Modèle de décision CLP - juin 2011

Laflamme et Geffrey Frenette ltée

2012 QCCLP 5154

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Lévis

9 août 2012

 

Région :

Lanaudière

 

Dossier :

458854-63-1201

 

Dossier CSST :

127580512

 

Commissaire :

Denys Beaulieu, juge administratif

 

Membres :

Lorraine Patenaude, associations d’employeurs

 

Guy Mousseau, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

Diane Laflamme

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Geffrey Frenette ltée

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 9 janvier 2012, la travailleuse, madame Diane Laflamme, dépose, par l’intermédiaire de son représentant, une requête à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) le 9 décembre 2011 à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme, d’une part, la décision initiale qu’elle a rendue le 12 septembre 2011 et déclare irrecevable la demande de remboursement des frais encourus pour les travaux d’entretien courant du domicile exécutés en 2005, 2006 et 2007.

[3]           La CSST confirme, d’autre part, la décision initiale qu’elle a rendue le 18 octobre 2011 et déclare que la travailleuse ne peut bénéficier des dispositions de l’article 116 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

L’AUDIENCE

[4]           La travailleuse est présente à l’audience tenue à Joliette le 24 juillet 2012 et elle est accompagnée de son représentant, monsieur Serge Desmarais, consultant. Le tribunal précise que monsieur Desmarais est le conjoint de la travailleuse. L’employeur, Geffrey Frenette ltée, est absent. L’employeur exploite une entreprise de la bannière Canadian Tire à Repentigny.

[5]           Dès le début de l’audience, le représentant de la travailleuse a tenu à produire des documents additionnels au soutien de la preuve documentaire. Le soussigné en a autorisé la production, bien que celle-ci ait été faite tardivement et en contravention des dispositions de la règle 11.2 des Règles de preuve et de procédure de la Commission des lésions professionnelles[2]. Ces documents sont les suivants :

T-1 : Lettre de la Financière Sun Life, 16 mai 2007

 

T-2 : Documents reliés à l’aide personnelle à domicile 2012-2011 et décision de la CSST du 22 avril 2008 (en liasse).

 

 

[6]           Le tribunal a également requis du représentant de la travailleuse la production d’une copie de meilleure qualité d’une lettre émanant de la Financière Sun Life figurant à la page 512 du dossier reconstitué du tribunal remis aux parties en vue de l’audience. Le représentant de la travailleuse a transmis ce document par télécopie au greffe du tribunal le jour même de l’audience.

[7]           Le présent dossier fut donc en délibéré le 24 juillet 2012.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[8]           La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles d’accueillir sa requête, d’infirmer la décision rendue par la CSST le 9 décembre 2011 à la suite d’une révision administrative et de déclarer, d’une part, qu’elle a droit au remboursement pour les travaux d’entretien courant de son domicile pour les années 2005, 2006 et 2007 et, d’autre part, qu’elle a droit de bénéficier des dispositions de l’article 116 de la loi.

LES FAITS

[9]           En raison du caractère très spécifique de la présente contestation, le tribunal se limite à ne rapporter que les faits essentiels à la compréhension du litige et à la motivation de la présente décision.

[10]        Ainsi, le 25 avril 2005, la travailleuse subit une lésion professionnelle reconnue par la CSST.

[11]        Le 18 juin 2007, la Commission des lésions professionnelles rend une décision par laquelle elle entérine un accord intervenu entre les parties à l’égard des dossiers 285468-63-0603 et 287893-63-0604.

[12]        Le tribunal déclare alors que les diagnostics qualifiant la lésion professionnelle sont « entorse lombaire et kyste synovial sur un portrait d’aggravation d’une condition personnelle préexistante de discopathie dégénérative lombaire et d’ostéoarthrose ». La date de consolidation de cette lésion est fixée au 28 avril 2007 avec une atteinte permanente totalisant 57,41 % et des limitations fonctionnelles de classe 4 selon l’Échelle des restrictions de la colonne lombo-sacrée de l’IRSST[3].

[13]        Le 11 septembre 2007, la CSST rend une décision par laquelle elle informe la travailleuse de son droit à la réadaptation. Cette décision n’a pas fait l’objet d’une contestation.

[14]        Quant à son droit au bénéfice des dispositions de l’article 116 de la loi, la travailleuse transmet une lettre à la CSST le 14 janvier 2011 dans laquelle elle fait état du Programme De Participation Aux Bénéfices Des Marchands Associés De Canadian Tire. La travailleuse prétend qu’il s’agit d’un régime de retraite qui est payé entièrement par l’employeur et elle réclame le versement de prestations depuis le 1er juillet 2006.

[15]        Au soutien de cette demande, la travailleuse joint divers documents dont une lettre signée par le propriétaire de l’entreprise datée du mois d’avril 2005 faisant état des montants versés aux employés à titre de ristournes ou autres formes de bonus pour l’année 2004.

[16]        La travailleuse joint également un formulaire rempli à la demande de la CSST et intitulé Droit de continuer à participer au régime de retraite ainsi que la décision rendue par la CSST le 15 mars 2011 statuant que la travailleuse souffre d’une invalidité grave et prolongée au sens de l’article 93 de la loi.

[17]        La travailleuse joint également copie d’une lettre émise par madame Shannon Doré, représentant, service à la clientèle, régimes collectifs de retraite, de la Financière Sun Life qui lui est adressée. En objet, madame Doré fait mention de l’entreprise « Canadian Tire » et ajoute la mention « régime de partage des profits ». Elle y fait alors référence à un régime enregistré d’épargne-retraite (REER), à un régime de participation différée aux bénéfices (RPDB) primes d’accroissement ainsi qu’à un régime de participation différée aux bénéfices (RPDB) allocations d’épargne. C’est ce document qui fut transmis par le représentant de la travailleuse au greffe du tribunal, ce dont il fut fait mention au paragraphe [6] de la présente décision.

[18]        À ce stade-ci, il convient de reproduire les extraits suivants de la note évolutive rédigée par madame Danielle Boudreau, agent d’indemnisation à la CSST le 23 mars 2011 :

Titre : courriel reçu de (T) re : participation au régime de retraite

 

- ASPECT PROFESSIONNEL :

Nous avons reçu un courriel de (T) confirmant son intérêt à participer au régime de retraite de son (E). Sur le document, on indique le nom de la responsable du régime, madame Chantal Asselin au (omis).

 

15h50 Appel fait chez (E) pour parler à madame Asselin. On m’informe qu’elle est en vacances et sera de retour le 11 avril prochain. On transfert l’appel à M. Frenette, propriétaire. Il confirme avoir parlé à M. Desmarais, conjoint de (T), qui a communiqué avec lui pour l’informer de sa demande de participation au régime de retraite. Il lui a également transmis copie de notre lettre. M. Frenette m’informe qu’il n’y a pas de régime de retraite en vigueur dans l’entreprise. Ce qui existe actuellement dans l’entreprise est que chaque année, au mois d’avril, une compilation des profits de l’année précédente est faite et une partie de ceux-ci répartie entre tous les employés en emploi pendant l’année de référence, en considérant l’ancienneté, le nombre d’heures travaillées durant l’année, le salaire gagné et selon le mérite. Il s’agit donc d’un bonus au rendement et non d’un régime de retraite. Il dit avoir transmis cette même information à M. Desmarais.

 

M. Desmarais sera informé que nous ne pourrons pas donner suite à sa demande participation à un régime de retraite puisque celui-ci n’existe pas au sens de l’art 116 de la LATMP. [sic]

 

[notre soulignement]

 

 

[19]        Par la suite, les notes évolutives rédigées par les agents de la CSST révèlent que le représentant de la travailleuse dépose une plainte et une demande d’enquête au Protecteur du citoyen à l’égard de cette demande de participation de la travailleuse au régime de retraite de l’entreprise.

[20]        Le tribunal considère pertinent de reproduire l’extrait suivant de la note évolutive rédigée par madame Josée Préville, agent d’indemnisation de la CSST, le 5 octobre 2011 :

Titre : Appel fait à la TL suivi pour art. 116

 

- ASPECT FINANCIER :

T absente, c’est a son conjoint que je fais le suivi du dossier concernant la demande art.116. J’informe monsieur Desmarais que j’ai appelé la Sunlife comme convenu avec Mme Gagnon du Protecteur du citoyen, mais qu’il m’est impossible d’avoir l’information concernant le type de produit financier et les montants versés par l’E. Je lui explique qu’il y a deux solutions pour obtenir ces informations : soit il appelle la Sunlife ou comme me l’a suggéré Mme Gagnon du Protecteur du citoyen, qu’il émette une procuration pour que ce soit possible que la CSST aie accès au dossier et en mesure de demander les informations écrites.

 

M. Desmarais me dit que la Sunlife lui a dit qu’elle ne comprenait pas qu’avec ce qu’ils ont fournis (lettres) que ce n’est pas réglé. Que la CSST est de mauvaise foi… M. Desmarais a eu des propos irrespectueux sur mes compétences. Me dis de ne plus les achaler avec ça, de prendre une décision et de le faire par écrit et que la CSST doit respecter les lois.

 

[…]

 

 

[21]        Le 18 octobre 2011, la CSST rend une décision formelle par laquelle elle informe la travailleuse du fait qu’elle n’a pas démontré qu’elle cotisait à un régime de retraite offert dans l’établissement où elle travaillait au moment de sa lésion. La travailleuse conteste cette décision dont elle demande la révision. Il s’agit de la seconde décision initiale à l’origine de la présente contestation.

[22]        Quant à la demande de la travailleuse relative au remboursement des coûts des travaux d’entretien courant du domicile, la preuve documentaire constituant le dossier du tribunal révèle que la CSST a rendu une décision à cet égard le 23 avril 2008.

[23]        Il convient, à ce stade-ci, de reproduire l’extrait suivant de la lettre émise par la Financière Sun Life le 16 mai 2005 (coté sous T-1) :

Objet : Programme De Participation Aux Bénéfices Des Marchands Associés De Canadian Tire

 

Bonjour!

 

Nous sommes heureux de vous souhaiter la bienvenue parmi les participants des Régimes collectifs de retraite de la Financière Sun Life. En qualité de fournisseur de votre régime de retraite, nous tenons à rendre votre participation au régime la plus simple possible, tout en vous permettant de tirer pleinement profit des multiples avantages qu’il vous offre. […]

 

[…]

 

[24]        Dans cette décision, la CSST autorise les frais de tonte de la pelouse, de taillage d’arbustes et de haies, de déneigement, de peinture intérieure et de grand ménage.

[25]        Le 30 août 2011, la travailleuse communique avec madame Isabelle Monette, agent d’indemnisation à la CSST au sujet du remboursement des travaux d’entretien courant de son domicile. Le tribunal considère pertinent de reproduire les extraits suivants de la note évolutive rédigée par madame Monette à cette date :

[…] Toutefois, il manque au dossier les soumissions règlementaires et par ailleurs, les factures soumises visent des TE réalisés en 2005, 2006 et 2007, soit des périodes antérieures à la décision rendue. (voir note OSI du 2011.08.18)

 

Madame souhaite que je m’entretienne avec son conjoint et représentant, Monsieur Desmarais. Il prend l’appareil et je lui répète ces informations. Il est mécontent et allègue que nous (la CSST) sommes de mauvaise foi, me répétant plusieurs fois qu’il est impossible d’obtenir les soumissions exigées puisqu’aucun entrepreneur ‘’n’accepte de se déplacer pour préparer des soumissions qui ne serviront pas’’. Il me dit que l’accident de sa conjointe est survenu en 2005 et qu’il a droit de faire rembourser les TE depuis cette date. Je dois répéter plusieurs fois mes explications. Cependant, Monsieur maintient son point de vue, lève le ton et me dit qu’il fera comme d’habitude et qu’il contestera les informations que je lui transmets.

 

[…]

 

 

[26]        Il convient, enfin, de reproduire l’extrait suivant de la note évolutive rédigée par madame Monette le 18 août 2011 :

[…]

 

Toutefois, nous n’avons en dossier qu’une seule soumission, concernant le grand ménage. De plus, les factures présentées et datées de juillet 2011 font état de travaux qui auraient été exécutés en 2005, 2006 et 2007. Elles ne sont donc pas remboursables puisqu’elles visent des travaux réalisés avant la décision de 2008. Ces travaux seraient remboursables s’ils avaient été faits après avril 2008.

 

Par ailleurs, la loi nous oblige à exiger 2 soumissions pour chaque TE autorisé. Or, une seule de ces soumissions a été déposée au dossier. Afin de régulariser la situation et permettre le remboursement d’une éventuelle réclamation, la T devrait nous fournir les documents suivants :

 

-         2 soumissions pour la tonte du gazon et le taillage d’arbustes et de haies;

-         2 soumissions pour le déneigement;

-         2 soumissions pour la peinture extérieure;

-         1 soumission pour le grand ménage.

 

Ainsi, nous pourrons déterminer le montant à autoriser pour le remboursement de ces travaux.

 

 

[27]        À ce stade-ci, le tribunal souligne que la seule soumission obtenue pour le grand ménage et à laquelle fait référence madame Monette dans la note précitée, est émise par l’entreprise Qualinet le 25 juin 2010 (coté sous T-2 en liasse).

[28]        Il s’agit là de l’essentiel de la preuve documentaire ayant une pertinence à l’égard des deux contestations soumises à l’attention du tribunal.

L’ARGUMENTATION DES PARTIES

[29]        D’entrée de jeu, le représentant de la travailleuse a soumis ses arguments à l’égard du droit de cette dernière de participer au régime de retraite de l’entreprise, conformément aux dispositions de l’article 116 de la loi.

[30]        Il a alors référé le tribunal aux éléments de preuve qui ont tous été précédemment rapportés aux paragraphes [10] à [27] de la présente décision.

[31]        Le représentant de la travailleuse soutient essentiellement que l’employeur possède un régime de retraite et que la travailleuse a droit de bénéficier de celui-ci puisqu’elle a rempli toutes les formalités nécessaires à l’application de cette disposition de la loi.

[32]        Quant aux travaux d’entretien courant du domicile, le représentant de la travailleuse a rappelé que celle-ci présente des limitations fonctionnelles de classe 4 selon l’Échelle des restrictions de la colonne lombo-sacrée de l’IRSST[4] et qu’elle a droit au remboursement de ces frais comme la CSST l’a reconnu dans la décision qu’elle a rendue le 22 avril 2008 (document coté sous T-2 en liasse).

L’AVIS DES MEMBRES

[33]        Conformément aux dispositions de l’article 429.50 de la loi, le soussigné a requis et obtenu l’avis des membres qui ont siégé avec lui à l’égard des questions faisant l’objet de la contestation ainsi que les motifs de leur avis.

[34]        Le membre issu des associations d’employeurs ainsi que le membre issu des associations syndicales sont d’avis que la preuve dont dispose le tribunal ne permettrait pas de rendre une décision favorable à la travailleuse.

[35]        En effet, quant à l’application des dispositions de l’article 116 de la loi, les membres sont d’avis qu’il n’existe pas de régime de retraite chez l’employeur de sorte que la demande de la travailleuse est irrecevable.

[36]        En ce qui concerne le remboursement des frais d’entretien courant du domicile pour les années 2005, 2006 et 2007, les membres soulignent que c’est à compter d’avril 2008 que la CSST a reconnu ce droit à la travailleuse et que, pour cette raison, il ne peut y avoir d’effet rétroactif à cette décision.

[37]        En outre, les membres soulignent que les documents soumis par la travailleuse à l’audience (coté sous T-2 en liasse) sont constitués, pour une majeure partie, de soumissions datées du 27 juillet 2011 émanant du conjoint de la travailleuse, qui agit à titre de son représentant devant le tribunal. Ces documents ne sont pas détaillés et ne correspondent pas à une soumission comme l’exigent la loi et les règlements.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[38]        La Commission des lésions professionnelles doit décider de la présente contestation sous deux aspects distincts.

[39]        D’une part, elle doit décider si la travailleuse a droit de bénéficier des dispositions de l’article 116 de la loi qui prévoit ce qui suit :

116.  Le travailleur qui, en raison d'une lésion professionnelle, est atteint d'une invalidité visée dans l'article 93 a droit de continuer à participer au régime de retraite offert dans l'établissement où il travaillait au moment de sa lésion.

 

Dans ce cas, ce travailleur paie sa part des cotisations exigibles, s'il y a lieu, et la Commission assume celle de l'employeur, sauf pendant la période où ce dernier est tenu d'assumer sa part en vertu du paragraphe 2° du premier alinéa de l'article 235 .

__________

1985, c. 6, a. 116.

 

 

[40]        D’autre part, le tribunal doit décider si la travailleuse a droit au remboursement des travaux d’entretien courant de son domicile pour les années 2005, 2006 et 2007 tel que réclamé par elle-même et son représentant.

[41]        À cet égard, il convient de reproduire les dispositions de l’article 165 de la loi qui prévoit ce qui suit :

165.  Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

__________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[42]        Quant au premier objet de la contestation, le tribunal déclare que la travailleuse ne peut bénéficier de l’application des dispositions de l’article 116 de la loi.

[43]        En effet, la preuve révèle sans équivoque l’inexistence d’un régime de retraite chez l’employeur.

[44]        Tous les documents soumis par le représentant de la travailleuse au soutien de ses prétentions et constituant la preuve documentaire au dossier démontrent que l’employeur possède un régime de partage des profits en vertu duquel il verse des ristournes ou un bonus au rendement au travailleur de l’entreprise au mois d’avril de chaque année.

[45]        Ce régime est administré par la Financière Sun Life dont la lettre du 16 mai 2005 s’avère aussi être sans équivoque. D’ailleurs, l’objet de cette lettre d’accueil est le suivant :

Objet : Programme De Participation Aux Bénéfices Des Marchands Associés De Canadian Tire

 

 

[46]        Plus loin dans cette lettre, la Financière Sun Life se présente comme étant le « fournisseur de votre régime de retraite », affirmation simple qui ne permet pas de conclure à ce statut juridique réel et concret.

[47]        Par ailleurs, la lettre émanant de madame Shannon Doré, dont il fut fait grand état par le représentant de la travailleuse afin d’appuyer sa demande, ne fait jamais référence à un régime de retraite.

[48]        Bien au contraire, cette lettre porte l’objet suivant : « Canadian Tire régime de partage des profits». Madame Doré fait référence aux trois contrats qui seraient détenus par la travailleuse, dont aucun ne constitue un régime de retraite, ce dont il fut fait mention au paragraphe [17] de la présente décision.

[49]        Pour l’ensemble de ces raisons, le soussigné n’éprouve aucune hésitation à conclure que la travailleuse ne peut bénéficier des dispositions de l’article 116 de la loi.

[50]        Par contre, à ce sujet précis, le soussigné s’interroge sur la pertinence, pour la travailleuse, de bénéficier de l’application des dispositions de l’article 67 de la loi à l’égard de l’établissement d’un revenu brut plus élevé pour elle. Cet article prévoit ce qui suit :

67.  Le revenu brut d'un travailleur est déterminé sur la base du revenu brut prévu par son contrat de travail et, lorsque le travailleur est visé à l'un des articles 42.11 et 1019.4 de la Loi sur les impôts (chapitre I-3), sur la base de l'ensemble des pourboires que le travailleur aurait déclarés à son employeur en vertu de cet article 1019.4 ou que son employeur lui aurait attribués en vertu de cet article 42.11, sauf si le travailleur démontre à la Commission qu'il a tiré un revenu brut plus élevé de l'emploi pour l'employeur au service duquel il se trouvait lorsque s'est manifestée sa lésion professionnelle ou du même genre d'emploi pour des employeurs différents pendant les 12 mois précédant le début de son incapacité.

 

 

Pour établir un revenu brut plus élevé, le travailleur peut inclure les bonis, les primes, les pourboires, les commissions, les majorations pour heures supplémentaires, les vacances si leur valeur en espèces n'est pas incluse dans le salaire, les rémunérations participatoires, la valeur en espèces de l'utilisation à des fins personnelles d'une automobile ou d'un logement fournis par l'employeur lorsqu'il en a perdu la jouissance en raison de sa lésion professionnelle et les prestations en vertu de la Loi sur l'assurance parentale (chapitre A-29.011) ou de la Loi sur l'assurance-emploi (Lois du Canada, 1996, chapitre 23).

__________

1985, c. 6, a. 67; 1997, c. 85, a. 4; 2001, c. 9, a. 125.

 

 

[51]        En effet, puisque les sommes d’argent versées par l’employeur au mois d’avril de chaque année correspondent aux notions de bonus, primes ou autres avantages pécuniaires, peu importe la qualification qu’on leur donne, la travailleuse aurait eu avantage à les ajouter à sa rémunération dans le calcul d’un revenu brut plus élevé.

[52]        Elle bénéficierait ainsi d’un versement de l’indemnité de remplacement du revenu qui serait supérieur à ce qu’elle reçoit actuellement.

[53]        Son représentant, quant à lui, aurait également eu avantage à soumettre une demande à la CSST à ce sujet précis plutôt que de requérir à l’intervention du Protecteur du citoyen et des instances politiques qui, au contraire du présent tribunal, n’ont aucune connaissance particulière, voire pertinente, de la présente loi et des règlements adoptés sous son empire.

[54]        En outre, la CSST aurait dû, de son propre chef, considérer cette situation sous cet angle, puisqu’elle possédait toute l’information nécessaire depuis la conversation échangée avec monsieur Frenette, propriétaire de l’entreprise, le 23 mars 2011, ce dont il fut fait mention au paragraphe [18] de la présente décision.

[55]        Quant à la demande de la travailleuse relative au remboursement des travaux d’entretien courant du domicile pour les années 2005, 2006 et 2007, le tribunal considère que cette demande est effectivement irrecevable, comme l’a souligné la CSST.

[56]        En effet, non seulement cette demande soumise en juillet 2011 est-elle tardive, mais, au surplus, elle ne respecte pas les dispositions de la loi et des règlements.

[57]        À ce sujet précis, le soussigné rappelle les éléments rapportés par madame Monette le 18 août 2011 dans la note évolutive qu’elle rédige le même jour et qui permettrait à la travailleuse de pouvoir bénéficier du remboursement de tels travaux postérieurement à l’année 2008, si elle se conforme aux formalités qui sont exigées d’elle à cet égard.

[58]        La CSST a d’ailleurs autorisé de tels travaux par la décision qu’elle a rendue le 22 avril 2008 (coté sous T-2 en liasse).

[59]        En raison de ce qui précède, le tribunal ne pourrait faire droit à la contestation de la travailleuse.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête déposée la travailleuse, madame Diane Laflamme, à la Commission des lésions professionnelles le 9 janvier 2012;

CONFIRME, pour des motifs additionnels, la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 9 décembre 2011 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas droit aux bénéfices des dispositions de l’article 116 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas droit au remboursement des travaux d’entretien courant de son domicile pour les années 2005, 2006 et 2007;

RÉSERVE à la travailleuse ses droits et recours à l’égard de l’application des dispositions du second alinéa de l’article 67 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, à la lumière de la présente décision.

 

 

 

__________________________________

 

Denys Beaulieu

 

Monsieur Serge Desmarais

SERGE DESMARAIS, CONSULTANT

Représentant de la partie requérante

 

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Règlement sur la preuve et la procédure de la Commission des lésions professionnelles, R.R.Q., c. A-3.001, r. 12.

[3]           Institut de recherche en santé et en sécurité du travail du Québec, Programme Sécurité-Ergonomie : Échelle de restrictions pour la colonne lombo-sacrée, Montréal, IRSST, mars 1988.

[4]           supra, note 3.

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