Décision

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Modèle de décision CLP - avril 2013

9231-8898 Québec inc. et Bissonnette

2015 QCCLP 2900

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Longueuil

25 mai 2015

 

Région :

Montérégie

 

Dossier :

567730-62-1503

 

Dossier CSST :

142574565

 

Commissaire :

Lucie Couture, juge administratif

 

Membres :

Alain Crampé, associations d’employeurs

 

Mohamed Boussaid, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

9231-8898 Québec inc.

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Jonathan Bissonnette

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 13 mars 2015, la compagnie 9231-8898 Québec inc. (l’employeur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste la décision rendue le 29 janvier 2015, par la conciliatrice-décideuse de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

[2]           Par cette décision, la conciliatrice-décideuse de la CSST rejette la plainte de monsieur Jonathan Bissonnette (le travailleur) relative à son congédiement, mais fait droit à celle concernant le paiement des 14 premiers jours. Elle ordonne à l’employeur de payer au travailleur la somme de 445,88 $.

[3]           Lors de l’audience tenue à Longueuil le 21 mai 2015, l’employeur est représenté par monsieur Marc Vézina. Le travailleur est présent.

QUESTION PRÉLIMINAIRE

[4]           La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) prévoit qu’une décision rendue par la CSST à la suite d’une plainte faite en vertu de l’article 32 de loi doit être contestée à la Commission des lésions professionnelles dans les 45 jours de sa notification, et ce, en vertu de l’article 359.1 de la loi.

[5]           Dans le présent dossier, la décision a été rendue le 29 janvier 2015 et la requête à la Commission des lésions professionnelles a été déposée le 13 mars 2015. Bien que les parties aient été avisées d’une question préliminaire en regard du délai à contester la décision du 29 janvier 2015, le tribunal constate que la requête de l’employeur a été produite à l’intérieur du délai prévu à la loi.  

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[6]           L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de ne pas avoir à payer la somme de 445,88 $ que lui ordonnait de payer la CSST pour les 14 premiers jours d’incapacité. Il prétend contester l’admissibilité de la réclamation du travailleur concernant la lésion professionnelle du 3 juillet 2014.

L’AVIS DES MEMBRES

[7]           Le membre issu des associations d’employeurs, monsieur Alain Crampé, et le membre issu des associations syndicales, monsieur Mohamed Boussaid, sont d’avis de faire droit en partie à la requête de l’employeur. Ils sont d’avis que l’employeur doit payer au travailleur son salaire net pour la première journée d’absence du 3 juillet 2014 ainsi que 90 % du salaire net que le travailleur aurait normalement gagné, n’eût été son incapacité, soit 90 % du salaire net de 391,50 $ conformément aux dispositions des articles 59, 60 et 62 de la loi.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[8]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si l’employeur doit payer au travailleur la somme de 445,88 $ tel qu’ordonné dans la décision du 29 janvier 2015.

[9]           Le tribunal retient les éléments suivants.

[10]        L’employeur dirige une agence de placement. Il emploie le travailleur à titre d’aide-livreur pour une compagnie de plomberie.

[11]        Le travailleur débute chez l’employeur en mars 2014 selon un horaire habituel, soit les lundis, jeudis et vendredis, à raison d’environ huit heures par jour, au salaire horaire de 14,50 $.

[12]        Le 30 juin 2014, la compagnie de plomberie où travaille le travailleur est fermée. Le 1er juillet 2014, la compagnie demande au travailleur d’entrer au travail. Ce dernier refuse en indiquant qu’il doit travailler chez un autre employeur.

[13]        Le 2 juillet 2014, il est en congé. Puis, le 3 juillet 2014, le travailleur se blesse au travail. Il avise son employeur et quitte avant la fin de son quart de travail.

[14]        Le 3 juillet 2014, le travailleur consulte un médecin qui produit une attestation médicale recommandant un arrêt de travail du 4 au 14 juillet 2014 avec consolidation de la lésion à cette date.

[15]        L’employeur confirme à la CSST, lors de l’audience tenue en lien avec la plainte faite par le travailleur en vertu de l’article 32 de la loi, qu’il a payé le travailleur pour les heures d’absence du 3 juillet ainsi que pour la journée du 4 juillet 2014. Il n’a pas payé le travailleur pour les journées subséquentes. À l’audience devant la Commission des lésions professionnelles, l’employeur confirme cette situation.

[16]        Le 24 juillet 2014, la CSST accepte la réclamation du travailleur et le 16 septembre 2014, la CSST, à la suite d’une révision administrative, confirme cette décision qui n’est pas contestée devant la Commission des lésions professionnelles.

[17]        Lors de l’audience, l’employeur explique à la Commission des lésions professionnelles ne pas avoir payé la somme déterminée dans la décision du 29 janvier 2015 de la conciliatrice-décideuse de la CSST parce qu’il entendait contester l’admissibilité de la réclamation du travailleur concernant l’événement du 3 juillet 2014.

[18]        Le tribunal note qu’aucune requête n’a été faite à l’encontre de la décision rendue le 16 septembre 2014, par la CSST, à la suite d’une révision administrative. Cette décision confirmait l’admissibilité de la réclamation du travailleur pour l’événement du 3 juillet 2014.

[19]        Le tribunal ne peut retenir le motif avancé par l’employeur pour refuser de payer les 14 premiers jours. Les dispositions des articles 59 et 60 de la loi sont claires et indiquent que l’employeur doit payer 90 % du salaire net qu’aurait normalement gagné le travailleur, n’eût été sa lésion professionnelle.

[20]        L’employeur a indiqué au tribunal qu’il pensait avoir contesté la décision de la révision administrative du 16 septembre 2014, laquelle confirmait la décision initiale du 24 juillet 2014 déclarant que le travailleur avait subi, le 3 juillet 2014, une lésion professionnelle.

[21]        Le tribunal a informé l’employeur que la présente requête ne visait que la décision rendue à la suite de la plainte déposée par le travailleur en vertu de l’article 32 de la loi concernant le paiement des 14 premiers jours ainsi que son congédiement.

[22]        En regard de cette décision du 29 janvier 2015, l’employeur doute que le travailleur aurait normalement travaillé les journées établies par la conciliatrice-décideuse, soit les 4 juillet, plus trois journées dans la semaine du 7 au 11 juillet ainsi que le 14 juillet 2014. L’employeur se base sur l’absentéisme du travailleur dans les mois précédents. Il précise que le nombre d’heures que travaillait le travailleur variait de 12 à 24 heures de travail par semaine.

[23]        L’employeur n’a pu fournir de documents pour attester que le travailleur n’aurait pas normalement travaillé ces jours-là.

[24]        Le tribunal retient que l’employeur n’a payé que 4,25 heures pour la journée du 3 juillet 2014. Il manque donc 3,75 heures à payer au travailleur. De plus, le tribunal retient la moyenne d’heures établie par la conciliatrice-décideuse pour la semaine du 7 au 11 juillet 2014, soit 19 heures.

[25]        L’employeur s’oppose au paiement au motif qu’il veut contester la décision d’admissibilité.

[26]        Le tribunal a rappelé à l’audience à l’employeur que même s’il contestait la décision d’admissibilité rendue le 16 septembre 2014, après la présente audience, il doit tout de même payer la somme due au travailleur en vertu des articles 59 et 60 de la loi.

[27]        Le tribunal retient que la moyenne de 19 heures pour la semaine du 7 au 11 juillet 2014 est établie correctement par la CSST en s’appuyant sur les heures travaillées par le travailleur dans les semaines précédant l’accident.

[28]        Les articles 59, 60 et 62 de la loi se lisent comme suit :

59.  L'employeur au service duquel se trouve le travailleur lorsqu'il est victime d'une lésion professionnelle lui verse son salaire net pour la partie de la journée de travail au cours de laquelle ce travailleur devient incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion, lorsque celui-ci aurait normalement travaillé pendant cette partie de journée, n'eût été de son incapacité.

 

L'employeur verse ce salaire au travailleur à l'époque où il le lui aurait normalement versé.

 

60.  L'employeur au service duquel se trouve le travailleur lorsqu'il est victime d'une lésion professionnelle lui verse, si celui-ci devient incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion, 90 % de son salaire net pour chaque jour ou partie de jour où ce travailleur aurait normalement travaillé, n'eût été de son incapacité, pendant les 14 jours complets suivant le début de cette incapacité.

 

L'employeur verse ce salaire au travailleur à l'époque où il le lui aurait normalement versé si celui-ci lui a fourni l'attestation médicale visée dans l'article 199.

 

Ce salaire constitue l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle le travailleur a droit pour les 14 jours complets suivant le début de son incapacité et la Commission en rembourse le montant à l'employeur dans les 14 jours de la réception de la réclamation de celui-ci, à défaut de quoi elle lui paie des intérêts, dont le taux est déterminé suivant les règles établies par règlement. Ces intérêts courent à compter du premier jour de retard et sont capitalisés quotidiennement.

 

Si, par la suite, la Commission décide que le travailleur n'a pas droit à cette indemnité, en tout ou en partie, elle doit lui en réclamer le trop-perçu conformément à la section I du chapitre XIII.

 

 

62.  Aux fins des articles 59 à 61, le salaire net du travailleur est égal à son salaire brut moins les retenues à la source qui sont faites habituellement par son employeur en vertu de :

 

1° la Loi sur les impôts (chapitre I - 3) et la Loi de l'impôt sur le revenu (Lois révisées du Canada (1985), chapitre 1, 5 e supplément);

 

2° la Loi sur l'assurance-emploi (Lois du Canada, 1996, chapitre 23); et

 

3° la Loi sur le régime de rentes du Québec (chapitre R-9);

 

4° la Loi sur l'assurance parentale (chapitre A-29.011).

 

Pour l'application du présent article, le salaire brut pour une journée ou une partie de journée comprend, lorsque le travailleur est visé à l'un des articles 42.11 et 1019.4 de la Loi sur les impôts, l'ensemble des pourboires qui, pour cette journée ou partie de journée, auraient été déclarés par le travailleur à son employeur en vertu de cet article 1019.4 ou que son employeur lui aurait attribués en vertu de cet article 42.11.

 

Aux fins de l'article 60, le salaire brut du travailleur est pris en considération jusqu'à concurrence du maximum annuel assurable établi en vertu de l'article 66.

 

 

[29]        Le tribunal est d’avis, en vertu de ces dispositions, que l’employeur doit payer au travailleur 100 % du salaire net prévu pour la première journée d’absence du travail, soit le 3 juillet 2014. L’employeur a déjà payé 4,25 heures pour cette journée. Il doit donc payer la différence, soit 3,75 heures à 14,50 $ l’heure, pour un total de 54,38 $. De ce montant devront être déduites les sommes visées à l’article 62 de la loi.

[30]        À ce montant doit s’ajouter 90 % du salaire net, pour les journées où le travailleur aurait normalement travaillé dans les 14 premiers jours suivants, soit dans le cas présent :

19 heures de travail pour la semaine du 7 au 11 juillet 2014

+ 8 heures pour la journée du 14 juillet 2014 (la lésion ayant été consolidée à cette date)

 

Pour un total de 27 heures X 14,50 $ = 391,50 $

 

 

[31]        L’employeur doit obtenir le salaire net de ce montant de 391,50 $ en soustrayant les déductions légales prévues à l’article 62 de la loi (391,50 $ moins les déductions légales), ce qui correspond au salaire net.

[32]        L’employeur devra payer 90 % du salaire net ainsi obtenu, conformément aux dispositions de l’article 60 de la loi :

90 % X (391,50 $ - déductions légales)

 

 

[33]        L’employeur doit donc payer au travailleur ces sommes plutôt que le montant inscrit dans la décision de la CSST rendue par la conciliatrice-décideuse, datée du 29 janvier 2015.

[34]        Il y a lieu de faire droit à la requête de l’employeur en ce sens.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de la compagnie 9231-8898 Québec inc., l’employeur;

MODIFIE en partie la décision du 29 janvier 2015 rendue par la conciliatrice-décideuse de la Commission de la santé et de la sécurité du travail;

DÉCLARE que l’employeur doit payer à monsieur Jonathan Bissonnette, le travailleur, les sommes suivantes :

54,38 $ moins les déductions légales de l’article 62 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles + 90 % du salaire net de 391,50 $, (soit 391,50 $ moins les déductions légales de l’article 62 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles).

 

 

__________________________________

 

Lucie Couture

 

 

 

 

 



[1]          RLRQ, c. A-3.001.

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