Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier

Section des affaires sociales

En matière d'indemnisation

 

 

Date : 27 avril 2023

Référence neutre : 2023 QCTAQ 04556

Dossier  : SAS-M-315484-2205

Devant les juges administratifs :

JACQUES RAMSAY

SONIA BOISCLAIR

 

M… C…

Partie requérante

c.

SOCIÉTÉ DE L'ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC

Partie intimée

 

 


DÉCISION


 


 


[1]                    Le Tribunal entend aujourd’hui un recours introduit par la requérante (Madame) le 3 juin 2022. Le recours est déposé après qu’elle ait essuyé un refus de la part de l’intimée, la Société de l’assurance automobile du Québec (la Société) de reconnaître un traumatisme craniocérébral (TCC) léger en relation avec son accident automobile du 27 octobre 2021, d’abord dans une décision du 23 décembre 2021, puis en révision le 5 avril 2022.

[2]                    Les deux points soulevés dans la décision du 5 avril 2022 du Service de révision administrative de la Société pour justifier le refus sont l’existence même du TCC léger et subsidiairement sa relation avec l’accident.

[3]                    L’existence ou non de ce diagnostic et de sa relation avec l’accident représentent donc les questions en litige que doit trancher le Tribunal aujourd’hui.

LES FAITS

[4]                    Le 27 octobre 2021, alors qu’elle est au volant de son véhicule sur le pont A, un autre véhicule change subitement de voie et vient heurter le sien du côté passager.

[5]                    Sur le coup, Madame ne se frappe pas la tête, mais elle décrit un mouvement latéral violent de la tête.

[6]                    Juste après la collision, Madame se sent au ralenti. Cependant, elle ne s’en inquiète pas, croyant qu’elle récupérera après s’être reposée à son domicile.

[7]                    Son véhicule étant fortement endommagé, le chauffeur de la remorqueuse la dépose de l’autre côté du pont d’où elle prend un taxi pour retourner à son domicile.

[8]                    À la maison, son conjoint veut l’amener voir un médecin, mais Madame refuse de se rendre à l’urgence. Elle obtient plutôt un rendez-vous avec son médecin de famille dans les 48 heures. Elle croit toujours qu’elle sera mieux après avoir dormi un peu.

[9]                    Le surlendemain 29 octobre 2021, elle conduit pour se rendre à son rendez-vous chez le médecin. Durant l’entrevue, elle aurait dit se sentir fatiguée et aurait mentionné avoir eu de la difficulté à se rendre. Les notes ne font pas état de cela. Seul est mentionné le fait que Madame soit étourdie. L’examen fait ce jour-là est essentiellement normal, y compris l’examen neurologique qui ne détecte aucun signe de traumatisme crânien. Le médecin pose le diagnostic de TCC léger et recommande une semaine de repos[1].

[10]               Au cours des jours suivants, Madame ne peut reprendre le volant, ses yeux bougent. Elle a mal à la tête. Elle se sent nauséeuse et n’a aucun appétit. Elle fonctionne comme un zombi. Il y a un délai entre la question et sa réponse. Elle est présente, mais se sent comme si elle n’était pas vraiment là.

[11]               Elle ne peut regarder la télévision. Elle ne peut plus lire. Elle peine à remplir le formulaire de la Société.

[12]               Son équilibre est incertain. Elle se sent comme sur un nuage.

[13]               Une semaine plus tard, elle reconsulte son médecin, cette fois-ci en consultation téléphonique[2]. Sur la base des symptômes que décrit Madame, il prolonge l’arrêt de travail et réfère Madame en physiothérapie où on lui fait faire plusieurs exercices de rééducation visuelle.

[14]               Madame aurait aimé retourner au travail en décembre. Toutefois, le retour au travail est retardé pour des considérations administratives jusqu’à ce qu’elle puisse effectuer un retour progressif début janvier 2022. Elle reprend alors le volant et retourne sur le pont Champlain.

[15]               Les premières journées sont difficiles alors que Madame se fatigue facilement et a de nombreux maux de tête. Elle est néanmoins capable de continuer sa progression et elle est de retour au travail à temps plein vers la fin du mois de février 2022. Elle estime qu’il lui a fallu jusqu’en août 2022 pour récupérer toutes ses capacités antérieures.

ANALYSE ET MOTIFS

[16]               Pour donner droit à une indemnité en vertu de la Loi sur l’assurance automobile[3] (LAA), il doit y avoir un fait accidentel et un préjudice subi par la personne. Dans le cas présent, la Société ne nie pas le fait accidentel, lequel est bien décrit dans le rapport d’accident[4].

[17]               La prétention de la Société est plutôt qu’il n’y a pas eu de TCC léger à la suite de l’accident, puisque Madame n’aurait pas présenté immédiatement ou dans les minutes suivant l’accident un des quatre signes de TCC léger énumérés dans le document Orientations ministérielles pour le traumatisme craniocérébral léger 2005-2010[5] (Orientations).

[18]               Faut-il le préciser, ce document n’a pas force de loi. Il est issu d’une initiative commune du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et de la Société. Il a été produit en 2005. À l’époque, il a reçu l’approbatur du Collège des médecins du Québec. Comme le titre l’indique, il visait une période spécifique 2005-2010. La Société a activement contribué tout au long des travaux au niveau de la recherche, des avis et de la rédaction. Elle est d’ailleurs l’un des deux promoteurs de ces travaux avec le MSSS[6].

[19]               La définition retenue de TCC léger emprunte largement à celle retenue par le Task Force de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et produite l’année précédente (2004).

[20]               Les travaux du Task Force ont été financés majoritairement par quatre partenaires assureurs, dont la Société[7]. Autrement dit, si le Task Force était venu présenter ces travaux au Québec, leur première diapositive aurait été une mise en garde contre un possible conflit d’intérêts.

[21]               En effet, bien que les travaux aient été rigoureux et en accord avec la pensée scientifique de l’époque, il faut reconnaître que la définition très stricte du TCC léger qui a été adoptée favorise les fournisseurs de service, tel le MSSS, en leur permettant de limiter l’offre de services, et les assureurs, telle la Société, en relevant le seuil d’éligibilité. Il y a là un biais cognitif indéniable.

[22]               Le document a depuis fait l’objet de critiques et d’appels à en préciser le contenu, entre autres dans un document de l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS), intitulé Traumatisme craniocérébral léger : mise à jour des connaissances en préparation de la révision des orientations ministérielles pour le traumatisme craniocérébral léger (2005-2010).[8] Puisque l’avocate de la Société y a fait référence dans sa plaidoirie en citant les paragraphes 41 et 42 de la décision 2020 QCTAQ 10339 reproduit plus bas, il convient que le Tribunal se penche au moins sur le contenu de ces deux paragraphes, d’autant plus que Madame a aussi mentionné les publications de l’INESSS lors de sa demande de révision auprès de la SAAQ[9] :

L’avocat de Madame invite le Tribunal à considérer le document de l’INESSS sur les mises à jour des connaissances en préparation de la révision des orientations ministérielles. Il souligne que les orientations ministérielles ne sont pas à jour et que l’INESSS propose des changements dans les critères à considérer pour un TCC léger.

À cet égard, le Tribunal considère que le document de l’INESSS est un outil de travail en vue de revoir les orientations ministérielles et non un diagnostic. Les mises en garde dans ce document visent notamment à indiquer aux professionnels de la santé à poursuivre leur investigation. Le Tribunal conclut que ce document n’invalide en rien les orientations ministérielles présentement en vigueur et en lien avec la question en litige[10].

[23]               Cette formation constate que ce document est produit par l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS), un organisme dont la réputation n’est plus à faire et qui est considéré comme impartial. Bien qu’il ne soit qu’un outil de travail en vue de travaux futurs, le document de l’INESSS représente une revue de la littérature exhaustive et contemporaine (2018) qui vient à tout le moins mettre un bémol sur la définition plus rigide du TCC léger offerte dans le document Orientations. De l’analyse des articles répertoriés, il est certainement permis d’affirmer qu’il existe d’autres perspectives de définition du TCC léger que celle adoptée par les travaux du MSSS et de la SAAQ. Dès lors, il convient, en 2023, d’accueillir le contenu du document Orientations avec circonspection.

[24]               Par ailleurs, de prétendre que les orientations adoptées en 2005 restent en vigueur jusqu’à une éventuelle prochaine mouture néglige le fait que le document de 2005 doit son existence en grande partie à l’initiative de la Société. Dans la mesure où la définition existante lui convient, pourquoi celle-ci convoquerait-elle un nouveau comité ? La Société n’a certainement aucune obligation de réviser son travail.

[25]               Quoi qu’il en soit, dans cette affaire, la prétention de la Société est donc qu’en l’absence d’une perte de conscience, d’une amnésie, de signe neurologique transitoire, de confusion ou de désorientation, il ne saurait être question d’un TCC léger.

[26]               Qu’en est-il des symptômes initiaux de Madame ?

[27]               Madame reconnaît qu’elle n’a pas reçu de coup à la tête lors de la collision. Elle décrit plutôt un mouvement d’oscillation latéral de la tête. Les deux mécanismes sont reconnus compatibles avec un TCC.

[28]               Madame dit ne pas avoir perdu conscience. Le rapport d’accident est à cet effet, puisqu’il n’indique aucun blessé. Une courte perte de conscience d’une minute ou moins aurait facilement pu passer inaperçue étant donné que Madame est seule à bord de son véhicule. Toutefois, comme le véhicule n’a jamais dévié de sa voie, il serait effectivement fort improbable qu’il y ait eu perte de conscience.

[29]               A-t-elle souffert d’amnésie ? Encore là, Madame a témoigné qu’elle n’avait pas l’impression d’avoir souffert d’amnésie. Si elle a oublié des choses, elle croit que ce serait sous le coup de l’énervement.

[30]               Est-elle confuse ou désorientée ? Madame a témoigné que ce n’est pas son souvenir. Toutefois, toujours lors de son témoignage, Madame a expliqué qu’elle était dans un état « je suis là, je ne suis pas là »[11]. Ces symptômes sont apparus dans les premiers instants suivant l’accident.

[31]               Elle a expliqué qu’elle a appelé son mari et que ce dernier lui a dit de faire le 9-1-1. Le préposé au 9-1-1 lui a alors suggéré de déplacer sa voiture sur l’accotement du pont. Elle s’est exécutée et elle est ensuite sortie de sa voiture. Les policiers qui sont intervenus lui ont dit de rentrer dans sa voiture parce que c’était dangereux d’être à l’extérieur sur le pont. Lors de son témoignage, elle a reconnu que son comportement était dangereux et ne faisait pas de sens. Encore aujourd’hui, elle se l’explique mal.

[32]               Ils lui ont demandé si elle était blessée et elle a dit que non, croyant qu’elle était simplement sous le choc émotif. Elle agissait toutefois au ralenti, note-t-elle, avec un délai de réaction pour répondre aux questions.

[33]               Puisque son mari avait eu un accident beaucoup plus important au niveau matériel et qu’il était malgré tout retourné au travail dès le lendemain, elle a pensé qu’il en serait ainsi pour elle. 

[34]               Selon Madame, le chauffeur de la remorqueuse, après l’avoir amenée sur la RiveSud de l’autre côté du pont, aurait attendu l’arrivée du taxi pour ne pas la laisser seule. Madame croit que ceci pourrait être dû au fait que son comportement était légèrement décalé.

[35]               À la maison, elle ne souhaite que dormir. Elle espère se réveiller fraîche et disposée. Au lieu de cela, elle est apathique et désintéressée.

[36]               Elle voit son médecin le surlendemain. La note médicale est donc relativement contemporaine à l’accident, soit à peine 48 heures après l’accident.

[37]               Le témoignage de Madame vient expliquer la brièveté de la note du 29 octobre 2021[12]. Madame confirme qu’elle minimisait ses symptômes et donc pourrait avoir négligé de rapporter certains de ses symptômes. De fait, à cette occasion seule est rapportée la présence d’étourdissements.

[38]               Par ailleurs, au-delà de l’anamnèse, l’examen est normal, y compris les épreuves cérébelleuses et le test de Romberg[13]. Cela n’a rien d’étonnant et ce n’est pas déterminant puisque, en matière de TCC léger, cet examen est souvent normal, particulièrement lorsque cet examen n’est pas fait sur les lieux de l’accident. 

[39]               Nonobstant cela, il n’est pas anodin pour le Tribunal que l’impression générale du médecin soit néanmoins celle d’un TCC léger et qu’il ait posé ce diagnostic dès cette première visite. Il faut conclure qu’il a effectivement été convaincu par l’anamnèse obtenue de la part d’une patiente qu’il connait bien.

[40]               Un élément important ressort de cette note du 29 octobre 2021.

[41]               Le médecin traitant de Madame a jugé utile de débuter celle-ci par la mention « Pt est arrivée 20 min en retard ».

[42]               Interrogée sur cette phrase, Madame a expliqué avoir conduit pour se rendre chez son médecin, contre l’avis de son mari. Elle croyait être suffisamment bien pour conduire seule. Or, elle a eu de la difficulté à se diriger et à trouver sa route alors qu’elle a l’habitude de s’y rendre aisément, puisque son médecin de famille pratique à cet endroit depuis de nombreuses années. Elle ne comprend pas comment elle a pu s’égarer.

[43]               À la suite de cette première consultation auprès de son médecin traitant, Madame a confié avoir été étourdie. Elle en attribue alors la cause à son diabète. Par conséquent, elle prend soin de manger et d’attendre avant de repartir.

[44]               Jusque-là, elle est toujours convaincue de n’avoir eu qu’un petit accident étant donné les dommages subis par son véhicule. Avec l’apparition des symptômes post-traumatiques, son état a empiré dans la semaine qui a suivi. Elle doit alors se rendre compte à l’évidence que quelque chose ne tourne pas rond. Mais même à ce moment, elle croit souffrir d’un état de stress post-traumatique et ne songe pas à la possibilité qu’elle puisse avoir subi un TCC.

[45]               Par la suite, elle a présenté plusieurs symptômes classiques d’une période posttrauma cérébral avec des nausées, des maux de tête, des étourdissements et de la fatigue. Ces symptômes ne sont évidemment pas exclusifs au TCC. Cependant, pris ensemble, dans un contexte d’apparition dans les jours suivant l’accident et associés au ralentissement psychomoteur noté immédiatement après l’accident, ils orientent également vers un TCC léger. Par ailleurs, les experts savent depuis longtemps que « les symptômes posttraumatiques peuvent apparaître de manière imprévisible et varier indépendamment de la gravité objective de l’atteinte traumatique originelle[14] ».

[46]               Pour le médecin de famille lors de son entretien téléphonique une semaine plus tard, ceci vient confirmer son impression première du 29 octobre[15]. Il prolonge alors l’arrêt et oriente Madame vers la physiothérapie.

[47]               D’emblée, le Tribunal souhaite établir qu’il estime la crédibilité du témoin excellente malgré son témoignage quelque peu difficile à suivre. Elle a témoigné de façon sincère, allant même jusqu’à reconnaître des éléments qui lui étaient défavorables tels que l’absence d’amnésie ou de perte de conscience. Elle n’a pas amplifié ses symptômes ni cherché à tirer profit de cet accident. Elle a toujours été contre l’idée que son arrêt de travail se prolonge allant jusqu’à écrire à son député pour qu’il intervienne en sa faveur[16]. La durée de ses symptômes est celle souvent rencontrée avec une telle blessure[17]. À son médecin, elle dit aller déjà beaucoup mieux lors du rendez-vous du 5 décembre[18], à peu près six semaines après l’accident. La concentration est meilleure, les maux de tête moins fréquents. Seule persiste alors une certaine fatigue.

[48]               L’argumentaire de la Société repose sur le fait que les symptômes et signes présentés par Madame à la suite de son accident ne répondent pas aux critères des Orientations.

[49]               La Société allègue que le préjudice n’a pas été prouvé en vertu de la doctrine médicale soumise. Elle soumet que le TCC ne constitue ici qu’une simple possibilité. L’avocate de la Société suggère que d’autres étiologies pourraient être en cause, en l’occurrence, le stress occasionné par la peur d’avoir peut-être perdu un embryon au détour de démarches en fertilité ou encore un trouble anxieux pour lequel Madame prenait déjà une médication.

[50]               Le Tribunal n’est pas d’accord. Il estime au contraire que le témoignage de Madame a permis d’établir que ce lien est plausible, logique et suffisamment étroit. Il y a clairement eu une altération des fonctions cognitives à la suite de l’accident. De plus le rétablissement rapide de Madame ne milite pas en faveur d’une cause reliée à l’anxiété ou à la venlafaxine que prend Madame. En effet, le trouble anxieux et le traitement pharmacologique ont persisté bien au-delà de l’épisode. Enfin, ces conditions ne répondent pas à la physiothérapie avec rééducation visuelle qu’a reçue Madame comme il a été observé chez cette dernière[19].

[51]               Le fardeau de la preuve imposée à Madame n’est pas celui de la causalité scientifique. La causalité en droit s’établit selon la prépondérance des probabilités. En d’autres mots, le Tribunal ne requiert pas une certitude médicale pour trancher. Une preuve médicale peut être nuancée et complétée.

[52]               Aucune expertise médicale n’a été produite de part et d’autre. De plus, le traitement de la demande d’indemnité de Madame s’est apparemment fait sans que le Service de l’évaluation médicale de la Société ne soit mis à contribution. À tout le moins, il n’y a aucune mention à cet effet dans les notes de la Société.

[53]               Le Tribunal doit donc prendre en compte tant la preuve médicale que la preuve factuelle.

[54]               D’un côté, le Tribunal doit considérer la doctrine médicale de 2005 à partir de laquelle la Société demande au Tribunal d’évaluer la condition de Madame même si les connaissances en matière de TCC ont évolué au cours des derniers 20 ans, ce qui affecte sa valeur probante.

[55]               En fonction de cette doctrine, force est de constater que les symptômes de Madame ne rencontrent pas les critères stricts qui s’y trouvent. Lors de l’élaboration de la définition du TCC léger en 2004, le choix a été fait d’opter pour une grande spécificité aux dépens d’une sensibilité moins grande. C’est le biais cognitif mentionné plus haut.

[56]               C’est donc dire qu’indubitablement, la personne qui rencontre les critères qui figurent au document Orientations a bel et bien un TCC léger. Par contre, cela signifie que d’autres, qui ont aussi un TCC léger ne seront pas identifiés parce qu’ils ne rencontrent pas cette définition stricte.

[57]               Le Tribunal estime que c’est exactement le cas de Madame. Lors de son témoignage, elle a expliqué ses symptômes de façon convaincante. Son médecin de famille a posé, dès le début, soit à peine 48 heures après l’accident, un diagnostic de TCC léger.

[58]               En tout état de cause, il n’y a pas d’autre explication logique pour la maladie de Madame avec ses symptômes cognitifs, somatiques et le trouble de l’équilibre. Dans le cas présent, la prépondérance des probabilités penche du côté de la position de Madame.

[59]               La jurisprudence déposée par l’avocate de la Société réfère aux Orientations. Avec respect, et pour les raisons énumérées plus haut, dans ce cas-ci, les symptômes ne peuvent être expliqués autrement que par un TCC léger.

[60]               C’est non seulement la cause la plus plausible, c’est aussi la seule qui a été démontrée par une preuve prépondérante.

POUR CES MOTIFS, le Tribunal :

  • Accueille le recours;
  • Infirme la décision rendue le 5 avril 2022.

 

 


 

JACQUES RAMSAY, j.a.t.a.q.

 

 

SONIA BOISCLAIR, j.a.t.a.q.


 

Jacques, Boisvert & Gauthier

Me Marie-Ève Desgagné

Procureure de la partie intimée


 


[1] Dossier administratif, p. 55.

[2] Ibid, p. 54.

[3] RLRQ, chapitre A-25.

[4] Dossier administratif, p. 12.

[5] Pièce I-1 «Orientations ministérielles pour le traumatisme craniocérébral léger 2005-2010», p.33, voir encadré portant sur la définition du TCC léger. Gouvernement du Québec, 2005.

[6] Ibid, p. 3. Message du sous-ministre Dr Iglesias.

[7] Ibid, p. 14.

[8] Catherine TRUCHON et al.,«Traumatisme craniocérébral léger : mise à jour des connaissances en préparation de la révision des orientations ministérielles pour le traumatisme craniocérébral léger (2005-2010)», [Québec], Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS), mars 2018, 115 pages. [En ligne], <https://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/INESSS/Rapports/Traumatologie/INESSS_Traumatisme_craniocerebral_leger.pdf

[9] Dossier administratif, p. 96.

[10] 2020 QCTAQ 10339, paragraphes 41 et 42.

[11] Repère de l’audience, 9 h 44.

[12] Dossier administratif, p. 55.

[13] Le test de Romberg sert à mesurer la proprioception. Le test est considéré comme positif si vous êtes incapable de rester debout longtemps les yeux fermés sans perdre l’équilibre.

[14] Pièce I-1, Orientations, page 88.

[15] Dossier administratif, p. 54.

[16] Il y aurait eu un litige avec l’employeur et l’assureur au sujet du retour au travail que souhaitait Madame.

[17] Orientations, p. 87. Ainsi « Le Task Force conclut de manière définitive sur la foi d’études solides (phases I et II) que l’on constate une résolution rapide des plaintes à l’intérieur des premières semaines suivant le TCCL et qu’il n’y a pas, dans la très grande majorité des cas, de symptômes cognitifs objectivables qui soient attribuables au TCCL après un à trois mois d’évolution et ce, particulièrement chez l’enfant. »

[18] Dossier administratif, p. 45.

[19] Dossier administratif, p.48.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.