Décision

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COMMISSION DES RELATIONS DU TRAVAIL

 

 

Dossier :

126818

Cas :

CM-2001-8129

 

Référence :

2006 QCCRT 0235

 

Montréal, le

4 mai 2006

______________________________________________________________________

 

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Paul Dufault

______________________________________________________________________

 

 

Yves Laviolette

 

Plaignant

c.

 

La Société des Casinos du Québec inc.

(Casino de Montréal)

Intimée

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 21 octobre 2004, Yves Laviolette (le plaignant) dépose une plainte en vertu de l’article 124 de la Loi sur les normes du travail, par laquelle il allègue avoir été congédié sans cause juste et suffisante le 18 octobre 2004 par La Société des casinos du Québec inc. (l’employeur).

[2]                Le motif de congédiement invoqué par l’employeur est le suivant : le plaignant, alors qu’il devait être absent du travail pour cause d’invalidité à la suite d’une opération à son genou gauche, s’est livré à des activités incompatibles avec le diagnostic de son médecin traitant et de son incapacité alléguée de ne pouvoir reprendre son travail.

[3]                L’employeur lui reproche de surcroît d’avoir manœuvré dans le but d’obtenir, frauduleusement et sans droit, des prestations d’assurance-invalidité. Ainsi, dans les circonstances selon celui-ci, il y a bris de la relation de confiance, et ce, d’autant plus sérieusement que, au Casino de Montréal, le plaignant est un cadre.

[4]                Il est convenu que la Commission décidera d’abord du fond de la présente affaire. Le cas échéant, la Commission réservera sa compétence pour déterminer le mode de réparation qu’elle jugera le plus approprié.

PREUVE DE L’EMPLOYEUR

[5]                Le 22 juin 1993, le plaignant, âgé de 50 ans au jour d’audience, est embauché chez l’employeur à la fonction de superviseur de croupiers, et ce, à compter du 5 juillet 1993. Cette offre est conditionnelle aux résultats positifs d’une enquête de sécurité menée par la Sûreté du Québec et à un examen médical satisfaisant (pièce E-2).

[6]                Le 6 juillet 1993, il signe un « Serment ou affirmation d’allégeance d’office et de discrétion », par lequel il s’engage notamment à être loyal envers l’employeur.

[7]                Le 22 septembre 1993, il atteste par écrit avoir reçu le Manuel de l’employé (pièce E-4). Par cette attestation, il s’engage à lire ce manuel et à respecter les politiques, ainsi que les règles, normes et procédures, en vigueur chez l’employeur (pièce E-4). À ce manuel, on y lit notamment que l’employé doit être présent à son poste de travail, à moins d’autorisation ou de justification préalable, et qu’il doit être, loyal, intègre et impartial (pièce E-5).

[8]                Le 5 mars 1996, il est promu à la fonction de « chef de partie » à temps complet, rétroactivement au 15 février 1996. Il relève dorénavant d’un chef de quart, lequel relève d’une chef de service (tables de jeu), laquelle à son tour relève du directeur des opérations, rattaché au directeur général. Il devient le supérieur immédiat de chefs de tables, auxquels se rapportent des croupiers. Ainsi, dans la ligne hiérarchique, il devient alors le supérieur de deuxième niveau des croupiers.

[9]                Le 12 d’août 2002, alors qu’il est au travail, le plaignant, en marchant, se blesse au genou gauche.

[10]           Le 13 août 2002, il consulte le Dr Luong. Par la suite, il consulte le médecin qui le traite pour son diabète, le Dr Gouin, lequel procède à des infiltrations de cortisone dans sa jambe et lui prescrit une prolongation de son arrêt de travail.

[11]           Le 24 septembre 2002, tout en se déplaçant avec des béquilles selon la prescription du Dr Gouin, le plaignant réintègre son travail. Par la suite, il doit subir d’autres examens médicaux, dont une échographie le 6 novembre 2002 et une résonance magnétique le 13 décembre 2002.

[12]           Le 27 juin 2003, il subit une arthroscopie au genou. À la suite de cette opération chirurgicale, devant subir d’autres examens médicaux et traitements, notamment en physiothérapie, il ne se présente plus au travail. Au fait, tel que nous le verrons, il sera absent du travail durant plus de quinze mois, soit jusqu’au jour où il sera congédié.

[13]            Or, étant donné que l’employeur « auto-assure » ses cadres durant les deux premières années d’absence au travail pour cause de maladie, le plaignant reçoit donc de celui-ci des prestations d’assurance-invalidité correspondant à 80 % de son salaire. Pour l’obtention d’une telle assurance, le plaignant n’a à défrayer aucun coût.

[14]           Le 20 août 2003, la Dre Martine Lévesque confirme avoir bel et bien opéré le plaignant en date du 27 juin 2003, après quoi il doit subir des traitements de physiothérapie. De plus, la Dre Lévesque établit que le plaignant serait en mesure de reprendre son travail à la fin du mois de septembre 2003 (pièce E-7). Or, à cette échéance, le plaignant ne se présente pas au travail.

[15]           Le 4 février 2004, toujours en physiothérapie, il subit une nouvelle imagerie par résonance magnétique.

[16]           Le 3 mars 2004, Lucie Gladu, conseillère en santé et sécurité chez l’employeur, affirme avoir téléphoné au plaignant afin de connaître ses « limitations fonctionnelles ». Au fait, elle souhaite pouvoir lui confier un travail adapté, tel un travail de bureau ne l’obligeant pas à devoir marcher.

[17]           Le 27 mars 2004, alors que le plaignant n’a toujours pas repris son travail, le Dr Gouin établit dans son pronostic qu’il ne peut déterminer à quel moment ce dernier serait en mesure de reprendre son travail (pièce E-8).

[18]           En mai 2004, le Dr Mark Burman, orthopédiste, prend la relève de la Dre Lévesque, laquelle doit s’absenter de son travail pour une période prolongée. Il lui prescrit alors des traitements de physiothérapie, lesquels avaient cessé au moment où il était suivi par la Dre Lévesque.

[19]           Le 28 mai 2004, le Dr Jacques Toupin, médecin-conseil en santé et sécurité du travail chez l’employeur, s’enquiert en ces termes, auprès du Dr Burman, si l’employeur peut assigner le plaignant à un travail adapté qui tienne compte de ses « limitations fonctionnelles » (pièce E-15) :

Monsieur Yves Laviolette a un rendez-vous avec vous en date du 31 mai 2004.

Il a eu une chirurgie pour son genou gauche le 27 juin 2003, et il est toujours en arrêt de travail complet pour cette même condition depuis. Étant donné que monsieur Laviolette est cadre au Casino, nous aurions l’opportunité de l’assigner à un travail adapté à sa condition.

Ainsi, dans le but d’accommoder votre patient et de respecter ses limitations fonctionnelles, nous aimerions obtenir des précisions sur ses limitations et sa capacité à effectuer certaines tâches.

Nous apprécierions donc que vous nous précisiez les limitations fonctionnelles de monsieur Laviolette, et que vous nous précisiez s’il est en mesure d’occuper un emploi en position assise et dans lequel il n’aura à se déplacer que pour ses besoins personnels. Soyez assuré que si vous deviez émettre différents commentaires concernant ce retour au travail avec restrictions, nous en tiendrons compte.

(Reproduit tel quel.)

[20]           Le plaignant affirme que le Dr Burman ne lui a pas montré ce document.

[21]           Le 31 mai 2004, le Dr Burman, tout en ne répondant pas à la requête du Dr Toupin, précise dans son diagnostic que le plaignant a des douleurs, des raideurs et des faiblesses et qu’il est inapte à marcher et à demeurer assis pendant une longue période temps. De plus, le Dr Burman ne peut déterminer à quel moment le plaignant serait en mesure de reprendre son travail (pièce E-9).

[22]           D’une part, tout en ne le niant pas, le plaignant affirme ne pas se souvenir si une personne du service de santé de l’employeur a communiqué avec lui ainsi que son médecin traitant, afin de s’enquérir si on pouvait l’assigner à une fonction où il pourrait ne travailler qu’en position assise, tel un emploi de bureau.

[23]           D’autre part, la conseillère Lucie Gladu affirme avoir bel et bien parlé avec le plaignant, à ce sujet, en mars et en mai 2004. En effet, à ce moment, l’employeur souhaite pouvoir lui confier un « travail allégé ». Au soutien de ses propos, elle verse au dossier un document intitulé « Notes administratives », par lequel sont relatées toutes les communications qu’elle a avec celui-ci ainsi que ses demandes de voir à ce que soient remplis et transmis les formulaires d’autorisation d’absence pour cause de maladie (pièce E-14). Au fait, Marie-Josée Parent, chef de service au Casino, viendra confirmer à la Commission que le plaignant a été mis au courant que l’employeur cherchait à entrer en communication avec son médecin traitant, le Dr Burman.

[24]           Le 3 septembre 2004, comme suite à la suggestion du Dr Jacques Toupin et étant donné que le Dr Burman n’a pas répondu à la requête de l’employeur relative aux limitations fonctionnelles du plaignant, la conseillère Gladu confie par télécopie ce mandat au Dr Yvan Comeau, orthopédiste (pièce E-17) :

Nous vous demandons de procéder à l’expertise médicale de cet(te) employé(e) afin de clarifier les points suivants :

1.      Le diagnostic;

2.      La date de retour au travail;

3.      La nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou les traitements administrés ou prescrits; Est-ce que monsieur nécessite l’utilisation de béquilles ou canne pour circuler?

4.      L’existence ou l’évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur;

5.      Aptitude à faire son emploi régulier. Sinon, est-il en mesure d’effectuer un emploi en position assise?

REMARQUES : Dans ce dossier nous tentons d’obtenir du médecin traitant les limitations fonctionnelles de monsieur afin de lui proposer un travail en fonction de celles-ci, mais nous n’obtenons pas de réponse du médecin. Monsieur Laviolette étant cadre au Casino, nous aurions l’opportunité de l’assigner à un travail adapté à sa condition.

(Reproduit tel quel.)

[25]           Le 8 septembre 2004, le plaignant est examiné durant environ une heure par le Dr Yvan Comeau, un orthopédiste dont la qualité d’expert n’est pas contestée. En début d’examen, le plaignant lui décrit les tâches qu’il est appelé à accomplir au Casino et lui mentionne qu’il doit travailler debout et effectuer des déplacements, dans l’exercice de sa fonction de « chef de partie ».

[26]           Dans son rapport d’« expertise médicale orthopédique », on retrouve notamment ces titres de chapitre : Historique de la blessure, des consultations médicales et des traitements subis; Problèmes actuels, relatés par le plaignant; Examen et exposé des résultats; Documentation, versée au dossier médical par le plaignant, dont les certificats médicaux; Discussion ou analyse du cas soumis; Conclusions (pièce E-18).

[27]           Au chapitre des Problèmes actuels, il est notamment écrit dans le rapport d’expertise, que le plaignant lui a dit qu’il circule avec sa canne à « 99,9 % du temps » et que, dans les escaliers, « il circule en se tenant à sa canne et à la rampe ».

[28]           Dans la Discussion, paraissant au rapport d’expertise, on y lit notamment ce qui suit, relativement à l’inadéquation constatée entre les problèmes relatés par le plaignant et la réalité factuelle telle que diagnostiquée par le médecin expert :

Suite à mon examen aujourd’hui, il se dégage une impression de discordance importante entre la réalité fonctionnelle de ce genou et les manifestations douloureuses de monsieur Laviolette à l’examen. ...

Lorsqu’il y a un désordre fonctionnel intra-articulaire secondaire à un problème biomécanique, il y a de façon quasi invariable persistance d’épanchement articulaire avec douleur. Et le tout entraîne une importante atrophie musculaire. Or, dans le cas actuel, monsieur Laviolette ne présente aucune atrophie musculaire, et ce, même s’il se déplace quasi constamment avec une canne. Et c’est sans compter sur le fait qu’il prétend être aux prises avec une ankylose en flexion et une importante limitation de la flexion de son genou.

Il y a ici un problème d’incompatibilité entre l’apparente perte fonctionnelle de ce genou et l’absence complète de toute atrophie musculaire.

[29]           Dans les Conclusions de son expertise médicale, au chapitre des limitations fonctionnelles, le Dr Comeau statue ce qui suit :

Tel qu’expliqué auparavant, je n’ai pas été en mesure de mettre en évidence un problème fonctionnel significatif justifiant des limitations fonctionnelles. L’absence de toute atrophie musculaire et de tout véritable flexum par ankylose du genou démontre, qu’en réalité, cette canne n’a aucune nécessité fonctionnelle. Et dans la vie quotidienne, elle ne semble pas utile pour suppléer à une hypothétique perte fonctionnelle.

Par conséquent, actuellement je ne propose aucune limitation fonctionnelle.

[30]           Enfin, de conclure dans son rapport d’expertise le Dr Comeau : « Il n’y a aucun doute que monsieur Laviolette est au moins apte à du travail sédentaire assis. Mais, j’ai l’impression très nette, suite à mon examen aujourd’hui, qu’il est en réalité apte à reprendre son travail régulier. »

[31]           Lorsqu’il est entendu, le Dr Comeau apporte les précisions suivantes. D’abord, ce qui le surprend, c’est la façon dont le plaignant tient sa canne. En effet, il la tient avec sa main gauche, alors que c’est le genou gauche qui est blessé. Or, dans un tel cas, selon le Dr Comeau, sa canne aurait dû être tenue du côté opposé à la blessure. Par ailleurs, lorsqu’il est examiné, le plaignant tient sa canne « tout le temps », alors que, généralement, un patient abandonne sa canne à ce moment. Ainsi, de déclarer le Dr Comeau : l’utilisation de la canne « ne correspond pas à la réalité ».

[32]           De plus, lorsqu’une personne utilise une canne, l’immobilisation et la            sous-utilisation conséquentes du genou entraînent une atrophie, une faiblesse et une fatigabilité du genou concerné, tel que la doctrine médicale en fait mention (pièce E-19). Or, à l’examen, le Dr Comeau ne constate aucune atrophie musculaire ou incapacité fonctionnelle. « Les deux jambes sont dans la même posture », d’affirmer le Dr Comeau.

[33]           Autre élément qui surprend le Dr Comeau : à l’examen, le genou est bloqué et maintenu de façon rigide, avec une flexion constante de 30 degrés, alors que lorsque le plaignant se déshabille, s’habille et se déplace, il constate que son genou gauche atteint « une extension pratiquement complète ». Certes, il remarque une cicatrice sur le genou gauche. Mais, selon lui, les « deux genoux sont identiques ».

[34]           Le Dr Comeau constate aussi que le plaignant dit ressentir une douleur, « au simple toucher cutané ou pincé roulé du côté interne ». Or, dit-il, une telle réaction n’a aucun rapport avec une lésion intra-articulaire.

[35]           Par ailleurs, étant donné que la résonance magnétique révèle que les ligaments sont intacts, il ne peut pratiquer le test McMurray, parce que le plaignant dit qu’il ne peut fléchir son genou gauche.

[36]           Dans son expertise, s’il opine que « le meilleur traitement serait de réintégrer progressivement » le plaignant au travail, ce n’est pas parce que le plaignant présente des limitations fonctionnelles, c’est que le Dr Comeau se place à ce moment du point de vue, non pas médical, mais de la gestion des ressources humaines. En effet, selon lui, étant donné que le plaignant a développé des « habitudes hors du travail », une réintégration progressive lui apparaît préférable, au strict point de vue psychologique.

[37]           En somme, selon le Dr Comeau, l’examen objectif ne coïncide pas avec l’état subjectif de la situation pathologique décrite par le plaignant ou manifestée par son comportement.

[38]           Le plaignant dit ne pas se souvenir avoir dit au Dr Comeau, à ce moment, qu’il portait sa canne à 99,9 % du temps où il circule. S’il a dit une telle chose, c’est « un mensonge », reconnaît-il, puisqu’il n’utilise sa canne à ce moment qu’à 50 % de ses déplacements. De plus, devant le Dr Comeau, il nie avoir boité.

[39]           Les 15, 16, 17, 18, 19 et 21 septembre 2004, un, deux ou trois enquêteurs de la firme Gilbraltor Investigates, selon les journées et les circonstances, exercent une surveillance du plaignant au moyen d’une caméra 8 millimètres, dont les observations filmées sont par la suite transférées sur une cassette vidéo VHS.

[40]           À ces jours, à l’exception du 19 septembre 2004 où les deux enquêteurs ne constatent « aucune activité visible du sujet », le plaignant est filmé aux alentours de sa résidence, dans ses déplacements à pied sur la rue, dans ses entrées ou sorties d’un centre d’achat, d’une banque, d’une bibliothèque et de commerces. Il est également filmé lorsqu’il entre et sort d’une voiture.

[41]           Par ailleurs, sont versés au dossier la vidéo ainsi que le rapport des enquêteurs décrivant dans le détail leurs observations ainsi que l’heure précise de leurs constats visuels (pièces E-11 à E-13). En aucun moment, l’enquêteur, appelé à témoigner, dit avoir vu le plaignant utiliser une canne, une rame d’escalier ou boiter lorsqu’il se déplace. Au fait, c’est ce qu’on constate en visionnant la vidéo.

[42]           Le 20 septembre 2004, au moyen d’un document intitulé Déclaration du médecin, le Dr Mark Burman, réitère son diagnostic du 13 mai 2004, tout en précisant que le plaignant est hypersensible, a une diminution d’amplitude articulaire, est incapable de marcher sans l’aide d’une canne et de demeurer assis longtemps.

[43]           De plus, dans sa Déclaration du 20 septembre 2004, le Dr Burman fait mention qu’il n’est toujours pas en mesure de déterminer à quel moment exactement le plaignant pourrait reprendre son travail. Toutefois, il lui donne rendez-vous, dans les quatre mois suivant cette visite, soit à la fin de janvier 2005 (pièce E-10).

[44]           Au fait, lorsqu’il est entendu, l’orthopédiste expert, le Dr Yvan Comeau, se dit « totalement en désaccord » avec l’intégralité du contenu de cette Déclaration du Dr Burman.

[45]           Par ailleurs, lorsqu’il rencontre le Dr Burman, le plaignant affirme que ce dernier ne lui prescrit pas le port d’une canne, mais qu’il l’utilisait de son propre chef. Or, étant donné que sur le formulaire rempli par le Dr Burman, le 20 septembre 2004, il est écrit en langue anglaise qu’il est incapable de marcher sans l’aide d’une canne et de demeurer longtemps assis, le procureur de l’employeur lui demande alors s’il n’a pas suggéré ces éléments paraissant à la Déclaration de son médecin traitant. À cette question, le plaignant répond par la négative.

[46]           Le 29 septembre 2004, après y avoir été convoqué, le plaignant se rend aux bureaux de l’employeur. À ce jour, dans l’heure précédant son départ pour le Casino, lorsqu’il y arrive, qu’il se rend au bureau de Brigitte Cérat et qu’il quitte le Casino, il est également surveillé par deux enquêteurs. Il est ainsi filmé par eux et par les caméras de surveillance du Casino. Les vidéos, ainsi que le rapport de ces enquêteurs, sont versés au dossier (pièces E-11 à E-13). Sur ces vidéos, on y constate ce qui suit.

[47]           Dans l’heure précédant son départ pour le Casino, il se rend à un dépanneur. À ce moment, il ne boite pas, il n’a pas de canne et il n’affiche aucune difficulté lorsqu’il entre dans sa voiture.

[48]           Parvenu sur le terrain du Casino, lorsqu’il descend de sa voiture, il porte une canne qu’il utilise pour marcher. Dans ses déplacements, il boite. En marchant, il s’appuie sur sa canne. Parfois, il semble plutôt traîner cette canne, spécialement lorsqu’il est filmé dans le sous-sol et qu’il n’y a personne près de lui. Dans le stationnement, à son arrivée et à son départ, il regarde un peu partout autour de lui.

[49]           Au bureau de la chef de service Brigitte Cérat, il y rencontre cette dernière, ainsi que Marie-Josée Parent, chef de service (tables de jeu), sa supérieure de deuxième niveau qui bénéficie à ce moment d’un congé de maternité. Les parties reconnaissent que, si Brigitte Cérat rendait témoignage, elle corroborerait les faits exposés par la chef de service Parent.

[50]           Le but de cette rencontre, selon Marie-Josée Parent : connaître la version des faits du plaignant, relativement à son état de santé, d’autant plus que Marie-Josée Parent dit n’avoir pas réussi à joindre pendant des mois le plaignant - ce que nie ce dernier -, et que, par ailleurs, les représentants de l’employeur ne réussissent également pas à prendre contact avec son médecin traitant, le Dr Burman.

[51]           D’abord, Marie-Josée Parent verse au dossier la description de fonction de « chef de partie », détenue par plaignant. La raison d’être de cette fonction est la suivante (pièce E-22) :

... le chef de partie spécialiste jeux est responsable de l’évaluation et du suivi des joueurs experts; il gère une équipe de travail, cadres et employés syndiqués, et supervise les opérations d’une section des tables de jeu.

Il assure également l’intégrité et le bon déroulement des tables de jeu tout en veillant à la satisfaction de la clientèle.

[52]           De plus, Marie-Josée Parent verse également au dossier le compte-rendu de la rencontre qu’elle et Brigitte Cérat tiennent avec le plaignant, en date du                       29 septembre 2004. Il convient de reproduire l’intégralité de ce compte-rendu, exposant notamment pourquoi dès ce jour le plaignant est suspendu pour une période indéfinie (pièce E-23) :

Yves [Laviolette] arrive en boitant avec sa canne. Lorsqu’il est assis, sa jambe gauche repose sur sa canne de façon à ce que son genou soit en position de détente.

Nous expliquons à Yves Laviolette qu’étant donné que Brigitte assume le remplacement de Marie-Josée, qu’il était important pour Brigitte de bien connaître tous les gestionnaires de son équipe et qu’elle désirait faire un survol de son dossier. De plus, il lui est mentionné qu’étant donné que nous avions reçu une M1 (formulaire du médecin traitant) mentionnant qu’il serait en arrêt de travail pour un autre 4 mois, ceci nous permettait de mettre son dossier à jour et de s’informer comment était sa situation présente.

Dans un premier temps, nous lui avons demandé comment allait sa santé. Il nous a répondu que c’était très difficile étant donné qu’il ne sortait que très rarement de sa maison. Il devait se déplacer avec sa canne en tout temps car il ne pouvait déplier son genou. Il nous a également montré comment il embarquait dans sa voiture, qu’il devait se glisser sur le siège en tenant fermement la portière de sa voiture pour ne pas se blesser davantage. Il nous mentionne également qu’il doit toujours avoir sa canne car son genou peut flancher à tout moment.

Nous lui demandons s’il pratique des activités sportives telles que le golf, la bicyclette, la marche... Il répond qu’il ne peut rien faire. Il s’est lancé dans la lecture.

Il nous fait part également que sa vie de couple vit des moments difficiles car étant donné qu’il est toujours à la maison et qu’il ne peut rien faire, il est parfois difficile pour sa femme de vivre cette situation.

Suite à cette conversation, Brigitte mentionne qu’elle est confuse car l’information qu’elle a reçue ne correspond pas à la situation qu’il venait de décrire. J’affirme la même chose en mentionnant à Yves que nous ne croyons pas qu’il a toujours besoin de sa canne et que plus souvent qu’autrement, lorsqu’il sortait, il n’avait pas besoin de canne.

Il est très surpris par cette allégation et il nous demande de qui vient cette information. Nous lui mentionnons que c’est une information que nous avions reçue et que c’est pour cette raison que nous voulions lui en parler aujourd’hui. Il insiste à quelques reprises pour savoir de qui venait cette information. Nous lui avons répondu qu’à ce stade, ce n’était point important.

Il nous fait mention qu’il doit utiliser sa canne 80 % du temps lorsqu’il sort. Nous lui rappelons l’explication qu’il a fait au début de cette rencontre et que nous étions encore très perplexe par rapport aux faits présentés. Nous réitérons que l’information que nous avons ne reflète aucunement sa version des faits. Nous lui mentionnons que malheureusement, nous ne croyions pas ce qu’il nous disait. Il revient à la défense en nous demandant pourquoi irait-il voir des spécialistes à maintes reprises et pourquoi il paierait s’il n’avait pas de problème. Nous revenons sur le fait que l’information reçue ne concorde pas avec ces faits.

Il nous dit que si nous voulions qu’il entre travailler lundi prochain, il entrerait et en serait très heureux car il trouve la situation difficile à la maison. Nous lui mentionnons que la M1 présente indique qu’il ne peut travailler, assis ou debout.

À la fin de notre conversation, nous lui mentionnons que nous n’avons d’autres choix que de le suspendre sans solde pour fins d’enquêtes car nous voulions vérifier nos faits. Il nous questionne sur ces 11 ans de service en nous disant que nous n’en tenons pas compte. Nous lui expliquons que la situation présente n’a rien à voir avec ces années de service (exemple de l’alcool au volant, cela ne prend rien qu’une fois pour être reconnu coupable). Il semble déconcerté par la situation et demande si l’enquête sera longue. Nous lui répondons que nous étions pour lui faire un retour le plus rapidement possible car nous comprenons que ce ne sera pas facile pour lui.

(Reproduit tel quel.)

[53]           Lorsqu’elle est entendue par la Commission, Marie-Josée Parent dit que, parce qu’elle a vu les vidéos avant de rencontrer le plaignant avec Brigitte Cérat et que        ceux-ci confirment l’expertise du Dr Comeau, elle était vraiment choquée et peinée de constater que le plaignant pouvait lui « mentir comme ça ».

[54]           Pour sa part, lorsqu’il rencontre les chefs de service Parent et Cérat, il ne se souvient pas avoir dit, dans un premier temps, qu’il utilisait constamment sa canne et, dans un deuxième temps après qu’elles lui aient dit qu’elles détenaient des informations contredisant ses propos, qu’il ne l’utilisait qu’à 80 % du temps. Il ne se souvient également pas avoir dit qu’il devait avoir toujours une canne, lorsqu’il était à son domicile ou lorsqu’il en sortait. Mais, il confirme leur avoir démontré comment il s’y prenait pour entrer dans sa voiture, en tenant la portière et en glissant sur le siège.

[55]           En toute fin d’audience, lorsqu’il est interrogé par son procureur, il se souvient cette fois avoir dit qu’il ne sortait que très rarement de sa maison et qu’il ne se déplaçait avec sa canne qu’à 50 % du temps.

[56]           De plus, en début d’audience, confirmant au procureur de l’employeur avoir bel et bien dit qu’il était prêt à revenir travailler le lundi suivant la rencontre, il dit cependant ne pas se souvenir s’il a fait cette proposition après que les chefs de service lui aient fait part qu’elles détenaient des informations contredisant ses propos.

[57]           En toute fin d’audience, après avoir pris connaissance du compte-rendu reproduit plus haut, il tient à préciser cette fois qu’il a bien dit une telle chose, non pas après que les chefs de service lui ont dit que sa version des faits ne coïncidait pas avec les informations qu’elles détenaient, mais plutôt après qu’il ait dit que « ça va mal à la maison ». En effet, affirme-t-il avoir dit à ce moment, il était prêt à revenir travailler le lundi suivant, et ce, de lui faire préciser le procureur de l’employeur, même si son médecin traitant a écrit dans sa Déclaration qu’il était incapable de marcher sans l’aide d’une canne et de rester assis longtemps.

[58]           À cet égard, à une autre question du procureur de l’employeur, il reconnaît que, s’il n’avait pas été rencontré au Casino en date du 29 septembre 2004, il n’aurait pas pris l’initiative de proposer de revenir au travail avant janvier 2005.

[59]           Examiné en cours d’audience plus à fond par le procureur de l’employeur, le plaignant précise qu’il ne pouvait passer une journée complète sans problème. Il lui arrivait de ne pas utiliser sa canne, afin de forcer la situation pour qu’il puisse se « remettre sur les deux pattes ». Il lui arrivait aussi de quitter sa résidence ou de descendre un escalier, sans prendre sa canne. Toutefois, précise-t-il, lorsqu’il descend un escalier sans canne, il doit tenir la rampe. Il confirme qu’il peut à l’occasion magasiner, durant une heure ou deux, ou jouer au billard, sans avoir de canne.

[60]           Certes, reconnaît-il, lorsque le 8 septembre 2004 il se présente chez le médecin expert de l’employeur, le Dr Comeau, lorsque le 20 septembre 2004 il se présente chez son médecin traitant, le Dr Burman, lorsque le 29 septembre 2004 il se présente aux bureaux de Brigitte Cérat, au Casino, il a sa canne. Pourquoi avoir sa canne, à ces occasions? Parce que, à ces moments, « ça va moins bien », dit-il.

[61]           Toutefois, il nie avoir dit au Dr Burman qu’il était incapable de marcher sans sa canne. Selon lui, c’est, à la suite de l’examen que ce dernier lui fait subir, que le Dr Burman fait mention d’une telle limitation fonctionnelle (pièce E-10). De plus, rajoute-t-il, en juillet, en août et en septembre 2004, il n’utilise sa canne qu’à 50 % du temps. Lorsqu’il ne l’utilise pas, il ne boite pas pour autant, précise-t-il.

[62]           Le 14 octobre 2004, alors que depuis le 29 septembre 2004 il est suspendu pour une période indéfinie et après que le Dr Comeau ait visionné à la demande de l’employeur la vidéocassette de filature, ce dernier produit un Rapport complémentaire. D’abord, dans ce document, il rappelle ces conclusions de son examen du                     8 septembre 2004 :

Je concluais donc, suite à mon examen, à une condition post-opératoire de méniscectomie interne du genou sans aucune évidence de trouble fonctionnel significatif. Je considérais urgent de réintégrer Monsieur Laviolette au travail. Je considérais l’utilisation de la canne inutile. Je ne recommandais aucune limitation fonctionnelle.

[63]           Puis, le Dr Comeau y décrit entre autres ce qu’il voit sur ces vidéos :

Sur ces vidéos, nous voyons essentiellement Monsieur Laviolette se déplacer à différents endroits. Nous constatons qu’il n’utilise jamais la canne dans ses déplacements. Sa démarche est vive, souple et dans la moindre boiterie. Il entre et sort de son véhicule avec vivacité et souplesse.

De façon particulière, à une reprise, nous le voyons entrer dans son automobile alors que l’appui principal se fait sur son membre inférieur gauche, ce qui implique entre autres un pivotement. Le tout semble se faire avec beaucoup de facilité.

Et dans sa démarche, nous pouvons constater une extension complète des deux genoux.

[64]           Par ailleurs, dans son analyse ou « discussion », le Dr Comeau expose notamment ce qui suit :

Cette cassette vidéo confirme les opinions émises dans mes conclusions à l’effet que Monsieur Laviolette est certainement apte à du travail sédentaire assis. Et en réalité, il faut le considérer apte à son travail régulier.

Cette filature nous montre un homme avec une démarche normale. ...

Nous ne décelons aucune appréhension, ni aucune précaution, ni aucune économie dans l’utilisation de son membre inférieur gauche dans les déplacements de Monsieur Laviolette.

Cela contredit les affirmations de Monsieur Laviolette lors de notre rencontre. En cela va également complètement à l’encontre de la prestation que m’a offerte Monsieur Laviolette lors de l’examen. ...

[65]           Enfin, toujours dans son rapport complémentaire à la suite du visionnement des vidéos, le Dr Comeau est conduit à cette conclusion :

Suite à la prise de connaissance de cette vidéo de filature de Monsieur Laviolette portant sur plusieurs jours, j’en arrive à la conclusion que celui-ci présente un état de normalité fonctionnelle au niveau de son genou gauche. Il est donc certainement apte à faire du travail allégé de type sédentaire. Et en fait, suite à la prise de connaissance de cette vidéo de filature, je le considère en réalité parfaitement apte à réintégrer son travail régulier.

Cette filature vidéo contredit formellement la prestation offerte par Monsieur Laviolette lors de notre rencontre. Et cette prestation constitue un comportement trompeur visant à m’induire en erreur concernant l’état réel de son genou.

Et si Monsieur Laviolette adoptait le même comportement vis-à-vis ses différents thérapeutes et son employeur, on peut également considérer qu’il s’agissait toujours là d’un comportement trompeur visant à induire en erreur ses différents intervenants.

[66]           En ce qui concerne la première vidéo où en aucun temps on ne l’aperçoit avec une canne dans ses déplacements, le Dr Comeau dit qu’on voit alors le plaignant            « à l’état naturel ». Ainsi, selon lui, la prestation offerte par ce dernier, dans son bureau, ne correspondait aucunement à la réalité factuelle.

[67]           En ce qui concerne le second vidéo, où on le voit sortir de son domicile et se présenter sans canne à un dépanneur, environ une heure avant de se présenter avec une canne au Casino en date du 29 septembre 2004, le Dr Comeau réitère que le comportement du plaignant ne correspond pas alors à un problème inflammatoire      post-traumatique, tel qu’allégué. Même plus, rajoute-t-il : « Au Casino, la canne ressemble plus à une décoration. »

[68]           Au soutien de sa conclusion, tirée de l’examen objectif de la situation observée, le Dr Comeau verse au dossier un texte de doctrine médicale, faisant état des trois phases constitutives du mécanisme de guérison des tissus conjonctifs (pièce E-21). Il met en relief ce consensus médical dont il est fait mention : après six semaines, la phase de guérison est complétée et la personne peut reprendre ses activités normales.

[69]           De plus, le Dr Comeau établit que, dans les deux mois suivant le 27 juin 2003, jour où le plaignant a été opéré, la blessure de ce dernier était consolidée. Ainsi, sur le plan médical, rien ne sert d’appui aux propos du plaignant, voulant qu’à une journée il se serve de sa canne et qu’à une autre il ne s’en sert pas. En somme, la thèse prétendue par celui-ci d’utilisation de sa canne, à 50 % du temps, ne lui paraît pas vraisemblable.

[70]           Le 15 octobre 2004, dans les circonstances, Marie-Josée Parent, chef de service, congédie le plaignant en lui écrivant ce qui suit (pièce E-1) :

La présente fait suite à votre suspension pour fins d’enquête ayant débutée le 29 septembre dernier. Nous désirons vous faire part de la décision de la Société suite à l’analyse des faits pertinents reliés à votre absence ayant débutée le 26 juin 2003 pour cause de maladie et pour laquelle vous receviez des prestations d’assurance-invalidité.

·         Considérant que durant cette absence vous avez effectué des activités incompatibles avec le diagnostic de votre médecin traitant et de votre état d’incapacité allégué sur le formulaire médical que vous nous avez fourni;

·         Considérant que lesdites activités sont également incompatibles avec les douleurs, les symptômes et les limitations que vous alléguiez et que vous avez amplifiées afin d’induire votre expert en erreur;

·         Considérant qu’il s’agit de fausses déclarations faites dans le but d’obtenir sans droit des prestations d’assurance-invalidité;

·         Considérant les explications que vous nous avez données lors de notre rencontre du 29 septembre 2004;

·         Considérant le fait que pareil comportement, compte tenu des circonstances, s’assimile à une fraude;

·         Considérant la politique sur la conduite du personnel ainsi que la nature et la gravité du geste reproché;

·         Considérant que la nature de vos fonctions requiert un haut niveau de confiance;

·         Considérant la réputation d’honnêteté et d’intégrité que notre établissement doit maintenir;

·         Considérant que pour ces motifs, le lien de confiance qui se doit d’exister entre vous et votre employeur a été rompu;

Nous vous avisons que nous mettons fin à votre emploi rétroactivement au 29 septembre 2004, date de votre suspension pour fins d’enquête.

Votre relevé d’emploi et les sommes qui vous sont dues vous seront acheminés à votre domicile.

(Reproduite telle quelle.)

[71]           Cette décision de congédier le plaignant, dans le contexte où ce dernier n’a aucun dossier disciplinaire, est prise, conjointement et solidairement, par le conseiller en gestion des ressources humaines, par le directeur des opérations ainsi que par la chef de service (tables de jeu).

[72]           Pour Marie-Josée Parent, l’« intégrité », au Casino, est une valeur absolue. Le non-respect de cette règle éthique, plus particulièrement par un cadre, entraîne le congédiement de la personne fautive. Dans les circonstances, à l’endroit du plaignant, il y a donc bris irréversible de la relation de confiance.

[73]           Le 1er novembre 2005, en application de l’article 28 des Règles de preuve et procédure de la Commission des relations du travail, le procureur de l’employeur dépose à la Commission les deux rapports du médecin expert, rédigés et signés par le Dr Yvan Comeau, soit l’« Expertise médicale orthopédique » du 8 septembre 2004 ainsi que le « Rapport complémentaire » du 14 octobre 2004, lequel dernier rapport est élaboré à la suite du visionnement des vidéocassettes de filature.

[74]           Les deux rapports du médecin expert sont également transmis, au même jour, au procureur du plaignant. Au fait, par le deuxième rapport du médecin expert de l’employeur, la partie plaignante se trouve conséquemment à être informée de l’existence d’une filature et de prise vidéo, ayant débuté dans les jours précédant la venue du plaignant au Casino en date du 29 septembre 2004.

[75]           Le 18 novembre 2005, à la première journée d’audience, après avoir témoigné, avoir entendu les détectives et avoir pris connaissance du contenu des vidéos, le plaignant sollicite avec approbation une remise d’audience, afin qu’il puisse consulter son médecin traitant. Il devait faire connaître ses intentions dans les deux semaines suivant cette audience.

[76]           Le 16 février 2006, après avoir réussi à contacter son médecin, il avise la Commission qu’il entend poursuivre l’audition de sa plainte, et ce, « sans médecin expert de son côté ». Ainsi, le Dr Mark Burman, orthopédiste, n’est pas produit par le plaignant lors de la deuxième et dernière journée d’audience, soit le 11 avril 2006.

Prétentions juridiques

[77]           L’employeur soumet essentiellement que le plaignant a fait défaut de satisfaire à deux ses obligations contractuelles. D’une part, en ne fournissant pas normalement sa prestation de travail pour laquelle ses services sont retenus, et ce, en s’absentant de son travail alors qu’il n’était plus invalide ou, à tout le moins, en négligeant de faire connaître ses limitations fonctionnelles pour un retour adapté à sa situation. D’autre part, en manquant à son obligation de loyauté envers l’employeur, lequel défraie en totalité les coûts des prestations d’assurance-invalidité qui lui sont versées.

[78]           Au soutien de ses prétentions, l’employeur fait valoir les « activités incompatibles » accomplies par le plaignant, alors que ce dernier attestait son incapacité de pouvoir revenir au travail, ainsi que les « manœuvres frauduleuses » déployées par celui-ci pour obtenir des prestations d’assurance-invalidité. La faute, selon l’employeur, est d’autant plus grave que le plaignant fait partie du personnel d’encadrement du Casino.

[79]           Le plaignant, tout en reconnaissant que c’est « à bon droit » que l’employeur l’a fait examiner par un orthopédiste expert, plaide qu’il n’est pas responsable du fait que son médecin traitant, le Dr Burman, n’a pas répondu à la demande de l’employeur cherchant à savoir s’il avait des limitations fonctionnelles. De plus, au lieu de le faire suivre par des enquêteurs, à la suite de l’expertise médicale du Dr Comeau, il fait valoir qu’on aurait dû d’abord le confronter aux conclusions de ce médecin expert et l’obliger à se présenter au travail. Enfin, il soumet que la peine imposée ne respecte pas la règle jurisprudentielle de la progression des sanctions et, au surplus, qu’elle n’est pas proportionnelle à la faute alléguée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

[80]           Le plaignant satisfait aux conditions d'exercice du recours prévu à l'article 124 de la Loi sur les normes du travail. Ainsi, l’employeur a le fardeau de convaincre que sa décision de mettre fin à son emploi s’explique par une cause juste et suffisante.

[81]           Sur le fond de la présente affaire, il convient de souligner que la doctrine en droit du travail reconnaît que l’exercice d’« activités incompatibles », avec l’« incapacité alléguée » par le salarié au soutien de son absence au travail, constitue une faute qui atteint le « lien de confiance ». En effet, par un tel comportement, le salarié « enfreint son obligation de loyauté en tentant de percevoir, par le subterfuge de fausses déclarations, des avantages auxquels son état de santé ne lui donne pas droit ». Il y est aussi reconnu qu’une telle faute, associée « à de la fraude », est jugée « très sévèrement » par les tribunaux. (Voir Les mesures disciplinaires et non disciplinaires dans les rapports collectifs du travail, Bernier, Blanchet, Granosik et Séguin. Éd. Yvon Blais, paragraphe 13.301.)

[82]           Toujours selon cette doctrine, ayant au surplus la propriété de systématiser une abondante jurisprudence sur la question, il y est aussi établi que, en matière d’« activités incompatibles avec l’invalidité alléguée, la preuve de l’employeur repose fréquemment sur la surveillance du salarié par des moyens électroniques tels que la vidéo », preuve « acceptée » sous condition par les tribunaux. (Voir ouvrage précité, paragraphe 13.302.)

[83]           À la lumière de ces principes, ressortissant de la doctrine et de la jurisprudence, qu’en est-il exactement dans la présente affaire?

[84]           Le 20 août 2003, après avoir confirmé à l’employeur qu’elle a bel et bien opéré le plaignant en date du 27 juin 2003, la Dre Martine Lévesque établit, dans son pronostic, que celui-ci serait en mesure de reprendre son travail à la fin de septembre 2003. Toutefois, à ce moment, parce que devant subir des traitements de physiothérapie, il ne se présente pas au travail.

[85]           Dès le 17 novembre 2003, tel qu’on peut le lire dans ses « Notes administratives », la conseillère Lucie Gladu amorce une série d’appels périodiques par lesquels elle s’enquiert rigoureusement, auprès du plaignant, de son état de santé et de la nature des traitements qui lui sont administrés. De plus, par ces appels, elle lui demande aussi de voir à ce que soient remplis et transmis à l’employeur des formulaires d’autorisation d’absence.

[86]           Le 3 mars 2004, alors que le plaignant est absent du travail depuis plus de huit mois et quoique le plaignant dise qu’il ne se souvient pas de cette communication téléphonique, la Commission retient que la conseillère Gladu lui a bel et bien téléphoné pour lui demander de voir à ce qu’il obtienne un certificat médical, sur lequel son médecin traitant ferait mention de ses « limitations fonctionnelles ». En effet, elle souhaite pouvoir lui confier un « travail allégé », tel qu’on le lit dans ses « Notes administratives ».

[87]           Cette communication téléphonique du 3 mars 2004 est importante. Certes, en droit du travail, la maladie constitue une cause d’absence légitime, sauf s’il s’agit d’une absence prolongée et chronique, pouvant dans certains cas justifier un employeur de procéder à un congédiement non disciplinaire ou administratif. De plus, au-delà du droit à l’égalité prévu à la Charte québécoise devant parfois impliquer une solution raisonnable d’accommodement, sans contrainte excessive, un employeur n’a pas l’obligation de devoir tailler sur mesure un emploi pouvant convenir à un salarié malade. Or, dans le présent cas, l’employeur est disposé à lui offrir un travail adapté et qui ne l’oblige pas à devoir marcher, le cas échéant, tel un travail de bureau.

[88]           À ce questionnement de l’employeur, concernant l’existence ou non de « limitations fonctionnelles » concrètement éprouvées, le plaignant n’y répond pas. Toutefois, environ trois semaines plus tard, il obtient une autre attestation d’absence, par laquelle le Dr Gouin confirme qu’il n’a pas discuté avec le plaignant d’un plan de retour au travail, avec ou sans restriction. De plus, le Dr Gouin atteste que l’absence au travail l’est pour une période d’une durée « indéterminée ».

[89]           Le 28 mai 2004, onze mois après l’absence au travail du plaignant pour cause de maladie, l’employeur, par son médecin-conseil en santé et sécurité du travail, le Dr Jacques Toupin, décide alors de s’adresser directement au médecin traitant du plaignant afin de connaître avec précision ses « limitations et sa capacité à effectuer certaines tâches ». Il est précisé au Dr Burman qu’Yves Laviolette est un cadre, au Casino, et que ce dernier pourra être assigné « à un travail adapté à sa condition ».

[90]           À cette requête de l’employeur, le Dr Burman n’y répond également pas. Mais, trois jours plus tard, soit le 31 mai 2004, celui-ci remet au plaignant un certificat médical attestant notamment qu’il est inapte à marcher et à demeurer assis pendant une longue période de temps. De plus, à l’instar du Dr Gouin, le Dr Burman atteste que l’absence au travail de ce dernier l’est bel et bien pour une période d’une durée « indéfinie ».

[91]           Le 3 septembre 2004, plus de quatorze mois après le premier jour d’absence du plaignant et suivant la recommandation du Dr Toupin, l’employeur, par la conseillère Gladu, confie le mandat à un médecin expert d’examiner le plaignant et, plus précisément, d’évaluer s’il est apte à accomplir « son emploi régulier » ou, à tout le moins, s’il est « en mesure d’effectuer un emploi en position assise ». Dans le contexte des attentes frustrées de l’employeur, relatives à ses demandes d’éclaircissement sur les « limitations fonctionnelles » du plaignant, un tel mandat s’explique et se comprend. 

[92]           L’expertise médicale orthopédique du 8 septembre 2004, réalisée par le Dr Yvan Comeau, contredit d’une manière nette et directe le certificat médical présenté par le plaignant en date du 31 mai 2004, sous la signature du Dr Burman. Même plus, de conclure le Dr Comeau dans son rapport : « ... je ne propose aucune limitation fonctionnelle ». Rappelons que, depuis le 3 mars 2004, l’employeur cherche à savoir ce qu’il en est exactement, à cet égard.

[93]           Considérant les rapports médicaux contradictoires, considérant que le médecin expert évalue que le plaignant n’est porteur à ce jour d’aucune « limitation fonctionnelle », considérant que le plaignant retire depuis près de quinze mois des prestations d’assurance-invalidité à la charge complète du Casino, l’employeur a donc des motifs réels et sérieux de soumettre ce dernier à une surveillance, au moyen de la filature et de la prise vidéo d’activités accomplies dans ses déplacements hors de sa résidence.

[94]           En outre, cette surveillance, selon la façon dont elle est décidée et mise en œuvre par l’employeur, respecte ces principes établis par la Cour d’appel du Québec, dans l’affaire Syndicat des travailleuses et travailleurs de Bridgestone / Firestone de Joliette (C.S.N.) c. Trudeau [1999] R.J.D.T. 10-75 (C.A.) :

En substance, bien qu’elle comporte une atteinte apparente au droit à la vie privée, la surveillance à l’extérieur de l’établissement peut être admise si elle est justifiée par des motifs rationnels et conduite par des moyens raisonnables, comme l’exige l’article 9.1 de la charte québécoise. ... L’employeur doit déjà posséder des motifs raisonnables avant de décider de soumettre son salarié à une surveillance. Il ne saurait les créer a posteriori, après avoir effectué la surveillance en litige. ...

Avant d’employer cette méthode, il faut cependant qu’il ait des motifs sérieux qui lui permettent de mettre en doute l’honnêteté du comportement de l’employé.

Au niveau du choix des moyens, il faut que la mesure de surveillance, notamment la filature, apparaisse comme nécessaire pour la vérification du comportement du salarié et que, par ailleurs, elle soit menée de façon la moins intrusive possible. Lorsque ces conditions sont réunies, l’employeur a le droit de recourir à des procédures de surveillance, qui doivent être aussi limitées que possible...

[95]           Or, l’enregistrement et la reproduction des images, résultant de la prise de vidéo alors que le plaignant est sous surveillance par des enquêteurs pendant sept jours, confirment avec force poids l’expertise médicale orthopédique du Dr Comeau.

[96]           Les vidéos révèlent que, en tout temps, dans ses déplacements, le plaignant marche avec aisance et agilité, comme toute personne non affligée par un problème à un genou. Il n’a pas de canne. Il ne boite pas. Il emprunte un escalier, sans tenir la rampe. Même plus, il entre dans sa voiture en portant et en faisant pivoter tout le poids de son corps sur sa jambe gauche, et ce, avec empressement et adresse. Enfin, cette jambe peut complètement s’étirer, sans aucune rigidité ou retenue.

[97]           Le 20 septembre 2004, moins de trois semaines après avoir été examiné par le médecin expert de l’employeur et alors même qu’il est à son insu sous surveillance étroite par des enquêteurs, le plaignant obtient un autre certificat médical établissant qu’il est incapable de marcher sans l’aide d’une canne et de demeurer assis longtemps. De plus, tout en ne pouvant déterminer à quel moment il pourra reprendre le travail, avec ou sans restriction, son médecin traitant, le Dr Burman, lui donne rendez-vous dans quatre mois, soit à la fin de janvier 2005. De telles prises vidéo, concomitantes à un tel certificat médical, requièrent certes des explications.

[98]           Le 29 septembre 2004, alors que le plaignant est absent pour cause d’invalidité alléguée depuis plus de quinze mois, les chefs de service Parent et Cérat le rencontrent au Casino, après l’avoir convoqué. Elles veulent le confronter avec ce qu’elles ont vu sur les vidéos, confirmant avec évidence l’analyse et les conclusions du médecin expert de l’employeur. Pour ce faire, afin que l’exposé du plaignant ne soit pas ajusté aux informations qu’elles détiennent et qu’elles ne lui livrent pas d’entrée de jeu, elles lui demandent d’abord de décrire sa situation concrètement vécue au moment présent.

[99]           La mise en scène du plaignant est dévastatrice. Une heure avant de se présenter au Casino, il se rend allègrement et sans canne à un dépanneur de sa municipalité. Arrivé au Casino, il boite et il s’appuie la plus part du temps sur sa canne. Au bureau de Brigitte Cérat, après s’être assis, il repose sa jambe sur sa canne. Il dit aux chefs de service présentes qu’il ne peut se déplacer « en tout temps » sans sa canne et qu’il est incapable de déplier son genou. De plus, il reconnaît avoir fait la démonstration comment il s’y prend pour entrer laborieusement dans sa voiture.

[100]       Certes, devant la Commission, le plaignant cherche à nier certaines affirmations qu’il a faites au médecin expert de l’employeur, le Dr Comeau, ainsi qu’aux chefs de service qui l’ont précisément rencontrer pour obtenir sa version des faits et dont le compte-rendu de leur entretien avec celui-ci est rédigé le jour même de leur rencontre.

[101]       Il n’y a pas lieu de reprendre chacun des éléments de la déposition du plaignant. Exemple : lorsqu’il nie avoir dit qu’il portait sa canne en tout temps ou à 99,9 % du temps, mais qu’il la portait plutôt à 80 % ou à 50 % du temps. Après avoir vu et entendu le plaignant, la Commission ne peut retenir ses déclarations ou ses explications, privées de toute force probante et crédible sur la balance des probabilités, et ce, notamment, en regard des raisons de se souvenir ou de ne pas se souvenir de tel ou tel fait passé.

[102]       Mais, il y a plus. Dix-sept jours avant la première journée d’audience devant la Commission, est transmise par l’employeur à la partie plaignante une copie des deux rapports du médecin expert, rédigés et signés par le Dr Yvan Comeau, soit l’« Expertise médicale orthopédique » du 8 septembre 2004 ainsi que le « Rapport complémentaire » du 14 octobre 2004, lequel dernier rapport est élaboré à la suite du visionnement des vidéocassettes de filature.

[103]       Or, tel que la Commission l’a décidé dans deux autres affaires distinctes et dont on peut s’inspirer du raisonnement suivi en faisant les adaptations requises, à partir du moment où un médecin expert mandaté par l’employeur conclut à l’aptitude au travail d’une personne salariée, dans le cas où l’expertise médicale paraît avoir été réalisée de façon « sérieuse » et « selon les règles de l’art », il revient à cette personne de se décharger du « fardeau de preuve » qui retombe alors sur ses épaules.

[104]       C’est ainsi que, dans le sillage d’une autre décision rendue en ce sens 
( 2005 QCCRT 0697 ), la Commission statue ce qui suit dans l’affaire Karine Lanouette c. Novartis Pharma Canada inc. ( 2006 QCCRT 0140 ) :

[74] La Commission est toujours d’avis que la communication des conclusions d’une expertise médicale apparaissant à première vue sérieuse et réalisée selon les règles de l’art opère un renversement du fardeau de la preuve sur les épaules du salarié absent, l’oblige à tout le moins à communiquer les résultats obtenus à son médecin traitant, afin que celui-ci puisse porter un jugement éclairé sur la situation et, s’il ne partage pas certaines des conclusions de l’expert, qu’il soit en mesure de s’en expliquer ou d’expliquer sa décision d’attendre l’opinion demandée à un autre expert, le cas échéant.

[105]       Dans le cas qui nous occupe, si on lit le mandat que la conseillère Lucie Gladu confie par télécopie au Dr Yvan Comeau, on constate le caractère objectif de sa requête, non teintée de considérations subjectives ou partiales pouvant influencer l’opinion du médecin expert en orthopédie.

[106]       Par ailleurs, lors de l’expertise médicale orthopédique du 8 septembre 2004, c’est le Dr Comeau lui-même qui s’enquiert auprès du plaignant de l’historique de sa blessure, des consultations médicales qu’il a effectuées et des certificats médicaux qu’il a obtenus.

[107]       Il ressort de la lecture intégrale du premier rapport de neuf pages du médecin expert que ce dernier a procédé avec méthode et rigueur. De plus, devant la Commission, le Dr Comeau a établi ses observations et son opinion de façon bien documentée et convaincante. Rappelons qu’un témoin expert est habilité à exprimer son opinion à partir des faits prouvés. Cependant, le tribunal n’est pas nécessairement lié par le témoignage de l’expert entendu.

[108]       Il convient également de dire un mot sur la façon dont l’employeur a géré cette délicate affaire, mettant en cause un de ses cadres. Ce qui frappe d’emblée, c’est qu’il n’a pas agi avec précipitation. Rien ne laisse croire qu’il voulait prendre avantage de la situation pour se débarrasser du plaignant. Au contraire! Dès le 3 mars 2004, plus de sept mois avant le congédiement de ce dernier, l’employeur tente de connaître ses « limitations fonctionnelles » afin de pouvoir lui confier un travail adapté à sa situation.

[109]       On ne peut malheureusement pas en dire autant du plaignant. Quoiqu’il veuille bien le nier, il paraît vraisemblable, lors de ses consultations avec ses différents médecins traitants, y compris avec le médecin expert de l’employeur, qu’il ait amplifié ses symptômes et présenté un tableau de la situation non conforme avec la réalité concrètement vécue et ressentie par lui dans le quotidien de tous les jours. En ce sens, cet élément d’analyse du Dr Comeau l’emporte, de façon prépondérante, en faveur des prétentions de l’employeur : « Suite à mon analyse aujourd’hui, il se dégage une impression de discordance importante entre la réalité fonctionnelle de ce genou et les manifestations douloureuses de monsieur Laviolette à l’examen. »

[110]       L’employeur a réussi à procéder à un renversement du fardeau de preuve à la charge du plaignant, par l’établissement de la preuve sérieuse, rigoureuse et prépondérante présentée par son médecin expert, laquelle est fort bien appuyée par le comportement factuel et filmé du plaignant durant une période significative. Pour sa part, après qu’il ait eu l’occasion de prendre connaissance des deux rapports de ce médecin expert transmis à son procureur et de visionner avant le début de l’audience les vidéos résultant d’une filature dont il a été objet, le plaignant n’a pas réussi à repousser ou à contredire, par ses seules explications dépourvues de force probante, cette preuve de poids offerte par l’employeur.

[111]       Ainsi, en l’espèce, il convient de conclure que le droit l’emporte de façon prépondérante en faveur des prétentions de l’employeur. En effet, la Commission n’a d’autres choix que d’inférer, de l’ensemble des faits établis par la preuve, que le plaignant s’est bel et bien livré à des « activités incompatibles » avec le diagnostic de son médecin traitant.

[112]       Ne présentant pas un degré de sévérité de problème à son genou gauche pouvant le rendre tout à fait inapte au travail et profitant illicitement dans le contexte de prestations d’assurance-invalidité auxquelles il n’avait assurément pas droit, le plaignant a violé ses obligations contractuelles ainsi que ses engagements pris au moment de son embauche.

[113]       Ainsi, étant donné la gravité de la faute commise, l’employeur, dans les circonstances, était justifié de rompre la relation d’emploi le liant avec le plaignant, un de ses cadres, pour bris irrémédiable du lien de confiance.

EN CONSÉQUENCE, la Commission des relations du travail

REJETTE                      la plainte.  

 

 

__________________________________

Paul Dufault

 

Me Marc Beaudry

POIRIER, RIVEST, FRADETTE

Représentant du plaignant

 

Me Jean Leduc

loranger marcoux

Représentant de l’intimée

 

 

Date de la dernière audience :

11 avril 2006

 

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