Section des affaires sociales
Désignée comme étant une commission d'examen au sens des
articles
Référence neutre : 2008 QCTAQ 041080
Dossier : SAS-Q-031651-9311
MÉDARD SAUCIER, avocat
JEAN AUDET, psychologue
PIERRE HÉLIE, psychiatre
PROCUREUR AUX POURSUITES CRIMINELLES ET PÉNALES
et
LE CURATEUR PUBLIC DU QUÉBEC
CSSS B
[1] Il s'agit d'une audience, la 17e, de ce Tribunal siégeant en Commission d'examen des troubles mentaux aux termes de l'article 672.81 du Code criminel.[1]
[2] L’accusé est âgé de 37 ans.
[3] Il a, le 18 avril 1994, fait l'objet de deux verdicts de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux en regard d'accusations de voies de fait sur la personne de son père et de défaut de se conformer à un engagement, délits commis le 16 septembre 1993.
[4] Notons par ailleurs que ce même jour (18 avril 1994), l'accusé a plaidé coupable à des accusations de fraude et de défaut de se conformer à une ordonnance de probation (délits commis le 12 décembre 1992) et d'omission d'être présent au Tribunal lorsque requis (délit commis le 22 avril 1993).
[5] Le 20 juin 1994, l'accusé a fait l'objet d'un deuxième verdict de non-responsabilité criminelle en regard cette fois d'une accusation de possession d'outils de cambriolage, délit commis le 17 septembre 1992.
[6] À l’audience, la psychiatre traitante, docteur Georgina Zahirney, fait lecture d’un rapport préparé pour la circonstance. De ce rapport ce Tribunal retient ce qui suit :
«M. [l'accusé] est hospitalisé à l'unité de soins longue durée à l'hôpital Malartic depuis le 7 juin 2005. Il est un homme célibataire âgé de 37 ans qui reçoit du bien-être social et de l'argent de sa famille. Il bénéficie d'un régime de protection depuis décembre 2003.
[…]
M. [l'accusé] était hospitalisé la dernière fois au CH Rouyn-Noranda en février 2005 et à ce moment-là le traitement par la Clozapine a été débuté. Il portait un diagnostic de schizophrénie de type paranoïde, trouble de la personnalité avec traits antisociaux, abus de drogues et de l'alcool. Il était connu pour un sévère problème d'abus de substances incluant l'utilisation d'inhalants. Il est hospitalisé à l'hôpital Malartic, l'unité de réadaptation, depuis juin 2005. Il est connu en psychiatrie depuis 1993, moment de sa première hospitalisation en psychiatrie à l'hôpital Malartic à l'unité médico-légale. Il a été hospitalisé à dix reprises au Centre hospitalier de Rouyn-Noranda entre 1994 et 2005. Au niveau de sa santé physique, Monsieur souffre des caries dentaires sévères. Il a un problème de surplus de poids avec un profil lipidique défavorable.
Un rapport d'évaluation psychologique a été complété en mai 2006. On a noté une atteinte non spécifique au niveau de son fonctionnement cognitif. Il y avait une lenteur d'exécution importante, des pensées délirantes qui diminuent sa capacité d'attention et de concentration, et une diminution d'adaptation quotidienne.
Médication actuelle :
Clozapine 400 mg am, 500 mg hs
Divalproex 750 mg hs et 500 mg midi
Atropine SL pour hypersalivation
Évolution clinique :
M. [l'accusé] maintient un état stationnaire depuis plus d'un an et demi, avec des symptômes chroniques de la maladie psychotique sévère. Son mode de fonctionnement global est limité, et il nécessite une supervision régulière par rapport à son hygiène et ses habitudes de vie. Il participe régulièrement aux activités de réadaptation supervisées. Il ne démontre pas d'agressivité ni d'agitation. Par contre, son intégration sociale est superficielle étant donné la présence des idées grandioses et la désorganisation au niveau des pensées. Il n'a pas d'autocritique par rapport à sa maladie et il ne reconnaît toujours pas sa capacité violente. Il interprète presque tout à travers ses idées délirantes grandioses. Il soliloque fréquemment. Il a eu une rechute d'abus d'alcool cet été, sans décompensation psychiatrique. Il a signé un contrat de s'engager à ne pas consommer et depuis septembre 2007 on n'a pas noté d'autre rechute. Il fait des sorties seules en ville et au restaurant, qui se passent bien. Il n'a pas eu des épisodes de violence. Il a une relation affective mais aussi utilitaire avec sa mère, qui lui envoie de l'argent régulièrement. Il peut lui mettre de la pression pour en avoir plus, alors, il faut le superviser à ce niveau. Sa mère habite en résidence à Rouyn. C'est son souhait de retourner à Rouyn.
Examen mental le 2008-01-23 :
Il a une attitude calme et polie, avec un léger ralentissement psychomoteur. Son apparence est légèrement négligée, ses vêtements sont souvent tâchés. Il a une très mauvaise hygiène dentaire. Son affect est euthymique et restreint. Humeur légèrement anxieuse. Les pensées se désorganisent après quelques minutes de conversation avec des associations lâches. Il m'a déjà dit communiquer par ses pensées avec son psychiatre Dr Gingras. Il a des idées délirantes de nature grandioses et paranoïdes, par exemple qu'il est riche, juge, médecin ou même le curateur publique. Il nie des hallucinations sur l'unité il peut avoir des rires immotivés ou soliloquer. Il nie la présence des idées suicidaires et violentes. Jugement chroniquement pauvre. L'autocritique est absente.
Impression diagnostique :
On note la présence d'une schizophrénie paranoïde sévère, partiellement réfractaire au traitement malgré un traitement optimal avec la Clozapine. Il y a des troubles cognitifs, typique d'une maladie psychotique sévère et probablement causés partiellement par un abus de substances, notamment des solvants dans le passé. On note la présence des traits de personnalité narcissique et antisociale. L'abus de substances est en rémission étant donné l'encadrement institutionnel.
Recommandations :
M. [l'accusé] souffre d'une pathologie psychotique sévère et persistante qui nécessite l'encadrement d'une institution appropriée. En dehors d'une ressource capable d'offrir un niveau de supervision adéquate, exemple de type intermédiaire, le risque de rechute de sa maladie, de l'abus de substances et du comportement dangereux demeure élevé. Nous sommes d'avis que M. [l'accusé] doit demeurer en détention avec des modalités de sorties selon son état en attendant la disponibilité d'une ressource d'hébergement appropriée. Selon l'entente avec l'hôpital Rouyn- Noranda, nous demandons que l'ordonnance leur soit confiée pour permettre le transfert à son hôpital de secteur et l'intégration à une ressource dès que disponible.»
[7] En réponse à une question du procureur de l’accusé, docteur Zahirney précise que la détention de l’accusé doit se poursuivre du fait qu’il n’est pas apte à s’occuper de lui-même et que sa maladie est trop sévère. Il nécessité une supervision importante.
[8] L’accusé se dit par ailleurs d’accord avec le rapport et sa recommandation.
[9]
Considérant l’article
«672.54 Pour l’application du paragraphe 672.45(2) ou de l’article 672.47, le tribunal ou la commission d’examen rend la décision la moins sévère et la moins privative de liberté parmi celles qui suivent, compte tenu de la nécessité de protéger le public face aux personnes dangereuses, de l’état mental de l’accusé et de ses besoins, notamment de la nécessité de sa réinsertion sociale :
a) lorsqu’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux a été rendu à l’égard de l’accusé, une décision portant libération inconditionnelle de celui-ci si le tribunal ou la commission est d’avis qu’il ne représente pas un risque important pour la sécurité du public;
b) une décision portant libération de l’accusé sous réserve des modalités que le tribunal ou la commission juge indiquées;
c) une décision portant détention de l’accusé dans un hôpital sous réserve des modalités que le tribunal ou la commission juge indiquées.»
[10] Considérant le rapport de la psychiatre traitante et de son témoignage à l’audience.
[11] Considérant que l’accusé continue de représenter un risque important pour la sécurité du public.
[12] Considérant qu’il est opportun que le dossier de l'accusé soit transféré au CSSS de Rouyn-Noranda, facilitant ainsi sa réinsertion sociale dans son milieu d'origine.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
- MAINTIENT la détention de l’accusé au CSSS de la Vallée-de-l’Or (Malartic) et, le cas échéant, au CSSS de Rouyn-Noranda, sous réserve de modalités suivantes :
· qu’il bénéficie de sorties, sans accompagnement, dont la durée, la fréquence et les modalités seront déterminées par l’équipe traitante en fonction de son état clinique et de son comportement. Ces sorties peuvent comprendre des périodes d’essai en ressource appropriée.
- ORDONNE le transfèrement de l’accusé du CSSS de la Vallée-de-l’Or (Malartic) au CSSS de Rouyn-Noranda avec le même statut de détention avec modalités.
[13] Cette décision, rendue à l'unanimité, a été communiquée aux parties séance tenante à l’audience.
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MÉDARD SAUCIER Président délégué |
Me Imane Kamal
Procureur de la partie accusée
Madame Jocelyne Martineau
Responsable de l'hôpital
Procureur aux poursuites criminelles et pénales
Le Curateur public du Québec
[1] À son audience précédente, tenue le 28 mars 2007, ce Tribunal avait ordonné la détention de l’accusé au CSSS de la Vallée-de-l’Or (Malartic) avec modalités de sorties.