Décision

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Moisan c

Moisan c. Standard Paper Box (SPB Canada inc.)

2006 QCCS 1107

J.B. 3588

 
COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

 

N° :

500-11-027299-060

 

DATE :

Le 3 mars 2006

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

JEAN-FRANÇOIS BUFFONI, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

Cal Moisan

Demandeur

c.

Standard Paper Box (SPB Canada Inc.)

et

9133-0050 Québec Inc.

et

Cal N. Moisan

et

André Moisan

Défendeurs

et

Norampac Inc.

Mise en cause

et

Paul Simard

et

Pierre Simard

Intervenants

 

______________________________________________________________________

 

Jugement sur deux requêtes en rejet d’action

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[1]                Le recours du demandeur est-il frivole ou manifestement mal fondé?

[2]                Dans sa requête introductive d’instance, le demandeur, actionnaire minoritaire des deux sociétés défenderesses, invoque diverses brimades dont il aurait été victime de la part de ces sociétés et des deux autres défendeurs et recherche en conséquence des ordonnances d’injonction provisoire, interlocutoire et permanente contre les défendeurs visant :

2.1.            la communication d’une copie d’un contrat de vente d’actifs;

2.2.            le rapatriement de certains meubles et des machineries;

2.3.            l’annulation d’un règlement de fusion;

2.4.            la vérification de l’état des lieux à six adresses.

[3]                Après avoir interrogé le demandeur en vertu de l’article 93 CPC, les défendeurs s’appuient sur l’article 75.1 CPC pour demander le rejet de son recours au motif qu’il serait frivole ou manifestement mal fondé.

[4]                Pour en décider, il convient de distinguer entre les quatre conclusions ci-dessus.

Communication d’une copie d’un contrat de vente d’actifs

[5]                Le demandeur invoque notamment que l’une des sociétés défenderesses a aliéné 95 % de ses actifs sans le prévenir ni le consulter et que, malgré ses demandes, les défendeurs refusent de lui remettre une copie du contrat d’aliénation.

[6]                Dans un recours en oppression parallèle, ce tribunal a, le 23 novembre 2005,  rendu contre les présents défendeurs une ordonnance de sauvegarde leur ordonnant de communiquer une copie de ce même contrat à d’autres actionnaires minoritaires des sociétés défenderesses.

[7]                Ce fait en soi n’est pas déterminant, chaque cas devant être jugé à son mérite.

[8]                Cela dit, l’interrogatoire du demandeur ne démontre pas la frivolité ou le mal-fondé de sa propre demande de communication.

Rapatriement de certains meubles et des machineries

[9]                Le demandeur allègue que le défendeur André Moisan se serait accaparé de tous les meubles meublants, effet mobiliers et machineries situés au siège social de la première défenderesse.

[10]            De l’interrogatoire du demandeur il ressort que cette allégation repose sur une information d’un employé qui lui aurait dit qu’un étage du siège social avait été vidé.

[11]            Selon les défendeurs, cette seule information ne justifie pas le demandeur de conclure per saltum qu’André Moisan se serait accaparé des biens.  Plusieurs autres hypothèses pourraient expliquer le déplacement des biens, à commencer par la vente légitime des actifs.

[12]            Autrement dit, le demandeur tirerait une conclusion hâtive, non supportée par la preuve.

[13]            Une telle situation n’est pas nouvelle.

[14]            Il arrive fréquemment qu’un justiciable ne connaisse pas tous les détails des faits générateurs qui constituent le fondement de son recours.  Par exemple, le patient qui était sous anesthésie au moment des faits a une connaissance personnelle fort limitée de la faute médicale dont il allègue avoir été victime.

[15]            Qu’à cela ne tienne, notre régime judiciaire pallie ce problème en permettant à ce justiciable de faire appel aux témoins des faits, aux témoins experts, aux présomptions légales et de fait, aux interrogatoires après défense, aux contre-interrogatoires et ainsi de suite, bref, à tout un arsenal qui, une fois la preuve close, permettra au juge du fond d’exercer son pouvoir souverain d’appréciation.

[16]            Et c’est au terme du procès que se posera la question de savoir si ce justiciable s’est déchargé ou non de son fardeau de preuve.

[17]            Une action n’est donc pas a priori frivole ou manifestement déraisonnable seulement parce que cette preuve complète n’est pas disponible au moment où le demandeur dépose sa requête introductive d’instance.

[18]            En l’espèce, l’interrogatoire du demandeur, à ce stade préliminaire des procédures, ne démontre pas que la demande est frivole ou manifestement mal fondée.

[19]            Bien sûr, tout défendeur a le droit de savoir ce qui lui est reproché.

[20]            Mais l’interrogatoire du demandeur, lu dans le contexte de la requête introductive d’instance, fournit suffisamment de détails pour permettre au défendeur André Moisan de savoir ce que le demandeur lui reproche.

Annulation d’un règlement de fusion

[21]            Le demandeur allègue avoir, le 16 novembre 2005, voté contre la fusion de la première société défenderesse avec une société inexistante.

[22]            Il demande en conséquence que le règlement adopté ce jour-là soit annulé.

[23]            L’interrogatoire du demandeur démontre qu’il se trompe sur un point crucial : le règlement qu’il attaque entérine un simple changement de dénomination sociale.

[24]            La fusion dont se plaint le demandeur a eu lieu en 1999, comme le rappelle le premier Attendu du règlement adopté le 16 novembre 2005.

[25]            C’est donc par pure méprise que le demandeur a compris que le vote de cette dernière date portait sur une fusion.

[26]            Sur ce point, sa demande est manifestement mal fondée.

Vérification de l’état des lieux à six adresses

[27]            Cette demande semble a priori tomber sous le coup de l’article 401 CPC qui prévoit que le tribunal, après le dépôt de la défense, peut ordonner l’accès à un élément matériel de preuve se rapportant au litige.

[28]            Il s’agit d’une mesure de communication de la preuve généralement ouverte aux justiciables, à certaines conditions.

[29]            L’interrogatoire du demandeur ne démontre que cette demande soit frivole ou manifestement mal fondée.

Conclusion

[30]            Les défendeurs ont démontré que l’une des quatre conclusions de la requête introductive d’instance remplit le critère de rejet prévu par l’article 75.1 CPC.

[31]            Cette conclusion de la requête introductive d’instance étant dissociable du reste de l’action, il y a lieu de la radier.[1]

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

[32]            FAIT DROIT pour partie aux deux requêtes en rejet du recours fondées sur l’article 75.1 du Code de procédure civile;

[33]            RADIE la conclusion 2c) de la requête introductive d’instance du 6 décembre 2005 visant à annuler le règlement 2005-1 quant à la fusion;

[34]            FRAIS à suivre le sort de la cause.

 

 

__________________________________

Jean-François Buffoni, j.c.s.

 

 

M. Cal Moisan

Pour lui-même

 

Me Pierre Fournier

Fournier Avocats

Pour Standard Paper Box (SPB Canada Inc.) et 9133-0050 Québec Inc.

 

Me Jacques Jeansonne

Deslauriers Jeansonne

Pour Cal N. Moisan et André Moisan

 

Me Lucien Bouchard

Davis, Ward & Associés

Mes Chantal Perreault et Karine Bourgeois

Paquette Gadler et associés

Pour Paul Simard et Pierre Simard

 

Date d’audience :

17 février 2006

 



[1] Oznaga c. Société d'exploitation des loteries et courses du Québec, [1981] 2 R.C.S. 113Saint-Martin c. Fédération des enseignants des écoles juives, REJB 2002-33284 (C.S.) et les autorités citées dans ce jugement.

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