DĂCISION
[1] Le 31 janvier 2003, monsieur AndrĂ© Lacasse (le travailleur) dĂ©pose Ă la Commission des lĂ©sions professionnelles une requĂȘte par laquelle il conteste une dĂ©cision rendue par la Commission de la santĂ© et de la sĂ©curitĂ© du travail (la CSST) le 15 janvier 2003 Ă la suite dâune rĂ©vision administrative.
[2] Par cette dĂ©cision, la CSST confirme celle quâelle a initialement rendue le 23 juillet 2002, dĂ©clare que le travailleur est apte Ă occuper lâemploi convenable de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel (sport), que cet emploi peut procurer un revenu annuel estimĂ© Ă 20 856 $ et que le travailleur est apte Ă occuper cet emploi depuis le 22 juillet 2002.
[3] Ă lâaudience, le travailleur est prĂ©sent et reprĂ©sentĂ©. Lâemployeur est quant Ă lui absent. La CSST a dĂ©lĂ©guĂ© une avocate Ă lâaudience.
L'OBJET DE LA CONTESTATION
[4]
Le travailleur demande à la Commission des lésions
professionnelles de déclarer que le poste de préposé à la location de matériel
(sport) nâest pas un emploi convenable notamment parce quâil nâest pas
disponible, que le travailleur nâa pas les capacitĂ©s physiques de lâexercer et
quâil ne sâagit pas de la solution la plus Ă©conomique au sens de lâarticle
LES FAITS
[5] Le 9 juin 1995, le travailleur subit une lĂ©sion professionnelle alors que son bras gauche reste pris dans lâenrouleur du chalut au moment de la remontĂ©e. Il en rĂ©sulte une fracture du radius et du cubitus gauches. Suite Ă cette lĂ©sion, le travailleur subit une greffe du radius en dĂ©cembre 1995 en plus dâune application de plaque mĂ©tallique. Il avait aussi Ă©tĂ© opĂ©rĂ© le 9 juin 1995 pour rĂ©duction ouverte et fixation par plaque et vis de la fracture radiale.
[6] Le 7 octobre 1996, une note Ă©volutive nous apprend que le travailleur a terminĂ© un secondaire III et quâil a comme expĂ©rience de travail unique la pĂȘche, ayant travaillĂ© seize ans comme homme de pont.
[7] Le 17 fĂ©vrier 1997, le Dr Roch Banville procĂšde Ă la rĂ©daction du rapport dâĂ©valuation mĂ©dicale. Ătant donnĂ© les trouvailles objectives Ă lâexamen, il Ă©met les limitations fonctionnelles suivantes :
«Monsieur AndrĂ© Lacasse est porteur dâune pathologie qui impose des limitations fonctionnelles qui se lisent comme suit; il devra Ă©viter :
-     dâexĂ©cuter des mouvements rĂ©pĂ©titifs de flexion, dâextension, de latĂ©ralitĂ© ou de rotation au niveau du coude gauche;
-     de garder le bras gauche en position statique dâĂ©lĂ©vation, dâabduction ou de rotation;
-Â Â Â Â Â de soulever ou porter des charges dont le poids excĂšde 20 livres;
-     de lever les bras plus haut que les épaules;
-Â Â Â Â Â de pousser, presser ou appuyer avec le bras;
-Â Â Â Â Â de tirer ou lancer des objets avec le bras;
-Â Â Â Â Â de sâaccrocher ou sâagripper;
-     dâexĂ©cuter des activitĂ©s qui demandent de la prĂ©cision ou de la dextĂ©ritĂ© la lâintĂ©rieur dâun travail qutidien et de façon rĂ©pĂ©titive. » (Sic)
[8] Le Dr Roch Banville estime cette Ă©valuation comme Ă©tant provisoire Ă©tant donnĂ© que lâatrophie importante que prĂ©sente le travailleur lâempĂȘche absolument de retourner Ă son travail initial. Il Ă©value lâatteinte permanente Ă 9.5 %.
[9] Le 19 mars 1997, le travailleur est examinĂ© par le Dr Claude Rouleau Ă la demande de la CSST. Au niveau du diagnostic, il mentionne la prĂ©sence dâune « fracture du radius et du cubitus gauches, rĂ©duction ouverte avec ostĂ©osynthĂšse, plaque et vis, non union de la fracture du radius et greffe osseuse et reprise ostĂ©osynthĂšse radius ». Le Dr Rouleau Ă©met des limitations fonctionnelles temporaires et une atteinte permanente de 10 %.
[10] Le 30 avril 1997, le travailleur est examinĂ© par le Dr RĂ©jean Cloutier, agissant comme membre du Bureau dâĂ©valuation mĂ©dicale. Il croit quâil sâagit dâune Ă©volution atypique pour une fracture du radius gauche qui a nĂ©cessitĂ© une rĂ©duction ouverte. Une atrophie importante de tout le membre supĂ©rieur aux niveaux du bras et de lâavant-bras est notĂ©e avec douleur au niveau de la plaque. Il y a Ă©galement un signe de Tinel positif. Il estime que le travailleur nâest sĂ»rement pas apte Ă reprendre son travail de pĂȘcheur, mĂ©tier trĂšs exigeant physiquement. Il croit que la lĂ©sion nâest pas consolidĂ©e et quâil est trop tĂŽt pour se prononcer sur lâatteinte permanente et les limitations fonctionnelles. Il recommande une exĂ©rĂšse de la plaque et vis au niveau du radius.
[11] Le 12 fĂ©vrier 1998, le travailleur rencontre le Dr Jacques Garneau, chirurgien orthopĂ©diste, Ă la demande de la CSST. Une atrophie importante au niveau de la musculature pĂ©riscapulaire gauche est notĂ©e de mĂȘme que diverses trouvailles objectives. Il estime quâil y a atteinte permanente de 12 % et des limitations fonctionnelles quâil dĂ©crit.
[12] Le 10 mars 1998, un Ă©lectromyogramme dĂ©montre une minime lenteur au niveau des nerfs mĂ©dian et ulnaire gauches au niveau du poignet avec changement neurogĂ©nique. Le tout serait suggestif dâune dystrophie sympathique. Une scintigraphie osseuse du 8 juillet 1997 nâavait cependant pas dĂ©montrĂ© dâalgodystrophie sympathique rĂ©flexe au niveau du poignet ou de la main gauche.
[13] Le 4 aoĂ»t 1998, le travailleur rencontre le Dr Luc Lemire, chirurgien orthopĂ©diste, agissant Ă titre de membre du Bureau dâĂ©valuation mĂ©dicale. Il juge que la lĂ©sion nâest pas consolidĂ©e et, bien quâil juge quâil soit trop tĂŽt pour dĂ©terminer lâatteinte permanente et les limitations fonctionnelles, il prĂ©voit quâil y en aura vraisemblablement.
[14] Le 27 mai 1999, le Dr Tinco Tran, chirurgien orthopĂ©diste, procĂšde Ă la prĂ©paration dâun rapport dâĂ©valuation mĂ©dicale faisant suite Ă son rapport final du mĂȘme jour, consolidant la lĂ©sion au 26 mai 1999 avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles. Le diagnostic retenu est celui de fracture de lâavant-bras gauche avec Ă©tirement de lâĂ©paule gauche et lĂ©sion du nerf mĂ©dian. Il mentionne que la lĂ©sion subie par le travailleur le 9 juin 1995 Ă©tait sĂ©vĂšre puisque non seulement son avant-bras fut Ă©crasĂ© par le treuil mais il est restĂ© suspendu dans les airs pendant quelques minutes avec Ă©tirement important Ă lâĂ©paule gauche. Il Ă©value lâatteinte permanente Ă 19 % et Ă©met les limitations fonctionnelles suivantes :
«Ăviter de forcer, tirer, pousser ou lever des charges pesant plus de 5 livres avec sa main gauche;
Ăviter les mouvements rĂ©pĂ©titifs de flexion, dâextension, dâinclinaison radiale ou cubitale au poignet gauche;
Ăviter les mouvements rĂ©pĂ©titifs de flexion ou de rotation Ă lâĂ©paule gauche;
Ăviter de travailler avec le bras gauche Ă©levĂ© au-dessus du niveau des Ă©paules;
Ăviter de travailler avec le membre supĂ©rieur en position fixe. » (PiĂšce I-2)
[15] Le 7 octobre 1999, la CSST rend une décision admettant le travailleur en réadaptation.
[16] Le 13 mars 2000, la CSST rend une dĂ©cision dĂ©terminant lâemploi convenable de capitaine de bateau de pĂȘche. Les mesures accessoires de rĂ©adaptation, octroyĂ©es au travailleur, sont une formation pour terminer son secondaire V et une formation professionnelle spĂ©cialisĂ©e de lâĂ©cole des PĂȘches. Cet emploi convenable est dĂ©terminĂ© par la CSST en collaboration avec le travailleur qui dĂ©sire rester dans le domaine des pĂȘches. Cependant, la dĂ©cision concernant lâemploi convenable sera contestĂ©e par la suite aprĂšs que le travailleur eut constatĂ© quâil y avait incompatibilitĂ© entre les limitations fonctionnelles qui lâaffectent et ce nouveau travail.
[17] En octobre 2000, le conseiller en orientation, Maurice Vinet, produit un rapport dâĂ©valuation et dâorientation professionnelle. Monsieur Vinet croit quâil serait souhaitable quâune partie des tĂąches Ă effectuer dans le nouvel emploi du travailleur se dĂ©roulent Ă lâextĂ©rieur et lui permettent dâĂȘtre en contact avec la nature. Il estime quâil est primordial dâaccorder beaucoup dâimportance Ă ses antĂ©cĂ©dents professionnels si la CSST dĂ©sire dĂ©terminer une occupation convenable qui soit bien adaptĂ©e Ă la rĂ©alitĂ© du travailleur. Lâadministration de diffĂ©rents tests permet de constater que le travailleur manifeste un intĂ©rĂȘt marquĂ© pour les emplois de type investigateur, Ă savoir ceux qui font appel Ă son ingĂ©niositĂ©, son sens de lâobservation et son souci du dĂ©tail afin de rĂ©soudre certains problĂšmes. Les rĂ©sultats obtenus sur le test BGTA dĂ©montrent que le travailleur dispose dâhabiletĂ© supĂ©rieure Ă la moyenne en ce qui a trait Ă la perception des Ă©critures, aptitudes qui sâavĂšrent importantes dans les occupations tel que contrĂŽleur de la qualitĂ©. Dans la liste des occupations jugĂ©es convenables par le conseiller en orientation suite au test administrĂ©, il retient notamment celles dâinspecteur des normes sanitaires et de commis vendeur dans un magasin dâĂ©quipement de pĂȘche commerciale, de vĂȘtements de travail, quincaillerie, produits horticoles, poissonnerie, etc. En conclusion, il mentionne :
«... Il jouit dâune mobilitĂ© restreinte. Toutefois, il semble dĂ©terminĂ© Ă rĂ©intĂ©grer le marchĂ© du travail dans les plus brefs dĂ©lais. Il manifeste beaucoup dâenthousiasme pour les occupations de nature "investigatrice". Ses antĂ©cĂ©dents professionnels nous permettent de croire quâil a un intĂ©rĂȘt marquĂ© pour les occupations "rĂ©alistes".
Bref, ces observations nous portent Ă conclure que le travailleur aurait avantage Ă se rĂ©orienter dans un mĂ©tier qui comporte une variĂ©tĂ© de tĂąches manuelles et qui nĂ©cessite un certain degrĂ© dâingĂ©niositĂ©, de curiositĂ© et de minutie. Il mâapparaĂźtrait souhaitable que ce travail soit en lien avec la flore et la faune et quâune partie des tĂąches puissent ĂȘtre exĂ©cutĂ©es Ă lâextĂ©rieur.»
[18] Le 2 novembre 2000, le travailleur rencontre son agent de rĂ©adaptation. Le travailleur convient que les emplois retenus par le conseiller en orientation correspondent bien Ă ses intĂ©rĂȘts puisque la majoritĂ© dâentre eux sont liĂ©s directement ou indirectement Ă la pĂȘche commerciale. Il a identifiĂ©, parmi ces emplois, deux qui sont plus particuliĂšrement intĂ©ressants pour lui, soit inspecteur des pĂȘches et inspecteur des normes sanitaires. Lâagent de rĂ©adaptation explique au travailleur que, dans le contexte de lâapproche concentrique, le poste dâinspecteur de la transformation des produits marins, qui intĂ©resse particuliĂšrement le travailleur, serait acceptable.  Il manque cependant certaines donnĂ©es afin dâavoir une meilleure idĂ©e du rĂ©alisme de cette solution.
[19] Le 22 mai 2001, la CSST infirme sa dĂ©cision initiale concernant lâemploi convenable de capitaine de bateau et retourne le dossier Ă la CSST afin quâun nouvel emploi convenable soit dĂ©terminĂ©.
[20] Le travailleur tĂ©moigne Ă lâaudience. Il est ĂągĂ© de 40 ans et est devenu pĂȘcheur dĂšs son entrĂ©e sur le marchĂ© du travail.
[21] Dans le cadre de son programme de rĂ©adaptation, il a complĂ©tĂ© son secondaire V Ă lâaide du programme de formation aux adultes. Il a mĂȘme obtenu une attestation dâexcellence. Lorsquâil a rencontrĂ© monsieur Vinet, le conseiller en orientation rĂ©fĂ©rĂ© par la CSST, ce dernier lui a suggĂ©rĂ© de se recycler dans le contrĂŽle des aliments oĂč il y avait plusieurs dĂ©bouchĂ©s. La formation en matiĂšre de contrĂŽle de la qualitĂ© des produits marins se donne Ă Grande-RiviĂšre et nĂ©cessite six Ă sept mois de cours pour dĂ©boucher sur une attestation dâĂ©tudes collĂ©giales. Il a fait des dĂ©marches qui lui permettent dâaffirmer quâil dĂ©tient Ă lâavance la certitude dâoccuper deux emplois diffĂ©rents chez Marinard dĂšs le printemps 2004. Un revenu brut dâenviron 25 000 $ est Ă prĂ©voir. Le cours coĂ»te 33 800 $ pour les deux sessions.
[22] Il a comme expĂ©rience de travail unique la pĂȘche quâil a exercĂ©e pendant seize ou dix-sept ans jusquâĂ son accident du travail.
[23] Quant Ă lâemploi convenable de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif, il a fait des recherches dans les 100 kilomĂštres de sa rĂ©sidence et a identifiĂ© les employeurs suivants : golf Ă Fort PrĂ©vel, Parc de Forillon, GaspĂ© Aventure et un centre de ski. Il ne peut absolument rien faire avec son bras gauche et il est gaucher. Il serait donc incapable dâentretenir une bicyclette, de manoeuvrer des canots ou des moteurs de bateaux ou encore de rĂ©parer un monte -pente.
[24] En contre-interrogatoire, il mentionne quâil a fait des dĂ©marches Ă GaspĂ© Aventure et au Parc Forillon. Tous ces emplois sont saisonniers, ne durant que quelques mois par annĂ©e alors que comme pĂȘcheur il travaillait neuf mois par an Ă un salaire dâau-dessus de 50 000 $. Il mentionne de plus quâil ne se sentirait pas bien dans cet emploi qui ne lâattire aucunement et qui est prĂ©caire, Ă©tant donnĂ© la possibilitĂ© pour un employeur dâembaucher des jeunes pour faire ce travail Ă meilleur prix.
[25] Quant au travail de contrĂŽle de la qualitĂ© des aliments, il sâagit dâun travail connexe Ă la pĂȘche, domaine quâil connaĂźt bien. Cet emploi est plus stable et bien payĂ© Ă©tant donnĂ© quâil demande une formation particuliĂšre tandis que lâemploi de prĂ©posĂ© au matĂ©riel de sport ne requiert aucune spĂ©cialisation de sorte quâun roulement de personnel peut sâopĂ©rer facilement.
[26] Quant Ă un Ă©ventuel emploi chez Fort PrĂ©vel, il estime la distance trop importante, Ă savoir 90 kilomĂštres. Quant au Parc Forillon, les employĂ©s sâoccupent plutĂŽt de plongĂ©e sous-marine.
[27] La procureure de la CSST dĂ©pose, sous la cote I-4, diffĂ©rentes dĂ©coupures tirĂ©es du guide touristique de la rĂ©gion de la GaspĂ©sie et le travailleur fait ses commentaires sur ces diffĂ©rentes entreprises oeuvrant dans le domaine de la plongĂ©e sous-marine, du kayak de mer, du cyclo-tourisme, etc. Ses dĂ©marches directes se limitent donc Ă deux employeurs et il a jugĂ© quâil ne pouvait occuper les autres emplois par dĂ©duction.
[28] La CSST dĂ©pose, sous la cote I-3, un extrait du systĂšme « REPĂRES » concernant lâemploi de prĂ©posĂ© Ă la location du matĂ©riel sportif. On voit que les tĂąches inhĂ©rentes Ă cet emploi nĂ©cessitent la prĂ©paration dâĂ©quipement pour les rĂ©servations de groupes et les ajustements nĂ©cessaires selon les caractĂ©ristiques physiques de chaque client. Un tel prĂ©posĂ© doit Ă©galement effectuer lâentretien ou les rĂ©parations mineures nĂ©cessaires Ă lâĂ©quipement. Au niveau des capacitĂ©s physiques, un tel prĂ©posĂ© doit ĂȘtre capable de soulever un poids dâenviron cinq Ă dix kilogrammes. On indique Ă©galement quâune connaissance de base de lâanglais est exigĂ©e et quâune expĂ©rience en vente dâĂ©quipement sportif constitue un atout. Les perspectives dâemploi au niveau provincial sont Ă©gales Ă la moyenne jusquâen 2005. Les perspectives du marchĂ© de travail pour la GaspĂ©sie et les Iles-de-la-Madeleine sont cependant faibles avec un taux de chĂŽmage Ă©levĂ© et des perspectives plus restreintes.
[29] Le travailleur dĂ©pose pour sa part, sous la cĂŽte T-1, un extrait de la classification nationale des professions 2001 concernant le titre dâemploi dâopĂ©rateur et de prĂ©posĂ© aux sports, aux loisirs et dans les parcs dâattractions.
L'ARGUMENTATION DES PARTIES
[30] Le procureur du travailleur fait remarquer que le systĂšme « REPĂRES » indique que lâemploi convenable, dĂ©terminĂ© par la CSST, nĂ©cessite la prĂ©paration dâĂ©quipement pour des rĂ©servations de groupes ce qui va manifestement Ă lâencontre des limitations fonctionnelles du travailleur. Quant Ă GaspĂ© Ranch AcadĂ©mie, comme il sâagit dâune entreprise qui loue des chevaux il est Ă©vident que la manipulation de selles est trop exigeante pour le travailleur. Il en va de mĂȘme pour lâentreprise Kayak Forillon oĂč la manipulation et lâentretien des kayaks sont impossibles pour le travailleur. Quant aux entreprises de plongĂ©e sous-marine, le travailleur est sĂ»rement incapable de manipuler des bonbonnes dâair sans contrevenir Ă ses limitations. Ce genre dâemploi est au surplus prĂ©caire et il nâest pas disponible dans la rĂ©gion du travailleur. Une seule boutique existe, soit GaspĂ© Aventure et rien nâindique que des emplois y sont disponibles. Dans toute la liste dâemplois dĂ©posĂ©e par la CSST, rien nâindique que ces entreprises embauchent rĂ©ellement des gens pour la courte saison des activitĂ©s. Il estime quâaucun poste de ce genre nâexiste dans un rayon de 50 kilomĂštres de GaspĂ©. Dans les ZEC, lâĂ©quipement consiste essentiellement en des chaloupes et rien nâindique que des postes de prĂ©posĂ© aux Ă©quipements sportifs existent dans ces endroits.
[31]
Se référant aux articles
[32]
La procureure de la CSST croit que la solution mise de lâavant
par le procureur du travailleur est hypothĂ©tique puisque le travailleur nâest
pas sĂ»r de rĂ©ussir la formation et que lâemploi qui est disponible maintenant
ne le sera peut-ĂȘtre pas Ă Ă©chĂ©ance.Â
Elle rappelle les dispositions de lâarticle
[33] Le travailleur nâa pas fait ses devoirs puisquâil ne sâest rendu vĂ©rifier la possibilitĂ© dâemploi que chez deux employeurs. Le travailleur dĂ©montre donc peu dâintĂ©rĂȘt dans sa recherche dâemploi. Il existe sĂ»rement des emplois qui respectent les limitations fonctionnelles du travailleur dans sa rĂ©gion.
[34] Elle dépose au soutien de son argumentation de la jurisprudence[2].
[35] En rĂ©plique, le procureur du travailleur fait remarquer que le travail qui exige une manipulation de poids de cinq Ă dix kilos est celui dâinspecteur en produits marins, ce qui nâest pas lâemploi convoitĂ© par le travailleur.
L'AVIS DES MEMBRES
[36]
Les membres issus des associations syndicales et dâemployeurs
partagent le mĂȘme avis. Lâemploi de
prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif nâest pas un emploi convenable parce
quâil ne respecte pas les critĂšres Ă©noncĂ©s par lâarticle
[37] Notamment, il nâest pas appropriĂ© parce quâil ne respecte pas les intĂ©rĂȘts et le vĂ©cu du travailleur, il nây a pas de possibilitĂ© raisonnable dâembauche suivant le systĂšme RepĂšre et il ne respecte pas les limitations fonctionnelles Ă©mises par le Dr Tran.
LES MOTIFS DE LA DĂCISION
[38] La Commission des lĂ©sions professionnelles doit dĂ©cider si lâemploi de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif constitue un emploi convenable au sens de la loi, que le travailleur est capable dâexercer Ă compter du 22 juillet 2002.
[39]
La dĂ©finition dâ« emploi convenable » se trouve Ă lâarticle
« emploi convenable » : un emploi approprié qui permet au travailleur victime d'une lésion professionnelle d'utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, qui présente une possibilité raisonnable d'embauche et dont les conditions d'exercice ne comportent pas de danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion ;
[40] Cet emploi convenable doit ĂȘtre dĂ©terminĂ© au travailleur par la CSST en tenant compte des dispositions prĂ©vues au titre de la rĂ©adaptation professionnelle dont les articles suivants :
166. La rĂ©adaptation professionnelle a pour but de faciliter la rĂ©intĂ©gration du travailleur dans son emploi ou dans un emploi Ă©quivalent ou, si ce but ne peut ĂȘtre atteint, l'accĂšs Ă un emploi convenable.
________
1985, c. 6, a. 166.
167. Un programme de réadaptation professionnelle peut comprendre notamment :
1 Â un programme de recyclage;
2  des services d'évaluation des possibilités professionnelles;
3 Â un programme de formation professionnelle;
4 Â des services de support en recherche d'emploi;
5  le paiement de subventions à un employeur pour favoriser l'embauche du travailleur qui a subi une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique;
6 Â l'adaptation d'un poste de travail;
7  le paiement de frais pour explorer un marché d'emplois ou pour déménager prÚs d'un nouveau lieu de travail;
8 Â le paiement de subventions au travailleur.
________
1985, c. 6, a. 167.
171. Lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut rendre le travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent et que son employeur n'a aucun emploi convenable disponible, ce travailleur peut bénéficier de services d'évaluation de ses possibilités professionnelles en vue de l'aider à déterminer un emploi convenable qu'il pourrait exercer.
 Cette évaluation se fait notamment en fonction de la scolarité du travailleur, de son expérience de travail, de ses capacités fonctionnelles et du marché du travail.
________
1985, c. 6, a. 171.
172. Le travailleur qui ne peut redevenir capable d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle peut bénéficier d'un programme de formation professionnelle s'il lui est impossible d'accéder autrement à un emploi convenable.
Ce programme a pour but de permettre au travailleur d'acquĂ©rir les connaissances et l'habiletĂ© requises pour exercer un emploi convenable et il peut ĂȘtre rĂ©alisĂ©, autant que possible au QuĂ©bec, en Ă©tablissement d'enseignement ou en industrie.
________
1985, c. 6, a. 172; 1992, c. 68, a. 157.
[41] Le tribunal constate, tout comme la procureure de la CSST, que le travailleur nâa peut-ĂȘtre pas toujours apportĂ© la collaboration voulue au cours de son processus de rĂ©adaptation.
[42] En effet, le travailleur avait une seule idĂ©e dâemploi convenable en tĂȘte et il nâa pas voulu en dĂ©roger. Le tribunal convient, tout comme le commissaire Claude BĂ©rubĂ© dans lâaffaire prĂ©citĂ©e, que la CSST a le devoir dâagir conformĂ©ment aux paramĂštres de sa mission mĂȘme lorsquâelle ne respecte pas le cheminement privilĂ©giĂ© par un travailleur.
[43]
Ainsi, la CSST peut déterminer un emploi convenable
unilatĂ©ralement lorsquâelle nâa pas la collaboration du travailleur. Ceci Ă©tant dit, la CSST doit tout de mĂȘme,
dans cette dĂ©marche, procĂ©der Ă la dĂ©termination dâun emploi convenable qui
respecte les prescriptions de lâarticle
[44] En effet, lâemploi convenable dĂ©terminĂ© par la CSST nâest pas un emploi appropriĂ©. à la lecture de certains dictionnaires, on constate que le mot « appropriĂ© » doit sâentendre de quelque chose qui convient, qui est propre, qui est conforme, adaptĂ© et adĂ©quat. Il est Ă©vident que lâemploi de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif ne respecte pas ces qualificatifs. Cet emploi ne respecte nullement les goĂ»ts et aptitudes du travailleur[3].
[45] En plus du tĂ©moignage du travailleur Ă lâeffet quâil nâa aucun intĂ©rĂȘt pour ce genre dâemploi, cet emploi ne correspond pas aux conclusions retenues dans le rapport dĂ©posĂ© sous la cote I-1. Ainsi, cet emploi nâapparaĂźt nullement Ă la liste dâoccupations jugĂ©es convenables.
[46] Les tests passĂ©s par le travailleur ont dĂ©montrĂ© quâil a beaucoup dâenthousiasme pour les occupations investigatrices, ce que nâest nullement lâemploi convenable. Contrairement aux suggestions du conseiller en orientation, lâemploi convenable ne nĂ©cessite aucun degrĂ© dâingĂ©niositĂ©, de curiositĂ© et de minutie et nâa aucun lien avec la flore et la faune. Le conseiller avait de plus mentionnĂ© quâil Ă©tait nĂ©cessaire de respecter les antĂ©cĂ©dents professionnels du travailleur, ce qui nâa pas Ă©tĂ© fait.
[47] De plus, la jurisprudence a mentionnĂ© que lâemploi convenable devait respecter en autant que possible les prĂ©fĂ©rences du travailleur[4]. Toutefois, la jurisprudence a Ă©galement mentionnĂ© que les prĂ©fĂ©rences du travailleur ne devaient pas ĂȘtre lâexpression de caprices ou rĂ©pondre au dĂ©sir dâun travailleur qui voudrait se lancer dans un domaine tout autre que le sien. Il suffit donc pour rencontrer ce critĂšre que lâemploi identifiĂ© rĂ©ponde adĂ©quatement au profil du travailleur.
[48] Or, le tribunal ne croit pas que câest par caprice que le travailleur ne veut pas exercer un emploi dans un domaine quâil nâa jamais touchĂ© de prĂšs ou de loin alors que son expĂ©rience unique de travail a Ă©tĂ© acquise dans le domaine de la pĂȘche. Le travailleur nâa pas non plus mentionnĂ© quâil voulait se lancer dans un tout nouveau domaine.
[49] Le tribunal ne croit pas non plus que lâemploi convenable dĂ©terminĂ© respecte la capacitĂ© rĂ©siduelle du travailleur laquelle sâĂ©value en fonction des limitations fonctionnelles que celui-ci conserve Ă la suite de sa lĂ©sion professionnelle[5]. Ainsi, lâemploi de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif ne respecte pas, selon la preuve dont le tribunal dispose, les limitations fonctionnelles Ă©mises par le Dr Tran. Ainsi, dans le cadre de ce travail, le travailleur doit forcer, tirer, pousser ou lever des charges pesant plus de cinq livres puisque selon le systĂšme «REPĂRES» il faut ĂȘtre capable de soulever un poids dâenviron cinq Ă dix kilogrammes pour ĂȘtre prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif.
[50] On ne peut prĂ©sumer que le travailleur pourrait se servir exclusivement de sa main droite pour ce faire puisque plusieurs Ă©quipements nĂ©cessitent certainement lâutilisation des deux mains (ski, bonbonne dâair, selle, sac de golf, bicyclette, kayak, etc.). Le systĂšme «REPĂRES» indique Ă©galement que le prĂ©posĂ© doit prĂ©parer lâĂ©quipement, y effectuer des ajustements, lâentretien ou les rĂ©parations mineures et montrer aux clients les techniques dâutilisation de cet Ă©quipement. Le membre dominant du travailleur Ă©tant son bras gauche, soit celui qui a Ă©tĂ© blessĂ©, il est facile dâimaginer par exemple que la rĂ©paration de bicyclettes entraĂźne certains mouvements non conformes pour son membre supĂ©rieur gauche.
[51] Par consĂ©quent, les conditions dâexercice dâun emploi convenable comportent des dangers pour la santĂ©, la sĂ©curitĂ© et lâintĂ©gritĂ© physique du travailleur puisquâil nây a pas respect intĂ©gral de ses limitations fonctionnelles[6].
[52] Au surplus, lâemploi convenable dĂ©terminĂ© par la CSST ne permet pas au travailleur dâutiliser ses qualifications professionnelles. En effet, avec le temps le travailleur a acquis une expĂ©rience indĂ©niable dans le domaine de la pĂȘche laquelle peut servir dans des domaines connexes mais aucunement dans l'emploi de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel de sport.
[53] Le systĂšme «REPĂRES» indique de plus quâune connaissance de base de lâanglais est exigĂ©e ce qui peut se comprendre encore plus dans la rĂ©gion du travailleur oĂč la clientĂšle touristique est importante et oĂč il y a une importante communautĂ© anglophone. La preuve nâa pas dĂ©montrĂ© que le travailleur avait une connaissance de base de lâanglais. Le fait dâavoir fait des Ă©tudes secondaires en anglais ne permet pas de conclure que le travailleur a une connaissance de base de cette langue Ă dĂ©faut dâavoir fait des stages dâimmersion ou de possĂ©der une expĂ©rience pratique de la conversation. Cette connaissance de base apprise au secondaire ne permet pas de façon probante de conclure que le travailleur serait capable de tenir une conversation avec des clients anglophones se prĂ©sentant chez un Ă©ventuel employeur[7].
[54] Lâemploi convenable dĂ©terminĂ© ne permet donc pas au travailleur dâutiliser lâexpertise et lâexpĂ©rience dĂ©jĂ acquises ce que la CSST doit faire dans la mesure du possible[8].
[55] Le tribunal ne croit pas non plus que lâemploi de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif prĂ©sente une possibilitĂ© raisonnable dâembauche dans la rĂ©gion oĂč habite le travailleur. Il est important de rappeler que le travailleur a toujours habitĂ© dans la rĂ©gion oĂč il habite prĂ©sentement. Il serait donc dĂ©raisonnable de lui demander de dĂ©mĂ©nager pour se trouver un emploi ou encore dâeffectuer un trajet dĂ©raisonnable le matin pour aller au travail et le soir pour en revenir[9]. Sâil est vrai quâĂ lâoccasion un travailleur doit Ă©tendre ses recherches dâemploi Ă un rayon plus vaste que celui autour duquel se situe son domicile, cela ne constitue pas une rĂšgle ferme[10].
[56] Or, en lâespĂšce, la preuve nâa nullement dĂ©montrĂ© lâexistence de postes de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif disponibles dans la rĂ©gion oĂč habite le travailleur. Dans un premier temps, le systĂšme «REPĂRES» indique bien que dans la rĂ©gion de la GaspĂ©sie et des Iles-de-la-Madeleine, la demande de main-dâĆuvre de 2001 Ă 2005 pour ce type dâemploi est faible, le taux de chĂŽmage estimĂ© en 2001 Ă©levĂ© et les perspectives 2002 Ă 2005 plus restreintes. Ceci suffit Ă disposer de cet aspect du litige[11]. Quant au document T-1, le tribunal ne peut le retenir puisque les prĂ©visions sont faites pour le poste beaucoup plus gĂ©nĂ©rique de prĂ©posĂ© dans les amusements, les sports et les loisirs, et non spĂ©cifiquement sur le prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel de sport.
[57] Quant au document dĂ©posĂ© par la CSST sous la cote I-4, il ne prouve quâune chose , soit lâexistence de certaines entreprises offrant au public des Ă©quipements sportifs. Rien ne prouve que des postes de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif existent bel et bien dans ces entreprises. Ainsi, aucune preuve ne dĂ©montre que chez GaspĂ© Ranch AcadĂ©mie le propriĂ©taire a besoin dâemployĂ©s pour effectuer la tĂąche de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif, pas plus que chez GaspĂ© Aventure.
[58] Le travailleur nâa aucune expĂ©rience dans ce domaine et devient donc moins compĂ©titif. Le tribunal comprend mal comment un employeur ne dĂ©cidera pas plutĂŽt dâengager une personne plus jeune que le travailleur en le payant moins cher pour faire les mĂȘmes activitĂ©s. En effet, comme cet emploi ne nĂ©cessite pas de spĂ©cialisation, ceci facilite le roulement de personnel et un employeur peut avoir intĂ©rĂȘt Ă embaucher un jeune ou un Ă©tudiant pour effectuer cette tĂąche plutĂŽt que le travailleur qui, en plus dâĂȘtre porteur dâune lĂ©sion professionnelle, a 40 ans. La jurisprudence a Ă©tabli que le travailleur doit ĂȘtre placĂ© sur le mĂȘme pied que les autres travailleurs devant une possibilitĂ© dâembauche sans ĂȘtre forcĂ© de se reprĂ©senter comme quelquâun qui doit avoir des exigences diffĂ©rentes des autres[12]. Ainsi, en plus de son Ăąge et de son inexpĂ©rience, le travailleur a des limitations fonctionnelles importantes au bras gauche qui font en sorte quâil pourrait difficilement concurrencer un autre travailleur pour le mĂȘme poste[13].
[59] De plus, les Ă©ventuels emplois Ă©numĂ©rĂ©s Ă la piĂšce I-4 sont des emplois saisonniers ne durant que quelques mois par annĂ©e (ski, golf, kayak, etc.). Il ne sâagit donc pas dâemplois convenables pour un travailleur qui pourrait occuper un travail Ă temps plein sur une base annuelle. Il faut se rappeler quâavant sa lĂ©sion, le travailleur effectuait ses tĂąches environ neuf mois par annĂ©e et non pas seulement trois ou quatre.
[60] En consĂ©quence, le fait que lâemploi convenable puisse difficilement ĂȘtre occupĂ© Ă temps plein sur une base annuelle peut constituer un Ă©lĂ©ment dĂ©terminant quant Ă la validitĂ© de cet emploi, compte tenu de la situation particuliĂšre du travailleur[14]. Il apparaĂźt au tribunal que lâĂ©valuation du salaire que pourrait retirer le travailleur de lâemploi convenable est donc exagĂ©rĂ©e en lâespĂšce puisque basĂ©e sur un emploi annuel et non saisonnier. Le travailleur se trouverait donc gravement pĂ©nalisĂ© dans le calcul de son indemnitĂ© rĂ©duite de remplacement du revenu.
[61]
Pour tous ces motifs, il est donc Ă©vident que lâemploi de
prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif nâest pas convenable pour le
travailleur dans les circonstances précises de ce dossier. La CSST devra donc établir, en collaboration
avec le travailleur, un nouvel emploi convenable. Le travailleur devra comprendre que sa collaboration est
essentielle et quâil doit faire montre de souplesse dans la recherche dâun
emploi qui lui est convenable sans se limiter Ă une seule avenue. Il devra Ă©galement avoir Ă lâesprit les
dispositions de lâarticle
[62] La CSST devra, quant Ă elle, se rappeler que dans la dĂ©termination dâun emploi convenable elle doit Ă©viter la tentation de dĂ©terminer un emploi dans le seul but de diminuer les coĂ»ts du rĂ©gime[16]. Il est vrai que la loi prĂ©voit, Ă son article 181, ce qui suit :
181. Le coût de la réadaptation est assumé par la Commission.
Dans la mise en oeuvre d'un plan individualisé de réadaptation, la Commission assume le coût de la solution appropriée la plus économique parmi celles qui permettent d'atteindre l'objectif recherché.
________
1985, c. 6, a. 181.
[63] Cependant, lâaspect Ă©conomique nâest pas le seul Ă considĂ©rer lorsquâil sâagit de dĂ©terminer un emploi convenable. Le critĂšre de la solution la plus Ă©conomique, bien quâimplicite Ă une saine gestion, ne doit pas lâemporter sur le droit du travailleur Ă un plan individualisĂ© de rĂ©adaptation qui tienne compte de sa situation particuliĂšre et de tous les critĂšres prĂ©vus Ă la loi[17]. Comme lâemploi convoitĂ© par le travailleur respecte Ă premiĂšre vue les critĂšres contenus Ă la dĂ©finition dâemploi convenable, la CSST devrait refaire ses calculs pour sâassurer que la dĂ©pense additionnelle de 33 000 $ requise par un programme de formation ne serait pas compensĂ©e par la diminution de lâindemnitĂ© rĂ©duite de remplacement du revenu qui en rĂ©sulterait. Il est vrai que le travailleur a eu un Ă©chec en chimie et quâil sâagit dâune matiĂšre importante dans la nouvelle formation quâil aimerait avoir. Il a cependant reçu une mention dâexcellence lors de lâĂ©mission de son diplĂŽme de secondaire V et semble trĂšs dĂ©terminĂ© dans son dĂ©sir dâoccuper lâemploi quâil convoite.
[64] En rĂ©sumĂ©, le tribunal croit que la CSST et le travailleur devront faire montre de souplesse, dâouverture dâesprit et de bonne foi afin de tenter de trouver finalement un emploi convenable au travailleur dans le respect des prescriptions de la loi et ainsi mettre fin Ă un processus qui aura durĂ© bien trop longtemps.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LĂSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requĂȘte de monsieur AndrĂ© Lacasse, le travailleur;
INFIRME la dĂ©cision rendue par la Commission de la santĂ© et de la sĂ©curitĂ© du travail le 15 janvier 2003 Ă la suite dâune rĂ©vision administrative;
DĂCLARE que lâemploi de prĂ©posĂ© Ă la location de matĂ©riel sportif nâest pas convenable pour le travailleur et quâil nâĂ©tait pas apte Ă lâoccuper Ă compter du 22 juillet 2002;
DĂCLARE que le travailleur a droit aux bĂ©nĂ©fices prĂ©vus par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles;
RETOURNE le dossier Ă la Commission de la santĂ© et de la sĂ©curitĂ© du travail afin quâun nouvel emploi convenable soit dĂ©terminĂ© dans le respect des prescriptions de la loi;
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Me JEAN-FRANĂOIS CLĂMENT |
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Commissaire |
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DENIS PARADIS, AVOCAT |
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Représentant de la partie requérante |
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PANNETON LESSARD (Me Sonia Grenier) |
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Représentante de la partie intervenante |
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[1]Â Â Â Â Â Â Â Â Â L.R.Q., c. A-3.001
[2]         Roy et Deniso Lebel Inc. (Div. Scierie), C. L.P. 155855-01C-0102, 2 octobre 2001, C. Bérubé
[3]Â Â Â Â Â Â Â Â Â Provost et Laboratoire
Ville-Marie inc., C.A.L.P.33847-04-9111, 27 février 1992, P. Brazeau,
révision rejetée le 5 novembre 1992, R. Chartier; Moreau et C. G. Fortin inc., C.A.L.P.
[4]Â Â Â Â Â Â Â Â Â Lapointe et Ateliers de
mécanique Lapointe enr., C.A.L.P.
[5]Â Â Â Â Â Â Â Â Â CSST et Fiset, C.A.L.P.
[6]Â Â Â Â Â Â Â Â Â Brault et Produits Forestiers Tembec
inc.,
[7]         Perrier et Coopérative
Solidarité Bon Ménage, C.L.P.
[8]Â Â Â Â Â Â Â Â Â CSST et Goyette, C.A.L.P.
[9]Â Â Â Â Â Â Â Â Â Bouchard et R. Malouin
& Fils inc. C.A.L.P.
[10]Â Â Â Â Â Â Â Â Duguay et Construction du Cap-Rouge
inc.,
[11]Â Â Â Â Â Â Â Â Provost et Gattola inc.,
C.A.L.P.
[12]        Caron et Transport Network Québec ltée,
C.A.L.P.
[13]        Lajoie et SystÚme intérieur Laval inc.,
[14]Â Â Â Â Â Â Â Â Belisle et Eddy inc.,
C.A.L.P.
[15]Â Â Â Â Â Â Â Â Gervais et Aliments
Maple Leaf,
[16]        Ficara et Marché Bonanza inc.,
[17]        Ganon et 110436 Canada ltée, C.A.L.P.
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