Mérius c. Entreprises Fola inc. |
2016 QCCQ 14778 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-32-148402-151 |
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DATE : |
30 novembre 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
JEFFREY EDWARDS, J.C.Q. |
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JÉSULA MÉRIUS |
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Demanderesse |
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c. |
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LES ENTREPRISES FOLA INC. |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Un contrat d’achat et d’installation d’une thermopompe intervient entre madame Jésula Mérius et Les Entreprises Fola inc. (Fola). Le contrat est conclu au domicile de Mme Mérius. Fola agit alors comme commerçant itinérant au sens des articles 55 et suivants de la Loi sur la protection du consommateur (Loi)[1].
[2] Cinq mois plus tard, la thermopompe ne fonctionne plus.
[3] De plus, Mme Mérius allègue que Fola, lors de la vente, ne respecte pas certaines dispositions impératives prévues à la Loi concernant la vente conclue par vendeur itinérant. Compte tenu de ce qui précède, Mme Mérius demande que le contrat intervenu soit résolu et annulé, avec toutes les conséquences juridiques qui en découlent.
Est-ce que Mme Mérius est en droit d’obtenir la résolution du contrat de vente :
1) en raison des omissions commises lors de la vente par Fola en vertu de la Loi sur la protection du consommateur?
2) en raison de l’état défectueux de la thermopompe vendue et installée?
[4] Le 30 juin 2014, un contrat pour l’achat d’une thermopompe intervient entre les parties. Le représentant de Fola est Richard Horecki. Le contrat est conclu au domicile de Mme Mérius. Fola admet que M. Horecki agit alors comme commerçant itinérant en vertu de la Loi. En effet, lors de l’audition du présent dossier, M. Michel Marien représentant de Fola le confirme. Par ailleurs, M. Horecki n’est pas présent à l’audition.
[5] Afin de la convaincre d’acheter la thermopompe, M. Horecki fait à Mme Mérius de multiples promesses et déclarations selon lesquelles la thermopompe envisagée lui ferait économiser des frais d’électricité et que le coût d’achat serait en partie payé par une subvention gouvernementale.
[6] Mme Mérius signe le contrat le même jour. En même temps, un contrat de crédit pour financer l’achat de la thermopompe est signé par Mme Mérius et M. Horecki, ce dernier agissant cette fois comme représentant de Crelogix Acceptance Corporation (Crelogix).
[7] Selon Mme Mérius, M. Horecki ne lui remet pas lors de la signature de ces contrats, l’Énoncé des droits de résiliation du consommateur et le formulaire de résolution, tel que prévu par la Loi[2].
[8] Les multiples promesses et déclarations du représentant de Fola se sont révélées fausses. Il n’y a aucune économie des frais d’électricité. Mme Mérius ne reçoit aucune subvention gouvernementale en paiement partiel du coût d’achat de la thermopompe.
[9] Cinq (5) mois plus tard, soit à partir de novembre 2014, la thermopompe cesse de fonctionner. Mme Mérius fait alors des appels multiples à Fola pour qu’elle revienne réparer la thermopompe. Mme Mérius affirme que ses nombreux appels pour un service de réparation sont alors ignorés par Fola qui ne les retourne pas.
[10] Après avoir insisté, des représentants de Fola se sont présentés deux fois. Mais après inspection, ils déclarent à Mme Mérius que l’appareil a besoin d’une certaine pièce et qu’ils reviendraient avec ladite pièce, ce qui n’arrive pas.
[11] Aucun représentant de Fola ne revient pour installer la pièce manquante ou pour réparer autrement la thermopompe qui a cessé de fonctionner. Malgré que la thermopompe ne fonctionne pas, et malgré l’absence de service ou de réparation, les prélèvements automatiques mensuels à partir du compte bancaire de Mme Mérius d’une somme de 165,53 $ continuent d’être pris du 1er septembre 2014 au 1er juin 2015, pour un total de 1 489,77 $ (9 x 165,53 $). À partir de ce dernier paiement, Mme Mérius prend les mesures nécessaires pour faire cesser les prélèvements automatiques.
[12] Mme Mérius envoie deux (2) mises en demeure[3] à Fola mettant fin au contrat, l’une en date du 15 décembre 2014, l’autre en date du 29 juin 2015. Mme Mérius produit également un rapport d’inspection d’un professionnel spécialisé en thermopompe, soit P. Bourassa Thermopompe[4]. Selon ce rapport, l’unité vendue par Fola est défectueuse, car la carte électronique et le compresseur ne fonctionnent pas et sont atteints de vices de fabrication.
[13] Quant à Fola, son représentant à la Cour, Michel Marien, présente une tout autre version des faits. Selon les informations qui lui ont été communiquées, la thermopompe vendue fonctionne bien lors des visites par les techniciens de Fola. C’était plutôt Mme Mérius qui ne collaborait pas quant aux tentatives de Fola d’augmenter l’efficacité et le rendement de la thermopompe.
[14] Mme Mérius est catégorique. Lors de la vente, M. Horecki ne lui a remis ni l’Énoncé des droits de résolution du consommateur ni le formulaire de résolution prévu par la Loi. Mme Mérius produit tous les documents originaux reçus lors de la vente et ces documents ne s’y trouvent pas.
[15] Pour sa part, M. Horecki n’a pas témoigné. Le représentant de Fola à l’audience, Michel Marien, n’était pas présent à ce moment. Lors de l’audience à la Cour, M. Marien avait en sa possession l’original du commerçant du contrat intervenu. Mais ses documents contractuels originaux n’avait ni l’annexe comprenant cet énoncé ni le formulaire de résolution prescrits par la Loi, ce qui tend à confirmer que de tels documents n’ont effectivement pas été remis à Mme Mérius lors de la signature du contrat.
[16] Le Tribunal considère que la prépondérance de la preuve soutient la version des faits de Mme Mérius selon laquelle ni ledit énoncé ni le formulaire ne lui ont été remis lors de la signature du contrat de vente.
[17] L’article 58 in fine de la Loi énonce ainsi :
58. Le commerçant doit annexer au double du contrat qu’il remet au consommateur un Énoncé des droits de résolution du consommateur et un formulaire de résolution conformes au modèle de l’annexe 1.
[18] Les articles 59, 61, 62, 63 et 64 de la Loi précisent les conséquences juridiques d’une telle omission. Ces articles se lisent en partie ainsi :
59. Le contrat conclu entre un commerçant itinérant et un consommateur peut être résolu à la discrétion de ce dernier dans les dix jours qui suivent celui où chacune des parties est en possession d’un double du contrat.
Ce délai est toutefois porté à un an à compter de la date de la formation du contrat dans l’un ou l’autre des cas suivants :
[…]
d) un Énoncé des droits de résolution du consommateur et un formulaire de résolution conformes au modèle de l’annexe 1 ne sont pas annexés au contrat lors de sa formation;
61. Le consommateur se prévaut de la faculté de résolution :
[…]
c) par un autre avis écrit à cet effet au commerçant itinérant ou à son représentant.
62. Le contrat est résolu de plein droit à compter de la remise du bien ou de l’envoi du formulaire ou de l’avis.
Un contrat de crédit conclu par le consommateur, même avec un tiers commerçant, à l’occasion ou en considération d’un contrat conclu avec un commerçant itinérant, forme un tout avec ce contrat et est, de même, résolu de plein droit dès lors qu’il résulte d’une offre, d’une représentation ou d’une autre forme d’intervention du commerçant itinérant.
63. Dans les 15 jours qui suivent la résolution, les parties doivent se restituer ce qu’elles ont reçu l’une de l’autre.
[…]
Le commerçant itinérant assume les frais de restitution.
64. Le commerçant itinérant assume les risques de perte ou de détérioration, même par cas de force majeure.
[Les italiques ont été ajoutés par le Tribunal]
[19] Mme Mérius avait donc le droit de résoudre ou d’annuler les contrats intervenus dans l’année suivant leur conclusion, soit jusqu’au 30 juin 2015 en envoyant un avis à cet effet au commerçant.
[20] Or, selon les faits établis, Mme Mérius a effectivement envoyé deux avis à Fola à cette fin, et ce, avant l’expiration du délai prévu du 30 juin 2015. En effet, ces avis ont été envoyés le 15 décembre 2014 et le 29 juin 2015.
[21] Ainsi, conformément au premier alinéa de l’article 62 de la Loi, le contrat de vente entre Mme Mérius et Fola était résolu de plein droit, et ce, à compter de l’envoi du premier avis, soit le 15 décembre 2014.
[22] De plus, conformément au deuxième alinéa de l’article 62 de la Loi, le contrat de crédit (ou de financement) intervenu entre Mme Mérius et Crelogix était également résolu et annulé au même moment.
[23] Le Tribunal prend acte et constatera donc la résolution judiciaire de ces contrats aux conclusions de ce jugement.
[24] Compte tenu de la conclusion à laquelle la Cour arrive à la question précédente, il n’est pas strictement nécessaire de répondre à cette question. Néanmoins, il est tout de même utile de préciser que, même si le Tribunal n’arrivait pas à la conclusion mentionnée à la question précédente, la prépondérance de la preuve établit que la thermopompe vendue et livrée est défectueuse et ne fonctionne pas.
[25] C’est Mme Mérius qui a vécu avec la thermopompe depuis son achat. Elle témoigne que la thermopompe ne fonctionne pas depuis novembre 2014. Ses nombreuses plaintes et mises en demeure écrites, rédigées lors des faits, confirment et corroborent sa version des faits. De plus, un rapport d’inspection confirme l’état défectueux de la thermopompe.
[26] Le représentant de Fola qui a témoigné à l’audience n’était pas présent lors de la vente et ne s’est jamais rendu chez Mme Mérius et n’a jamais examiné la thermopompe problématique. De plus, M. Marien n’a produit aucune note de service d’un technicien de Fola à l’appui de sa version selon laquelle la thermopompe fonctionnait lors des visites de ses techniciens ou encore qui fait état d’un manque de collaboration de Mme Mérius.
[27] Ainsi, la prépondérance de la preuve confirme l’état défectueux de la thermopompe. En conséquence, Mme Mérius a également raison de se plaindre que les garanties de bon fonctionnement, de durabilité et contre les vices cachés prévues aux articles 37, 38 et 53 de la Loi ont été violées par Fola. Ces articles se lisent ainsi :
37. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse
servir à l’usage auquel il est normalement destiné.
38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.
53. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit
d’exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours
fondé sur un vice caché du bien qui a fait l’objet du contrat, sauf si le
consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire.
Il en est ainsi pour le défaut d’indications nécessaires à la protection de l’utilisateur contre un risque ou un danger dont il ne pouvait lui-même se rendre compte.
Ni le commerçant, ni le fabricant ne peuvent alléguer le fait qu’ils ignoraient ce vice ou ce défaut.
Le recours contre le fabricant peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien.
[28] Selon la prépondérance de la preuve, la thermopompe vendue n’a pas servi à un usage normal, et ce, pendant une durée raisonnable, ce qui devait être de plusieurs années selon le représentant même de Fola. Qui plus est, la garantie conventionnelle prévue au contrat pendant une période d’un an n’a pas été respectée. Conformément à l’article 272 de la Loi, Mme Mérius est donc également en droit de demander pour ces motifs la résolution du contrat intervenu.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
PREND ACTE et CONSTATE, en date du 15 décembre 2014 et, dans la mesure requise, PRONONCE la RÉSOLUTION du contrat d’achat portant le numéro 13538 (Pièce P-1) intervenu entre Jésula Mérius et Les Entreprises Fola inc.;
CONSTATE en date du 15 décembre 2014 la RÉSOLUTION du contrat de crédit intervenu entre Crelogix Acceptance Corporation et Jésula Mérius portant le numéro 23629716 (Pièce P-10);
CONDAMNE Les Entreprises Fola inc. à payer à Mme Jésula Mérius la somme de 1 489,77 $ avec intérêts au taux légal de 5 % par année et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter de la mise en demeure qui est subséquente à ces paiements, soit celle du 29 juin 2015 (Pièce P-3);
PREND ACTE de l’offre de Jésula Mérius de permettre à Les Entreprises Fola inc. de venir prendre la thermopompe vendue, à la condition et moyennant paiement des montants dus à Jésula Mérius en vertu du présent jugement;
CONDAMNE Les Entreprises Fola inc. à payer les frais de justice (frais de timbre judiciaire) de 200 $.
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__________________________________ Jeffrey Edwards, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
8 novembre 2016 |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.