Archambault c. Bureau en Gros |
2015 QCCQ 11715 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances »
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-32-130514-112 |
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DATE : |
29 septembre 2015 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
DOMINIQUE VÉZINA, J.C.Q. |
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MURIELLE ARCHAMBAULT |
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Demanderesse |
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c. |
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BUREAU EN GROS |
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HEWLETT PACKARD |
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Défenderesses |
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JUGEMENT |
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[1] Suite à l’achat d’un ordinateur Hewlett Packard (HP), Murielle Archambault réclame 2 863.93 $ du vendeur Bureau en Gros et du fabriquant Hewlett Packard.
[2] Bureau en Gros ne produit aucune contestation au dossier de la Cour. Hewlett Packard en dépose une, mais est absente à l’audience.
A) Mme Archambault a-t-elle établi que l’ordinateur acheté n’a pas servi à un usage normal pendant une durée raisonnable?
B) Quels sont les dommages auxquels Mme Archambault a droit?
[3] Le 12 février 2008, Mme Archambault achète un ordinateur HP, avec une garantie prolongée de 2 ans[1].
[4] En août 2011, Mme Archambault commence à éprouver des difficultés avec son ordinateur : l’écran présente des couleurs bleuâtres, l’écran « gèle », l’ordinateur se ferme tout seul et le traitement des opérations est lent.
[5] Mme Archambault entame différentes démarches, tant auprès de Bureau en Gros que de Hewlett Packard pour solutionner les problèmes, sans succès.
[6] Le 8 septembre 2011[2], elle envoie une mise en demeure à Bureau en Gros et à Hewlett Packard.
[7] Le 5 octobre 2011[3], Mme Archambault achète un nouvel ordinateur.
[8] Le 12 octobre 2011[4], Hewlett Packard lui écrit :
Je suis en réception de votre lettre a l’OPC et la seule chose que je peu vous offrir est un remboursement partial pour votre appareil.
Celle-ci est plus de trois ans et demie et n’a jamais eu de service précédent dans sa vie, et maintenant votre appareil et passer le date maximum de support.
Ceci veut dire que HP n’a plus de pièce pour un service sur votre appareil.
(reproduction intégrale)
A) Mme Archambault a-t-elle établi que l’ordinateur acheté n’a pas servi à un usage normal pendant une durée raisonnable?
[9] En matière civile, celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui justifient ses prétentions[5]. À cet égard, le fardeau de la preuve repose sur la partie qui présente une demande. Celle-ci doit présenter une preuve selon la balance des probabilités qu’on appelle une preuve prépondérante. Ceci signifie que Mme Archambault doit démontrer que ses prétentions factuelles sont plus probables que leur inexistence[6] pour avoir gain de cause.
[10] Mme Archambault a conclu un contrat de vente avec Bureau en Gros, lequel contrat est régi par la Loi sur la protection du consommateur (LPC)[7].
[11] La LPC prévoit une garantie de qualité et une garantie de durabilité :
37. Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à l'usage auquel il est normalement destiné.
38. Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation du bien.
[12] Quant à l’exercice du recours, la LPC indique :
54. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d'exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur une obligation résultant de l'article 37, 38 ou 39.
[…]
[13] La garantie conventionnelle n’exclut pas la garantie de qualité et de durabilité de la LPC[8].
[14] Hewlett Packard présente une contestation écrite laquelle n’est soutenue par aucune preuve présentée à l’audience. On peut toutefois y lire :
8) Le 12 octobre 2011 la partie demanderesse a rejoint la partie défenderesse par téléphone. D’après les investigations, l’appareil n’a jamais eu un service précédemment et maintenant l’appareil est passé le maximum garanti de support (plus de service disponible). En considération de bonne volonté, la partie défenderesse a offert un remboursement partiel due à l’âge de l’appareil pour la valeur de 500,00 $. La partie demanderesse a refusé.
[…]
10) La mémoire vive a besoin d’être remplacer.
11) La partie défenderesse soumet qu’elle a exécuté tous ses obligations en vertu de la garantie envers la partie demanderesse. Puisque l’appareil n’est plus sous la garantie du manufacturer. Même si ce n’était pas le cas, la réclamation d’un montant de 2 200,00$ de la partie demanderesse est grossièrement exagérée vu que l’ordinateur a plus de 3 ans et demi.
12) La partie défenderesse soumet que l’ordinateur a eu une vie raisonnable.
(reproduction intégrale)
[15] Or, pour la disponibilité des pièces de rechange, la LPC prévoit :
39. Si un bien qui fait l'objet d'un contrat est de nature à nécessiter un travail d'entretien, les pièces de rechange et les services de réparation doivent être disponibles pendant une durée raisonnable après la formation du contrat.
Le commerçant ou le fabricant peut se dégager de cette obligation en avertissant le consommateur par écrit, avant la formation du contrat, qu'il ne fournit pas de pièce de rechange ou de service de réparation.
[16] Mme Archambault achète un ordinateur pour son usage personnel. Elle établit en avoir fait un usage normal.
[17] Après l’achat remontant à 3 ans et demi, l’ordinateur n’est plus fonctionnel.
[18] Par exemple, dans Vallières c. Boutique du Bureau Gyva inc.[9], le Tribunal a déterminé qu’un ordinateur fonctionnel sur une période d’un an et demi ne présentait pas la garantie de durabilité.
[19] Selon la balance des probabilités, Mme Archambault a établi que l’ordinateur acheté n’a pas servi à un usage normal pendant une durée raisonnable.
B) Quels sont les dommages auxquels Mme Archambault a droit?
[20] L’article 272 LPC prévoit les recours disponibles à Mme Archambault.
[21] Cette dernière demande l’annulation du contrat et des dommages-intérêts.
[22] L’annulation du contrat ne peut être octroyée puisque Mme Archambault a bénéficié pendant 3 ans et demi de l’ordinateur et qu’il n’est plus en sa possession pour le remettre à Bureau en Gros ou à Hewlett Packard.
[23] Cependant, Mme Archambault a droit à des dommages-intérêts.
[24] À ce titre, Mme Archambault réclame 2 863.93 $.
[25] Le Tribunal analyse chacune des rubriques de dommages.
a) Achat d’un nouvel ordinateur, achat et installation de programmes et d’antivirus, assemblage et configuration de l’ordinateur : 1 424 $
[26] Mme Archambault dépose deux factures[10] pour justifier ce montant.
[27] Du total des deux factures, le Tribunal retranche la nouvelle garantie de 4 ans (249.99 $), le montant lié au port 500 GB (69.99 $) et le montant pour le « restore create » (99.99 $)[11]. Le total retranché est donc de 419.97 $, auquel il faut ajouter les taxes[12]. Le Tribunal considère donc, pour le nouvel ordinateur, un coût de 941.14 $.
[28] De ce coût, il faut déduire une certaine dépréciation puisque Mme Archambault fait alors l’acquisition d’un ordinateur neuf.
[29] Le Tribunal a discrétion. Il évalue qu’il faut retrancher 40% de 941.14 $ et alloue donc 564.68 $.
[30] En matière contractuelle, le Code civil du Québec prévoit :
1613. En matière contractuelle, le débiteur n'est tenu que des dommages-intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir au moment où l'obligation a été contractée, lorsque ce n'est point par sa faute intentionnelle ou par sa faute lourde qu'elle n'est point exécutée; même alors, les dommages-intérêts ne comprennent que ce qui est une suite immédiate et directe de l'inexécution.
[31] Le Tribunal garde à l’esprit ce principe pour les prochaines rubriques de dommages.
b) Frais encourus pour la vérification de l’ordinateur : 113.93 $[13]
[32] Le Tribunal alloue ce montant.
c) Paiement du service Internet de la mi-août 2011 au 5 octobre 2011 : 25.00 $
[33] Sans ordinateur fonctionnel, Mme Archambault a payé ce service inutilement. Le Tribunal alloue ce montant.
d) Frais de déplacement (kilométrage et transport en commun)[14] : 506.97 $
[34] Mme Archambault calcule ses frais de déplacement en y incluant ses vacations à la Cour pour préparer son dossier. Elle considère aussi ses visites en voiture au magasin
[35] Le Tribunal a discrétion pour évaluer les dommages et lui alloue un montant de 150 $ pour ses frais de déplacement.
e) Frais de poste : 18.25 $[15]
[36] Le Tribunal alloue ce montant.
f) Frais de papeterie : 8.18 $[16]
[37] Le Tribunal alloue ce montant.
g) Frais de photocopie : 17.16 $[17]
[38] Le Tribunal alloue ce montant.
h) Dommages, troubles et inconvénients : 500.00 $
[39] Mme Archambault a été privée de son ordinateur et a dû se déplacer et effectuer différentes démarches pour tenter d’en arriver à une solution. En l’absence de résultat, elle a acheté un nouvel ordinateur.
[40] Le Tribunal a discrétion et alloue à ce titre un montant de 250.00 $[18].
[41] Le montant total des dommages-intérêts accordés est donc de 1 147.20 $.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE en partie l’action de la demanderesse Murielle Archambault contre les défenderesses Bureau en Gros et Hewlett Packard;
[42] CONDAMNE solidairement les défenderesses Bureau en Gros et Hewlett Packard à payer 1 147.20 $ à la demanderesse Murielle Archambault, avec l’intérêt légal de 5 % par année et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, calculés depuis le 8 septembre 2011;
CONDAMNE solidairement les défenderesses Bureau en Gros et Hewlett Packard à payer à la demanderesse Murielle Archambault les frais judiciaires de 100 $.
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__________________________________ DOMINIQUE VÉZINA, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
14 septembre 2015 |
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[1] Pièce P-1.
[2] Pièce P-4.
[3] Pièce P-2.
[4] Pièce P-7.
[5] Art. 2803 Code civil du Québec (C.c.Q.)
[6] Art. 2804 C.c.Q.
[7] RLRQ c. P.-40.1.
[8] Vallières c. Boutique du Bureau Gyva inc., 2008 QCCQ 2904.
[9] 2008 QCCQ 2904.
[10] Pièce P-2.
[11] Ce dernier item ne pouvait être expliqué par Mme Archambault.
[12] 419.97 $ + 21.00 $ (TPS) + 41.89 $ (TVQ) = 482.86 $
[13] Pièce P-3.
[14] Pièce P-9.
[15] Pièce P-10.
[16] Pièce P-11.
[17] Pièce P-11.
[18] Tousignant-Labarge c. Magasin Best Buy ltée (Future Shop entrepôt de l’électronique), 2009 QCCQ 4825.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.