Pinette c. Électro-Sorel enr. |
2017 QCCQ 3129 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
RICHELIEU |
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LOCALITÉ DE |
SOREL-TRACY |
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« Chambre civile » |
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N° : |
765-32-004789-161 |
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DATE : |
13 avril 2017 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
J. SÉBASTIEN VAILLANCOURT, J.C.Q. |
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MARIE-ÈVE PINETTE |
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Partie demanderesse |
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c. |
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ÉLECTRO-SOREL ENR. |
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Partie défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Marie-Ève Pinette demande au Tribunal d’annuler une vente qu’elle a conclue avec Électro-Sorel Enr. (ÉLECTRO) et portant sur un ensemble de laveuse et de sécheuse et de condamner Électro à lui verser la somme de 2 350$.
Questions en litige
[2] Le Tribunal est appelé à répondre aux questions en litige suivantes :
a) La vente conclue entre les parties doit-elle être annulée?
b) Madame Pinette a-t-elle droit à la somme de 2 350$?
Contexte
[3] Le 3 juin 2015, madame Pinette achète de Électro un ensemble de laveuse et de sécheuse usagées au prix de 850$. La facture[1] qui lui est remise par Électro ne contient pas le prix d’achat et il y est indiqué manuellement « garantie 3 mois-pièces et service ».
[4] Le jour même, madame Pinette constate, lors de l’utilisation de la laveuse, que celle-ci ne se vide pas de son eau.
[5] Elle communique avec le vendeur qui se présente sur les lieux et lui suggère d’utiliser un autre cycle de lavage, ce qui règlera effectivement le problème. Elle n’utilisera cependant aucun autre cycle de lavage par la suite.
[6] D’autre part, la laveuse fait, dès que madame Pinette commence à l’utiliser, un bruit anormal qui s’intensifiera au fil du temps. Elle en informe le vendeur qui lui répond que ce bruit est normal. Comme le bruit s’intensifie de plus en plus, elle communique de nouveau avec lui qui lui répond alors que la garantie de trois mois est expirée et qu’elle devra payer pour la réparation.
[7] Elle cesse définitivement d’utiliser les deux appareils environ dix mois après l’achat.
[8] Elle fait alors sa lessive à la buanderie lorsqu’elle a les moyens d’en payer les frais ou chez ses parents.
[9] Madame Pinette demande au Tribunal d’annuler la vente et de condamner Électro à lui payer la somme de 2 350$ correspondant au remboursement du prix d’achat de 850$ et la somme de 1 500$ en dommages-intérêts pour les déplacements qu’elle a dû effectuer pour faire sa lessive ainsi que la perte de temps causée par le mauvais fonctionnement de la laveuse.
[10] En défense, le représentant d’Électro, René Maltais, affirme étonnamment qu’il ne croit pas que madame Pinette ait réellement payé 850$ pour les électroménagers puisque le commerce ne vend pas d’appareils à un tel prix. Il reconnaît toutefois la facture produite par madame Pinette et y reconnaît la calligraphie de son associé. Il ne peut que constater que le prix de la vente n’y est malheureusement pas indiqué.
[11] D’autre part, monsieur Maltais plaide essentiellement que la garantie conventionnelle étant expirée, Électro ne peut être tenue responsable du mauvais fonctionnement de la laveuse.
Analyse et décision
[12]
En vertu de l’article
[13] Le fardeau de preuve repose en conséquence sur les épaules de madame Pinette.
[14]
L’article
[15]
Électro est par ailleurs tenue à la garantie de qualité prévue à
l’article
1726. Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus.
Il n’est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.
[16] Électro étant un vendeur professionnel, il existe une présomption que le bien est affecté d’un vice au moment de la vente lorsque le mauvais fonctionnement du bien survient prématurément :
1729. En cas de vente par un vendeur professionnel, l’existence d’un vice au moment de la vente est présumée, lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa détérioration survient prématurément par rapport à des biens identiques ou de même espèce; cette présomption est repoussée si le défaut est dû à une mauvaise utilisation du bien par l’acheteur.
[17] Le contrat en étant un de consommation, Électro est également tenue aux garanties prévues aux articles 37 et 38 de la Loi sur la protection du consommateur[2] (L.P.C.) :
37. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné.
38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.
[18] Monsieur Maltais soutient que la seule cause du bruit effectué par la laveuse est, selon lui, une mauvaise utilisation par madame Pinette qui a sans doute surchargé l’appareil.
[19] Le Tribunal ne peut retenir cet argument puisque, d’une part, la preuve non contestée est à l’effet que la laveuse faisait du bruit dès la première journée. D’autre part, monsieur Maltais a admis, à l’audience, ne pas se rappeler de cet appareil en particulier.
[20] Le Tribunal est convaincu, suivant la prépondérance de la preuve, que la laveuse ne peut servir à l’usage auquel elle est normalement destinée ni à un usage normal pendant une durée raisonnable eu égard à son prix.
[21] Le Tribunal conclut d’ailleurs que la vente a effectivement été conclue au prix de 850$ puisque le témoignage de madame Pinette est crédible à cet égard. D’ailleurs, Électro ne peut s’en prendre qu’à elle si le prix de la transaction n’est pas inscrit sur sa facture.
[22] Le Tribunal est également d’avis que la laveuse était affectée d’un vice caché au moment de la vente et que ce vice rend la laveuse impropre à l’usage auquel madame Pinette la destinait.
[23] Électro a donc manqué à son obligation de garantie.
[24]
L’article
a) l’exécution de l’obligation;
b) l’autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;
c) la réduction de son obligation;
d) la résiliation du contrat;
e) la résolution du contrat; ou
f) la nullité du contrat,
sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs.
[25] Le Tribunal estime que l’annulation de la vente demandée par madame Pinette n’est pas justifiée dans les circonstances.
[26] En effet, la sécheuse, qui fait aussi partie de la vente, fonctionne bien.
[27] D’autre part, la laveuse est, suivant la preuve prépondérante, affectée de vices qui peuvent, toutefois, être réparés.
[28] Monsieur Maltais indique à l’audience que la suspension de l’appareil est sans doute brisée et que les pièces à remplacer coûtent environ 100$. Cependant, le Tribunal ne peut se fier à cette déclaration puisque monsieur Maltais n’a pas de souvenir de l’appareil et qu’il ne peut donc que spéculer sur le bris.
[29] Comme le Tribunal refuse d’annuler la vente, il n’y a pas lieu d’ordonner le remboursement complet du prix payé. Cependant, le Tribunal condamne Électro à payer à madame Pinette la somme de 400$ qui paraît juste et raisonnable pour procéder aux réparations.
[30] Le Tribunal estime par ailleurs qu’il y a lieu d’accorder des dommages-intérêts pour compenser la perte de temps et les inconvénients subis par madame Pinette qui a dû se déplacer à divers endroits pour effectuer sa lessive. Elle doit également être compensée pour la perte de l’usage du bien.
[31] La réclamation de 1 500$ est cependant exagérée de sorte que le Tribunal, usant de sa discrétion judiciaire, accorde, à ce titre, la somme de 400$.
[32] Ainsi, Électro est condamnée à payer à madame Pinette la somme de 800$ avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle à compter de la mise en demeure.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[33] ACCUEILLE en partie la demande;
[34]
CONDAMNE Électro-Sorel Enr. à payer à Marie-Ève Pinette la somme
de 800$ avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à
l’article
[35] CONDAMNE Électro-Sorel Enr. à payer à Marie-Ève Pinette les frais de notification de la mise en demeure de 11,50$.
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__________________________________ J. SÉBASTIEN VAILLANCOURT, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
24 mars 2017 |
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AVIS :
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