Décision

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Gabarit de jugement pour la cour d'appel

Lacour c. Construction D.M. Turcotte TRO inc.

2019 QCCA 1023

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

QUÉBEC

N° :

200-09-009829-182

(400-17-004309-163)

 

DATE :

 10 JUIN 2019

 

 

CORAM :

LES HONORABLES

LOUIS ROCHETTE, J.C.A.

JULIE DUTIL, J.C.A.

ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A.

 

 

THÉRÈSE LACOUR

MARCEL NADEAU

APPELANTS — demandeurs

c.

 

CONSTRUCTION D.M. TURCOTTE T.R.O. INC.

INTIMÉE — défenderesse et demanderesse en garantie

-et-

 

SNC-LAVALIN GEM QUÉBEC INC.

INTIMÉE — défenderesse en garantie

 

 

ARRÊT

 

 

[1]           Les appelants portent en appel le jugement rendu le 3 juillet 2018 par la Cour supérieure, district de Trois-Rivières (l’honorable Jacques Babin), accueillant la demande conjointe en irrecevabilité et en rejet des intimées et rejetant la demande introductive d’instance au motif que le recours est prescrit.

[2]           Pour les motifs du juge Mainville, auxquels souscrivent les juges Rochette et Dutil, LA COUR :

[3]           ACCUEILLE en partie l’appel à la seule fin de remplacer le paragraphe [60] du jugement de première instance par ce qui suit :

[60]      ACCUEILLE la demande en rejet en vertu des articles 51 et suivants du Code de procédure civile.

[4]           CONDAMNE les appelants aux frais de justice en appel.

 

 

 

 

LOUIS ROCHETTE, J.C.A.

 

 

 

 

 

JULIE DUTIL, J.C.A.

 

 

 

 

 

ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A.

 

 

 

Me Marc Michaud

LEGRIS, MICHAUD

Pour les appelants

 

Me Maya Angenot

NORTON ROSE

Pour SNC-Lavalin GEM Québec inc.

 

Me Émilie Bilodeau

STEIN, MONAST

Me Sophie Plamondon

CARTER, GOURDEAU

Pour Construction D.M. Turcotte T.R.O. inc.

 

Date d’audience :

9 avril 2019


 

 

 

MOTIFS DU JUGE MAINVILLE

 

 

[5]           Les appelants, Thérèse Lacour et Marcel Nadeau, se pourvoient contre un jugement rendu le 3 juillet 2018 par l’honorable Jacques Babin de la Cour supérieure, district de Trois-Rivières. Ce jugement accueille la demande conjointe en irrecevabilité (art. 168 C.p.c.) et en rejet (art. 51 et s. C.p.c.) des intimées Construction D.M. Turcotte T.R.O. inc. (« Turcotte ») et SNC-Lavalin GEM Québec inc. (« SNC-Lavalin ») et rejette la demande introductive d’instance au motif que le recours est prescrit.

LE CONTEXTE

[6]           Le litige concerne des vices affectant la résidence des appelants en bordure du fleuve Saint-Laurent à Trois-Rivières qui fut construite par Turcotte et livrée en janvier 2001.

[7]           On ne saurait mieux décrire le contexte du litige qu’en reproduisant les allégations de la demande introductive d’instance des appelants datée du 12 août 2016, telle que modifiée le 27 octobre 2017, et visant l’intimée Turcotte à titre de défenderesse :

1.- Les demandeurs sont propriétaires d'un emplacement situé au 3010, rue A à Trois-Rivières en vertu de leur contrat d'achat publié le 9 novembre 1994 sous le numéro 368 938 du Bureau de la publicité des droits de la circonscription foncière de Champlain; […]

2.- Le 10 mars 2000, ils ont signé un contrat d'entreprise avec la défenderesse par lequel ils lui donnaient le mandat de construire leur nouvelle résidence sur cet emplacement qui fut terminée en janvier 2001; […]

3.- Environ vers 2003, les demandeurs ont alors constaté une fissure entre le garage et la maison du côté est ainsi que des petites fissures dans le crépi;

4.- À ce moment, les demandeurs avisèrent la défenderesse qui les rassura;

5.- En 2004, une autre fissure apparue autour du cadre de la porte de service, côté est de leur maison et le mortier se détachait également des briques;

6.- De nouveau, les demandeurs communiquèrent alors avec la défenderesse, mais là encore, le problème n'était pas grave, de l'avis de la défenderesse;

7.- Par la suite, les demandeurs envisagèrent alors le projet d'agrandir leur résidence du côté ouest de leur maison, mais la fissure qui avait été découverte à la jonction du garage et de la maison s'était agrandie;

8.- Les demandeurs communiquèrent alors avec la défenderesse qui ne voulait plus construire l'agrandissement sans connaître plus précisément l'origine des désordres affectant cette propriété;

9.- La défenderesse s'adressa alors à un ingénieur en structure et une fois l'enquête terminée, elle avisa les demandeurs que la situation avait été jugée sans gravité et qu’il s'agissait d'un mouvement normal de l'immeuble;

10.- Entre 2005 et 2010, les demandeurs constatèrent que les fissures élargissaient toujours un peu plus;

11.- En octobre 2010, les demandeurs constatèrent la présence de fissures polygonales sur le solage de l'agrandissement laissant présager un problème de pyrrhotite;

12.- Les demandeurs demandèrent alors à la défenderesse de vérifier les fissures sur le logis principal étant donné leur progression ;

13.- La défenderesse donna alors instruction à l'arpenteur-géomètre Jean Pinard de faire un relevé établissant la progression des fissures ;

14.- Le 30 août 2010, les demandeurs transmirent une lettre à la défenderesse pour lui signaler des fissures dans le solage de leur propriété tout en lui demandant de venir examiner l'objet de leur plainte; […]

15.- Le 12 octobre 2012, les demandeurs transmirent une nouvelle lettre à la défenderesse pour lui signaler les problèmes qui s’aggravaient; […]

16.- Inquiets de cette situation, les demandeurs ont requis les services de l'ingénieur Jacques Gagné de la firme Jacques Gagné Experts-Conseils inc. qui produisit un rapport en date du 2 septembre 2014;

17.- L'ingénieur Jacques Gagné émit alors l'opinion que les désordres affectant la résidence des demandeurs étaient occasionnés par la présence d'un saule pleureur au coin arrière droit de la résidence et c'est à ce moment que les demandeurs furent avisés des raisons expliquant les désordres causés à leur maison;

18.- Ainsi, le saule pleureur était à une distance trop rapprochée avec le bâtiment et la défenderesse a fait défaut de considérer la présence de ce saule pleureur;

19.- Les désordres occasionnés à la maison des demandeurs sont dus à la présence de ce saule pleureur qui a entraîné l'affaissement des fondations;

20.- Les fondations doivent donc être réparées, les planchers remis au niveau alors que tous les revêtements muraux intérieurs doivent également être réparés;

21.- Par conséquent, les demandeurs réclament de la défenderesse les montants suivants :

a) 250 000,00 $ en dommages et intérêts correspondant au coût des réparations afin de remettre le bâtiment en bon état;

b) 1 092,26 $ correspondant au coût d'abattage du saule pleureur du 28  novembre 2013;

c) 1 006,03 $ correspondant au coût de la facture du 23 octobre 2013 de Vistech;

d) 919,80 $ correspondant au coût de la facture du 31 octobre 2016 de Gouttières R. Léveillé inc.;

22.- Les demandeurs réclament chacun de la défenderesse la somme de 25 000,00$ pour troubles, inconvénients subis, perte de jouissance de la propriété, stress.

[8]           Turcotte appelle alors en garantie SNC-Lavalin au motif que c’est cette dernière qui fut mandatée par elle pour vérifier la capacité portante du sol et pour émettre des recommandations en prévision de la construction de la résidence des appelants.

[9]           Le 4 avril 2018, Turcotte et SNC-Lavalin déposent une demande conjointe en irrecevabilité (art. 168 C.p.c.) et en rejet (art. 51 et s. C.p.c.) à l’encontre de l’action des appelants. Elles soutiennent que le recours est irrecevable puisqu’il serait prescrit depuis, au plus tard, le 12 octobre 2015, soit trois ans après la date de la mise en demeure des appelants dont il est fait mention au paragraphe 15 de la demande introductive d’instance. Invoquant l’interrogatoire au préalable de l’appelante Thérèse Lacour et le rapport de l’expert des appelants, Jacques Gagné, elles soutiennent que le recours serait aussi manifestement mal fondé et voué à l’échec puisque prescrit depuis l’automne 2012 ou, même en retenant le point de départ le plus favorable aux appelants, au plus tard depuis la fin juin 2013, lorsque ces derniers ont obtenu les conclusions et recommandations de l’expert Gagné quant à la cause des préjudices allégués.

LE JUGEMENT DE PREMIÈRE INSTANCE

[10]        Le juge de première instance note que le délai de prescription applicable est celui de trois ans (art. 2925 C.c.Q.). Quant au point de départ de ce délai, il mentionne qu’il correspond en principe au jour où le droit d’action a pris naissance (art. 2880 C.c.Q.), mais qu’en l’occurrence, puisque le préjudice des appelants s’est manifesté graduellement (art. 2926 C.c.Q.)[1], il se dit d’avis que « le droit d’action des demandeurs commençait dès que le dommage se manifestait de façon appréciable »[2].

[11]        Procédant à l’application de ce principe, le juge conclut que « même s’ils n’avaient pas une connaissance totale de la cause exacte de leur préjudice »[3], les appelants connaissaient l’ampleur des dommages bien avant le 12 août 2013, soit trois ans avant l’introduction de leur recours.

[12]        Le juge affirme que, dans la mise en demeure envoyée à l’intimée Turcotte le 12 octobre 2012, les appelants rapportent de façon claire tant l’ampleur des problèmes affectant leur résidence que le fait que ceux-ci s’aggravent depuis 10 ans. Ainsi, le juge conclut que puisque les dommages s’étaient déjà manifestés de façon appréciable avant cette mise en demeure, le recours des appelants était prescrit lorsqu’ils l’ont entrepris le 12 août 2016[4].

[13]        Le juge s’attarde ensuite à la connaissance par les appelants de la cause du préjudice.

[14]        Il constate qu’à l’automne 2012, le représentant de l’intimée Turcotte leur a conseillé de poursuivre et les appelants étaient alors prêts à entamer leur recours, tel qu’il appert de l’aveu même de l’appelante Thérèse Lacour lors de son interrogatoire au préalable[5] :

[37]      Même plus, à l’automne 2012 Turcotte leur a même conseillé de le poursuivre.

[38]      Cela appert de la page 68 de la transcription de l’interrogatoire au préalable de la demanderesse, alors qu’elle déclare :

R.         Mais un jour, M. Turcotte, Jacques Turcotte m’a dit : « Vous n’avez pas d’autre choix de vous retourner contre nous si, nous, nous voulons nous retourner contre les ingénieurs et les spécialistes que nous avons consultés ». Voilà. Il nous a dit ça. « Vous n’avez pas d’autre choix que de vous retourner contre nous ».

[Soulignement du juge de première instance]

[39]      Et dès après madame Lacour indique qu’elle était effectivement sur le point d’entreprendre des démarches avec son avocat, Me Michaud.

[40]      Mais ce n’est que quatre ans plus tard que des procédures judiciaires seront instituées, ce qui apparaît non seulement inexplicable, mais tout à fait déraisonnable.

[15]        Le juge discute ensuite du rapport de l’expert Gagné, dans lequel ce dernier identifie un saule pleureur à proximité de la résidence comme la cause du préjudice. Il recommande d’ailleurs aux appelants de l’abattre avant la fin de l’été 2013, ce qui fut effectivement fait à l’automne 2013. Le juge retient de ce rapport et de l’interrogatoire de Thérèse Lacour que les appelants connaissaient les conclusions et les recommandations de l’expert dès juin 2013, soit plus de trois ans avant l’introduction de leur action[6].

[16]        Enfin, le juge rejette la défense d’impossibilité d’agir soumise par les appelants. Ces derniers soutenaient que les propos rassurants du représentant de Turcotte auraient mené à une impossibilité d’agir au sens de l’article 2904 C.c.Q. ayant pour effet de suspendre le délai de prescription. Le juge affirme que ces propos n’ont aucunement causé une impossibilité d’agir et que, bien au contraire, en 2012, le représentant de Turcotte a invité les appelants à poursuivre[7].

[17]        Le juge accueille donc la demande en irrecevabilité et en rejet et rejette l’action des appelants.

LES QUESTIONS SOULEVÉES EN APPEL

[18]        Les appelants identifient deux questions en appel qu’ils formulent comme suit dans leur mémoire :

(1)  Est-ce que le point de départ de la prescription apparaît de façon suffisamment claire et évidente à la lecture de la demande introductive d'instance permettant au Tribunal, au stade d'une demande en irrecevabilité, de rejeter la demande sans permettre aux parties d'être entendues sur le fond?

 

(2)  Au stade d'une demande en irrecevabilité, l'interrogatoire de l'appelante Thérèse Lacour et du rapport de l'ingénieur Jacques Gagné, déposés par l'intimée, pouvaient-ils être considérés?

[19]        De fait, ce que les appelants soutiennent, c’est que le juge de première instance se serait prononcé uniquement sur la demande en irrecevabilité (art. 168 C.p.c.) et non pas sur la demande en rejet (art. 51 et s. C.p.c.) des intimées. Ce faisant, il aurait erré en droit en ne limitant pas son analyse aux allégations de la procédure introductive d’instance. Le juge aurait donc erré en analysant plutôt des questions de fait qui relèvent de l’appréciation du juge saisi du fond de l’affaire, en s’appuyant sur l’interrogatoire préalable de Thérèse Lacour et le rapport de l’expert Gagné, ce qui ne serait pas permis dans le cadre de l’analyse de la recevabilité d’une demande en vertu de l’article 168 C.p.c.

[20]        Quoique cela ne soit pas identifié précisément comme une question en appel dans leur déclaration d’appel, les appelants ajoutent dans leur mémoire que le juge aurait aussi erré en ne retenant pas leurs prétentions portant sur l’impossibilité d’agir.

ANALYSE

[21]        La prétention des appelants selon laquelle le juge de première instance s’est seulement prononcé sur la demande en irrecevabilité des intimées n’est pas fondée. Au contraire, il ressort clairement du jugement de première instance que le juge s’est prononcé tant sur le moyen d’irrecevabilité (art. 168 C.p.c.) que sur le caractère manifestement mal fondé de l’action entreprise (art. 51 et s. C.p.c.).

[22]        La demande des intimées est intitulée « Demande conjointe […] en irrecevabilité et en rejet de la demande introductive d’instance » (soulignement ajouté) et réfère dans son titre à la fois aux articles 51 et s. et 168 C.p.c. La structure de cette procédure prévoit d’ailleurs une section pour l’irrecevabilité et une autre sur le caractère manifestement mal fondé de la demande des appelants.

[23]        Le jugement entrepris est lui aussi divisé de la même manière. Dans les paragraphes 24 à 36, le juge analyse les allégations dans la demande des appelants ainsi que les pièces au soutien de celle-ci pour conclure que le recours est prescrit à sa face même. Dans les paragraphes 37 à 59, il analyse sommairement la preuve au dossier, dont l’interrogatoire préalable de Thérèse Lacour et le rapport de l’expert Gagné, ce qui constitue une analyse usuelle dans le cadre d’une demande en rejet en vertu des articles 51 et s. C.p.c. invoquant le caractère manifestement mal fondé d’une action. Dans ses conclusions, le juge accueille d’ailleurs la « Demande en irrecevabilité et en rejet » (soulignement ajouté) des intimées.

[24]        Même si le juge n’emploie pas le mot « abus », il est évident qu’il s’est prononcé selon les articles 51 et s. C.p.c. en concluant que le recours des appelants était manifestement mal fondé. D’ailleurs, la Cour a récemment affirmé « qu’il n’y a pas lieu de se formaliser de l’absence d’une référence à la notion d’ « abus » dans le cadre de l’analyse ou du dispositif du jugement qui rejette une demande fondée sur l’article 51 C.p.c. »[8].

[25]        L’article 53 C.p.c. permet à un tribunal de rejeter une demande en justice dans un cas d’abus. L’article 51 C.p.c. stipule que cet abus « peut résulter, sans égard à l’intention, d’une demande en justice ou d’un autre acte de procédure manifestement mal fondé […] » (soulignement ajouté). Ainsi, les articles 51 et s. C.p.c. visent une gamme élargie de situations qui sont qualifiées « d’abusives », même si elles ne résultent pas nécessairement de la mauvaise foi, de la témérité ou de l’acharnement[9]

[26]        Plus particulièrement, les articles 51 et s. reprennent, tout en les élargissant, les articles 75.1 et 75.2 de l’ancien C.p.c. abrogés par les amendements de 2009[10]. L’article 75.1 permettait de demander le rejet d’une demande en justice si un interrogatoire démontrait qu’elle était « frivole ou manifestement mal fondée », tandis que l’article 75.2 permettait au tribunal d’octroyer, en plus du rejet, des dommages-intérêts compensatoires lorsque l’acte de procédure était jugé « abusif ou dilatoire ».

[27]        Le législateur a tout de même conservé le moyen d’irrecevabilité prévu à l’article 168 C.p.c., qui permet, notamment, de conclure au rejet d’une demande en justice si « elle n’est pas fondée en droit, quoique les faits allégués puissent être vrais ».

[28]        Rien n’empêche d’invoquer la prescription tant comme un moyen d’irrecevabilité fondé sur l’article 168 C.p.c., que moyen de rejet en vertu des articles 51 et s. C.p.c.[11]. Cela étant, il est bien établi que les approches des deux dispositions sont différentes. 

[29]        Dans le premier cas, l’irrecevabilité (168 C.p.c.) doit se décider en fonction des allégations et des pièces à l’appui de la demande en justice, tenues pour vraies au plan factuel; elle est sujette à un principe de prudence selon lequel, autant que possible, on doit éviter de mettre fin prématurément à un procès, considérant les graves conséquences qui découlent du rejet d’une action sans que la demande soit examinée au fond[12].

[30]        Dans le deuxième cas (art. 51 et s. C.p.c.), même si un principe de prudence s’impose toujours, le tribunal peut se référer à l’ensemble du dossier afin de conclure au rejet de l’action, ce qui inclut les procédures, les pièces et, surtout, les interrogatoires[13].

[31]        Lorsque le tribunal est saisi d’une demande fondée à la fois sur l’article 168 C.p.c. et sur les articles 51 et s. C.p.c., il convient d’analyser, dans un premier temps, la demande en irrecevabilité et, dans un deuxième temps, la demande en rejet fondée sur l’abus[14]. C’est ce que le juge de première instance a fait. Il convient de faire de même en appel.

La demande en irrecevabilité en vertu de l’article 168 C.p.c.

[32]        L’analyse du moyen d’irrecevabilité par le juge de première instance fut malheureusement déformée par sa conclusion de droit voulant que le délai de prescription du droit d’action des appelants ait commencé dès que le préjudice s’est manifesté de façon appréciable. Il faut nuancer considérablement les propos du juge à cet égard, lesquels semblent confondre le moyen d’action fondé sur le régime particulier de la responsabilité présumée de l’entrepreneur en construction prévu à l’article 2118 C.c.Q. et celui fondé sur le régime général de la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur prévu à l’article 1458 C.c.Q.

[33]        Le point de départ du délai de prescription est énoncé à l’article 2880 al. 2 C.c.Q. :

2880. […]

Le jour où le droit d’action a pris naissance fixe le point de départ de la prescription extinctive.

2880. (…)

The day on which the right of action arises determines the beginning of the period of extinctive prescription.

[34]        Ainsi, le délai de prescription commence à courir le jour où le droit d’action se cristallise, c’est-à-dire au moment où tous les éléments nécessaires pour soutenir l’action entreprise sont réunis[15]. En définitive, le point de départ de la prescription extinctive correspond au jour où le justiciable « a une connaissance raisonnablement suffisante des éléments constitutifs de son droit d’action »[16]. Ces éléments constitutifs peuvent varier selon le régime de responsabilité en cause.

[35]        N’eût été la prescription, le recours des appelants aurait pu se fonder sur le régime de la responsabilité présumée de l’entrepreneur, de l’architecte et de l’ingénieur énoncé aux articles 2118, 2119 et 2121 C.c.Q. :

2118. À moins qu’ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l’entrepreneur, l’architecte et l’ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu’il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l’ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d’un vice de conception, de construction ou de réalisation de l’ouvrage, ou, encore, d’un vice du sol.

 

2118. Unless they can be relieved from liability, the contractor, the architect and the engineer who, as the case may be, directed or supervised the work, and the subcontractor with respect to work performed by him, are solidarily liable for the loss of the work occurring within five years after the work was completed, whether the loss results from faulty design, construction or production of the work, or defects in the ground.

2119. L’architecte ou l’ingénieur ne sera dégagé de sa responsabilité qu’en prouvant que les vices de l’ouvrage ou de la partie qu’il a réalisée ne résultent ni d’une erreur ou d’un défaut dans les expertises ou les plans qu’il a pu fournir, ni d’un manquement dans la direction ou dans la surveillance des travaux.

 

2119. The architect or the engineer may be relieved from liability only by proving that the defects in the work or in the part of it carried out by him do not result from any error or defect in the expert opinions or plans he may have supplied or from any failure in the direction or supervision of the work.

 

L’entrepreneur n’en sera dégagé qu’en prouvant que ces vices résultent d’une erreur ou d’un défaut dans les expertises ou les plans de l’architecte ou de l’ingénieur choisi par le client. Le sous-entrepreneur n’en sera dégagé qu’en prouvant que ces vices résultent des décisions de l’entrepreneur ou des expertises ou plans de l’architecte ou de l’ingénieur.

 

The contractor may be relieved from liability only by proving that the defects result from an error or defect in the expert opinions or plans of the architect or engineer selected by the client. The subcontractor may be relieved from liability only by proving that the defects result from decisions of the contractor or from the expert opinions or plans of the architect or engineer.

 

Chacun pourra encore se dégager de sa responsabilité en prouvant que ces vices résultent de décisions imposées par le client dans le choix du sol ou des matériaux, ou dans le choix des sous-entrepreneurs, des experts ou des méthodes de construction.

 

Each may, in addition, be relieved from liability by proving that the defects result from decisions imposed by the client in selecting the land or materials, or the subcontractors, experts, or construction methods.

 

2121.  L’architecte et l’ingénieur qui ne dirigent pas ou ne surveillent pas les travaux, ne sont responsables que de la perte qui résulte d’un défaut ou d’une erreur dans les plans ou les expertises qu’ils ont fournies.

 

2121. An architect or an engineer who does not direct or supervise work is liable only for the loss occasioned by a defect or error in the plans or in the expert opinions he supplied.

[36]        Ce régime particulier de responsabilité présumée protège le propriétaire à la fois contre l’effondrement complet de l’ouvrage et la dégradation d’une partie de celui-ci[17]. Comme le notent les auteurs Baudouin, Deslauriers et Moore, « [e]st suffisante une menace sérieuse et réelle d’effondrement, par exemple, lorsqu’il y a apparition de fissures ou de lézardes importantes, d’infiltrations d’eau, etc. »[18].

[37]        L’article 2118 C.c.Q. accorde donc au propriétaire un recours contre le vice de conception, de construction, de réalisation de l’ouvrage, ou encore, d’un vice du sol qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux. Le recours du propriétaire sous ce régime de responsabilité présumée se prescrit par trois ans à compter de la perte de l’ouvrage, conformément à l’article 2925 C.c.Q.[19] :

2925. L’action qui tend à faire valoir un droit personnel ou un droit réel mobilier et dont le délai de prescription n’est pas autrement fixé se prescrit par trois ans.

2925. An action to enforce a personal right or movable real right is prescribed by three years, if the prescriptive period is not otherwise determined.

[38]         Dans les cas où les dégradations se révèlent graduellement ou tardivement, l’article 2926 prévoit alors la règle suivante :

2926. Lorsque le droit d’action résulte d’un préjudice moral, corporel ou matériel qui se manifeste graduellement ou tardivement, le délai court à compter du jour où il se manifeste pour la première fois.

2926. Where the right of action arises from moral, bodily or material injury appearing progressively or tardily, the period runs from the day the injury appears for the first time.

[39]        Dans l’affaire Desgagné c. Fabrique de la paroisse St-Philippe d’Arvida[20], la Cour suprême du Canada devait traiter des articles 1688 et 2259 de l’ancien Code civil du Bas-Canada (« C.c.B-C. »), qui énonçaient ce qui suit :

1688. Si l’édifice périt en tout ou en partie dans les cinq ans, par le vice de la construction ou même par le vice du sol, l’architecte qui surveille l’ouvrage et l’entrepreneur sont responsables de la perte conjointement et solidairement.

 

1688. If a building perish in whole or in part within five years, from a defect in construction, or even from the unfavorable nature of the ground, the architect superintending the work, and the builder are jointly and severally liable for the loss.

2259. L’action en indemnité en vertu de l’article 1688 doit être introduite dans les cinq ans de la perte.

 

Si cependant le vice en est un qui se manifeste graduellement, la prescription commence à courir à l’expiration des cinq années mentionnées dans l’article 1688.

2259. The action for indemnity under article 1688 must be taken within five years from the date of the loss.

 

If, however, the defect is one which is only gradually revealed, prescription shall begin to run from the expiration of the five years mentioned in article 1688.

[40]        Sous la plume du juge Beetz, la Cour suprême concluait alors que lorsqu’un vice énoncé à l’article 1688 C.c.B.-C. se manifestait graduellement, c’était le second alinéa de l’article 2259 C.c.B.-C. qui devait s’appliquer. En conséquence, la prescription de cinq ans prévue à cet article ne commençait donc à courir qu’à l’expiration de la période de cinq ans prévue à l’article 1688 C.c.B.-C.[21].  L’ouvrage en cause dans l’affaire Desgagné n’ayant été accepté qu’en 1964 et les vices de l’ouvrage s’étant manifestés graduellement, la demanderesse dans cette affaire avait donc jusqu’en 1974 pour intenter son recours.

[41]        Malgré que les articles 2118 et 2926 C.c.Q. ne soient pas rédigés de la même façon que les articles 1688 et 2259 C.c.B.-C., la doctrine et la jurisprudence adoptent la même approche sous le régime de la responsabilité présumée de l’article 2118 C.c.Q., sous réserve que le délai de prescription est celui de trois ans prévu à l’article 2925 C.c.Q. et non pas cinq ans comme c’était le cas selon le C.c.B.-C.[22]. Les auteurs Baudouin, Deslauriers et Moore s’expriment comme suit à cet égard[23] :

[…] Si donc la perte prévue à l’article 2118 C.c. survient à l’intérieur de la période de cinq ans de la fin des travaux, le titulaire du recours à trois ans pour se pourvoir en justice (art. 2925 C.c.), le délai se calculant à partir du jour de la perte (au sens donné à ce terme par la jurisprudence) ou, le cas échéant, de la découverte du vice pouvant mener à celle-ci (selon l’article 2926 C.c.). La jurisprudence a décidé que le délai, en cas d’un vice graduel, ne commence à courir que de la date où le vice s’est manifesté de façon appréciable pour la première fois. La période maximale de prescription est donc désormais de huit ans en cas de manifestation graduelle du vice et non plus de dix ans.

[42]        Dans le dossier dont nous sommes saisis, la demande introductive d’instance des appelants énonce que les travaux de construction de leur résidence ont été terminés en janvier 2001 et que les préjudices affectant celle-ci se sont manifestés graduellement. La période maximale pour invoquer le régime particulier de responsabilité présumée de l’entrepreneur en vertu de l’article 2118 C.c.Q. expirait donc au plus tard dans les huit ans, soit en janvier 2009. Le délai de prescription pour invoquer la responsabilité de Turcotte conformément à l’article 2118 C.c.Q. était donc expiré lorsque les appelants ont introduit leur recours le 12 août 2016.

[43]        Ne pouvant plus se prévaloir du régime de la responsabilité présumée de l’article 2118 C.c.Q., les appelants ne pouvaient donc fonder leur recours que sur le régime général de la responsabilité civile contractuelle (art. 1458 C.c.Q.), lequel se superpose au régime particulier de responsabilité présumée de l’article 2118 C.c.Q.[24]. L’article 1458 C.c.Q. dispose de ce qui suit :

1458. Toute personne a le devoir d’honorer les engagements qu’elle a contractés.

 

1458. Every person has a duty to honour his contractual undertakings.

 

 

Elle est, lorsqu’elle manque à ce devoir, responsable du préjudice, corporel, moral ou matériel, qu’elle cause à son cocontractant et tenue de réparer ce préjudice; ni elle ni le cocontractant ne peuvent alors se soustraire à l’application des règles du régime contractuel de responsabilité pour opter en faveur de règles qui leur seraient plus profitables.

Where he fails in this duty, he is liable for any bodily, moral or material injury he causes to the other contracting party and is bound to make reparation for the injury; neither he nor the other party may in such a case avoid the rules governing contractual liability by opting for rules that would be more favourable to them.

[44]        Le recours sous le régime général de la responsabilité contractuelle se prescrit par trois ans, tel que le prévoit l’article 2925 C.c.Q., reproduit ci-haut. Cependant, contrairement au régime particulier de responsabilité présumée de l’article 2118 C.c.Q., la cristallisation d’un recours en responsabilité contractuelle ne survient pas lorsque le préjudice se manifeste pour la première fois de façon appréciable, comme pourrait le laisser entendre les motifs du juge de première instance. Le délai de prescription commence plutôt à compter du moment où tous les éléments permettant d’intenter le recours en responsabilité contractuelle sont connus ou auraient pu être raisonnablement connus. Selon l’énonciation classique, ces éléments sont une faute contractuelle, un préjudice et un lien de causalité entre cette faute et ce préjudice, le tout adapté aux différences d’aménagement pratique du régime de responsabilité contractuelle invoqué[25].

[45]        L’action en justice n’est pas une expédition de pêche et « l'on ne poursuit pas quelqu'un dans le but de découvrir qu'il nous a causé préjudice, mais bien parce que l'on est, déjà, raisonnablement certain qu'il a commis une faute ayant causé préjudice »[26]. Tel que le signalait le juge Chamberland dans S.C. c. Archevêque catholique romain de Québec, une affaire portant sur la responsabilité extracontractuelle, mais dont les principes s’appliquent tout autant sous le régime général de la responsabilité contractuelle[27] :

Le délai de prescription ne peut pas commencer à courir avant le jour où, pour la première fois, le détenteur du droit à exercer pouvait effectivement prendre une action en justice, c'est-à-dire à compter de ce jour où, pour la première fois, il connaissait, ou pouvait raisonnablement connaître, les trois éléments nécessaires à l'exercice de son recours (la faute, le préjudice et le lien de causalité entre la faute et le préjudice).  Ce n'est, en définitive, qu'à compter de ce moment que les conditions juridiques du droit de poursuite se trouvent enfin réunies et que la cause d'action se cristallise.

[46]        Ce principe s’impose tout autant lorsque le préjudice se manifeste graduellement ou tardivement. En effet, la règle énoncée à l’article 2926 C.c.Q. voulant que, dans un tel cas, le délai de prescription débute à compter du jour ou le préjudice se manifeste pour la première fois (il doit s’agir d’un préjudice qui se manifeste d’une façon « appréciable » ou « tangible »[28]), est complémentaire à la faute et au lien de causalité entre cette faute et le préjudice, tous ces éléments devant être présents afin de conclure au point de départ d’une action fondée sur le régime général de la responsabilité civile contractuelle.

[47]        Les articles 2880 al. 2 et 2926 C.c.Q. sont donc nécessairement complémentaires l'un de l'autre. Le premier, contenu dans le chapitre général dans le titre portant sur les dispositions générales du régime de la prescription, en se référant au « droit d'action », présuppose que tous les éléments constitutifs de la responsabilité civile contractuelle se sont manifestés avant que ne commence à courir la prescription. Le second, contenu dans le titre de la prescription extinctive, constitue une application particulière de la règle précédente lorsque le préjudice se manifeste graduellement ou tardivement, permettant ainsi de retarder le départ du délai de prescription dans un tel cas; ce qui ne signifie pas, cependant, que la faute et le lien de causalité ne doivent pas eux aussi être présents et connus pour que ce délai puisse courir[29].

[48]        Dans leur procédure introductive d’instance, les appelants reconnaissent qu’ils subissent un préjudice qui s’est manifesté de façon appréciable depuis plusieurs années. Par contre, ce qu’ils soutiennent aussi dans cette procédure, c’est qu’ils n’auraient appris la faute contractuelle de Turcotte et le lien de causalité entre cette faute et le préjudice subi que lors de la production du rapport de l’expert Gagné, le 2 septembre 2014. À cet égard, il y a lieu de reproduire à nouveau les paragraphes 16 à 19 de la demande introductive d’instance des appelants :

16.- Inquiets de cette situation, les demandeurs ont requis les services de l'ingénieur Jacques Gagné de la firme Jacques Gagné Experts-Conseils inc. qui produisit un rapport en date du 2 septembre 2014;

17.- L'ingénieur Jacques Gagné émit alors l'opinion que les désordres affectant la résidence des demandeurs étaient occasionnés par la présence d'un saule pleureur au coin arrière droit de la résidence et c'est à ce moment que les demandeurs furent avisés des raisons expliquant les désordres causés à leur maison;

18.- Ainsi, le saule pleureur était à une distance trop rapprochée avec le bâtiment et la défenderesse a fait défaut de considérer la présence de ce saule pleureur;

19.- Les désordres occasionnés à la maison des demandeurs sont dus à la présence de ce saule pleureur qui a entraîné l'affaissement des fondations;

[49]        Ainsi, si l’on s’en tient à la demande introductive d’instance et aux pièces à son soutien, il n’est pas manifeste que le recours en responsabilité contractuelle des appelants est prescrit en date de l’introduction de cette demande le 12 août 2016. En effet, les appelants laissent entendre dans cette procédure qu’ils n’ont appris la faute de Turcotte et le lien de causalité entre cette faute et le préjudice que le 2 septembre 2014. Le juge de première instance a donc erré en rejetant le recours sur le fondement de son irrecevabilité en vertu de l’article 168 C.p.c.

[50]        Toutefois, cette erreur ne décide pas de l’appel, vu la preuve subséquente versée au dossier sous forme d’interrogatoire au préalable qui permettait au juge de première instance de rejeter le recours conformément aux articles 51 et s. C.p.c., ce qu’il convient maintenant d’analyser.

La demande de rejet en vertu des articles 51 et s. C.p.c.

[51]        L’interrogatoire préalable de l’appelante Thérèse Lacour est pertinent. Elle y affirme que le représentant de Turcotte, à l’automne 2012, a encouragé les appelants à intenter une poursuite judiciaire et que ces derniers étaient alors en mesure d’intenter leur recours[30] :

Q- Est-ce qu'à partir de 2012, 2013, 2014, est-ce que vous avisez à de nouvelles reprises M. Turcotte du fait que les fissures, des nouvelles problématiques que vous voyez?

R- Écoutez, à partir du moment où on a engagé, quand même, avec Me Michaud, une procédure...

Q- Des démarches.

R- Des démarches, on va dire, oui, c'est ça, on a avisé... un maximum de discrétion, mais il y avait comme des liens on peut peut-être pas dire de grande amitié avec les Turcotte, mais quand même, suffisamment pour qu'on s'inquiète de la santé de son papa qui est décédé depuis, etc. Donc, il nous arrivait de nous rencontrer. On parlait pas normalement de ces problèmes. Mais un jour, M. Turcotte, Jacques Turcotte m'a dit : « Vous n'avez pas d'autre choix de vous retourner contre nous si, nous, nous voulons nous retourner contre les ingénieurs et les spécialistes que nous avons consultés ». Voilà. Il nous a dit ça. « Vous n'avez pas d'autre choix que de vous retourner contre nous ».

Q- Puis ça, à ce moment-là, vous aviez déjà commencé vos démarches avec...

R- On était sur le point.

            […]

Q- Et ça c’est … à quel moment vous me dites « M. Turcotte m’a dit “vous n’avez pas le choix de…” »

R- Ben, c’est là où j’arrive pas à me souvenir exactement, mais je sais que c’était au moment où nous commencions à penser aux procédures. Et lui nous a dit… Parce qu’en même temps, nous nous sommes aussi retournés contre les Turcotte à propos de la pyrrhotite. Donc, il y a un mois, là, il y a, entre… nous faisons partie du recours collectif. Donc, entre les procédures du recours collectif avec Me Soucy et puis… C’est pratiquement au même moment, là, que les choses se sont décidées.

Q- Puis si on essaie…

R- C’est brouillé, là.

Q- D’accord. Donc, c’était avant ou après que vous ayez eu votre rapport de M. Gagné?

R- Non, c’est avant.

Q- Avant d’avoir reçu le rapport de M. Gagné?

R- Avant. C’est avant d’avoir le rapport, qu’il nous a dit ça : « Vous n’aurez pas le choix de vous retourner contre nous. Ne vous inquiétez pas - il a dit -, parce que nous, on se retourne contre… » Parce que… Alors c’est là que nous avons… nous nous sommes dits, mais pourquoi il veut se retourner contre les ingénieurs qui ont… qu’il avait consultés pour la structure des fondations? Et l’interprétation qui est arrivée c’est que pour eux, la cause serait certainement au niveau du terrain, d’où le fait qu’ils fassent venir M. Pinard qui fait des relevés de terrain.

Q-  Donc on se situe, quoi, un peu après l’envoi de votre lettre d’octobre 2012?

R- Je le sais pas, là. Honnêtement, je le sais pas. Mais c’est dans cette période-là.

              [Soulignement ajouté]

[52]        Le rapport de l’expert Gagné s’explique d’ailleurs mieux à la lumière de l’interrogatoire au préalable de Thérèse Lacour. Plusieurs éléments du rapport laissent entendre que les appelants connaissaient les conclusions de celui-ci dès juin 2013, mais cette hypothèse ne s’est vraiment confirmée que lors de l’interrogatoire au préalable.

[53]        En effet, l’expert Gagné affirme dans son rapport avoir pris connaissance des préjudices subis à la résidence lors d’une visite de celle-ci le 3 décembre 2012[31]. Le pied de page de chaque page du rapport indique la date de « juin 2013 ». C’est seulement à la dernière page qu’il est indiqué, en note manuscrite, le 2 septembre 2014 près de la signature et du sceau d’ingénieur[32]. Enfin, le rapport ne laisse place à aucun doute quant à l’antériorité de la principale recommandation de l’expert[33] :

Nous recommandons de couper le saule pleureur dans les plus brefs délais soit avant la fin de l'été 2013. […]

[Soulignement ajouté]

[54]        Thérèse Lacour reconnaît que cette recommandation fut reçue bien avant la date de signature du rapport et, de fait, elle confirme que les appelants ont fait arracher l’arbre en novembre 2013, soit environ dix mois avant la signature du rapport final[34].

[55]        Le juge de première instance conclut donc que les appelants connaissaient l’existence de tous les éléments de leur droit d’action à l’encontre de Turcotte dès l’automne 2012, lorsque le représentant de cette dernière les incite à poursuivre. Il conclut aussi que c’est au plus tard en juin 2013 que les appelants ont eu connaissance des résultats et des recommandations de l’expertise de Gagné. Ces conclusions sont fondées sur la preuve. Le juge de première instance était donc justifié de rejeter l’action en vertu des articles 51 et s. C.p.c.

[56]        Cela étant, il faut noter que les appelants ont instruit leur appel comme s’il s’agissait d’un appel de plein droit, ce qui est permis lorsqu’une demande en justice est rejetée en vertu de l’article 168 C.p.c. sur le fondement d’un moyen d’irrecevabilité. Par contre, l’article 30 al. 2 par. 3 C.p.c. prévoit que lorsqu’une telle demande est rejetée en raison de son caractère abusif (art. 51 et s. C.p.c.), l’appel n’est possible que sur permission. Or, lorsque le rejet de la demande s’appuie à la fois sur le fondement de l’article 168 C.p.c. et des articles 51 et s. C.p.c., une permission d’appeler est-elle aussi requise? La réponse à cette question n’est pas évidente[35]. Cependant, dans Linda’s Fashion & Co. c. Shtern[36], la Cour a récemment conclu que dans de telles circonstances, l’appel pouvait procéder de plein droit. L’appel dans le dossier dont nous sommes saisis est donc régulièrement formé.

La suspension de la prescription et l’impossibilité d’agir

[57]        La prétention des appelants qu’ils étaient dans l’impossibilité d’agir ne peut être retenue, vu que la preuve révèle sans ambiguïté que le représentant de Turcotte leur a recommandé de poursuivre à l’automne 2012. Toute prétendue impossibilité d’agir qui aurait résulté des assurances des représentants de Turcotte antérieures à l’automne 2012 n’est donc pas pertinente puisque le recours des appelants serait de toute façon prescrit depuis.

[58]        De plus, outre le fait que les appelants n’invoquent pas l’impossibilité d’agir dans leur procédure introductive d’instance, la suspension d’un délai de prescription pour un tel motif requiert la preuve d’un véritable obstacle qui empêche d’agir[37]. Le fardeau d’établir la preuve de cette impossibilité d’agir appartient à celui qui l’invoque[38]. Tel que l’a conclu le juge de première instance, il n’y a aucune telle preuve au dossier[39]. Les propos prétendument rassurants du représentant de Turcotte concernant les fissures ne constituent pas une conduite qui peut raisonnablement mener à une impossibilité d’agir chez les appelants, surtout lorsqu’on tient compte du fait que ce même représentant les a encouragés à poursuivre à l’automne 2012. Il n’y a pas ici une ignorance chez les appelants qui résulte d’une faute du débiteur permettant d’alléguer l’impossibilité d’agir menant à la suspension du délai de prescription[40].

CONCLUSIONS

[59]        Pour ces motifs, je propose d’accueillir en partie l’appel à la seule fin de préciser que le recours est rejeté sur le fondement des articles 51 et s. C.p.c. plutôt que de l’article 168 C.p.c.; je propose donc de remplacer le paragraphe [60] du jugement de première instance par ce qui suit :

[60]      ACCUEILLE la demande en rejet en vertu des articles 51 et suivants du Code de procédure civile;

[60]        Vu cette conclusion peu favorable aux appelants, je propose aussi que ces derniers soient condamnés à payer les frais de justice en appel.

 

 

 

ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A.

 



[1]     Jugement de première instance, par. 17-21.

[2]     Id., par. 22.

[3]     Id., par. 25.

[4]     Id., par. 26-31.

[5]     Id., par 37-40.

[6]     Id., par. 41-48.

[7]     Id., par. 55-59.

[8]     9105-3975 Québec inc. c. Andritz Hydro Canada inc., 2018 QCCA 1968, par. 6, s’appuyant à cet égard sur 2741-8854 Québec inc. c. Restaurant King Ouest inc., 2018 QCCA 1807, par. 30-31.

[9]     Gauthier c. Charlebois (Succession de), 2013 QCCA 1809, par. 30-31.

[10]    Loi modifiant le Code de procédure civile pour prévenir l’utilisation abusive des tribunaux et favoriser le respect de la liberté d’expression et la participation des citoyens aux débats publics, L.Q. 2009, c. 12.

[11]    Gauthier c. Charlebois (Succession de), 2013 QCCA 1809; Brousseau c. Montréal (Ville de), 2011 QCCA 2434, par. 12; Brousseau c. Crevier, 2011 QCCA 2327, par. 4; Plante c. Lemieux, [2001] J.Q. n° 6099 (QL), J.E. 2002-120 (C.A.), par. 9 de l’éd. QL; Roy c. Pageot, [2001] J.Q. n° 5351 (QL), REJB 2001-29665 (C.S.), par. 27 de l’éd. QL ; Sylvestre c. Communauté des sœurs de la charité, [1996] J.Q. n° 2590 (QL), J.E. 96-1736 (C.S.), par. 1-3 et 28 de l’éd. QL.

[12]    9213-1705 Québec inc. c. Geitzen, 2016 QCCA 71, par. 12; Québec (Ville de) c. CFG Construction inc., 2015 QCCA 362, par. 12; Entrepôt International Québec, s.e.c. c. Protection incendie de la Capitale inc., 2014 QCCA 617, par. 2; Gauthier c. Charlebois (Succession de), 2013 QCCA 1809, par. 16; Bohémier c. Barreau du Québec, 2012 QCCA 308, par. 17; Cheung c. Borsellino, 2005 QCCA 865, par. 5.

[13]    Gauthier c. Charlebois (Succession de), 2013 QCCA 1809, par. 26-27; Plante c. Lemieux, [2001] J.Q. n° 6099 (QL), J.E. 2002-120 (C.A.); Montplaisir c. Mondou, 2017 QCCA 1841, par. 7 (juge unique); Duguay c. Boutin, 2013 QCCA 965 (juge unique), par. 22; Fruits de mer Lagoon inc. c. Réfrigération, plomberie & chauffage Longueuil inc. (Zero-C), 2016 QCCS 1647, par. 58. Voir aussi : SNC-Lavalin Group inc. c. Ben Aïssa, 2019 QCCS 465, par. 174; Trotman c. Re/Max Royal (Jordan) inc., 2018 QCCS 5283, apr. 37; Ferme Brogali inc. c. Brouillard, 2018 QCCS 4653, par. 24; South Pacific Tours c. 9017-2214 Québec inc. (Tours Cassis), 2018 QCCS 3355, par. 27; Olenga c. Ville de Montréal, 2018 QCCS 2970, par. 19-20; Lafortune c. Grenache, 2018 QCCS 2600, par. 10; D.B. c. Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, 2018 QCCS 2559, par. 29.

[14]    Brousseau c. Montréal (Ville de), 2011 QCCA 2434, par. 12; Brousseau c. Crevier, 2011 QCCA 2327, par. 5; Lefrançois c. Charland, 2011 QCCA 1877, par. 2-4; Allaire c. Canada (Procureur général), 2016 QCCA 209 (juge unique), par. 6-7.

[15]    Monopro Ltd. c. Montreal Trust, [2000] J.Q. n° 1040 (QL), J.E. 2000-777 (C.A.), par. 17 de l’éd. QL; Daigle c. Mathieu, 2010 QCCA 1612, par. 49; Delson (Ville de) c. Autobus La Québécoise Roussillon inc., 2015 QCCA 20, par. 75; Édith Lambert, La prescription (art. 2875 à 2933 C.c.Q.) dans « Commentaires sur le Code civil du Québec », (DCQ), Montréal, Éditions Yvon Blais, 2014, p. 1127-1134; Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 1, Cowansville, Yvon Blais, 2014, n° 1-1322, p. 1158-1159.

[16]    Imperial Tobacco Canada ltée c. Conseil québécois sur le tabac et la santé, 2019 QCCA 358, par. 1061 et 1081; ICQ Algérie c. Duquette, 2018 QCCA 160, par. 7; Rosenberg c. Canada (Procureur général), 2014 QCCA 2041, par. 8; Céline Gervais, La prescription, Cowansville, Yvon Blais, 2009, p. 106-107; Pierre Martineau, La Prescription dans Traité élémentaire de droit civil, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 1977, n° 247, p. 251.

[17]    Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 2, Cowansville, Yvon Blais, 2014, n° 2-281, p. 316; Constructions GSS Gauthier 2000 inc. c. Scaffidi Argentina, 2014 QCCA 990; Canada inc. c. 9141-0787 Québec inc., 2018 QCCS 5876, par. 39; Palmieri c. Dubuc, 2009 QCCS 1004, par. 96-99; Assistance aux femmes de Montréal inc. c. Habitations Alexandre inc., 2008 QCCS 5204, par. 149-151; Milette c. Constructions J. & G. Provencher inc., [2000] J.Q. n° 6389, J.E. 2000-1781, par. 35 de l’éd. QL; Gagnon c. Roger Bisson inc., [2004] J.Q. n° 1690 (QL), J.E. 2004-671, par. 43 de l’éd. QL. Voir aussi sous le C.c.B.-C. : Chabot c. Raymond Caron Inc., [1984] J.Q. n° 540 (QL), J.E. 84-538 (C.A.), par. 18-21.

[18]    Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 2, Cowansville, Yvon Blais, 2014, n° 2-283, p. 317-318. Voir aussi : Distribution Couche-Tard inc. c. Constructions Loracon inc., 2015 QCCS 2775, par. 104; Giabouranis c. Aux Rythmes des saisons inc., 2014 QCCS 5579, par. 24; Joubert c. Boutin, 2014 QCCS 46, par. 104.

[19]    Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 2, Cowansville, Yvon Blais, 2014, n° 2-336 et 2-337, p. 345-346; Jacques Deslauriers, Vente, louage, contrat d’entreprise ou de service, 2e éd., Montréal, Wilson Lafleur, 2013, n° 2472-2473.

[20]    Desgagné c. Fabrique de la paroisse St-Philippe d’Arvida, [1984] 1 R.C.S. 19.

[21]    Id., p. 42.

[22]    Assistance aux femmes de Montréal c. Habitations Alexandre inc., 2008 QCCS 5204, par. 165-167; 4526937 Canada inc. c. 9141-0787 Québec inc., 2018 QCCS 5876, par. 42-45 ; Bélanger c. Caron, [2005] J.Q. n° 10156 (QL), EYB 2005-93366 (C.S.), par. 23-33 de l’éd. QL.

[23]    Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 2, Cowansville, Yvon Blais, 2014, n° 2-337, p. 346. Voir aussi Édith Lambert, La prescription (art. 2857 à 2933 C.c.Q.) dans Commentaires sur le Code civil du Québec, Cownasville, Yvon Blais, n° 2925 560 et 2926 595, p. 1073-1074 et  1153-1156 ; Jacques Deslauriers, Vente, louage, contrat d’entreprise ou de service, 2 éd., Montréal, Wilson Lafleur, 2013, n° 2508.

[24]    Turcotte c. Lavoie, [1950] B.R. 161, p. 163-164; Ceriko Asselin Lombardi inc. c. Maçonnerie Express inc. [2001] J.Q. n° 1085 (QL), J.E. 2001-697 (C.A.), par. 13 de l’éd. QL : « La garantie accordée par une partie contractante a pour effet de conférer un avantage au cocontractant et non de lui retirer un droit. À titre d'exemple, sous le Code civil du Bas-Canada, la doctrine et la jurisprudence ont reconnu que la garantie légale édictée par l'article 1688 C.c.B.-C. (maintenant 2118 C.c.Q.) n'avait pas pour effet de restreindre les recours de droit commun. Je ne vois pas de raison pour laquelle le même principe ne s'appliquerait pas en matière de garantie contractuelle. » (renvoi omis); Prince c. Dalpé, 2008 QCCS 5181, par. 66 : « […] La responsabilité de l'entrepreneur existe en vertu du régime général indépendamment de l'expiration du régime de garantie légale contre la perte totale ou partielle de l'ouvrage »; Habitations des Cônes c. Roy, 2013 QCCS 260, par. 24-26; Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 2, Cowansville, Yvon Blais, 2014, n° 2-338, p. 347.

[25]    Monopro Ltd. c. Montreal Trust, [2000] J.Q. n° 1040 (QL), J.E. 2000-777 (C.A.), par. 17 de l’éd. QL; Daigle c. Mathieu, 2010 QCCA 1612, par. 49; Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 1, Cowansville, Yvon Blais, 2014, n° 1-45 à 1-51, p. 29-35.

[26]    Dufour c. Havrankova, 2013 QCCA 486, par. 3. Voir aussi Ouellet c. Ouellet, 2017 QCCA 113, par. 36; Bolduc c. Lévis (Ville de), 2015 QCCA 1428, par. 53; Mennillo c. Intramodal inc., 2014 QCCA 1515, par. 128.

[27]    S.C. c. Archevêque catholique romain de Québec, 2009 QCCA 1349, par. 134. La dissidence du juge Chamberland dans cette affaire a été confirmée par la Cour suprême du Canada dans Christensen c. Archevêque catholique romain de Québec, 2010 CSC 44, [2010] 2 RCS 694. Voir aussi : Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 1, Cowansville, Yvon Blais, 2014, n° 1-1320, p. 1155.

[28]    Gingras c. Québec (Cité), [1947] J.Q. n° 13 (QL), [1948] B.R. 171 (C.A.), par. 9 à 11 de l’éd. QL; DSD International inc. c. Construction Gosselin-Tremblay inc., 2008 QCCA 2533, par. 11-12; Monopro Ltd. c. Montreal Trust, [2000] J.Q. n° 1040 (QL), J.E. 2000-777 (C.A.), par. 21-22; Céline Gervais, La prescription, Cowansville, Yvon Blais, 2009, p. 116-117; Jean-Louis Baudouin et Pierre-Gabriel Jobin, Les obligations, 7e éd., Cowansville, Yvon Blais, 2013, n° 1127, p. 1358.

[29]    April c. Seltzer, succession, [1997] J.Q. n° 3694 (QL), J.E. 97-2130 (C.S.), par. 12 de l’éd. QL; Édith Lambert, La prescription (art. 2857 à 2933 C.c.Q.) dans Commentaires sur le Code civil du Québec, Cowansville, Yvon Blais, n° 2926 565, p. 1129-1132.

[30]    Notes sténographiques de l’interrogatoire préalable de Thérèse Lacour, 9 mai 2017, p. 68-70.

[31]    Pièce R-2 : Rapport d’expertise de Jacques Gagné, juin 2013, p. 2.

[32]    Id., p. 15.

[33]    Id., p. 14.

[34]    Notes sténographiques de l’interrogatoire préalable de Thérèse Lacour, 9 mai 2017, M.A., p. 62-64.

[35]    2741-8854 Québec inc. c. Restaurant King Ouest inc., 2018 QCCA 1807; 9105-3975 Québec inc. c. Anditz Hydro Canada inc., 2017 QCCA 1810 (juge unique); Gauthier c. Charlebois (Succession de), 2013 QCCA 1809; Groupe Alta-Socam (Chambly) inc. c. Groupe Bennet Fleet inc., 2012 QCCA 1255; Brousseau c. Montréal (Ville de), 2011 QCCA 2434.

[36]    Linda’s Fashion & Co. c. Shtern, 2019 QCCA 906, par. 5-13.

[37]    C.c.Q., art. 2904.; Pellerin Savitz s.e.n.c.r.l. c. Guindon, 2017 CSC 29, [2017] 1 R.C.S. 575, par. 33. Pour une discussion approfondie sur l’impossibilité d’agir, voir : Gauthier c. Lac Brome (Ville), [1998] 2 R.C.S. 3, par. 47 à 73.

[38]    F.B. c. Therrien (Succession de), 2014 QCCA 854, par. 59.

[39]    Jugement de première instance, par. 55-59.

[40]    Nadeau c. Nadeau, 2010 QCCA 341, par. 63-65; Remer c. Remer, 2013 QCCA 1803, par. 89-90.

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