Décision

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 Hill c. Iperceptions inc.

2011 QCCS 2692

JM 1796

 
 COUR SUPÉRIEURE

 

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

DISTRICT DE

MONTRÉAL

 

 

 

N° :

500-17-046956-085

 

 

 

DATE :

 31 mai 2011

 

______________________________________________________________________

 

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

DANIÈLE MAYRAND, J.C.S.

 

______________________________________________________________________

 

 

 

 

 

PETER GORDON HILL

 

Demandeur

 

c.

 

IPERCEPTIONS INC.

 

Défenderesse

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

JUGEMENT

 

______________________________________________________________________

 

 

 

[1]           Peter Gordon Hill (« M. Hill »), réclame 125 800 $ pour les dommages qu'il allègue avoir subis à la suite de la résiliation « abusive » et « illégale » du contrat d'emploi (le « Contrat ») qui le liait à Iperceptions Inc. (« Iperceptions »).

[2]           Iperceptions plaide avoir assujetti le Contrat à une période d'essai de six mois et y avoir mis fin à l'expiration de ce délai au motif que M. Hill ne répondait pas aux attentes qu'elle pouvait légitimement exiger de lui.

les faits

Ø  La sollicitation de l'emploi par M. Hill

[3]           Le 18 février 2008, M. Hill s'enquiert par courriel auprès d’Iperceptions de la possibilité d'un emploi. Alors employé chez Crop Inc. (« Crop »), il vient de recevoir un sévère avertissement à savoir que s'il n'améliore pas sa performance d'ici trois (3) mois, son emploi sera en péril[1].

[4]           Après une sollicitation intensive[2] de sa part, il décroche finalement le poste de directeur recherche et développement chez Iperceptions.

Ø  Le contrat d'emploi

[5]           Bien que le Contrat que M. Hill signe avec Iperceptions ne soit pas daté, il y est prévu que l'emploi débute le 12 mai 2008. Sa rémunération annuelle est fixée à 109 000 $ et il bénéficie de trois (3) semaines de vacances. Le Contrat est par ailleurs assujetti à une période d'essai de six (6) mois.

[6]           Il convient d'en citer les extraits pertinents :

We are pleased to offer you full time employment with the Company in the position of Director of Product & Research Design, reporting directly to the VP Research and Development. The start date of your employment will be May 12th, 2008. - Pending confirmation from Peter based on current employment release.

It is understood by all parties involved, that there will be an in-depth performance and compensation review after your first six months of employment. Management will undertake to review your compensation package based on the results of your initial 6 month contributions, it will also serve as an initial probation period.

(Le Tribunal souligne)

[7]           Initialement, Iperceptions était à la recherche d'un vice-président et avait recruté pour ce poste un candidat qui, après avoir accepté son offre d'emploi, a finalement décidé de demeurer chez son employeur. M. Hill est donc le second choix d’Iperceptions. Comme certains commentaires formulés par les références données par M. Hill le décrivent comme étant « agressif » et « contrôlant »; ceci a rebuté Iperceptions de lui offrir un poste de vice-président.

[8]           C'est dans ce contexte que Jerry Tarasofsky (« M. Tarasofsky »), chef des opérations chez Iperceptions, embauche M. Hill. En raison de la nature du poste et du salaire qui est inférieur à 110 000 $, M. Tarasofsky n'a pas besoin de recevoir l'aval du conseil d'administration d'Iperceptions (« C.A. »).

Ø  La promotion au poste de directeur senior

[9]           Au mois de juillet 2008, vu sa situation financière personnelle difficile, M. Hill demande une augmentation de salaire à son supérieur immédiat, Duff Anderson (« M. Anderson »), vice-président recherche et développement. Étant empathique à sa situation, M. Anderson crée un poste de directeur senior recherche et développement aux fins de justifier une augmentation à 130 000 $, un salaire que M. Hill recevra à compter du 16 septembre 2008.

[10]        Dans les jours précédant la réunion du C.A. qui doit se tenir le 13 novembre 2008, M. Hill complète certains documents, dont la non-divulgation d'informations. Il prépare également un projet de communiqué de presse annonçant sa nomination au poste de vice-président pour le 13 novembre 2008.

[11]        M. Hill prétend donc avoir été promu au poste de vice-président recherche et développement au début du mois de novembre 2008, ce qui devait d'ailleurs être confirmé, selon lui, lors de la réunion du C.A.du 13 novembre 2008.

[12]        Non seulement M. Hill n'est pas promu, mais le Contrat est résilié le 12 novembre 2008, soit le dernier jour de la période d'essai prévue au Contrat.

Ø  La résiliation du contrat

[13]        Le 11 novembre 2008, lors d'une rencontre du groupe de gestion d’Iperceptions à laquelle participent notamment M. Tarasofsky et M. Stephen Berns (« M. Berns »)[3], des insultes s'échangent entre M. Hill et M. Anderson. Devant tous les membres du groupe de gestion, ce dernier subit les attaques personnelles de M. Hill voulant qu'il soit incompétent. « Remis à sa place », M. Hill quitte la réunion enragé et de manière intempestive.

[14]        Le lendemain, en fin d'après-midi, estimant qu'il ne peut satisfaire aux attentes d'Iperceptions, M. Tarasofsky et M. Berns convoquent M. Hill pour l'informer qu'ils mettent fin à son Contrat puisqu'ils sont d'avis qu'il n'a ni les qualités de leadership ni les capacités de diriger un groupe d'analystes dans un domaine qui de surcroit est en constante évolution. Ils lui reprochent également son inaptitude à interagir et d'échanger avec ses collègues. D'ailleurs, plusieurs employés clés ont menacé de quitter l'entreprise si M. Hill demeurait au sein de l'entreprise et était promu au poste de vice-président. Bref, M. Hill a perdu la confiance des membres du groupe de gestion et de la haute direction.


LES QUESTIONS EN LITIGE

v  Le Contrat a-t-il été remplacé par un nouveau contrat lorsque M. Hill a obtenu sa promotion au poste de directeur senior en septembre 2008 ? À défaut,

v  La terminaison de l'emploi est-elle survenue pendant la période d'essai ?

v  Dans l'affirmative, l'article 2092 C.c.Q. reçoit-il application ? Si tel est le cas,

v  Iperceptions a-t-elle résilié le Contrat pour des motifs sérieux ?

v  Y-a-t-il lieu d'accueillir la demande reconventionnelle ?

ANALYSE

v  Le Contrat a-t-il été remplacé par un nouveau contrat lorsque M. Hill a obtenu sa promotion au poste de directeur senior en septembre 2008 ?

[15]        La promotion du mois de septembre 2008 survient en raison du fait que M. Hill insiste avoir des besoins financiers immédiats. M. Anderson, qui est alors satisfait de son rendement technique après quelques deux (2) mois d'emploi, crée un nouveau poste Senior Director pour justifier une augmentation de salaire à 130 000 $ et contenter M. Hill.

[16]        Ces modifications au Contrat n'affectent en rien les autres termes, notamment le fait que M. Hill doive se rapporter à M. Anderson et que la période d'essai demeure en vigueur.

[17]        Ceci confirme la version livrée par M. Anderson que le Tribunal préfère à celle de M. Hill qui finalement n'a fourni aucune preuve à l'effet contraire. D'ailleurs, les parties n'ont signé aucun nouveau contrat.[4].

v  La terminaison de l'emploi est-elle survenue pendant la période d'essai ?

[18]        Bien que le Contrat ne soit daté, mais il a probablement été signé le 21 avril 2008, en même temps que l'entente de confidentialité[5]. Par ailleurs, les termes du Contrat sont clairs, l'emploi a commencé le 12 mai 2008 : « The start date of your employment will be May 12, 2008 ».

[19]        Comme la période d'essai se terminait le 12 novembre 2008, la fin de l'emploi est donc survenue au cours de cette période.

v  L'article 2092 C.c.Q. reçoit-il application ?

[20]        M. Hill plaide que le fait de s'assujettir à une période d'essai ne peut écarter le délai-congé prescrit par les articles 2091 et 2092 C.c.Q. qui se lisent comme suit :

art. 2091.  Chacune des parties à un contrat à durée indéterminée peut y mettre fin en donnant à l'autre un délai de congé.

Le délai de congé doit être raisonnable et tenir compte, notamment, de la nature de l'emploi, des circonstances particulières dans lesquelles il s'exerce et de la durée de la prestation de travail.

art. 2092  Le salarié ne peut renoncer au droit qu'il a d'obtenir une indemnité en réparation du préjudice qu'il subit, lorsque le délai de congé est insuffisant ou que la résiliation est faite de manière abusive.

[21]        Ici même si les parties ont convenu d'une période d'essai, elles n'ont pas décidé qu'à son terme leur relation contractuelle se poursuivrait sur la base d'un nouvel engagement. Il s'agit donc d'un contrat à durée indéterminée.

[22]        Iperceptions invoque pour sa part le jugement prononcé par le juge Yves Mayrand de notre Cour dans l'affaire Newman c. Stokes[6] et qui énonce que le délai-congé ne peut s'appliquer lorsqu'un employé a accepté d'être assujetti à une période d'essai. S'il met fin à l'emploi, l'employeur doit toutefois le faire de façon juste et équitable. Ce jugement n'est pas déterminant puisqu'il a été rendu avant l'entrée en vigueur de l'article 2092 C.c.Q..

[23]        Par ailleurs, la décision invoquée par M. Hill dans Merlitit c. Excel Cargo a été rendue après l'entrée en vigueur de l'article 2092 C.c.Q. n'est pas concluante sur la question. Il y est décidé qu'un employé ne peut renoncer à un délai-congé raisonnable, puisque l'article 2092 C.c.Q. est d'ordre public. Dans cette affaire, le contrat comportait une période d'essai; le juge Wery de notre Cour décidait que le congédiement étant survenu après la période d'essai, l'employeur ne pouvait mettre fin au contrat de travail sans préavis, à moins d'avoir un motif raisonnable.

[48]  Par conséquent, le congédiement étant survenu après l'expiration de la période de probation, Excel Cargo ne pouvait mettre fin au contrat de travail sans préavis à moins d'avoir un motif raisonnable[7].

[24]        Tout en s'abstenant de se prononcer sur l'effet d'un congédiement pendant la période d'essai, le juge Wery réfère à des auteurs qui auraient néanmoins appliqué l'article 2092 C.c.Q. dans une telle circonstance[8].

[25]        Voici les commentaires de ces auteurs sur le sujet :

L'article 2092 C.c.Q. empêche en effet le salarié de renoncer à son droit d'obtenir une indemnité en réparation du préjudice subi conséquemment à un délai de congé insuffisant ou à une résiliation abusive de son contrat de travail. Le cas échéant, une telle renonciation serait donc inopposable au salarié. Cette donnée affecte une pratique courante du milieu du travail, même selon les conventions collectives, soit celle de l'établissement d'une période d'essai pour le salarié au début de son emploi, période pendant laquelle l'employeur se réserve le droit de mettre fin à l'emploi en tout temps, sans préavis ni indemnité. L'impact concret de l'invalidation de ce type de période d'essai reste par ailleurs marginal, sauf contexte exceptionnel, en raison de la courte durée des services du salarié au moment de la terminaison de son emploi et de l'évaluation conséquente du délai de congé auquel il a droit[9].

(Le Tribunal souligne)

[26]        Bref, selon ces auteurs,  l'article 2092 C.c.Q. s'applique, mais sa portée est marginale dans la plupart des cas.

[27]        Dans l'affaire Duffield c. Alubec Industries Inc[10], l'employeur a mis fin au contrat d'emploi avant l'expiration de la période d'essai. Selon la juge Claudette Picard de notre Cour, la période d'essai prévue à un contrat à durée indéterminée n'exonère pas l'employeur de devoir donner un délai-congé en l'absence d'un motif sérieux de résiliation de l'emploi :

The representation of Mr. Goldman led him properly to believe that he would have long term employment with Alubec. There was an implied term of reasonable job security, a factor which is to be especially considered when the employee has been employed for a short duration before being dismissed.

            …

 

            The Court finds that the contract was for an indeterminate period with a six months probation. The term is indeterminate as there is no clear and precise expiration thereof. The probation period does not in itself permit an employer to terminate without notice. Employment on probation cannot be terminated unless termination is made in good faith and on proof of serious reason or on payment in lieu of notice

 

(Le Tribunal souligne)

[28]        La juge Picard octroie ainsi à l'employé une compensation qui correspond au délai à courir entre la fin de l'emploi et l'expiration de la période d'essai.

[29]        Le Tribunal abonde dans le même sens que les auteurs précités et fait sien le raisonnement de la juge Picard.

[30]        Un contrat d'emploi à durée indéterminée assorti d'une période de probation n'exclut pas l'application de l'article 2092 C.c.Q. qui est d'ordre public. Toutefois, l'appréciation des motifs sérieux de fin d'emploi et le délai-congé se font en prenant en considération cet élément particulier du contrat d'emploi à savoir que l'employé est à l'essai et la courte durée de celui-ci.

v  Iperceptions a-t-elle résilié le Contrat pour des motifs sérieux ?

[31]        L'article 2094 C.c.Q. est rédigé en ces termes :

art. 2094  Une partie peut, pour un motif sérieux, résilier unilatéralement et sans préavis le contrat de travail.

[32]        Il appartenait à Iperceptions de prouver qu'elle avait un motif sérieux de résilier le Contrat sans donner un délai-congé raisonnable à M. Hill.

·        L'objection

[33]        M. Hill a présenté une objection générale à toute preuve de Iperceptions voulant démontrer qu'il y aurait eu résiliation du Contrat pour un motif autre que celui de la « fin du contrat ».

[34]        Au soutien de cette objection, il invoque le relevé de fin d'emploi qui énonce comme motif « la fin du contrat »[11].

[35]        Avec égards, cette mention sur un document de cette nature n'empêche pas Iperceptions de prouver des motifs sérieux justifiant la fin du Contrat ou de l'emploi.

[36]        Il s'agit d'un document administratif qui n'est pas déterminant dans le contexte ou le contrat en cause est un contrat assorti d'une période d'essai. L'employeur pouvait légitimement considérer, en transmettant ce relevé, qu'il y avait « fin du contrat ». Dans la mesure où la question de savoir si le Contrat était à durée déterminée ou indéterminée a été résolue par le présent jugement, ceci ne peut empêcher Iperceptions de prouver les motifs sérieux pour lesquels elle a résilié ou mis fin au Contrat.

·        Le motif sérieux invoqué par Iperceptions pour résilier le Contrat

[37]        Iperceptions a établi qu'elle avait un motif sérieux de mettre fin à l'emploi de M. Hill parce qu'il ne pouvait accomplir les tâches auxquelles elle le destinait et pour lesquelles il avait été embauché.

[38]        Le témoignage que M. Hill a livré, au cours duquel il questionne sans arrêt les interventions de son procureur pendant son interrogatoire en chef, est le reflet de sa personnalité. Le Tribunal a été à même de constater à quel point M. Hill peut exercer de la pression sur son entourage, qu'il est incapable d'écoute et d'autocritique.

[39]        Ses prétentions voulant que sa promotion du mois de septembre 2008 et les démarches entreprises pour sa candidature au poste de vice-président démontrent la satisfaction d'Iperceptions à son endroit ne l'exonèrent pas de satisfaire à la période d'essai jusqu'à la fin de celle-ci.

[40]        La promotion d'août-septembre 2008 s'est réalisée dans un contexte où tout va bien et où la prestation de travail d'un point de vue technique est satisfaisante. Outre le fait que M. Hill a vécu une séparation difficile, il doit payer une pension alimentaire et a fait faillite quelques mois auparavant. C'est dans ce contexte qu'il demande à M. Duff d'augmenter son salaire.

[41]        Par ailleurs et contrairement à ce que prétend M. Hill, les démarches qui ont été effectuées en vue de la réunion du C.A. du 13 novembre 2008, notamment la préparation d'un communiqué de presse et la prise de sa photo, ne confirment en rien ni qu'il ait été nommé au début de novembre 2008 vice-président recherche et événements ni que le poste lui était assuré.

[42]        Les attentes de Iperceptions à son endroit, dont il avait pleinement connaissance puisqu'il en a rédigé les objectifs, comportent notamment celle de bâtir une équipe et d'en être le coach, ce qui de toute évidence s'est avéré être un échec. Il a plutôt réussi à créer une mini révolution au sein de l'entreprise.

[43]        Les premiers indices de la situation conflictuelle générée par M. Hill sont survenus trois (3) mois après son embauche, alors que M. Anderson doit faire une session de résolution de conflit entre M. Hill et Mme Claudia Amato (« Mme Amato ») qui est sous sa supervision. Cette dernière prétend en effet que M. Hill est agressif et contrôlant, alors que lui considère que Mme Amato ne respecte pas son autorité et que son travail laisse à désirer.

[44]        En septembre 2008, Tim Burgess (« M. Burgess »), qui est très apprécié chez Iperceptions, démissionne puisqu'il ne peut plus travailler avec M. Hill. La version de M. Hill voulant qu'il allait de toute façon congédier M. Burgess n'est pas retenue et est contredite par la preuve. Ce dernier n'avait en effet aucun pouvoir de congédier qui que ce soit dans l'entreprise.

[45]        Un mois plus tard, M. Anderson doit tenir une autre session de résolution de conflit, cette fois-ci entre M. Hill et M. Akop Boyadjian («M. Boyadjian ») qui est aussi un directeur. Cette démarche est très acrimonieuse et les problèmes ne se résoudront pas avec ce dernier. À l'aube de la réunion du C.A., M. Boyadjian prévient M. Anderson qu'il est prêt à quitter avec des membres de son équipe si M. Hill demeure au sein de l'entreprise.

[46]        Parallèlement, en octobre 2008, trois analystes rencontrent M. Tarasofsky pour lui faire part du fait qu'elles ont de la difficulté à travailler avec M. Hill qui est agressif et très contrôlant. M. Tarasofsky prévient alors M. Hill qu'il doit améliorer son comportement et lui remet une brochure à cet effet.

[47]        À la fin octobre 2008, M. Anderson questionne le comportement de M. Hill. Il écrit d'ailleurs un courriel à M. Tarasofsky à l'effet suivant[12] :

There are signs that Peter still needs to work on his judgment and exercising of authority, he acts very much based on where he thinks he will get accolades and who can give them to him, I feel that he will go easily become confrontation all the way through if he doesn't feel I have an impact on his political and financial success.

[48]        Il appert que M. Hill est une personne à caractère conflictuel, agressif et contrôlant qui vivait des problèmes difficiles à l'époque des événements. Il a vécu un divorce l'année précédente et fait faillite en septembre 2007[13]. Ainsi, il affirme être très fatigué au mois de septembre 2008, quand il remercie M. Anderson pour son augmentation salariale :

Thus, I forgot to thank you for your support on my salary increase… It went through last pay check… It's going to make a decent difference. Regardless of whether if we had these agreements about professional issues, I hope you know I'm on side with you and enjoy working with you… I'm just really tired right now and it seems to be getting worse and worse every day… I know it's just one of those periods… It will get better soon. (Peter)

(Le Tribunal souligne)

[49]        La rencontre tumultueuse du 12 novembre 2008 confirme la tendance. Il a insulté M. Anderson, son supérieur immédiat, le traitant d'incompétent en présence de toute l'équipe de gestion et de hauts dirigeants, (M. Berns et M. Tarasofsky), lui disant notamment qu'il ne sait pas ce qu'il fait. Il a « piqué » une colère et, enragé, a quitté la rencontre en disant qu'il ne pouvait travailler dans ce type d'environnement.

[50]        M. Anderson a perdu complète confiance en M. Hill. Reste M. Tarasofsky qui le matin, lors de la rencontre tumultueuse, fait les liens entre la démission de M. Burgess, les trois plaintes qu'il a reçues des analystes et les commentaires négatifs donnés par les références de M. Hill.

[51]        Tout de suite après la rencontre, M. Tarasofsky fait un suivi avec les trois analystes. Il apprend que l'une d'elles est déjà à la recherche d'un emploi et que la situation ne s'est pas améliorée avec les autres. Même son de cloche de la part de M. Boyadjian.

[52]        L'extrait suivant du témoignage de M. Tarasofsky[14] résume la situation conflictuelle que M. Hill a vécu et les raisons qui ont rendu la terminaison de son emploi inévitable :

So that was what happened then. I then had one of my senior executives on the team approach me that he no longer wanted to work with Mr. Hill, him and his whole department were very upset by Mr. Hill's actions with them. And they were very, very disturbed by it and they would be ready to leave the company if Mr. Hill stayed with the company. Another executive, a senior executive, in the company said to us... said to me... came to me and said that he no longer trusted Mr. Hill based on certain things that occurred with the job. I spoke to a couple of the people that had been working for Mr. Hill that had originally spoken to me, and they confirmed that they didn't feel that there was any change that had occurred since I had told them that I would speak to Mr. Hill, and that they felt that he was not . . . hadn't changed his behaviour, that they were actually out looking for jobs, they had already posted on the job market to look for jobs.

 

So I was faced with a very interesting situation. I'm trying to build a company, to me one of the most critical aspects is the team and the organization. And it's essential that I have a team in place that works together, that has loyalty, and here I had a case where subordinates of Mr. Hill were already out looking for jobs. I had two (2) senior executives who were very upset and didn't want to work with him, to the point of threatening. So I was faced with the decision of do I fire all these people and keep Mr. Hill, or do I fire Mr. Hill and keep the rest of the organization.

(Le Tribunal souligne)

[53]        Iperceptions était dès lors justifiée de considérer que M. Hill ne pouvait accomplir les tâches pour lesquelles il était destiné dont celle d'être un team leader, de développer une relation harmonieuse avec les employés qu'il supervisait, ses supérieurs et ceux avec lesquels il doit de interagir. Comme le souligne la Cour d'appel[15], un employé qui occupe un poste de direction doit voir à l'unité de son équipe d'employés et être un modèle pour ceux-ci.

[54]        Toutes les raisons pour mettre fin à son emploi lui ont été exposées lors de la rencontre qu'il a eue avec M. Tarasofsky et M. Berns, notamment la perte de confiance et son incapacité de travailler en harmonie avec ses employés et avec ceux avec lesquels il doit interagir.

v  Y-a-t-il lieu d'accueillir la demande reconventionnelle ?

[55]        Les agissements de M. Hill dans les heures qui ont suivi la terminaison de son emploi, notamment la divulgation d'informations à un compétiteur et l'envoi par courriel à un membre du comité consultatif qui dénonce les gestes de Iperceptions et dans lequel il profère des insultes à l'égard de M. Anderson et de Iperceptions[16] sont condamnables. Par contre, outre le fait d'être réconfortée dans sa décision, la demanderesse n'a pas démontré avoir subi des dommages qui en résultaient. Par ailleurs, un tel comportement ajouté à l'envoi d'un courriel d'intimidation[17] aux témoins cités par Iperceptions, justifient le Tribunal de n'octroyer aucun frais à M. Hill sur la défense reconventionnelle.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[56]        REJETTE la Requête introductive d'instance amendée ;

[57]        AVEC DÉPENS ;

[58]        REJETTE la Demande reconventionnelle ;

[59]        SANS FRAIS.

 

 

__________________________________

Danièle Mayrand, j.c.s.

 

Me François Beauvais

rochefort et associés

Procureur du demandeur

 

Me Nancy Boyle

bcf

Procureure de la défenderesse

 

Date d’audience :

13, 14 et 15 avril 2011

 



[1]     Pièce D-11. C'est lors de l'audition que cet élément a été introduit en preuve. Lors de son interrogatoire hors cour, M. Hill a en effet omis de mentionner cet élément et a plutôt dit : That I was doing very well at Crop., l'interrogatoire hors cour du 29 mai 2009, p. 14. Confronté à la lettre de Crop (D-11) et au témoignage de Mme Élyse Turmel, il a dû admettre par la suite qu'il avait sollicité Iperceptions parce que Crop n'était pas satisfaite de son rendement.

[2]     Pièce D-7

[3]     Chef de l'information et actionnaire important de Iperceptions

[4]     Pilon c. Corporation d'entretien préventive du Québec, AZ-00029030 , p. 9

[5]     Pièce D-3

[6]     Newman c. Stokes, AZ-93021303 (C.S.)

[7]     AZ-50120474

[8]     Précité, note 3, paragr. 49

[9]     Robert P. GAGNON, le droit du travail du Québec, 4e édition, Cowansville, les éditions Yvon Blais, p. 88.

[10]    AZ-98021529 , p. 6 et 7

[11]    Pièce P-1

[12]    Pièce D-8, courriel de M. Hill à M. Anderson du 16 septembre 2008

[13]    Il n'a pas dévoilé ce dernier élément à Iperceptions, lors de son embauche ni par la suite.

[14]    Interrogatoire hors cour de M. Tarasofsky, p. 51 et 52.

[15]    Sirois c. O'Neil, J.E. 99-1343 (C.A.), p. 18 et 26

[16]    Pièce D-4

[17]    Pièce D-12

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