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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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RÉGION : |
LAURENTIDES |
MONTRÉAL, le 20 novembre 2001 |
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DOSSIER : |
142200-64-0006-RC |
DEVANT LA COMMISSAIRE : |
Lucie Landriault, avocate |
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ASSISTÉE DES MEMBRES : |
Jean E. Boulais, |
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Associations d’employeurs |
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Denis Beaudin, |
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Associations syndicales |
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DOSSIER CSST : |
105443592 |
AUDIENCE TENUE LE : |
18 octobre 2001 |
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À : |
Saint-Jérôme |
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DÉCISION CORRIGÉE RELATIVE À UNE REQUÊTE PRÉSENTÉE EN VERTU DE L'ARTICLE 429.56 DE LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES (L.R.Q., chapitre A-3.001) |
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DIANE LAURIN |
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PARTIE REQUÉRANTE |
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CENTRE HOSPITALIER LAURENTIEN |
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PARTIE INTÉRESSÉE |
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COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL |
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PARTIE INTERVENANTE |
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DÉCISION CORRIGÉE
[1] La décision du 8 novembre 2001 contient une erreur de date dans son dispositif.
[2] La décision est donc corrigée de façon à lire dans le dispositif :
DÉCLARE que madame Diane Laurin était capable le 18 août 1999, malgré ses nouvelles limitations fonctionnelles attribuables à l’aggravation de sa lésion professionnelle le 23 mars 1999, d’exercer l’emploi convenable d’adjointe administrative préalablement identifié.
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Me Lucie Landriault |
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Commissaire |
Lavery, De
Billy (Me Carl
Lessard) |
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Représentant de la partie intéressée |
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Panneton,
Lessard (Me Lucille
Giard) |
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Représentante
de la partie intervenante |
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DÉCISION
[1] Le 25 mai 2001, la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête en révision en vertu de l'article 429.56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001) (la Loi), à l'encontre d'une décision rendue le 25 avril 2001 par la Commission des lésions professionnelles.
[2] Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles accueille la requête de madame Diane Laurin à l’encontre de la décision du 5 juin 2000 rendue par la CSST à la suite d’une révision administrative. La Commission des lésions professionnelles infirme la décision du 5 juin 2000 et déclare que la travailleuse est incapable le 18 août 1999 d’occuper l’emploi convenable d’adjointe administrative. La Commission des lésions professionnelles retourne le dossier à la CSST pour que soit déterminé un nouvel emploi convenable en tenant compte de la capacité résiduelle complète de la travailleuse, notamment ses problèmes de vision reliés à une rétinopathie diabétique.
[3] À l’audience du 18 octobre 2001, la CSST est représentée. La travailleuse est présente. Le Centre Hospitalier Laurentien (l’employeur) n'est pas représenté.
L'OBJET DE LA REQUÊTE
[4] La CSST demande à la Commission des lésions professionnelles de réviser la décision rendue le 25 avril 2001 par la Commission des lésions professionnelles et de déclarer que la travailleuse est demeurée capable, malgré les limitations fonctionnelles supplémentaires reliées à une aggravation du 23 mars 1999, d’exercer l’emploi convenable d’adjointe administrative préalablement retenu pour elle le 14 septembre 1998.
[5] La CSST soutient que la décision du 25 avril 2001 est entachée d’un vice de fond s’apparentant à une erreur de droit manifeste en ce que la Commission des lésions professionnelles conclut qu’elle a l’obligation de tenir compte, lors de l’évaluation de la capacité de la travailleuse à refaire l’emploi d’adjointe administrative, des limitations fonctionnelles ou séquelles découlant de sa condition personnelle de rétinopathie diabétique.
[6] Selon la CSST, la Commission des lésions professionnelles devait analyser la capacité de la travailleuse à exercer l’emploi convenable prédéterminé en fonction des nouvelles limitations fonctionnelles découlant de sa lésion professionnelle (en vertu des articles 169 et 203 de la Loi) et non en fonction de la capacité résiduelle globale de la travailleuse comme c'est le cas lors de la détermination d'un emploi convenable.
[7] Ce n’est que dans le cas où les limitations fonctionnelles résultant de la lésion professionnelle empêchent un travailleur de reprendre l’emploi convenable déjà déterminé qu’il devient nécessaire de déterminer un nouvel emploi convenable, et donc de choisir celui-ci en tenant compte de toutes les limitations personnelles ou professionnelles qui affectent un travailleur (article 170). Il ressort de la Loi, et notamment des articles 148, 151, 168 et 169, que la réadaptation est étroitement liée aux limitations fonctionnelles découlant d’une lésion professionnelle.
[8] La jurisprudence citée par la Commission des lésions professionnelles dans sa décision du 25 avril 2001 est non pertinente puisqu'elle se rapporte à des cas relatifs à la détermination d'un emploi convenable.[1]
[9] La jurisprudence qui traite de la capacité d'un travailleur à exercer à nouveau son emploi ou un emploi convenable préalablement déterminé après l'ajout de limitations fonctionnelles retenues en conséquence d'une rechute, n'est pas au même effet[2]. Dans ce cas, seules les nouvelles limitations fonctionnelles doivent être analysées pour établir si elles empêchent le travailleur d'exercer l'emploi convenable préalablement identifié.
[10] L’erreur de la Commission des lésions professionnelles est déterminante dans la mesure où, n’eût été de cette erreur, elle aurait conclu que la travailleuse était capable d’exercer l’emploi d'adjointe administrative puisque au paragraphe [31] de sa décision, la Commission des lésions professionnelles reconnaît qu’elle ne possède aucune preuve à l’effet que les limitations émises par le médecin traitant empêchent la travailleuse d’exercer cet emploi.
[11] Puisque la Commission des lésions professionnelles devra rendre la décision qui aurait dû être rendue et qu’elle devra se prononcer sur le droit de la travailleuse aux indemnités de remplacement du revenu, la CSST soutient que la travailleuse a droit à l’indemnité seulement jusqu’au 7 février 2000 et non à une année complète à titre d’année de recherche d’emploi en vertu de l’article 49. La CSST appuie ses prétentions sur l’affaire Fex et Cartonniers Vallée et fils ltée[3].
[12] Pour sa part, la travailleuse soutient qu'elle a bénéficié de la réadaptation à la suite de sa lésion à l'épaule gauche, et qu'elle devrait avoir droit à la réadaptation pour la lésion à l'épaule droite puisqu'il s'agit de deux dossiers différents.
[13] De plus, la travailleuse soulève que ses problèmes de vision, bien qu’ils ne l’empêchaient pas d’exercer l’emploi convenable en 1998, avaient commencé dès 1996. Enfin, elle a eu des problèmes à l’épaule gauche durant ses cours de mars à septembre 1999.
LES FAITS
[14] Le 25 avril 1993, la travailleuse subit une lésion professionnelle de la nature d’une capsulite à l’épaule droite alors qu’elle occupe un emploi de préposée aux bénéficiaires. En conséquence de cette lésion professionnelle, elle présente une atteinte permanente à l’intégrité physique de 9,2% et des limitations fonctionnelles qui ne l’empêchent pas de reprendre son emploi habituel de préposée aux bénéficiaires.
[15] Le 12 septembre 1996, la travailleuse subit une lésion professionnelle de la nature d’une capsulite à l’épaule gauche. Elle présente une atteinte permanente à l’intégrité physique de 23,50% et des limitations fonctionnelles qui l’empêchent de reprendre son emploi.
[16] Le 15 mai 1998, la CSST rend une décision dans laquelle elle détermine pour la travailleuse un emploi convenable d’adjointe administrative qu'elle pourra exercer après avoir suivi un cours d’actualisation en bureautique du mois de mars 1998 au mois de septembre 1998. Cette décision n’est pas contestée.
[17] Le 14 septembre 1998, à la fin des cours en bureautique, la CSST rend une décision dans laquelle elle déclare que la travailleuse est capable d’occuper l’emploi convenable d’adjointe administrative. Elle lui accorde une année de recherche d’emploi compte tenu que l’emploi n’est pas disponible. La travailleuse conteste cette décision mais se désiste ultérieurement de sa contestation. Elle n'a pas occupé cet emploi ni aucun autre emploi.
[18] Le 23 mars 1999, la travailleuse subit une aggravation de sa lésion professionnelle sous la forme d’une arthrolyse et acromioplastie à l’épaule droite. Son médecin lui donne des limitations fonctionnelles supplémentaires. Il ajoute que la travailleuse a des problèmes de vision de plus en plus importants reliés à une rétinopathie diabétique qui font qu’aujourd’hui elle est incapable de faire un travail de bureau.
[19] Le 18 août 1999, la CSST déclare que la travailleuse est capable, malgré ses nouvelles limitations fonctionnelles, de refaire l’emploi convenable préalablement déterminé d’adjointe administrative. La CSST lui accorde des indemnités de remplacement du revenu du 18 août 1999 au 7 février 2000, période qui représente la période de recherche d’emploi non-utilisée (soit cinq mois et demi correspondant initialement à la période du 23 mars 1999 au 14 septembre 1999). Le 5 juin 2000, dans le cadre d’une révision administrative, la CSST confirme la décision du 18 août 1999, d'où la requête de la travailleuse devant la Commission des lésions professionnelles.
[20] Dans sa décision du 25 avril 2001, la Commission des lésions professionnelles infirme la décision de la CSST et déclare :
[29] La Commission des lésions professionnelles est consciente que, dès 1998, est déterminé un emploi convenable découlant de la lésion survenue le 12 septembre 1996, eu égard aux limitations fonctionnelles fixées en décembre 1997, concernant l’épaule gauche.
[30] Par ailleurs, il est à noter que la récidive, rechute ou aggravation acceptée en 1999 concerne l’épaule droite. Ainsi, les nouvelles limitations fonctionnelles fixées par le docteur Dion à l’épaule droite ne concernent pas le même siège de lésion pour lequel fût déterminé l’emploi convenable.
[31] Malgré cet impair, la Commission des lésions professionnelles constate qu'aucune preuve ne lui est formulée de la part de la travailleuse à l’effet que les limitations fonctionnelles déterminées par la docteur Dion, le 2 août 1999, dans son Rapport d’évaluation médicale et concernant l’épaule droite, l’empêchant d’effectuer l’emploi d’adjointe administrative.
[32] Le litige repose davantage sur la condition visuelle de la travailleuse découlant d’une rétinopathie diabétique. En effet, tel que consigné aux notes évolutives de la CSST du 18 août 1999, la CSST soutient qu’il ne lui appartient pas de réparer les conséquences d’une condition personnelle qui se présente une fois amorcée la mise en œuvre du plan individualisé de réadaptation.
[33] Eu égard à cet argument, la Commission des lésions professionnelles estime que la CSST ne peut soutenir celui-ci en soumettant que le processus de réadaptation était déjà mis en œuvre. Outre le fait qu’il ne s’agit pas de la même épaule, la Commission des lésions professionnelles constate au surplus que, puisqu’il y a eu augmentation du déficit anatomo-physiologique et des limitations fonctionnelles découlant d’une récidive, rechute ou aggravation survenue en mars 1999, la travailleuse, tel qu’il appert des notes évolutives de la CSST, est à nouveau admise en réadaptation. À ce moment, il y a lieu de reprendre, dans son ensemble, le processus d’évaluation et de réadaptation. Certes, un processus avait été mis en œuvre en 1998 pour une lésion à l’épaule gauche au cours de laquelle, la travailleuse a subi une rechute. Mais, puisque qu’il y a eu de nouvelles limitations fonctionnelles, ce processus cesse et il y avait lieu de reprendre à ce moment le processus en entier. Il ne s’agit donc pas d’un processus déjà en cours, mais bien d’un nouveau à amorcer.
[34] La Commission des lésions professionnelles constate qu’aucune étude d’évaluation de la capacité résiduelle de la travailleuse n’a été entreprise par la CSST pour la détermination de l’emploi convenable. Tel que souligné précédemment, il appert que la CSST demeure davantage préoccupée par la condition personnelle de la travailleuse et considère que l’augmentation des limitations fonctionnelles n’empêche pas celle-ci d’exercer l’emploi convenable déjà déterminé.
[21] Le commissaire, s'appuyant sur plusieurs causes de jurisprudence, conclut que la CSST devait tenir compte de la condition personnelle de la travailleuse « dans la nouvelle détermination de l'emploi convenable découlant d'une nouvelle rechute survenue le 22 mars 1999 ». Il retourne le dossier à la CSST afin que soit déterminé un nouvel emploi convenable qui tiendra compte de la capacité résiduelle totale de la travailleuse.
L'AVIS DES MEMBRES
[22] Les membres issus des associations d'employeurs et syndicales sont d’avis que la décision du 25 avril 2001 est entachée d’une erreur manifeste et déterminante équivalent à un vice de fond. En effet, la Commission des lésions professionnelles devait déterminer la capacité de la travailleuse à exercer l'emploi d'adjointe administrative en tenant compte uniquement de ses nouvelles limitations fonctionnelles et non de sa capacité résiduelle globale.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[23] La Commission des lésions professionnelles doit décider s'il y a lieu de réviser la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles le 25 avril 2001.
[24] Le pouvoir de révision ou de révocation d'une décision est prévu à l'article 429.56 de la Loi qui énonce les motifs spécifiques donnant ouverture à une requête en révision. Cet article se lit ainsi:
429.56 La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu:
1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;
2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;
3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.
Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut
être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.
____________________
1997, c. 27, a. 24.
[25] La jurisprudence des tribunaux supérieurs et de la Commission des lésions professionnelles a déterminé que les termes « vice de fond ou de procédure de nature à invalider la décision » doivent s'interpréter dans le sens d'une erreur manifeste de droit ou de fait ayant un effet déterminant sur l'issue de la contestation[4].
[26] Or, le recours en révision ou en révocation est exceptionnel dans la mesure où l'article 429.29 de la Loi stipule qu'une décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel.
[27] Dans le présent cas, la Commission des lésions professionnelles considère qu’il y a ouverture à la révision puisque la décision du 25 avril 2001 est entachée d’une erreur manifeste en droit, déterminante sur l’issue du litige.
[28] Dans sa décision du 25 avril 2001, la Commission des lésions professionnelles s'est demandé si la capacité résiduelle de la travailleuse, incluant ses problèmes de vision de nature personnelle, lui permettait d'effectuer l'emploi convenable.
[29] La Commission des lésions professionnelles devait plutôt se demander si la travailleuse demeurait capable, malgré les limitations fonctionnelles supplémentaires résultant de l’aggravation à l’épaule droite du 23 mars 1999, d’exercer l’emploi convenable préalablement identifié. C’est ce qui ressort de la Loi et notamment des articles 166, 168 et 169 qui se lisent comme suit:
166.
La réadaptation professionnelle a pour but de faciliter la réintégration du
travailleur dans son emploi ou dans un emploi équivalent ou, si ce
but ne peut être atteint, l'accès à un emploi convenable.
________
1985, c. 6, a. 166.
[….]
168. Le travailleur qui, en raison de sa lésion professionnelle, a besoin de mettre à jour ses connaissances pour redevenir capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent peut bénéficier d'un programme de recyclage qui peut être réalisé, autant que possible au Québec, en établissement d'enseignement ou en industrie.
________
1985, c. 6, a. 168; 1992, c. 68, a. 157.
169. Si le travailleur est incapable d'exercer son emploi en raison d'une limitation fonctionnelle qu'il garde de la lésion professionnelle dont il a été victime, la Commission informe ce travailleur et son employeur de la possibilité, le cas échéant, qu'une mesure de réadaptation rende ce travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent avant l'expiration du délai pour l'exercice de son droit au retour au travail.
Dans ce cas, la Commission prépare et met en
œuvre, avec la collaboration du travailleur et après consultation de
l'employeur, le programme de réadaptation professionnelle approprié, au terme
duquel le travailleur avise son employeur qu'il est redevenu capable d'exercer son
emploi ou un emploi équivalent.
________
1985, c. 6, a. 169.
[30] À l’opposé, lorsqu’il s’agit de déterminer un emploi convenable, ce sont les articles 170 et 2 qui s’appliquent. L’emploi convenable doit alors être déterminé en fonction de la capacité résiduelle d’un travailleur.
170. Lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut rendre le travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent, la Commission demande à l'employeur s'il a un emploi convenable disponible et, dans l'affirmative, elle informe le travailleur et son employeur de la possibilité, le cas échéant, qu'une mesure de réadaptation rende ce travailleur capable d'exercer cet emploi avant l'expiration du délai pour l'exercice de son droit au retour au travail.
Dans ce cas, la Commission prépare et met en œuvre, avec la collaboration du travailleur et après consultation de l'employeur, le programme de réadaptation professionnelle approprié, au terme duquel le travailleur avise son employeur qu'il est devenu capable d'exercer l'emploi convenable disponible.
________
1985, c. 6, a. 170.
article 2. :
[...]
« emploi convenable » : un emploi approprié qui permet au travailleur victime d'une lésion professionnelle d'utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, qui présente une possibilité raisonnable d'embauche et dont les conditions d'exercice ne comportent pas de danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion.
(le souligné est de la soussignée)
[31] La Commission des lésions professionnelles considère, en accord avec la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles et de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles, que les dispositions prévues aux articles 166, 168 et 169 qui ont trait à la capacité d'un travailleur de refaire son emploi s'appliquent, en faisant les adaptations requises, à la capacité d'un travailleur à exercer un emploi convenable préalablement déterminé[5]. C’est donc en fonction de ces articles de la Loi que la Commission des lésions professionnelles devait analyser la capacité de la travailleuse, et non en fonction de la définition de l’emploi convenable prévue à l’article 2.
[32] En effet, dans les affaires Leblond et CSST, et Construction Del-Nor inc. et Malboeuf, soumises par la CSST, la Commission d'appel a conclu qu'il s'agissait d'une erreur justifiant la révision que de réévaluer la capacité globale d'un travailleur lorsqu’il s’agit de se prononcer sur sa capacité à exercer un emploi convenable préalablement déterminé. À la suite d'une augmentation des limitations fonctionnelles, il faut évaluer uniquement si les limitations fonctionnelles supplémentaires empêchent un travailleur d'exercer l'emploi convenable prédéterminé. Le commissaire Bertrand Roy dans l'affaire Leblond rappelle, dans ce contexte, que la détermination d’un emploi convenable, et, par le fait même, l'évaluation de la capacité globale, est l’étape ultime du processus de réadaptation.
[33] Dans sa décision du 25 avril 2001, le premier commissaire s'appuie aux paragraphes [35] à [38] sur une jurisprudence élaborée en matière de détermination d'un emploi convenable. Le tribunal devait dans ce contexte tenir compte, non seulement des limitations fonctionnelles découlant de la lésion professionnelle mais aussi des incapacités personnelles, pour décider si le travailleur était capable d’exercer l'emploi convenable. Ces causes ne sont donc pas pertinentes pour la solution du litige.
[34] Deux seules des décisions que le premier commissaire cite sont pertinentes. En effet, dans les affaires Bissonnette (paragraphe [38] de la décision du 25 avril 2001) et Benoît (paragraphe [39]), le tribunal devait décider de la capacité d'un travailleur à exercer l’emploi convenable préalablement déterminé après l'ajout de nouvelles limitations fonctionnelles attribuables à la lésion professionnelle. Or, ces causes sont mal rapportées par le premier commissaire puisqu'elles disent le contraire de ce qu'il leur fait dire.
[35] En effet, le premier commissaire cite un court extrait de l’affaire Bissonnette dans lequel le tribunal pose le problème quant à la règle à appliquer. Il aurait été utile qu'il rapporte les paragraphes suivants de la décision Bissonnette puisque le tribunal y concluait qu'il ne doit pas tenir compte de limitations fonctionnelles sans lien avec la lésion professionnelle pour décider de la capacité d'un travailleur à exercer un emploi convenable préalablement identifié.
[36] De même, dans l'affaire Benoît, dans l'analyse de la capacité à exercer, après la survenance d’une rechute, un emploi convenable préalablement identifié, le tribunal a conclu qu'il ne doit pas être tenu compte des limitations d'ordre personnel qui sont apparues après la détermination de l'emploi convenable préalablement déterminé. Or, c’est ce que le premier commissaire a fait dans sa décision du 25 avril 2001 en tenant compte de la rétinopathie de la travailleuse qui est devenue incapacitante après la détermination de l’emploi convenable en 1998.
[37] La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision conclut que la décision du 25 avril 2001 est entachée d'une erreur en droit manifeste puisque le commissaire a analysé l'affaire en fonction de règles de droit qui étaient inapplicables au cas sous étude.
[38] Cette erreur est déterminante dans la mesure où, si le premier commissaire n'avait pas tenu compte de la condition personnelle de rétinopathie de la travailleuse, il aurait conclu que les nouvelles limitations fonctionnelles en conséquence de la rechute du 23 mars 1999 ne l'empêchent pas d'exercer l'emploi convenable préalablement identifié. C'est en effet ce qui ressort du paragraphe [31] de sa décision où il précise qu'aucune preuve n'est apportée par la travailleuse pour conclure que ses nouvelles limitations fonctionnelles l'empêchent d'effectuer l'emploi d'adjointe administrative. Il ressort aussi des paragraphes [40] à [42] que sa décision est fondée sur l'incapacité de la travailleuse en regard de sa rétinopathie.
[39] La Commission des lésions professionnelles ne retient pas les prétentions de la travailleuse selon lesquelles elle avait droit à la détermination d’un emploi nouvel convenable à la suite de sa lésion à l’épaule droite puisque la détermination de l’emploi d’adjointe administrative avait été faite en conséquence d’une autre lésion, soit une lésion à l’épaule gauche et qu'il s’agit de deux dossiers différents. Bien que le premier commissaire dans sa décision du 25 avril 2001 semble avoir voulu considérer cet élément alors qu'il écrit au paragraphe [31] de sa décision « Malgré cet impair », et au paragraphe [33], « outre le fait qu'il ne s'agit pas de la même épaule », il ne se prononce pas comme tel sur cette question et n'apporte aucun motif.
[40] Or, la commissaire soussignée ne voit pas en vertu de quelle disposition de la Loi ni de quel principe un travailleur pourrait avoir droit à nouveau à l'évaluation de sa capacité résiduelle globale lorsqu'il se blesse à un site différent. La Loi prévoit qu'à la suite d'une lésion professionnelle, le travailleur peut avoir droit à des mesures de réadaptation s'il n'est pas capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent (ou en l’occurrence, l’emploi convenable prédéterminé), et que, lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut le rendre capable, il y alors lieu d'envisager un emploi convenable. Ces règles s'appliquent sans égard au site de la lésion.
[41] Enfin, comme le soulève la CSST, au moment de la détermination de l'emploi convenable en 1998, la CSST a considéré la rétinopathie de la travailleuse mais celle-ci ne l'empêchait pas alors d'exercer l'emploi convenable d'adjointe administrative. C'est d'ailleurs ce que souligne le commissaire dans sa décision du 25 avril 2001 aux paragraphes [41] et [42].
[42] En dernier lieu, puisque la Commission des lésions professionnelles doit rendre la décision qui aurait dû être rendue, elle doit se prononcer sur le droit aux indemnités de la travailleuse.
[43] L’article 49 de la Loi prévoit :
49. Lorsqu'un travailleur incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle devient capable d'exercer à plein temps un emploi convenable, son indemnité de remplacement du revenu est réduite du revenu net retenu qu'il pourrait tirer de cet emploi convenable.
Cependant, si cet emploi convenable n'est pas disponible, ce travailleur a droit à l'indemnité de remplacement du revenu prévue par l'article 45 jusqu'à ce qu'il occupe cet emploi ou jusqu'à ce qu'il le refuse sans raison valable, mais pendant au plus un an à compter de la date où il devient capable de l'exercer.
L'indemnité prévue par le deuxième alinéa est réduite de tout montant versé au travailleur, en raison de sa cessation d'emploi, en vertu d'une loi du Québec ou d'ailleurs, autre que la présente loi.
________
1985, c. 6, a. 49.
[44] La jurisprudence a établi que lorsqu’un travailleur fait une rechute, récidive ou aggravation alors qu’il est en période de recherche d’emploi, cette période est suspendue (et les indemnités qui y correspondent), et recommence à courir lorsque le travailleur redevient capable d’exercer son emploi.
[45] La soussignée se dit d’accord avec cette interprétation élaborée dans l’affaire Fex précitée. Il y a donc lieu de confirmer la décision de la CSST selon laquelle la travailleuse a droit aux indemnités de remplacement du revenu du 18 août 1999 au 7 février 2000, et non pour une année complète. À compter du 8 février 2000 elle a droit à l’indemnité de remplacement du revenu réduite.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête en révision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail en vertu de l’article 429.56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles;
RÉVISE la décision de la Commission des lésions professionnelles du 25 avril 2001;
CONFIRME la décision du 5 juin 2000 rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que madame Diane Laurin était capable le 18 octobre 1999, malgré ses nouvelles limitations fonctionnelles attribuables à l'aggravation de sa lésion professionnelle le 23 mars 1999, d'exercer l'emploi convenable d'adjointe administrative préalablement identifié.
DÉCLARE que madame Diane Laurin a droit à l’indemnité de remplacement du revenu du 18 août 1999 au 7 février 2000, et, à compter du 8 février 2000, à une indemnité de remplacement du revenu réduite.
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Me Lucie Landriault |
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Commissaire |
Lavery, De
Billy (Me Carl
Lessard) |
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Représentant de la partie intéressée |
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Panneton,
Lessard (Me Lucille
Giard) |
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Représentante
de la partie intervenante |
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1
Drouin et Planches de Gypse Roy Inc., 35062-03-9112, le 26 août 1993, G. Godin; Tremblay et
Coffrages C.C.C. Ltée, [1995] C.A.L.P. 771;
Tremblay et CSST, 51626-02-9306, le 11 août 1995, M. Carignan; Silva et
Vêtements Sport John Tomaras, 103811-71-9807, le 24 août 1999, R. Brassard;
Kattouf et Banque Nationale du Canada, 125261-73-9910, le 27 novembre 2000, C.-A. Ducharme; Messina et Pavages Scott Inc., 139161-73-0005, le 20 décembre
2000, H. Rivard; Audet et Maranda &
Labrecque Ltée, 127169-32-9911, le 5 septembre 2000, G. Tardif; Gasbaro et Aluminium Welding Ltée, 135506-71-0004,
le 21 mars 2001, J.-C. Danis; Bissonnette
et Bissonnette & Bissonnette, 145944-03B-0009, le 2 mars 2001, M.
Cusson; Antonio et CSST, 53332-60-9208, le 9 mai 1996, M. Carignan; William et Global Drivers Service, 66813-60-9502, le 17 février 1997, M.
Zigby; Tremblay et Coffrages C.C.P. Ltée, précité; Benoît et Contrôleur Genico Ltée, 136652-71-0004, le 18 novembre 2000, A.
Suicco.
[2] Leblond et CSST, C.A.L.P.
A70019-03B-9506, le 8 janvier 1998, B. Roy accueillant une requête en révision
pour cause; Construction Del-Nor inc. et
Malboeuf, [1996] C.A.L.P. 1606
C.A.L.P. 1006; Fex et Cartonniers Vallée et fils Ltée, C.A.L.P.
53541-64-9306, 22 août 1995, L. Thibault, déposées par la CSST.
[3]
Voir
note 2.
[4]
Produits forestiers Donohue inc. et
Villeneuve
[1998] C.L.P. 733
; Franchellini et Fernando Sousa
[1998] C.L.P. 783
.
[5]
Voir
note 2
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.