Rénovations Ja-Car inc. |
2014 QCCLP 1935 |
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[1] Le 30 octobre 2013, Rénovations Ja-Car inc. (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 30 septembre 2013 lors d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme sa décision initiale du 26 juillet 2013 et déclare que l’imputation au dossier de l’employeur du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle subie par le travailleur le 14 janvier 2011 demeure inchangée.
[3] Le 16 janvier 2014, la représentante de l’employeur a informé le tribunal qu’elle renonçait à la tenue de l’audience devant avoir lieu à Saint-Hyacinthe le 17 janvier 2014 et a fait parvenir, le même jour, une argumentation écrite en lieu et place de sa participation à cette audience. Le dossier est mis en délibéré le 17 janvier 2014.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] L’employeur
invoque l’article
LES FAITS
[5] De l’analyse du dossier et de l’argumentation écrite reçue, la Commission des lésions professionnelles retient les éléments pertinents suivants.
[6] Le 14 janvier 2011, le travailleur, un charpentier-menuisier alors âgé de 54 ans, subit un accident du travail, se blessant alors à l’épaule droite.
[7] Le 17 janvier 2011, le travailleur consulte le Dr Leduc qui pose un diagnostic de tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite avec suspicion de déchirure. Il prescrit des anti-inflammatoires ainsi que de la physiothérapie et demande une échographie de l’épaule droite. Un arrêt de travail est prescrit.
[8] Le 24 janvier 2011, le Dr Leduc reprend le diagnostic de tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite avec suspicion de déchirure. Les traitements de physiothérapie ainsi que l’arrêt de travail sont prolongés.
[9] Le 25 janvier 2011, une échographie de l’épaule droite est effectuée et révèle ceci :
Déchirure partielle de haut grade au niveau du tendon du muscle sous-épineux dans un contexte d’accrochage acromio-huméral.
[10] Le 31 janvier 2011, le Dr Leduc retient le diagnostic de déchirure partielle à plus de 50 % du tendon sous-épineux de l’épaule droite. Il autorise des travaux légers pour le travailleur et demande de continuer les traitements de physiothérapie entrepris.
[11] Le 2 février 2011, la CSST accepte la réclamation du travailleur pour un accident du travail le 14 janvier 2011, retenant alors le diagnostic de tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite.
[12] Le 8 février 2011, le Dr Leduc pose les mêmes diagnostics de tendinite et de déchirure du sous-épineux de l’épaule droite. Les traitements d’ergothérapie sont ajoutés à la physiothérapie et le médecin réfère le travailleur en orthopédie. Le Dr Leduc remplit également un formulaire « Assignation temporaire d’un travail » sur lequel il autorise du « travail clérical ou de chantier », avec des limitations qu’il décrit.
[13] Le 22 février 2011, le Dr Leduc retient de nouveau le diagnostic de déchirure du tendon sous-épineux droit. La physiothérapie et l’ergothérapie sont poursuivies ainsi que les travaux légers.
[14] Par la suite, le travailleur bénéficie d’un suivi médical régulier auprès du Dr Leduc qui maintient toujours le diagnostic de déchirure de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite. Les traitements de physiothérapie et d’ergothérapie sont maintenus et le travailleur est toujours autorisé à faire des travaux légers[2].
[15] Le 16 mai 2011, le Dr Leduc pose toujours le diagnostic de rupture du tendon sous-épineux de l’épaule droite. Il note une amélioration graduelle de la condition du travailleur, demande une résonance magnétique afin de préciser son diagnostic et recommande une augmentation des périodes d’arrêts lors des travaux légers[3].
[16] Le 19 mai 2011, la CSST rend une décision par laquelle elle déclare qu’il y a une relation entre le nouveau diagnostic de déchirure du tendon du sous-épineux de l’épaule droite posé chez le travailleur et l’événement du 14 janvier 2011. Cette décision sera confirmée le 5 juillet 2011 lors d’une révision administrative, puis par une décision du tribunal[4], entérinant un accord, décision déclarant « Qu’en lien avec la lésion professionnelle subie le 14 janvier 2011 par le travailleur, le diagnostic de déchirure de la coiffe des rotateurs est l’aggravation d’une condition personnelle ».
[17] Le 9 juin 2011, la résonance magnétique de l’épaule droite demandée est réalisée et démontre ce qui suit:
Déchirure partielle d’environ 50% du sus-épineux qui mesure 7 x 12 mm.
Déchirure partielle presque complète du sous-épineux qui mesure 7 x 12 mm.[5]
Ostéo-arthrose acromio-claviculaire sévère.
À noter également de l’atrophie graisseuse légère à modérée des muscle [sic] sus - épineux et sous-épineux.
[18] Le 20 juin 2011, le Dr Leduc maintient le diagnostic de déchirure du sus et du sous-épineux droits. Le médecin indique que le travailleur est toujours en attente d’une consultation en orthopédie et que les traitements de physiothérapie et d’ergothérapie sont à poursuivre.
[19] Le 15 juillet 2011, le travailleur consulte le Dr Dionne, orthopédiste. Le Dr Dionne retient le diagnostic de « re-déchirure[6] de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite » et mentionne qu’une chirurgie est à envisager.
[20] Le 20 juillet 2011, le Dr Leduc note que le travailleur a été vu en orthopédie et qu’il y aura un suivi avec le Dr Dionne. Le Dr Leduc autorise la poursuite du travail léger[7] et mentionne que des « vacances sont autorisées ». Le 22 août 2011, le Dr Leduc fait de semblables constats.
[21] Le 19 septembre 2011, le travailleur revoit le Dr Dionne qui parle toujours de rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite et qui demande de continuer les traitements d’ergothérapie entrepris.
[22] Le 20 octobre 2011, le Dr Leduc maintient le diagnostic de déchirure de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite avec amélioration de 75 %. L’arrêt de travail est maintenu jusqu’au 22 décembre 2011.
[23] Le 1er novembre 2011, une évaluation de la capacité fonctionnelle du travailleur est faite à la Clinique d’évaluation et de réadaptation Rive-Sud. Au rapport produit le 11 novembre 2011, il est recommandé que le travailleur puisse bénéficier d’une intégration dans un « programme interdisciplinaire » pour une durée de quatre semaines, à défaut de quoi, il est indiqué « qu’un autre emploi où les exigences physiques sont moins élevées pourrait être considéré » pour le travailleur.
[24] Le 28 novembre 2011, le Dr Dionne indique que la lésion du travailleur évolue bien et il note que le travailleur a participé à un programme d’évaluation de sa capacité fonctionnelle.
[25] Le 21 décembre 2011, le Dr Leduc mentionne que le travailleur est référé à un centre de réadaptation en vue de développer ses capacités. L’arrêt de travail est prolongé pour une période indéterminée. Les traitements de physiothérapie et d’ergothérapie sont poursuivis.
[26] À compter du mois de janvier 2012, le travailleur participe à un programme de développement de ses capacités auprès de « L’équipe Entrac ». Après une évaluation, cet organisme recommande de débuter un programme de réadaptation active afin d’augmenter la tolérance à l’effort du membre supérieur droit du travailleur[8]. Il est alors prévu que la durée de cette intervention sera de quatre semaines, à raison de cinq séances par semaine, le tout devant débuter le 20 février 2012[9].
[27] Tel qu’il appert du dossier, les traitements de physiothérapie et d’ergothérapie que reçoit le travailleur cessent le 16 février 2012.
[28] Le 22 février 2012, le Dr Leduc réfère le travailleur à la Clinique des accidentés de la route et du travail pour un suivi, car il s’agit d’un cas complexe. Il recommande de poursuivre la réadaptation avec l’équipe multidisciplinaire (Entrac) et il indique qu’il y a des séquelles permanentes à prévoir. Sur la prescription de transfert, le Dr Leduc mentionne également que le Dr Dionne ne suggère pas de chirurgie pour le travailleur.
[29] Tel qu’il appert d’une « facture » de la firme Entrac, datée du 16 mars 2012 et adressée à la CSST, le travailleur a participé, entre le 20 février et le 16 mars 2012, à une rencontre pour « la gestion de la condition » le 20 février, puis à des rencontres « d’optimisation des capacités » les 21, 22, 23, 24 ,27, 28, 29 février, 2, 5, 6, 7, 8, 9,12,13,14,15 et 16 mars 2012.
[30] Tel qu’il appert d’une seconde « facture » de la firme Entrac datée du 20 avril 2012, le travailleur a de nouveau participé à des rencontres « d’optimisation des capacités » les 19, 23, 26 27, 28, 29, 30 mars, 2, 4, 5, 6, 10, 11, 12, 13, 16 et 17 avril 2012, alors qu’il est noté des absences les 20, 21 et 22 mars 2012.
[31] Quant à ces absences, tel qu’il appert d’une note du 22 mars 2012, le travailleur a consulté le Dr Lavoie au Centre hospitalier Pierre-Boucher pour une « embolie artérielle/œil gauche avec investigation » entre le 19 et le 22 mars 2012. Sur une « ordonnance médicale pharmaceutique de départ » émise le 22 mars 2012, un cardiologue indique que le travailleur « est apte à reprendre la réhabilitation de son épaule sans restriction ».
[32] Le 18 avril 2012, le travailleur rencontre le Dr Desautels, orthopédiste, pour un deuxième avis. Tout comme le Dr Dionne, le Dr Desautels ne recommande pas de chirurgie pour le travailleur. Une échographie des épaules est demandée.
[33] Dans une note remplie le même jour à l’attention de « L’Équipe Entrac », le Dr Desautels indique ceci :
Avez-vous des recommandations particulières pour la poursuite du programme ?
M. présente des déchirures de coiffe aux 2 épaules.
Des limitations permanentes sont recommandées.
Quelle est votre opinion par rapport à une chirurgie à l’épaule droite pour la déchirure actuelle ?
Pas de chirurgie proposée à droite.
Re : redéchirure (déjà opéré en 2002 X2)
Atrophie [illisible]
Peu de symptômes actuellement.
[34] Le 23 avril 2012, une entente de service entre la CSST et « L’équipe Entrac » confirme l’ajout de deux semaines d’intervention à raison de cinq séances par semaine, toujours en vue de l’optimisation des capacités du travailleur.
[35] Le 25 avril 2012, l’agente Dolbec de la CSST confirme une rencontre à tenir le 27 avril entre l’employeur, le travailleur et la firme Entrac afin de traiter de la question de la continuité du programme de développement des capacités du travailleur. Il est indiqué qu’un message en ce sens est laissé dans la boîte vocale du travailleur.
[36] Tel qu’il appert du dossier, le travailleur est hospitalisé d’urgence le 26 avril 2012 pour un problème de détérioration à la valve aortique. Le 27 avril, le travailleur informe la CSST de son hospitalisation « jusqu’au moins lundi prochain »[10].
[37] Le 4 mai 2012, l’agente Dolbec de la CSST note ceci :
Titre: APPEL DE T: HOSPITALISATION SE POURSUIT
- ASPECT MÉDICAL:
Message de T sur BV le 2012 05 03 à 10h33
Hospitalisé à la chambre 797 de I’Hôpital Pierre-Boucher.
Parlé à T le 2012 05 03 à 11h00
T explique aller un peu mieux. Cependant, il devra avoir une chx. La date sera déterminée d’ici quelques jours. D’ici à la chx, T demeurera hospitalisé. Suite à la chx, l’hospitalisation devrait se poursuivre quelques jours après la chx. La convalescence suite à la chx devrait être d’une durée de 3 à 4 mois.
T prévoit être encore hospitalisé le 2012 05 15 date à laquelle E prévoit le faire voir en expertise. Laissé les coordonnées à T des représentants de E. T leur fera un suivi de sa situation en début de semaine prochaine lorsqu’il aura plus de détails.
Demandé à T de renouveler la prescription d’AT par son md qui s’occupe de sa condition personnelle.
[38] Le 8 mai 2012, le travailleur subit une valvuloplastie, puis le 23 mai 2012, un drainage péricardique. Une convalescence d’une durée de trois mois est prévue et il appert du dossier que cette maladie personnelle du travailleur a été consolidée le 8 septembre 2012.
[39] Entre-temps, le 7 mai 2012, la CSST informe la clinique RésoScan que l’échographie que doit subir le travailleur doit être remise en raison de son hospitalisation. Il est noté que l’échographie est reportée au 1er juin 2012[11].
[40]
Puis, le 17 mai 2012, l’employeur dépose une demande de transfert de
l’imputation en vertu de l’article
Le 23 avril 2012, une convocation pour une expertise médicale
avec le Dr Isler (art
Le 26 avril 2012, nous apprenons que le travailleur est hospitalisé d’urgence ce jour. Son arrêt est prescrit jusqu’au 2 mai 2012. Également, une rencontre prévue le 27 avril en vue de la planification du retour en poste de monsieur Synnott est annulée.
Sachant cette information, l’arrêt de travail jusqu’au 2 mai, l’expertise médicale du 1er mai est donc reportée au 15 mai 2012, toujours avec le Dr Isler.
Le 4 mai 2012, suite à une conversation avec l’agente d’indemnisation au dossier, nous apprenons que le travailleur subira une chirurgie. Une convalescence d’une durée de 3 à 4 mois est prévue. Le même jour, compte tenu de ces informations, l’expertise médicale du 15 mai est annulée.
Aux dernières nouvelles, il y a confirmation que monsieur Synnott a subi une chirurgie pour remplacement d’une valve aortique. Sa convalescence sera de longue durée soit minimalement 3 mois. Compte tenu de cette situation, l’audition CLP du 13 juin sera reportée ultérieurement.
Aspect légal
Tel que mentionné dans la politique d’imputation de la CSST:
«On considère comme maladie intercurrente une pathologie ou une condition personnelle qui se manifeste en cours de consolidation d’une lésion professionnelle et qui a pour effet de la retarder».
Or, dans ce dossier nous soulignons que:
• Considérant que la condition du travailleur, soit le remplacement d’une valve aortique, constitue une maladie intercurrente;
• Considérant que la CSST a indiqué, en date du 4 mai 2012 que la consolidation sera longue alors qu’elle devrait probablement l’être déjà;
• Considérant que le travailleur a dû arrêter son programme de réadaptation en relation avec sa maladie personnelle;
• Considérant que le travailleur n’a pu se présenter à son expertise médicale en relation avec sa maladie personnelle;
• Considérant que l’audition CLP du 13 juin 2012 sera reportée ultérieurement;
• Considérant que cette condition a considérablement augmenté les frais au dossier;
Nous pouvons donc affirmer, en analysant le présent dossier, que cette condition joue un rôle déterminant dans la durée de la période de consolidation et des coûts relatifs au dossier.
Pour toutes ces raisons, nous demandons à la Commission de désimputer notre client à 100 %, à partir du 26 avril 2012, et de transférer à l’ensemble de tous les employeurs tous les frais relatifs au dossier qui sont chargés ainsi injustement depuis cette date.
[41] Le 7 juin 2012, un médecin indique sur un « papier de prescription » que le travailleur ne peut faire de traitements pour l’épaule gauche ni faire l’échographie demandée par le Dr Desautels jusqu’à nouvel ordre, en raison de sa maladie personnelle.
[42] Le 14 juin 2012, « l’Équipe Entrac » produit un rapport final, concluant ainsi :
3.2.2 Analyse et conclusion
Le participant a présenté une amélioration modérée de ses capacités fonctionnelles et de travail, principalement de la manutention de charges. Aucun plateau thérapeutique n’était atteint lors de la suspension du programme et l’évolution en réadaptation au niveau de l’épaule laissait entrevoir un pronostic favorable pour un retour au travail progressif à court/moyen terme. Toutefois, puisque le programme a été suspendu en raison d’une opération, nous n’avons pas pu atteindre les capacités nécessaires pour un retour à l’emploi prélésionnel.
[Notre soulignement]
[43] Le 26 juin 2012, l’agente Dolbec communique avec le travailleur afin de planifier une rencontre pour discuter d’un retour à un travail éventuel. Le travailleur informe l’agente que la rencontre ne pourra avoir lieu avant le 4 juillet, puisqu’il doit rencontrer son médecin la veille. Cette rencontre avec le travailleur a lieu le 5 juillet, au domicile du travailleur. L’agente Dolbec rapporte ceci :
Titre: Rencontre avec T
- ASPECT MÉDICAL:
Rencontre au domicile de T pour faire un bilan de la situation.
T est en convalescence pour une problématique cardiaque personnelle. Il va de mieux en mieux mais la fatigue est importante.
Discuté avec T de nos conversations avec l’équipe de Entrac. Étant donné que T est au repos complet et ce depuis longtemps, ce qui a été fait chez Entrac est en partie perdu.
Déjà lors du développement de capacité, l’équipe de réadaptation avait de grandes inquiétudes. Le constat d’Entrac, T a amélioré son endurance physique et son épaule mais malgré le tout à moyen terme l’équipe pense que T ne pourrait refaire un métier aussi physique et sollicitant son épaule.
T mentionne y réfléchir aussi de plus en plus surtout depuis ses deux opérations.
Le cardiologue de T prévoit une convalescence de 3 mois. Pour le moment T ne peut aller faire son échographie sous infiltration, T doit attendre l’autorisation de son MD.
PVM: DR Desautels le 5 mai 2012.
T sera aussi revu par son MD de famille.
T est aussi en attente pour un RV pour une expertise de la part de son E.
- ASPECT PROFESSIONNEL:
T se questionne de plus en plus en lien avec un retour dans son emploi pré lésionnel. T mentionne qu’il sait que puisque la compagnie est petite il est difficile d’avoir un EC. T aurait bien aimé pouvoir être juste contremaître.
T amorcera une réflexion sur un emploi convenable pour l’automne 2012. La première étape demandée à T est de mettre sur papier ses intérêts, ses compétences et ses formations.
T aimerait travailler un peu plus à son rythme et peut-être même à temps partiel.
Expliqué à T l’EC et l’année de recherche d’Emploi. Expliqué aussi les IRR et les IRR réduites.
• ASPECT FINANCIER:
T validera aussi auprès de la CCQ son fond de pension. [sic]
[44] Le 29 août 2012, une échographie des épaules est effectuée et se lit comme suit :
Il existe une déchirure transfixiante relativement chronique mesurant 2.3 cm de long par 1.9 cm de large, intéressant la portion antérieure du tendon du sus-épineux gauche.
II existe également, sinon une rupture complète du moins une déchirure transfixiante importante, chronique, de 3 cm de diamètre, au tendon du sus-épineux droit.
Pas de déchirure transfixiante significative décelable aux autres tendons des coiffes des rotateurs, ni aux tendons des longues portions des biceps.
Présence de quelques calcifications millimétriques aux tendons des muscles sous-scapulaires.
Légère arthrose acromio-claviculaire bilatérale.
L’étude dynamique démontre un conflit acromio-huméral d’importance légère à modérée à droite et d’importance légère à gauche.
Opinion: Rupture chronique du tendon du sus-épineux droit et déchirure transfixiante au tendon du sus-épineux gauche.
[45] Le 5 septembre 2012, le Dr Desautels confirme le diagnostic retenu à l’échographie du 29 août 2012 de déchirure la coiffe des rotateurs des deux épaules, note qu’il n’y a pas de douleur et qu’il n’y aura pas de chirurgie. Le médecin mentionne que le travailleur gardera de sa lésion des limitations permanentes déjà présentes depuis 2004 et qui sont incompatibles avec son emploi.
[46] Le 18 septembre 2012, le travailleur est examiné par le Dr Isler à la demande de l’employeur. À son rapport, le Dr Isler écrit notamment ceci :
EN RÉSUMÉ
Ce travailleur, qui avait déjà une rupture de la coiffe réparée en 2002, a pu réintégrer son travail de 2004 à 2011 sans limitation ni incidents. En 2011, alors qu’il retenait un poids lourd devant son épaule droite avec le membre supérieur étendu à bout de bras en rotation interne, il a subi une douleur aiguë suggestive d’une déchirure de la coiffe des rotateurs, selon les médecins contemporains. L’évaluation radiologique a permis de confirmer cette blessure. Une longue période d’évolution en traitement conservateur, il a eu un épisode de soins non reliés pour valvulopathie aortique qui a mérité environ trois mois d’invalidité. À la fin de cette période, le travailleur se dit peu ou pas symptomatique et capable de reprendre son travail, sans limitation, et l’examen objectif concorde.
L’investigation radiologique met en évidence une déchirure importante de la coiffe des rotateurs dont une partie est probablement liée à la blessure de 2002 et la progression de cette déchirure peut être due à l’histoire naturelle de la déchirure de la coiffe des rotateurs ou plus probablement d’une exacerbation traumatique causée par le geste qui, clairement, met en relation ces structures anatomiques.
Il est utile dans ce cas particulier de souligner qu’il est bien connu que pour certains individus, le traitement conservateur d’une rupture massive de la coiffe des rotateurs peut donner une évolution très favorable comme nous le présente le travailleur ce jour.
[Nos soulignements]
[47] Au terme de son examen, le Dr Isler retient, en lien avec l’événement du 14 janvier 2012, le diagnostic de rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite (exacerbation d’une rupture préexistante). Il consolide la lésion le même jour, soit le 18 septembre 2012, sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles additionnelles à celles établies pour la lésion du travailleur subie en 2002. Par ailleurs, sur la question de savoir « À partir de quelle date les soins ou les traitements ne sont plus nécessaires? », le Dr Isler indique ceci :
En l’absence d’une documentation d’une opinion par rapport à un plateau thérapeutique et une interruption des soins, je retiendrais la date du 5 septembre 2012, évaluation la plus récente du docteur Charles Desautels comme étant la date à partir de laquelle les soins et traitements ne sont plus nécessaires.
[Notre soulignement]
[48] Le 24 septembre 2012, le Dr Lévesque produit un rapport final dans lequel il consolide le même jour la lésion du travailleur, une tendinite de la coiffe des rotateurs et une déchirure du sus-épineux de l’épaule droite. Le médecin indique qu’il prévoit que le travailleur conservera de sa lésion une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
[49] Le 19 décembre 2012, le Dr Gauthier examine le travailleur aux fins de la production d’un rapport d’évaluation médicale. Au rapport produit le 10 janvier 2013, le Dr Gauthier retient le diagnostic de rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite pour lequel il n’accorde aucun déficit anatomo-physiologique additionnel, mais retient des limitations fonctionnelles qu’il décrit.
[50] Le 18 février 2013, le Dr Lévesque remplit un rapport « information médicale complémentaire écrite » sur lequel il se dit d’accord avec les conclusions du Dr Gauthier émises au rapport du 10 janvier 2013.
[51] Le 22 février 2013, Mélanie Dorais-Beauregard, conseillère en réadaptation de la CSST, indique, concernant la capacité de travail du travailleur, que les conclusions sont à l’effet que les limitations fonctionnelles du travailleur, émises le 10 janvier 2013 par le Dr Gauthier, soit d’éviter de manipuler des charges excédant plus de 25 kg avec le membre supérieur droit et d’éviter de travailler fréquemment à bout de bras ou au-dessus de l’horizontale, sont moindres que les limitations fonctionnelles antérieures avec lesquelles le travailleur faisait son travail régulier. En conséquence, la conseillère en réadaptation de la CSST, conclut que le travailleur est capable de refaire son travail prélésionnel.
[52] En conséquence de cette analyse, le 7 mars 2013 la CSST rend une décision par laquelle elle détermine que le travailleur est capable d’exercer son emploi depuis le 22 février 2013. Cette décision sera confirmée le 26 mars 2013 lors d’une révision administrative et cette dernière décision est devenue finale.
[53] En fait, tel qu’il appert du dossier, le travailleur a repris son travail prélésionnel à compter du 18 mars 2013, mais à « temps partiel », ce qui amène la CSST à cette période à lui verser des indemnités de remplacement du revenu réduites afin de compléter le salaire gagné[12]. Le travailleur a repris son travail régulier, à « temps complet », au début du mois de mai 2013, ce qui a entraîné la fin de son droit aux indemnités de remplacement du revenu[13].
[54] Le 25 juillet 2013, l’agente Nicole Lauzon de la CSST procède à l’analyse de la demande de transfert de coûts produite le 17 mai 2012 par l’employeur. Le tribunal croit utile de reproduire intégralement la note de l’agente Lauzon alors produite. Elle écrit :
GÉNÉRALITÉS:
• Date de l’événement d’origine : 14 janvier 2011
• Date de la demande de partage d’imputation: 17 mai 2012
• Article(s) concerné(s) de la LATMP: Art. 326 (Maladie intercurrente)
MOTIFS INVOQUÉS PAR L’EMPLOYEUR:
Le représentant de l’employeur demande un transfert de coûts en vertu de l’article 326 au motif qu’une maladie intercurrente, soit le remplacement d’une valve aortique, a eu pour effet de reporter une expertise médicale avec le Dr Isler (art. 209), de reporter l’audition CLP du 13 juin 2012 et d’interrompre son programme de réadaptation.
On nous demande de désimputer l’employeur à partir du 26 avril 2012.
ÉLÉMENTS PERTINENTS AU DOSSIER:
• Diagnostic de la lésion professionnelle : Tendinite et déchirure coiffe rotateurs épaule droite
Consolidation 24 septembre 2012 (RMF) sans atteinte permanente additionnelle et limitations fonctionnelles
• Maladie intercurrente : Hospitalisation le 25 avril 2012, remplacement valvulaire et convalescence post opération jusqu’au 8 septembre 2012 (certificat médical du 11 juillet 2012)
Durée de la maladie intercurrente = 139 jours
• Assignation temporaire:
Aucune assignation temporaire
• Traitements:
1) Fin des traitements de physiothérapie et d’ergothérapie le 16 février 2012.
2) Programme de développement des capacités débuté à la fin février 2012. Selon la note évolutive du 16 mars 2012, la poursuite du programme de développement des capacités était autorisée pour un autre 4 semaine, soit jusqu’aux alentours du 16 avril 2012. Une entente de service du 16 mars 2012 confirme cette autorisation.
Le 23 avril 2012, une entente de service confirme l’ajout de 2 semaines d’intervention à raison de 5 séances par semaine.
Le 25 avril 2012, une télécopie de l’équipe Entrac avise que le travailleur a remis un billet médical justifiant une absence jusqu’au 2 mai.
Le 14 juin 2012, la conseillère en réadaptation envoie un rapport de fin d’intervention à Entrac.
Interruption du programme de développement des capacités du 25 avril 2012 au 14 juin 2012, soit durant 51 jours.
• Durée de consolidation de la lésion: 619 jours
ANALYSE ET DÉCISION:
Compte tenu que l’employeur qui présente une demande en vertu du deuxième alinéa de l’article 326 doit le faire au moyen d’un écrit contenant un exposé des motifs à son soutien dans l’année suivant la date de l’accident;
Compte tenu qu’en vertu de l’article 352, la Commission prolonge un délai que la présente loi accorde pour l’exercice d’un droit ou relève une personne des conséquences de son défaut de le respecter, lorsque la personne démontre un motif raisonnable pour expliquer son retard;
Compte tenu que l’événement d’origine est le 14 janvier 2011 et que l’employeur nous présente sa demande en vertu de l’article 326, deuxième alinéa, le 17 mai 2012 en invoquant une maladie intercurrente connue depuis le 26 avril 2012 a démontré un motif raisonnable pour expliquer son retard;
Compte tenu que les situations pouvant donner droit au transfert en vertu de l’article 326, obéré injustement, sont la maladie intercurrente, l’assignation temporaire interrompue et la lésion causée par une négligence grossière et volontaire du travailleur;
Compte tenu qu’on considère une maladie intercurrente comme étant une maladie, ou une blessure qui se manifeste en cours de consolidation d’une lésion professionnelle;
Compte tenu qu’une hospitalisation et un remplacement valvulaire est une condition médicale personnelle qui se manifeste en cours de consolidation d’une lésion professionnelle et qui est distincte de la lésion professionnelle;
Compte tenu que la maladie intercurrente doit avoir pour effet d’altérer l’évolution de la lésion professionnelle, d’en modifier le plan de traitement et d’en retarder ainsi la consolidation;
Compte tenu qu’il est nécessaire, pour conclure qu’il y a une situation d’injustice significatif, que la maladie intercurrente doit être de plus de 7 jours consécutifs à compter de la date d’interruption de l’assignation temporaire et que la période de d’interruption de l’assignation doit équivaloir à au moins 20% de la période totale où il aurait dû y avoir assignation;
Compte tenu que dans le cas présent, la maladie intercurrente n’a interrompu aucune assignation temporaire;
Compte tenu qu’il est nécessaire, pour conclure qu’il y a une situation d’injustice significatif, que la maladie intercurrente doit être de plus de 7 jours consécutifs à compter de la date d’interruption des soins ou des traitements et que la période de prolongation de la consolidation due à cette maladie intercurrente doit représenter au moins 20% de la période totale de consolidation de la lésion professionnelle;
Compte tenu que le report d’une expertise médicale et d’une audition à la CLP ne sont pas des soins ou traitements;
Compte tenu que dans le cas présent, il y a eu interruption du Programme de développement des capacités du 25 avril 2012 au 14 juin 2012, soit durant 51 jours;
Compte tenu qu’il y a plus de 7 jours consécutifs à compter de la date d’interruption des soins ou des traitements;
Compte tenu toutefois que la période de prolongation de la consolidation due à cette condition médicale personnelle ne représente que 6,23% de la période totale de consolidation de la lésion professionnelle;
En conséquence, nous refusons la demande de transfert de coûts. [sic]
[55] En conséquence de cette analyse, la CSST rend une décision le 26 juillet 2013 par laquelle elle conclut que l’employeur n’est pas obéré injustement par l’imputation du coût des prestations liées à la lésion professionnelle du travailleur. Cette décision sera confirmée le 30 septembre 2013, lors d’une révision administrative, d’où le présent litige. Dans sa décision, la réviseure retient notamment ceci :
La Commission, en révision, constate que la maladie ou la blessure qui est survenue en cours de consolidation a causé une interruption des traitements relatifs à la lésion professionnelle pendant plus de sept (7) jours consécutifs.
Par contre, cette maladie ou cette blessure n’a pas prolongé la période de consolidation de la lésion professionnelle d’au moins 20 % de la période totale de consolidation. En effet, la preuve médicale au dossier est à l’effet que l’interruption du programme de développement des capacités, en raison de la maladie intercurrente, a duré 50 jours, soit entre le 25 avril 2012 et le 14 juin 2012. La période de consolidation de la lésion professionnelle étant de 619 jours, l’interruption du programme de développement des capacités représente donc 8,08 % de la période totale de consolidation.
Par conséquent, il n’y a pas lieu de donner suite à la demande de l’employeur et aucun transfert ne peut lui être accordé et l’imputation du coût des prestations n’a pas pour effet de l’obérer injustement.
[56] Dans son argumentation écrite produite le 16 janvier 2014, la procureure de l’employeur soutient ceci :
[…]
Dans le présent dossier, l’employeur est obéré injustement, car la CSST lui a imputé des coûts qui ne sont pas reliés à la lésion professionnelle, mais qui découlent uniquement de la condition personnelle du travailleur. Celle situation est inéquitable pour l’employeur.
Nous sommes d’avis que l’hospitalisation du travailleur pour un remplacement d’une valve aortique, constitue une maladie intercurrente qui est totalement étrangère à la lésion professionnelle reconnue par la CSST et qui a eu pour effet d’obérer injustement l’employeur. En effet, depuis le 25 avril 2012, date où il a été vu par le Service de cardiologie, le travailleur ne recevait plus de traitement et n’a pu faire une échographie des épaules qui avait été demandée lors de sa dernière visite avec le docteur Desaultels.
Lors de celle visite, le docteur Desaultels était sur le point de consolider la lésion et d’autoriser un retour au travail sans limitations permanentes supplémentaires. (voir p. 205), ce qui n’a pu être fait puisque quelques jours plus tard le travailleur était hospitalisé pour sa condition médicale.
D’ailleurs, un billet médical de la Clinique de médecine générale Le Médical indique que le travailleur ne peut faire de traitements pour l’épaule ni faire une échographie jusqu’à nouvel ordre et ce, en raison d’un remplacement d’une valve aortique et d’une péricardite. (p. 211)
Or, cette condition médicale a été consolidée le 8 septembre 2012 et le travailleur a finalement subi une échographie pour les épaules le 29 août 2012, soit 3 mois après avoir été traité pour sa maladie personnelle. Durant ce temps, les traitements n’ont pas pu être administrés au travailleur et c’est ce qui a fait en sorte que la lésion n’a pas pu être consolidée avant.
La maladie personnelle du travailleur a donc prolongé la période de consolidation de sa lésion à l’épaule droite, car lorsqu’il a été hospitalisé cette lésion était en voie de guérison et donc d’être consolidée puisque les docteurs Dionne et Desaultels ont conclu que le travailleur n’était pas un candidat à la chirurgie. N’eût été de la maladie intercurrente qui a occasionné une convalescence de 3 mois, la lésion aurait été consolidée beaucoup plus rapidement et l’employeur n’aurait pas à être imputé des coûts de l’indemnité de remplacement du revenu pour cette période.
De plus, il y a eu une interruption du programme de développement des capacités du 25 avril 2012 au 14 juin 2012. En effet, au moment où le travailleur a été hospitalisé, il suivait un programme de réadaptation qui avait été prescrit par le docteur Leduc le 21 décembre 2011 et qui a dû être arrêté jusqu’au 14 juin 2012 (voir notes évolutives page 58) en raison de sa maladie personnelle. Il y a donc également eu interruption du programme de développement des capacités pour une période de 51 jours.
Le travailleur a donc reçu de l’indemnité de remplacement de revenu du 25 avril 2012 au 29 août 2012 et ce, uniquement en raison d’une condition de santé personnelle aucunement en relation avec l’événement du 17 janvier 2011. En l’absence de condition de santé personnelle, l’employeur n’a pas à être imputé des coûts de l’indemnité pour cette période, soit environ 4 mois. Ces coûts représentent des coûts importants et donc une charge financière significative pour l’employeur.
Nous vous soumettons donc que l’employeur ne doit pas être imputé du coût de l’indemnité de remplacement du revenu pour la période du 25 avril 2012 au 29 août 2012, car ces coûts sont entièrement reliés aux problèmes de santé personnels du travailleur, ce qui crée une situation d’injustice pour l’employeur.
CONCLUSION
Pour tous ces motifs, nous demandons à la Commission d’accueillir la contestation de l’employeur et de déclarer que l’entreprise Rénovations Ja-Car inc. ne doit pas assumer les coûts des indemnités de remplacement du revenu versées au travailleur pour la période du 25 avril 2012 au 29 août 2012.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[57]
La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si
l’employeur a droit au transfert de coûts qu’il réclame en application de
l’article
326. La Commission impute à l'employeur le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail survenu à un travailleur alors qu'il était à son emploi.
Elle peut également, de sa propre initiative ou à la demande d'un employeur, imputer le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail aux employeurs d'une, de plusieurs ou de toutes les unités lorsque l'imputation faite en vertu du premier alinéa aurait pour effet de faire supporter injustement à un employeur le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail attribuable à un tiers ou d'obérer injustement un employeur.
L'employeur qui présente une demande en vertu du deuxième alinéa doit le faire au moyen d'un écrit contenant un exposé des motifs à son soutien dans l'année suivant la date de l'accident.
__________
1985, c. 6, a. 326; 1996, c. 70, a. 34.
[58] En l’espèce, l’employeur demande un transfert partiel du coût des prestations versées au travailleur et imputées à son dossier financier à la suite de la survenue le 25 avril 2012, en cours de lésion professionnelle, d’une maladie personnelle de nature cardiaque et qui a nécessité une hospitalisation, menant à deux chirurgies. Cette maladie personnelle ayant été considérée consolidée le 8 septembre 2012, l’employeur réclame que le coût des indemnités de remplacement du revenu versées au travailleur entre le 25 avril et le 29 août 2012, et qui lui a été imputé, soit retiré de son dossier.
[59] Essentiellement, le tribunal retient de l’argumentaire produit par la procureure de l’employeur qu’en définitive, la survenue, chez le travailleur en avril 2012, d’une maladie personnelle d’origine cardiaque aurait eu pour effet :
1) d’interrompre les traitements dont il bénéficiait pour sa lésion professionnelle;
2) de l’empêcher de subir une échographie prévue;
3) et, en définitive, d’avoir reporté la consolidation de la lésion à une date ultérieure, alors que cette date était imminente, puisque de toute façon, le travailleur n’était pas un candidat pour une chirurgie à son épaule.
[60]
Dans sa décision rendue le 26 juillet 2013 et confirmée le 30 septembre
2013, la CSST a appliqué une politique interne déterminant les conditions
d’application de l’article
[61]
Bien que dans son argumentaire présenté au tribunal l’employeur invoque de
nouveau l’application du deuxième alinéa de l’article
[62]
Le soussigné partage l’opinion émise par le tribunal dans l’affaire Arneg
Canada inc.[14], dans laquelle il est
suggéré qu’il y a lieu de s’interroger sur l’applicabilité du principe général
d’imputation, édicté au premier paragraphe de l’article
[16] D’abord, le premier alinéa énonce le principe général en matière d’imputation suivant lequel la CSST impute à l’employeur le coût des prestations dues en raison d'un accident survenu à un travailleur alors qu’il est à son emploi.
[17] Quant au deuxième alinéa, il prévoit deux exceptions à ce principe. Ces exceptions s’appliquent lorsque l’imputation faite en vertu du premier alinéa a pour effet de faire supporter injustement à un employeur le coût des prestations dues en raison d’un accident du travail attribuable à un tiers ou lorsque cette imputation a pour effet de l’obérer injustement.
[18] Ainsi, dans la mesure où les prestations dont l'employeur souhaite ne pas être imputé ne sont pas dues en raison de l’accident du travail, au sens du premier alinéa, ces prestations ne devraient pas être imputées au dossier de l'employeur, et ce, en application du principe général.
[19] Par contre, si les prestations sont dues en raison
de l’accident du travail, elles doivent être imputées au dossier financier de
l’employeur, sauf si l’employeur démontre qu’il peut bénéficier de l’une des
deux exceptions au principe général prévues au deuxième alinéa de
l’article
[20] Tel que mentionné, la première exception vise le transfert du coût des prestations lorsque l’accident du travail est attribuable à un tiers. La deuxième exception vise le transfert du coût des prestations lorsque l’imputation a pour effet d’obérer injustement l’employeur.
[Nos soulignements]
[63]
D’autre part, le soussigné souscrit également au principe mis de l’avant
dans l’affaire Supervac 2000[15] voulant que de façon
générale, une demande de transfert partiel du coût des prestations
imputées à un employeur relève du premier paragraphe de l’article
[64]
Dans l’affaire Supervac 2000, précitée, la Commission des lésions professionnelles a procédé à une analyse approfondie de
l’interprétation à retenir de l’article
[65] La Commission des lésions professionnelles procède alors à l’analyse de l’ensemble des principes d’imputation et de transfert des coûts, indiquant d’emblée que pour ce faire, il y a lieu de retenir la méthode dite de l’analyse contextuelle de la loi[16].
[66]
Par la suite, la Commission des lésions professionnelles procède à une
revue historique de la jurisprudence du tribunal en ce qui a trait à
l’interprétation donnée à l’article
[67]
La Commission des lésions professionnelles dans cette affaire Supervac
2000 rapporte également que depuis 2003, quelques décisions[18]
ont été rendues, traitant de ce type de demande, en ayant recours au premier
alinéa de l’article
[68] Partant, toujours dans l’affaire Supervac 2000, le tribunal estime donc nécessaire de s’interroger sur l’intention réelle du législateur et s’exprime comme suit :
[99] Par conséquent, il apparaît nécessaire de s’interroger
sur l’intention réelle du législateur lorsqu’il a édicté le principe général
d’imputation au premier alinéa de l’article
[100] Pour y parvenir, il est essentiel de revenir à
l’analyse contextuelle globale de la loi qui fait ressortir que le principe
général d’imputation prévu au premier alinéa de l’article
[101] Cependant, lorsqu’une partie de ces coûts est générée par une situation étrangère n’ayant pas de lien direct avec la lésion professionnelle, comme c’est notamment le cas du congédiement ou encore de la condition intercurrente ou personnelle interrompant une assignation temporaire, est-il justifiable que ces sommes demeurent imputées au dossier de l'employeur?
[102] Dans de telles circonstances, ne serait-ce pas le
premier alinéa de l’article
[103] En vue de se prononcer à cet égard, le tribunal a
analysé le libellé même de l’article
[104] Le
deuxième alinéa de l’article
[105] Or,
si l’on compare le libellé de cet alinéa à celui de l’article
[106] D’ailleurs,
dans l’affaire Les Systèmes Erin ltée27, la Commission des lésions professionnelles s’est penchée sur la portée du deuxième alinéa de
l’article
[26] Finalement,
il importe de souligner que l’article
[27] Cela implique, comme dans le cas de l’article 327, qu’il y a transfert de coût et non partage, comme c’est le cas en application des articles 328 et 329. Cette dernière disposition prévoit que la CSST « peut [...] imputer tout ou partie du coût des prestations aux employeurs de toutes les unités » alors que l’article 326 prévoit que la CSST « peut [...] imputer le coût des prestations [...] aux employeurs [...] ». Ainsi, lorsqu’il y a matière à application de l’article 326 alinéa 2, la totalité du coût des prestations ne doit plus être imputée à l’employeur, un transfert devant être fait : il ne saurait être question de ne l’imputer que d’une partie du coût. C’est, en quelque sorte, tout ou rien.
[28] D’ailleurs, lorsqu’il est question d’un accident du travail attribuable à un tiers, la totalité du coût des prestations est toujours transférée ; il n’est jamais question de partage ou de transfert du coût pour une période donnée.9 Il a d’ailleurs déjà été décidé à plusieurs reprises qu’il devait obligatoirement en être ainsi.
[29] Étonnamment, lorsqu’il est question d’éviter que l’employeur soit obéré injustement, un transfert du coût des prestations pour une période donnée, soit un transfert d’une partie seulement du coût total, a régulièrement été accordé, sans, par contre, qu’il semble y avoir eu discussion sur cette question.10
[30] Avec respect pour cette position, la commissaire soussignée ne peut la partager, pour les motifs exprimés précédemment. Il en va des cas où l’on conclut que l’employeur serait obéré injustement comme de ceux où l’on conclut à un accident attribuable à un tiers : l’employeur ne saurait alors être imputé ne serait-ce que d’une partie du coût des prestations dues en raison de l’accident du travail.
[31] Il importe cependant de préciser qu’il est possible, en application de l’article 326 (mais alinéa 1), de ne pas imputer à l’employeur une partie du coût des prestations versées au travailleur, pour autant que cette partie du coût ne soit pas due en raison de l’accident du travail. Un bon exemple de cette situation est la survenance d’une maladie personnelle intercurrente (par exemple, le travailleur fait un infarctus, ce qui retarde la consolidation ou la réadaptation liée à la lésion professionnelle) : les prestations sont alors versées par la CSST, mais comme elles ne sont pas directement attribuables à l’accident du travail elles ne doivent, par conséquent, pas être imputées à l’employeur. L’article 326, 1er alinéa prévoit en effet que c’est le coût des prestations dues en raison de l’accident du travail qui est imputé à l’employeur.
9 Voir notamment : General Motors du Canada ltée
et C.S.S.T.
10 Ville de St-Léonard et C.S.S.T. C.A.L.P.
[Nos soulignements]
[107] La
soussignée souscrit au raisonnement et aux motifs retenus dans cette décision
de même qu’à l’interprétation qui en est faite du second alinéa de
l’article
[108] De
plus, un autre élément permet au tribunal de conclure que le deuxième alinéa de
l’article
[109] En effet, le législateur a spécifiquement prévu que l'employeur doit présenter sa demande dans l’année suivant la date de l’accident. Ceci s’explique, de l’avis du tribunal, par le fait que les demandes de transfert total de coûts visent généralement des motifs liés à l’admissibilité même de la lésion professionnelle. C’est clairement le cas à l’égard des accidents attribuables à un tiers et le libellé même de cet alinéa ne permet pas de croire qu’il en va autrement à l’égard de la notion d’obérer injustement. D’autant plus que l’application de ce deuxième alinéa à des demandes de transfert partiel a donné lieu à des interprétations variées de cette notion « d’obérer injustement » et mené à une certaine « incohérence » relativement à l’interprétation à donner à cette notion et à la portée réelle de l’intention du législateur.
[110] La
soussignée est d’opinion que le législateur visait clairement, par les deux
exceptions prévues au deuxième alinéa de l’article
[111] Ceci semble d’autant plus
vrai que la plupart des demandes de transfert total de coûts, liées
principalement à l’interruption de l’assignation temporaire ou à la
prolongation de la période de consolidation en raison d’une situation étrangère
à l’accident du travail, surviennent fréquemment à l’extérieur de cette période
d’un an puisqu’elles s’inscrivent au cours de la période d’incapacité liée à la
lésion professionnelle. Il s’agit donc là d’un autre élément militant en faveur
d’une interprétation selon laquelle les deux exceptions prévues au deuxième
alinéa de l’article
[112] Dans le
cas à l’étude, puisqu’il ne s’agit pas d’une demande de transfert total, le
tribunal en vient à la conclusion qu’il faut l’analyser en vertu du principe
général d’imputation prévu au premier alinéa de l’article
(27) Précitée, note 26
[69] Le soussigné souscrit entièrement à ce raisonnement et fait siennes l’analyse et les conclusions de la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Supervac 2000, ci-dessus, et, par conséquent, estime que la présente demande de l’employeur doit être analysée sous l’angle du premier alinéa de l’article 326. À cet égard, le soussigné retient également qu’une semblable analyse, menant à une conclusion identique, fut faite dans l’affaire Commission Scolaire des Samares[19], précitée.
[70]
Le soussigné considère que l’approche proposée dans l’affaire Supervac
2000, quant à l’interprétation à donner à chacun des deux premiers
paragraphes de l’article
[71]
Cette approche a également l’avantage de proposer une solution valable à
l’interprétation disparate donnée à l’article
[72] Appliquant ces principes au présent cas, le soussigné est néanmoins d’avis que la requête de l’employeur doit être rejetée, et ce, pour les motifs suivants.
[73] En l’espèce et à l’instar de la CSST, le soussigné n’a aucune hésitation à reconnaître que le travailleur a vécu, en cours d’évolution de sa lésion professionnelle à l’épaule droite et alors que cette lésion professionnelle n’était toujours pas consolidée, la survenue d’une maladie personnelle de nature cardiaque, une maladie « intercurrente ».
[74] Dans son analyse de la demande de transfert de coûts présentée par l’employeur, la CSST a retenu que cette maladie intercurrente, qui a nécessité une hospitalisation du travailleur et entraîné deux interventions chirurgicales, a elle-même été considérée consolidée le 8 septembre 2012, soit pour une durée totale de 139 jours. La CSST a de plus retenu que cette maladie intercurrente n’a interrompu aucune assignation temporaire, mais qu’elle a eu pour conséquence d’entraîner le report d’une expertise médicale et d’une audition à la Commission des lésions professionnelles[20] et a également eu pour effet « d’entraîner une interruption du Programme de développement des capacités du 25 avril 2012 au 14 juin 2012, soit durant 51 jours »[21].
[75]
Néanmoins, la CSST a refusé la demande de l’employeur, tel que mentionné
précédemment, par application de principes établis dans une politique interne
relative à la notion « d’obéré injustement » de l’article
[76]
Le soussigné à établi précédemment qu’il y a plutôt lieu d’appliquer aux
faits retenus les dispositions de l’article
[77] Certes, dans le présent cas, il ne s’agit pas, comme dans nombre des décisions citées précédemment par le tribunal, de la survenue d’une maladie intercurrente empêchant la mise en place ou la continuation d’une assignation temporaire débutée et ayant pour effet de faire en sorte que des indemnités de remplacement du revenu sont versées au travailleur pendant la durée de la maladie intercurrente. Néanmoins, le soussigné est d’avis que la même analyse développée dans l’affaire Supervac 2000 peut trouver application en l’espèce alors que c’est principalement le rôle qu’a pu jouer la maladie intercurrente du travailleur sur l’interruption de son programme de réadaptation qui est en cause, et, par ricochet, sur la durée de consolidation de la lésion professionnelle[22].
[78] Ceci étant, le tribunal rappelle que dans l’affaire Supervac 2000, ce qui fait en sorte que l’employeur s’est vu retirer de son dossier le coûts des indemnités de remplacement du revenu versées au travailleur par la CSST, alors que dans cette affaire le congédiement du travailleur avait eu pour conséquence d’empêcher la mise en place d’une assignation temporaire, c’est essentiellement que la juge administratif saisie du litige a conclu que l’employeur avait démontré qu’il n’y avait pas de lien causal direct entre le coût des prestations que l’employeur désirait voir retirer de son dossier financier et la lésion professionnelle subie par le travailleur, que ces coûts n’étaient donc pas directement « dus en raison de l’accident du travail » subi par le travailleur.
[79] En l’espèce, l’argumentaire de l’employeur, de façon globale, suggère que n’eût été la maladie intercurrente du travailleur, à compter du 25 avril 2012, il aurait pu bénéficier de « traitements » jusqu’au 14 juin 2012 dans le cadre de son programme de réadaptation, il aurait subi l’échographie demandée en avril 2012 par le Dr Desautels et en aurait connu les résultats plus rapidement, ce qui aurait hâté d’autant la consolidation de sa lésion, du moins le constat de cette consolidation par les médecins consultés par le travailleur.
[80]
Avec égards, et même en prenant en considération que tous les postulats
formulés par l’employeur aient été exacts, le tribunal demeure d’avis que les
indemnités de remplacement du revenu versées au travailleur par la CSST pendant
l’évolution de la maladie intercurrente du travailleur demeuraient « dues
en raison de la lésion professionnelle » au sens de l’article
[81] Tout d’abord, le tribunal constate que le 18 avril 2012, le travailleur a revu le Dr Desautels et qu’à l’occasion de cette consultation, le médecin a indiqué au rapport produit pour la CSST une date de consolidation « prévisible » de 60 jours ou moins. Le médecin a par ailleurs demandé une échographie des épaules du travailleur et, en réponse à des questions posées par les professionnels de « L’équipe Entrac », il a indiqué qu’il n’y avait pas lieu de procéder à une chirurgie chez le travailleur et qu’aux fins de la poursuite du programme de réadaptation, « des limitations permanentes sont recommandées ».
[82] Quelques jours plus tard, un nouveau contrat de service est passé entre la CSST et Entrac, afin de poursuivre les « traitements » déjà offerts au travailleur, pour une période additionnelle de deux semaines, à raison de cinq séances par semaine. Cette prolongation, qui prenait effet à compter du 23 avril 2012, n’était autorisée que pour deux semaines. L’affirmation de l’employeur à son argumentaire voulant que le travailleur ait été privé de traitements jusqu’au 14 juin 2012 est donc inexacte.
[83] Or, la survenue de la maladie intercurrente, deux jours plus tard, a fait en sorte que la prolongation de traitements autorisée n’aura pas lieu et que l’échographie des épaules prévue en mai sera reportée au 29 août 2012.
[84] Manifestement, avant la survenue de la maladie intercurrente du travailleur le 25 avril 2012, la lésion professionnelle du travailleur n’était pas consolidée et des traitements demeuraient envisagés pour lui. De même, le médecin du travailleur avait demandé qu’une échographie des épaules du travailleur soit réalisée.
[85] Tout au cours de la période d’invalidité du travailleur en raison des chirurgies subies, invalidité associée à sa maladie personnelle, la CSST lui a versé des indemnités de remplacement du revenu.
[86] Par la suite, le travailleur a subi l’échographie demandée par le Dr Desautels le 29 août 2012 et cet examen a confirmé les déchirures connues aux épaules du travailleur. Puis, le 5 septembre 2012, le Dr Desautels a de nouveau confirmé qu’il n’y avait pas lieu de procéder à une chirurgie pour le travailleur et le médecin a indiqué, au rapport produit pour la CSST, que le travailleur conservait « des limitations permanentes depuis 2004, incompatibles avec l’emploi qu’il fait ».
[87] Quelques jours plus tard, le Dr Isler, désigné par l’employeur, jugeait la lésion professionnelle du travailleur consolidée à la date de son examen, sans atteinte permanente, mais avec les mêmes limitations fonctionnelles que celles découlant de la lésion précédente du travailleur, subie en 2002, le médecin concluant à la capacité du travailleur à refaire son emploi prélésionnel.
[88] La suite du dossier révèle le processus usuel par lequel une évaluation des séquelles permanentes attribuables à la lésion professionnelle est faite, menant à un rapport d’évaluation médicale par le Dr Gauthier, le 19 décembre 2012, dont les conclusions sont entérinées par le médecin du travailleur, le 18 février 2013.
[89] Contre toute attente, il est déterminé que les limitations fonctionnelles, retenues chez le travailleur en lien avec sa lésion professionnelle, sont moindre, que celles qui avaient été établies à la suite d’une première lésion en 2002 de sorte qu’il est déterminé par la CSST que le travailleur est redevenu capable d’exercer son emploi prélésionnel, depuis le 22 février 2013, ce qui, dans les faits s’est avéré exact, le travailleur ayant repris son emploi à compter du 18 mars 2013.
[90] À l’analyse, le soussigné est donc d’avis, à la lumière des constats rapportés ci-dessus, que la maladie intercurrente subie par le travailleur le 25 avril 2012 n’a d’aucune façon altéré le cours de l’évolution de la lésion professionnelle du travailleur et brisé le « lien causal » entre les indemnités de remplacement du revenu versées au travailleur et sa lésion professionnelle, les indemnités demeurant « directement » en lien avec cette lésion professionnelle.
[91] Certes, l’arrivée de la maladie intercurrente a entraîné l’interruption du programme de réadaptation qui venait d’être reconduit pour deux semaines, de sorte que le travailleur n’a pu recevoir les « traitements » associés à ce programme.
[92] Toutefois, de l’avis du soussigné, l’employeur n’a pas établi en quoi ces traitements auraient changé quoi que ce soit à la condition du travailleur, eurent-ils été prodigués. Telle est en effet la conclusion que tire le soussigné du rapport du Dr Isler, produit le 18 septembre 2012, alors que le médecin indique bien, après avoir noté qu’après avoir reçu des traitements conservateurs et la période où est survenue l’interruption forcée du programme de réadaptation du travailleur, qu’au terme de cette interruption, le travailleur s’est alors dit peu ou pas symptomatique de son épaule. Le Dr Isler écrit en effet :
Une longue période d’évolution en traitement conservateur, il a eu un épisode de soins non reliés pour valvulopathie aortique qui a mérité environ trois mois d’invalidité. À la fin de cette période, le travailleur se dit peu ou pas symptomatique et capable de reprendre son travail, sans limitation, et l’examen objectif concorde.
[93] De plus, le Dr Isler a précisé ceci relativement à ce constat d’une amélioration de la condition du travailleur :
Il est utile dans ce cas particulier de souligner qu’il est bien connu que pour certains individus, le traitement conservateur d’une rupture massive de la coiffe des rotateurs peut donner une évolution très favorable comme nous le présente le travailleur ce jour.
[94] De l’avis du soussigné, l’employeur n’a pas établi en quoi l’arrêt du programme de réadaptation du travailleur, qui devait se prolonger de deux semaines, aurait amélioré la condition du travailleur.
[95] Toutefois, l’employeur n’a pas davantage démontré en quoi cette absence de traitement implique que la lésion à l’épaule du travailleur était, ou aurait dû être, consolidée plus tôt. À cet égard, le tribunal retient que le Dr Isler n’a pas fait de tel constat à son rapport du 18 septembre 2012, se limitant à constater justement que :
En l’absence d’une documentation d’une opinion par rapport à un plateau thérapeutique et une interruption des soins, je retiendrais la date du 5 septembre 2012, évaluation la plus récente du docteur Charles Desautels comme étant la date à partir de laquelle les soins et traitements ne sont plus nécessaires.
[96] De l’avis du soussigné, la position de l’employeur voulant que la maladie intercurrente subie par le travailleur ait prolongé la durée de consolidation de la lésion professionnelle ne repose que sur une pure hypothèse, ce qui apparaît nettement insuffisant.
[97] Par ailleurs, il est vrai que la maladie intercurrente du travailleur a également eu pour effet de faire reporter une échographie des épaules du travailleur, prévue en mai, mais réalisée en août 2012.
[98] Quoi qu’il en soit, le soussigné estime que ce seul report ne suffit pas à faire en sorte que les indemnités versées au travailleur durant sa maladie personnelle perdent leur lien direct avec la lésion professionnelle elle-même.
[99] Dans l’hypothèse où le travailleur avait subi l’échographie demandée par le Dr Desautels en mai 2012, plutôt qu’en août 2012, rien ne permet pour autant de conclure que le Dr Desautels aurait nécessairement pu établir plus tôt que la lésion du travailleur était consolidée. Et même si le médecin avait, par hypothèse, revu le travailleur, disons en juin 2012, pour conclure à la consolidation de la lésion à la lumière des résultats de l’échographie, ses conclusions auraient été les mêmes quant à la question des séquelles permanentes que le travailleur conserve.
[100] Or, une telle conclusion aurait en conséquence amené la même évaluation des séquelles permanentes, par le Dr Gauthier, puis l’émission de l’avis du Dr Lévesque se disant d’accord avec les conclusions du Dr Gauthier.
[101] Bref, l’échographie eût-elle été faite plus tôt que cela n’aurait rien changé quant à la suite du dossier.
[102] Or, dans un tel contexte, il est manifeste qu’au moment de la survenue de sa maladie intercurrente, le travailleur avait droit de toucher des indemnités de remplacement du revenu, du fait de sa lésion professionnelle non consolidée, tout comme par la suite, dans l’attente de l’évaluation de l’existence de séquelles permanentes en lien avec la lésion professionnelle, conformément aux prescriptions de la loi :
46. Le travailleur est présumé incapable d'exercer son emploi tant que la lésion professionnelle dont il a été victime n'est pas consolidée.
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1985, c. 6, a. 46.
47. Le travailleur dont la lésion professionnelle est consolidée a droit à l'indemnité de remplacement du revenu prévue par l'article 45 tant qu'il a besoin de réadaptation pour redevenir capable d'exercer son emploi ou, si cet objectif ne peut être atteint, pour devenir capable d'exercer à plein temps un emploi convenable.
__________
1985, c. 6, a. 47.
[103] De l’ensemble
de ces constats, le tribunal conclut que l’employeur n’a pas démontré que les
indemnités de remplacement du revenu versées au travailleur entre le 25 avril
2012 et le 29 août 2012, soit pendant la durée active de la maladie
intercurrente subie par le travailleur, n’étaient pas des « prestations dues
en raison de l’accident du travail » du travailleur, au sens de l’article
[104] Par
ailleurs, le soussigné tient à préciser qu’il aurait également rejeté la
requête de l’employeur s’il avait traité celle-ci sous l’angle de l’article
[105] En effet, le soussigné estime que dans la mesure où le travailleur avait droit de toucher ses indemnités de remplacement du revenu pendant la période où s’est manifestée une maladie intercurrente chez lui, sa lésion professionnelle n’étant pas consolidée et toujours sous investigation (l’échographie demandée), et, par la suite, dans l’attente de la détermination de séquelles permanentes, il ne peut être alors retenu, dans ce contexte, que l’employeur subissait une injustice du fait de l’imputation du coût de ces indemnités à son dossier.
[106] Pour l’ensemble de ces motifs, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que la requête de l’employeur doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la requête de Rénovations Ja-Car inc., l’employeur, déposée le 30 octobre 2013;
CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 30 septembre 2013 lors d’une révision administrative;
DÉCLARE que l’imputation au dossier de l’employeur du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle subie par le travailleur le 14 janvier 2011 demeure inchangée.
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Michel Watkins |
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Me Chantal Lavoie A.P.C.H.Q. - BOIVIN & ASSOCIÉS |
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Représentante de la partie requérante |
[1] L.R.Q. c. A-3.001
[2] Note du tribunal : tel qu’il appert des rapports médicaux du Dr Leduc du 15 mars et 12 avril 2011 ainsi que des rapports de physiothérapie/ergothérapie apparaissant au dossier.
[3] Note du tribunal : Bien que le Dr Leduc semble autoriser du travail léger pour le travailleur à cette période, il ne semble pas que le travailleur occupe un tel travail léger. Tel qu’il appert de la note du 5 mai 2011 de l’agente Dolbec de la CSST, il est rapporté que le travailleur est « en arrêt de travail ». De même, à sa note du 23 août 2011, l’agente Dolbec mentionne que l’employeur l’informe du fait que « la dernière fois que E a eu des contacts avec le T, s’était avant ses vacances ». De plus, il est noté que : Il n’y a pas d’ATT possible. Un RAT a bien été tenté et T faisait attention au début de la lésion, mais T se plaignait d’importantes douleurs nocturnes ».
[4] Rénovations Ja-Car inc. et Synnott et CSST, C.L.P. 446237-62B-1108, 24 janvier 2013, M. Watkins.
[5] Note du tribunal : il s’agit probablement d’une erreur de la part du radiologiste puisque dans ses « constatations », le radiologiste Tremblay rapporte une déchirure du sus-épineux qui mesure 7 mm X 12 mm, mais une déchirure du sous-épineux qui mesure 10 mm X 12 mm, et non 7 mm X 12 mm.
[6] Note du tribunal : tel qu’il appert du dossier, le travailleur avait en effet déjà subi une déchirure au niveau de son épaule droite en 2002, déchirure pour laquelle il avait subi une chirurgie.
[7] Voir les commentaires à la note 3, supra.
[8] Note du tribunal : tel qu’il appert du rapport du 9 février 2012 présenté à la CSST.
[9] Note du tribunal : tel qu’il appert de l’entente de service du 14 février 2012.
[10] Note du tribunal : tel qu’il appert de la note de l’agente Dolbec du 27 avril 2012.
[11] Note du tribunal : tel qu’il appert de la note de l’agente Dolbec du 7 mai 2012.
[12] Note du tribunal : tel qu’il appert des notes de l’agente St-Amand du 21 mars 2013 et des notes de l’agente Dorais-Beauregard du 25 mars 2013.
[13] Note du tribunal : tel qu’il appert de la note de l’agente St-Amand du 11 juin 2013.
[14] C.L.P.
[15] C.L.P.
[16] Note du
tribunal : paragraphes 57 à 73 de la décision. Voir également à ce propos
l’affaire Commission Scolaire des Samares,
[17] Voir
notamment : Hôpital
Laval et CSST, C.A.L.P. 76351-03A-9601, 10 octobre 1997,
B. Roy; Ballin inc., C.L.P.
[18] Groupe
Admari inc. et CSST, C.L.P.
[19] Supra note 16.
[20] Note du tribunal : ces deux éléments ne sont plus repris dans l’argumentaire soumis au tribunal.
[21] Note du tribunal : le tout, tel qu’il appert de la note de l’agente Lauzon du 25 juillet 2013.
[22] Note du tribunal : tel que l’a d’ailleurs suggéré la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Les Systèmes Erin ltée, supra note 18.
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