Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier
COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Montréal

6 janvier 2004

 

Région :

Montréal

 

Dossier :

187785-71-0207

 

Dossier CSST :

083859637

 

Commissaire :

Me Lucie Couture

 

Membres :

André Guénette, associations d’employeurs

 

Sylvain Dandurand, associations syndicales

 

 

Assesseur :

Serge Bélanger, médecin

______________________________________________________________________

 

 

 

Jean-Pierre Lafond

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Multi-Marques inc. (div. Québec)

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 17 juillet 2002, monsieur Jean-Pierre Lafond (le travailleur), dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste la décision rendue le 10 juillet 2002, par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST confirme celle rendue initialement le 7 mars 2002, à la suite de l’avis du Bureau d'évaluation médicale du 6 décembre 2001 et de l’avis complémentaire du 29 janvier 2002. La CSST déclare que le travailleur ne conserve aucune atteinte permanente ni limitations fonctionnelles en relation avec la lésion professionnelle reconnue. La CSST déclare également qu’il n’y a pas de relation entre l’apnée du sommeil dont est porteur le travailleur et la lésion professionnelle de 1998.

[3]                La CSST confirme également celle rendue le 11 mars 2002 et déclare que le travailleur est capable de refaire son emploi depuis le 7 mars 2002.

[4]                Le travailleur est présent à l’audience du 2 octobre 2003 et il est représenté. Multi-Marques inc. (l’employeur) est absent, bien que dûment convoqué.

[5]                À la suite de l’audience, la soussignée a communiqué avec le procureur du travailleur afin de vérifier s’il avait en main le rapport final établissant si le travailleur conserve, à la suite de la thrombophlébite à l’origine de l’embolie pulmonaire de juillet 1998, une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. Le procureur du travailleur a informé la soussignée qu’il n’avait pas en main ledit rapport. Il s’est toutefois engagé à communiquer avec le médecin traitant, le docteur Daigle, afin de savoir si elle allait produire un tel rapport. Le médecin a consenti à produire ce rapport d’évaluation médicale, lequel a été reçu à la Commission des lésions professionnelles le 12 décembre 2003. La soussignée a communiqué à nouveau avec le procureur du travailleur après la réception de ce rapport d’évaluation médicale afin de demander des corrections au médecin traitant. Le procureur du travailleur a plutôt requis de la soussignée qu’elle demande à la CSST, de faire corriger le rapport d’évaluation médicale par le médecin traitant. Le dossier a donc été pris en délibéré à compter de cette conversation, soit le 18 décembre 2003.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[6]                Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer les décisions rendues. Il demande à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître que l’apnée du sommeil diagnostiquée est en relation avec l’accident du travail de juillet 1998. Il demande aussi à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il conserve, à la suite de sa lésion professionnelle, une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles et qu’en conséquence, il est incapable de refaire son emploi pré-lésionnel.

L’AVIS DES MEMBRES

[7]                Le membre issu des associations syndicales, monsieur Sylvain Dandurand et le membre issu des associations d’employeurs, monsieur André Guénette sont d’avis de faire droit à la requête du travailleur. Ils sont d’avis que la preuve prépondérante permet d’établir une relation entre l’apnée du sommeil dont est atteint le travailleur et la lésion professionnelle de 1998. De plus, ils sont d’avis que le travailleur conserve, à la suite de la lésion professionnelle de 1998, le déficit anatomo-physiologique et les limitations fonctionnelles énoncées par le docteur Daigle. Ils sont également d’avis, compte tenu de ces limitations fonctionnelles, que le travailleur est incapable de reprendre son emploi pré-lésionnel de chauffeur-livreur de pains. Le travailleur a donc droit à la réadaptation.

QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

[8]                La Commission des lésions professionnelles doit déterminer, compte tenu de la décision de la révision administrative, si l’apnée du sommeil est en relation avec la lésion professionnelle de juillet 1998. Elle doit également déterminer si cette lésion professionnelle de juillet 1998 a entraîné une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.

[9]                En premier lieu, compte tenu d’un des diagnostics posés au dossier, à savoir l’hypertension pulmonaire, la Commission des lésions professionnelles s’est interrogée, afin de savoir si le dossier n’aurait pas dû faire l’objet d’une étude par les comités des maladies pulmonaires professionnelles, comme le prévoit l’article 226 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) qui se lit comme suit :

226. Lorsqu'un travailleur produit une réclamation à la Commission alléguant qu'il est atteint d'une maladie professionnelle pulmonaire, la Commission le réfère, dans les 10 jours, à un comité des maladies professionnelles pulmonaires.

__________

1985, c. 6, a. 226.

 

 

[10]           Après avoir entendu les explications du docteur Daigle, pneumologue, elle retient que la réclamation du travailleur a été faite non pas pour une maladie pulmonaire professionnelle, mais pour une maladie vasculaire soit une embolie pulmonaire consécutive à une thrombophlébite profonde du membre inférieur gauche. Il n’y a donc pas lieu, dans les circonstances, même si le diagnostic d’hypertension pulmonaire a été posé au dossier, de référer le dossier au comité des maladies pulmonaires professionnelles. La Commission des lésions professionnelles estime en effet que les termes mêmes de l’article 226 de la loi précisent les cas devant être soumis au comité des maladies professionnelles pulmonaires. Ces réclamations doivent nécessairement identifier une maladie pulmonaire professionnelle. La présente réclamation a été faite à la suite d’une embolie pulmonaire causée par une thrombophlébite profonde du membre inférieur gauche. Il ne peut s’agir, en l’espèce, d’une maladie pulmonaire professionnelle et cela, même si au cours des traitements de cette embolie, on a diagnostiqué une hypertension pulmonaire.

[11]           La Commission des lésions professionnelles s’est également interrogée pour savoir si elle était compétente à disposer de la question du diagnostic d’apnée du sommeil en relation ou non avec la lésion professionnelle de juillet 1998, compte tenu que la décision initiale rendue par la CSST, le 7 mars 2002, à la suite de l’avis du Bureau d'évaluation médicale, n’avait traité que de la question de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles découlant de cette lésion professionnelle de juillet 1998.

[12]           À cet égard, le procureur du travailleur soumet que la Commission des lésions professionnelles est compétente, pour disposer de la relation entre le diagnostic d’apnée du sommeil et la lésion professionnelle de juillet 1998, compte tenu que la CSST, à la suite de la révision administrative, s’est prononcée sur la relation entre l’apnée du sommeil et la lésion professionnelle de 1998.

[13]           La Commission des lésions professionnelles est d’avis, qu’elle peut disposer de la question de la relation entre le diagnostic d’apnée du sommeil et la lésion professionnelle de juillet 1998, compte tenu de la teneur de la décision rendue à la suite de la révision administrative. Mais, au surplus, la Commission des lésions professionnelles est d’avis, que la révision administrative a, avec raison, traitée de cet aspect dans sa décision. Elle est d’avis que la décision de la CSST rendue le 7 mars 2002, à la suite de l’avis du Bureau d'évaluation médicale, niait implicitement la relation entre ce diagnostic et la lésion professionnelle de juillet 1998, puisque la CSST refusait d’accorder le pourcentage d’atteinte permanente que le membre du Bureau d'évaluation médicale accordait spécifiquement pour cet état d’apnée du sommeil.

[14]           Ce faisant, la Commission des lésions professionnelles comprend que cette décision du 7 mars 2002 refusait la relation entre le diagnostic d’apnée du sommeil et la lésion professionnelle de juillet 1998. Cela permettait alors, à la révision administrative de décider de cette question, et par voie de conséquences, à la Commission des lésions professionnelles d’en disposer également.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[15]           La Commission des lésions professionnelles doit donc déterminer si l’apnée du sommeil est en relation avec la lésion professionnelle dont a été victime le travailleur en juillet 1998. Elle devra également décider si le travailleur conserve, à la suite de sa lésion professionnelle de juillet 1998, une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.

[16]           Après avoir entendu les témoignages et étudié le dossier, la Commission des lésions professionnelles est d’avis de faire droit à la requête du travailleur. Elle est d’avis que l’apnée du sommeil dont souffre le travailleur est en relation avec la lésion professionnelle de juillet 1998. Elle est aussi d’avis qu’à la suite de cette lésion professionnelle, le travailleur conserve un déficit anatomo-physiologique de 5 % pour l’apnée du sommeil et de 10 % pour l’hypertension pulmonaire. Elle est aussi d’avis que le travailleur conserve un déficit anatomo-physiologique de 5 % pour les séquelles de la thrombophlébite à l’origine de l’embolie pulmonaire subie en juillet 1998. Elle est aussi d’avis que le travailleur conserve, à la suite de ces lésions professionnelles, les limitations fonctionnelles reprises à l’audience par le docteur Daigle, pneumologue. Les raisons motivant ces conclusions sont reprises ci-après.

[17]           La Commission des lésions professionnelles retient que le travailleur a subi un premier accident du travail en 1983, alors qu’il s’inflige une entorse de la cheville gauche. À la suite de cette entorse, il développe une thrombophlébite profonde du membre inférieur gauche. Cette lésion est consolidée sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles.

[18]           En 1995, à la suite d’un autre accident du travail au cours duquel il s’inflige une fracture de la cheville droite, il subit une autre thrombophlébite profonde, mais au membre inférieur droit.

[19]           Le 16 mai 1998, il s’inflige, au cours d’un autre accident du travail, un étirement musculaire au mollet gauche. Cette lésion est consolidée sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles.

[20]           Le 14 juillet 1998, il subit une récidive, rechute ou aggravation de cette lésion soit, une thrombophlébite du membre inférieur gauche et une embolie pulmonaire secondaire. La CSST accepte la réclamation pour cette thrombophlébite comme étant en relation avec la lésion professionnelle de 1983. Cette décision n’est pas contestée.

[21]           La Commission des lésions professionnelles retient qu’aucune décision n’a cependant été rendue acceptant la relation entre l’embolie pulmonaire et l’événement de 1983. Elle constate toutefois que cette acceptation est implicite du dossier, puisque le travailleur a été indemnisé par la CSST durant une longue période, à la suite de cette embolie.

[22]           Le 26 janvier 1999, le docteur J. Mantha, médecin du travailleur, détermine que l’embolie pulmonaire et la thrombophlébite profonde sont consolidées à cette date avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles. Il dirige le travailleur au docteur Daigle, pneumologue pour l’évaluation des séquelles. Entre temps, le travailleur continue d’être sous les soins du docteur Daigle relativement à des troubles de sommeil. Il subit divers examens à la suite desquels, le docteur Daigle pose un diagnostic d’apnée du sommeil.

[23]           La soussignée retient du dossier que le 23 novembre 1999, lors d’une conversation téléphonique entre le médecin de la CSST et le docteur Daigle, cette dernière est d’avis que l’apnée du sommeil n’est pas secondaire à l’embolie, mais plutôt à l’obésité du travailleur. Le médecin régional indique que l’apnée n’est pas en relation avec la lésion professionnelle. Toutefois, malgré cette opinion émise au dossier, la Commission des lésions professionnelles retient que le 30 novembre 1999, le médecin régional, à la suite de l’appel du médecin traitant, le docteur Daigle recommande d’accepter de payer l’appareil pour contrôler l’apnée du sommeil. La CSST ne rend toutefois pas de décision sur ce diagnostic, même si aux notes évolutives on retrouve une mention à l’effet que cette apnée n’est pas en relation. La CSST défraie les divers examens et la location d’un appareil permettant de contrôler cet état.

[24]           Le 25 mai 2001, le docteur Daigle, dans son rapport d’évaluation médicale, reconnaît que le travailleur est porteur d’un syndrome d’apnée du sommeil sévère qu’elle estime secondaire à une diminution de la mobilité à la suite de multiples fractures de la cheville accidentelles suivies de thrombophlébites profondes avec embolie pulmonaire.

[25]           Le 8 juin 2001, on retrouve aux notes évolutives de la CSST que le docteur Goupil de la CSST a téléphoné au docteur Daigle afin qu’elle enlève de son rapport d’évaluation médicale, le diagnostic d’apnée du sommeil. Il précise que ce diagnostic est refusé. Cependant, encore là, aucune décision n’a été rendue par la CSST refusant ce diagnostic.

[26]           Le 12 juin 2001, le docteur Ferron de la CSST indique aux notes évolutives que le rapport d’évaluation médicale du docteur Daigle n’est pas conforme, car le diagnostic accepté était celui d’embolie pulmonaire secondaire à une thrombophlébite profonde. Il précise que le diagnostic d’apnée du sommeil a été considéré comme une condition personnelle.

[27]           La CSST demande un avis au docteur J. Malo, pneumologue, en vertu de l’article 204 de la loi concernant le diagnostic, l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles. Sur la demande d’avis, bien qu’elle questionne le diagnostic, elle indique que celui accepté par la CSST est embolie pulmonaire.

[28]           Le 29 juin 2001, le docteur Malo retient quant à lui un diagnostic d’hypertension pulmonaire post-embolie pulmonaire pour laquelle il accorde un déficit anatomo - physiologique de 10 %. Il écarte toutefois le diagnostic d’apnée du sommeil, puisqu’il est d’avis qu’il n’y a pas de relation entre le traumatisme, la diminution des activités physiques, la prise de poids et l’apparition d’un tableau d’apnée du sommeil. Il est d’avis que l’hypertension pulmonaire risque d’avoir un caractère permanent avec une dyspnée d’effort accrue. Il associe cet état à une limitation fonctionnelle.

[29]           Le 26 juillet 2001, le docteur Ferron de la CSST demande un avis complémentaire au docteur Malo concernant la description des limitations fonctionnelles. On retrouve une note manuscrite dans laquelle, le docteur Ferron rapporte que le docteur Malo lui aurait décrit les limitations fonctionnelles suivantes :

·         Limitation dans l’usage de sa jambe g.;

·         Transport de charge (poids et fréquence);

·         Faire un travail debout;

·         Se déplacer;

·         Monter des escaliers.

 

 

[30]           Le 19 octobre 2001, la Commission des lésions professionnelles retrouve aux notes évolutives, une note de l’agent au dossier qui indique demander un avis au Bureau d'évaluation médicale sur les questions du diagnostic, de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.

[31]           Le 6 décembre 2001, le docteur Bégin, membre du Bureau d'évaluation médicale donne son avis. Il estime que le syndrome d’apnée du sommeil peut expliquer en soi l’hypertension pulmonaire légère chez le travailleur. Il est d’avis que la fonction respiratoire est tout de même normale, compte tenu de l’embonpoint du travailleur. Il attribue toutefois l’apnée du sommeil au gain de poids du travailleur sur une période de deux ans, associée à l’inactivité physique précipitée par les accidents du travail antérieurs. Il ajoute que le travailleur pesait 200 livres en 1980 et qu’il a pris 70 livres depuis. Il ajoute :

« [...]

 

Il y a donc une association de causalité au moins partielle entre l’immobilisation associée aux accidents du travail de ce patient, son gain de poids et les effets résultants, soit le syndrome d’apnée du sommeil avec hypertension pulmonaire secondaire aux apnées du sommeil. Pour ce syndrome d’apnée, il existe donc un déficit de 5 % pour cette maladie.

 

Finalement, pour ce qui est des limitations fonctionnelles, le patient est actuellement limité dans ses activités fonctionnelles par son embonpoint et son syndrome d’apnée du sommeil et il aurait besoin d’un reconditionnement physique intense dans un centre de réadaptation de la CSST afin de favoriser la perte de poids et le conditionnement cardio‑respiratoire pour lui permettre un retour au travail éventuel.

 

[...] »

 

 

[32]           Le 22 janvier 2002, le docteur Goupil de la CSST indique avoir communiqué avec le directeur du Bureau d’évaluation médicale concernant les questions discutées par le docteur Bégin. Le 23 janvier 2002, le docteur Blouin du Bureau d’évaluation médicale est d’avis que le dossier n’est pas clair et qu’il reviendra auprès du docteur Bégin.

[33]           Le 29 janvier 2002, le docteur Bégin produit un rapport complémentaire. Il retient comme diagnostic celui de « syndrome d’apnée du sommeil secondairement à un gain de poids facilité par l’immobilisation reliée aux accidents du travail de 1983, 1996 et 1998 ». Il accorde un déficit anatomo-physiologique de 5 % pour syndrome d’apnée du sommeil. Il reconnaît que les limitations fonctionnelles sont en relation avec l’embonpoint du travailleur et non en relation avec une condition cardio-pulmonaire altérée. Il recommande que le travailleur soit soumis à un « reconditionnement » physique intense afin de favoriser une perte de poids et le conditionnement cardio‑respiratoire pour lui permettre un retour au travail sans aucune limitation.

[34]           Le 25 février 2002, le docteur Goupil de la CSST est d’avis que le rapport du docteur Bégin n’est pas conforme. Il indique ce qui suit aux notes évolutives :

« Appel tel Dr Blouin du BEM. Je lui explique que la CSST n’a pas encore le DAP et les LF pour le diagnostic accepté en 98 et consolidé par le md traitant le 26-01-99. Il dit qu’il appellera le Dr Bégin et lui expliquera le problème. Il nous appellera après. (…) » (sic)

 

 

[35]           Le 27 février 2002, le docteur Bégin produit un nouvel avis complémentaire dans lequel il précise ce qui suit :

« Ce dossier m’est référé afin de statuer sur les séquelles d’embolie pulmonaire et limitations fonctionnelles chez ce réclamant, le docteur Malo, médecin délégué de la CSST, étant d’avis d’accorder un DAP de 10 % en fonction de séquelles d’embolie pulmonaire.

 

[…]

 

Il y a une notion d’hypertension pulmonaire sur une échographie cardiaque faite à la clinique de radiologie de Laval en juin 1999. C’est apparemment sur cette base que le docteur Malo aurait suggéré un déficit de 10 %.

 

Je suis d’avis que la fonction respiratoire de ce réclamant est normale; en particulier la capacité de diffusion étant normale, il n’y a pas de séquelles d’embolie pulmonaire chez ce réclamant. Aucun DAP n’est accordé pour séquelles d’embolie pulmonaire. Le réclamant n’a pas de limitation fonctionnelle en raison d’embolie pulmonaire, les seules limitations qu’il présente sont en raison de son embonpoint et il est encouragé à augmenter son activité physique pour résoudre ce dernier problème, ce qui devrait améliorer son problème d’apnée du sommeil. »

 

 

[36]           Dans une note du médecin régional non datée, ce dernier précise que le docteur Bégin accepte un diagnostic différent de celui reconnu. Il précise ne pas avoir de déficit anatomo-physiologique et les limitations fonctionnelles pour le diagnostic accepté par la CSST.

[37]           Le 7 mars 2002, la CSST rend une décision par laquelle elle détermine que le travailleur ne conserve aucune atteinte permanente ni limitations fonctionnelles. Le 11 mars 2002, elle rend une seconde décision par laquelle elle détermine que le travailleur est capable de refaire son emploi.

[38]           Le 12 mars 2002, le docteur Malo donne un avis complémentaire. Il précise que selon lui, la première cause de l’hypertension est l’épisode d’embolie dont a souffert le travailleur. Il est aussi d’avis, contrairement à ce que précisait le docteur Bégin, qu’il n’est pas bien établi que l’hypertension puisse résulter de l’apnée du sommeil dont souffre le travailleur. Quant à la relation entre cette apnée du sommeil et les lésions professionnelles antérieures, il ajoute ce qui suit :

« […]

 

Le deuxième point (…) c’est-à-dire d’établir une causalité entre l’apparition d’apnée du sommeil et l’accident du travail. Bien sûr, si un accident du travail provoque une sédentarité et que cette sédentarité provoque un gain de poids et que ce gain de poids provoque un tableau d’apnée du sommeil, il se peut donc que l’on puisse établir une causalité entre l’apnée du sommeil et l’arrêt du travail. Je crois toutefois que c’est exagéré. De la même façon, si le gain de poids favorise un développement d’arthrose au niveau des genoux ou des chevilles et que ce gain de poids est associé à l’arrêt de travail, il faudrait donc compenser l’arthrose comme secondaire au travail effectué auparavant. (...) je n’ai pu, à date, me convaincre de cette relation de cause à effet.

 

[…] »

 

 

[39]           Lors de l’audience, le travailleur a témoigné des circonstances entourant les divers événements subis au travail, ainsi que les exigences de son emploi de chauffeur‑livreur de pains. Il explique plus particulièrement, que cet emploi exige qu’il manipule les cabarets de plastique dans lesquels les pains sont déposés. Il doit en effet, charger son camion de ces cabarets de pains afin d’aller les livrer dans les divers magasins inscrit à sa route de livraison. Il charge le camion des cabarets de pains empilés sur le quai de chargement de la compagnie. Son camion contient environ vingt piles de 12 cabarets chacune. Ces piles peuvent parfois être composées de 17 cabarets de haut. Ces cabarets sont posés à même le sol. Il doit donc tirer les piles de cabarets du quai de chargement afin de les faire pénétrer dans le camion. Comme le camion est situé plus bas que le quai de chargement, il ne peut pas entrer une pile de plus de 12 cabarets de haut. Si les piles sont plus hautes que ce qui entre dans le camion, il doit descendre les cabarets excédentaires, ce qui signifie qu’il travaille alors à bout de bras puisque ces piles de 17 cabarets de haut peuvent mesurer plus de 7 pieds de hauteur. Pour tirer les piles, il utilise un crochet de métal. Il précise que l’espace pour circuler entre les piles est réduit sur le quai de chargement. Il dispose donc de peu d’espace pour effectuer les diverses manœuvres, ce qui implique qu’il doit se contorsionner afin de circuler entre les piles de cabarets. Le poids d’un cabaret peut varier de 10 à 15 livres, selon le type de pain.

[40]           Le travailleur ajoute que le chargement doit s’effectuer rapidement, puisqu’un autre travailleur attend qu’il ait fini afin de pouvoir, lui aussi, effectuer le chargement de son camion. Il dispose d’environ 30 minutes pour effectuer ces tâches. De plus, les conditions climatiques peuvent compliquer ces manœuvres dépendant des saisons.

[41]           Par la suite, le travailleur livre les pains chez ses clients. Sa route comporte entre 35 et 42 points de livraison par jour. Il doit donc prendre les divers cabarets de pains et les entrer chez le client pour ensuite aller placer les pains sur les étagères. Il enlève les pains non vendus et les rapporte à l’entrepôt. Le travailleur précise qu’entre 1983 et 1998, il a toujours eu la même route de livraison.

[42]           Lors de la livraison chez les clients, il utilise parfois des chariots sur roulettes sur lesquels, il empile les cabarets. Il sort alors les cabarets du camion, les empile sur le chariot et il peut alors tirer plus facilement les cabarets de pain et les apporter près des étagères. Parfois il transporte les cabarets dans ses mains. Il prend alors deux cabarets à la fois, pour sortir du camion. C’est précisément lors de cette manœuvre qu’il s’est infligé l’entorse de la cheville en 1983, ainsi que la fracture de 1995.

[43]           À la suite de l’accident de 1983, le travailleur a été en arrêt de travail durant près d’un an et il a présenté des difficultés à marcher durant cette période. Il a alors reçu divers traitements de physiothérapie En mai 1998, il s’inflige l’étirement musculaire de la jambe en enjambant une chaîne pour aller aider un compagnon de travail qui avait des difficultés à faire son chargement.

[44]           Il a alors été en arrêt de travail durant quelques semaines et a reçu des traitements de physiothérapie. Quelques jours après la fin des traitements, il a subi l’embolie pulmonaire. Il est alors au travail. La Commission des lésions professionnelles retient de son témoignage, que depuis l’accident survenu quelques temps auparavant, il présentait une enflure du membre inférieur gauche. On lui disait que cela était sans conséquences jusqu’à ce qu’il fasse l’embolie.

[45]           La Commission des lésions professionnelles retient du témoignage du travailleur qu’à la suite de la lésion professionnelle de 1983, il avait repris ses activités professionnelles. Son poids était alors autour de 190 ou 200 livres. Il en est de même à la suite de l’accident de 1995. Cependant, à la suite de cet accident, il accusait des difficultés à la marche, lors de son retour au travail. Son retour au travail s’était effectué plus rapidement que lors du précédent accident du travail. Son poids n’a pratiquement pas varié jusqu’à l’accident de mai 1998 et de juillet 1998. À partir de ce dernier  événement et compte tenu qu’il ne pouvait pas se déplacer, ni effectuer d’efforts physiques, son poids a augmenté de 50 à 70 livres, ce qu’il n’avait jamais vécu auparavant.

[46]           C’est à la suite de l’événement de juillet 1998, qu’il a commencé à ressentir des problèmes de sommeil. Il devait obligatoirement faire des siestes durant la journée. C’est après en avoir parlé au docteur Daigle, son pneumologue qui le suivait depuis l’embolie et qui l’a dirigé à la clinique du sommeil, qu’un diagnostic d’apnée du sommeil a été posé.

[47]           Ses activités ont été très limitées après l’embolie, car au moindre effort physique, il manquait de souffle. De plus, il devait faire de fréquentes siestes, car il était constamment fatigué.

[48]           Le travailleur ajoute avoir suivi les recommandations du docteur Bégin et avoir suivi depuis, un programme de reconditionnement physique. Il précise que son poids a diminué depuis la reprise du conditionnement physique.

[49]           La Commission des lésions professionnelles retient du témoignage du docteur Daigle, que celle-ci est d’avis que le travailleur conserve des séquelles de l’embolie dont il a été victime en juillet 1998. Cette embolie est consécutive à une thrombophlébite du membre inférieur gauche qui a été confirmée par le « Doppler » effectué le 14 juillet 1998. Elle précise également, qu’à la suite de cette thrombophlébite et de cette embolie pulmonaire, le travailleur a présenté un tableau d’hypertension pulmonaire. Ce diagnostic a été confirmé par l’échographie cardiaque effectuée le 14 juillet 1998 qui démontrait : « un ventricule droit légèrement dilaté et présentant une hypokinésie de la paroi antérieure du ventricule droit ».

[50]           Elle précise que cette hypertension pulmonaire est toujours présente, en janvier 1999, lors de la seconde échographie cardiaque pratiquée à ce moment. Elle est également d’avis que cette hypertension pulmonaire est permanente, puisqu’elle persiste plus de six mois après l’embolie. Elle partage l’opinion du docteur Malo à l’effet que cette hypertension pulmonaire est responsable des symptômes ressentis par le travailleur dont la dyspnée à l’effort même modéré et cela, même si les tests de fonction respiratoire se sont avérés dans les limites de la normale. Elle est d’accord avec le pourcentage de déficit anatomo-physiologique accordé par le docteur Malo, à ce titre.

[51]           Contrairement à l’opinion du docteur Malo, elle partage plutôt celle exprimée par le docteur Bégin à l’effet que l’apnée du sommeil est en relation avec le dernier épisode de thrombophlébite et d’embolie pulmonaire, puisque c’est à partir de ce moment que le travailleur a commencé à prendre du poids. Elle associe en effet, le syndrome d’apnée du sommeil à l’embonpoint du travailleur et comme cet embonpoint découle de l’immobilité consécutive à la thrombophlébite et à l’embolie de juillet 1998, elle établit une relation de cause à effet entre ce syndrome et la lésion professionnelle de juillet 1998.

[52]           Le docteur Daigle a également précisé les limitations fonctionnelles qu’elle reconnaît au travailleur, en précisant que certaines découlent des séquelles de la thrombophlébite, d’autres de l’embolie pulmonaire et de l’hypertension pulmonaire associée et d’autres du syndrome d’apnée du sommeil. Elle est d’avis qu’en raison de l’intolérance à l’effort générée par les séquelles d’hypertension pulmonaire et l’apnée du sommeil, le travailleur devrait éviter de soulever des poids de plus de 25 kilos. Pour les séquelles de la thrombophlébite, il doit éviter de travailler en position debout prolongée ni de monter dans les échelles. Pour les séquelles de l’apnée et comme l’appareil qu’il utilise la nuit ne contrôle qu’en partie son problème, il demeure avec des difficultés à faire une journée normale de travail sans avoir à faire de siestes. Il ne pourrait donc pas travailler de nuit, ni sur des horaires irréguliers. Elle estime également qu’il ne pourrait travailler à raison de 40 heures par semaine. Elle estime qu’une semaine de 25 heures serait appropriée dans les circonstances.

[53]           Dans un rapport complémentaire produit après l’audience, le docteur Daigle accorde un déficit anatomo-physiologique de 5 % pour le syndrome post-phlébitique que conserve le travailleur.

[54]           La Commission des lésions professionnelles constate cependant que le médecin ne précise toutefois pas pour quel membre inférieur elle attribue ce pourcentage.

[55]           La Commission des lésions professionnelles peut inférer du dossier qu’il s’agit du membre inférieur gauche, puisque la thrombophlébite de juillet 1998 a impliqué ce membre inférieur gauche.

[56]           La Commission des lésions professionnelles rappelle cependant que le travailleur a subi des thrombophlébites aux deux membres inférieurs. La Commission des lésions professionnelles constate que le médecin traitant n’a pas évalué l’état du membre inférieur droit. Il est donc impossible pour la Commission des lésions professionnelles de décider s’il y a lieu d’appliquer le facteur de bilatéralité pour les séquelles de la thrombophlébite du membre inférieur gauche.

[57]           La Commission des lésions professionnelles estime que la preuve prépondérante au dossier démontre qu’il y a relation entre l’apnée du sommeil et la lésion professionnelle de juillet 1998. En effet, ce n’est qu’à partir de cette lésion, que le travailleur a accusé des difficultés importantes de mobilisation et par voie de conséquences, qu’il a commencé à prendre du poids. La Commission des lésions professionnelles retient de son témoignage qu’à la suite des autres épisodes de thrombophlébite, il avait pu reprendre ses activités sans trop de difficultés. Il n’avait pas présenté d’augmentation pondérale significative à la suite des épisodes précédents. De ce fait, la Commission des lésions professionnelles associe, tout comme l’ont fait les docteurs Daigle et Bégin, cette surcharge pondérale aux séquelles découlant de la thrombophlébite et l’embolie pulmonaire.

[58]           Comme cette surcharge pondérale est, selon le témoignage du docteur Daigle, la cause de l’apnée du sommeil diagnostiquée, la Commission des lésions professionnelles estime que la prépondérance de preuve est à l’effet qu’il y a relation entre cette apnée du sommeil et l’événement de 1998. De plus, cette apnée du sommeil, même si elle est contrôlée en partie par l’appareil utilisé par le travailleur la nuit, elle laisse tout de même le travailleur porteur de séquelles permanentes. Il a donc droit au pourcentage de déficit anatomo-physiologique recommandé par les docteurs Bégin et Daigle, soit 5 %.

[59]           La Commission des lésions professionnelles estime aussi que le travailleur conserve des séquelles de son embolie, soit une hypertension pulmonaire. Cet état, malgré un test de fonction respiratoire normale, constitue tout de même une séquelle permanente de l’embolie. La Commission des lésions professionnelles retient en effet, que lorsque cette hypertension n’est que transitoire, elle disparaît dans les semaines suivant l’embolie. Comme cette hypertension est objectivée plus de six mois après l’embolie, elle a acquis un caractère de permanence qui justifie l’octroi du pourcentage de déficit anatomo-physioloqiue accordé par les docteurs Malo et Daigle, soit 10 %.

[60]           Quant aux séquelles de la thrombophlébite, elles ont été évaluées par le docteur Daigle dans son rapport d’évaluation complémentaire produit après l’audience. La Commission des lésions professionnelles estime que le travailleur a droit aux 5 % accordés par son médecin, et cela, pour le membre inférieur gauche.

[61]           La soussignée tient à préciser qu’en vertu de l’article 85 de la loi, lorsqu’un travailleur subit un dommage corporel à un organe symétrique à celui déjà atteint, il a droit à un pourcentage additionnel à titre de dommage bilatéral. Cet article se lit comme suit :

85. Le barème des indemnités pour préjudice corporel adopté par règlement doit permettre de déterminer un pourcentage additionnel lorsqu'un travailleur subit, en raison d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, des déficits anatomo‑physiologiques à des organes symétriques ou un déficit anatomo-physiologique à un organe symétrique à celui qui est déjà atteint.

 

À cette fin, le barème tient compte de la nature des organes atteints et du caractère anatomique ou fonctionnel des déficits.

__________

1985, c. 6, a. 85; 1999, c. 40, a. 4.

 

 

[62]           Pour être en mesure d’établir le pourcentage de déficit anatomo-physiologique à titre de dommage bilatéral, il faut que l’évaluation des séquelles soit faite pour les deux organes symétriques soit, dans le dossier sous étude, les membres inférieurs, puisque le travailleur a été victime de thrombophlébites aux deux membres inférieurs. Il importe peu, aux fins d’application de l’article 85 de la loi, que la lésion au membre inférieur gauche soit antérieure à la lésion professionnelle de juillet 1998, puisque l’article 85 permet justement d’accorder un déficit anatomo-physiologique supplémentaire, à titre de dommage bilatéral, dans le cas où la lésion professionnelle laisse un déficit anatomo-physiologique à un organe symétrique à celui déjà atteint. Ce qui peut être le cas en l’espèce, puisque le travailleur a déjà présenté une thrombophlébite au membre contra-latéral.

[63]           La soussignée constate que le rapport du docteur Daigle n’évalue pas les deux membres inférieurs du travailleur et ce faisant, cette évaluation ne respecte pas certaines des règles du Règlement sur le barème des dommages corporels[2], à savoir, les articles 7 et 8 du règlement, ainsi que l’article 1 du chapitre XIII, de l’annexe I concernant le système cardio-vasculaire. Il est donc impossible pour la soussignée de savoir si le travailleur a droit à un pourcentage additionnel de déficit anatomo‑physiologique au titre de dommage bilatéral.

[64]           Ces articles se lisent comme suit :

« 7.      Lorsqu’un travailleur subit, en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, des dommages bilatéraux résultant de déficits anatomo-physiologiques à des organes symétriques ou d’un déficit anatomo-physiologique à un organe symétrique à celui qui est déjà atteint, le barème détermine un pourcentage additionnel qui correspond à la somme des pourcentages de déficits anatomo-physiologiques fixés pour l’organe le moins atteint.

 

Ce principe ne s’applique pas aux pourcentages prévus pour le préjudice esthétique ou les douleurs et la perte de jouissance de la vie.

 

Dans le cas de lésion préexistante à celle évaluée, les séquelles de la lésion préexistante sont évaluées suivant le barème, mais seulement aux fins du calcul des dommages bilatéraux.

 

 

8.         Des règles particulières d’évaluation sont fixées pour chaque système du corps humain, au début de chaque chapitre de l’Annexe I, compte tenu de la nature différente des organes atteints et du caractère anatomique ou fonctionnel des déficits.

 

            Ces règles prévoient également les modalités du calcul des dommages bilatéraux pour ce système.

 

 

SYSTÈME CARDIO-VASCULAIRE

 

            RÈGLES PARTICULIÈRES

 

            Bilatéralité

 

1.         Dans ce chapitre, à l’exception du phénomène de Raynaud et des séquelles consécutives à une lésion vasculaire aux membres supérieurs, aux membres inférieurs et à des séquelles consécutives à des lésions veineuses et lymphatiques, les pourcentages résultant du calcul de la bilatéralité, à la suite d’atteinte permanente à des organes symétriques, sont déjà intégrés. Ils sont alors indiqués sous chaque séquelle. Lorsqu’il n’y a pas d’indication à cet effet, le principe de la bilatéralité ne joue pas. »

 

 

[65]           Compte tenu que le travailleur a subi des thrombophlébites aux deux membres inférieurs, il y a lieu de diriger le dossier à la CSST, afin qu’elle demande un complément d’expertise au docteur Daigle, afin de savoir si un tel pourcentage pour les dommages bilatéraux doit être accordé ou non au travailleur.

[66]           La soussignée détermine néanmoins que le travailleur conserve les déficits antatomo-physiologiques suivant :

-     5 % pour apnée du sommeil;

-     10 % pour hypertension pulmonaire;

-     5 % pour syndrome post-phlébitique membre inférieur gauche.

 

 

[67]           Il restera à déterminer si le travailleur a droit à un pourcentage au titre de la bilatéralité ainsi que le pourcentage auquel le travailleur a droit, à titre de douleurs et perte de jouissance de la vie, puisque ce dernier pourcentage se calcule sur la somme des déficits anatomo-physiologiques, et ce, en vertu de l’article 3 du règlement précité.

[68]           La Commission des lésions professionnelles estime également que le travailleur conserve les limitations fonctionnelles énoncées par le docteur Daigle. Ces limitations fonctionnelles découlent des trois diagnostics reconnus en relation avec la lésion professionnelle de juillet 1998 soit, la thrombophlébite, l’apnée du sommeil et l’hypertension pulmonaire. Ces limitations fonctionnelles sont les suivantes :

Le travailleur doit éviter :

·         le travail en station debout prolongée;

·         de monter ou de travailler dans des échelles;

·         de soulever des charges de plus de 25 kilos;

·         de travailler sur des horaires irréguliers;

·         de travailler de nuit;

·         de travailler plus de 25 heures par semaine.

 

 

[69]           Finalement, après avoir entendu le témoignage du travailleur sur les tâches qu’il accomplissait dans le cadre de son travail de chauffeur-livreur de pain, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que, compte tenu de ces limitations fonctionnelles, le travailleur n’est pas en mesure de reprendre son travail. Il a donc droit aux prestations prévues par la loi et il a droit à la réadaptation que requiert son état.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête du travailleur, monsieur Jean-Pierre Lafond;

INFIRME la décision rendue le 10 juillet 2002, par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que l’apnée du sommeil dont est porteur le travailleur est en relation avec la lésion professionnelle de juillet 1998;


DÉCLARE que le travailleur conserve les déficits anatomo-physiologiques suivants :

·         5 % pour cette apnée du sommeil;

·         10 % pour l’hypertension pulmonaire;

·         5 % pour le syndrome post-phlébitique du membre inférieur gauche.

 

 

RETOURNE le dossier à la CSST afin qu’elle obtienne du médecin traitant l’évaluation du membre inférieur droit, afin de déterminer si le travailleur a droit à un pourcentage additionnel de déficit anatomo-physiologique à titre de dommage bilatéral.

DÉCLARE que le travailleur conserve, à la suite de sa lésion professionnelle de juillet 1998, les limitations fonctionnelles suivantes :

Le travailleur doit éviter :

·         le travail en station debout prolongée;

·         de monter ou de travailler dans des échelles;

·         de soulever des charges de plus de 25 kilos;

·         de travailler sur des horaires irréguliers;

·         de travailler de nuit;

·         de travailler plus de 25 heures par semaine.

 

 

DÉCLARE que le travailleur est incapable de refaire son emploi. Il a donc droit aux prestations prévues par la loi ainsi qu’à la réadaptation que requiert son état.

 

 

__________________________________

 

Me Lucie Couture

 

Commissaire

 

 

 

 

Me Daniel Thimineur

TEAMSTERS QUÉBEC

Représentant de la partie requérante

 

 

 

 

 

 

 

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001

[2]          (1987) 119 G.O. II, 5576

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.