Décision

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          COMMISSION D'APPEL EN MATIÈRE DE
          LÉSIONS PROFESSIONNELLES

     QUÉBEC    QUÉBEC, le 12 AVRIL 1994

     DISTRICT D'APPEL   DEVANT LE COMMISSAIRE:    Me CLAUDE BÉRUBÉ
     DE QUÉBEC

     RÉGION: Québec

     DOSSIERS: 40730-03-9206
               43843-03-9210

     DOSSIER CSST:   AUDITION TENUE LE:        8 MARS 1994
     0991 23945

     DOSSIERS BRP:
     6080 4541 À:           QUÉBEC
     6086 8769

          MONSIEUR JEAN-YVES DENIS
          200, rue Pont Scott, app.412
          QUÉBEC (Québec)
          G1M 3E5

                                PARTIE APPELANTE

          et

          SEARS CANADA INC.
     

3150, boul. Portland SHERBROOKE (Québec) J1L 1K3 PARTIE INTÉRESSÉE et COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL Direction régionale Québec Nord 730, boul. Charest Est QUÉBEC (Québec) G1K 7S6 PARTIE INTERVENANTE D É C I S I O N 40730-03-9206 Le 19 juin 1992, M. Jean-Yves Denis (le travailleur) dépose à la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d'appel) une déclaration d'appel à l'encontre d'une décision du Bureau de révision Québec rendue le 7 mai 1992.

Dans cette décision unanime, le Bureau de révision déclare irrecevable la demande de révision logée par le travailleur en date du 13 mars 1991, concernant les décisions rendues par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la Commission), le 24 septembre 1990, parce que hors délai.

43843-03-9210 Le 2 octobre 1992, le travailleur dépose à la Commission d'appel une déclaration d'appel à l'encontre d'une décision du Bureau de révision Québec, rendue le 13 août 1992.

Dans cette décision unanime, le Bureau de révision maintient les décisions rendues par la Commission, les 6 et 8 mai 1991 à l'effet de refuser la réclamation du travailleur, datée du 12 mars 1991, pour rechute, récidive ou aggravation et de ne pas l'admettre à la reprise du processus de réadaptation en vertu de l'article 51 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001).

OBJET DE L'APPEL 40730-03-9206 Le travailleur demande à la Commission d'appel d'infirmer la décision du Bureau de révision et de prolonger, suivant l'article 176.12 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (L.R.Q., c. S-2.1), pour motif raisonnable, le délai de révision prévu à l'article 358 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

43843-03-9210 Le travailleur demande à la Commission d'appel d'infirmer la décision du Bureau de révision et de reconnaître la relation entre la rechute, récidive ou aggravation du 12 mars 1991 et sa lésion professionnelle du 4 décembre 1987. Il demande également que lui soit reconnu son droit au versement de l'indemnité de remplacement du revenu prévu par l'article 45 et son admissibilité à la reprise du processus de réadaptation suivant l'article 51 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

INTERVENTION DE LA C.S.S.T.

40730-03-9206 43843-03-9210 La Commission est intervenue dans les deux dossiers, suivant l'article 416 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

AUDITION Le travailleur est présent à l'audition et est représenté par procureur.

Sears Canada inc. (l'employeur), quoique dûment convoqué, n'est pas représenté.

La Commission, partie intervenante au dossier, est représentée par procureure.

LES FAITS 40730-03-9206 Le travailleur conteste les décisions rendues le 24 septembre 1990 par la Commission, déterminant comme emploi convenable celui de messager et établissant le revenu brut annuel de 20 000 $.

Dans son témoignage devant la Commission d'appel, le travailleur indique qu'il est âgé de 50 ans, qu'il possède une 6ième année et qu'il a toujours été livreur ou homme d'entrepôt. Il précise avoir pris connaissance, à la fin de septembre, des décisions du 24 septembre 1990 de la Commission et en avoir compris qu'on lui avait déterminé un emploi convenable et que cela lui assurerait un revenu de 20 000 $ jusqu'à l'âge de 65 ans.

Il précise: «En octobre, j'ai fait appel à Mme Gagné et je lui ai dit que je ne comprenais pas c'est quoi. Elle m'a répondu: "c'est pas grave on va arranger ça et quand au salaire s'est tel que marqué sur le papier".» Il précise qu'après cette conversation, il a été dirigé à un M.

Morasse pour un ajustement de salaire qui devait être versé rétroactivement.

Il a effectivement rencontré M. Morasse au bureau de la Commission. En fin de janvier ou au début de février, il allègue être entré en contact avec Mme Gagné et avoir pris rendez-vous.

Celle-ci lui aurait alors dit que le montant de 20 000 $ serait le salaire brut qu'il toucherait de la Commission jusqu'à 65 ans: «J'ai revu M. Morasse en février qui m'informe que j'aurais dû contester la décision du 24 septembre.

Alors j'ai voulu voir des gens plus haut placés, j'ai parlé à M. Bourdages et Mme Thibeault.» Suivant ses dires, c'est alors que pour la première fois, une représentante de la Commission, Mme Thibeault, l'informe que: «C'est passé mais écrivez votre lettre quand même pour contester.» À cela, il allègue avoir répondu: «J'ai dit pas besoin, Mme Gagné m'a dit que tout était arrangé.» Il ajoute alors: «J'ai mandaté Me Bellemare en mars quand j'ai vu qu'il n'y avait rien qui marchait. Ça avait l'air que j'avais des problèmes.» Il est ensuite contre-interrogé par la procureure de la Commission en regard d'une pièce qu'elle dépose sous la cote I-1; il s'agit d'une note manuscrite, non signée et datée, faisant état de la scolarité du travailleur. Le travailleur déclare ne pas se souvenir de ce document puis il précise ne pas l'avoir composé lui-même mais l'avoir écrit.

Questionné en regard des accidents du travail antérieurs à celui qui a donné lieu à la présente réclamation, il précise avoir été victime de trois ou quatre accidents du travail, admettant par la suite que son dossier révèle plutôt onze événements.

Quant à ses rapports avec l'employeur, il ressort de son témoignage qu'il n'était à l'emploi de Sears Sherbrooke que depuis deux mois au moment de sa lésion professionnelle et que la décision de quitter Québec pour travailler à Sherbrooke n'était pas la sienne mais avait été prise par l'employeur aux bureaux de Toronto.

En contre-interrogatoire, il admet avoir déclaré, en février, à la Commission: «Je vais aller consulter Me Bellemare.» Mais il précise immédiatement ne pas avoir donné suite parce que, après l'entrevue avec M. Morasse, il a entrepris des démarches téléphoniques auprès de différents intervenants de la Commission; il ajoute: «Ça m'aurait donné quoi d'aller voir un avocat.» Enfin, selon ses dires, c'est quelqu'un chez l'employeur qui, en janvier, lui a dit qu'il n'avait pas compris la teneur de la lettre de la Commission, ce dont il a reçu confirmation lors de son entrevue avec M. Morasse.

La conseillère en matière de réadaptation de la Commission, Mme Gagné, est entendue à l'audition.

Après avoir expliqué à la Commission d'appel, le processus de réadaptation suivi dans ces dossiers, fait état des sessions, rencontres, contacts et informations transmises au travailleur, en regard de la détermination d'un emploi, elle précise enfin, que celui-ci a toujours été tenu informé des étapes de son dossier. C'est avec son accord qu'a été déterminé l'emploi convenable de messager et cette possibilité avait été amenée par le travailleur lui-même.

Quant au calcul du salaire, il est établi d'après la liste informatisée et le travailleur en a été tenu informé tout au long du processus.

Elle a eu des rencontres avec le travailleur pour lui expliquer le fonctionnement des indemnités réduites et lorsque le travailleur lui a fait part de ses intentions de contester ou de contacter son avocat, elle lui a suggéré effectivement de rencontrer celui-ci.

Contre-interrogée par le procureur du travailleur, elle admet être informée que le travailleur a pris contact avec différents intervenants de la Commission dont M. Bourdages. Suite aux désaccords manifestés par le travailleur, elle témoigne lui avoir dit de faire une demande écrite de contestation et a donné au travailleur, à sa demande, les informations pour qu'il puisse contacter son supérieur immédiat; c'est d'ailleurs ce qui est écrit dans les notes évolutives du dossier.

Elle insiste sur le fait que, suite à l'appel du travailleur, manifestant son désaccord, elle a constaté avec celui-ci l'expiration de son délai de demande de révision et lui avoir dit de faire sa demande par écrit. Elle se souvient cependant que le travailleur lui a indiqué qu'il préférait parler au plus haut gradé.

S'en remettant aux notes évolutives contenues au dossier de la Commission d'appel, Mme Gagné ajoute qu'avant le 1er février 1991, le travailleur n'a pas manifesté son intention de contester les décisions de la Commission du 24 septembre 1990, si ce n'est qu'il a fait les demandes afin que soit corrigé le calcul de la base de salaire pour le versement des indemnités avec rétroactivités.

Le dossier de la Commission d'appel contient un écrit sous la signature de Mme Magalie Gagné daté du 5 mars 1991, qu'il importe de reproduire ci-après: «Après avoir à plusieurs reprises contacté plusieurs intervenants de la ... à tour de rôle, notre supérieur et même le ... régional, (+) a finalement contacté M. Laliberté; (+) contestera par écrit; (+) devra rencontrer Me Bellemare vendredi.

(+) a commencé à parler de rencontrer son avocat au début de février. Disait qu'il ne comprenait pas salaire E.C. et irréduites. Nous lui avons expliqué à plusieurs reprises. À chaque fois, semblait comprendre et à chaque fois, nous lui disions que c'était son droit de rencontrer son avocat s'il se sentait plus sécure ainsi.» Un deuxième document portant la date du 7 mars 1991 permet de constater, qu'à cette date, le travailleur a informé la représentante de la Commission que: «L'emploi n'a pas fait. A rendez-vous avec Me Marc Bellemare.» Le mémo interne de la Commission contient ce qui suit: «Dit qu'il a essayé 4 hres et qu'il n'était pas capable. Dit qu'il ne se cherchera pas d'emploi dans de domaine. Nous lui suggérons quand même de poursuivre sa recherche d'emploi dans ce domaine ou dans un autre pour ne pas être pénaliser à la fin de recherche d'emploi. Nous répète qu'il a mis son dossier entre les mains de Maître Bellemarre.

D'accord.» (sic) 43843-03-9210 Les faits en relation avec le présent dossier font suite à ceux énoncés dans le dossier 40730-03-9206.

À la suite des décisions de la Commission du 24 septembre 1990, déterminant un emploi convenable de messager avec salaire annuel de 20 000 $, le travailleur a participé à un groupe d'intégration au travail et dans le cadre de celui-ci, a communiqué par téléphone avec l'employeur éventuel, Trajet Spécial inc.. Il précise: «Il m'a dit de venir le voir.» Le travailleur a effectivement rencontré l'employeur qui lui aurait dit: «On va essayer.» Dans le cadre de cet emploi, il s'agissait, pour le travailleur, de livrer et de cueillir des enveloppes ou des petits colis.

Suivant celui-ci, le salaire devait être basé sur le millage effectivement parcouru.

Un mémo interne de la Commission, daté du 5 mars 1991, dont il fait état précédemment dans la présente décision contient la mention suivante: «Nous avise qu'un (É) a communiqué avec lui.

«TRAJETS SPÉCIAUX».

Débuterait 6-03-1991 Dit qu'il y va p-c-qu'il faut qu'il essaye mais n'est au départ pas intéressé par le salaire soit 45 % des recettes.

Nous l'avisons qu'il pourrait commencer à recevoir irréduites suit à l'occupation de l'E.C.» Il a alors commencé le travail, le 6 mars 1991, et a cessé après quatre heures de travail, se disant: «incapable de flexion et de rotation, nécessité par le déblayage de la voiture et les entrées et sorties de la voiture.» En réponse aux questions de la Commission d'appel, le travailleur est incapable de préciser les termes de l'entente qui prévalait quant au salaire, aux horaires et aux autres conditions de travail.

Dans les faits, il n'a effectué que sept ou huit livraisons entre 8 h 15 et 12 h 15, le 6 mars 1991 et s'est déclaré par la suite incapable de continuer. Il n'a pas été vu en consultation, le 6 mars, et s'est reposé chez lui. Il n'a pas eu besoin de prendre de médicament, il rencontre une seule fois, le 12 mars 1991, le Dr Thivierge alors que son médecin traitant, le Dr Lessard, est absent.

Dans son témoignage, il précise qu'il ne s'agissait pas d'un emploi payant et qu'après quatre heures d'ouvrage, il avait dépensé 8 $ d'essence en plus d'avoir eu mal au dos et à la jambe gauche.

Le travailleur présente, le 12 mars 1991, une réclamation pour rechute, récidive ou aggravation de sa lésion professionnelle du 4 décembre 1987. La description de l'événement contenue à la réclamation est la suivante: «A essayer un emploi convenable le 5/03/91 chez Trajet Spécial et n'a pu le faire plus de 4 hre cause de douleurs (messager) voir rapport médical du Dr Carol Thivierge.» (sic) Le 12 mars 1991, le Dr Carol Thivierge complète effectivement un formulaire d'attestation médicale contenant la description suivante: «Radiculopathie L5. A tenté un emploi convenable courrier messager mais impossible trop de douleur.

Devra recherche un autre emploi.» Le 6 mai 1991, la Commission rend la décision suivante: «À la suite de l'étude du rapport médical à votre dossier, nous ne pouvons accepter votre réclamation du 12 mars 1992 car il nous a pas démontré une aggravation médicale. En effet, sur le rapport fait le 12 mars 1991 de votre médecin traitant, la radiculopathie L5 était déjà présente lors de l'évaluation médicale faite par le docteur Gérard Leblanc le 20 novembre 1989.» Le 8 mai 1991, la Commission confirme ce qui suit au travailleur: «Suite à l'étude de votre dossier, la présente vous confirme que vous n'êtes pas admissible à une reprise du processus de réadaptation en vertu de l'article 51 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

En effet, vous n'occupiez pas l'emploi convenable à temps plein lorsque vous avez cessé de l'exercer.» ARGUMENTATION 40730-03-9206 Le procureur du travailleur, tout en reconnaissant que la demande de révision a été présentée hors délai, soumet que le Bureau de révision aurait dû relever le travailleur de son défaut et prolonger le délai pour motifs raisonnables, le tout suivant l'article 176.12 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

Soumettant que la loi de 1985 (L.A.T.M.P.) parle de motif raisonnable alors qu'antérieurement, il fallait démontrer l'impossibilité d'agir, il soutient que c'est un allégement notable du fardeau de la preuve qui incombe au travailleur et que cela ouvre la porte à la notion d'équité.

Il précise que les notes évolutives contenues au dossier de la Commission d'appel ne sont pas le reflet réel des événements puisque «tout n'y est pas noté».

Suivant ses prétentions, tous les agissements du travailleur démontrent qu'il n'a pas saisi la portée des décisions du 24 septembre 1990. Quand il a bien compris, dit-il, il a agi et a toujours utilisé les moyens suggérés.

Reprenant le fil des événements, il prétend que, c'est à compter de février, que le travailleur sait qu'il ne recevra pas, jusqu'à 65 ans, l'indemnité de remplacement du revenu confirmée par la Commission.

Enfin, il prétend que le travailleur n'a pas eu de raison de douter que son cheminement de rencontre avec les autorités supérieures était valable.

Quant à la procureure de la Commission, elle résume les témoignages et précise que le travailleur soit lire, qu'il a pris connaissance des différentes lettres de la Commission et qu'il a déjà contesté auparavant au moins une décision de la Commission devant la Commission d'appel.

Quant aux bonnes relations supposées entre le travailleur et son employeur, elle soumet que l'employeur a déjà contesté le fait accidentel, a refusé de réintégrer le travailleur dans un poste allégé et a présenté une demande suivant l'article 246; le travailleur est donc bien informé qu'il ne peut pas se fier sur son employeur pour voir au bon cheminement de son dossier.

Quant à la supposée contestation verbale que prétend avoir faite le travailleur au début d'octobre 1990, il ne s'agit que d'une simple allégation, aucune preuve.

Elle soumet, à l'appui de ses prétentions, deux décisions de la Commission d'appel, dans les affaires: Lelièvre c. Supermarché du Boulevard inc.1 et Guy Chenay et Forme G.G. inc.2.

43843-03-9210 Dans ce dossier, le procureur du travailleur soutient que la réclamation du travailleur est en relation avec sa lésion professionnelle initiale. Il soumet que cette relation peut être établie à l'aide de l'évaluation pratiquée par le Dr Leblanc, en 1989.

En regard de l'article 51, il prétend que le travailleur est retourné au travail dans un emploi à plein temps et que la preuve démontre que cet emploi n'était pas convenable.

Quant à la procureure de la Commission, elle soumet à la Commission d'appel que la preuve est prépondérante à l'effet que le travailleur n'a pas accompli un emploi convenable à plein temps et que la Commission n'est pas liée par les constatations du Dr Thivierge portant sur un aspect autre que médical.

En réplique, le procureur du travailleur soutient que l'article 51 ne permet pas l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire par la 1 8 juillet 1991, commissaire Élaine Harvey, CALP, district d'appel Montréal, dossier 28454.

2 18 avril 1991, commissaire Guy Perreault, CALP, district d'appel de Montréal, dossier 26171.

Commission qui doit s'en remettre à l'avis du médecin qui a charge du travailleur; en l'espèce, le Dr Thivierge rencontre cette qualification.

MOTIFS DES DÉCISIONS 40730-03-9206 Dans ce dossier, saisie de la demande du travailleur présentée en vertu de l'article 176.12 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, la Commission d'appel doit déterminer si celui-ci avait des motifs raisonnables qui permettent de prolonger le délai pour procéder à une demande de révision.

Le droit applicable est contenu aux articles 358 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et 176.12 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, lesquels se lisent comme suit: 358. Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision par un bureau de révision constitué en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (chapitre S-2.1).

Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou 233 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de l'article 256.

176.12 Un Bureau de révision peut, à la demande d'une partie, pour un motif raisonnable et aux conditions appropriés, prolonger un délai ou relever une partie des conséquences de son défaut de la respecter, si l'autre partie n'en subit aucun préjudice grave.

Pour les fins de la présente décision, la Commission d'appel est d'avis que le témoignage du travailleur constitue un élément essentiel.

Elle doit, en conséquence, y rechercher la narration exacte des événements, la véracité des allégations et juger de la crédibilité de ce témoignage en regard de l'ensemble de la preuve.

Malgré tout le respect pour l'opinion contraire, la Commission d'appel est d'avis que le travailleur n'est pas crédible lorsqu'il soutient: - qu'il n'a qu'une 6ième année, puisque la preuve démontre qu'il a effectivement une scolarité plus avancée; - quand il indique qu'il a placé un appel à la procureure de la Commission en octobre 1990 en lui disant qu'il ne comprenait pas le sens de la décision du 24 octobre et que celle-ci lui aurait répondu: «c'est pas grave on va arranger ça, quant au salaire, tel que marqué sur le papier». Cette allégation du travailleur n'est pas supportée par le contenu des notes évolutives ni par ses agissements subséquents et est, au contraire, contredite par la représentante de la Commission, notes à l'appui; - quand il confirme qu'en février, il a communiqué avec Mme Magalie Gagné, la représentante de la Commission, et qu'elle lui a dit: «que le 20 000 $ serait le salaire brut qu'il aurait jusqu'à 65 ans». Cette affirmation n'est pas supportée par les documents au dossier et est contredite par la représentante de la Commission; - quand il dit que c'est M. Morasse, de la Commission, qui l'informe, pour la première fois en février, qu'il aurait dû contester. Au contraire, le contenu des notes évolutives fait voir qu'il est informé dès le 1er février 1991 par Mme Gagné de la nécessité de faire une demande écrite puisque la date de contestation est expirée; - lorsqu'il modifie sa version, subséquemment en disant que c'est Mme Thibeault qui lui a finalement dit, pour la première fois: «...le délai est passé mais écrivez votre lettre quand même pour contester».

Point n'est besoin de reprendre un à un, tous les éléments du témoignage du travailleur qui ne concordent pas avec les faits.

La prépondérance de la preuve est à l'effet que celui-ci a préféré, à chacune des étapes de son dossier, à compter du 24 septembre 1990, faire des démarches auprès des hautes instances de la Commission plutôt que de procéder simplement, tel que cela lui a été mentionné à plusieurs reprises, par l'envoi d'un écrit contestant les décisions de la Commission.

La Commission d'appel est d'avis que le travailleur était bien conscient de la portée des décisions du 24 septembre 1990 et de la nécessité de produire, dans les délais, un écrit de contestation, si tel était alors sa volonté.

Non seulement le travailleur n'a-t-il pas respecté les exigences de la loi quant au délai de contestation, à compter du 24 septembre 1990 mais il a également fait fi des recommandations des représentants de la Commission, en toute étape du dossier, de déposer une demande de contestation écrite.

Dans l'éventualité improbable, cependant que ce n'est que le 1er février 1991 que le travailleur est valablement informé de ses droits et obligations, il ne s'exécute de son obligation, qu'en date du 13 mars, soit hors délai, et après le dépôt d'une nouvelle réclamation pour rechute, récidive ou aggravation.

La Commission d'appel est donc d'avis que le travailleur n'a pas fait valoir de motif raisonnable qui permette de le relever du défaut d'avoir produit, dans les délais requis à l'article 358 de la loi, une demande de contestation écrite à l'encontre de la décision de la Commission du 24 septembre 1990 et, par conséquent, son appel sera rejeté.

43843-03-9210 Dans ce dossier, la Commission d'appel est saisie de la demande du travailleur de reconnaître qu'il a été victime d'une lésion professionnelle par rechute, récidive ou aggravation, le 12 mars 1991. Pour ce faire, elle doit conclure à la relation entre la pathologie identifiée alors et la lésion professionnelle initiale du 4 décembre 1987.

Le rapport médical fourni par le travailleur au soutien de sa réclamation, fait état d'une radiculopathie L5.

Il apparaît à la Commission d'appel que la preuve médicale disponible ne permet pas de conclure à la relation entre un tel diagnostic établi à l'occasion de la rechute, récidive ou aggravation alléguée et celui d'entorse lombaire pour l'événement du 4 décembre 1987.

Au contraire, la preuve médicale prépondérante constituée principalement par les rapports des Drs Gérard Leblanc, Paul-O.

Nadeau et Jean-Marc Lessard, médecins traitant du travailleur, est à l'effet que le travailleur n'a pas subi une hernie discale, à l'occasion de l'événement de 1987, ce qui aurait pu être la cause de la radiculopathie au niveau L5 démontrée par un EMG positif et constaté par le Dr Deléan, le 6 septembre 1989.

Aucune preuve médicale n'est apportée par le travailleur qui permette de conclure que l'entorse lombaire diagnostiquée en 1987 puisse être à l'origine de la radiculopathie L5, dont l'apparition est, par ailleurs, antérieure à la rechute, récidive ou aggravation alléguée en date du 12 mars 1991.

Il ne s'agit donc pas là d'un élément susceptible de rechute, récidive ou aggravation, en 1991, puisque cela n'a pas été reconnu comme lésion professionnelle, en 1987.

En l'absence d'une preuve médicale prépondérante, la Commission d'appel ne peut conclure à la relation entre l'événement du 12 mars 1991 et l'événement initial de 1987.

Quant à la possibilité pour le travailleur de se prévaloir des dispositions de l'article 51 de la loi, la Commission d'appel, après analyse de la preuve, notamment du témoignage du travailleur, est d'avis que celui-ci ne rencontre pas les critères d'application de l'article 51.

En effet, la Commission d'appel est d'avis que le travailleur n'a pas occupé à plein temps un emploi convenable au sens de l'article 51. Aucune preuve ne permet de conclure à l'occupation d'un emploi à plein temps puisque le travailleur n'a fait qu'une démarche à l'essai et à lui-même quitté, après quelques heures, sur des prétextes ambigus.

Il soutient, dans un premier temps, avoir ressenti des douleurs dans sa jambe gauche et argumente surtout devant la Commission d'appel, qu'il s'agissait d'un emploi peu lucratif et peu intéressant. Il ne détenait pas de contrat de travail, ne peut préciser les conditions de son emploi, n'avait pas d'entente ni verbale ni écrite et il n'était qu'à l'essai.

La prépondérance de la preuve est à l'effet qu'en présence d'un emploi non intéressant, le travailleur a préféré s'abstenir.

La Commission d'appel conclut donc que le travailleur n'a pas occupé à plein temps l'emploi de messager.

La Commission d'appel est également d'avis que ce n'est pas sur l'avis du médecin qui a charge du travailleur que celui-ci a dû abandonner son emploi. De fait, c'est de sa propre initiative que le travailleur a abandonné cet emploi et ce n'est que six jours plus tard qu'il a consulté le Dr Thivierge, médecin généraliste qui n'a pu que constater les dires du travailleur qu'il rapporte ainsi: «A tenté un emploi convenable comme messager mais impossible: trop de douleurs - devra rechercher un autre emploi.» Ce médecin n'a pas soigné le travailleur, ne l'a pas suivi, n'a pas prescrit de médicament ni recommandé des traitements et n'a, dans les faits, que constater les dires du travailleur.

En conséquence, la Commission d'appel est d'avis que les conditions d'applications de l'article 51 ne se rencontrent pas en l'espèce. L'appel du travailleur ne peut être accueilli.

POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION D'APPEL EN MATIÈRE DE LÉSIONS PROFESSIONNELLES: Dans le dossier 40730-03-9206: REJETTE l'appel du travailleur, M. Jean-Yves Denis; CONFIRME la décision du Bureau de révision Québec rendue le 7 mai 1992; DÉCLARE que M. Jean-Yves Denis a transmis sa demande de révision des décisions de la Commission de la santé et de la sécurité du travail du 24 septembre 1990 en dehors des délais prévus dans la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et qu'il n'a pas établi de motif raisonnable pour être relevé des conséquences de son défaut; et DÉCLARE que les décisions de la Commission de la santé et de la sécurité du travail du 24 septembre 1990 sont devenues finales et exécutoires.

Dans le dossier 43843-03-9210: REJETTE l'appel du travailleur, M. Jean-Yves Denis; CONFIRME la décision du Bureau de révision du 13 août 1992; DÉCLARE que M. Jean-Yves Denis n'a pas subi de lésion professionnelle le 12 mars 1991; DÉCLARE que les conditions d'application de l'article 51 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ne sont pas rencontrées en l'espèce et que M. Jean-Yves Denis ne peut récupérer le droit à l'indemnité de remplacement du revenu et aux autres prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

CLAUDE BÉRUBÉ Commissaire LABRIE, BELLEMARE & ASSOCIÉS (Me Marc Bellemare) 1584, Chemin St-Louis SILLERY (Québec) G1S 1G6 Représentant de la partie appelante CHAYER, PANNETON, LESSARD (Me Christiane Desmeules) 730, boul. Charest Est QUÉBEC (Québec) G1K 7S6 Représentante de la partie intervenante

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.