Décision

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St-Pierre c. Meubles Branchaud

2015 QCCQ 4713

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

ROUYN-NORANDA

LOCALITÉ DE

ROUYN-NORANDA

« Chambre civile »

N° :

600-32-003497-153

 

DATE :

29 mai 2015

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

NANCY McKENNA, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

NICOLE ST-PIERRE

Demanderesse

 

c.

 

MEUBLES BRANCHAUD

Défenderesse

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]           Madame Nicole St-Pierre réclame de Meubles Branchaud la somme de 788,97 $ représentant le coût d’achat d’une cuisinière Frigidaire et d’une garantie prolongée.

[2]           Meubles Branchaud conteste la réclamation alléguant que la cuisinière est tout à fait fonctionnelle.

CONTEXTE FACTUEL

[3]           Le 10 avril 2010, la demanderesse achète de la défenderesse une cuisinière de marque Frigidaire à surface de céramique unie. Elle défraie également 100 $ pour une garantie prolongée de 5 ans, au coût de 100 $. Toutefois, aucune copie de la garantie prolongée n’est remise à la demanderesse.

[4]           En février 2011, la demanderesse constate qu’en opérant le four il se dégage une humidité telle que la fenêtre de la porte de la cuisinière devient tout embuée. Elle communique avec la défenderesse qui envoie un technicien pour examiner la cuisinière. Le caoutchouc de la porte de la cuisinière est alors remplacé.

[5]           Par la suite, la demanderesse s’aperçoit que la porte ne ferme pas de façon étanche et que le problème d’humidité persiste. En 2012, la défenderesse est de nouveau sollicitée et on procède alors au changement de la porte de la cuisinière. La première porte de remplacement doit à son tour être changée puisqu’il ne s’agit pas du bon modèle.

[6]           La demanderesse et son conjoint témoignent que le remplacement de la porte n’a fait qu’aggraver les problèmes. En effet, le problème d’humidité persiste et provoque même des gouttelettes d’eau à la sortie de la cheminée à proximité du rond de poêle. De plus, l’humidité provoque un circuit électrique lors de la mise en marche de deux des ronds de poêle.

[7]           Pour ce qui est de la porte, elle semble mal cadrée et non étanche. Des photos déposées en preuve témoignent de cette affirmation[1].

[8]           Après réception de la mise en demeure, la défenderesse fait de nouveau appel à un technicien qui se rend chez la demanderesse. Se fondant sur le rapport du technicien, la défenderesse refuse d’honorer la garantie au motif que la cuisinière est tout à fait fonctionnelle. Le rapport du technicien conclut que l’humidité sort par la cheminée comme elle se doit, que les ronds fonctionnent adéquatement et que la porte de la cuisinière n’est pas croche[2].

ANALYSE ET DÉCISION

[9]           Le contrat passé entre les parties est un contrat de consommation qui est régi notamment par la Loi sur la protection du consommateur.

[10]        À cet égard, les articles 37, 38, 53, 262 et 272 L.P.C. trouvent application dans la présente affaire :

37. Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à l'usage auquel il est normalement destiné.

38. Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation du bien.

53. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d'exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l'objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire.

Il en est ainsi pour le défaut d'indications nécessaires à la protection de l'utilisateur contre un risque ou un danger dont il ne pouvait lui-même se rendre compte.

Ni le commerçant, ni le fabricant ne peuvent alléguer le fait qu'ils ignoraient ce vice ou ce défaut.

Le recours contre le fabricant peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien.

262. À moins qu'il n'en soit prévu autrement dans la présente loi, le consommateur ne peut renoncer à un droit que lui confère la présente loi.

272. Si le commerçant ou le fabricant manque à une obligation que lui impose la présente loi, un règlement ou un engagement volontaire souscrit en vertu de l'article 314 ou dont l'application a été étendue par un décret pris en vertu de l'article 315.1, le consommateur, sous réserve des autres recours prévus par la présente loi, peut demander, selon le cas:

 a) l'exécution de l'obligation;

 b) l'autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;

 c) la réduction de son obligation;

 d) la résiliation du contrat;

 e) la résolution du contrat; ou

 f) la nullité du contrat,

sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs.

[11]        De plus en ce qui a trait à la garantie prolongée, il est utile de souligner les obligations du commerçant[3] :

45. Un écrit qui constate une garantie doit être rédigé clairement et indiquer:

 a) le nom et l'adresse de la personne qui accorde la garantie;

 b) la description du bien ou du service qui fait l'objet de la garantie;

 c) le fait que la garantie puisse ou non être cédée;

 d) les obligations de la personne qui accorde la garantie en cas de défectuosité du bien ou de mauvaise exécution du service sur lequel porte la garantie;

 e) la façon de procéder que doit suivre le consommateur pour obtenir l'exécution de la garantie, en plus d'indiquer qui est autorisé à l'exécuter; et

 f) la durée de validité de la garantie.

[12]        Les articles 2803 et 2804 du Code civil du Québec énoncent qu'il appartient à celui qui prétend avoir un droit de prouver les faits qui soutiennent sa prétention selon la prépondérance de la preuve.

[13]        Il appartient donc à la demanderesse de faire la preuve que la défenderesse a contrevenu aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 37 et 38 L.P.C. précités.

[14]        La preuve révèle que la cuisinière est atteinte d’un défaut de fabrication. Malgré les nombreuses plaintes formulées par la demanderesse au fil des ans, le problème n’est toujours pas résolu. Le Tribunal retient qu’un défaut de la porte de la cuisinière a entraîné d’autres problèmes, soit l’accumulation d’humidité et d’eau sur la surface de la cuisinière de même qu’un mauvais fonctionnement de deux ronds de la cuisinière.

[15]        La défenderesse n’a pas fait la preuve des allégations de sa contestation en ce qui concerne le bon fonctionnement de la cuisinière. De plus, le rapport lacunaire du technicien ne fait aucunement état du fonctionnement de la cuisinière lors de l’utilisation du four et des conséquences qui en découlent.

[16]        Un déboursé de 688,83 $ pour une cuisinière devrait être garant d’une qualité telle qu’il procure à l’acheteur l’usage auquel il est en droit de s’attendre. Ce qui n’est pas le cas dans la présente affaire.

[17]        Au surplus, le Tribunal estime que la défenderesse ne lui a pas présenté une preuve prépondérante que les défectuosités de la cuisinière n’étaient pas couvertes par la garantie prolongée.

[18]        En clair, la garantie conventionnelle trouve ici application et au surplus, la responsabilité de la défenderesse est également engagée en vertu de l’application des articles 37 et 38 L.P.C.

[19]        En vertu de l’article 272 L.P.C., il y a lieu d’annuler la vente de la cuisinière et non pas la vente de la garantie prolongée. Conséquemment, la demanderesse remettra la cuisinière, la défenderesse en prendra livraison à ses frais et devra rembourser à la demanderesse le prix d’achat, soit 598,99 $ plus taxes.

[20]        Enfin, le Tribunal accorde à la demanderesse la somme de 11,50 $ pour les frais d'envoi de la mise en demeure.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[21]        ACCUEILLE partiellement la demande;

[22]        ANNULE la vente intervenue entre les parties le 10 avril 2010 concernant une cuisinière de marque Frigidaire;

[23]        ORDONNE à la défenderesse de reprendre à ses frais ladite cuisinière;

[24]        CONDAMNE la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 700,33 $ avec intérêts au taux légal plus l’indemnité prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 28 janvier 2015, date de la mise en demeure;

[25]        CONDAMNE la défenderesse à payer à la défenderesse les frais judiciaires de 75,25 $.

 

 

__________________________________

NANCY McKENNA, J.C.Q.

 

Date d’audience :

7 mai 2015

 



[1] Pièce P-1

[2] Pièce D-2

[3] Article 45 Loi sur la protection du consommateur

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