Décision

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Guilbault c. Motos illimitées inc.

2018 QCCQ 7316

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA                                                                       

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

JOLIETTE

LOCALITÉ DE

JOLIETTE

« Chambre civile »

N° :

705-32-015819-177

 

 

 

DATE :

25 septembre 2018

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

YVAN NOLET, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

SABRINA GUILBAULT

c.

MOTOS ILLIMITÉES INC.

Partie défenderesse

 

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]           Sabrina Guilbault réclame 15 000 $ à Motos Illimitées Inc. (« Motos Illimitées ») à la suite de vices cachés au véhicule tout terrain usagé de marque Polaris RZR XP 900 2011 (« VTT ») acheté de la défenderesse. Cette somme comprend le remboursement du montant d’une assurance, le remboursement du coût de réparations et divers dommages.

[2]           Concernant le remboursement du coût de l’assurance pour la garantie de réparation, madame Guilbault allègue avoir été induite en erreur par le représentant de la défenderesse concernant cette garantie.

[3]           Pour sa part, Motos Illimitées plaide que les problèmes soulevés par la demanderesse ne constituent pas des vices cachés, mais résulte d’une utilisation abusive du VTT. Concernant l’assurance réparation, le représentant de Motos Illimitées soutient qu’aucune fausse représentation n’a été effectuée à la demanderesse.

CONTEXTE

[4]           Début avril 2016, madame Guilbault achète pour un prix de 10 800 $ le VTT de Motos Illimitées. Le vendeur lui mentionne que s’agissant d’un modèle 2011, celui-ci ne bénéficie d’aucune garantie de fonctionnement et lui propose alors d’acquérir une garantie supplémentaire d’un montant de 2 635 $. Le prix total d’acquisition du VTT incluant l’assurance, les accessoires et les taxes est de 15 935,53 $.

[5]           À sa première sortie avec le VTT en mai 2016, elle l’utilise dans les sentiers fédérés et remarque un problème dans la direction qui n’est pas stable. Elle rebrousse chemin afin que Motos Illimitées puisse vérifier le VTT et indique que sa première sortie dure environ une heure.

[6]           Une fois transporté chez Motos Illimitées, le VTT est examiné et le technicien identifie que la barre de torsion est brisée. Le bon de travail indique également que différentes pièces de la direction doivent être examinées. Motos Illimitées effectue les réparations et communique avec madame Guilbault un mois plus tard afin qu’elle récupère le VTT.

[7]           Lorsqu’elle se présente au commerce le 15 juin 2016, l’employé de Motos Illimitées l’informe qu’elle doit débourser 700 $ du montant de la facture qui totalise 1 551,97 $. Madame Guilbault conteste devoir payer ce montant, mais après négociation, elle accepte de payer une somme de 300 $.

[8]           Lorsqu’elle réutilise le VTT avant la fin du mois de juin, elle est accompagnée d’amis dont l’un est mécanicien. Elle circule dans les sentiers fédérés et se dirige vers St-Donat. Alors qu’elle est dans une montée, elle note que le VTT perd de la puissance et finalement, le moteur s’arrête. Le mécanicien qui l’accompagne tente de le faire repartir et entend un bruit inhabituel.

[9]           Il informe immédiatement madame Guilbault qu’il y a un problème sérieux avec le moteur du VTT qui doit être réparé. Il est transporté à nouveau chez Motos Illimitées et madame Guilbault comprend mal qu’alors qu’elle a circulé moins de 500 kilomètres avec celui-ci depuis l’achat, il se soit brisé à deux occasions.

[10]        Motos Illimitées communique avec madame Guilbault au mois d’août afin qu’elle récupère le VTT. Une fois sur place, on lui mentionne que le coût des réparations totalise 7 779,04 $. On l’informe également que la limite à sa garantie additionnelle est de 5 000 $ de telle sorte que Motos Illimitées lui réclame 2 700 $ pour les réparations.

[11]        Madame Guilbault n’est pas d’accord pour payer cette somme, mais en bout de ligne, elle souhaite récupérer le VTT et finit par payer la somme demandée.

[12]        Le 14 septembre 2016, ses procureurs informent Motos Illimitées que le VTT vendu était affecté de vices cachés. Cette mise en demeure précise « qu’il est anormal qu’après environ 10 heures d’utilisation normale du véhicule ce dernier doive faire l’objet de réparation pour l’équivalent de 9 500,00  $ alors que le prix de vente, avant taxes, du véhicule était de 10 800 $ ».

[13]        En conclusion, la mise en demeure réclame à Motos Illimitées le remboursement des frais de réparation et de la garantie supplémentaire. Sans réponse de Motos Illimitées, elle transmet en mars 2017 une nouvelle mise en demeure à Motos Illimitées et lui réclame également un montant en dommages pour ses troubles et dommages et la perte d’utilisation du VTT.

[14]        Pour sa part, Motos Illimitées confirme avoir respecté les dispositions de la garantie additionnelle et fait valoir que les bris du VTT découle d’une utilisation abusive de celui-ci. Dans les circonstances, elle demande le rejet de la demande de madame Guilbault.

ANALYSE ET MOTIFS  

[15]        Lors de l'analyse des prétentions des parties, le Tribunal doit tenir compte des règles de preuve contenues au Code civil du Québec (« C.c.Q.»).

[16]        L'article 2803 C.c.Q. indique que « Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention. […] ». Ainsi, il revient à madame Guilbault de prouver que le VTT était affecté de vices cachés et que son représentant l’a induite en erreur concernant la signature de la garantie additionnelle.

[17]        L'article 2804 C.c.Q. précise une règle importante qui doit guider le Tribunal dans l'analyse de la preuve présentée par les parties. Cet article précise :

« La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante. »

[18]        Cet article consacre le principe à l'effet que dans un procès civil, la prépondérance d'une preuve concernant un fait est suffisante afin de prouver l'existence de ce fait.

[19]        Le contrat de vente intervenu entre madame Guilbault et Autos Illimitées constitue un contrat régi par la Loi sur la protection du consommateur (« LPC »).

[20]        Bien qu’il était vrai que madame Guilbault ne bénéficiait d’aucune garantie de bon fonctionnement lors de l’achat du VTT, elle bénéficiait tout de même des recours prévus aux articles 37 et 38 de la LPC qui traitent de la garantie de qualité d'un bien en regard à sa durabilité. Enfin, elle bénéficie également de la garantie de qualité prévue à l'article 1726 C.c.Q.

[21]        Il y a lieu de reproduire ci-après les articles 37 et 38 de la LPC :  

37. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné.

38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.

[22]       Cette durabilité du bien doit permettre au consommateur d'utiliser le bien acheté pour l'usage auquel il le destine. De plus, le consommateur doit bénéficier d'un usage normal de ce bien pendant une durée raisonnable en regard au prix payé pour celui-ci. Or, une utilisation de moins d’une dizaine d’heures pour un véhicule de cette nature ne constitue pas une durée d’utilisation raisonnable pour le prix payé de plus de 10 000 $.

[23]       Le VTT acquis par madame Guilbault est un véhicule destiné à une conduite sportive sur des terrains hors route. Il est ainsi normal que madame Guilbault l’ait utilisé sur les sentiers fédérés et malgré les prétentions du représentant de la défenderesse, la preuve n’a démontré aucune utilisation abusive du VTT.

[24]       Les problèmes de direction du VTT et du moteur constituaient de plus, de par leur nature, des problèmes difficilement détectables par la demanderesse lors de l’acquisition.

[25]       Considérant que Motos Illimitées est un vendeur professionnel de véhicules tout terrain, madame Guilbault bénéficie également de la présomption de l’article 1729 du C.c.Q. Cet article précise qu’un vendeur professionnel est présumé connaitre les vices affectant le bien lorsque le mauvais fonctionnement survient prématurément par rapport à des biens identiques. De plus, vu l’article 53 de la LPC, Motos Illimitées ne pouvait alléguer qu’elle ignorait les vices cachés.

[26]       Ainsi, vu les dispositions précitées, Motos illimitées devra rembourser à madame Guilbault la somme de 3 000 $ qu’elle a dû payer pour réparer le VTT alors que les problèmes de celui-ci étaient le résultat de vices cachés.

[27]       D’autre part, concernant l’assurance additionnelle, la preuve prépondérante est à l’effet que des représentations erronées lui ont été faites concernant cette garantie dont le fait qu’elle n’avait droit à aucune garantie. D’autre part, bien que Motos Illimitées ait accepté d’honorer le contrat de garantie jusqu’à hauteur de 5 000 $, le contrat d’assurance additionnelle prévoyait une limitation à 3 000 $ pour un VTT usagé.

[28]       Considérant que madame Guilbault a dû payer une somme de 3 029,59 $ pour une telle assurance que le contrat limitait à un montant de 3 000 $, il y a de considérer qu’elle a été induite en erreur lors de la conclusion de ce contrat qui sera, comme le permet l’article 272 de la LPC, résolu. Ainsi, Motos Illimitées devra également lui rembourser la somme de 3 029,59 $.

[29]       Enfin, concernant les troubles et inconvénients subis par madame Guilbault, dont la perte d’utilisation de son VTT de plus de deux mois pendant les cinq premiers mois de son acquisition, le Tribunal arbitre le montant de ses dommages à 1 000 $.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[30]        ACCUEILLE en partie la demande;

[31]        CONDAMNE Motos Illimitées inc. à payer à Sabrina Guilbault la somme de 7 029,59 $ avec intérêts au taux légal, plus l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 14 septembre 2016, ainsi que les frais de justice de 200 $.

 

 

 

 

__________________________________

YVAN NOLET, J.C.Q.

 

 

 

 

 

Date d’audience :

7 septembre 2018

 

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