Desrochers et Centre Bell |
2012 QCCLP 2142 |
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[1] Le 3 janvier 2011, monsieur Pierre Desrochers (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision rendue le 23 novembre 2010 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision en révision, la CSST confirme en partie celle qu’elle a initialement rendue le 7 juillet 2010 à l’effet que des sommes ont été versées en trop au travailleur entre le 10 mai 2010 et le 1er juillet 2010 en raison de son retour au travail progressif.
[3] À l’audience, le travailleur était présent. Le Centre Bell (l’employeur) était absent. Il avait informé le tribunal de son absence et fait parvenir, avant l’audience, un relevé des heures travaillées par le travailleur pour la période en litige
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision du 23 novembre 2010 au motif que la CSST doit tenir compte, non pas des heures réellement travaillées, mais d’une journée normale de travail pour la réduction de son indemnité de remplacement du revenu.
L’AVIS DES MEMBRES
[5]
Le membre issu des associations d’employeurs ainsi que la membre issue
des associations syndicales sont d’avis que la requête du travailleur doit être
rejetée. Ils retiennent la jurisprudence majoritaire du tribunal à l’effet que
l’article
LES FAITS ET LES MOTIFS
[6] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si la CSST est bien fondée de soustraire de l’indemnité de remplacement du revenu du travailleur les heures qu’il a travaillées en retour au travail progressif.
[7] Le travailleur occupe un emploi de chef accessoiriste et de technicien chez l’employeur lorsqu’il est victime d’un accident du travail le 7 avril 2010. À cette date, il fait une chute et se frappe la tête contre le sol. Sa réclamation est acceptée le 17 mai 2010 en raison d’un diagnostic d’amnésie rétrograde.
[8] La CSST fut avisée que le travailleur avait repris son travail, en retour au travail progressif, le 10 mai 2010.
[9] Selon l’information fournie par l’employeur au tribunal, le travailleur a repris le travail dès le 4 mai 2010.
[10] Le retour au travail est autorisé par le médecin qui prévoit un retour au travail à deux jours par semaine à compter du 10 mai 2010 et à trois jours par semaine, à compter du 17 mai 2010.
[11] Le 26 mai 2010, le médecin prévoit toujours un retour au travail progressif, mais seulement à deux jours par semaine. Le 15 juin suivant, il prévoit un retour au travail à trois jours par semaine, mais pour un maximum de huit heures par jour.
[12] Lors de son témoignage à l’audience, le travailleur considère qu’on a réduit son indemnité de remplacement du revenu de façon excessive puisque la CSST a soustrait toutes les heures réellement travaillées. Le travailleur explique que son travail prélésionnel est un travail qui l’appelle à travailler parfois jusqu’à 20 heures par jour. En effet, lorsqu’il a repris le travail en retour progressif, il a travaillé des journées excédant huit heures à plusieurs reprises. Il soumet un tableau à l’appui de sa position. Il prétend que la CSST doit réduire son indemnité de remplacement du revenu de deux jours d’indemnité, s’il a travaillé deux jours. Puisque son indemnité de remplacement du revenu est de 107,94 $ par jour, c’est ce montant, pour chaque journée travaillée, qui doit être soustrait de son indemnité de remplacement du revenu.
[13] La Commission des lésions professionnelles ne peut retenir la position du travailleur.
[14] En effet, la jurisprudence du tribunal retient de façon majoritaire que le retour au travail progressif, dans l’emploi prélésionnel, entraîne l’application de l’article 52 de la loi[2].
[15]
Cette jurisprudence est à l’effet qu’un travailleur qui a droit à une
indemnité de remplacement du revenu, alors qu’il perçoit un revenu de son
emploi qu’il a progressivement réintégré, voit son indemnité réduite en
application de l’article
[16]
L’application de cet article
[17] Le travailleur qui est en retour progressif dans son emploi ne doit pas être traité différemment des autres travailleurs qui reçoivent une indemnité de remplacement du revenu. À ce sujet, le tribunal s’exprime comme suit dans l’affaire Hamel et Sobey’s Québec inc.[5] :
[26] Aucune disposition de la loi ne prévoit
spécifiquement le cas du retour au travail à temps partiel d’un travailleur.
Pourtant dans les faits, il s’agit d’une mesure souvent prescrite par les
médecins. Le législateur ne peut avoir voulu que l’on cumule alors un salaire
et une pleine indemnité de remplacement du revenu. D’ailleurs ce n’est pas ce
que le travailleur prétend. Devant cette situation, il semble ressortir que la
seule disposition pouvant recevoir application est l’article
[27] En conséquence, la Commission des lésions professionnelles conclut que l’indemnité de remplacement du revenu du travailleur devait être réduite de son revenu net d’emploi et que le calcul effectué par la CSST est conforme.
[18] La décision dont est saisi le présent tribunal concerne des sommes qui auraient été versées en trop entre le 10 mai 2010 et le 1er juillet 2010. Selon un document acheminé par l’employeur au tribunal, le travailleur a exercé son emploi les 4 et 14 mai pour un total de 19 heures au montant de 909,12 $ et le 20 mai pour un total de huit heures, ce qui a représenté 436,40 $. Le travailleur a ensuite exercé son travail les 27 et 28 mai pour un total de 24 heures et un montant de 1163,66 $. Le 4 juin, le travailleur a exercé son emploi six heures pour 218,18 $. Le 11 juin, il a travaillé un total de 18 heures pour 872,75 $. Du 13 au 19 juin, il a effectué du montage durant trois jours pour un total de 26 heures et un montant de 1036,38 $. Finalement, du 20 au 26 juin, il a effectué du démontage pendant deux jours pour un total de 18 heures et un montant de 1090,94 $. Ces montants sont basés sur des relevés de paie produits avec le tableau de l’employeur.
[19]
La Commission des lésions professionnelles est donc d’avis que la CSST doit, en application de l’article
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la requête de monsieur Pierre Desrochers, le travailleur;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 23 novembre 2010, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que, pour la période du 10 mai au 1er juillet 2010, la Commission de la santé et de la sécurité du travail doit déduire de l’indemnité de remplacement du revenu à laquelle a droit le travailleur le revenu net qu’il a reçu suite à son retour au travail progressif.
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Sylvie Arcand |
[1] L.R.Q. c. A-3.001.
[2] Hamel et Sobey’s Québec, C.L.P. 146964-61-0009,
25 mars 2001, L. Nadeau; Laporte et Brake Parts Canada inc.
Montréal, C.L.P. 195097-72-0211, 11 juillet 2003, P. Perron, requête
en révision rejetée, 18 mars 2004; Morin et Service correctionnel du
Canada et D.R.H.C. Direction Travail,
C.L.P.
[3] Moreau et Compagnie Systèmes Allied (Canada),
C.L.P.
[4] Moreau et Compagnie Systèmes Allied (Canada), précitée, note 3; ; Morin et Service correctionnel du Canada et D.R.H.C. Direction Travail, précitée, note 2; Lemelin et R.T.C. Garage, précitée, note 2.
[5] Précitée, note 2.
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