Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Montréal

MONTRÉAL, le 15 février 2002

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIERS :

158701-71-0103

170323-71-0110

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Robert Langlois

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Pierre Gamache

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

France Morin

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DE L’ASSESSEUR :

Dr Albert Charbonneau

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

115090524

 

AUDIENCE TENUE LES :

15 novembre 2001

9 janvier 2002

 

 

 

 

 

PRIS EN DÉLIBÉRÉ :

 

 

17 janvier 2002

 

 

À :

Montréal

 

 

 

 

 

 

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GILLES MARTEL

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

Et

 

 

 

 

 

 

 

 

CONRAD JODOIN LTÉE

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DÉCISION

 

 

DOSSIER 158701-71-0103

[1]               Le 8 mars 2001, monsieur Gilles Martel (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision rendue le 28 février 2001 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) à la suite d’une révision administrative.

[2]               Par cette décision, la CSST maintient notamment une décision qu’elle a rendue le 21 juin 2000 et déclare que le travailleur n’a pas subi une récidive, rechute ou aggravation le 31 mars 2000.

DOSSIER 170323-71-0110

[3]               Le 11 octobre 2001, le travailleur dépose une nouvelle requête par laquelle il conteste une décision rendue par la CSST à la suite d’une révision administrative le 25 septembre 2001.

[4]               Par cette décision, la CSST maintient celles qu’elle a rendues les 8 février, 13 et 27 mars 2001.  Elle y déclare que le travailleur est capable d’exercer son emploi à compter du 9 février 2001, qu’il n’a pas subi une récidive, rechute ou aggravation le 14 février 2001 et refuse de le rembourser pour un transport ambulancier.

[5]               Le travailleur, son représentant et monsieur Conrad Jodoin de l’entreprise Conrad Jodoin ltée (l’employeur) assistent à l’audience tenue par la Commission des lésions professionnelles.

[6]               La présente affaire a été prise en délibéré le 17 janvier 2002, soit à la réception des notes de consultation médicale demandées par le soussigné lors de l’audience.

L'OBJET DU LITIGE

DOSSIER 158701-71-0103

[7]               Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que le 31 mars 2000, il a subi une récidive, rechute ou aggravation de la lésion professionnelle subie le 20 août 1998.

 

DOSSIER 170323-71-0110

[8]               Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déterminer que ses limitations fonctionnelles font en sorte qu’il était incapable de reprendre son emploi le 9 février 2001, qu’il a subi une récidive, rechute ou aggravation le 14 février 2001 et qu’il a droit au remboursement des frais reliés au transport ambulancier.

LES FAITS

DOSSIER 158701-71-0103

[9]               Le 20 août 1998, le travailleur occupe l’emploi de camionneur lorsqu’il fait une chute au moment de descendre de son camion et se heurte le dos contre un marchepied de métal.  Le lendemain, il consulte au Centre hospitalier de Verdun un médecin (nom illisible sur l’attestation médicale) qui pose le diagnostic d’entorse lombaire.

[10]           La CSST reconnaît la présence d’une lésion professionnelle et procède au versement de l’indemnité de remplacement du revenu.

[11]           Le 27 octobre 1998, une tomodensitométrie permet de mettre en lumière une « discopathie chronique étagée prédominante en L5-S1 associée à une petite hernie postéro-latérale gauche en L3-L4, postéro-latérale et foraminale droite en L4-L5 et postéro-médiane en L5-S1 ».  Par la suite, le docteur Michel Gauthier, médecin qui a charge du travailleur, retient les diagnostics de hernie discale L3-L4 gauche et de discopathie L3-L4, L4-L5 et L5-S1.

[12]           À la demande de la CSST, le 3 août 1999, le docteur Serge Bourdua, membre du Bureau d’évaluation médicale, examine le travailleur et conclut au diagnostic d’entorse lombaire sur une condition personnelle préexistante de discopathie multi-étagée.  Le docteur Bourdua consolide cette lésion à la date du 23 juin 1999 sans aucun traitement nécessaire au-delà de cette date.  Il émet une atteinte permanente de 2 % (entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées avec ou sans changement radiologique) et les limitations fonctionnelles suivantes :

-        éviter de soulever, porter, pousser ou tirer des charges de plus de 25 kilogrammes ;

-        éviter d’effectuer des mouvements avec des amplitudes extrêmes de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire ;

-        éviter de subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale.

 

 

[13]           Dans une décision rendue le 20 octobre 2000[1], la Commission des lésions professionnelles maintient la décision de la CSST qui reprenait les conclusions du membre du Bureau d’évaluation médicale.

[14]           Le dossier comprend une attestation médicale signée par le docteur Gauthier le 24 janvier 2000 et qui parle d’une symptomatologie persistante.

[15]           Lors de l’audience, le travailleur explique qu’en mars 2000, il recevait des traitements d’ergothérapie qui lui avaient été prescrits par l’agent de la CSST en vue d’une évaluation de sa capacité de travail.  Le vendredi 31 mars 2000, l’ergothérapeute tente une nouvelle manipulation : le travailleur doit se coucher sur un ballon tandis que l’ostéopathe exerce une pression à la région lombaire.  Le travailleur ressent alors une douleur lombaire instantanée qui l’oblige à demeurer coucher durant une grande partie de la fin de semaine qui suit.  Le 3 avril 2000, il est de retour à ses traitements.  L’ergothérapeute qui lui prodiguait des soins est en vacances.  Sa remplaçante désire effectuer la manipulation du 31 mars.  Le travailleur lui fait part des douleurs qu’il a ressenties.  Elle décide malgré tout d’effectuer la manipulation.  Le travailleur témoigne alors qu’il a ressenti une grande douleur lombaire.

[16]           Les notes de l’ergothérapeute précisent ce qui suit :

« Il est à noter que monsieur a failli faire une chute pendant la fin de semaine du 25 mars 2000 et il s’est plaint d’une augmentation de douleur à partir de ce moment.  Le programme a donc été allégé et monsieur ne faisait, par la suite, que des demies journées.  Il avait fait des progrès significatifs avant cet incident et avait même rapporté une diminution de la douleur. »

 

 

[17]           Commentant ces notes, le travailleur souligne plutôt qu’en marchant sur la glace, il a fait « un pas de travers » et a ressenti une petite douleur au dos.  L’augmentation de la douleur n’était cependant pas suffisante pour consulter un médecin.

[18]           Les notes évolutives de la CSST font état d’une conversation téléphonique tenue le 19 mai 2000 entre l’ergothérapeute et l’agent de la CSST.  Il y est inscrit que lors de la manipulation du 3 avril 2000, le travailleur ne s’est jamais plaint de quoi que ce soit et qu’il demandait à l’ergothérapeute de presser plus fort.  Enfin, elle précise que le travailleur lui-même a mentionné avoir fait une chute une semaine auparavant.

[19]           Le 4 avril 2000, le travailleur est examiné par le docteur Thimoty Heron qui pose le diagnostic d’entorse lombaire et d’augmentation de la lombalgie (discopathie) depuis une semaine.  Pour sa part, le 12 avril 2000, le docteur Michel Martel parle d’une maladie discale lombaire.

DOSSIER 170323-71-0110

[20]           Le 8 février 2001, la CSST détermine que le travailleur est capable d’exercer son emploi à compter du 9 février 2001.  Les notes évolutives de la CSST nous apprennent qu’avant de prendre cette décision, l’agent de la CSST a consulté le document « IRSST - Programme sécurité-ergonomie, procédure d’interprétation professionnelle à l’usage du conseiller en réadaptation ».  Il y mentionne que les « vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale doivent être provoqués par du matériel roulant sans suspension par exemple ».  Il explique aussi que le siège sur lequel le travailleur prend place est à positionnement électrique, est muni d’une suspension à air et que toutes les roues du tracteur conduit par le travailleur sont pourvues de systèmes de suspension à air.  Il estime alors que la dernière limitation fonctionnelle émise par le docteur Bourdua est respectée.

[21]           Par ailleurs, le travailleur explique à l’agent qu’il sera incapable d’enlever la barre pour déplacer le bogie et que les « dolley » sont souvent difficiles à lever lorsqu’ils sont trop bas.  Dans ces deux cas, l’agent de la CSST lui répond qu’il n’effectue que rarement ces manipulations et que, s’il doit les effectuer, il pourra demander de l’aide.

[22]           Durant l’audience, le travailleur explique qu’à une date non définie en février 2001, l’agent de la CSST lui a donné rendez-vous chez l’employeur afin d’évaluer sa capacité de travail.  Lors de cette rencontre, l’agent aurait demandé au travailleur de prendre place à bord d’un camion vide et de le conduire.  Le travailleur a aussi procédé à l’arrimage d’une remorque et aurait mentionné à l’agent qu'il éprouvait de la difficulté à effectuer cette opération.  Ce dernier aurait alors insisté pour que le travailleur procède à cette opération.

[23]           Témoignant lors de l’audience, monsieur Conrad Jodoin, employeur, explique qu’il a assisté à la rencontre entre le travailleur et l’agent de la CSST en février 2001.  Il précise que c’est plutôt le travailleur lui-même qui a insisté pour conduire le camion.  Il affirme qu’à l’issue de cette rencontre, le travailleur semblait heureux de reprendre son emploi et n’a pas précisé qu’il ressentait de la douleur.

[24]           Par ailleurs, le 13 février 2001, le travailleur reprend son travail et conduit un camion jusqu'à Kingston (Ontario).  Il mentionne que la conduite du camion a été la cause d’une augmentation de la douleur dorsale ainsi que d’un engourdissement à la jambe gauche.  Durant le trajet du retour, il a été dans l’obligation de procéder à trois arrêts pour se reposer.

[25]           Le lendemain, le travailleur doit conduire à nouveau un camion.  Il emprunte le pont-tunnel Louis-H.-Lafontaine qui est congestionné.  Il précise qu’il a été dans l’obligation de manipuler fréquemment la pédale d’embrayage.  Sa jambe gauche est de plus en plus engourdie et ses douleurs lombaires sont intenses.  Une fois le pont-tunnel traversé, il s’arrête sur le bord de la route, estimant que la conduite du camion est dangereuse puisqu’il peut difficilement bouger sa jambe gauche.  En se levant, il constate qu’il est incapable de marcher et fait appel à une ambulance qui le transporte au Centre hospitalier Angrignon.  Il y rencontre le docteur Daniel Émond qui pose le diagnostic de rechute de lombalgie chronique.  Le 22 février 2001, le docteur Gauthier parlera d’une récidive, rechute ou aggravation de la hernie discale L3-L4 gauche.  Ce diagnostic sera retenu lors de visites médicales faites les 22 et 28 mars 2001 auprès des docteurs Michel Gauthier et Atieh Samini.

[26]           L’employeur témoigne qu’à son retour de Kingston, le 13 février 2001, le travailleur ne lui a pas fait part des douleurs qu’il décrit lors de l’audience.  Il en est de même lorsque le lendemain, il se présente au travail.  C’est pour ce motif qu’il a été surpris d’apprendre que l’intensité des douleurs a obligé le travailleur à faire appel à une ambulance.

[27]           Ce sont les décisions de la CSST à l’effet de refuser de reconnaître que le travailleur a subi une récidive, rechute ou aggravation le 14 février 2001 et de refuser de le rembourser pour le coût du transport ambulancier qui font partie du présent litige.

L'AVIS DES MEMBRES

DOSSIER 158701-71-0103

[28]           La membre issue des associations syndicales émet l’opinion que l’augmentation des douleurs constatée à compter du 4 avril 2000 est causée par les soins d’ergothérapie du 31 mars 2000.  Elle estime alors que cet événement est en relation avec la lésion professionnelle initiale et que le travailleur a subi une récidive, rechute ou aggravation le 31 mars 2000.

[29]           Le membre issu des associations d’employeurs estime que la preuve présentée par le travailleur, afin d’expliquer l’augmentation des douleurs constatées à compter du 4 avril 2000, a été contredite par les éléments inclus au dossier.  Ainsi, l’augmentation des douleurs serait causée par une chute effectuée à son domicile.  Par ailleurs, rien n’indique que le travailleur était souffrant à la suite de la manipulation du 31 mars 2000.  Il n’a donc pas subi une récidive, rechute ou aggravation à cette date.

 

DOSSIER 170323-71-0110

[30]           Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs estiment que les limitations fonctionnelles émises par le docteur Bourdua du Bureau d’évaluation médicale et confirmées par la Commission des lésions professionnelles ne permettent pas au travailleur de réintégrer le poste de camionneur qu’il occupait au moment où il a subi sa lésion professionnelle initiale.

[31]           Enfin, ils estiment que le diagnostic de récidive de hernie discale tel qu’il est posé par les médecins à la suite de l’événement du 14 février 2001 ne peut être en relation avec celui d’entorse lombaire sur discopathie préexistante multi-étagée retenue lors de l’événement d’origine.  Le travailleur n’a donc pas subi une récidive, rechute ou aggravation à cette date.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

DOSSIER 158701-71-0103

[32]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a subi une récidive, rechute ou aggravation le 31 mars 2000 lors des soins qui lui ont été prescrits dans le cadre du plan individualisé de réadaptation.

[33]           La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[2](la loi) précise ce qui suit :

31. Est considérée une lésion professionnelle, une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion :

 

1°  des soins qu'un travailleur reçoit pour une lésion professionnelle ou de l'omission de tels soins;

2°  d'une activité prescrite au travailleur dans le cadre des traitements médicaux qu'il reçoit pour une lésion professionnelle ou dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation.

 

Cependant, le premier alinéa ne s'applique pas si la blessure ou la maladie donne lieu à une indemnisation en vertu de la Loi sur l'assurance automobile (chapitre A - 25), de la Loi visant à favoriser le civisme (chapitre C‑20) ou de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels (chapitre I‑6).

________

1985, c. 6, a. 31.

 

 

[34]           La jurisprudence[3] a établi qu’il faut une preuve prépondérante que la récidive, rechute ou aggravation est reliée à l’événement d’origine et cette relation ne peut être présumée.  De plus, le seul témoignage du travailleur est insuffisant pour l’établir et une preuve médicale est nécessaire.  Certains paramètres permettent de déterminer l’existence d’une telle relation, soit :

         la gravité de la lésion initiale ;

         la continuité de la symptomatologie ;

         l’existence ou non d’un suivi médical ;

         le retour au travail, avec ou sans limitation fonctionnelle ;

         la présence ou l’absence d’une atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique ;

         la présence ou l’absence de condition personnelle ;

         la compatibilité de la symptomatologie alléguée au moment de la récidive, rechute ou aggravation avec la nature de la lésion initiale ;

         le délai entre la récidive, rechute ou aggravation et la lésion initiale.

 

 

[35]           Aucun de ces paramètres n’est à lui seul décisif mais, pris ensemble, ils peuvent permettre de décider du bien-fondé d’une réclamation.

[36]           De la preuve qui lui a été présentée, la Commission des lésions professionnelles retient que vers le 25 mars 2000, le travailleur a failli faire une chute sur la glace alors qu’il est à son domicile.  Bien que durant l’audience il mentionne que cette chute ne lui a occasionné qu’une faible augmentation de ses douleurs, les notes de l’ergothérapeute qui le soigne précisent qu’à compter de ce moment, il s’est plaint d’une augmentation de ses douleurs et que le programme des traitements a été modifié.

[37]           La Commission des lésions professionnelles estime que si le travailleur s’est plaint d’une augmentation des douleurs à l’ergothérapeute qui lui prodigue des soins et qu’on a changé le programme des traitements, c’est parce que les douleurs étaient plus intenses qu’il ne le laisse croire.

[38]           Par ailleurs, le travailleur allègue que c’est une manipulation faite par son ergothérapeute, et reprise quelques jours plus tard par l’ergothérapeute suppléante, qui serait à l’origine de l’augmentation de ses douleurs.  Or, les explications de l’ergothérapeute suppléante, telles qu’elles sont relatées par l’agent de la CSST, sont à l’effet que le travailleur ne s’est pas plaint de douleurs lors de cette manipulation et qu’il lui demandait de peser plus fort.

[39]           Le témoignage du travailleur a donc été contredit sous ces aspects. 

[40]           Par ailleurs, bien que le 4 avril 2000, le docteur Heron pose le diagnostic d’entorse lombaire et d’augmentation de la lombalgie causée par la discopathie, le docteur Martel, médecin qui a charge du travailleur, parlera d’une maladie discale lombaire.

[41]           En argumentation, le représentant du travailleur explique que le Bureau d’évaluation médicale a établi que la discopathie est reliée à l’événement initial.  Il estime que la symptomatologie associée à cette condition est acquise et due à cet événement.  Il en déduit alors que la maladie discale lombaire soulignée par le docteur Martel est reliée à cet événement.

[42]           Le présent tribunal n’est pas du même avis.  Rappelons que le docteur Bourdua du Bureau d'évaluation médicale devait trancher entre le diagnostic de hernie discale et celui d’entorse lombaire.  Il opine vers un diagnostic d’entorse lombaire greffée sur une discopathie préexistante multi-étagée plutôt que de retenir celui de hernie discale.  Il en est de même de l’atteinte permanente qui réfère à une entorse lombaire et non à une hernie discale.

[43]           De plus, dans la décision du 20 octobre 2000, la commissaire Vaillancourt tranche du diagnostic de hernie de la manière suivante :

« La preuve médicale prépondérante est à l’effet qu’il y a peu de signes cliniques compatibles et constants quant au diagnostic de hernie discale L3-L4. »

 

 

[44]           C’est donc dire que, malgré la discopathie préexistante, le diagnostic de hernie discale n’a pas été retenu par le membre du Bureau d'évaluation médicale et par la Commission des lésions professionnelles.  À cause de cette dissimilitude des diagnostics, le présent tribunal ne peut conclure que le diagnostic de maladie discale lombaire retenu par le docteur Martel est relié à l’événement d’origine.  Le travailleur n’a donc pas subi, le 31 mars 2000, une récidive, rechute ou aggravation de la lésion professionnelle du 20 août 1998.

DOSSIER 170323-71-0110

[45]           La Commission des lésions professionnelles doit maintenant déterminer si les limitations fonctionnelles retenues par le docteur Bourdua du Bureau d’évaluation médicale empêchent le travailleur d’exercer son emploi de camionneur.

[46]           Parmi ces limitations fonctionnelles, la Commission des lésions professionnelles note plus particulièrement celle où le travailleur devra éviter de subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale.

[47]           Lorsque l’agent de la CSST conclut que cette limitation fonctionnelle est respectée, il réfère à un document émanant de l’IRSST qui précise que ces vibrations doivent être « …provoquées par du matériel roulant sans suspension, par exemple ».  L’agent constate que le matériel roulant opéré par le travailleur est muni de suspension et, retenant le critère mentionné par l’IRSST, conclut que la limitation fonctionnelle est respectée lorsque le travailleur effectue son travail.

[48]           Pour sa part, la Commission des lésions professionnelles estime que même en présence d’un système de suspension, la preuve n’a pas été faite que le travailleur, lorsqu’il conduit son camion, n’est pas exposé à des vibrations de basse fréquence et de contrecoups à la colonne vertébrale : on n’a procédé à aucune mesure des vibrations et on n’a effectué aucune évaluation des contrecoups auxquels le travailleur pourrait être exposé lors de la conduite des camions.

[49]           Par ailleurs, lorsque le travailleur mentionne à l’agent qu’il ne sera pas capable de déplacer le bogie et que les « dolley » sont souvent difficiles à lever, celui-ci lui répond qu’il effectue rarement ces opérations et qu’il pourra demander de l’aide.  Le présent tribunal ne peut se satisfaire de ces réponses et estime que, dans le cas où aucune aide n’est disponible, le travailleur s’expose à des dangers, compte tenu de la limitation fonctionnelle qui exige qu’il ne puisse soulever, porter, pousser ou tirer des charges de plus de 25 kilogrammes.

[50]           La Commission des lésions professionnelles estime que la décision de la CSST, qui veut que le travailleur soit capable d’exercer son emploi de camionneur, doit être infirmée.

[51]           La Commission des lésions professionnelles doit maintenant déterminer si le travailleur a subi une récidive, rechute ou aggravation le 14 février 2001 et s’il a droit au remboursement des frais reliés au transport ambulancier.

[52]           Malgré le diagnostic de rechute de lombalgie chronique retenu par le docteur Émond le 14 février 2001 alors qu’il examine le travailleur à l’urgence du Centre hospitalier Angrignon, le docteur Gauthier, médecin qui a charge du travailleur, pose le diagnostic de hernie discale L3-L4 gauche.  C’est ce diagnostic qui sera par la suite retenu de manière prépondérante.  Or, pour les mêmes motifs qu’exprimés précédemment, on ne peut relier le diagnostic de hernie à celui d’entorse lombaire greffée sur une discopathie préexistante multi-étagée tel qu’il a été retenu lors de la lésion initiale.

[53]           Le travailleur n’a donc pas subi une récidive, rechute ou aggravation le 14 février 2001.

[54]           Enfin, en l’absence de tout nouvel événement traumatique à l’origine de ses malaises, le travailleur ne peut avoir subi une nouvelle lésion professionnelle.

[55]           En l’absence de lésion professionnelle, il n’a pas droit au remboursement pour les frais de transport ambulancier qui a eu lieu le 14 février 2001.

 

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

DOSSIER 158701-71-0103

REJETTE la requête faite par le travailleur, monsieur Gilles Martel le 8 mars 2001 ;

MAINTIENT la décision rendue le 28 février 2001 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative ;

DÉCLARE que monsieur Martel n’a pas subi, le 31 mars 2000, une récidive, rechute ou aggravation de la lésion professionnelle du 20 août 1998.

 

DOSSIER 170323-71-0110

ACCUEILLE EN PARTIE la requête formulée le 11 octobre 2001 par monsieur Martel ;

MODIFIE la décision rendue le 25 septembre 2001 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative ;

DÉCLARE que monsieur Martel est incapable d’exercer son emploi de camionneur ;

DÉCLARE que monsieur Martel n’a pas subi, le 14 février 2001, une récidive, rechute ou aggravation de la lésion professionnelle du 20 août 1998 ;

DÉCLARE que monsieur Martel n’a pas droit au remboursement des frais encourus par le transport ambulancier du 14 février 2001.

 

 

 

 

Robert Langlois

 

Commissaire

 

 

LAPORTE & LAVALLÉE

(Me André Laporte)

 

Procureur de la partie requérante

 



[1]          Gilles Martel et Conrad Jodoin, 130093-71-0001, 2000-10-20, A. Vaillancourt.

[2]          L.R.Q., c. A-3.001.

[3]          Boisvert  et Halco inc. [1995] C.A.L.P. 19 ; Poirier et C.S.S.T., 65997-09-9501, 95-10-27, M. Renaud.

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