Décision

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Landry c. Brault & Martineau inc.

2017 QCCQ 4331

JV0516

 
 COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-32-149756-159

 

 

 

DATE :

 9 janvier 2017

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

SUZANNE VADBONCOEUR, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

RICHARD LANDRY

Demandeur

c.

 

BRAULT & MARTINEAU INC.

et

MABE CANADA INC.

Défenderesses

et

MC COMMERCIAL INC.

            Appelée

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT RENDU SÉANCE TENANTE

______________________________________________________________________

 

Note : Le jugement dans cette cause a été rendu oralement le 9 janvier 2017 mais n’a été formulé par écrit que le 5 mai 2017.

[1]          Pour les motifs énoncés verbalement, enregistrés numériquement et résumés ci-après, le Tribunal rend jugement comme suit :

[2]          Le Tribunal est saisi d’une requête introductive d’instance par laquelle le demandeur réclame aux défenderesses Brault & Martineau (B&M) et Mabe Canada inc. (Mabe) la somme de 578,30$, augmentée à 778,30$ durant l’audience.  Cette somme représente les frais déboursés par le demandeur pour une réparation urgente du réfrigérateur acheté le 12 octobre 2012 chez B&M, mais livré en mai 2013.

[3]          B&M nie devoir ce montant, alléguant que le demandeur, qui invoque un vice de fabrication, aurait dû lui envoyer une dénonciation écrite.  Il lui reproche également d’avoir étalé sur une période de trois semaines les visites d’un technicien au lieu de fournir dès le départ un estimé écrit à B&M ou au fabricant; il a plutôt mis ces derniers devant le fait accompli, empêchant ainsi la défenderesse et le fabricant de vérifier l’état du réfrigérateur en temps utile et d’y apporter les correctifs appropriés, le cas échéant. 

[4]          B&M appelle en garantie MC Commercial inc.

[5]          Ni Mabe ni MC Commercial inc. n’ont produit de contestation ni n’étaient présentes à l’audience.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[6]          Le Tribunal doit statuer sur les questions suivantes :

·          La durée de vie utile du réfrigérateur a-t-elle été suffisamment longue eu égard à la garantie légale prévue à la Loi sur la protection du consommateur et au Code civil du Québec?

·          B&M, Mabe et MC Commercial sont-elles responsables des dommages subis par le demandeur eu égard à leur obligation de respecter leur garantie contre les vices cachés?

LE CONTEXTE

[7]          Le 12 octobre 2012, le demandeur Landry achète un réfrigérateur de marque General Electric qu’il paie 1 764,16$ (voir facture P-1).

[8]          Le réfrigérateur ne lui est toutefois livré qu’en mai 2013.

[9]          Le 11 mai 2015, après deux ans d’usage, le réfrigérateur se met à mal fonctionner.

[10]       Monsieur Landry appelle B&M dès le lendemain mais, puisqu’il n’avait pas pris de garantie prolongée, on décline toute responsabilité et on le réfère à monsieur Yves Lavoie, réparateur autorisé pour les appareils General Electric.

[11]       Monsieur Lavoie se rend au domicile de monsieur Landry à trois reprises, soit le 12 mai, le 26 mai et le 2 juin et change finalement la carte électronique du réfrigérateur.  Il lui en coûte la somme de 578,30$ comme en font foi les factures produites en liasse sous P-2.

[12]       Le 4 août 2015, le demandeur envoie une mise en demeure à B&M (P-3) qui lui répond le 24 août 2015 (P-4) en le référant à Mabe, le manufacturier.

[13]       Monsieur Landry envoie aussi une mise en demeure à Mabe Canada inc. le 8 octobre 2015 (P-5), qui répond à son tour le 5 novembre 2015 (P-6).

ANALYSE ET DÉCISION

[14]       Dans toute action en justice, la partie demanderesse doit démontrer au Tribunal, par une preuve prépondérante, le bien fondé de ses prétentions conformément aux articles 2803 et 2804 du Code civil du Québec, lesquels se lisent comme suit :

« 2803.    Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.

2804.   La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante. »

[15]       Or, le Tribunal estime que le demandeur a rencontré son fardeau et a démontré avec succès le bien-fondé de ses prétentions.

[16]       En effet, la preuve révèle que le réfrigérateur a cessé de fonctionner adéquatement après seulement deux ans d’usage.

[17]       La preuve révèle aussi que le demandeur a contacté B&M aussitôt mais que celle-ci a décliné toute responsabilité sous prétexte que monsieur Landry n’avait pas pris de garantie prolongée.

[18]       Le Tribunal tient à souligner que personne n’est tenu de prendre une garantie prolongée lorsqu’elle achète un bien de consommation et que le fait de ne pas prendre une telle garantie ne diminue en rien ni n’enlève l’obligation du vendeur de respecter sa garantie contre les vices cachés.

[19]       Selon les articles 37 et 38 de la Loi sur la protection du consommateur[1], un bien de consommation doit pouvoir servir à l’usage auquel il est destiné, durant une période de vie normale, eu égard à sa nature et au prix payé.  Dans le cas sous étude, une durée de vie de deux ans est nettement insuffisante pour un réfrigérateur.  Ces articles se lisent comme suit :

« 37.    Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné.

38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien. »

[20]       De plus, l’article 1726 du Code civil du Québec oblige le vendeur à garantir à l’acheteur que le bien vendu est exempt de vices cachés. Il se lit comme suit :

« 1726.    Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus.

Il n’est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert. »

[21]       B&M reproche au demandeur, dans sa réponse du 24 août 2015 (P-4), d’avoir prématurément procédé à la réparation de l’appareil.  Le Tribunal ne partage cet avis : monsieur Landry se trouvait dans une situation d’urgence - un réfrigérateur est un bien essentiel au Canada - et il se devait d’agir vite s’il ne voulait pas perdre tous ses aliments.  Il en a d’ailleurs perdu quelques-uns.

[22]       De plus, l’appel téléphonique de monsieur Landry dès qu’il a constaté le bris et l’envoi de sa mise en demeure moins de trois mois après l’événement satisfont le Tribunal et démontrent qu’il a pleinement rempli ses obligations de dénoncer le bris au vendeur.

[23]       Le Tribunal considère que B&M n’a pas respecté sa garantie légale.  Quant à Mabe Canada inc., elle est responsable comme fabricant du respect de cette garantie au même titre que le vendeur; et le consommateur a le droit de poursuivre le vendeur, le fabricant ou les deux, conformément à l’article 53 LPC :

« 53. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d’exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l’objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire.

Il en est ainsi pour le défaut d’indications nécessaires à la protection de l’utilisateur contre un risque ou un danger dont il ne pouvait lui-même se rendre compte.

Ni le commerçant, ni le fabricant ne peuvent alléguer le fait qu’ils ignoraient ce vice ou ce défaut.

Le recours contre le fabricant peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien. »

[24]       Le Tribunal conclut donc que le demandeur s’est déchargé de son fardeau de preuve, tant par sa preuve testimoniale que documentaire, et il fait droit à sa réclamation sauf pour le montant de 200$ pour perte d’aliments, ajouté à sa demande initiale à l’audience, que le Tribunal rejette faute de preuve.

[25]       Le Tribunal doit cependant rejeter l’appel en garantie contre MC Commercial inc., faute de preuve.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE la requête introductive d’instance du demandeur;

CONDAMNE les défenderesses solidairement à payer au demandeur la somme de 578,30$ avec les intérêts au taux légal de 5% l’an et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter du 6 août 2015, ainsi que les frais de justice.

REJETTE l’appel en garantie sans frais.

 

 

__________________________________

SUZANNE VADBONCOEUR, J.C.Q.

 

 

 

 

 

Date d’audience :

9 janvier 2017

 



[1]    RLRQ, c. P-40.1

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