Décision

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St-Hubert Express Verdun

2011 QCCLP 4970

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Longueuil

20 juillet 2011

 

Région :

Montérégie

 

Dossier :

411290-62-1005

 

Dossier CSST :

134752989

 

Commissaire :

Doris Lévesque, juge administratif

 

______________________________________________________________________

 

 

 

St-Hubert Express Verdun

 

Partie requérante

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 27 mai 2010, St-Hubert Express Verdun (l’employeur) dépose une requête auprès de la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative, le 14 avril 2010.

[2]           Par cette décision, la CSST maintient celle rendue initialement en imputation le 29 janvier 2010. Elle conclut que l’employeur n’a pas droit à un transfert de l’imputation du coût des prestations reliées à l’accident du travail subi par monsieur Robert Ferland (le travailleur) le 7 avril 2009, puisque le motif invoqué par l’employeur ne permet pas de conclure qu’il est obéré injustement.

[3]           Une audience était prévue, à Longueuil, le 28 avril 2011. Toutefois, entre-temps, l’employeur a avisé qu’il serait absent à l’audience et a demandé un délai pour produire son argumentation écrite, délai accordé jusqu’au 12 mai 2011.

[4]           Le 12 mai 2011, le dossier est mis en délibéré.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[5]           L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit d’obtenir le transfert des coûts reliés à cet accident du travail du 7 avril 2009, en vertu de l’article 326 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

LES FAITS ET LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[6]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si l’employeur a droit d’obtenir le transfert des coûts reliés à la lésion professionnelle du 7 avril 2009 au motif qu’il est obéré injustement.

[7]           La demande de l'employeur relative à un transfert de l’imputation du coût des prestations reliées à l’accident du travail trouve son assise sur l’article 326 de la loi qui énonce, en cette matière :

326.  La Commission impute à l'employeur le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail survenu à un travailleur alors qu'il était à son emploi.

 

Elle peut également, de sa propre initiative ou à la demande d'un employeur, imputer le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail aux employeurs d'une, de plusieurs ou de toutes les unités lorsque l'imputation faite en vertu du premier alinéa aurait pour effet de faire supporter injustement à un employeur le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail attribuable à un tiers ou d'obérer injustement un employeur.

 

L'employeur qui présente une demande en vertu du deuxième alinéa doit le faire au moyen d'un écrit contenant un exposé des motifs à son soutien dans l'année suivant la date de l'accident.

__________

1985, c. 6, a. 326; 1996, c. 70, a. 34.

 

 

[8]           D’emblée, la Commission des lésions professionnelles constate que l’employeur, en déposant sa demande de transfert d’imputation le 4 novembre 2009, respecte le délai prévu à la loi, puisque sa demande a été faite dans l’année suivant la date de l’accident du 7 avril 2009.

[9]           Le premier alinéa de l’article 326 de la loi prévoit qu’en vertu du principe général en matière d'imputation, la CSST impute à l’employeur le coût des prestations dues en raison d’un accident du travail survenu à un travailleur, alors qu’il était à son emploi.

[10]        L’employeur invoque plutôt l’exception prévue au deuxième alinéa de l’article 326 de la loi pour demander une désimputation partielle, puisqu’il considère être obéré injustement en raison du fait qu’il est imputé de sommes reliées à l'indemnité réduite de remplacement du revenu que reçoit le travailleur, en relation avec un autre événement survenu antérieurement chez un autre employeur.

[11]        Plus précisément, l’employeur prétend qu’il ne devrait être imputé que pour le coût de l’indemnité de remplacement du revenu versée au travailleur sur une base salariale de 15 366 $, représentant le salaire gagné par celui-ci au cours des douze derniers mois travaillés au sein de son entreprise.

[12]        L’employeur a-t-il raison de prétendre qu’il est obéré injustement pour ce motif?

[13]        Avant de disposer de cette question en litige, il y a lieu de procéder à un bref rappel des faits.

[14]        Le 7 avril 2009, le travailleur, âgé de 57 ans, est victime d’un accident du travail dans le cadre de son emploi de livreur auprès de l’employeur, ainsi déclaré au formulaire de Réclamation du travailleur :

J’étais parti faire une livraison au retour il fallait que j’arrête à la S.A.Q. ramasser la commande de vin et en prenant la caisse de vin je me suis retourner pour sortir mais rentrer dans le cadrage de porte et la caisse de vin m’as rentrer dans les cotes et j’ai senti comme un os de poulet qui casse il était environ 15 hrs et je me suis dit ça va passer mais à 19 hrs je n’étais plus capable de travailler tellement que j’avais mal et j’ai dit à mon supérieur David Fafard que je m’en allais a l’hopital. [sic]

 

[Dossier C.L.P., page 15]

 

 

[15]        Le 7 avril 2009, le diagnostic de contusion thoracique est posé. C’est ce diagnostic qui est accepté par la CSST dans une décision non contestée[2].

[16]        Au moment de son accident du travail, le travailleur occupait cet emploi de livreur depuis janvier 2007 chez l’employeur au dossier. Il recevait alors une indemnité réduite de remplacement du revenu, à la suite de la détermination d’un emploi convenable, découlant d’une lésion professionnelle antérieure subie chez un autre employeur[3].

[17]        Le 6 mai 2009, la CSST fixe ainsi la base salariale sur laquelle le travailleur va être indemnisé en détaillant ainsi ses calculs :

Détermination du revenu brut

 

Le T se trouve dans une situation particulière puisqu’il reçoit déjà de l’indemnité de remplacement du revenu (IRR réduite). Or, selon l’article 73 LATMP, le revenu brut d’un travailleur victime d’une lésion professionnelle alors qu’il reçoit une indemnité de remplacement du revenu est le plus élevé de celui, revalorisé, qui a servi de base au calcul de son indemnité initiale et de celui qu’il tire de son nouvel emploi.

 

·            Contrat de travail actuel = 32 heures/semaine x $ 7.75/heure ($12 931.42 + pourboires déclarés)

 

·            Base salariale de l’événement d’origine du dossier avec IRR réduites: $ 44 922.69 => c’est ce salaire qui sera retenu car le plus rémunérateur

 

[Dossier C.L.P., page 3]

 

 

[18]        Le 4 novembre 2009, l’employeur manifeste son désaccord avec la base salariale retenue par la CSST pour le calcul de l'indemnité de remplacement du revenu et soutient être obéré injustement en demandant l’application du deuxième alinéa de l’article 326 de la loi.

[19]        Le 14 avril 2010, la CSST, en révision administrative, refuse l'application de l’exception prévue au deuxième alinéa de l'article 326 pour permettre un transfert d’imputation en s’appuyant sur les motifs suivants :

Pour se prévaloir de cette exception, l’employeur doit démontrer des situations précises répondant aux deux critères suivants : soit une situation d’injustice, c’est-à-dire une situation étrangère aux risques que l’employeur doit supporter et que la proportion des coûts attribuables à cette situation d’injustice est significative par rapport aux coûts découlant de l’accident en cause.

 

Une situation étrangère aux risques que l’employeur doit supporter est une situation qui peut être fortuite, inusitée, inhabituelle ou exceptionnelle. Pour la Commission, ces circonstances réfèrent à trois situations qui peuvent donner droit à un transfert d’imputation, soit : une maladie intercurrente, l’interruption de l’assignation temporaire ou bien encore la lésion causée par une négligence grossière et volontaire du travailleur.

 

L’employeur allègue que le salaire annuel retenu, aux fins du versement des IRR reliées à la lésion professionnelle du 7 avril 2009, est supérieur à celui réellement versé au travailleur. Ainsi, il requiert que soient imputées à son dossier uniquement les sommes en lien avec les revenus qu’il a versés à ce dernier. À cet effet, la Révision administrative constate, des éléments au dossier, que la Commission a appliqué la Loi pour établir le revenu brut du travailleur servant au calcul des IRR. Ainsi, la Révision administrative rappelle qu’au moment de l’imputation des coûts, la Commission ne peut qu’appliquer les dispositions de la Loi et porter au compte de l’employeur le coût des prestations reliées à l’accident du travail et que l’application de la Loi ne permet pas de conclure que l’employeur est obéré injustement.

 

[Dossier C.L.P., page 52]

 

 

[20]        Dans son argumentation écrite, l’employeur soutient que l’analyse de la CSST comporte plusieurs erreurs fondamentales en droit. Premièrement, son analyse repose sur des prémisses erronées qui ne font aucunement parties des dispositions législatives ou règlementaires mais reposent plutôt sur des politiques administratives. Or, la notion « d’obérer injustement » n’est aucunement limitée à l’une des situations dont a fait état la CSST.

[21]        Dans un deuxième temps, l’employeur soutient que la CSST a omis d’appliquer les dispositions relatives au financement du régime et qu’il ne faut pas confondre les dispositions visant l’indemnisation des travailleurs avec celles relatives à l’imputation au financement du régime. Il considère que ce n’est pas parce qu’un travailleur a le droit d’être indemnisé conformément aux dispositions de l’article 73 de la loi que l’employeur chez qui survient la « seconde »[4] lésion doit supporter le coût des prestations versées en vertu de la « première » lésion subie par le travailleur. Or, la CSST lui a fait supporter la très grande part des coûts associés à une lésion subie chez un autre employeur, ce qui est injuste et justifie un transfert partiel d’imputation.

[22]        L’employeur indique que le travailleur était à son emploi depuis le mois d’octobre 2008, à titre de livreur à temps partiel, et avait gagné, au cours des douze derniers mois, un revenu 15 366,00 $. Or, la CSST a imputé à son dossier l’ensemble des indemnités de remplacement du revenu versées au travailleur, calculées sur la base salariale revalorisée de 44 922,69 $, établie en fonction du salaire qu’il gagnait chez son employeur au moment de la survenance de sa « première » lésion professionnelle.

[23]        L’employeur soumet une injustice à lui faire supporter coût de ces indemnités excédant celles calculées sur une base salariale de 15 366,00 $, puisque ces indemnités ont déjà été imputées à l’employeur précédent du travailleur. Il estime qu’il ne devrait se voir imputer à son dossier financier que les indemnités calculées sur une base salariale de 15 366,00 $.

[24]        L’employeur ajoute qu'il est en effet injuste de lui faire supporter le coût des prestations qui ont déjà été imputées à un autre employeur et pour lesquelles la CSST a déjà facturé à un employeur les provisions actuarielles nécessaires au paiement des prestations versées au travailleur, à la suite de sa nouvelle lésion professionnelle subie alors qu’il était à son emploi. En agissant ainsi, la CSST va à l’encontre même des objectifs du régime d’assurance que constitue la CSST et de la notion d’équité qui est à la base même du régime.

[25]        La Commission des lésions professionnelles constate que le calcul de l'indemnité de remplacement du revenu versée au travailleur, à la suite de son accident du travail du 7 avril 2009, a été effectué conformément aux dispositions prévues à l'article 73 de la loi qui se lisent ainsi :

73.  Le revenu brut d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle alors qu'il reçoit une indemnité de remplacement du revenu est le plus élevé de celui, revalorisé, qui a servi de base au calcul de son indemnité initiale et de celui qu'il tire de son nouvel emploi.

 

L'indemnité de remplacement du revenu que reçoit ce travailleur alors qu'il est victime d'une lésion professionnelle cesse de lui être versée et sa nouvelle indemnité ne peut excéder celle qui est calculée sur la base du maximum annuel assurable en vigueur lorsque se manifeste sa nouvelle lésion professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 73.

 

 

[26]        Ces dispositions permettent à la CSST de déterminer le revenu brut d'un travailleur à la suite de sa lésion professionnelle, alors qu'il reçoit une indemnité de remplacement du revenu, tel que dans le présent cas. Le législateur a alors prévu que le revenu brut est le plus élevé de celui revalorisé qui a servi de base au calcul de l’indemnité de remplacement du revenu initiale du travailleur et de celui qu'il tirait de son nouvel emploi.

[27]        L’interprétation de l'article 73 de la loi a fait l’objet d'une jurisprudence au fil des ans. Selon le courant majoritaire[5], le fait que le travailleur reçoive une indemnité de remplacement du revenu plus élevée que le revenu brut gagné au moment de la survenance de la lésion professionnelle résulte des effets de l’application de l’article 73 de la loi. Dans un tel cas, il n’y a pas lieu de désimputer la portion du coût des prestations du dossier financier de l’employeur.

[28]        Cette position jurisprudentielle quant à cette interprétation de l'article 73 est ainsi résumée en ces termes dans l’affaire Nettoyeurs Pellican inc.[6] :

[28]      Selon la situation visée, le législateur prévoit donc la façon de déterminer le revenu brut d’un travailleur. Et l’article 73 de la loi prévoit le cas du travailleur victime d’une lésion professionnelle alors qu’il reçoit une indemnité de remplacement du revenu. Dans ce genre de situation, le législateur prévoit spécifiquement que le revenu brut est le plus élevé de celui, revalorisé, qui a servi de base au calcul de son indemnité de remplacement du revenu initiale et de celui qu’il tire de son nouvel emploi.

 

[29]      Avec respect pour l’opinion contraire, on ne peut qualifier l’article 73 de la loi de simple modalité administrative. Le législateur y prévoit spécifiquement la façon d’établir le revenu brut pour le travailleur visé par une telle situation. Ceci, dans le but d’établir son revenu net, lequel doit servir au calcul de l’indemnité de remplacement du revenu à laquelle il a droit en raison de la nouvelle lésion professionnelle qui le rend incapable d’exercer son emploi.

 

[...]

 

[33]      La travailleuse ayant droit à une indemnité de remplacement du revenu en raison de sa lésion professionnelle du 7 janvier 2008, survenue à la suite d’un accident du travail, il est compréhensible qu’en regard du premier alinéa de l’article 326 de la loi, la CSST impute à l’employeur le coût des prestations dues en raison de cet accident du travail du 7 janvier 2008, alors que la travailleuse était à son emploi.

 

[34]      Avec respect pour l’opinion contraire, l’article 73 ne fait pas en sorte d’imputer à l’employeur une indemnité de remplacement du revenu découlant d’un autre dossier. Cet article sert plutôt au calcul de l’indemnité de remplacement du revenu à laquelle peut avoir droit la travailleuse, en raison de sa lésion professionnelle du 7 janvier 2008 subie chez l’employeur.

 

[...]

 

[37]      Ce faisant, la CSST impute à l'employeur le coût des prestations dues en raison de l’accident du travail survenu à la travailleuse alors qu’elle était à son emploi le 7 janvier 2008, ce qui inclut l’indemnité de remplacement du revenu, calculée selon ce que prévoit la loi. Quant au second alinéa de l’article 326, l’employeur ne peut prétendre être obéré injustement du fait de l’application de la loi3.

__________

3      Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (Hôtel-Dieu), C.L.P. 140317-05-0005, 18 décembre 2000, F. Ranger; Les Rôtisseries St-Hubert ltée et CSST, C.L.P. 153024-62C-0012, 25 février 2002, J. Landry; Centre hospitalier de soins de longue durée René-Lévesque, C.L.P. 180387-62A-0203, 10 janvier 2003, M. Bélanger; Centre hospitalier Jacques-Viger, C.L.P. 161991-62C-0106, 15 janvier 2002, J. Landry; Transformateur Delta ltée, C.L.P. 169039-62C-0208, 12 août 2003, M.-D. Lampron; Hôpital Laval, C.L.P. 353474-31-0807, 23 mars 2009, H. Thériault.

[29]        Toutefois, l'employeur demande de s’écarter de cette position jurisprudentielle majoritaire et de plutôt retenir l’interprétation proposée dans l’affaire J.M. Bouchard et Fils[7] également reprise dans Rôtisserie St-Hubert (10520 Lajeunesse)[8] pour conclure qu’il était injuste de faire supporter à l’employeur le coût des prestations déjà imputées à un autre employeur, pour lesquelles d’ailleurs la CSST a déjà facturé cet employeur avec des provisions actuarielles nécessaires au paiement des prestations versées.

[30]        En résumé, dans la cause J.M. Bouchard et fils le juge administratif considère que l’interprétation majoritaire fait fi d’un principe fondamental en matière d’imputation voulant qu’un employeur doit supporter uniquement les coûts qui lui sont attribuables. Il exprime son désaccord avec cette interprétation majoritairement retenue, puisqu'il est d'avis qu’il s’agit d’une interprétation qui s'appuie sur une analyse grammaticale des dispositions de la loi au lieu de tenir compte du contexte global résultant de l’intention du législateur de voir à ce que les dispositions de la loi s’harmonisent entre elles. Afin de respecter la règle générale de l’imputation, d’éviter de pénaliser financièrement l’employeur et d’entraîner des conséquences défavorables à l’égard des travailleurs réadaptés, il considère que l’on doit imputer au dossier financier de l’employeur seulement la partie de l’indemnité de remplacement du revenu versée au travailleur qui correspond au salaire qu’il gagnait au moment où il a été victime d’un accident du travail, alors qu’il était à son emploi.

[31]        À la lumière des analyses effectuées au sein de ces deux courants jurisprudentiels, la soussignée, tout comme dans l'affaire Centre universitaire de santé McGill[9], considère qu'on ne peut conclure que l’employeur est obéré injustement dans un tel cas :

[34]      L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles en l’instance de retenir l’interprétation proposée par la Commission des lésions professionnelles dans cette affaire et de conclure qu’il est obéré injustement en raison de l’imputation d’une partie de l’indemnité de remplacement du revenu versée au travailleur en regard d’un accident du travail antérieur.

 

[35]      Malgré l’analyse développée par la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire J.M. Bouchard & Fils inc., le tribunal en l’instance estime qu’il n’y a pas lieu de s’écarter de la jurisprudence largement majoritaire qui retient qu’il n’y a pas lieu de soustraire une partie du coût des prestations à l’employeur en pareilles circonstances.

 

[36]      Le tribunal ne retient pas non plus l’argument voulant que l’employeur est obéré injustement suivant le deuxième alinéa de l’article 326 de la loi. Suivant la jurisprudence5 largement majoritaire, l’employeur ne peut être obéré injustement en raison de l’application de la loi.

_____________

            5.    Groupe C.D.P. inc., C.L.P. 356625-31-0808, 23 juillet 2009, G. Tardif; Hôpital Laval, C.L.P. 353474-31-0807, 23 mars 2009, H. Thériault; Ville d’Amos et CSST, C.L.P. 264865-08-0506, 8 octobre 2008, F. Daigneault; Marché Claude St-Pierre, C.L.P. 312077-71-0703, 9 octobre 2007, R.Langlois;Transformateur Delta ltée, C.L.P. 169039-62C-0208, 12 août 2003, M.-D. Lampron; Centre hospitalier de soins de longue durée René-Lévesque, C.L.P. 180387-62A-0203, 10 janvier 2003, M. Bélanger; Les Rôtisseries St-Hubert ltée et CSST, C.L.P. 153024-62C-0012, 25 février 2002, J. Landry; Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (Hôtel-Dieu), C.L.P. 140317-05-0005, 18 décembre 2000, F. Ranger.

 

 

[32]        Dans l’affaire Centre universitaire de santé McGill précitée, la Commission des lésions professionnelles citait, d'ailleurs fort à propos, les extraits suivants dans l’affaire Fermes Rivest, Bourgeois inc.[10] ayant rappelé le principe, maintes fois énoncé par la jurisprudence, voulant qu'un employeur ne peut prétendre être obéré injustement par la simple application de la loi :

[19]      La jurisprudence du tribunal2 enseigne qu’un employeur ne peut être obéré injustement en raison de l’application des dispositions de la loi.

 

[20]      D’ailleurs, dans plusieurs affaires3 où il devait statuer sur des questions similaires à celle soumise dans le présent dossier, le tribunal a refusé de faire droit aux demandes d’employeurs.

 

[21]      Le tribunal a alors conclu qu’un employeur n’est pas obéré injustement du fait qu’un travailleur à son service reçoive une indemnité de remplacement du revenu calculée sur un revenu brut plus élevé que celui du salaire qu’il gagnait au moment de la survenance de sa lésion professionnelle. Un tel calcul résulte purement et simplement de l’application des dispositions de la loi à cet égard, ce qui peut difficilement être qualifié d’injuste.

__________

2              Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (Hôtel-Dieu), C.L.P. 140317-05-0005, 18 décembre 2000, F. Ranger; Les Rôtisseries St-Hubert ltée et CSST, C.L.P. 153024-62C-0012, 25 février 2002, J. Landry; Centre hospitalier de soins de longue durée René-Lévesque, C.L.P. 180387-62A-0203, 10 janvier 2003, M. Bélanger; Centre hospitalier Jacques-Viger, C.L.P. 161991-62C-0105, 15 janvier 2002, J. Landry; Transformateur Delta ltée, C.L.P. 189039-62B-0208, 12 juin 2003, M.-D. Lampron; Hôpital Laval, C.L.P. 353474-31-0807, 23 mars 2009, H. Thériault.

3              Marché Claude St-Pierre, C.L.P. 312077-71-0703, 9 octobre 2007, R. Langlois; Ville d’Amos et CSST, C.L.P. 264865-08-0506, 8 octobre 2008, F. Daigneault; Hôpital Laval, précitée note 2; Groupe C.D.P. inc., C.L.P. 356625-31-0808, 23 juillet 2009, G. Tardif; Nettoyeurs Pellican inc., précitée note 1; ARTB inc., C.L.P. 346416-03B-0804, 19 août 2009, R. Deraiche.

 

 

[33]        Tout comme l’a décidé la jurisprudence majoritaire, à laquelle souscrit la soussignée, « le fait que le travailleur reçoive une indemnité de remplacement du revenu dont la base salariale est plus élevée que le revenu brut qu’il tirait au moment de la survenance de sa lésion professionnelle résulte de la simple application de l’article 73 de la loi et cette indemnité doit être imputée à l’employeur »[11].

[34]        Par conséquent, la Commission des lésions professionnelles estime qu’il n’y a pas lieu de procéder à un transfert du coût des prestations découlant de la lésion professionnelle du travailleur le 7 avril 2009.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE  la requête déposée par St-Hubert Express Verdun le 27 mai 2010;

CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative, le 14 avril 2010;

DÉCLARE que St-Hubert Express Verdun n'a pas droit à un transfert de l’imputation du coût des prestations reliées à l’accident du travail subi par monsieur Robert Ferland le 7 avril 2009.

 

 

__________________________________

 

Doris Lévesque

 

 

 

 

Me Éric Latulippe

LANGLOIS KRONSTRÖM DESJARDINS

Représentant de la partie requérante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Le 5 mai 2009, la CSST rend une décision d’admissibilité confirmée par la suite, en révision administrative, le 26 juin 2009.

[3]          Dossier C.L.P., page 3.

[4]           Tel qu’indiqué par l’employeur qui n’a pas accès aux dossiers antérieurs du travailleur « Les notions de «première» et «seconde» ou «deuxième» ne sont utilisées qu’à titre de référence puisque nous ne savons pas si le travailleur avait subi une autre lésion professionnelle avant celle ayant servi à établir sa base salariale dans le présent dossier ».

[5]           Services Kelly (Canada) ltée, C.L.P. 387474-71-0908, 31 mars 2010, C. Racine; Fermes Rivest, Bourgeois inc., C.L.P. 377627-63-0905, 23 mars 2010, J.-P. Arsenault; J. Albert Cormier & fils inc., C.L.P., 377217-01C-0904, 17 mars 2010, R. Arseneau; Services de sécurité Alain St-Germain inc. et Sécuritas Canada ltée, C.L.P., 373674-64-0903, 19 février 2010, M. Lalonde; Entreprises Ds Rochon & frères inc., C.L.P., 373976-31-0903, 19 janvier 2010, H. Thériault; Fernand Harvey & Fils inc., C.L.P., 382751-31-0907, 17 décembre 2009, R. Hudon; Ressource de réinsertion Le Phare, C.L.P. 366109-09-0812, 29 septembre 2009, Y. Vigneault.

[6]           C.L.P. 372145-31-0903, 4 août 2009, S. Sénéchal.

[7]           C.L.P. 372840-02-0903, 17 mai 2010, M. Sansfaçon.

[8]           C.L.P. 416361-71-1007, 8 mars 2011, C. Burdett.

[9]           C.L.P. 388006-71-0909, 30 septembre 2010, F. Juteau.

[10]         Précitée, note 5.

[11]         Précitée, note 9.

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