Mutuelle de prévention de la CMEQ et Ratté Électrique inc.

2012 QCCLP 1167

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Montréal

15 février 2012

 

Région :

Montérégie

 

Dossier :

414981-62-1007-R

 

Dossier CSST :

133279554

 

Commissaire :

Jean-François Martel, juge administratif

______________________________________________________________________

 

 

 

Mutuelle de prévention de la CMEQ

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Ratté Électrique inc. (F)

et

Richard Lapointe et Associés inc.

 

Parties intéressées

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 8 avril 2011, la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) dépose une requête en vertu de l'article 429.56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) à l'encontre d'une décision rendue par la Commission des lésions professionnelles, le 25 février 2011.

[2]           Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles :

ACCUEILLE la requête de Mutuelle de prévention de la CMEQ;

 

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 30 juin 2010, à la suite d’une révision administrative;

 

DÉCLARE recevable la demande de partage de coût à la suite de la lésion professionnelle subie par monsieur Guy Séguin, le travailleur, le 27 mai 2008;

 

RETOURNE le dossier à la Commission de la santé et de la sécurité du travail afin qu’elle statue sur la demande de partage.

 

[3]           La CSST est représentée par procureur à l’audience tenue sur la requête en révision, le 12 décembre 2011, à Longueuil.  La Mutuelle de prévention de la CMEQ (la mutuelle) y est également représentée par procureure.  Bien que dûment convoqué en sa qualité de syndic à la faillite de Ratté Électrique inc. (l’employeur), Richard Lapointe et Associés inc. (le syndic) n’a mandaté aucun représentant à l’audience et n’a pas justifié son absence.

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[4]           Les conclusions de la requête en révision déposée par la CSST sont les suivantes :

POUR CES MOTIFS, NOUS DEMANDONS À LA COMMISSION DES LÉSIONS

PROFESSIONNELLES DE:

 

CONVOQUER les parties afin d’entendre la présente requête;

 

RÉVISER la décision de la Commission des lésions professionnelles du 25 février 2010 [sic] ;

 

DÉCLARER que la Mutuelle de prévention de la CMEQ n’a pas de personnalité juridique et ne peut pas, par conséquent, être considérée comme une personne au sens de la LATMP;

 

DÉCLARER que cette mutuelle de prévention ne peut ainsi être considérée comme une personne qui se croit lésée au sens des article 358 et 359 de la LATMP et ne pouvait donc pas demander la révision de la décision rendue le 27 avril 2010 et 30 juin 2010 en vertu de ces articles;

 

REJETER la requête produite par Mutuelle de prévention de la CMEQ ou par la Corporation des maîtres électriciens du Québec pour et au nom de cette mutuelle de prévention en l’instance;

 

REJETER la requête produite par Mutuelle de prévention de la CMEQ et/ou son gestionnaire en l’absence d’un mandat spécifique du syndic de faillite;

 

RÉTABLIR la décision rendue le 27 avril 2010 avec ses conclusions.

 

LES FAITS ET LES MOTIFS

Les principes de droit applicables

[5]           La CSST allègue que « la décision rendue le 25 février 2011 (…) comporte un vice de fond et des erreurs manifestes en droit de nature telle qu’elle doit être invalidée ».

[6]           Le présent recours s’inscrit donc dans le cadre du troisième paragraphe du premier alinéa de l’article 429.56 de la loi :

429.56.  La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

 

2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

 

3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

[7]           Aucun vice de procédure n’est allégué.

[8]           Interprétant le sens des mots « vice de fond [...] de nature à invalider la décision » dans les affaires Donohue et Franchellini[2], la Commission des lésions professionnelles a jugé qu’ils font référence à une erreur manifeste, de droit ou de fait, ayant un effet déterminant sur l’issue de la contestation.  Ces décisions ont été suivies à maintes reprises dans la jurisprudence subséquente.

[9]           Il a également été jugé que le recours en révision ne doit pas être un appel déguisé, compte tenu du caractère final des décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles, ainsi que le prévoit le troisième alinéa de l’article 429.49 de la loi :

429.49.

 

[…]

 

La décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel et toute personne visée doit s'y conformer sans délai.

__________

1997, c. 27, a. 24.

[10]        Siégeant en révision judiciaire de certaines décisions de la Commission des lésions professionnelles, les tribunaux supérieurs ont entériné, à plusieurs reprises, l’interprétation des textes législatifs pertinents que celle-ci retient.

[11]        Ainsi, en 2003, dans l’affaire Bourassa, la Cour d’appel a, en outre, rappelé qu’« il [le recours en révision] ne saurait non plus être une invitation faite à un commissaire de substituer son opinion et son appréciation de la preuve à celle de la première formation »[3].

[12]        Dans l’arrêt Godin[4], l’honorable juge Fish précise qu’une décision ne peut être révisée pour le simple motif que la formation siégeant en révision ne partage pas l’opinion du premier juge administratif, que ce soit à l’égard de l’appréciation de la preuve, de l’interprétation de la règle de droit applicable ou même du résultat de l’analyse ; dans chaque cas, conclut-il, là où plus d’une issue raisonnable est possible, c’est celle retenue par le premier juge administratif qui doit prévaloir :

[51]    Accordingly, the Tribunal commits a reviewable error when it revokes or reviews one of its earlier decisions merely because it disagrees with its findings of fact, its interpretation of a statute or regulation, its reasoning or even its conclusions.  Where there is room on any of these matters for more than one reasonable opinion, it is the first not that last that prevails.

 

[13]        Dans son arrêt Amar c. CSST[5], la Cour d’appel réitère qu’une divergence d’opinions quant à l’interprétation du droit ne constitue pas un motif de révision.

[14]        Dans l’affaire CSST c. Fontaine[6], sous la plume de l’honorable juge Morissette, la Cour reprend avec approbation les propos du juge Fish et ajoute que le vice de fond de nature à invalider dont parle la loi réfère à une « faille » dans la première décision telle qu’elle dénote, de la part de son auteur, une « erreur manifeste, donc voisine d’une forme d’incompétence, ce dernier terme étant entendu ici dans son acception courante plutôt que dans son acception juridique ».

[15]        La même règle fut répétée dans l’arrêt Touloumi[7] :

[5]        Il ressort nettement de l’arrêt Fontaine qu’une décision attaquée pour motif de vice de fond ne peut faire l’objet d’une révision interne que lorsqu’elle est entachée d’une erreur dont la gravité, l’évidence et le caractère déterminant ont été démontrés par la partie qui demande la révision.

[16]        Cette approche a toujours cours à la Commission des lésions professionnelles[8].

[17]        Il ressort notamment de ce qui précède qu’une décision exhibant un « raisonnement parfaitement intelligible » n’est pas sujette à révision[9].

[18]        Ainsi, dans le présent cas, la décision du 25 février 2011 fait autorité.  Elle ne saurait être révisée pour le motif que le soussigné ne partagerait pas l’opinion du premier juge administratif quant à l’appréciation de la preuve ou l’interprétation du droit ou encore quant à l’issue du litige, à moins qu’à l’égard de l’un de ces sujets, la CSST ne démontre qu’elle est entachée d’une erreur grave, évidente (manifeste) et déterminante.

[19]        Le recours en révision n’est pas un appel.

[20]        Qu’en est-il en l’espèce ?

Le contexte

[21]        Monsieur Guy Séguin a été victime d’un accident du travail, le 27 mai 2008, alors qu’il était à l’emploi de l’employeur.

[22]        Le coût des prestations dues en raison du susdit accident du travail a été imputé à l’employeur, conformément au premier alinéa de l’article 326 de la loi.

[23]        Le 17 novembre 2009, la mutuelle a déposé, « en tant que mandataire de l’employeur », une demande de partage d’imputation du coût des prestations fondée sur les dispositions de l’article 329 de la loi, à savoir qu’au moment où sa lésion professionnelle s’est manifestée, le travailleur était déjà handicapé :

329.  Dans le cas d'un travailleur déjà handicapé lorsque se manifeste sa lésion professionnelle, la Commission peut, de sa propre initiative ou à la demande d'un employeur, imputer tout ou partie du coût des prestations aux employeurs de toutes les unités.

 

L'employeur qui présente une demande en vertu du premier alinéa doit le faire au moyen d'un écrit contenant un exposé des motifs à son soutien avant l'expiration de la troisième année qui suit l'année de la lésion professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 329; 1996, c. 70, a. 35.

 

[24]        Le 27 avril 2010, la CSST a rejeté cette demande de partage pour le motif qu’elle la considérait irrecevable :

Nous vous informons que nous ne pouvons accéder à votre demande.  L’employeur au dossier étant fermé en raison d’une faillite en date du 25 septembre 2009, vous n’avez pas pu obtenir un mandat de celui-ci, contrairement à ce qui est inscrit dans le libellé de votre demande.

 

Conséquemment, nous considérons votre demande irrecevable.

 

 

[25]        La mutuelle a demandé la révision administrative de cette décision.

[26]        Le 30 juin 2010, à la suite de la révision administrative, la décision rendue par la CSST le 27 avril 2010 a été confirmée, notamment dans les termes suivants :

Compte tenu que l’employeur n’a plus d’existence légale depuis le 25 septembre 2009, la Mutuelle de prévention, n’ayant pas de personnalité juridique, ne peut agir en son propre nom ou en sa qualité de gestionnaire de la Mutuelle de prévention ni donner un mandat de représentation à quiconque.

 

 

[27]        Le 12 juillet 2010, la mutuelle a contesté la décision du 30 juin 2010 devant la Commission des lésions professionnelles.

[28]        La CSST n’est pas intervenue devant la Commission des lésions professionnelles, conformément à l’article 429.16 de la loi, afin d’être « considérée partie à la contestation » :

429.16.  La Commission peut intervenir devant la Commission des lésions professionnelles à tout moment jusqu'à la fin de l'enquête et de l'audition.

 

Lorsqu'elle désire intervenir, elle transmet un avis à cet effet à chacune des parties et à la Commission des lésions professionnelles; elle est alors considérée partie à la contestation.

 

Il en est de même du travailleur concerné par un recours relatif à l'application de l'article 329 .

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[29]        Le 16 novembre 2010, la mutuelle a avisé la Commission des lésions professionnelles qu’elle renonçait à la tenue d’une audition et qu’elle produirait une argumentation écrite.  Ladite argumentation écrite porte la date du 30 novembre 2010 et a été déposée au greffe du tribunal le lendemain.

[30]        Cette argumentation explique qu’en fait, il n’y a pas qu’une seule mutuelle de prévention de la CMEQ, mais bien trois[10], lesquelles sont intégrées à la structure corporative de la Corporation des maîtres électriciens du Québec en tant que l’une des huit directions de cette dernière :

Les Mutuelles de prévention de la CMEQ sont l’une des huit directions de la Corporation des maîtres électriciens du Québec [ci-après la Corporation]1. Les décisions qui concernent les Mutuelles sont, dans certains cas, prises par le Comité exécutif provincial de la Corporation et, dans d’autres, par le Comité de gestion des mutuelles et la Direction des Mutuelles de prévention de la CMEQ, tel qu’il appert du Contrat de service2. C’est donc la Corporation qui administre les Mutuelles, qui sont au nombre de trois3, et elle peut, à ce titre, ester en justice4. En effet, la Corporation est une personne morale constituée par l’article 3 de la Loi sur les maîtres électriciens et a, par le fait même, la personnalité juridique5.

________________________

1       Voir organigramme de la Corporation des maîtres électriciens du Québec, Annexe 1.

2       Contrat de service, version en vigueur depuis le 8 mai 2009, notamment les art. 6.2 et 6.3, Annexe 2

jointe à la présente argumentation (ci-après Annexe 2].

3       Les mutuelles portent, pour la CSST, les numéros MTU00690, MTU00696 et MTU00697 et, respectivement, pour la CMEQ, les numéros 1, 2 et 3.

4       Art. 2271 C.c.Q..

5       L.R.Q. c. M-3; Art. 298 et s. C.c.Q.

 

 

 

[31]        Dans cette argumentation, la mutuelle adopte une position sensiblement différente de celle qu’elle avait prise jusqu’alors : désormais, elle soutient présenter la demande de partage en son propre nom et, non plus, en tant que mandataire de l’employeur failli :

Nous soumettons que la demande de partage doit être déclarée recevable parce que les Mutuelles ont l’intérêt requis pour agir en leur nom propre. Au soutien de cette prétention, nous ferons valoir les arguments suivants:

 

- les Mutuelles de prévention de la CMEQ peuvent agir pour représenter leurs membres puisque la Corporation des maîtres électriciens du Québec, en tant qu’administratrice des Mutuelles, a la personnalité juridique pour ester en justice afin de faire valoir les intérêts des Mutuelles;

 

- les Mutuelles agissant en leur propre nom, aucun mandat de la part de l’employeur en faillite ni du syndic n’est requis;

 

- l’article 357.1 LATMP est inapplicable en l’espèce;

 

- les Mutuelles ont l’intérêt juridique nécessaire pour demander le partage des coûts.

 

[32]        Par la décision du 25 février 2011, la Commission des lésions professionnelles a déclaré la demande de partage recevable et a retourné le dossier à la CSST pour qu’elle statue sur son mérite.  La CSST s’est portée requérante en révision interne en vertu de l’article 429.56 de la loi précité.

Analyse et discussion

[33]        Dans la présente affaire, la CSST n’a soumis aucun argument au premier juge administratif, puisqu’elle a choisi de ne pas se porter partie intervenante dans la contestation déposée à l’encontre de sa décision rejetant la demande de partage.

[34]        Cela étant, la plaidoirie maintenant présentée par la CSST à la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision est exclusivement construite sur la base de « nouveaux arguments » au sens de la jurisprudence applicable en semblable matière.

[35]        Or, comme l’a rappelé la Commission des lésions professionnelles dans des circonstances analogues à celles du présent cas[11], la CSST « ne peut, par le biais du recours en révision qu’elle a exercé, venir soumettre les arguments qu’elle aurait pu présenter initialement » :

[41]      Troisièmement, la CSST n’est pas intervenue à l’audience initiale de telle sorte qu’elle n’a soumis aucun argument au premier juge administratif qui était appelé à se prononcer sur la question en litige.

 

[42]      Elle ne peut, par le biais du recours en révision qu’elle a exercé, venir soumettre les arguments qu’elle aurait pu présenter initialement parce que le recours en révision n’est pas un appel et ne peut, comme l’indique la Cour d’appel dans l’arrêt Bourassa, être une occasion pour une partie d’ajouter de nouveaux arguments12.

________________________

12             Pour une décision récente au même effet impliquant la CSST, voir : Bossé et Mirinox. C.L.P. 52202-31-0806-R, 6 novembre 2009, C. Racine

 

 

[36]        Cette règle prend appui sur les principes dégagés par la Cour d’appel, dans ses arrêts Fontaine[12] et Bourassa[13], dont il convient de citer les extraits suivants :

Dans l’arrêt Fontaine :

 

[51]      En ce qui concerne la raison d’être de la révision pour un vice de fond de cet ordre, la jurisprudence est univoque. Il s’agit de rectifier les erreurs présentant les caractéristiques qui viennent d’être décrites. Il ne saurait s’agir de substituer à une première opinion ou interprétation des faits ou du droit une seconde opinion ni plus ni moins défendable que la première[51]. Intervenir en révision pour ce motif commande la réformation de la décision par la Cour supérieure car le tribunal administratif «commits a reviewable error when it revokes or reviews one of its earlier decisions merely because it disagrees with its findings of fact, its interpretation of a statute or regulation, its reasoning or even its conclusions»[52]L’interprétation d’un texte législatif «ne conduit pas nécessairement au dégagement d’une solution unique»[53] mais, comme «il appart[ient] d’abord aux premiers décideurs spécialisés d’interpréter»[54] un texte, c’est leur interprétation qui, toutes choses égales d’ailleurs, doit prévaloir. Saisi d’une demande de révision pour cause de vice de fond, le tribunal administratif doit se garder de confondre cette question précise avec celle dont était saisie la première formation (en d’autres termes, il importe qu’il s’abstienne d’intervenir s’il ne peut d’abord établir l’existence d’une erreur manifeste et déterminante dans la première décision)[55]Enfin, le recours en révision «ne doit […] pas être un appel sur la base des mêmes faits» : il s’en distingue notamment parce que seule l’erreur manifeste de fait ou de droit habilite la seconde formation à se prononcer sur le fond, et parce qu’une partie ne peut «ajouter de nouveaux arguments» au stade de la révision[56].

________________________

 

[51]   Voir l’arrêt Godin, supra, note 12, paragr. 47 (le juge Fish) et 165 (le juge Chamberland) et l’arrêt Bourassa, supra, note 10, paragr. 22.

[52] Ibid., paragr. 51.

[53] Arrêt Amar, supra, note 13, paragr. 27.

[54] Ibid., paragr.26.

[55] Supra, note 10, paragr. 24.

[56] Ibid., paragr. 22.

 

 

Dans l’arrêt Bourassa :

 

[22]      Sous prétexte d'un vice de fond, le recours en révision ne doit cependant pas être un appel sur la base des mêmes faits.  Il ne saurait non plus être une invitation faite à un commissaire de substituer son opinion et son appréciation de la preuve à celle de la première formation ou encore une occasion pour une partie d'ajouter de nouveaux arguments[1]

________________________

[1]             Voir:  Y. OUELLETTE, Les tribunaux administratifs au Canada, Procédure et Preuve, Montréal, Les Éditions Thémis, 1997, p. 506-508.  J.P. VILLAGI, dans Droit public et administratif, Vol. 7, Collection de droit 2002-2003, Éditions Yvon Blais, 2002, p. 127-129.

 

[Nos soulignements]

 

 

[37]        À la lumière de ces principes, la Commission des lésions professionnelles a même conclu, dans l’affaire Bossé et Mirinox[14], que « le silence de la CSST lors de l’audience initiale constitue donc un obstacle à la présente requête »[15] en révision.  Pourtant, dans les paragraphes subséquents de la même décision (55 à 70 inclusivement), le tribunal n’en procède pas moins à l’analyse de la première décision pour conclure à la fin qu’il « n’y décèle pas d’erreur manifeste et déterminante »[16].

[38]        De même, dans l’affaire Lachaine et Transelec & Carjan Senc (F) précitée[17], le tribunal a malgré tout analysé la première décision pour en arriver « à la conclusion que la CSST n’a pas démontré que la décision rendue le 6 avril 2009 comporte un vice de fond qui est de nature à l’invalider »[18].

[39]        Dans une affaire encore plus récente[19] présentant, elle aussi, beaucoup d’analogie avec celle présentement sous étude, le tribunal a délimité les paramètres de révision comme suit :

[22]      Le présent tribunal constate que la CSST avance devant lui des arguments qu’elle aurait pu présenter lors de l’audience du 23 octobre 2009, puisque la question de savoir si monsieur Myeong pouvait être considéré comme un travailleur domicilié au Québec au sens de l’article 8 de la loi était la question en litige devant la première juge administrative. C’est cette question qui constituait l’objet même de la décision initiale de la CSST, laquelle a été confirmée en révision administrative et contestée par l’employeur. C’est précisément cette question qu’avait à trancher la première juge administrative. Le débat, lors de l’audience initiale devant la Commission des lésions professionnelles le 23 octobre 2009, a donc porté sur cette question.  Si la CSST avait voulu influencer la première juge administrative par ses arguments de droit, il reste qu'elle aurait dû les lui présenter à ce moment. Or, elle a choisi de ne pas intervenir devant la première juge administrative.

 

[23]      D’ailleurs, la Commission des lésions professionnelles s’est prononcée en ce sens dans l’affaire Bossé et Mirinox12 où la CSST n’était pas intervenue devant le premier juge administratif pour lui exposer les arguments qu’elle présentait devant la formation siégeant en révision. Or, comme l’énonce avec justesse la juge administrative dans cette affaire, le recours en révision n’est pas une occasion de bonifier une preuve ou de peaufiner une argumentation. Elle détermine que le silence de la CSST lors de l’audience initiale constitue donc un obstacle à la requête en révision.

[24]      Le tribunal estime que la CSST ne peut donc, après coup, faire valoir son point de vue sur la question même soumise lors de la première audience. Cela équivaudrait à demander au présent tribunal siégeant en révision d’analyser à nouveau les faits et de recevoir de nouveaux arguments portant sur une question déjà réglée par une décision finale et exécutoire.

 

[25]      Au surplus, ajoutons que la CSST n’a pas démontré devant la présente instance que l'interprétation retenue par la première juge administrative est tellement irrationnelle qu'elle constitue une erreur de droit. Elle n’a pas démontré que le Code civil ne peut être interprété comme le fait la première juge administrative à la lumière des faits qui lui avaient été soumis.

 

[Note de bas de page omise] [Nos soulignements]

 

[40]        Le soussigné retient de la jurisprudence citée dans les paragraphes précédents qu’il ne saurait se pencher sur le mérite des nombreux arguments présentés en révision par le procureur de la CSST « s’il ne peut d’abord établir l’existence d’une erreur manifeste et déterminante » dans la décision du 25 février 2011.

[41]        Autrement dit, si la lecture de la première décision ne permet pas d’y déceler une erreur manifeste et déterminante, la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision n’est pas justifiée d’intervenir en prenant appui sur les arguments maintenant avancés par la CSST.

[42]        Ainsi, il n’appartient pas au soussigné de décider si le premier juge administratif a eu tort ou raison de déclarer recevable la demande de partage présentée par la mutuelle, mais plutôt de déterminer si la décision rendue en ce sens comporte ou non un vice de fond de nature à l’invalider, c’est-à-dire une erreur manifeste et déterminante.

[43]        La CSST argue que la mutuelle n’a pas la personnalité juridique et qu’on ne peut dès lors la considérer comme étant une « personne » aux fins de l’article 358 de la loi :

358.  Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.

 

Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander la révision du refus de la Commission de reconsidérer sa décision en vertu du premier alinéa de l'article 365 .

 

Une personne ne peut demander la révision de l'acceptation ou du refus de la Commission de conclure une entente prévue à l'article 284.2 ni du refus de la Commission de renoncer à un intérêt, une pénalité ou des frais ou d'annuler un intérêt, une pénalité ou des frais en vertu de l'article 323.1 .

 

Une personne ne peut demander la révision du taux provisoire fixé par la Commission en vertu de l'article  315.2 .

__________

1985, c. 6, a. 358; 1992, c. 11, a. 31; 1996, c. 70, a. 40; 1997, c. 27, a. 14; 2006, c. 53, a. 26.

 

 

[44]        Ainsi, selon la CSST, la mutuelle ne pouvait se croire lésée par la décision du 27 avril 2010 refusant sa demande de partage pour le motif qu’elle était irrecevable et ne pouvait en demander la révision administrative.

[45]        Le premier juge administratif a, au contraire, décidé que la mutuelle est dotée de la personnalité juridique.  Il s’en explique aux paragraphes 11 à 14 de sa décision comme suit :

[11]      La décision de la CSST nie l’intérêt pour agir aux Mutuelles en raison du fait que celles-ci n’ont pas de personnalité juridique. De l’avis de la représentante, cet argument n’est pas fondé.

 

[12]      Les Mutuelles de prévention de la CMEQ sont l’une des huit directions de la Corporation des maîtres électriciens du Québec (la Corporation). Les décisions qui concernent les Mutuelles sont, dans certain cas, prises par le Comité exécutif provincial de la Corporation et, dans d’autres, par le Comité de gestion des mutuelles et la Direction des Mutuelles de prévention de la CMEQ, tel qu’il appert du Contrat de service. C’est donc la Corporation qui administre les Mutuelles, qui sont au nombre de trois , et elle peut, à ce titre, ester en justice . En effet, la Corporation est une personne morale constituée par l’article 3 de la Loi sur les maîtres électriciens et a, par le fait même, la personnalité juridique .

 

[13]      L’auteur Me Réjean Côté5 propose le raisonnement suivant afin d’appuyer la thèse selon laquelle une mutuelle devrait se voir reconnaître l’intérêt pour agir :

 

Le contrat de mutuelle peut être considéré comme un contrat d’association au sens de l’article 2186 C.c.Q., qui prévoit en effet que : « le contrat d’association est celui par lequel les parties conviennent de poursuivre un but commun autre que la réalisation de bénéfices pécuniaires à partager entre les membres de l’association ». Or, l’article 2271 C.c.Q. permet aux administrateurs d’une association d’ester en justice « pour faire valoir les droits et les intérêts de l’association ». Puisque le but commun de la mutuelle consiste à promouvoir la prévention des lésions professionnelles et la réadaptation des travailleurs qui en sont victimes, mais aussi à réduire la cotisation versée à la CSST par les employeurs qui en sont membres, il apparaît logique de croire que l’association devrait être habilitée à intenter tout recours, ou encore à intervenir devant toute instance, lorsque la cotisation des employeurs risque d’être affectée, directement ou indirectement, alors que personne ne prend autrement la défense des intérêts du groupe.

 

Bien entendu, ces recours ne pourront être exercés que dans le respect des dispositions de l’article 357.1 L.A.T.M.P., et sous réserve des conditions élaborées par la jurisprudence majoritaire, comme nous en avons déjà fait mention.

 

Précisons par ailleurs que le regroupement produit des effets juridiques et financiers concrets et tangibles. Sans compter qu’une mutuelle contre-performante est appelée à disparaître. Comment pourrait-on refuser à une association le droit de défendre sa propre survie ?

 

[14]      La représentante des Mutuelles soumet, à l’instar de Me Côté, que les Mutuelles constituent une association au sens du Code civil du Québec. Ainsi, les Mutuelles, en tant que groupe d’employeurs mettant en commun leurs salaires et leur expérience, constituent une association et doivent se voir reconnaître le droit d’agir en l’espèce, dans la mesure où elles font la démonstration d’un intérêt juridique.

 

[46]        En somme, la décision du 25 février 2011 énonce deux motifs au soutien de la conclusion à laquelle le premier juge administratif en est arrivé que la mutuelle est dotée d’une personnalité juridique, à savoir : 1) en tant que partie intégrante de la structure corporative de la CMEQ, la mutuelle « profite » en quelque sorte de la personnalité juridique que la Loi sur les maîtres électriciens et les articles 298 et suivants du Code civil du Québec confèrent à cette dernière, et 2) la mutuelle constitue par elle-même une « association » au sens des articles 2186 et suivants du Code civil du Québec.

[47]        On ne peut certes prétendre que la décision en cause n’est pas motivée à cet égard.

[48]        Bien sûr, on peut ne pas être d’accord avec la conclusion retenue ; c’est le cas de la CSST.  Mais, il eut été préférable qu’elle se présente devant le premier juge administratif afin de le convaincre du bien-fondé de sa position.

[49]        Une étude de la jurisprudence du tribunal révèle qu’à une certaine époque, le fait qu’une mutuelle regroupant des employeurs soit dotée d’une personnalité juridique semblait toujours pris pour acquis.  En effet, la jurisprudence considérait que la véritable question à analyser était celle de savoir si la mutuelle et/ou ses membres avaient un intérêt juridique pour être « partie intéressée » à une demande de partage de coût.

[50]        Ainsi, il fut jugé à maintes reprises qu’une mutuelle était non seulement une partie intéressée[20] à une contestation, mais qu’elle pouvait elle-même présenter une demande de partage du coût des prestations dues en raison de l’accident du travail subi par un travailleur à l’emploi de l’un de ses membres[21].  Il fut aussi décidé qu’une mutuelle pouvait soumettre une requête en révision ou révocation[22].

[51]        De fait, la question de la personnalité juridique de la mutuelle ne faisait pas l’objet d’une analyse distincte, la jurisprudence s’attardant plutôt à déterminer si une mutuelle avait l’intérêt juridique requis pour être « partie intéressée » à une demande de partage de coût.

[52]        Par sa décision rendue dans l’affaire Vibert et Excavation Bernard & Gene Cahill inc.[23], la Commission des lésions professionnelles a, pour la première fois, statué qu’il lui fallait, en premier lieu, analyser le statut juridique de la mutuelle :

[57]      Il convient d’abord de s’interroger sur le statut juridique de la Mutuelle afin de déterminer si elle peut agir à titre de partie devant la Commission des lésions professionnelles dans une cause concernant l’indemnisation d’un travailleur.

 

[53]        Elle a conclu, dans ce cas-là, que la mutuelle ne jouissait pas de la personnalité juridique :

[63]      La lecture de ces dispositions amène le tribunal à conclure que le législateur n’a pas attribué à la Mutuelle une personnalité juridique lui permettant d’agir en son propre nom dans le traitement des dossiers d’indemnisation des travailleurs à l’emploi des employeurs membres d’un groupe partie à une entente mentionnée à la loi et au règlement précité.

 

 

[54]        Cette conclusion s’inscrit cependant dans un contexte particulier que la décision Vibert[24] prend soin de distinguer de celui dans lequel la jurisprudence antérieure[25] avait été élaborée :

[93]      Comme dans plusieurs décisions sur le sujet, le tribunal s’appuie sur la décision de la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire La Mutuelle de prévention des produits de la forêt, aménagement et transformation et Scierie Gatineau inc. . Il y a lieu de rappeler que cette décision a été rendue dans un contexte de financement, tout comme celle de A. Vaillancourt dans Société des Alcools du Québec et Placements Havrex Ltée . Il s’agit de deux affaires où le tribunal avait à statuer sur une demande de partage de coût.

 

[Notre soulignement]

 

 

[55]        En effet, alors que la jurisprudence antérieure avait disposé de demandes de transfert ou de partage de coût relevant de la division du financement de la Commission des lésions professionnelles, dans l’affaire Vibert[26], le tribunal statuait sur le refus d’une réclamation pour récidive, rechute ou aggravation relevant de sa division de la prévention et de l’indemnisation[27] :

[39]      En vertu de l’article 370 de la loi, la Commission des lésions professionnelles siège en divisions :

1-   la division du financement;

2-   la division de la prévention et de l’indemnisation des lésions professionnelles.

 

[40]      L’article 371 de la loi prévoit que les recours, ayant pour objet une décision rendue en vertu de l’application des chapitres IX ou X, sont décidés par la division du financement. Le chapitre IX a justement pour titre « financement » et traite notamment de la constitution d’un fonds d’accident auquel contribuent les employeurs.

 

[41]      C’est dans ce chapitre que l’on retrouve la section VI traitant de l’imputation des coûts, plus particulièrement les articles 326, 327, 328 et 329 dont l’application est susceptible de donner lieu à des contestations qui sont entendues par un commissaire seul alors que, dans la division de la prévention et de l’indemnisation des lésions professionnelles, comme l’indique l’article 374, les membres, l’un issu des associations syndicales et l’autre issu des associations d’employeurs, siègent auprès du commissaire et ont pour fonction de le conseiller.

 

[…]

 

[43]      Les recours dont est présentement saisi le tribunal sont entendus par la division de la prévention et de l’indemnisation des lésions professionnelles.

 

[44]      Lorsque la Commission des lésions professionnelles est saisie d’un recours contestant une décision de la CSST acceptant ou refusant une réclamation, elle peut, comme le prévoit l’article 377 de la loi, la confirmer, la modifier ou l’infirmer et, s’il y a lieu, rendre la décision qui, à son avis, aurait dû être rendue en premier lieu.

 

[…]

 

[48]      De l’avis du tribunal, c’est en ayant à l’esprit ce contexte, qu’il faut déterminer si la Mutuelle peut intervenir dans les dossiers dont elle est saisie.

 

[Nos soulignements]

 

[56]        C’est en tenant compte de cette distinction contextuelle que la Commission des lésions professionnelles, dans la décision Vibert[28], a jugé que les dispositions de l’article 357.1 s’avéraient déterminantes.

[57]        Pour plus de commodité, il convient de citer d’abord le texte de l’article 357.1 de la loi et ensuite les extraits pertinents de la décision Vibert :

357.1.  Une opération visée à l'article 314.3 ne fait pas renaître des droits de révision ou de contestation autrement éteints.

 

Un employeur qui fait partie d'un groupe d'employeurs ayant conclu une entente en vertu de l'article 284.2 ne peut demander la révision ni contester une décision concernant le travailleur d'un autre employeur du groupe.

__________

1996, c. 70, a. 39.

 

Décision Vibert :

 

[78]      Vu l’article 357.1 de la loi, il n’est pas utile de décider si les employeurs, membres du groupe de la Mutuelle, peuvent intervenir en prétendant qu’ils sont susceptibles d’être affectés par la décision de la Commission des lésions professionnelles. En effet, la loi leur nie explicitement cette possibilité.

 

[…]

 

[81]      Le tribunal est d’avis que le législateur n’a pas voulu que l’instruction des recours devant la Commission des lésions professionnelles se transforme en un débat impliquant des personnes autres que le travailleur, son employeur et la CSST, soit les personnes directement impliquées dans le traitement de la réclamation, et ce, dans le but de permettre que les recours soient instruits rapidement et procèdent de façon efficace afin qu’une décision soit rendue dans les meilleurs délais.

 

[84]      Tel que mentionné par le tribunal dans cette affaire, les décisions qu’il cite ont été rendues en matière de financement.

 

[85]      Or, en matière de réparation, le législateur a tout de même prévu à l’article 273 de la loi, qu’une association d’employeurs, qui regroupe des employeurs exerçant des activités économiques semblables, peut exercer des droits que la loi confère à l’employeur du travailleur relativement à la réclamation qu’il a faite. Cette disposition est rédigée ainsi :

 

273.  Lorsqu'un employeur dont le nom apparaît sur le formulaire visé dans l'article 272 a disparu, l'association des employeurs qui regroupe les employeurs exerçant des activités économiques semblables à celles de l'employeur disparu peut exercer les droits que la présente loi confère à l'employeur du travailleur relativement à la réclamation pour laquelle ce formulaire a été rempli.

__________

1985, c. 6, a. 273.

 

[86]      De l’avis du présent tribunal, avec respect, en dehors de la situation exceptionnelle visée par cette disposition, il y a lieu d’appliquer la lettre et l’esprit de l’article 357.1 de la loi qui exclut les autres employeurs d’un groupe de tout débat concernant la réclamation d’un travailleur.

 

[…]

 

[98]      Lors de l’adoption de l’article 284.2 de la loi, qui a amené la « création » des mutuelles de prévention, ni par la suite, le législateur n’a pas cru bon de permettre à ces dernières, qui n’ont pas d’ailleurs d’existence légale, ni à leurs membres, la possibilité d’intervenir en leur propre nom, au lieu et place de l’employeur, dans un débat concernant la réclamation d’un travailleur. Au contraire, le législateur leur a clairement nié ce droit dans le but de préserver le tripartisme qui existe en matière d’indemnisation.

 

[Nos soulignements]

 

 

 

[58]        En l’espèce, dans la foulée des principes élaborés dans l’affaire Vibert[29] et jurisprudence à l’appui, le premier juge administratif analyse le recours dont il est saisi et conclut que l’article 357.1 n’est pas applicable au présent cas, puisqu’il s’agit en l’occurrence d’une matière relevant de la division du financement :

[26]      Or, en l’espèce, il ne s’agit pas de cela. Les Mutuelles ne représentent pas ici un autre employeur membre des Mutuelles, mais représentent plutôt les intérêts du groupe, plus précisément la Mutuelle # 1 (MTU00690).

 

[27]      Elles ne contestent pas non plus une décision qui concerne un travailleur. En effet, il s’agit ici d’une question d’imputation des coûts et de financement. Les droits du travailleur ne sont aucunement affectés par le fait que les Mutuelles formulent une demande de partage.

 

[28]      La jurisprudence fait d’ailleurs une distinction entre les cas d’indemnisation et les cas de financement, lorsqu’il s’agit de l’interprétation de cette disposition8.

 

[29]      Le fait que le litige devant la Commission des lésions professionnelles porte sur une question d’indemnisation n’empêche toutefois pas le tribunal de reconnaître à une mutuelle le statut de partie intéressée.  C’est le cas, par exemple, lorsque l’employeur se désintéresse de son dossier et que la mutuelle démontre que ses membres vont subir un « préjudice d’ordre pécuniaire si la réclamation […] est admise »9.

 

[30]      Aussi, dans l’affaire Pietras et Laboratoires Ultrateck inc.10 :

 

[15]        Le tribunal n’est pas persuadé que le raisonnement exprimé par la commissaire Langlois puisse trouver application sans distinction dans un cas de réparation étant donné l’article 357.1 de la loi. Par contre, le tribunal convient que face à des situations exceptionnelles, comme c’est le cas dans le présent dossier où l’employeur et le travailleur sont des personnes liées, ou encore lorsqu’on se trouve face à un employeur qui a cessé ses activités et qui se désintéresse de son dossier, il devrait être permis à la Mutuelle d’agir en son propre nom afin d’être en mesure de protéger les intérêts des autres membres de la Mutuelle. […]

 

[nos soulignements]

 

[31]      Dans l’affaire Mutuelle de Prévention ARQ et Auberge Grand-Mère11, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’article 357.1 de la loi « n’empêche pas la Mutuelle d’intervenir elle-même pour défendre le bien commun ».

 

[32]      Par ailleurs, l’article 357.1 de la loi doit recevoir une interprétation conforme au but qu’il poursuit. Selon la Commission des lésions professionnelles, dans l’affaire Vibert et Excavation Bernard & Gene Cahill inc. précitée, le but de l’article 357.1 de la loi est d’éviter au travailleur d’avoir à se défendre contre plus d’un employeur :

 

[70]         Par cette disposition, le législateur a voulu éviter qu’un travailleur à l’emploi d’un employeur faisant partie d’un regroupement visé à l’article 284.2 se voie confronté à plus d’un employeur à l’occasion d’un débat sur une réclamation qu’il a déposée.

 

[…]

 

[86]         […] il y a lieu d’appliquer la lettre et l’esprit de l’article 357.1 de la loi qui exclut les autres employeurs d’un groupe de tout débat concernant la réclamation du travailleur.

 

[nos soulignements]

 

[33]      Notons également que le fait de reconnaître ici un intérêt aux Mutuelles de prévention de la CMEQ apparaît être en accord avec le raisonnement exposé dans l’affaire Lauzon et Le Groupe A & A précitée. Dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles fait une revue des principes applicables et refuse de reconnaître que la mutuelle a un intérêt juridique. Le tribunal appuie sa décision sur le fait que la mutuelle est constituée en personne morale sans but lucratif, qu’elle ne peut en conséquence avoir un intérêt financier, et que le litige porte sur l’admissibilité de la lésion professionnelle, situation visée par l’article 357.1 de la loi.

 

[34]      En l’espèce, l’article 357.1 de la loi n’est pas applicable puisqu’il s’agit d’une question de financement. Conséquemment, l’employeur est d’avis que la CSST était mal fondée de s’appuyer sur cette disposition.

 

________________________

8       Lauzon et Le Groupe A & A, C.L.P. 364777-63-0812, 19 avril 2010, F. Mercure; Coup de Balai Sweepers inc. (T.A.) et Corda, C.L.P. 362196-71-0811, 3 février 2010, L. Landriault; Vibert et Excavation Bernard & Gene Cahill inc., C.L.P. 318325-01B-0705, 8 septembre 2008, M. Racine.

9       Carbonneau et Boulangerie Repentigny inc., C.L.P. 353059-63-0807, 15 février 2010, A. Quigley.

10     C.L.P. 252559-62C-0501, 31 mars 2006, N. Tremblay.

11     C.L.P. 263460-04-0505, 18 juillet 2006, J.-F. Clément.

 

[Nos soulignements]

 

 

[59]        Ce raisonnement est logique et intelligible.  Il s’appuie sur une interprétation du deuxième alinéa de l’article 357.1 de la loi selon laquelle une décision statuant sur une demande de partage de coût faite par un employeur en vertu de l’article 329 de la loi n’est pas « une décision concernant le travailleur », et ce, parce que le troisième alinéa de l’article 429.16 de la loi prévoit qu’un travailleur n’est considéré partie à une demande de partage que s’il manifeste son désir de l’être en transmettant un avis d’intervention à cet effet à chacune des parties et au tribunal :

429.16.  La Commission peut intervenir devant la Commission des lésions professionnelles à tout moment jusqu'à la fin de l'enquête et de l'audition.

 

Lorsqu'elle désire intervenir, elle transmet un avis à cet effet à chacune des parties et à la Commission des lésions professionnelles; elle est alors considérée partie à la contestation.

 

Il en est de même du travailleur concerné par un recours relatif à l'application de l'article 329 .

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[60]        Certes, une interprétation différente était possible.  En effet, le premier juge administratif aurait pu conclure que, même en tenant compte des termes du troisième alinéa de l’article 429.16 de la loi, le travailleur n’en demeurait pas moins « concerné » par la décision statuant sur la demande de partage de l’employeur et que l’exclusion prévue au deuxième alinéa de l’article 357.1 s’appliquait à l’espèce.  C’est cette dernière interprétation qui avait été retenue dans l’affaire Lauzon et Le Groupe A & A[30] et qui fut éventuellement retenue par la jurisprudence majoritaire, comme nous le verrons plus loin.

[61]        Bref, force est de reconnaître que l’interprétation des dispositions législatives en cause retenue par le premier juge administratif faisait partie des solutions possibles au litige qu’il devait résoudre, du moins à l’époque où il a rendu sa décision du 25 février 2011.

[62]        Or, comme le rappelait la Cour d’appel dans l’arrêt Amar[31], « l’interprétation d’un texte législatif ne conduit pas nécessairement au dégagement d’une solution unique » et la formation siégeant en révision n’est pas justifiée de substituer sa propre interprétation à celle du premier juge administratif pour le seul motif qu’elle ne partage pas son opinion ; la divergence d’opinion n’est pas un motif valable de révision :

[25]      La divergence d'interprétation, quant au sens à donner au texte de l'art.  80.3   L.A.T.M.P. à partir des seuls débats parlementaires, pouvait-elle permettre à la CLP de révoquer la première décision sous prétexte qu'il s'agissait là d'un vice de fond ayant un effet déterminant sur le sort du litige?

 

[26]      Il appartenait d'abord aux premiers décideurs spécialisés d'interpréter ce texte et de lui donner le sens qui, à leur avis, répondait le mieux à l'intention du législateur, à l'objet de la L.A.T.M.P. et à la situation personnelle de l'appelant.

 

[27]      L'interprétation d'un texte législatif ne conduit pas nécessairement au dégagement d'une solution unique.  L'exercice d'interprétation exige de l'interprète de procéder à des choix qui, bien qu'encadrés par les règles d'interprétation des lois, sont sujets à une marge d'appréciation admissible.

 

[28]      En substituant, pour les motifs ci-haut mentionnés, sa propre interprétation à celle retenue par la première formation, la CLP a rendu une décision déraisonnable, car elle n'établit aucun vice de fond pouvant l'avoir justifiée d'agir ainsi.

 

[63]        Suivant cette approche dans l’affaire Cascade Groupe Papiers Fins inc. et Désormeaux[32], la Commission des lésions professionnelles a refusé de réviser la décision rendue par le premier juge administratif qui se fondait - comme en l’espèce - sur une série de décisions du tribunal allant dans le même sens :

[21]      Le présent tribunal doit s’en tenir à déterminer si l’interprétation de la loi telle que retenue par la première juge administrative fait ou non partie de la panoplie des interprétations possibles. En d’autres mots, s’écarte-t-elle à ce point du texte de loi que cela constitue une erreur de droit?

 

[22]      Rappelons que le droit évolue constamment et qu’une interprétation qui se tient, même si elle ne fait pas nécessairement l’unanimité à travers l’ensemble des décideurs, ne constitue pas pour autant une erreur de droit.

 

[23]      Soulignons que ce principe est énoncé par la Cour d’appel du Québec en matière d’interprétation de textes législatifs dans l’arrêt Amar c. CSST et Locations d’autos et camions Discount9, principe qui a été repris plus récemment dans l’affaire Fontaine10. La Cour retient que l’interprétation d’un texte législatif ne conduit pas toujours à une interprétation unique et que les décideurs jouissent d’une marge de manœuvre appréciable dans leur interprétation.

 

[…]

 

[25]      En l’espèce, en rendant sa décision, la première juge administrative se fonde sur des principes émis dans la jurisprudence citant une série de décisions qui vont dans le même sens que l’interprétation qu’elle privilégie. (…)

 

[…]

 

[28]      Avec respect pour l’opinion du juge administratif siégeant en révision dans l’affaire Cie de la Baie d’Hudson, le présent tribunal considère que l’interprétation retenue par la première juge administrative dans la présente affaire est une interprétation qui est possible à travers une panoplie d’interprétations, d’autant plus qu’elle se fonde sur une série de décisions de la Commission des lésions professionnelles. Tel que vu ci-haut, les faits analysés par la Cour supérieure dans la décision de 1993 se distinguent des faits en l’espèce puisque dans cette affaire, le travailleur ne conservait aucune atteinte permanente à l'intégrité physique de la lésion professionnelle subie alors qu’en l’espèce, une atteinte permanente à l'intégrité physique est prévue selon toute probabilité.

 

[29]      Tant que l’interprétation retenue par la première juge administrative se situe dans le cadre des interprétations possibles qui peuvent se justifier en regard du droit, la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision ne peut intervenir.

 

[Nos soulignements] [Notes de bas de page omises]

 

 

[64]        Ainsi, même après que la décision dans l’affaire Vibert[33] ait été rendue, la conclusion qu’une mutuelle pouvait se porter requérante en partage de coût demeurait l’une des issues raisonnables disponibles.

[65]        La tendance jurisprudentielle sur le sujet s’est modifiée par la suite, en prenant une nouvelle orientation.

[66]        C’est la décision rendue, le 27 janvier 2011, dans l’affaire Automobiles Jalbert inc. et CSST[34], qui a amorcé ce changement.

[67]        Dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles avait rendu une première décision déclarant recevable la demande de révision administrative déposée par le gestionnaire d’une mutuelle de prévention à l’encontre d’une décision de la CSST sur une demande de partage de coût.  La susdite première décision de la Commission des lésions professionnelles avait conclu que la mutuelle de prévention était « une personne qui se croit lésée » au sens de l’article 358 de la loi :

[28]      Le premier juge administratif conclut donc « que la Mutuelle de prévention CCAQ, par l’entremise de son gestionnaire, Groupe-Conseil Aon inc., pouvait soumettre la demande de révision du 18 janvier 2008 à titre de personne qui se croit lésée ».

 

 

[68]        Devant la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision, la représentante de l’employeur avait admis que « l’employeur fait partie de la Mutuelle 081 », laquelle « n’a pas de personnalité juridique »[35].  À l’évidence, il s’agit là d’une situation juridique bien différente de celle qui prévaut dans le présent cas : ici, la mutuelle soutient avec vigueur qu’elle est dotée de la personnalité juridique.

[69]        Dans l’affaire Automobiles Jalbert[36], la CSST a plaidé spécifiquement que la première juge administrative avait commis une erreur manifeste en omettant de répondre à la question essentielle de la personnalité et du statut juridique de la mutuelle avant d’examiner si elle est une personne pouvant demander une révision administrative en vertu de l’article 358 de la loi :

[31]      Dans sa requête et à l’audience, le représentant de la CSST soumet que le premier juge administratif a commis une erreur manifeste en ce qu’il a omis de répondre à une question essentielle ayant un effet déterminant sur le sort du litige, soit de décider de la question de la personnalité et du statut juridique de la Mutuelle, puisqu’il y a lieu de répondre à cette question avant d’examiner si elle est une personne pouvant demander la révision d’une décision comme le prescrit l’article 358 de la loi.

 

[32]      Il souligne que le premier juge administratif, lorsqu’il traite de la décision Vibert, ne répond pas à la question et saute immédiatement à l’étape de l’intérêt juridique, ce qui constitue une erreur manifeste et déterminante puisqu’il n’explique pas pourquoi une mutuelle qui n’aurait pas de personnalité juridique en indemnisation en aurait une lorsqu’il est question du financement.

 

[33]      Il souligne que s’il n’y a pas de personnalité juridique reconnue dans une situation, il ne peut y en avoir une dans aucune situation.

 

 

[70]        Encore une fois, cette situation juridique se distingue de notre espèce : ici le premier juge administratif a analysé le statut de la mutuelle aux paragraphes 11 à 34 inclusivement de sa décision, respectivement sous les rubriques Personnalité juridique et Inapplicabilité de l’article 357.1 de la loi, le tout avant d’aborder, aux paragraphes 35 à 48, le sujet de l’Intérêt pour agir des Mutuelles.

[71]        Dans l’affaire Automobiles Jalbert[37], la juge administrative siégeant en révision a retenu l’argument de la CSST et elle a conclu que l’erreur commise par la première juge administrative dans cette affaire consistait en son omission de statuer d’abord sur la question de la personnalité juridique de la mutuelle avant de discuter de son intérêt :

[31]      Dans sa requête et à l’audience, le représentant de la CSST soumet que le premier juge administratif a commis une erreur manifeste en ce qu’il a omis de répondre à une question essentielle ayant un effet déterminant sur le sort du litige, soit de décider de la question de la personnalité et du statut juridique de la Mutuelle, puisqu’il y a lieu de répondre à cette question avant d’examiner si elle est une personne pouvant demander la révision d’une décision comme le prescrit l’article 358 de la loi.

 

[32]      Il souligne que le premier juge administratif, lorsqu’il traite de la décision Vibert, ne répond pas à la question et saute immédiatement à l’étape de l’intérêt juridique, ce qui constitue une erreur manifeste et déterminante puisqu’il n’explique pas pourquoi une mutuelle qui n’aurait pas de personnalité juridique en indemnisation en aurait une lorsqu’il est question du financement.

 

[33]      Il souligne que s’il n’y a pas de personnalité juridique reconnue dans une situation, il ne peut y en avoir une dans aucune situation.

 

[…]

 

[47]      La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision est d’avis que puisque le premier juge administratif a omis de faire l’étude complète de la question, il y a lieu de répondre aux questions posées et de clarifier le rôle et les droits de chaque intervenant lorsqu’une mutuelle, un gestionnaire de mutuelle et un représentant d’un gestionnaire de mutuelle s’autorisent à contester une décision ou exercer certains droits en lieu et place de l’employeur dans un litige concernant, entre autres, l’imputation des coûts reliés à une lésion professionnelle.

 

[…]

 

[51]      Le tribunal siégeant en révision constate que la démarche préliminaire de détermination du statut juridique du gestionnaire SST CCAQ ou du fournisseur de services de cette personne qui veut être reconnue partie au litige n’a pas été complétée en l’espèce, ce qui entache la décision d’une erreur de droit qui apparaît déterminante sur le sort de la demande présentée.

 

[72]        C’est pour ce motif que la juge administrative siégeant en révision dans l’affaire Automobiles Jalbert a pu, ensuite, appliquer - non pas, substituer - sa propre interprétation des dispositions pertinentes de la loi et décider notamment que « l’interdiction prévue par l’article 357.1 de la loi s’applique » dans un cas de demande de partage du coût :

[56]      Le tribunal ajoute que le raisonnement développé dans les affaires Vibert et Lauzon, voulant que les employeurs signataires d’une Entente en vertu de 284.2 ne peuvent faire indirectement ce qu’ils ne peuvent faire directement en matière de prévention et d’indemnisation, s’applique aussi en matière de financement puisqu’une décision en financement concerne également le travailleur d’un autre employeur du groupe et que l’interdiction prévue par l’article 357.1 de la loi s’applique.

[73]        Autrement dit, n’eût été de l’omission de la première juge administrative de se prononcer quant au statut juridique de la mutuelle requérante (était-elle dotée oui ou non de la personnalité juridique ?), la juge administrative siégeant en révision n’aurait pas été justifiée de réviser la première décision rendue.

[74]        C’est d’ailleurs ainsi que la Cour supérieure[38], saisie d’une requête en révision judiciaire, a compris la situation, tel qu’il appert de la décision qu’elle a rendue le 7 septembre 2011 :

[133]    Comme mentionné précédemment, CLP-2 devait d'abord justifier son intervention par l'existence d'un vice de fond ayant un effet déterminant sur le sort de la contestation dans la décision CLP-1.

 

[…]

 

[135]    Puis, CLP-2 constate que la CLP-1 a omis d'examiner et de statuer sur la question de droit principale dont elle était saisie, à savoir si une mutuelle de prévention peut être une personne au sens de l'article 358 de la LATMP, préalablement à celle de déterminer, s'il y lieu, si cette personne peut être lésée.

 

[139]    En fait, pour CLP-2, CLP-1 élude la question principale de l'identification du titulaire du droit énoncé à l'article 358 LATMP selon lequel seule « une personne qui se croit lésée » peut demander la révision d'une décision de la CSST pour adjuger directement et seulement la notion de « lésée » et conclure à l'intérêt de la mutuelle de prévention pour agir en révision.

 

[140]    En somme, CLP-2 justifie son intervention par l'absence d'analyse par CLP-1 de la notion de « personne » qu'elle se devait d'effectuer:  (…)

 

[…]

 

[144]    À la lumière de ce qui précède, le tribunal est d'avis que CLP-2 a rendu une décision raisonnable en concluant à l'existence d'un vice de fond de nature à invalider la décision de CLP-1 dans l'application et l'évaluation des dispositions législatives que cette dernière avait l'obligation d'analyser, dont l'article 358 LATMP quant au titulaire du droit d'effectuer une demande de révision d'une décision de la CSST.

 

[145]    CLP-2 pouvait donc valablement procéder à une nouvelle étude de la question.

 

[…]

 

[167]    La CLP-2 a par conséquent répondu à la question principale à laquelle la CLP-1 a omis de répondre initialement. Ainsi, elle conclut que la mutuelle au sens de l’article 284.2 de la LATMP n’est pas une « personne qui se croit lésée » au sens de l’article 358 de la LATMP.

 

 

[75]        Finalement, la Cour supérieure juge raisonnable l’interprétation des textes législatifs retenue par la juge administrative siégeant en révision dans l’affaire Automobiles Jalbert[39] quant au fond du litige :

[172]    Au surplus, le Tribunal est d’avis que la CLP-2 a décidé raisonnablement en concluant qu’il n’y a aucun motif raisonnable permettant de croire que la LATMP s’applique différemment en division de la prévention et de l’indemnisation des lésions professionnelles qu’en division du financement. La LATMP s’applique de façon uniforme, peu importe la division qui est visée. Le législateur n’a aucunement prévu, quelle que soit la division concernée, d’accorder un statut particulier à une mutuelle de prévention.

 

[173]    En somme, la décision CLP-2 est raisonnable. Le processus décisionnel suivi est intelligible et appartient aux issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

 

[76]        Comme l’a rappelé à juste titre la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire CLSC Rivière-des Prairies et CSST[40], le fait que l’interprétation adoptée par la juge administrative siégeant en révision ait été considérée « raisonnable » par la Cour supérieure n’implique pas nécessairement que la position contraire soit, elle, manifestement déraisonnable ou entachée d’une erreur manifeste équivalant à un vice de fond de nature à l’invalider :

[45]      Le Tribunal ne retient pas cette prétention. Il faut se rappeler le cadre d’intervention en révision judiciaire. La Cour a uniquement conclu que la décision de la Commission des lésions professionnelles (retenant l’interprétation majoritaire) n’était pas manifestement déraisonnable. Cela n’implique pas pour autant que l’interprétation minoritaire est, elle, manifestement déraisonnable.

 

[…]

 

[47]      Puis il[41] ajoute ceci à la toute fin :

 

[59]        L'existence, au sein du tribunal spécialisé, de deux courants jurisprudentiels ne permet pas de supposer que l'un d'eux est déraisonnable, et n'autorise pas le tribunal de révision à intervenir.

 

 

[77]        Depuis l’époque à laquelle la décision a été rendue par le premier juge administratif dans la présente affaire, le 25 février 2011, la jurisprudence majoritaire de la Commission des lésions professionnelles adopte l’approche élaborée par la Cour Supérieure et la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision dans l’affaire Automobiles Jalbert inc.[42].  Il y a eu revirement jurisprudentiel.

[78]        Le fait que la décision rendue le 25 février 2011 ne se conforme pas au courant jurisprudentiel désormais majoritaire la vicie-t-elle fondamentalement au point qu’elle soit invalide ?

[79]        À la lumière des propos suivants de la Cour d’appel dans l’arrêt Fontaine[43], le soussigné considère qu’il faut répondre par la négative :

[61]      Reste l’argument fondé sur l’existence d’un «jurisprudence contradictoire». La commissaire Nadeau a très bien dégagé dans le dossier Couture[64] les points sur lesquels se distinguent les décisions publiées dans des cas analogues de rechute, récidive ou aggravation postérieure à la détermination d’un emploi convenable. Cela soulève une question, à laquelle la commissaire Nadeau a répondu négativement dans le dossier Couture. On peut la formuler comme ceci : en se prononçant comme elle l’a fait, d’une manière qui paraît faire entorse à l’interprétation dominante, la CLP 1 a-t-elle rendu une décision entachée d’un vice de fond de nature à l’invalider - ou encore, a-t-elle rendu une décision déraisonnable?

 

[…]

 

[63]      Par cet arrêt [Domtar inc. c. Québec (Commission d’appel en matières de lésions professionnelles), [1993] 2 R.C.S. 756 ], la Cour suprême décida en un premier temps que l’interprétation de l’art. 60 LATMP adoptée par la CALP ne pouvait être qualifiée de manifestement déraisonnable[66]. Se posait alors une seconde question : la Cour d’appel avait-elle jugé à bon droit, en s’appuyant sur son arrêt Produits Pétro-Canada Inc. c. Moalli[67], qu’il fallait casser la décision de la CALP parce qu’une divergence d’interprétation apparente l’opposait au Tribunal du travail sur la portée de ce même article 60? Critiquant l’arrêt Moalli qu’elle juge trop interventionniste, la Cour suprême accueille le pourvoi et répond négativement à cette deuxième question. Le juge L’Heureux-Dubé qui rend le jugement unanime de la Cour conclut ses motifs par les observations suivantes[68] :

 

Si le droit administratif canadien a pu évoluer au point de reconnaître que les tribunaux administratifs ont la compétence de se tromper dans le cadre de leur expertise, je crois que l'absence d'unanimité est, de même, le prix à payer pour la liberté et l'indépendance décisionnelle accordées aux membres de ces mêmes tribunauxReconnaître l'existence d'un conflit jurisprudentiel comme motif autonome de contrôle judiciaire constituerait, à mes yeux, une grave entorse à ces principes.  Ceci m'apparaît d'autant plus vrai que les tribunaux administratifs, tout comme le législateur, ont le pouvoir de régler eux-mêmes ces conflits.  La solution qu'appellent les conflits jurisprudentiels au sein de tribunaux administratifs demeure donc un choix politique qui ne saurait, en dernière analyse, être l'apanage des cours de justice.

Il me paraît exact de dire qu’après cet arrêt de principe, l’autonomie décisionnelle des tribunaux administratifs a acquis préséance sur l’objectif de cohérence ou de constance décisionnelle[69].

 

[…]

 

[66]      Troisièmement, une fois admis que l’existence d’un conflit jurisprudentiel ne constitue pas en soi un motif autonome de contrôle judiciaire, il faut se demander si se démarquer d’une jurisprudence assez soutenue de la CLP équivaut pour la CLP 1 à rendre une décision «déraisonnable» : c’est ce critère, on l’a vu, qui permet d’identifier un vice de fond de nature à invalider une décision. Si la CLP 2 pouvait exercer, sans contrevenir au principe de l’arrêt Farrah, la compétence d’un tribunal d’appel, il est possible qu’elle pourrait substituer sa lecture de la loi à celle adoptée par la CLP 1. Elle aurait alors le pouvoir d’intervenir même en l’absence d’une décision «déraisonnable» de la part de la CLP 1. Mais, depuis l’arrêt Godin, ce qualificatif impose une restriction à son pouvoir d’intervention en révision[75]. La raison de cette restriction, telle que je la comprends, est la suivante. Si, parallèlement aux objectifs que le législateur a coutume de se fixer lorsqu’il crée un tribunal administratif, on laissait coexister la possibilité de réviser les décisions à volonté, on instaurerait un régime contradictoire : la célérité et la finalité voulues par le législateur dans la prise de décision quasijudiciaire seraient en tension, sinon en conflit, constants avec la faculté de substituer à une première interprétation une seconde, voire une troisième interprétation[76], uniquement parce que celle-ci exprime mieux l’opinion du dernier décideur habilité à se prononcer. En ces matières, le mieux est l’ennemi du bien.

 

[67]      La dernière question à considérer consiste donc à se demander si s’écarter de la jurisprudence dominante est en tant que tel déraisonnable, constitue une «erreur manifeste de droit» ou «a fatal error».

 

[68]      Les premiers éléments d’une réponse se trouvent dans l’arrêt Domtar. Cet arrêt a eu des suites et l’on sait que, par la force des choses, des décisions contradictoires de nature à engendrer un conflit opérationnel feront l’objet d’un contrôle judiciaire plus serré[77]. Mais rien de tel ne se présente ici. Nous sommes bien en deçà du conflit opérationnel. Il s’agit plutôt, en l’occurrence, du problème qu’évoquait le professeur Mullan, cité dans l’arrêt Domtar[78], lorsqu’il insistait «sur le principe voulant que des causes similaires soient traitées de façon analogue». Ce principe, ou précepte, n’est pas nouveau. Il est habituellement énoncé en langue anglaise au moyen de l’expression «treating like cases alike».  (…)

 

[…]

 

[70]      Dans le cas présent, la CLP 1 a considéré le dossier médical de l’intimée, a entendu son témoignage et, d’emblée, a formulé la question à résoudre dans les termes que j’ai cité plus haut : l’emploi convenable déterminé en 1997 le demeurait-il après l’échec de l’intervention chirurgicale postérieure à cette détermination? Elle répond ensuite par la négative à cette question. A-t-elle fourni dans sa décision les raisons qui l’ont amenée à suivre ce raisonnement? En dépit du fait qu’elle n’ait pas traité de la jurisprudence de la CLP à laquelle on lui reproche maintenant d’avoir dérogé, je crois que les motifs de sa décision font ressortir ce pourquoi elle a jugé opportun de faire droit au recours de l’intimée.

 

[71]      Une décision judiciaire ou quasijudiciaire se situe au point de contact entre le droit et le fait, là où l’interprétation des textes se fait nécessairement à la lumière des circonstances précises de l’espèce.  (…)

[72]      Ce faisant, elle [la CLP 1] s’est écartée, semble-t-il, d’une norme jurisprudentielle antérieure; du moins l’a-t-elle sensiblement nuancée. Mais cette norme ne repose que sur une interprétation possible, et certainement pas sur la seule lecture indiscutable, du texte de loi invoqué de part et d’autre. En situant le cas de l’intimée en dehors du champ d’application de la norme jurisprudentielle apparemment applicable, la CLP 1 signale que cette norme telle qu’on la comprend est susceptible de faire obstacle à la solution appropriée du cas sous étude : elle est surdéterminée ou «overinclusive». Confrontée à des faits difficiles, une interprétation qu’on croyait reçue fait voir ses faiblesses. Sans être fréquents, de tels infléchissements sont assez banals en jurisprudence; on leur doit en partie la fécondité du droit. Dans ces conditions, je ne vois pas, pour ma part, comment l’on pourrait qualifier l’interprétation adoptée par la CLP 1, et la décision qui en est résultée, de déraisonnable ou de manifestement erronée. Elle résiste à un examen assez poussé, selon l’expression du juge Iacobucci dans l’arrêt Southam[83]

 

[73]      La CLP 2 a-t-elle adopté une interprétation déraisonnable de la LATMP en concluant à l’existence d’un vice de fond dans la décision de la CLP 1? Je crois que oui, car elle s’est contentée pour arriver à ce résultat de renvoyer à quelques décisions antérieures, sans rouvrir la question de fond posée par la caducité apparente en l’espèce de l’«emploi convenable», comme si la règle du stare decisis, qui n’a pas d’application ici, réglait le cas, et sans administrer, raisons à l’appui, la démonstration que la décision de la CLP 1 comportait une erreur de droit manifeste. La situation présentée par ce pourvoi est donc semblable à celle de l’arrêt Godin, à cette différence près que la Cour supérieure, ici, a pu s’appuyer sur le raisonnement déjà développé dans cette décision récente de notre Cour. Elle a eu entièrement raison de le faire.

 

[Nos soulignements] [Notes de renvois en bas de pages omises]

 

[80]        Précisons que, dans le présent cas, l’approche préconisée par la CSST voudrait qu’on impose à la décision rendue le 25 février une « norme jurisprudentielle » (ou une « jurisprudence assez soutenue ») non pas antérieure, mais plutôt une qui lui serait même postérieure.

[81]        Or, tel qu’il appert de la jurisprudence citée auparavant[44], le premier juge administratif a ici « emprunté une voie contemporaine »[45] à l’époque où il a rendu sa décision :

[31]      La position qu’a adoptée le commissaire dans CLP-1 a été renversée par l’affaire Pâtisserie Chevalier inc.12 et ce, avant que ne soit rendue CLP-2.  Il n’en demeure pas moins qu’au moment où CLP-1 a été rendue, ce courant jurisprudentiel était en vigueur et appliqué par des commissaires de la CLP.

 

[…]

 

[35]      Il ressort ainsi que la seconde commissaire a, à bon droit, refusé d'écarter l'opinion du premier commissaire.  Cette commissaire donne raison aux actuels requérants en ce qu'elle reconnaît la validité de la position expliquée et adoptée depuis la décision de l'affaire Pâtisserie Chevalier inc.

 

[36]      Si la commissaire ayant rendu CLP-2 avait plutôt eu à rendre CLP-1, elle n'aurait fort probablement pas conclu de la même façon.  À titre de commissaire siégeant en révision administrative, elle s'est cependant gardée de toute intervention, reconnaissant que l'opinion privilégiée par CLP-1 n'était pas insoutenable ou indéfendable au moment où elle a été rendue.

 

[37]      Ce faisant, CLP-2 respecte les principes de retenue élaborés par les plus hautes instances judiciaires.

 

[Nos soulignements] [Note de renvoi en bas de page omise]

 

 

[82]        Réviser la décision du 25 février 2011 parce que l’interprétation jurisprudentielle a changé depuis qu’elle a été rendue aurait pour effet d’anéantir la stabilité décisionnelle à laquelle les parties ont droit, et ce, pour un motif que le législateur n’a pas jugé bon de reconnaître.

[83]        Certes, le corpus jurisprudentiel est et doit demeurer un facteur d’évolution du droit ; c’est ce qui permet à la loi de s’adapter - et de continuer de s’appliquer - aux situations changeantes de la vie en société sans nécessiter de constantes modifications législatives.  Mais, cette souplesse n’a de vertu que si on lui réserve une application exclusivement prospective.  L’évolution jurisprudentielle prévient les justiciables que, la règle de droit ayant évolué, les litiges futurs ne connaîtront pas nécessairement une issue identique à celle retenue par le passé en des circonstances analogues.

[84]        Changer rétroactivement le dispositif d’une décision déclarée « finale et sans appel » par la loi est une toute autre affaire.  Cela affecte la situation juridique présente des parties en cause telle qu’elle avait été cristallisée.  Si cette mesure exceptionnelle était appliquée indûment, tous les justiciables seraient justifiés d’y percevoir un élément d’insécurité, pour l’avenir : leurs droits passés pourraient-ils être remis en question au gré d’un revirement jurisprudentiel ?

[85]        C’est pourquoi, en l’espèce, la jurisprudence élaborée postérieurement à la décision du 25 février 2011 ne peut servir de prétexte à sa révision.

[86]        Dans le troisième et dernier volet de sa décision du 25 février 2011, plus particulièrement aux paragraphes 35 à 48 de celle-ci, le premier juge administratif analyse l’Intérêt pour agir des Mutuelles.

[87]        L’impact financier que les prestations imputées en raison de la lésion professionnelle subie par le travailleur auront sur les cotisations des employeurs membres de la mutuelle est d’abord considéré.  Ensuite, il est fait état des dispositions des articles 2 et 9 du Règlement sur le taux personnalisé applicable.  Puis, la question des frais, notamment d’expertises médicales, que la mutuelle engage pour le bénéfice de ses membres est abordée.  Le premier juge administratif cite des extraits de quatre décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles reconnaissant l’intérêt qu’une mutuelle a d’initier des demandes de partage ainsi qu’à un deuxième extrait de l’article publié par Me Réjean Côté concluant dans le même sens.  Il en arrive finalement à la conclusion suivante :

[48]      Les Mutuelles ont l’intérêt juridique nécessaire pour demander le partage des coûts puisque les autres employeurs subiront un impact financier à la suite de l’imputation des coûts de la lésion professionnelle du 27 mai 2008 et des frais engagés pour sa gestion. Ainsi, les Mutuelles n’ont pas besoin de mandat ni de l’employeur, ni du syndic. Les Mutuelles doivent pouvoir agir en leur propre nom de manière à protéger les intérêts de leurs membres collectivement.

 

 

[88]        Nul n’est besoin de reprendre ici l’exposé de tous les motifs qui amènent le soussigné à conclure que le premier juge administratif a, sur cette question comme sur la précédente, suivi un raisonnement intelligible, qu’il s’est fondé sur une interprétation du droit ayant cours à la Commission des lésions professionnelles, du moins à l’époque, et que la décision rendue est adéquatement motivée à ce sujet.

[89]        La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision n’a pas à déterminer si la décision rendue par le premier juge administratif est la bonne, mais bien seulement à vérifier si elle comporte ou non un vice de fond de nature à l’invalider.

[90]        Pour les motifs exprimés précédemment, le soussigné conclut que tel n’est pas le cas.

[91]        La requête en révision n’est pas fondée.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête en révision déposée par la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

 

 

__________________________________

 

Jean-François Martel

 

 

 

 

Me Bianca Turgeon

CORPORATION DES MAÎTRES ÉLECTRICIENS DU QUÉBEC

Procureure de la Mutuelle de prévention de la CMEQ

 

 

 

 

 

Me David Martinez

VIGNEAULT THIBODEAU BERGERON

Procureur de la CSST

 



[1]          L.R.Q. c. A-3.001.

[2]           Produits forestiers Donohue inc. et Villeneuve, [1998] C.L.P. 733  ; Franchellini et Sousa, [1998] C.L.P. 783 .

[3]           Bourassa c. Commission des lésions professionnelles, [2003] C.L.P. 601 (C.A.).

[4]           Tribunal administratif du Québec c. Godin, [2003] R.J.Q. 2490 (C.A.).  Voir au même effet : I.M.P. Group ltd. (Innotech-Execaire Aviation Group) c. CLP, C.S. Montréal, 500-17-041658-082, 2 décembre 2008, J. Lebel, (08LP-172), requête pour autorisation d'appeler accueillie, C.A. Montréal, 500-09-019249-085.

[5]           [2003] C.L.P. 606 (C.A.).

[6]           [2005] C.L.P. 626 (C.A.).

[7]           CSST c. Touloumi, [2005] C.L.P. 921 (C.A).

[8]           Donohue : Victoria et 3131751 Canada inc., C.L.P. 166678-72-0108, 1er décembre 2005, B. Roy ; Louis-Seize et CLSC-CHSLD de la Petite-Nation, C.L.P. 214190-07-0308, 20 décembre 2005, L. Nadeau ; Ricard et Liquidation Choc, C.L.P. 217112-62C-0310, 10 février 2006, C.-A. Ducharme, (05LP-299) ; Coopérative forestière Hautes-Laurentides et Aubry, [2008] C.L.P. 763 .

[9]           Commission scolaire des Phares c. CLP, C.S. Rimouski, 100-000616-062, 23 avril 2007, J. Blanchet, (07LP-14).

[10]         Aux paragraphes 15 et 26 de la décision du 25 février 2011, le premier juge administratif précise que l’employeur était membre des mutuelles depuis le 19 janvier 2007, plus précisément du groupe identifié comme étant la « Mutuelle # 1 (MTU00690) ».

[11]         Lachaine et Transelec & Carjan Senc (F), 2009 QCCLP 8564 .

[12]         Voir la note 6.

[13]         Voir la note 3.

[14]         2009 QCCLP 7512 .

[15]         Idem, paragraphe 54.

[16]         Idem, paragraphe 71.

[17]         Voir la note 11.

[18]         Idem, paragraphe 43.

[19]         La Compagnie Marie Chouinard et Won Won Myeong, 2010 QCCLP 7620 .

[20]         Société des Alcools du Québec et Placements Havrex Ltée, C.L.P. 184726-62B-0205, 4 décembre 2005, Alain Vaillancourt (demande de transfert en vertu de l’article 326 de la loi).

[21]         La Mutuelle de prévention des produits de la forêt, aménagement et transformation et Scierie Gatineau inc., C.L.P 215666-07-0309, 10 mai 2004, M. Langlois, (04LP-27) ; Succession Paul Giroux et G.P.G. Construction inc., [2004] C.L.P. 1602  ; Mutuelle APCHQ et Bastien, [2005] C.L.P. 314 (décision sur requête en révocation) ; Micor Auto Location inc., C.L.P 229351-63-0403, 12 octobre 2005, J.-P. Arsenault; Micor Auto inc., C.L.P 239544-64-0407, 6 décembre 2005, R. Daniel; Mutuelle de prévention ARQ et Auberge Grand-Mère, [2006] C.L.P. 161  ; Ginsberg, Gingras & ass. Syndic et Gervais Dodge Chrysler Jeep, C.L.P 314651-08-0704, 10 janvier 2008, P. Prégent ; Carbonneau et Boulangerie Repentigny inc., [2009] C.L.P. 678 .

[22]         Mutuelle A.P.C.H.Q. et Bastien, [2005] C.L.P. 314 .

[23]         2008 QCCLP 5159 .

[24]         Idem.

[25]         Voir la note 21.

[26]         Note 23.

[27]         Les décisions rendues dans les affaires Casa du Spaghetti et Laporte ( 2009 QCCLP 107 ), Coup de Balai Sweepers inc (T.A.) et Corda ( 2010 QCCLP 944 ) ainsi que Lauzon et Le Groupe A & A ( 2010 QCCLP 2945 ) citées par la CSST ont toutes, elles aussi, été rendues en matière d’indemnisation et réparation.

[28]         Note 23.

[29]         Idem.

[30]         2010 QCCLP 2945 .

[31]         À la note 5, paragraphe 27.

[32]         2010 QCCLP 7404

[33]         Idem.

[34]         2011 QCCLP 547 .

[35]         Idem, paragraphe 39.

[36]         Idem.

[37]         Idem.

[38]         Automobiles Jalbert inc. c. Commission des lésions professionnelles et CSST, 2011 QCCS 4829 .

[39]         Note 23.

[40]         2008 QCCLP 7329 .

[41]         Groupe P.F. Brisson inc. c. Commission des lésions professionnelles, C.S. Hull 550-17-003064-076, 12 novembre 2007, j. Gagnon.  Voir aussi : Lalic c. Lontotech CNC inc., C.S. Montréal 500-17-037457-077, 17 juillet 2008, j. Mercure.

[42]         Voir notamment : Lévesque et Canadian Tire, 2011 QCCLP 2057  ; Lapointe Système inc. et Henley, 2011 QCCLP 1421  ; Bresse & Associés, syndics et Guillemette, 2011 QCCLP 1374  ; Mutuelle de prévention ARQ et Resto le goût d’Italie inc., 2011 QCCLP 4092  ; Mutuelle de prévention no 00044 (9058-1794 Québec inc. (division A)) et Entreprises Martin Lajeunesse (F), 2011 QCCLP 4430  ; Mutuelle de prévention 18 Manufacturier 3 et Métal RGA inc. (dissoute) et CSST, 2011 QCCLP 7221

[43]         Précitée à la note 6.

[44]         Voir les notes 20, 21 et 22.

[45]         A. de la Chevrotière ltée et Commission des lésions professionnelles, 2006 QCCS 3618 .

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