de la situation aux abords de la piste et conclut, dans un rapport daté du 29 janvier 2004, que l'émission des principales substances produites par les motoneiges ne présente pas un risque significatif à long terme pour la santé des Membres.
[192] À court terme, en situation de trafic intense et à condition que les niveaux d'exposition soient suffisants, ces substances peuvent, en théorie, causer des inconvénients de la nature de ceux rapportés par certains témoins; l'absence de mesure sur place l'empêche cependant de conclure, à l'existence réelle d'un lien entre les deux.
·
[193] Robert A. Bertrand est médecin; il pratique en otologie et neuro-otologie jusqu'en 1992, alors qu'il cesse de pratiquer la chirurgie. Durant cette période il enseigne et assiste les résidants en oto-laryngologie en cours d'entraînement à l'Hôpital Notre-Dame.
[194] Ensuite, il devient consultant en otologie industrielle, notamment pour la Commission des accidents du travail. Ce travail l'amène à évaluer les effets du bruit en milieu de travail sur la santé des travailleurs, mais plus spécifiquement, quant à l'audition.
[195] Il n'a aucune formation en audiologie ou génie acoustique.
·
[196] Dr Bertrand soumet et produit un rapport daté du 13 avril 2004 qui porte sur l'impact du passage des motoneiges sur la qualité de vie des résidants à moins de 200 m de la piste. Les conclusions de son rapport n'ont cependant pas été retenues par le Tribunal.
[197] En premier lieu, Dr Bertrand a un profil de carrière impressionnant, mais l'expertise qu'il a acquise relève essentiellement du domaine médical. Or, la Coalition, tenant compte des conclusions de Mme Renoux, n'invoque plus les risques à la santé des Membres pouvant découler de la circulation sur la piste.
[198] De plus, Dr Bertrand fait des calculs et émet des conclusions en matière de mesures de bruit alors qu'il ne possède pas la formation pertinente.
[199] En second lieu, le rapport du Dr Bertrand de même que son témoignage constituent principalement une appréciation des opinions émises par les experts Laroche, Nguyen et Allard, de leur méthodologie et de leur choix de descripteur.
[200] Une telle démarche ne relève pas de l'expert dont le rôle consiste à aider le Tribunal en appliquant à un ensemble de faits des connaissances scientifiques particulières et en exprimant une opinion sur les conclusions que l'on peut en tirer[48]. Dr Bertrand procède à une démarche qui relève d'un Tribunal appelé à trancher entre des opinions divergentes d'experts.
·
[201] Il n'est pas contesté qu'il n'existe aucune norme quantitative spécifiquement applicable à la situation concernée.
[202] Les experts Nguyen, Laroche et Allard procèdent donc à des mesures de bruit, soit intérieur ou extérieur aux environs de la piste, comparent leurs résultats aux normes qu'ils jugent les plus appropriées dans les circonstances et émettent une opinion sur la présence ou non d'un bruit constitutif de nuisance.
·
[203] Phat Nguyen obtient un baccalauréat en génie mécanique de l'École polytechnique en 1974 et, en 1983, un diplôme d'études complémentaires.
[204] Il a été chef de groupe en technologie du bruit et des vibrations pour le Centre de technologie Noranda; par la suite, il devient président de Décibel consultant Inc. et de Produits Acoustiques P.N. Inc.
[205] Il est l'auteur de plusieurs publications sur le bruit et a enseigné en technique d'ingénierie et de contrôle du bruit, en gestion du bruit environnemental et en utilisation de matériaux acoustiques. Il a également contribué à l'élaboration de règlements sur la nuisance sonore pour plusieurs villes. Finalement, il a été chef de projet en gestion du bruit et calcul d'impact sonore et de conformité à la réglementation applicable pour Hydro-Québec, Bombardier, Canadair, le ministère des Transports du Québec et plusieurs villes.
[206] Depuis 1974, M. Nguyen a procédé à plusieurs études d'impact visant à évaluer les conditions sonores d'un milieu et à solutionner toute problématique reliée au bruit. Il effectue des relevés et des mesures de bruit depuis 25 ans.
[207] La Coalition lui demande de procéder à une étude de l'impact de la circulation de motoneiges sur l'environnement sonore des quartiers résidentiels avoisinant la piste; il produit son rapport daté de janvier 2003[49].
·
[208] Chantal Laroche obtient un baccalauréat en audiologie et orthophonie en 1984. Elle enseigne ces matières depuis 1985 et, depuis 1996, est professeure agrégée à l'École des sciences de la réadaptation, Faculté des sciences de la santé, à l'Université d'Ottawa. Elle est membre de plusieurs ordres et associations professionnelles incluant l'Ordre des audiologistes et des orthophonistes du Québec et de l'Ontario.
[209] Mme Laroche est l'auteure de plusieurs publications dans le domaine de l'acoustique portant, entre autres sur le bruit dans un contexte environnemental et de santé publique et sur la mesure de l'exposition à un tel bruit. Ces publications lui ont valu plusieurs distinctions universitaires.
[210] Mme Laroche a participé à plusieurs projets de recherche portant sur le bruit principalement en milieu de travail. Elle a également collaboré à l'élaboration de standards et à la conception de systèmes de mesures du bruit. Finalement, elle a aussi fait des études d'impact sonore pour Hydro-Québec.
[211] À la demande de la Coalition, elle analyse l'impact du bruit, sur la qualité de vie des résidants le long de la piste, notamment en ce qui a trait au sommeil, à la communication et à un effet de gêne et produit son rapport daté du 27 février 2003.
·
[212] Jean-Luc Allard est ingénieur en génie mécanique. Il a une formation générale en acoustique et, depuis 1982, travaille principalement dans le domaine de l'acoustique et de la qualité de l'air. En 1993, il devient vice-précisent de SLEI.
[213] Il est couramment appelé, dans le cadre de ses fonctions, à procéder à des études d'impact sur le bruit de même qu'à travailler sur des projets visant à réduire le bruit industriel et environnemental.
[214] Il reçoit mandat des défenderesses d'évaluer le climat sonore ambiant de la piste et les effets du bruit émis par les motoneiges et produit son rapport daté d'avril 2004.
Les mesures
[215] La pression sonore se mesure par l'unité de mesure logarithmique que constitue le décibel, identifié par dB. L'oreille étant plus sensible aux fréquences et variations du son, afin d'en tenir compte, un facteur de pondération est introduit lors de mesures du bruit et est indiqué par la lettre A. L'unité de mesure est donc identifié par dB ou dBA.
[216] L'échelle des mesures du son varie du seuil de d'audition (0 dB) au seuil de la douleur (140 dB).
[217] Les différents descripteurs de bruit sont :
L95 : |
représente la mesure du bruit de fond d'un milieu environnemental, c'est-à-dire la composante sonore continue et stable de ce milieu. Il est admis que Mme Laroche, sans que cela ne change le sens de son analyse, identifie erronément le bruit de fond par le descripteur LAmin; |
|
LAmax ou Lmax : |
représente le niveau maximum d'un bruit ponctuel ou niveau maximal de bruit mesuré; |
|
Leq ou Laeq global :
|
représente le niveau de bruit moyen calculé sur une période de mesure; entre autres : |
|
|
Leq 1 min : |
représente le niveau moyen de bruit pendant la période d'échantillonnage de 1 minute; |
|
Leq 24 h : |
représente le niveau moyen de bruit pendant la période d'échantillonnage 24 h. |
[218] M. Nguyen prend des mesures de bruit extérieur à huit points récepteurs le long de la piste; ces points sont identifiés à son rapport par les lettres « A » à « H ».
[219] Ils sont situés au 84, rue De l'Église à St-Faustin-Lac-Carré (point A), au 1189, rue Émond à Mont-Tremblant - St-Jovite (point B), au 167, Chemin des Boisés à Mont-Tremblant (point C) et au 637, du Moulin à Labelle (point D).
[220] Le point B est situé à une intersection.
[221] Les points récepteurs A, B, C et D sont répartis sur le 38 km de la piste à des distances variant entre 5 et 25 m de chaque côté. Des mesures de courte durée et de longue durée y sont prises. Les mesures de courte durée durent entre 45 minutes (min) et 1 h et celles de longue durée, 24 h.
[222] Les relevés de courte durée sont effectués le vendredi, 29 mars 2002 et dimanche, 5 janvier 2003 et ceux de longue durée, du samedi 28 au dimanche 29 décembre 2002 ainsi que du samedi 4 au dimanche 5 janvier 2003.
[223] Chaque passage de motoneiges faisant l'objet d'une mesure peut correspondre à celui d'une ou de plusieurs motoneiges.
[224] Des mesures de courte durée uniquement sont prises aux points récepteurs E, F, G et H. Les points E, F et G se trouvent dans la municipalité de Mont-Tremblant, de l'autre côté du Lac Mercier, et le point H dans la municipalité de St-Faustin, de l'autre côté du Lac-Carré, à des distances variant entre 325 et 500 m de la piste.
·
Le résultat des mesures de courte durée prises aux points A, B, C et D est le suivant[50] :
TABLEAU 1
Niveau ponctuel de bruit mesuré aux points récepteurs
No. |
Point récepteur |
Date des mesures |
Niveau de bruit de fond |
Nombre de motoneiges |
Duré du passage |
Niveau maximal de bruit mesuré |
Niveau de bruit équivalent* |
1 |
Point A |
29/3/2002 |
38 dBA |
2 |
28 sec |
86.0 dBA |
72.8 dBA |
2 |
(Figure 1) |
5/1/2003 |
35 dBA |
5 |
63 sec. |
79.7 dBA |
66.5 dBA |
3 |
|
|
|
2 |
37 sec. |
64.6 dBA |
54.5 dBA |
4 |
Point B |
29/3/2002 |
38 dBA |
2 |
83 sec. |
82.2 dBA |
69.3 dBA |
5 |
(Figure 1) |
|
|
5 |
54 sec. |
95.7 dBA |
82.0 dBA |
6 |
|
|
|
2 |
48 sec. |
81.6 dBA |
71.6 dBA |
7 |
|
5/1/2003 |
34 dBA |
3 |
42 sec. |
75.7 dBA |
67.1 dBA |
8 |
|
|
|
1 |
34 sec. |
80.1 dBA |
68.7 dBA |
9 |
Point C |
29/3/2002 |
37 dBA |
2 |
71 sec. |
77.9 dBA |
65.8 dBA |
10 |
(Figure 1) |
|
|
2 |
75 sec. |
77.0 dBA |
65.1 dBA |
11 |
Point D |
29/3/2002 |
35 dBA |
3 |
12 sec. |
85.2 dBA |
76.6 dBA |
12 |
(Figure 1) |
|
|
1 |
8 sec. |
78.9 dBA |
69.3 dBA |
13 |
|
|
|
1 |
9 sec. |
85.8 dBA |
74.4 dBA |
14 |
|
|
|
1 |
18 sec. |
80.5 dBA |
68.4 dBA |
15 |
|
|
|
1 |
9 sec. |
82.4 dBA |
71.6 dBA |
16 |
|
|
|
1 |
23 sec. |
83.1 dBA |
68.2 dBA |
17 |
|
|
|
1 |
17 sec. |
83.5 dBA |
70.4 dBA |
18 |
Point E (Figure 2) |
5/1/2003 |
22 dBA |
4 sur la piste |
224 sec. |
50.5 dBA |
41.3 dBA |
19 |
Point F |
5/1/2003 |
23 dBA |
2 sur la piste |
125 sec. |
58.7 dBA |
41.0 dBA |
20 |
(Figure 2) |
|
|
1 sur la piste |
73 sec. |
47.6 dBA |
38.3 dBA |
21 |
|
|
|
3 sur la piste |
105 sec. |
58.5 dBA |
48.7 dBA |
22 |
|
|
|
1 sur la piste |
62 sec. |
48.5 dBA |
41.0 dBA |
23 |
|
|
|
2 sur la piste |
120 sec. |
52.0 dBA |
42.3 dBA |
24 |
Point G |
5/1/2003 |
26 dBA |
2 sur la piste |
37 sec. |
55.1 dBA |
47.8 dBA |
25 |
(Figure 2) |
|
|
2 sur le lac |
25 sec. |
58.8 dBA |
52.4 dBA |
26 |
|
|
|
5 sur le lac |
41 sec. |
62.2 dBA |
52.6 dBA |
27 |
Point H |
5/1/2003 |
23 dBA |
1 |
7 sec. |
45.2 dBA |
41.2 dBA |
28 |
(Figure 3) |
|
|
5 |
20 sec. |
52.4 dBA |
45.5 dBA |
* : mesuré pendant la durée du passage d'une motoneige ou d'un groupe de motoneiges
[225] Aux points A, B, C et D, le bruit de fond varie entre 34 et 44 dBA, le niveau Lmax mesuré varie entre 64.6 dBA et 95.7 dBA et le Leq varie de 54.5 à 82 dBA. Un passage dure entre 9 et 84 secondes (s).
[226] Aux points E, F, G. et H, le bruit de fond varie entre 22 et 26 dBA, le Lmax entre 45.2 et 62.2 dBA et le Leq entre 38.3 et 48.7 dBA. Un passage dure en moyenne entre 7 s et 73 s bien que quelques passages se prolongent sur 105, 120, 125 et 334 s.
[227] En effet, les témoins en font état et les relevés de passage le confirment, souvent plusieurs motoneiges circulent l'une derrière l'autre.
[228] Ensuite, par une formule standard logarithmique, M. Nguyen convertit les résultats de courte durée obtenus aux points A, B, C et D et détermine le niveau de bruit correspondant au passage d'une seule motoneige.
[229] Les résultats sont à l'effet que le passage d'une seule motoneige génère un niveau de bruit équivalent variant entre 62.5 dBA et 70.2 dBA et un niveau de bruit équivalent horaire entre 45.5 dBA et 51.8 dBA. Le niveau de bruit le plus élevé se situe au point B, soit l'endroit où les mesures prises sont situées près d'une croisée de chemins.
·
[230] M. Nguyen rajoute également que « si le nombre de motoneiges circulant devant les points d'évaluation pendant une heure dépasse 1, les niveaux de bruit équivalent horaire […] seront augmentés par les facteurs suivants[51] »:
Nombre de motoneiges par heure |
Augmentation des niveaux de bruit équivalent horaire |
2 |
+ 3.0 dBA |
3 |
+ 4.8 dBA |
4 |
+ 6.0 dBA |
5 |
+ 7.0 dBA |
10 |
+ 10.0 dBA |
50 |
+17.0 dBA |
100 |
+ 20.0 dBA |
[231] En ce qui concerne les mesures de bruit de longue durée, elles démontrent, selon lui, ce qui suit[52] :
- le passage de motoneiges a été enregistré même très tard dans la nuit (3h00 ou 5h00 du matin);
- des niveau maximaux de bruit dépassant les 100 dBA ont été enregistrés au point B;
- les niveaux de bruit les plus élevés sont mesurés au point B;
- les niveaux de bruit équivalent 1 minute (Leq 1min.) varient de 60 à 80 dBA;
- les niveaux de bruit équivalent horaire de jour (7 h à 19 h) varient entre 50 et 70 dBA;
- les niveaux de bruit équivalent horaire de nuit (19 h à 7 h) dépassaient généralement 40 dBA.
·
[232] Chantal Laroche procède à des mesures de courte durée uniquement, et ce simultanément à l'extérieur et l'intérieur, pendant des périodes variant, selon le point récepteur, entre 6 et 23 min.
[233] Elle choisit, après deux visites de reconnaissance, de réaliser ses relevés aux mêmes points récepteurs A, B, C et D qu'utilise M. Nguyen.
[234] Les résultats de ces mesures sont les suivants[53] :
Tableau 1. Mesures au point A, chambre à l'étage, fenêtre fermée, 16 minutes (15h51-16h07)
|
Mesure intérieure |
Mesure extérieure |
Différence ext-int |
|
(dBA) |
(dBA) |
(dBA) |
LAeq global |
27.5 |
53.4 |
26 |
LAmax |
38 à 50 |
67 à 74 |
21 à 32 |
LAmin |
20 |
35 |
15 |
|
|
|
|
Différence max-min |
18 à 30 |
32 à 39 |
|
Tableau 2. Mesures au point B, chambre à l'étage, fenêtre fermée, 23 minutes (11h48-12h11)
|
Mesure intérieure |
Mesure extérieure |
Différence ext-int |
|
(dBA) |
(dBA) |
(dBA) |
LAeq global |
33 |
68 |
35 |
LAmax |
38 à 52 |
72 à 88 |
31 à 41 |
LAmin |
17 |
28 |
11 |
|
|
|
|
Différence max-min |
21 à 35 |
44 à 60 |
|
Tableau 3. Mesures au point B, salon, fenêtre fermée, 6 minutes (12h16-12h22)
|
Mesure intérieure |
Mesure extérieure |
Différence ext-int |
|
(dBA) |
(dBA) |
(dBA) |
LAeq global |
37 |
71 |
34 |
LAmax |
48 à 53 |
82 à 89 |
32 à 36 |
LAmin |
22 |
27 |
5 |
|
|
|
|
Différence max-min |
26 à 31 |
55 à 62 |
|
Tableau 4. Mesures au point C, chambre à l'étage, fenêtre fermée, 16 minutes (14h16-14h32)
|
Mesure intérieure |
Mesure extérieure |
Différence ext-int |
|
(dBA) |
(dBA) |
(dBA) |
LAeq global |
27 |
60 |
33 |
LAmax |
39 à 46 |
71 à 76 |
28 à 36 |
LAmin |
18 |
35 |
17 |
|
|
|
|
Différence max-min |
21 à 28 |
36 à 41 |
|
Tableau 5. Mesures au point C, chambre des maîtres, fenêtre fermée, 21 minutes (14h18-14h39)
|
Mesure intérieure |
Mesure extérieure |
Différence ext-int |
|
(dBA) |
(dBA) |
(dBA) |
LAeq global |
36 |
63 |
27 |
LAmax |
44 à 56 |
72 à 80 |
20 à 25 |
LAmin |
21 |
31 |
10 |
|
|
|
|
Différence max-min |
23 à 35 |
41 à 49 |
|
Tableau 6. Mesures au point C, corridor, fenêtre fermée, 10 minutes (14h39-14h49)
|
Mesure intérieure |
Mesure extérieure |
Différence ext-int |
|
(dBA) |
(dBA) |
(dBA) |
LAeq global |
36 |
63 |
27 |
LAmax |
50 à 54 |
77 à 80 |
25 à 27 |
LAmin |
23 |
32 |
9 |
|
|
|
|
Différence max-min |
27 à 31 |
35 à 48 |
|
Tableau 7. Mesures au point D, chambre, fenêtre fermée, 12 minutes (10h44-10h56)
|
Mesure intérieure |
Mesure extérieure |
Différence ext-int |
|
(dBA) |
(dBA) |
(dBA) |
LAeq global |
33 |
67 |
34 |
LAmax |
27 à 34 |
76 à 88 |
45 à 54 |
LAmin |
21 |
31 |
10 |
|
|
|
|
Différence max-min |
6 à 13 |
45 à 57 |
|
[235] Les LAmax notés aux tableaux 1 à 7 du rapport de Mme Laroche correspondent à un bruit de motoneige.
[236] Mme Laroche compare, tel qu'il appert au tableau qui suit, ses résultats et ceux de l'expert Nguyen. Elle conclut que les niveaux de bruit de fond et de LAmax enregistrés à l'extérieur par ce dernier et par elle-même sont généralement comparables[54].
Tableau 8. Comparaisons entre les données de Nguyen et Doan (2003) et celles du présent rapport aux points de mesures A, B, C et D.
Point récepteur |
Date des mesures (Nguyen et Doan, 2003) |
Niveau de bruit de fond |
Niveau maximal de bruit mesuré |
Dates des mesures (Laroche, 2003) |
Niveau de bruit de fond |
Niveau maximal de bruit mesuré |
Point A (Figure 1) |
29/3/2002 |
38 dBA |
86.0 dBA |
9/02/03 |
35 |
74 |
5/1/2003 |
35 dBA |
79.7 dBA |
|
|
|
|
|
|
64.6 dBA |
|
|
|
|
Point B (Figure 1) |
29/3/2002 |
38 dBA |
82.2 dBA |
9/02/03 |
28 |
89 |
95.7 dBA |
9/02/03 |
27 |
89 |
|||
81.6 dBA |
2/02/03 |
36 |
92 |
|||
5/1/2003 |
34 dBA |
75.7 dBA |
|
|
|
|
80.1 dBA |
|
|
|
|||
Point C (Figure 1) |
29/3/2002 |
37 dBA |
77.9 dBA |
2/02/03 |
31 |
80 |
|
9/02/03 |
35 |
76 |
|||
77.0 dBA |
9/02/03 |
32 |
80 |
|||
Point D (Figure 1) |
29/3/2002 |
35 dBA |
85.2 dBA |
9/02/03 |
36 |
88 |
78.9 dBA |
|
|
|
|||
85.8 dBA |
|
|
|
|||
80.5 dBA |
|
|
|
|||
82.4 dBA |
|
|
|
|||
83.1dBA |
|
|
|
|||
83.5 dBA |
|
|
|
[237] Les mesures rapportées à l'intérieur sont des mesures qui ont été prises avec fenêtres fermées sauf au point C où elles sont prises avec fenêtres ouvertes.
·
[238] Jean-Luc Allard, à partir d'un échantillonnage de motoneiges de différentes marques, vérifie d'abord la conformité du bruit généré par ces motoneiges à la réglementation applicable et, ensuite, l'effet de la propagation de ce bruit tenant compte de la distance de la piste et du facteur d'atténuation à l'intérieur d'une résidence.
[239] Le niveau sonore d'une motoneige construite après le 1er janvier 1972 ne doit pas être supérieur à 82 dBA lorsque mesuré à 15 m de la trajectoire, en accélération. Une motoneige est équipée, soit d'un moteur deux temps ou, plus récemment, d'un moteur quatre temps.
[240] Les essais s'effectuent sur un groupe de sept motoneiges dont cinq ont des moteurs à deux temps et, deux, des moteurs à quatre temps. Ils ont lieu en pleine accélération sur 30, 50 et 100 m ainsi qu'à une vitesse constante sur 200 m.
[241] À l'exception d'une, elles respectent toute la norme réglementaire d'émission sonore de 82 dB. Les motoneiges à moteurs deux temps ont un niveau d'émission sonore moyen de 82 dB et les moteurs quatre temps inférieurs de 5 à 8 dB.
[242] Des essais complémentaires effectués sur un terrain plat sans obstacle montrent, selon M. Allard, une diminution moyenne de 7 dB en doublant la distance, et ce, pour les deux types de moteur. Ainsi, le niveau sonore maximum est de 75 dB à 30 m, 61 dB à 120 m et 54 dB à 240 m.
[243] Le niveau sonore maximum d'une motoneige à moteur quatre temps est plus faible en accélération que celui d'une motoneige à moteur deux temps, mais il est comparable à des vitesses de 30 et 70 km/heure (km/h). Une motoneige qui circule de 30 à 70 km/h émet des niveaux sonores maximums inférieurs à ceux en accélération; cependant une motoneige qui circule à 100 km/h produit des émissions sonores inférieures ou identiques à une motoneige en accélération.
·
[244] Ensuite, les mesures du climat sonore sont effectuées à des points récepteurs qui correspondent à 7 bornes kilométriques.
[245] Ces bornes sont déterminées en fonction d'une caractérisation du milieu selon la densité d'habitations, les limites de vitesse affichées et la présence d'autres sources de bruit. Elles sont situées au Lac-Carré, au Domaine Lauzon, sur la rue Émond, à Mont-Tremblant Village, au Lac Mercier et sur le chemin Labelle entre le Lac Mercier et Labelle.
[246] Généralement, ce sont des milieux urbains où la vitesse affichée sur la piste est de 30 km/h, à l'exception du point de mesure situé au 103, Chemin Labelle. À cet endroit, la piste traverse une zone rurale et circule en parallèle au Chemin Labelle; la densité d'habitations y est très faible et la vitesse affichée est de 70 km/h.
[247] Les mesures sont prises à des distances variant de 15 à 160 m du centre de la piste et chaque mesure prise correspond au passage d'une seule motoneige.
[248] M. Allard effectue des mesures de courte durée, typiquement 1 h et des mesures de longue durée sur 24 h. Les premières ont lieu, du vendredi 7 mars au dimanche 9 mars 2003 et du vendredi 14 mars au dimanche 16 mars 2003; les secondes sont effectuées, du lundi 10 mars au jeudi 13 mars 2003 et du dimanche 16 mars au samedi 22 mars 2003.
[249] Les résultats de mesures obtenues sont les suivants[55] :
Borne Kilométrique |
Lieu |
Distance De la piste (m) |
Début du relevé |
Durée |
Niveau sonore (dBA) ___________________________________________________________________
|
Source sonore |
|||||||||||||||||||||||||||
69-1 69-2 69-3 69-4 |
Lac-Carré |
27 50 90 24 |
Vendredi 7 mars 2003 à 17h00 Vendredi 7 mars 2003 à 13h36 Vendredi 7 mars 2003 à 14h30 Vendredi 7 mars 2003 à 16h05 |
24h 3h 1h 1h |
28 à 56 48 à 51 50 56 |
40 à 78 71 à 78 73 75 |
21 à 40 29 à 34 41 34 |
51 -- -- -- |
38 -- -- -- |
49 -- -- -- |
50 -- -- -- |
Motoneiges et circulation automobile |
|||||||||||||||||||||
76-1 76-2 76-3 76-5 76-6 76-7 76-9 76-1b |
Domaine Lauzon |
34 50 100 25 50 100 25 20 |
Samedi 8 mars 2003 à 19h07 Dimanche 9 mars 2003 à 14h36 Dimanche 9 mars 2003 à 15h00 Dimanche 9 mars 2003 à 14h45 Dimanche 9 mars 2003 à 12h23 Dimanche 9 mars 2003 à 11h35 Dimanche 9 mars 2003 à 13h00 Lundi 10 mars 2003 |
23h 3h 2h 2h 2h 2h 1h 4 jours |
23 à 46 40 à 44 39 à 45 46 à 49 48 à 49 47 à 48 49 22 à 50 |
41 à 79 65 à 70 58 à 72 70 à 72 69 à 71 69 69 31 à 86 |
19 à 33 26 à 31 30 31 à 33 33 à 34 28 à 33 34 19 à 37 |
42 -- -- -- -- -- -- 44 à 45 |
33 -- -- -- -- -- -- 36 à 39 |
41 -- -- -- -- -- -- 42 à 44 |
43 -- -- -- -- -- -- 45 à 47 |
Motoneiges et circulation automobile |
|||||||||||||||||||||
83-1 83-2 |
Émond |
22 56 |
Vendredi 14 mars 2003 à 13h24 Samedi 15 mars 2003 à 14h19 |
26h 1h |
23 à 59 47 |
36 à 93 74 |
20 à 31 30 |
51 -- |
41 -- |
49 -- |
51 -- |
Motoneiges et circulation automobile |
|||||||||||||||||||||
91 |
Mont-Tremblant-Village |
35 |
Vendredi 14 mars 2003 à 14h58 |
25h |
44 à 65 |
69 à 87 |
28 à 37 |
63 |
55 |
61 |
64 |
Circulation automobile et motoneiges lorsqu'il n'y a pas de circulation |
|||||||||||||||||||||
93-1 93-1 93-2 93-3 |
Lac Mercier |
14 14 30 50 |
Vendredi 14 mars 2003 à 16h35 Dimanche 16 mars 2003 Samedi 15 mars 2003 à 9h47 Samedi 15 mars 2003 à 10h54 |
47h 6 jours 1h 1h |
22 à 58 20 à 58 46 47 |
34 à 85 33 à 89 73 66 |
18 à 32 19 à 36 19 23 |
55 47 à 51 -- -- |
44 26 à 42 -- -- |
53 45 à 50 -- -- |
54 46 à 52 -- -- |
Motoneiges et circulation automobile |
|||||||||||||||||||||
103 |
Labelle |
160 |
Dimanche 16 mars 2003 à 19h00 |
23h |
30 à 48 |
50 à 79 |
19 à 36 |
44 |
38 |
43 |
46 |
Circulation automobile et motoneiges |
|||||||||||||||||||||
105-1 105-2 105-3 |
Labelle |
30 100 12 |
Samedi 15 mars 2003 à 17h00 Dimanche 16 mars 2003 à 13h52 Dimanche 16 mars 2003 à 15h12 |
24h 1h 2h |
32 à 51 47 58 à 60 |
45 à 75 66 93 |
29 à 40 38 37 à 38 |
48 -- -- |
41 -- -- |
46 -- -- |
49 -- -- |
Motoneiges et circulation automobile |
|||||||||||||||||||||
*: Les heures manquantes ont été supposées égales à la valeur moyenne de la période |
[250] La principale source de bruit enregistré aux points de mesures résulte du passage de motoneiges, à l'exception de la borne kilométrique 91 située à Mont-Tremblant Village. Dans ce cas, la piste est située plus bas que le chemin principal et le bruit dominant, lors des mesures soit un vendredi soir, est celui des automobiles.
[251] Le bruit de fond varie entre 13 dBA et 41 dBA, le Lmax entre 31 et 93 dBA et le niveau de bruit équivalent entre 22 et 65 dBA.
[252] Finalement, le trafic pendant les périodes de mesures est le suivant :
Kilomètre |
Date |
Heure |
Motoneige |
69 - Lac-Carré |
vendredi, 7 mars 2003 au samedi, 8 mars 2003 |
à 16 h
à 16 h en 24 heures |
350 |
|
entre 22 h et 7 h |
3 |
|
76 - Domaine Lauzon |
|
en 23 heures |
294 |
|
entre 22 h et 7 h |
18 |
|
91 - Mont Tremblant Village |
vendredi, 14 mars |
entre 21 h 15 et 22 h 15 |
10 |
samedi, 15 mars |
entre 13 h 50 et 15 h 30 |
83 |
|
entre 1 h 40 et 2 h 40 |
0 |
||
- rue Émond |
vendredi, 14 mars |
entre 19 h 45 et 20 h 45 |
2 |
samedi, 15 mars |
entre 0 et 1 h 25 |
1 |
|
entre 13 h 50 et 15 h 30 |
83 |
||
93 - Lac Mercier |
vendredi, 14 mars 2003 |
entre 22 h 30 et 23 h 30 |
2 |
samedi, 15 mars 2003 |
entre 2 h 50 et 3 h 55 |
0 |
|
entre 9 h 43 et 12 h |
72 |
||
entre 20 h 50 et 21 h 50 |
5 |
||
dimanche, 16 mars 2003 |
entre 13 h 33 et 14 h 35 |
36 |
|
103 Chemin Labelle |
samedi, 15 mars 2003 |
entre 19 h et 23 h |
0 |
dimanche, 16 mars 2003 |
entre 1 h 12 et 2 h 12 |
1 |
|
14 h 55 et 15 h 55 |
21 |
||
105, Chemin Labelle |
samedi, 15 mars 2003 |
entre 21 h 04 et 22 h 04 |
16 |
dimanche, 16 mars 2003 |
entre 13 h 55 et 15 h 04 |
38 |
|
entre 15 h 20 et 17 h 07 |
20 |
La comparaison des résultats aux normes par les experts
[253] La plupart des municipalités avoisinant le Parc Linéaire, à l'exception de St-Jovite et Mont-Tremblant, ont adopté des règlements qui réfèrent à une norme qualitative, c'est-à-dire établissant des conditions au bruit constituant une nuisance.
[254] Le libellé de ces règlements est similaire et stipule que[56] « le fait de faire, de provoquer ou d'inciter à faire, de quelque façon que ce soit, du bruit susceptible de troubler la paix, la tranquillité, le confort, le repos, le bien-être des citoyens ou de nature à empêcher l'usage paisible de la propriété dans le voisinage, constitue une nuisance et est prohibé ».
[255] La ville de St-Jovite prévoit un niveau sonore maximal mais dans une zone industrielle; le Règlement 2003-53 de la ville de Mont-Tremblant est d'application générale et fixe la limite de bruit à l'extérieur entre 22 h et 7 h à un Leg 60 min de 60 dBA. Ce règlement n'inclut aucune disposition spécifiquement applicable au bruit de motoneiges.
·
[256] La MRCL ne possède pas de règlement spécifique sur les nuisances.
·
[257] Les experts procèdent donc, à partir de guides, recommandations ou réglementations autres[57] à déterminer le paramètre descripteur comparatif qui leur paraît être le plus représentatif de la gêne associée à au bruit environnemental.
·
[258] M. Nguyen adopte deux approches.
[259] Selon M. Nguyen, ses mesures démontrent, à l'extérieur. un dépassement hors norme du niveau de bruit ponctuel, soit le Lmax mesuré par rapport au bruit de fond.
[260] Ce dépassement est de 24 à 58 dBA pour les points récepteurs A, B, C et D, et de 22 à 35 dBA pour les points récepteurs E, F, G et H.
[261] M. Nguyen souligne, et cela n'est pas remis en question, que la perception suggestive d'un bruit dépend de son dépassement par rapport au niveau de bruit de fond et un changement de 5 dB est considéré significatif. Le tableau suivant le démontre[58] :
Perception du bruit |
Dépassement par rapport au bruit de fond |
2 fois plus fort |
10 dBA |
4 fois plus fort |
20 dBA |
8 fois plus fort |
30 dBA |
16 fois plus fort |
40 dBA |
32 fois plus fort |
50 dBA |
64 fois plus fort |
60 dBA |
[262] Également, M. Nguyen compare ses résultats aux normes quantitatives incluses à la note d'instruction 98-01 du ministère de l'Environnement du Québec qui est, en résumé, la suivante[59] :
3.2.3. Note d'instruction 98-01 du ministère de l'Environnement du Québec
Le ministère de l'Environnement du Québec (MENV) a préparé une Note d'instruction 98-01, publiée en 1998. Cette dernière stipule, pour le sources fixes, des niveaux sonores maximums à ne pas dépasser en fonction des zones décrétées aux termes des règlements de zonage municipaux. Ces niveaux sonores (Leq 1 h) servent de lignes directrices aux interventions de MENV. Une source fixe réfère à un procédé ou un établissement industriel susceptible d'émettre un bruit quelconque dans l'atmosphère.
La note d'instruction 98-01 stipule que le niveau sonore maximum des sources fixes sera inférieur, en tout temps et en tout point de réception du bruit, au plus élevé des niveaux sonores suivants :
1. Niveaux sonores maximaux permis en fonction de la catégorie de zonage (40 à 70 dBA).
2. Niveau sonore égal au niveau ambiant mesuré au même endroit lors de l'arrêt complet des opérations de l'entreprise.
Le ministère de l'Environnement du Québec stipule clairement que « ces critères ne s'appliquent pas à une source de bruit en mouvement sur un chemin public.
[263] M. Nguyen compare ses résultats de mesures avec les limites de 45 dBA le jour (7 h à 19 h) et de 40 dBA la nuit (19 h à 7 h) applicables à une zone sensible zonée catégorie 1, habitations unifamiliales isolées ou jumelées.
[264] Il explique son choix par le fait que ces limites sonores sont normalement utilisées dans des études d'impact sonore lorsque la ville ou la municipalité concernée par l'étude de bruit ne possède pas un règlement quantitatif sur le bruit. Également selon lui, le Parc Linéaire peut être considéré chemin privé.
[265] Il conclut que, dans l'ensemble, ses résultats de mesures, incluant celles correspondant au passage d'une motoneige, dépassent ces limites.
·
[266] Mme Laroche choisit de comparer ses résultats de mesures à diverses recommandations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Son choix est orienté en fonction du fait qu'elles ont fait l'objet d'un consensus internationale en 2000 (WHO 2000), s'appuient sur plus de 350 références scientifiques portant sur les effets du bruit sur la santé et, également, plusieurs articles de fond publiés par des experts sur les méfaits du bruit tant canadiens, qu'américains, français et hollandais y réfèrent.
[267] Selon Mme Laroche, le bruit est un bruit intermittent, c'est-à-dire qu'il se produit à des intervalles réguliers ou irréguliers par opposition à un bruit toujours régulier.
[268] Dans le cas d'une source de bruit répétitive avec variance, c'est-à-dire de bruit ponctuel variable, il faut tenter de mesurer l'impact immédiat et imprévisible du bruit concerné. Le LAeq, qui a pour effet de répartir le bruit sur une période de temps, respecte la réalité pour un bruit continu, mais la respecte moins pour un bruit ponctuel puisqu'il dilue ses effets.
[269] La différence entre le LAmax et le bruit de fond permet de vérifier, de façon plus précise, l'impact réel du bruit concerné et, selon Mme Laroche, une différence de plus de 15 dB entraîne une gêne. De plus, la durée et le nombre d'événements doivent aussi, dans l'appréciation de l'impact, entrer en ligne de compte permettant d'évaluer la fréquence d'un effet de gêne.
[270] Le nombre d'événements qui entraînent des émergences dépassant 15 dBA (différence entre LAmax et bruit de fond) est donc un facteur à considérer pour déterminer s'il y a nuisance. Le LAmax permet de mieux apprécier un bruit distinct.
[271] Également en ce qui a trait aux effets du bruit sur le sommeil, Mme Laroche compare ses mesures aux recommandations de l'OMS en matière de bruit non continu. À ce sujet, elle écrit[60] :
Lorsque le bruit n'est pas continu (comme c'est le cas avec les motoneiges), les niveaux maxima ne devraient pas dépasser 45 dBA, lorsque le niveau de bruit ambiant est de l'ordre de 30 dBA. On parle alors d'une différence inférieure à 15 dB, afin de protéger le sommeil des résidants. Par ailleurs, pour assurer un sommeil réparateur, le nombre d'événements sonores imprévus de près de 45 dBA max ne devraient pas apparaître plus de 10 à 15 fois par nuit. Les experts internationaux ajoutent aussi que lorsque le niveau ambiant est inférieur à 30 dBA, il faudrait abaisser la limite de 45 dBA max et tenter de respecter une différence inférieure à 15 dB. Ceci est encore plus important lorsque les gens exposés sont âgés (WHO, 2000, Laroche et al., 2003).
[272] Quant à son analyse comparative[61] :
Les données recueillies aux quatre points récepteurs le long du Parc linéaire du Petit-Train-du-Nord sont claires. Toutes les valeurs enregistrées à l'intérieur des chambres à coucher des résidences du point A, B et C dépassent largement les limites recommandées par l'OMS pour assurer un sommeil réparateur. Les niveaux maxima dépassent dans plusieurs cas le 45 dBA max recommandés par l'OMS. Par ailleurs, les différences entre le bruit ambiant et les niveaux maxima sont toutes supérieures à 15 dB, et atteignent même souvent des différences de plus de 25 dB. Lorsque les fenêtres sont entrouvertes, la situation est encore pire. L'ensemble des valeurs ont été enregistrées le jour, mais le rapport de Nguyen et Doan (2003) démontrent clairement que les motoneiges passent à toute heure du jour et de la nuit. Il y a moins de passages le soir et la nuit, mais la quantité de ces passages est suffisante pour perturber de façon significative le sommeil des résidants.
Il est important d'ajouter que les passages de motoneiges ont des durées variant entre 7 et 84 secondes, selon les mesures effectuées aux points A, B, C et D par Nguyen et Doan (2003). Ainsi, lors du passage d'une ou de plusieurs motoneiges, les niveaux sonores atteignent un niveau maximum quelque part entre 7 et 84 secondes. Le niveau du bruit augmente avant d'atteindre ce maximum et s'abaisse ensuite à l'intérieur de cette période de temps. Si cette période est courte (ex. 7 sec.), le niveau passe du niveau de bruit ambiant au niveau maximum en près de 3-5 secondes (soit une élévation de près de 30 dB dans plusieurs cas), ce qui est suffisant pour provoquer une réaction de sursaut chez les résidants et provoquer leur éveil, et ce plusieurs fois par nuit. Si la période associée au passage d'une ou plusieurs motoneiges est longue (ex. 84 sec.), le niveau augmente et peut rester élevé selon le nombre de motoneiges qui passent en même temps, pour ensuite chuter graduellement à mesure que les motoneiges s'éloignent. Dans ce cas, la variation de 30 dB se fait sur une période beaucoup plus longue. Le bruit est donc perçu tout au long de cette période, ce qui rend l'impact sur le sommeil d'autant plus important.
[273] Elle constate en effet que la mesure du bruit intérieur avec fenêtre ouverte au point C, fait augmenter la différence entre le LAmax et le bruit de fond de 31 à 41 dB. La réduction des niveaux sonores de l'extérieur vers l'intérieur des résidences s'explique par le facteur d'atténuation qui entre alors en jeu. Les experts s'entendent qu'il est en moyenne de 25 à 27 dB. À tout événement, les atténuations constatées par M. Allard et Mme Laroche sont à peu près du même ordre.
[274] Selon les mesures de Mme Laroche, les LAmax comparativement au 45 dBA recommandé par l'OMS atteignent des valeurs entre 56 et 66 dBA alors que le niveau de bruit de fond est d'environ 25 dBA.
[275] Quant à l'impact du bruit sur la communication verbale, son opinion est la suivante :
à l'intérieur[62] :
En présence d'un bruit ambiant de l'ordre de 20-30 dBA à l'intérieur de leur domicile, les gens ajustent leur système de sons ou leur téléviseur à un niveau confortable d'écoute de l'ordre de 50 dBA. Lorsqu'il y a un passage de motoneige qui engendre des niveaux qui peuvent dépasser 50 dBA à l'intérieur, on se retrouve dans une situation où le niveau de la musique ou de la parole est identique à celui du bruit. […] Les experts (WHO, 2000; Laroche et al., 2003) précisent que pour assurer une communication verbale adéquate, le niveau de bruit ambiant doit être inférieur à 35 dBA et le rapport signal sur bruit doit être de l'ordre de 15 dB. Ce rapport peut même être supérieur à 15 dB pour les personnes qui présentent des atteintes auditives (ex. personnes âgées). Ainsi, si le bruit ambiant monte subitement à 50 dBA lors du passage d'une ou de plusieurs motoneiges, les résidants n'ont pas le choix que de hausser le volume d'au moins 15 dB (donc à 65 dBA) pour continuer de comprendre les messages verbaux.
et concernant la situation à l'extérieur[63] « chaque passage de motoneige peut induire des niveaux de bruit entre 67 et 92 dBA, selon la localisation des résidences. Il est pratiquement impossible de communiquer pendant ces périodes de bruit ».
[276] Finalement, en ce qui a trait aux effets de gêne découlant du bruit, elle explique qu'ils peuvent découler d'une multitude de facteurs acoustiques et non-acoustiques tels que les niveaux de bruit, les variations dans le bruit et la grande différence des réactions entre les individus face au bruit. Malgré la difficulté à rendre compte d'une gêne associée au bruit, les experts s'entendent en ce qui a trait aux niveaux de bruit continu[64] : « que peu de gens seront sérieusement gênés par des Laeq inférieurs à 55 dBA ou modérément gênés à des Laeq de moins de 50 dBA. Ces niveaux devraient être corrigés de 5 à 10 dB le soir et la nuit ».
[277] Ainsi, elle conclut que, même en attribuant une norme applicable en matière de bruit continu, donc une mesure répartie sur une plus longue période[65], « dans le cas des motoneiges qui nous préoccupent, tous les niveaux de bruit supérieurs à 50 dBA le jour et à 40 dBA la nuit sont susceptibles de gêner modérément ou sévèrement les résidants […] ».
[278] L'ensemble des témoignages décrivant les effets ressentis par les résidants en réaction au bruit traduit, selon Mme Laroche, une situation où vraisemblablement les émergences de bruit dépassent 15 dBA et il y a urgence à agir. Les données recueillies dépassent les limites acceptables pour assurer un sommeil de qualité, ne pas interférer dans la communication et éviter l'effet de gêne.
·
[279] M. Allard, en choisissant les normes qui lui serviront de paramètres de comparaison avec le résultat de ses mesures de bruit, tient compte des éléments suivants :
· la norme doit être raisonnable et facile à appliquer, tenant compte que la tolérance au bruit est suggestive;
· la revue des divers guides, recommandations et règlements en matière de bruit[66] révèle que le descripteur longue durée Leq est le plus utilisé pour représenter la gêne associée au bruit environnemental de même qu'en matière de bruit communautaire; le critère de nuit est plus restrictif que le jour;
· le bruit communautaire se divise en quatre catégories : le bruit perçu sur une base régulière; le bruit sporadique associé à la nuisance publique limitée dans le temps et l'espace; la circulation aérienne et ferroviaire; le bruit de certains produits manufacturiers;
· la circulation aux abords d'autoroutes, de rues et de pistes de motoneiges se classe dans la première.
· la circulation de motoneiges s'apparente à la circulation routière puisque le bruit qu'elle émet peut être variable.
[280] M. Allard retient, en premier lieu, la norme de 55 dBA, Leq 24 h énoncée dans la politique sur le bruit routier développée en 1998 par le ministère des Transports. Cette norme vise une source mobile sur un chemin public, comme en l'occurrence les motoneiges.
[281] Le Leq 24 h permet, selon lui, de couvrir des variables dans le temps dont le nombre de passages de motoneiges, sans diluer l'intensité d'un bruit ni l'effet de la fréquence des passages et faire disparaître les Lmax, puisqu'il s'établit selon une moyenne logarithmique. Les études d'impact se font à l'aide de ce paramètre.
[282] En second lieu, il retient les niveaux sonores inclus aux lignes directrices nationales visant la limitation du bruit extérieur émises par le Comité consultatif fédéral-provincial de l'hygiène du milieu de travail (Comité consultatif), en modifiant les heures de coupure; il retient également l'indice utilisé par l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis (US EPA), dont la norme est comparable aux lignes directrices nationales du Comité consultatif.
[283] Ainsi, il utilise les comparables suivants[67] :
· Leq 7 h - 22 h = 55 dBA à l'extérieur
· Leq 22 h - 7 h = 50 dBA à l'extérieur
· Leq 22 h - 7 h = 40 dBA à l'intérieur (chambre à coucher)
· Leq 22 h - 7 h = 45 dBA à l'intérieur (bureau, salle de séjour).
[284] M. Allard commence son analyse en convertissant en Leq 24 h les niveaux de bruit ponctuels relevés dans le cadre de ses essais sur des motoneiges et il conclut que[68] :
Pour des motoneiges conformes au Règlement sur la motoneige, circulant à plus de 70 km/h ou en pleine accélération, le niveau sonore équivalent journalier de 55 dBA serait dépassé à 15 m les samedis en raison de l'achalandage accru. En s'éloignant, le niveau sonore diminue en dessous à 55 dBA et peu de gens devraient être gênés par le bruit des motoneiges. Les zones où le niveau dépasse 55 dBA seraient limitées à moins de 30 m des intersections où les motoneiges pourraient être en pleine accélération et à 15 m du sentier à plus de 70 km/h lorsqu'il y a 650 passages et plus, soit principalement le samedi pendant la période de pointe d'utilisation des motoneiges.
[285] En appliquant sur ces résultats un niveau d'atténuation de l'extérieur vers l'intérieur de 27 dBA, tel que recommandé par l'EPA lorsque les fenêtres sont fermées, il conclut que les résultats à l'intérieur rencontreraient les critères proposés par le Comité consultatif.
[286] Les niveaux sonores équivalents (Leq) mesurés entre 14 et 160 m de la piste sont également inférieurs à 55 dBA le jour (7 h à 22 h) et 45 dBA la nuit (22 h à 7 h), sauf au kilomètre - 91, c'est-à-dire à Mont-Tremblant Village, en raison du bruit de la circulation des automobiles. Le bruit ambiant est donc conforme aux critères retenus dans son étude.
[287] Ensuite, il évalue les conséquences du bruit des motoneiges sur la communication, l'effet de gêne et sur le sommeil.
[288] À l'extérieur, il reconnaît une interférence temporaire; l'intelligibilité serait réduite à - 95% dans les situations suivantes :
· à 240 m et moins de la piste, en accélération ou en vitesse supérieure à 100 km/h;
· à 120 m et moins de la piste, avec une vitesse de 70 km/h;
· à 60 m et moins de la piste, de façon générale, avec une vitesse de 30 km/h.
[289] À l'intérieur, elle est, selon lui, complète, compte tenu du facteur d'atténuation.
[290] En ce qui a trait à l'effet de gêne, il se réfère aux recommandations de l'OMS et de l'EPA en matière de bruit continu et il conclut qu'à l'exception du point de relevé 91, ses relevés de bruit sont inférieurs ou égaux à 55 dBA (Leq 16 h) le jour, et 45 dBA (Leq 8 h) la nuit. Les Ldn sont aussi inférieurs à 55 dBA et donc il n'y a pas contravention à ces normes.
[291] Finalement, en ce qui concerne la perturbation du sommeil[69] :
Pour une bonne nuit de sommeil, le niveau sonore intérieur ne devrait pas dépasser un niveau approximatif Lmax de 45 dBA, 10 à 15 fois par nuit, et […] un niveau sonore Leq de 30 à 35 dBA ne devrait pas être dépassé pour les bruits continus.
Pour un niveau sonore maximum Lmax de 45 dBA à l'intérieur, le niveau sonore extérieur devrait être de 72 dBA en considérant une atténuation type de 27 dBA (fenêtre fermée) de l'extérieur vers l'intérieur. Le niveau sonore Lmax du passage des motoneiges, conforme au Règlement sur la motoneige, atteint 82 dBA à 15 m. Ces niveaux sont de nature à perturber le sommeil à proximité de la piste, mais cela dépend de la distance et des conditions d'utilisation.
[…]
Selon les données recueillies, qui sont limitées, le nombre de passages de motoneiges la nuit est compris entre 3 et 24, sauf à une exception avec 54 passages.
[292] Aussi, s'appuyant sur les critères émis par l'OMS, M. Allard conclut qu'une perturbation du sommeil est possible dans le cas du non-respect des vitesses affichées et, pour les résidences isolées situées, à moins de 30 m alors que la vitesse affichée est de 70 km/h.
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[293] La différence dans les conclusions de Mme Laroche et celles de M. Allard, en ce qui a trait à l'effet de gêne engendré par le bruit malgré une comparaison avec la même norme, se comprend par le fait qu'ils n'utilisent pas les mêmes descripteurs au niveau des mesures.
[294] La norme qui tient compte d'un bruit intermittent par opposition à un bruit continu, c'est-à-dire une norme qui utilise un paramètre comparable de plus courte durée ou qui tient compte du dépassement d'un bruit de fond, paraît la plus raisonnable dans les circonstances.
·
[295] Les auteurs en matière de bruit soulignent l'importance de choisir avec soin les descripteurs afin qu'ils rendent compte avec exactitude du niveau d'irritation engendrée par un bruit.
[296] Dans Proceedings of the 8th International Congress of Noise as a Public Health Problem, il est souligné que[70] « it is well established that the temporal distribution of noises, their maximum levels, emergences, numbers, repetitions, and durations have a considerable influence on the human response ».
[297] Le descripteur doit donc être en mesure de rendre compte de ces éléments, avec le plus de fiabilité.
[298] Dans The Noise Manual Fifth Edition[71], il est écrit que « the day-night average sound level (DNL) […] and normalized DNL work best to characterize the long-term acoustical character of a community as influenced by noise sources that are continually present as steady-state sounds or frequently occurring events over most of the day every day. DNL does not work well for infrequently occurring loud sounds that may be disturbing to a community without strongly affecting the long-term average sound level ».
[299] De plus[72], « in some cases, the use of DNL will underestimate community reaction. This is most likely when the sound occurs only occasionally (once a day or less) in short periods of loud sound not typical for the community. [..] This can be a particular problem if the noise occurs during evening or weekend periods when people are home and possibly trying to enjoy the outdoors. It is better in these cases to use actual sound levels during the events, rather that the DNL […] ».
[300] La Norme internationale ISO 1996-1, acoustique - description mesurage et évaluation du bruit de l'environnement[73] associe le bruit continu, par exemple, au bruit d'un transformateur ou d'un ventilateur.
[301] En ce qui concerne l'impact sur le sommeil, les auteurs affirment que l'évaluation de l'existence ou non d'une nuisance doit se faire tenant compte qu'il doit être possible de dormir avec une fenêtre légèrement ouverte.
[302] Également dans Guidelines for Community Noise, on précise que si[74] « the noise is not continuous, sleep disturbance correlates best with LAmax and effects have been observed at 45 dB or less. This is particularly true if the background is low. […] To prevent sleep disturbances, one should thus considered the equivalent sound pressure level and the number and level of sound events. […] Therefore, the guidelines should be based on a combination of values of 30 dB LAeq,8h and 45 dB LAmax . […] Sleep disturbance from intermittent noise events increases with the maximum noise level. Even if the total equivalent noise is fairly low, a small number of noise events with a high maximum sound pressure level will affect sleep ».
[303] Quant à l'effet de gêne[75] « noise measures based solely on LAeq values do not, adequately characterize most noise environment and do not adequately assess the health impacts of noise on human well-being. It is also important to measure the maximum noise level and the number of noise events when deriving guideline values ».
·
[304] Le bruit ne correspond pas à la description d'un bruit continu décrit aux publications spécialisées en la matière.
[305] Les relevés de bruit montrent qu'il se manifeste à des fréquences et pour des durées de temps variable d'une journée à l'autre ou même à l'intérieur d'une journée.
[306] Les témoins décrivent un bruit strident, soudain et intermittent. Il ne s'agit pas d'un bruit constant : la fréquence et le rapprochement de ses manifestations à l'occasion peuvent donner une impression de constance.
[307] L'évaluation du climat sonore de la piste doit donc, de préférence, se faire en fonction de données comparatives applicables en matière de bruit intermittent, mais récurrent et non pas continu.
·
[308] Les critères de référence et descripteurs de longue durée utilisés par M. Allard pour fins de comparaison s'appliquent, principalement en matière de bruit continu auquel est souvent associé le bruit routier. La nuit, ses critères tiennent compte de situation où l'on dort les fenêtres fermées, ce qui n'est pas recommandé dans la littérature spécialisée.
[309] L'estimation de M. Allard de la moyenne d'atténuation du bruit de 7 dBA lorsque la distance double est fondée sur des essais en terrain plat, ce qui n'est pas nécessairement la situation aux abords de la piste.
[310] De plus, ses estimations se concilient difficilement avec le résultat de ses mesures qui ne démontrent pas une telle réduction à des distances éloignées.
[311] La vitesse et la conformité ou non à la norme d'émission sonore ont, en toute vraisemblance, un impact.
[312] Également, il ne tient pas compte, au niveau des mesures, de l'impact de la circulation de plusieurs motoneiges à la fois puisque chacune de ses mesures correspond au passage d'une seule motoneige et ce résultat est ensuite réparti sur une période de longue durée.
[313] Or, ce n'est pas la situation sur la piste; la preuve prépondérante démontre que les motoneiges circulent souvent plusieurs à la fois.
[314] M. Nguyen témoigne, sans être contredit, que si le nombre de motoneiges circulant devant un point récepteur pendant 1 h dépasse 1, le niveau équivalent horaire doit être augmenté de plus de 3 dBA s'il y a 2 motoneiges, de 4.8 dBA s'il y en a 3, de 6 dBA s'il y en a 4, de 7 dBA s'il y en a 5, de 10 dBA s'il y en a 10, de 17 dBA s'il y en a 50 et de 20 dBA s'il y en a 100, en 1 h.
[315] Les décomptes révèlent que le passage de plus d'une motoneige à l'heure est chose courante la fin de semaine et durant la semaine. Le détail des décomptes effectués par le ministère des Transports indique que, durant ces journées, la moyenne se situe entre 5 et 10 motoneiges à l'heure.
[316] Le Comité consultatif, dans ses lignes directrices nationales, écrit que les descripteurs Leq 7 h à 23 h, dont s'inspire entre autres M. Allard, s'appliquent plutôt à l'aménagement foncier alors que les descripteurs de courte durée (LAmax, LAeq 1 h) sont utilisés dans la réglementation visant à contrôler la nuisance. Incidemment, le règlement adopté plus récemment par la Municipalité de Mont-Tremblant réfère à un descripteur Leq 60 minutes.
[317] Finalement, le fait que le descripteur Leq 24 h ne traduit pas adéquatement la situation sur la piste se démontre par l'extrapolation que fait M. Allard pour établir le nombre de passages nécessaires pour atteindre 42 dBA, c'est-à-dire un niveau inférieur au 55 dBA auquel il se réfère. Selon son calcul, 600 motoneiges doivent circuler à 30 km/h à une distance de 50 m.
·
[318] L'approche préconisée par les experts Nguyen et Laroche, qui consiste à apprécier l'existence ou non d'une nuisance en comparant la différence entre le bruit de fond et les émergences de bruit afin de déterminer l'impact ponctuel d'un événement, est une approche appliquée par l'OMS.
[319] L'OMS est une référence en matière de bruit que l'on retrouve de façon générale dans les publications spécialisées. Le Comité consultatif, dont la norme est appliquée par M. Allard, s'y réfère.
[320] Or, la perception suggestive d'un bruit, selon tous les experts, dépend du dépassement de son intensité par rapport au niveau du bruit de fond. Cette perception suggestive est la suivante[76] :
Perception subjective d'un bruit
Perception du bruit |
Dépassement par rapport au bruit de fond |
2 fois plus fort |
10 dBA |
4 fois plus fort |
20 dBA |
8 fois plus fort |
30 dBA |
16 fois plus fort |
40 dBA |
32 fois plus fort |
50 dBA |
64 fois plus fort |
60 dBA |
[321] Tous les résultats de mesures de bruit, que l'événement mesuré corresponde au passage d'une seule ou de plusieurs motoneiges, montrent, pour chaque événement mesuré, un dépassement du niveau de bruit ponctuel par rapport au bruit de fond largement supérieur à 5 dB; la norme de 15 dB qu'applique Mme Laroche l'est aussi.
[322] L'évaluation de l'effet du bruit sur le sommeil par Mme Laroche tient compte de niveaux sonores maximums de 45 dBA en matière de bruit non continu, il s'agit d'une norme acceptée par les experts en bruit, dont l'OMS.
[323] Il en est de même des paramètres comparatifs qu'elle utilise pour évaluer notamment à l'extérieur l'impact du bruit sur la communication.
[324] En ce qui concerne l'impact du bruit à l'extérieur, les opinions des experts convergent. Mme Laroche, en analysant les résultats des mesures à 25 m et moins de la piste, conclut à un impact significatif sur la communication; M. Allard reconnaît à 60 m et moins, à une vitesse de 30 km/h, une interférence temporaire où l'intelligibilité serait réduite à - 95%.
[325] Il faut apprécier ces constats en tenant compte aussi du nombre de passages enregistrés sur la piste.
[326] L'incidence des phénomènes d'accélération et de vitesse sont aussi des facteurs qui influent sur le bruit émis par les motoneiges. Tous les experts le reconnaissent. M. Allard constate d'ailleurs, même en appliquant un descripteur de plus longue durée, des dépassements aux normes qu'il applique dans certaines circonstances. Il s'agit de situations où il y a accélération ou non-respect de la limite de vitesse.
[327] Or, entre Lac-Carré et Mont-Laurier, il y a 70 arrêts sur la piste.
[328] Également, plusieurs témoins attestent du fait que les limites de vitesse sont loin d'être toujours respectées : certains le constatent en circulant eux-mêmes sur la piste et, d'autres, en se faisant régulièrement dépasser par des motoneiges alors qu'ils circulent sur une route longeant la piste et peuvent aussi comparer les vitesses de croisière respectives.
[329] Mme Alarie témoigne que, quant à elle, il n'y a qu'une seule limite de vitesse sur la piste, soit 70 km/h et M. Doré témoigne qu'à l'extérieur de la municipalité de Mont-Tremblant où il réside, les motoneiges circulent à des vitesses variant entre 90 et 110 km/h et, dans les zones de 30 km/h, à des vitesses entre 40 et 50 km/h.
·
[330] Il y a lieu de conclure que les normes prises en considération et les descripteurs appliqués par les experts Nguyen et Laroche rendent compte, avec plus de justesse, de la réalité sur la piste et, par voie de conséquence, de retenir leur conclusion à l'effet que le bruit dépasse généralement les normes acceptables et constitue une nuisance.
·
[331] Les plaintes de Membres quant aux effets de ce bruit sont ainsi objectivées.
[332] De plus, la modification d'un horaire d'activités, l'élévation de la voix ou du volume du téléviseur, l'utilisation de protecteurs auditifs, la réalisation de travaux d'insonorisation, le fait de déserter fréquemment son habitation et le déménagement sont considérés des réactions objectives au bruit[77].
·
[333] Plusieurs témoins cités par les défenderesses témoignent que le bruit ne les dérange pas, même lorsqu'ils se trouvent à l'extérieur sur leur propriété.
[334] De tels témoignages de résidants à moins de 30 m se concilient difficilement avec la preuve d'expert, incluant le témoignage de M. Allard, à l'effet qu'à de telles distances et dans plusieurs autres situations, il y a dépassement des normes entraînant vraisemblablement un effet de gêne.
[335] Or, la plupart de ces témoins gardent leurs fenêtres fermées même pour dormir ou ne démontrent pas d'intérêt à profiter de leur propriété à l'extérieur l'hiver.
[336] M. Laudat a son lieu de travail non loin de la piste; or, il est reconnu que, lorsqu'elle travaille, une personne n'a pas les mêmes attentes et peut considérer « le bruit comme une donnée inhérente du milieu »[78].
[337] Il faut également mentionner que Mme Alarie est motoneigiste, son mari et ses enfants le sont également et elle est membre d'un club de motoneige; M. Doré est motoneigiste et membre d'un club de motoneige; M. Auger et Mme Nantel reçoivent des amis qui les visitent en motoneige; le fils de Mme Rock, soit le frère de Tawrence Rock, est motoneigiste et membre d'un club de motoneige; Mme Robidoux est secrétaire-trésorière pour le Club de moto-neige de Labelle.
[338] Tout compte fait, cette preuve concorde avec le constat que fait la MRCL par sa résolution 2000-05-2551 adoptée le 11 mai 2000 et qui est la suivante[79] :
CONSIDÉRANT le droit des citoyens à la qualité et la tranquillité de vie;
CONSIDÉRANT la pollution de l'eau et des sols résultants des émanations provenant des moteurs;
CONSIDÉRANT la pollution de l'air provenant des émanations d'oxydes de carbone, d'hydrocarbures et autres produits;
CONSIDÉRANT les nuisances sociales et en particulier la pollution sonore envahissant les milieux naturels et les milieux de vie des citoyens;
CONSIDÉRANT l'intrusion de ces véhicules dans l'intimité des citoyens;
CONSIDÉRANT la nécessité et l'urgence de protéger la santé publique, y compris celle des usages de ces véhicules;
CONSIDÉRANT les effets néfastes de plus en plus évidents pour la santé des citoyens;
CONSIDÉRANT l'énorme surconsommation de produits pétroliers de ces engins;
POUR CES MOTIFS :
Il est proposé par le conseiller Robert Champage
appuyé par le conseiller Pierre Circé,
et résolu majoritairement
que la MRC des Laurentides appuie la Coalition pour la protection de l'environnement du parc linéaire Le P'tit Train du Nord et le Conseil régional de l'environnement des Laurentides dans leurs démarches à l'effet de demander aux premiers ministres du Québec et du Canada ainsi qu'aux ministres de la Santé, de l'environnement et des Transports de :
1. se concerter afin d'exiger des fabricants de tous les véhicules récréatifs motorisés qu'ils produisent des moteurs conformes aux normes d'émission, de bruit et d'efficacité énergétique applicables aux véhicules automobiles en Amérique du Nord et particulièrement en Californie;
2. de légiférer afin d'encadrer de façon efficace la construction de ces engins;
3. de légiférer afin d'encadrer de façon étroite et efficace l'utilisation et la circulation de ces engins.
Monsieur André F. Sigouin, maire de la municipalité de Mont-Tremblant inscrit sa dissidence.
·
[339] Finalement, la prépondérance des témoignages, qui ne peuvent être écartés, établit aussi que la circulation de motoneiges entraîne une grande partie de l'hiver l'envahissement de la piste et de ses abords par l'odeur.
·
[340] D'autres effets de cette circulation sont évoqués par les témoins, sans cependant que la preuve ne démontre leur caractère collectif.
·
[341] La preuve n'établit pas que la piste est située dans un milieu autre qu'essentiellement rural. Les émergences de bruit enregistrées lors des relevés, à l'exception d'un endroit, sont toutes reliées à des motoneiges.
[342] Il n'est pas prouvé, de façon prépondérante, que d'autres bruits dans le milieu ont un impact sur le milieu sonore ambiant surpassant le bruit.
[343] Or, il y a « une plus grande attente en termes de « paix et tranquillité » dans les ensembles ruraux calmes »[80].
[344] L'intensité du bruit, tel qu'il existe l'hiver aux abords de la piste, ne constitue pas un inconvénient normal et inévitable de la vie en société dans un tel milieu.
[345] Le fait de ne pas pouvoir ouvrir ses fenêtres l'hiver ou sinon d'en subir des inconvénients qui dépassent les normes, d'être empêché de dormir, de se réfugier ailleurs, traduisent une nuisance.
[346] Les inconvénients anormaux qui se traduisent par des odeurs, du bruit, une contamination de la qualité de l'air ou autres composantes dans l'environnement peuvent constituer une nuisance au sens du droit commun[81].
[347] Il y a donc lieu de conclure que la circulation de motoneiges sur la piste entraîne une contravention à la norme édictée à l'article 976 C.c.Q.[82].
·
[348] Finalement, les mesures de bruit indiquent que les émergences de bruit provenant de motoneiges peuvent atteindre, à des distances au-delà du 100 m de la piste, un niveau de dépassement du bruit de fond allant au-delà de celui acceptable selon les experts Nguyen et Laroche. L'émergence y est cependant moins accentuée.
[349] De même, la preuve testimoniale, quant aux effets de la circulation de motoneiges sur les Membres résidant au-delà de 100 m de la piste, est non seulement contradictoire, mais aussi n'établit pas l'existence de troubles de voisinage générateurs de responsabilité au sens de l'article 976 C.c.Q.
[350] M. Desparois témoigne d'inconvénients uniquement occasionnels dont l'intensité décrite ne correspond pas à une nuisance au sens de cette disposition.
[351] En conséquence, il y a lieu de conclure à l'absence de preuve de nuisance à l'égard de résidants à plus de 100 m de la piste.
[352] Les dispositions pertinentes à cette question incluses au bail intervenu entre le Gouvernement et la MRCL sont les suivantes :
1.2 « Complexe » ou « complexe récréo-touristique » : l'ensemble de toutes les améliorations, constructions ou de tout autre ouvrage effectué sur le terrain ainsi que l'ensemble des actifs immobiliers existant sur ce terrain à la date de la signature des présentes, à l'usage du public en général, destinés à l'établissement et à l'aménagement d'un parc linéaire à caractère régional.
[…]
ARTICLE 5 - NATURE ET LIMITE DU BAIL
5.1 Le Locataire ne peut occuper, aménager ou utiliser le terrain qu'aux fins d'y développer et d'y exploiter de façon continue le complexe récréo-touristique dans le but de permettre l'exercice d'activités de sports, de loisirs et de plein air, notamment la randonnée pédestre, le vélo et le ski de fond, tel que défini dans le programme d'aménagement prévu à l'article 9.
[…]
ARTICLE 6 - OBLIGATIONS DU LOCATAIRE
6.1 Le Locataire s'engage à ériger sur le terrain un complexe récréo-touristique en conformité avec le programme d'aménagement exigé à l'article 9.
[…]
6.3 Le Locataire doit faire en sorte que l'usage et l'occupation du complexe et du terrain soient en tout temps conformes à toute loi, règlement, règlement de zonage, ordonnance et directive applicables, provenant d'une autorité gouvernementale ayant juridiction relativement à la condition, l'entretien, l'utilisation ou l'occupation du complexe et du terrain.
[…]
ARTICLE 9 - PROGRAMME D'AMÉNAGEMENT
9.1 Le Locataire doit préparer et soumettre à l'approbation du Locateur un programme d'aménagement à long terme du terrain et du complexe récréo-touristique.
9.2 Au plus tard, dans les trois (3) mois suivant la signature de ce bail, le Locataire doit remettre au Locateur un programme d'aménagement couvrant la période débutant à la date de la signature des présentes et se terminant le 31 décembre 1998. Ce programme d'aménagement doit comprendre notamment tous les aménagements envisagés sur le terrain, une politique d'affectation d'usage de ce terrain, par segment de terrain, une programmation des éventuelles immobilisations ainsi qu'un budget quinquennal prévisionnel d'immobilisations reflétant un programme projectionnel d'ordonnancement des travaux et d'investissement pouvant être réalisé au cours de cette période.
[…]
ARTICLE 11 - CESSION, SOUS-LOCATION, SOUS-TRAITANCE ET GÉRANCE
[…]
11.2 Le Locataire peut sous-louer un bâtiment, aménagement ou tout autre ouvrage ainsi que se prévaloir des services de sous-traitance, mail il doit alors en informer le Locateur dans un délai raisonnable et transmettre à ce dernier le nom et l'adresse du sous-locataire ou du sous-traitant.
11.3 Le Locataire doit obtenir le consentement du Locateur avant de confier à un tiers la gérance ou l'administration du terrain ou du complexe récréo-touristique.
[353] Les baux entre la MRCL et les Clubs qui sont, à tout compte fait, presque similaires, à titre pertinent, prévoient que :
FAIT FOI qu'en considération des loyers, stipulations, restrictions, termes, conventions et conditions ci-après récités, que le Locataire s'engage par les présentes à payer, observer et exécuter, le Locateur sous-loue au Locataire, qui accepte, une parcelle de terrain (ci-après appelée les « lieux sous-loués »), [… ]des terrains du Locateur bande de terrain qui, jusqu'à son abandon, a servi comme emprise ferroviaire ou comme surlargeur à cette emprise, qui est dorénavant connue sous l'appellation PARC LINÉAIRE LE P'TIT TRAIN DU NORD.
[…]
Le Locataire aura la possession et l'usage des lieux sous-loués pour une période d'environ quatre (4) mois […].
[…]
2. Les lieux sous-loués seront utilisés par le Locataire pour les fins d'y entretenir un chemin pour la circulation de motoneiges et à nulle autre fin.
[…]
4. Le Locataire devra aussi durant le terme de ce bail bien et suffisamment réparer, entretenir, corriger et conserver les lieux sous-loués en bon état de réparation qu'elle que soit la cause du besoin de telles réparations, exception faite des dommages occasionnés par cas fortuit ou force majeure.
5. Le Locataire devra durant le terme de ce bail entretenir s,il y a lieu les clôtures sur les lieux sous-loués.
6. Le Locataire ne coupera ni ne permettre qu'aucun arbre soit coupé sur les lieux sous-loués sans le consentement écrit du Locateur.
[…]
8. […]
Sans limiter la portée de ce qui précède, le Locataire devra prendre tous les moyens nécessaires pour faire en sorte que les dispositions du Code de la route et de toute législation, qui s'appliquent à l'utilisation des motoneiges soient respectées sur les lieux sous-loués.
Le Locataire sera responsable de la sécurité et de la surveillance des lieux sous-loués, […]
[…]
12. Le Locataire s'engage à indemniser le Locateur et le mettre à couvert contre toutes réclamations, demandes, jugements y compris les jugements rendus de la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles, L.R.Q. ch. A-3.001 ou toute législation de même nature, actions et poursuites faites ou intentées par toute personne, et contre toutes pertes, tous dommages ou coûts subis ou encourus par le Locateur, ses employés, représentants ou agents, et qui pourraient résulter du présent bail ou de toute chose faite ou omise aux termes des présentes, s'y rattacher ou en être une conséquence directe ou indirecte.
[…][83].
·
[354] Le terme « voisin » au sens de l'article 976 C.c.Q. est interprété largement; ce peut être un propriétaire, locataire, occupant, usager, usufruitier, possesseur ou détenteur d'un fonds.
[355] Cette disposition assujettit non seulement toutes les personnes qui ont un droit réel dans un fonds, mais aussi celles qui ont un droit de jouissance ou d'usage. En d'autres termes, le trouble de voisinage susceptible d'entraîner une responsabilité doit avoir un lien avec le fait de l'occuper ou d'en avoir l'usage.
·
[356] Le Bail entre le Gouvernement et la MRCL, en ce qui a trait au droit de cette dernière de sous-louer les lieux concernés, ne l'autorise qu'à sous-louer un bâtiment, aménagement ou tout autre ouvrage.
[357] Le bail autorise aussi la MRCL à se prévaloir de services de sous-traitance. Dans ce dernier cas, la MRCL doit obtenir le consentement du locateur avant de confier à un tiers la gérance ou l'administration du terrain ou du complexe récréo-touristique et, à tout événement, elle demeure responsable de toutes et chacune des clauses du bail, dont celles notamment de faire en sorte que l'usage et l'occupation du complexe et du terrain soient en tout temps conformes à la loi.
[358] De plus, la MRCL adopte le règlement 133-97 dans lequel elle y impose que la circulation sur la piste soit exclusivement réservée à la motoneige l'hiver entre le 1er décembre et le 14 avril de chaque année et y prohibe toute autre activité durant cette période; également, elle y réglemente la propriété, la sécurité et l'ordre et interdit de boire des boissons alcoolisées sur le Parc Linéaire.
[359] Aucune activité ne peut être organisée et tenue sur le Parc Linéaire à moins d'une autorisation préalable de la MRCL.
[360] Des amendes sont prévues pour toute personne qui commet une infraction au règlement.
[361] Également, les baux entre la MRCL et les Clubs de motoneige stipulent que la MRCL leur octroie la possession et l'usage des lieux sous-loués pour les fins d'entretenir un chemin pour la circulation de motoneiges et à nulle autre fin.
[362] Il est admis par les parties que les Clubs de motoneige voient de fait à l'entretien des sentiers.
[363] Le terme « entretenir » a le sens de[84] « 1. tenir en bon état. […] 2. Faire durer, maintenir dans le même état. […].
[364] Les baux, en plus d'énoncer que les Clubs de motoneige devront réparer, entretenir, corriger et conserver les lieux sous-loués en bon état, leur imposent également de prendre tous les moyens nécessaires pour faire en sorte que les dispositions du Code de la route et de toute législation s'appliquant à l'utilisation de motoneiges soient respectées et de voir à la sécurité et la surveillance sur la piste.
[365] Ces dispositions montrent que la MRCL, malgré les baux avec les Clubs de motoneige et en conformité avec les termes et conditions du bail qui la lient au Gouvernement, garde contrôle sur la piste et en assure l'aménagement.
[366] Le comportement de la MRCL reflète son occupation de la piste alors qu'elle s'adjoint les Clubs de motoneige uniquement pour assurer l'encadrement et la gestion de la piste dont elle en a elle-même déterminé l'usage selon la saison.
[367] En conséquence, la responsabilité en vertu de l'article 976 C.c.Q. incombe à la MRCL.
[368] Les Clubs de motoneige n'occupent pas la piste dans le sens où ils peuvent être considérés des voisins en vertu de l'article 976 C.c.Q.
[369] La Coalition n'a pas prouvé de faute particulière commise ni de contravention aux termes et conditions des baux liant les Clubs de motoneige à la MRCL par ces derniers et ayant causé la nuisance. La Coalition n'a d'ailleurs pas tenté de prouver telle faute ou contravention, appuyant essentiellement son recours sur les dispositions de l'article 976 C.c.Q.
·
[370] Vu les conclusions auxquelles en arrive le Tribunal quant à l'application de l'article 976 C.c.Q., il ne s'avère pas nécessaire de statuer sur les contraventions alléguées aux dispositions de la LQE et de la Charte.
[371] Les défenderesses plaident que les inconvénients découlant du bruit qui ont fait l'objet d'une preuve sont de la nature de préjudices particuliers, lesquels se distinguent d'un Membre à l'autre selon sa situation personnelle. Il y aurait absence de preuve que les Membres ont subi un préjudice commun.
·
[372] Le juge Lesage, dans le jugement de première instance rendu dans la cause du Syndicat national des employés de l'hôpital St-Ferdinand c. Curateur public[85], rappelle que le recours collectif n'est pas orienté vers une solution purement compensatoire.
[373] M. le juge Nichols, dans l'arrêt de la Cour d'appel précise que[86] :
En prescrivant que le tribunal, en matière de recours collectif, doit traiter les questions de droit et de fait collectivement, le législateur a créé selon moi un nouveau moyen de preuve permettant d'établir l'existence des éléments essentiels de la responsabilité civile.
[…]
En d'autres mots, la certitude du dommage, en matière de recours collectif, doit être évaluée à partir d'une base collective ou globale et non d'une base individuelle. Cela ne signifie aucunement que le dommage n'a pas à être certain.
Il faut toujours la certitude que tous les membres du groupe visés par le recours collectif ont subi un préjudice mais le traitement collectif de la preuve n'exige pas que soit étalé le préjudice particulier subi par chacun.
[…]
Cette dispense a pour conséquence que le tribunal pourra prononcer une condamnation en faveur de tous les membres du groupe si le traitement collectif de la preuve le convainc qu'il y a préjudice commun sans avoir à trouver dans la preuve des présomptions graves, précises et concordantes dont l'inférence permette de conclure à l'existence d'un préjudice absolument similaire.[87]
[374] Et il conclut, dans les circonstances particulières à ce cas, ce qui suit[88] :
En traitant les questions de fait collectivement comme le veut la loi en matière de recours collectif il me semble que la simple énumération des multiples répercussions causées par les arrêts de travail est suffisante pour démontrer que le préjudice n'a épargné personne, d'autant plus que les victimes sont ici des personnes plus vulnérables que d'autres à cause de leur déficience mentale.
[…]
À mon avis il n'était pas nécessaire, comme l'a fait le premier juge, de rechercher un préjudice commun qui soit identique pour tous les bénéficiaires. Il me paraît évident que cette privation de services n'a pas atteint tous les bénéficiaires de la même manière. Même l'inconfort, à supposer que tous aient éprouvé ce genre de préjudice, n'a pas dû être ressenti par tous de la même façon car la capacité de perception d'un préjudice de cette nature peut varier d'un bénéficiaire à l'autre selon la nature et le degré de sa pathologie.
[…]
Traités collectivement, les faits mis en preuve démontrent avec surabondance l'existence d'un préjudice commun. La seule privation de services pendant 30 jours dans une institution de ce genre ne peut pas se concevoir sans entraîner de préjudice pour les bénéficiaires, à moins que les appelants ne cherchent à démontrer que les services dispensés par leurs membres n'avaient rien d'essentiel et qu'au demeurant on aurait pu aisément se passer d'eux.
[375] Bref, la preuve doit révéler l'existence d'un préjudice d'une nature particulière propre à l'ensemble des Membres du groupe sans qu'il ne soit nécessairement similaire[89].
·
[376] La preuve traitée collectivement établit que les Membres résidant jusqu'à 100 m ou moins de la piste subissent collectivement, chaque année pendant une période s'étendant approximativement du 15 décembre d'une année au 15 mars de l'autre, des inconvénients résultant du bruit et de la présence de l'odeur sur leur propriété. Le préjudice collectif se traduit par une gêne presque constante, une perturbation fréquente du sommeil et l'impossibilité de profiter normalement de leur propriété à l'extérieur l'hiver.
[377] Le traitement collectif des faits pertinents aux dommages empêche notamment de particulariser l'incidence sur la valeur des dommages subis reliée au fait que certains Membres aient résidé aux abords de la piste après que n'ait débuté la nuisance et à l'ordonnance de sauvegarde rendue durant l'hiver 2003-2004.
[378] Les autres inconvénients dont ont fait état certains témoins ne sont pas retenus, faute de preuve de leur caractère collectif.
·
[379] La preuve n'établit pas, avec suffisamment d'exactitude, le nombre de Membres ayant subi des dommages, et le recouvrement collectif n'apparaît pas opportun.
·
[380] Un montant d'indemnité de 1 200 $ sera donc accordé à chaque membre résidant à 100 m ou moins de la piste, étant entendu qu'il est suffisant que l'habitation d'un résidant Membre soit situé à 100 m ou moins en ligne droite du bord le plus rapproché de l'emprise du Parc linéaire entre la borne kilométrique 68.5 située à St-Fautin-Lac-Carré et la borne kilométrique 106.5 située à Labelle, pour chaque saison hivernale à compter de la saison 1997-1998 jusqu'à la saison hivernale 2003-2004 inclusivement.
[381] Le Groupe Commerce, en vertu d'une police d'assurance portant le numéro 326-6168, des certificats FCMQ1266800 et FCMQ1261200 ainsi que de l'avenant #2 daté du 29 décembre 1997, assure, pour la période du 1er octobre 1997 au 1er octobre 1998, les Clubs de motoneige et la MRCL.
[382] Tig, en vertu de la police d'assurance numéro T7-37519770 et des certificats FCMQ1266800, FCMQ1261200, assure, pour les périodes du 1er octobre 1998 au 1er octobre 1999 et du 1er octobre 1999 au 1er octobre 2000, les Clubs de motoneige.
[383] Lombard, en vertu des polices CBC534557 et 814854, assure, à compter du 16 juin 1996, la MRCL.
·
[384] Les trois assureurs plaident que les circonstances au soutien de l'action intentée par la Coalition ne sont pas de la nature d'un sinistre, d'un accident ou d'un événement couverts par les polices d'assurance.
[385] Lombard ajoute que les dommages réclamés par la Coalition sont le résultat d'un geste posé délibérément par la MRCL, soit la décision politique d'autoriser l'activité de la motoneige sur la piste et que, en conséquence, ils ne sont pas couverts pas une police d'assurance responsabilité civile.
[386] Subsidiairement, les trois assureurs invoquent l'exclusion « risque de pollution » incluse à leur police d'assurance.
·
[387] L'action directe de la Coalition contre les assureurs a pour fondement l'article 2501 C.c.Q. qui autorise le tiers lésé à faire valoir son droit d'action contre l'assuré ou l'assureur ou contre l'un et l'autre.
·
[388] Les polices émises par le Groupe Commerce et par Lombard, en vertu de sa Partie III, couvrent la responsabilité civile des entreprises.
[389] La police d'assurance émise par Tig est une police intitulée Commercial General Liability Policy.
[390] Les garanties offertes par ces polices sont :
Groupe Commerce
· garantie A : Dommages corporels, dommages matériels et/ou privation de jouissance;
· garantie B : Préjudice personnel;
· garantie C : Frais médicaux;
· garantie D : Responsabilité locative.
Tig
· garantie A : Bodily Injury and Property Damage Liability;
· garantie B : Personal Injury Liability;
· garantie C : Medical Payments;
· garantie D : Tenants Legal Liability.
Lombard
· garantie A : Dommages corporels, dommages matériels et/ou privation de jouissance;
· garantie B : Préjudice personnel et préjudice imputable à la publicité;
· garantie C : Frais médicaux;
· garantie D : Responsabilité locative;
· garantie E : Responsabilité civile relative aux avantages sociaux.
[391] La garantie B incluse à chacune des polices est similaire.
Groupe Commerce
a) La garantie B couvre[90] :
[…] les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant incomber à l'Assuré en raison de préjudice personnel. Pour être couvert, le préjudice doit être occasionné par un délit commis pendant que le contrat est en vigueur, dans les limites territoriales de la garantie et dans le cadre des activités pour lesquelles vous êtes assuré.
b) Au chapitre des définitions[91], l'expression « préjudice personnel » est définie comme suit :
[…] tout préjudice (sauf les dommages corporels) occasionné du fait des délits ci-après :
i) arrestation, détention ou emprisonnement injustifiés;
ii) poursuites intentées par malveillance;
iii) atteintes à l'inviolabilité du domicile, notamment l'éviction injustifiée, étant précisé que le domicile s'entend de tout lieu occupé par une personne physique;
iv) paroles ou écrits diffamatoires à l'endroit d'une personne physique ou morale ou dépréciant ses produits ou ses services;
v) paroles ou écrits violant le droit à la vie privée.
Tig
a) La garantie B couvre[92] :
a) […] those sums that the insured becomes legally obligated to pay as compensatory damages because of "personal injury" to which this insurance applies. No other obligation or liability to pay sums or perform acts or services is covered unless explicitly provided for under SUPPLEMENTARY PAYMENTS - COVERAGES A, B, AND D. […]
b) Au chapitre des définitions[93], l'expression « personal injury » est employée dans un sens similaire à la police de Groupe Commerce et est définie comme suit :
8. […] means injury, other than "bodily injury", arising out of one or more of the following offences :
a) False arrest, detention or imprisonment;
b) Malicious prosecution;
c) Wrongful entry into, or eviction of a person from, a room, dwelling or premises that the person occupies;
d) Oral or written publication of material that slanders or libels a person or organization or disparages a person's or organization's goods, products or services; or
e) Oral or written publication of material that violates a person's right of privacy.
Lombard
a) La garantie B couvre[94] :
[…] les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant incomber à L'Assuré en raison de préjudice personnel ou de préjudice imputable à la publicité. Pour être couvert :
- le préjudice personnel doit être occasionné par un délit commis pendant que le contrat est en vigueur, dans les limites territoriales de la garantie et dans le cadre des activités pour lesquelles vous êtes assuré;
b) Au chapitre des définitions[95], l'expression « préjudice personnel » est définie comme :
[…] tout préjudice (sauf les dommages corporels) occasionné du fait des délits ci-après :
a) Arrestation, détention ou emprisonnement injustifiés;
b) Poursuites intentées par malveillance;
c) Atteintes à l'inviolabilité du domicile, notamment l'éviction injustifiée, étant précisé que le domicile s'entend de tout lieu occupé par une personne physique;
d) Paroles ou écrits diffamatoires à l'endroit d'une personne physique ou morale ou dépréciant ses Produits ou services;
e) Paroles ou écrits violant le droit à la vie privée.
[392] La Coalition n'allègue pas, à titre de conséquences découlant de la circulation de motoneiges sur la piste, de préjudice ayant pour origine un délit couvert par la garantie B de ces polices.
·
[393] Les garanties C, D et E quant à Lombard, vu la nature de la garantie offerte, n'ont pas non plus d'application dans les circonstances.
·
Groupe Commerce
a) La garantie A couvre[96] :
Nous garantissons les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant incomber à l'Assuré en raison de dommages corporels, de dommages matériels ou de privation de jouissance de biens corporels. Pour être couverts les dommages susdits doivent survenir pendant que le contrat est en vigueur et résulter d'un sinistre s'étant produit dans les limites territoriales de la garantie.
b) Au chapitre des définitions[97], les définitions pertinentes sont les suivantes :
Dommage corporel, toute atteinte subie par une personne physique, ainsi que la maladie.
Dommage matériel, toute détérioration ou destruction d'un bien corporel.
Sinistre, tout accident ainsi que l'exposition continuelle ou répétée à des risques essentiellement de même nature.
Tig
a) La garantie A couvre[98] :
a) […] those sums that the insured becomes legally obligated to pay as compensatory damages because of "bodily injury" or "property damage" to which this insurance applies. No other obligation or liability to pay sums or perform acts or services is covered unless explicitly provided for under SUPPLEMENTARY PAYMENTS - COVERAGES A, B AND D. This insurance applies only to "bodily injury" and "property damage" which occurs during the policy period. The "bodily injury" or "property damage" must be caused by an "occurrence". The "occurrence" must take place in the "coverage territory". […]
b) Au chapitre définitions[99], les définitions pertinentes sont les suivantes :
3. "Bodily Injury" means bodily injury, sickness or disease sustained by a person, including death resulting from any of these at any time.
7. "Occurrence" means an accident, including continuous or repeated exposure to substantially the same general harmful conditions.
Lombard
a) La garantie A couvre[100] :
1. Nature et étendue de la garantie
Nous garantissons les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant incomber à l'assuré en raison de dommages corporels, de dommages matériels ou de privation de jouissance de biens corporels. Pour être couverts, les dommages susdits doivent survenir pendant que le contrat est en vigueur et résulter d'un sinistre s'étant produit dans les limites territoriales de la garantie.
[…]
2. Exclusions
Sont exclus de la présente assurance :
A) Les dommages intentionnellement causés ou provoqués par l'Assuré ou prévus par lui, étant précisé que demeurent couverts les dommages corporels ou dommages matériels résultant de l'emploi d'une force raisonnable pour protéger des personnes ou des biens;
c) Au chapitre des définitions[101], les définitions pertinentes sont :
Dommage corporel, toute atteinte corporelle subie par une personne physique ainsi que la maladie, l'incapacité ou la mort en résultant, et s'il ne découle pas du préjudice personnel ou du préjudice imputable à la publicité, le dommage corporel comprend le préjudice mental, l'angoisse, le choc nerveux et l'humiliation.
Dommages matériel, toute détérioration ou destruction d'un bien corporel.
Sinistre, tout accident, ainsi que l'exposition continuelle ou répétée à des risques essentiellement de même nature.
·
[394] En vertu de la garantie A de ces polices et, sous réserve de ses termes et conditions, la couverture d'assurance prend effet uniquement lorsque survient un sinistre ou une « occurrence » tels qu'ils sont définis aux polices.
[395] Les dispositions du Code civil applicables au contrat d'assurance d'ailleurs le prévoit. En effet, les articles 2389 et 2463 C.c.Q. énoncent :
[2389] Le contrat d'assurance est celui par lequel l'assureur, moyennant une prime ou cotisation, s'oblige à verser au preneur ou à un tiers une prestation dans le cas où un risque couvert par l'assurance se réalise.
L'assurance est maritime ou terrestre.
[2463] L'assurance de dommages oblige l'assureur à réparer le préjudice subi au moment du sinistre, mais seulement jusqu'à concurrence du montant de l'assurance.
(soulignements ajoutés)
[396] Selon le professeur Didier Lluelles[102] :
La définition de l'article 2389 expose le caractère essentiellement aléatoire de la convention d'assurance […]
[…] si la prestation promise n'est pas fondée sur la réalisation d'un risque, mais sur celle d'un événement qui est certain(7), au niveau de sa réalisation, de son caractère prématuré ou de son intensité, le contrat en question n'en est pas un d'assurance.
[…]
Le risque est l'élément fondamental du contrat d'assurance : c'est le hasard contre les effets néfastes duquel le preneur veut se prémunir. Sans ce hasard, il ne saurait être question de contrat d'assurance.
_______________________
(7) Jean-Guy BERGERON, Le droit des assurances et l'entreprise, (1983) 14 R.D.U.S. 113, 121-128
[397] En matière d'assurance responsabilité, malgré une évolution dans la définition des termes « sinistre » ou « occurrence » incluse aux polices d'assurance, l'événement occasionnant les dommages réclamés doit toujours offrir les mêmes caractéristiques que l'accident tel qu'envisagé à l'origine. Cependant, le caractère de soudaineté exigé à l'origine n'est plus et le dommage peut se produire graduellement[103].
[398] Également, Gorden HILLIKER, dans Liability Insurance Law in Canada[104], écrit :
The courts have, nevertheless, invariably attempted to construct a formula for "accident", the test most often cited being that expressed by Lord MacNaghten in Fenton v. J. Thorley & Co. :38
I come, therefore, to the conclusion that the expression "accident" is used in the popular and ordinary sense of the word as denoting an unlooked-for mishap or an untoward event which is not expected or designed.
On this test, "accident" connotes both lack of intent and lack of expectation. Both of these concepts are retained in the definition of "occurrence" found in most modern commercial liability policies, in which coverage is extended to "continuous or repeated exposure to conditions which results in property damage neither expected nor intended from the standpoint of the insured."
____________________
(38) [1903] A.C. 443 (H.L.) at 448
[399] Finalement, Craig BROWN et Julio MENEZES, dans Insurance Law in Canada[105], précisent que :
[…] An event is not an accident if it is bound to happen in the ordinary course of events. And loss is not accidental if it is deliberately caused by the insured. […] One aspect of this is that, unless a different intention is clearly indicated, an insurance contract is presumed, whether or not the word "accident" or something like it is used, to cover only fortuitous events; only loss which occurs randomly. Loss is not fortuitous if it is certain to happen or if it is deliberately engineered by the insured.
[400] En bref, « la garantie d'assurance de responsabilité civile s'applique à la réparation des dommages corporels ou matériels causés à autrui, suite à un événement ayant un caractère accidentel, imprévu, soudain, mais pouvant être graduel et indépendant de la volonté de l'assuré »[106].
·
[401] La Coalition recherche la responsabilité de la MRCL et des Clubs de motoneige pour les effets que cause la circulation des motoneiges sur la piste aux personnes désignées ainsi qu'à ses Membres.
[402] Autrement dit, la Coalition invoque, à l'appui de son action, un état de fait tel qu'il existe chaque année entre le 1er décembre et le 15 avril, et ce, depuis le 7 novembre 1997. Un tel état de fait n'a pas ce caractère essentiellement aléatoire de l'événement couvert par une garantie d'assurance responsabilité civile; il n'est pas fortuit car il se produit dans le cours normal des choses pendant la période hivernale.
[403] Cet état de fait n'est pas un sinistre couvert par les contrats d'assurance concernés.
·
[404] Les polices d'assurance excluent spécifiquement de la couverture les conséquences de l'émission de polluants[107].
[405] Or, le bruit est un contaminant tel qu'il est défini à l'article 1 de la LQE et serait donc visé par l'exclusion « risque de pollution » incluse aux polices d'assurance. En fait, cette exclusion vient préciser l'inexistence dans un tel contexte d'un événement d'assurance[108].
[406] Les polices d'assurance du Groupe Commerce, de Tig et de Lombard ne couvrent pas les circonstances faisant l'objet du présent litige.
[407] Oralement, la Coaliton demande l'exécution provisoire du présent jugement.
[408] L'article 760 C.p.c. prévoit que « l'injonction prononcée dans un jugement final reste en vigueur nonobstant appel ».
[409] En ce qui a trait à la condamnation en dommages, il n'y a aucun motif suffisant justifiant d'en ordonner l'exécution provisoire nonobstant appel.
·
[410] La réserve de droit recherchée dans les conclusions de l'action en recours collectif quant au remboursement de déboursés que la Coalition aurait encourus pour mener le recours collectif n'a pas à être prononcée puisque superflue dans la mesure où la Coalition bénéficie d'un tel droit; au cas contraire, la réserve ne peut créer un tel droit.
[411] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[412] ACCUEILLE, en partie, l'action en recours collectif de la Coalition pour la protection de l'environnement du parc linéaire « Petit Train du Nord »;
[413] REJETTE l'action en recours collectif contre la Société d'assurance Tig, le Groupe commerce compagnie d'assurances et la Compagnie d'assurance Lombard;
[414] REJETTE l'action en recours collectif contre le Club de motoneiges diable et rouge Inc. et le Club de moto-neige de Labelle Inc.;
[415] ORDONNE à la Municipalité régionale de comté des Laurentides, à ses administrateurs, dirigeants, officiers, représentants, employés et mandataires, d'interdire l'accès aux motoneiges sur le Parc Linéaire le Petit Train du Nord entre les bornes kilométriques 68.5 et 106.5 jusqu'à ce que des mesures appropriée soient prises pour que cesse la nuisance qui résulte de la circulation de motoneiges sur ce tronçon du Parc Linéaire;
[416] MODIFIE la description du groupe pour la suivante :
Toutes les personnes physiques résidant ou ayant résidé après le 7 novembre 1997, à titre de propriétaire ou locataire, à 100 mètres ou moins de chaque côté d'une bande de terrain connue comme étant le parc linéaire Le Petit Train du Nord, entre la borne kilométrique 68.5 située à St-Fautin-Lac-Carré et la borne kilométrique 106.5 située à Labelle, étant suffisant qu'une partie quelconque de l'habitation d'un résidant soit située à 100 mètres ou moins en ligne droite du bord le plus rapproché de l'emprise du parc linéaire et étant compris que toutes les personnes physiques résidant ou ayant résidé de façon régulière avec le propriétaire ou locataire sont membres du groupe.
[417] CONDAMNE la Municipalité régionale de comté des Laurentides à verser à Gérard Émond et à Aline Thibault-Émond la somme de 1 200 $ chacun pour chacune des saisons hivernales à compter de 1997-1998 à 2003-2004 inclusivement ainsi que l'intérêt et l'indemnité additionnelle à compter du 7 novembre 1997;
[418] CONDAMNE le Procureur général du Québec solidairement avec la Municipalité régionale de comté des Laurentides à verser à Gérard Émond et à Aline Thibault-Émond la somme de 1 200 $ chacun pour chacune des saisons hivernales 2002-2003 et 2003-2004 ainsi que l'intérêt et l'indemnité additionnelle à compter du 20 janvier 2003;
[419] CONDAMNE la Municipalité régionale de comté des Laurentides à verser à chacun des Membres du groupe la somme de 1 200 $, pour chacune des saisons hivernales à compter de l'année 1997-1998 jusqu'à l'année 2003-2004 inclusivement ainsi que l'intérêt et l'indemnité additionnelle à compter du 7 novembre 1997;
[420] CONDAMNE le Procureur général du Québec solidairement avec la Municipalité régionale de comté des Laurentides à verser à chacun des Membres du groupe la somme de 1 200 $ pour chacune des saisons hivernales 2002-2003 et 2003-2004 ainsi que l'intérêt et l'indemnité additionnelle à compter du 20 janvier 2003;
[421] ORDONNE le recouvrement individuel des réclamations;
[422] ORDONNE à la Coalition pour la protection de l'environnement du parc linéaire « Petit Train du Nord » de faire signifier le présent jugement au greffier de la Cour supérieure pour qu'il avise le tribunal lorsque le présent jugement aura acquis l'autorité de la chose jugée afin que soit ordonnée la publication de l'avis requis par l'article 1030 C.p.c.;
[423] ORDONNE, après publication de cet avis, que les Membres fassent parvenir, par courrier recommandé, copie de leur formulaire de réclamation et des pièces jointes aux procureurs de la Municipalité régionale de comté des Laurentides et du Procureur général du Québec aux adresses suivantes :
Me Michel Lalande DEVEAU BISSONNETTE MONFETTE & ALS 490, rue Laviolette Saint-Jérôme (Québec) J7Y 2T9 |
Me Luc Mayrand et/ou Me Guylaine Henri BERNARD ROY ASSOCIÉS 1, rue Notre-Dame est #8.00 Montréal (Québec) H2Y 1B6 |
[424] ORDONNE que les réclamations individuelles des Membres soient adressées dans l'année qui suivra la publication de l'avis prévu à l'article 1030 C.p.c., par courrier recommandé, au greffier de la Cour supérieure du palais de Justice (25, De Martigny, Saint-Jérôme, Québec, J7Y 4Z1) en y déposant leur formulaire de réclamation et les pièces jointes de même que preuve de l'envoi par courrier recommandé d'une copie à Me Michel Lalande, Me Luc Mayrand et/ou Me Guylaine Henri;
[425] ORDONNE que la réclamation des Membres par eux-mêmes ou par les procureurs de la Coalition pour la protection de l'environnement du parc linéaire « Petit Train du Nord » contiennent les informations suivantes :
a) la mention « recours collectif » et une désignation sommaire de cette cause en en-tête;
b) le nom du Membre pour qui la réclamation est déposée et son adresse actuelle;
c) un affidavit et toute pièce justificative attestant de ce qui suit :
· l'adresse civique du Membre pendant les périodes concernées;
· sa résidence, à titre de propriétaire ou locataire, ou le fait qu'il réside ou a résidé de façon régulière avec le propriétaire ou le locataire, après le 7 novembre 1997, à 100 m ou moins d'une bande de terrain connue comme étant le Parc linéaire le Petit Train du Nord entre la borne kilométrique 68.5 située à St-Faustin-Lac-Carré et la borne kilométrique 106.5 située à Labelle, et la période de telle résidence.
[426] ORDONNE à la Municipalité régionale de comté des Laurentides et au Procureur général du Québec de déposer leur contestation des réclamations individuelles auprès du greffier de la Cour supérieure, à l'adresse mentionnée précédemment, dans les 15 jours de la réception de la copie du formulaire de réclamation individuelle par leur procureur et d'appuyer leur contestation d'un affidavit y détaillant les motifs;
[427] ORDONNE à la Municipalité régionale de comté des Laurentides et au Procureur général du Québec de transmettre copie de chaque contestation aux procureurs de la Coalition pour la protection de l'environnement du parc linéaire « Petit Train du Nord » et au Membre;
[428] ORDONNE au greffier, à défaut par la Municipalité régionale de comté des Laurentides et du Procureur général du Québec de contester les réclamations individuelles dans le délai de 15 jours, de prononcer un jugement sur toute réclamation non contestée selon le formulaire et les pièces justificatives produits;
[429] ORDONNE au greffier de décider de toute contestation écrite;
[430] ORDONNE que, pour la disposition des réclamations individuelles, il n'y ait de preuve orale que sur autorisation préalable du tribunal;
[431] ORDONNE au greffier de transmette aux Membres, aux procureurs de la Coalition pour la protection de l'environnement du parc linéaire « Petit Train du Nord », de la Municipalité régionale de comté des Laurentides et du Procureur général du Québec, copie de toute décision qui dispose d'une réclamation;
[432] DÉCLARE que toute décision du greffier peut être révisée par le tribunal sur demande écrite signifiée dans les vingt-et-un jours de telle décision;
[433] DÉCLARE que, à défaut de demande de révision dans le délai prescrit, toute décision du greffier est exécutoire comme partie du présent jugement;
[434] ORDONNE que l'exécution de tout jugement disposant d'une réclamation se fasse à l'initiative du membre concerné;
[435] ORDONNE que, un an après la publication de l'avis requis par l'article 1030 C.p.c., aucune réclamation individuelle ne soit recevable;
[436] LE TOUT, AVEC DÉPENS, y compris les frais d'experts, tant pour la préparation de leurs expertises que pour leur comparution devant le Tribunal et les frais d'avis.
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__________________________________ HÉLÈNE LANGLOIS, J.C.S. |
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Me Pierre Sylvestre et/ou Me Éric David |
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SYLVESTRE CHARBONNEAU FAFARD |
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Procureur de Coalition pour la protection de l'environnement du parc linéaire « Petit Train du Nord » et Gérard Émond et Aline Thibault-Émond |
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Me Michel Lalande et/ou Me Mathias Rancourt |
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DEVEAU BISSONNETTE MONFETTE & ALS |
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Procureur de La Municipalité régionale de comté des Laurentides |
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Me André Ramier |
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PRÉVOST AUCLAIR FORTIN D'AOUST |
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Procureur du Club de motoneiges diable et rouge inc. et Club de moto-neige de Labelle inc. |
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Me Claude P. Laporte |
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GASCO GOODHUE PROVOST |
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Procureur de la Société d'assurance Tig |
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Me Robert Dupaul et/ou Me Marc Simard |
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BÉLANGER SAUVÉ |
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Procureur du Groupe commerce compagnie d'assurances |
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Me Guy Pépin |
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BÉLANGER SAUVÉ |
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Procureur de la Compagnie d'assurance Lombard |
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Me Luc Mayrand et/ou Me Guylaine Henri |
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BERNARD ROY ASSOCIÉS |
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Procureur du Procureur général du Québec |
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Dates d’audience : |
Mai : 26, 27, 28 et 31 Juin : 1er, 2, 3, 7, 8, 9, 10, 14, 15, 16, 17, 21, 22, 23, 28, 29 et 30 Juillet : 2, 5 et 6 Août : 16, 17, 18, 19, 20, 23 et 24 |
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[1] Jugement de l'hon. Suzanne Courteau, j.c.s., 31 janvier 2002, p. 11.
[2] Procès-verbal du 31 mai 2004, p. 10.
[3] L.R.Q. c. Q-2.
[4] L.R.Q. c. C-12.
[5] [1996] R.J.Q. 2370 (C.S.).
[6] Rapport final préliminaire de la firme Sotar Inc. (juin 1990), pièce MRC-4.
[7] Résolution no 89-01-604.
[8] Pièce MRC-4, p. 47 et 48.
[9] Pièce MRC-4, p. 64.
[10] Pièce MRC-14, Introduction, p. 1.
[11] Pièce MRC-15.
[12] Pièce P-4.
[13] Précité, note 3.
[14] R.R.Q. c. V-1.2, r.1.
[15] L.R.Q. c. V-1.2.
[16] Pièce P-5.
[17] AZ-50262383 .
[18] Id, paragr. 22.
[19] Danielle PINARD, L'exigence d'avis préalable au procureur général prévue à l'article 95 du Code de procédure civile, Revue du Barreau, tome 50, numéro 4, septembre-octobre 1990, p. 629, 652.
[20] Geneviève TREMBLAY, Les tribunaux et les gestions politiques - les limites de la justiciabilité, Montréal, Wilson Lafleur, 1999, p. 53.
[21] Renvoi relatif à la sécession du Québec, [1998] 2 R.C.S., 217, M. le juge en chef Lamer.
[22] Précité, note 20, p. 26.
[23] Opération Dismantle c. La Reine, [1985] 1 R.C.S. 441 .
[24] Prud'homme c. Prudhomme, [2002] 4 R.C.S., 663, 683; articles 300 et 1376 C.c.Q.
[25] Ouimette c. Canada (P.G.), [2002] R.J.Q. 1228 (C.A.); demande d'autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée le 27 mars 2003.
[26] [1930] A.C. 171, 183 (C.P.).
[27] [1989] 2 R.C.S. 1181 , 1225, 1226.
[28] [1999] 1 R.C.S. 201 .
[29] Michel BÉLANGER, La responsabilité de l'état et de ses sociétés en environnement, Éditions Yvon Blais, p. 109.
[30] Sutherland c. Canada (Attorney General), [2002] B.C.J. No 1479 (C.A. C.-B.) demande d'autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée [2002] S.C.C.A. No 385, Quicklaw, p. 1 de 23.
[31] Id.
[32] Id., paragr. 66, p. 14 de 23.
[33] Id., paragr. 36, p. 7 et suiv.
[34] Id., paragr. 37 et suiv., p. 7 et suiv.
[35] Id., paragr. 95, 96 et 97, p. 18 et suiv.
[36] [2001] O.J., No 2789.
[37] [1966] 2 R.C.S. 151, 155.
[38] St-Pierre v. The Minister of Transportation and Communications, (1987), 39, D.L.R. (4th), 10, 18.
[39] Pièce P-4.
[40] Extrait cité d'ans l'arrêt Huguette Barrette & al c. Ciment du Saint-Laurent Inc., Québec, no 200-06-000004-930, 9 mai 2003, j. Dutil, paragr. 297.
[41] François Gourdeau & al c. Anne Letellier de St-Just & al, REJB 2002-31486 (C.A.).
[42] Précis de droit de biens, Éditions Thémis, p. 416.
[43] Jean-Louis BAUDOUIN et Patrice DESLAURIERS, La responsabilité civile, 5e édition Cowansville, Éditions Yvon Blais, 1998, no 174, p.122.
[44] Précité, note 40, paragr. 348.
[45] Précité, note 43, paragr. 194; William Drysdale c. A. Dugas, [1895], 26 R.C.S.
[46] Précité, note 42, p. 452, référant à la cause de Pelchat c. Carrière d'Acton Vale, [1970] C.A. 884 , 887.
[47] Pièces P-11, P-47 et P-69.
[48] La Reine c. Howard, [1989] 1 R.C.S. 1337 , 1348, j. Lamer.
[49] Pièce P-21.
[50] Pièce P-21, p. 8.
[51] Pièce P-21, p. 9.
[52] Pièce P-21, p.19.
[53] Pièce P-32, p.8-10.
[54] Pièce P-32, p. 11.
[55] Pièce PG-2, p. 22.
[56] Municipalité de St-Fautin-Lac-Carré, règlement no 45-98; MRCL-Municipalité de la Conception, règlement no SQ-15-99, MRCL-Ville de St-Jovite, règlement 139-(1994), MRCL- Municipalité de la Paroisse de St-Jovite, règlement 398-98, Municipalité de Labelle, règlement no 200-32, MRCL-Municipalité de Mont-Tremblant, règlement 88-06, annexes nos 2, 3, 4, 5 et 7 de la pièce P-21.
[57] Autres règlements et limites de bruit au Québec: Règlement sur les carrières et sablières (R.R.Q., 1981, c. Q-2, r.2); Règlement sur les usines de béton bitumineux (R.R.Q., 1981, c.Q-2, r.25); Note d'instruction 98-01 du ministère de l'Environnement du Québec; Politique du ministère des Transports sur le bruit routier (1998); Règlement relatif à la qualité du milieu de travail (S-2.1 r. 15); Comité Consultatif fédéral-provincial de l'hygiène du milieu du travail - Lignes directrices nationales visant la limitation du bruit extérieur; Directives relatives au bruit communautaire (1998) de l'Organisation mondiale de la santé; Agence de protection de l'environnement des États-Unis (US EPA).
[58] Pièce P-21, p. 23.
[59] Pièce PG-2, p. 7.
[60] Pièce P-32, p. 15.
[61] Pièce P-32, p. 15.
[62] Pièce P-32, p. 16.
[63] Pièce P-32, p. 16.
[64] Pièce P-32, p. 17.
[65] Pièce P-32, p. 17.
[66] Loi sur les véhicules hors route; Règlement sur la motoneige; Autres règlements et limites de bruit au Québec: Règlement sur les carrières et sablières (R.R.Q., 1981, c. Q-2, r.2); Règlement sur les usines de béton bitumineux (R.R.Q., 1981, c.Q-2, r.25); Note d'instruction 98-01 du ministère de l'Environnement du Québec (Politique sur le bruit (1998) du ministère des Transports du Québec; Règlement relatif à la qualité de milieu du travail; Réglementation municipale: Règlement 2003-53, Ville de Mont-Tremblant; Règlements municipaux relatifs à la nuisance sonore (St-Faustin-Lac-Carré, La Conception, Ville St-Jovite, paroisse de St-Jovite, Labelle); Comité Consultatif fédéral-provincial de l'hygiène du milieu du travail - Lignes directrices nationales visant la limitation du bruit extérieur; Organisation mondiale de la santé; Agence de protection de l'environnement des États-Unis (US EPA).
[67] Pièce PG-2, p. 11.
[68] Pièce PG-2, p. 17.
[69] Pièce PG-2, p. 60 et 61.
[70] Rotterdam, the Netherlands, 29 June - 3 July 2003, Ronald G. De JONG, Tammo HOUTGAST, Ellis A.M. FRANSSEN & Wiini F. HOFMAN, Published by Foundation ICBEN 2003, Schiedan, the Netherlands, Pièce P-32 C), p. 183.
[71] Elliott H. BERGER, MS, INCE Bd. Cert. Senior Scientist, Auditory Research, publié en 2000, 604 & 605, Pièce P-32 D), p. 604 et 605.
[72] Id., p. 630.
[73] Partie 1: Grandeurs fondamentales et méthodes d'évaluation, 2e éd. 2003-08-01, P-32 B).
[74] Brigitta BERGLUND, Thomas LINDVALL, Dietrich H SCHWELA, Kee-Tai GOH, 3.4. Sleep Disturbance, 27; 4.2.3. Sleep disturbance effects, 39 Pièce P-32 A).
[75] Id., 4.3 Specific Environments; 4.3.1. Dwellings, 41, Pièce P-32 A).
[76] Pièce P-21, p. 3.
[77] Pièce P-91, p. 5.
[78] Pièce P-91, p. 5.
[79] Pièce P-73.
[80] Pièce P-32 B), p. 23.
[81] Monique LUSSIER, Développements récents en droit de l'environnement, De certaines notions et recours de droit civil en matière de responsabilité environnementale extracontractuelle, Service de la formation permanente Barreau du Québec, Éditions Yvon Blais, 1999, (124), p. 14
[82] Pièce P-91, p. 12.
[83] Pièces P-4, P-6 et P-7.
[84] Dictionnaire « Le Petit Larousse illustrée », 1999
[85] [1990] R.J.Q., 359, 397.
[86] Syndicat national des employés de l'hôpital St-Ferdinand c. Curateur public, [1994] R.J.Q. 2761 , p. 2785 et 2786 (C.A.).
[87] Id,. p. 2789.
[88] Id., p. 2792.
[89] Pierre DESCHAMPS, Développements récents sur les recours collectifs, Service de la formation permanente, Barreau du Québec, éd. Yvon Blais, 1999, pp. 192 et 193.
[90] Pièce DGC-1, Assurance de la responsabilité civile des entreprises, Chapitre Premier - Les Garanties, Garantie B, Préjudice personnel, 1. Nature et étendue de la garantie, p. 3.
[91] Pièce DGC-1, Chapitre IV - Définitions, p. 6.
[92] Pièce T-3, Section 1 - Coverages, Coverage B - Personal Injury Liability, 1. Insuring Agreement, p. 2 de 8.
[93] Pièce T-3, Chapitre V - Definitions, p. 7 de 8.
[94] Pièce P-10, Assurance de la responsabilité civile des entreprises, Garantie B - Préjudice Personnel et préjudice imputable à la publicité, 1. Nature et étendue de la garantie, p, 39 de 79.
[95] Pièce P-10, Chapitre V - Définitions, pp. 49 et 50 de 79.
[96] Pièce DGC-1, Assurance de la responsabilité civile des entreprises, Chapitre Premier - Les Garanties, Garantie A, Dommages corporels, dommages matériels et/ou privation de jouissance, 1. Nature et étendue de la garantie, p. 2.
[97] Pièce DGC-1, Chapitre IV - Définitions, p. 6.
[98] Pièce T-3, Section 1 - Coverages, Coverage A - Bodily Injury and Property Damage Liabiity, 1. Insuring Agreement, p. 1 de 8.
[99] Pièce T-3, Section V - Definitions, p. 7 de 8.
[100] Pièce P-10, Chapitre Premier - Les Garanties, Garantie A - Dommages corporels, dommages matériels et/ou privation de jouissance, p. 37 de 79.
[101] Pièce P-10, Chapitre V - Définitions, pp. 49 et 50 de 79.
[102] Précis des assurances terrestres, Éditions Thémis, 3e édition, 1999, pp, 25 et 169.
[103] Rémi MOREAU, La notion d'événement en assurance de responsabilité civile, (4 février 1987) p. 427; Marcus B. SNOWDEN et Marc G. LICHTY, Annotated commercial general liability policy, Canada Law Book, par: 11:20, p. 11-3.
[104] Butterworths, 1991, p. 118.
[105] Thomson - Carswell, 2002, Volume 1, 8.4 Fortuity, p. 8-24.
[106] Précité, note 103, p. 453.
[107] Pièce DGC-1, p. 4; Pièce T-3, "Avenant Absolution Exclusion"; Pièce P-10, p, 42 de 79.
[108] Précité, note 103, p. 427.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.