Société de transport de Montréal |
2011 QCCLP 2256 |
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[1] Le 4 décembre 2009, Société de transport de Montréal (l’employeur) dépose une requête en contestation à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 25 novembre 2009, à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme sa décision initiale datée du 23 juin 2009 à l’effet que l’employeur doit assumer la totalité du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle subie par monsieur Richard Fournier (le travailleur), le 15 novembre 2005.
[3] Conformément à l’article 429.14 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), l’employeur a renoncé à la tenue d’une audience prévue le 14 février 2011 devant la Commission des lésions professionnelles, mais a fait parvenir une expertise médicale datée du 24 janvier 2011 ainsi qu’une argumentation écrite au soutien de la requête en contestation. C’est à cette date que le dossier est mis en délibéré.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que sa demande est recevable même si, au départ, la décision de la CSST concerne un partage de l’imputation du coût des prestations reliées à la réclamation du travailleur en application de l’article 329 de la loi.
[5] L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit à un transfert de l’imputation du coût des prestations reliées à la réclamation du travailleur, à la suite de la lésion professionnelle qu’il a subie le 11 août 2008, en relation avec la lésion professionnelle initiale subie le 15 novembre 2005. Plus spécifiquement, il demande de déclarer que la rupture du tendon du quadriceps distal gauche est une lésion professionnelle découlant d’un soin reçu pour la lésion professionnelle acceptée, soit une tendinite du quadriceps distal gauche. Il demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer, en application de l’article 327, paragraphe 1, de la loi, qu’il a droit à un transfert total de l’imputation du coût des prestations depuis le 11 août 2008.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[6] La Commission des lésions professionnelles doit décider si l’employeur a droit à un transfert total de l’imputation du coût des prestations reliées à la chirurgie subie par le travailleur, le 11 août 2008, pour la réparation d’une rupture du tendon du quadriceps distal gauche. Les articles de la loi qui s’appliquent à une telle demande sont les articles 31 et 327 de la loi.
[7] L’article 31, paragraphe 1, et l’article 327, paragraphe 1, de la loi sont libellés comme suit :
31. Est considérée une lésion professionnelle, une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion :
1° des soins qu'un travailleur reçoit pour une lésion professionnelle ou de l'omission de tels soins;
[…]
327. La Commission impute aux employeurs de toutes les unités le coût des prestations :
1° dues en raison d'une lésion professionnelle visée dans l'article 31 ;
[…]
[8] Aux fins de rendre sa décision, la Commission des lésions professionnelles retient les principaux faits suivants.
[9] Le 15 novembre 2005, le travailleur, alors âgé de 48 ans, est victime d’un accident du travail lorsqu’en se levant du banc de l’autobus qu’il conduit, il se frappe le genou gauche sur une boîte de métal.
[10] Le 24 novembre 2005, la CSST reconnaît le diagnostic de contusion au genou gauche, consolidée le 17 novembre 2005.
[11] En mars 2006, le travailleur consulte un médecin en raison de la persistance de douleur au genou gauche. Une résonance magnétique est réalisée le 27 mars 2006. Les résultats révèlent la présence d’une chondromalacie au niveau du genou gauche, mais sans autre anomalie particulière.
[12] Le 3 août 2006, la CSST accepte la réclamation du travailleur pour un diagnostic de tendinite du quadriceps distal gauche, toujours en relation avec l’événement survenu le 15 novembre 2005. Cette tendinite est consolidée le 21 mars 2007 par le docteur Patrick Lavigne, chirurgien orthopédiste. Au rapport d’évaluation médicale, ce médecin note que le travailleur conserve une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
[13] Le 5 octobre 2007, le travailleur consulte à nouveau le docteur Lavigne. Il produit un rapport médical sur les formulaires prescrits par la CSST où il écrit :
Patient suivi pour chondropathie
tendinite quadriceps gauche
malgré risque de rupture par infiltration
patient veut infiltration
bien tolérée, patient a revoir au
besoin, AINS prescrit
Patient travaille. [sic]
[14] Par la suite, le prochain rapport médical émis par le docteur Lavigne est daté du 9 mai 2008. Il diagnostique une tendinite du quadriceps réfractaire gauche et il demande une chirurgie. Il précise que le travailleur est maintenu au travail.
[15] Effectivement, le 11 août 2008, le travailleur subit une chirurgie sous les soins du docteur Marc Isler. Selon le protocole opératoire, le chirurgien procède à la réparation de la rupture du tendon du quadriceps distal gauche. Cette lésion est consolidée le 12 janvier 2009.
[16] Entre-temps, le 16 octobre 2008, la CSST rend une décision acceptant la réclamation du travailleur pour une récidive, rechute ou aggravation en date du 11 août 2008. Le diagnostic retenu est celui de rupture du tendon du quadriceps distal gauche.
[17] Le 22 décembre 2008, l’employeur demande à la CSST de procéder à un partage du coût des prestations reliées à la lésion professionnelle du travailleur, puisque celui-ci présente une condition personnelle antérieure à l’événement du 15 novembre 2005. Il soumet qu’en vertu de l’article 329 de la loi, le travailleur était porteur d’un handicap préexistant, donnant ainsi ouverture à sa demande.
[18] Le 23 juin 2009, la CSST rend une décision par laquelle elle informe l’employeur qu’il demeure imputé de la totalité du coût des prestations puisqu’il n’a pas démontré que le travailleur était porteur d’un handicap préexistant, au sens de l’article 329 de la loi. Cette décision est confirmée par une décision rendue à la suite d’une révision administrative, en date du 25 novembre 2009, d’où la présente requête de l’employeur.
[19] Au soutien de sa requête, l’employeur a fait parvenir à la Commission des lésions professionnelles une expertise médicale basée sur l’étude du dossier par le docteur Bernard Lacasse, chirurgien orthopédiste, datée du 24 janvier 2011.
[20] Le docteur Lacasse a revu tout le dossier du travailleur. Il retient que le 5 octobre 2007, malgré la réserve formulée par le docteur Lavigne quant au risque lié à une infiltration au niveau du tendon du quadriceps de provoquer une rupture, il a tout de même procédé à cette infiltration. Le 11 août 2008, nous l’avons dit plus haut, le docteur Isler a procédé à un débridement et à une suture de cette rupture tendineuse gauche.
[21] Selon le docteur Lacasse, le scénario le plus probable au dossier du travailleur est qu’il est possible qu’il ait présenté une tendinite du tendon du quadriceps en relation avec l’événement initial. Cependant, l’infiltration du 5 octobre 2007, une infiltration de corticoïde, a causé la rupture du tendon, confirmant les craintes exprimées par le docteur Lavigne à cet effet. L’infiltration a causé la rupture qui elle-même a nécessité le traitement chirurgical.
[22] Selon le docteur Lacasse, cette rupture du tendon du quadriceps gauche est une nouvelle lésion acquise à l’occasion des soins reçus par le travailleur pour sa lésion professionnelle. Il retient également que la résonance magnétique pratiquée le 27 mars 2006 ne décelait aucune déchirure au niveau du quadriceps gauche. Il croit que l’employeur doit demander un partage d’imputation en vertu des articles 31 et 327 de la loi.
[23] Dans la présente cause, l’employeur a demandé à la CSST, par une lettre datée du 22 décembre 2008, un partage de l’imputation du coût des prestations en application de l’article 329 de la loi. La CSST a refusé cette demande de l’employeur, car il n’a pas prouvé un handicap préexistant.
[24] Devant la Commission des lésions professionnelles, l’employeur invoque plutôt qu’il a droit à un transfert du coût des prestations à partir de la chirurgie subie par le travailleur le 11 août 2008, car cette chirurgie a été rendue nécessaire en raison d’une lésion découlant d’un soin que le travailleur a reçu pour traiter sa lésion professionnelle. Une telle lésion est visée au paragraphe 1 de l’article 31 de la loi, qui permet l’application de l’article 327.
[25] La Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’elle peut statuer sur la requête de l’employeur même si sa demande initiale à la CSST est fondée sur l’article 329 de la loi. L’employeur peut valablement demander l’application de l’article 327 de la loi dans le présent dossier, et ce, pour les motifs suivants.
[26] Cette question a déjà été décidée, notamment par une décision de notre tribunal dans l’affaire Pâtisserie Chevalier inc.[2] Dans cette affaire, justement en matière d’imputation du coût des prestations, l’employeur avait initialement demandé à la CSST de procéder à un transfert de l’imputation du coût des prestations en application des articles 31 et 327 de la loi. Devant la Commission des lésions professionnelles, l’employeur invoquait plutôt un handicap préexistant et demandait un partage de l’imputation en application de l’article 329 de la loi.
[27] Dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles rappelle qu’elle a une compétence exclusive, selon l’article 369 de la loi, pour statuer, notamment, sur les recours formés en vertu de l’article 359 de la loi. La décision pendante devant elle entre dans cette catégorie.
[28] Dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles rappelle que la loi l’a investie de pouvoirs aux fins d’exercer sa compétence exclusive. Ces pouvoirs conférés se retrouvent, essentiellement, aux articles 377 et 378 de la loi. L’article 377 est libellé comme suit :
377. La Commission des lésions professionnelles a le pouvoir de décider de toute question de droit ou de fait nécessaire à l'exercice de sa compétence.
Elle peut confirmer, modifier ou infirmer la décision, l'ordre ou l'ordonnance contesté et, s'il y a lieu, rendre la décision, l'ordre ou l'ordonnance qui, à son avis, aurait dû être rendu en premier lieu.
[29] Toujours dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles rappelle que l’application des articles 327 et 329 de la loi concerne une décision portant sur l’imputation du coût des prestations reliées à une réclamation. Ces deux articles se retrouvent au chapitre IX, section VI, de la loi. Dans les deux cas, la Commission des lésions professionnelles peut confirmer, modifier ou infirmer la décision visée par le recours exercé par un employeur. Dans les deux cas, l’employeur recherche une modification de l’imputation du coût des prestations faites par la CSST à son dossier.
[30] Dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que la situation devant elle ne concerne pas sa compétence, mais fait plutôt appel au principe du « de novo ». Voici comment s’exprime la Commission des lésions professionnelles sur cette notion :
[69] Les recours portés devant la Commission des lésions professionnelles sont entendus « de novo ». Quant à cet aspect « de novo » du processus de contestation, il est intéressant de référer aux propos livrés par la commissaire Vaillancourt dans l’affaire Hétu et Centre hospitalier Royal Victoria6. Dans cette affaire, elle indique :
De plus, la jurisprudence ayant eu à interpréter la compétence de la Commission d’appel a clairement statué qu’il s’agissait d’un appel « de novo », ce qui implique qu’elle n’est aucunement limitée par le dossier qui a pu être constitué au niveau des instances antérieures, ni limitée par la teneur exacte des motifs pris en compte et de la décision qui a été rendue par ces instances, pourvu évidemment de ne pas s’écarter de ce qui constitue la matière ou l’objet de l’appel. Il en découle qu’une partie peut présenter une nouvelle preuve et n’est pas limitée par la preuve présentée devant l’instance antérieure.
[…]
Une des conséquences fondamentales de l’aspect « de novo » de la procédure est de justement permettre au tribunal d’entendre de nouvelles preuves et de pouvoir aussi actualiser un dossier pour tenir compte de cette nouvelle preuve, et ce, toujours en lien avec la question en litige. De plus, dans le cadre d’une loi d’ordre public, le tribunal n’est pas nécessairement lié par la contestation d’une partie.
En résumé, prétendre, comme l’a fait le premier commissaire dans sa décision qu’il n’était pas limité par la contestation, mais qu’il avait la même compétence que la CSST lors de la décision initiale n’est pas dénué de fondement juridique et s’accorde assez bien avec la doctrine et la jurisprudence en droit administratif.
6 [2000] C.L.P. 365 .
[31] La Commission des lésions professionnelles, dans cette affaire, rappelle également que le principe du « de novo » est depuis longtemps reconnu par les tribunaux supérieurs comme étant applicable à la Commission des lésions professionnelles, tout comme il a été reconnu applicable à sa prédécesseure, la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles[3].
[32] En tenant compte de tous ces principes, la Commission des lésions professionnelles, dans cette affaire, conclut qu’elle peut examiner au fond le bien-fondé de la demande de l’employeur quant à un partage de l’imputation en application de l’article 329 de la loi, malgré que la demande initiale à la CSST fût faite en vertu de l’article 327 de la loi.
[33] Dans la présente cause, l’analyse se fait exactement de la même façon en appliquant le même raisonnement. La Commission des lésions professionnelles a la compétence pour recevoir et soupeser la preuve de l’employeur, même nouvelle, relativement à sa prétention concernant sa contestation de l’imputation faite à son dossier par la CSST.
[34] Dans la présente cause, la CSST a rendu une décision le 16 octobre 2008, acceptant la réclamation du travailleur à titre de récidive, rechute ou aggravation en date du 11 août 2008. Le diagnostic retenu est celui de rupture du tendon du quadriceps distal gauche. L’employeur avait d’abord demandé la révision de cette décision, mais s’est désisté de sa demande.
[35] Essentiellement, deux courants jurisprudentiels de notre tribunal semblent prévaloir concernant l’application de l’article 327 de la loi. Un courant jurisprudentiel établit que l’employeur ne peut demander le transfert de l’imputation par l’application de l’article 327, paragraphe 1, de la loi, s’il n’a pas contesté la décision de la CSST établissant une relation entre le nouveau diagnostic et l’événement initial (voir notamment Équipement de ferme Turgeon ltée[4]).
[36] Un autre courant est plutôt d’avis que l’employeur n’est pas forclos de demander à la CSST l’application de l’article 327, par le biais de l’application de l’article 31 de la loi, même s’il n’a pas contesté une décision de la CSST concluant à une relation causale entre un diagnostic donné et la lésion professionnelle initiale. Voici comment la Commission des lésions professionnelles résume ce courant jurisprudentiel dans l’affaire Hydro-Québec[5] :
[22] L’employeur n’a pas contesté la décision rendue par la CSST le 30 juin 2009. Le tribunal est d’avis que le fait de reconnaître la relation entre le diagnostic d’algodystrophie et la lésion professionnelle du 18 novembre 2008 n’est pas « inconciliable » avec le fait que cette même pathologie puisse découler des soins ou de l’omission des soins selon l’article 31 de la loi. La jurisprudence du tribunal n’est pas unanime à ce sujet mais de nombreuses décisions3 sont à l’effet que la reconnaissance entre un diagnostic donné et la lésion initiale n’empêche pas l’employeur de demander un transfert d’imputation en vertu de l’article 327 de la loi. Le soussigné partage le même avis.
3 Les Constructions G.S.L. inc., C.L.P. 360733-01A-0810, 22 juin 2010, R. Arseneau.; E.P. Poirier ltée, C.L.P. 360262-62A-0810, 25 août 2009, C. Burdett; voir aussi : Métro Richelieu C.L.P. 291111-71-0606, 31 janvier 2007, D. Lévesque; Couche Tard inc., C.L. P. 359591-01A-0809, 30 novembre 2009, R. Arseneau; Centre d’insémination artificielle du Québec, C.L.P. 364272-62B-08-12, 1er juin 2010, F. Daigneault.
[37] La présente Commission des lésions professionnelles partage cette dernière façon d’aborder la question de l’application de l’article 31 et de l’article 327 de la loi. La Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’interprétation des différentes dispositions de la loi doit se faire de façon à favoriser l’exercice d’un droit plutôt qu’à le limiter.
[38] De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, lorsque l’employeur demande l’application de l’article 327 de la loi, il peut faire la preuve d’une des situations visées à l’article 31 de la loi sans qu’il ait, au préalable, à contester la décision initiale concernant l’admissibilité de cette lésion. Il faut se rappeler que l’employeur ne conteste pas l’admissibilité de la réclamation pour cette nouvelle lésion, mais seulement l’imputation du coût des prestations à son dossier d’employeur liée à cette nouvelle lésion professionnelle.
[39] L’article 31 de la loi ne change pas la définition de ce qu’est une lésion professionnelle, contenue à l’article 2 de la loi, mais en donne une modalité d’application. L’article 31 précise que les situations y décrites s’inscrivent dans une continuité du lien de causalité avec, nécessairement, une lésion professionnelle initiale reconnue, laquelle a nécessité ce soin ou ce traitement.
[40] D’ailleurs, lorsque l’on examine les articles de la loi concernant la procédure de réclamation d’un travailleur à la CSST, ils font référence au concept de lésion professionnelle. L’article 31 de la loi n’est pas une catégorie à part. Le travailleur dépose sa réclamation auprès de la CSST afin de faire reconnaître une lésion professionnelle, sans avoir à préciser qu’il s’agit d’une lésion visée à l’article 31 de la loi.
[41] De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, en décrétant l’application de la loi aux situations visées à l’article 31 de la loi, le législateur a voulu leur donner une incidence particulière. Lorsque le législateur décrète que la loi s’applique à ces situations, il évite toute ambiguïté possible sur cet aspect. Cependant, que la lésion professionnelle soit visée par une des situations prévues à l’article 31 n’a aucune incidence pour un travailleur. Il aura droit aux mêmes bénéfices que ceux de toutes autres lésions professionnelles.
[42] L’incidence particulière de l’article 31 de la loi se retrouve essentiellement en matière d’imputation du coût des prestations. Le seul article de la loi qui fait référence à l’article 31, c’est l’article 327 de la loi.
[43] Avec respect, de l’avis de la Commission des lésions professionnelles, obliger un employeur à contester une décision d’admissibilité aux seules fins d’obtenir expressément une décision de la CSST quant à la présence ou non d’une des situations visées par l’article 31 de la loi, pour ultimement obtenir ce qu’il souhaite, c’est-à-dire une décision en matière d’imputation, est tout simplement contraire à l’esprit et à l’économie de la loi.
[44] Ainsi, de l’avis de la Commission des lésions professionnelles, l’employeur peut demander l’application de l’article 327, paragraphe 1 de la loi, même s’il n’a pas contesté initialement la décision d’admissibilité de la nouvelle lésion, acceptée à titre de récidive, rechute ou aggravation. L’employeur doit faire la preuve qu’exige l’application de l’article 327, paragraphe 1, de la loi. L’employeur doit prouver que la nouvelle lésion pour laquelle il demande un transfert de l’imputation du coût des prestations constitue bel et bien une lésion distincte de la lésion professionnelle initiale et qu’elle découle d’un soin ou d’un traitement reçu[6].
[45] Dans la présente cause, la preuve révèle que le travailleur a reçu, le 5 octobre 2007, une infiltration au niveau du tendon gauche pour traiter sa tendinite au quadriceps gauche, une lésion professionnelle reconnue. Il n’était pas en arrêt de travail à cette époque. Déjà à cette date, le docteur Lavigne exprimait sa réticence à procéder à ce traitement puisqu’il comportait des risques de rupture du tendon.
[46] Le 11 août 2008, le docteur Isler procède effectivement à la réparation de la rupture du tendon du quadriceps gauche chez le travailleur.
[47] Or, il apparaît clairement, dans l’opinion du docteur Lacasse, chirurgien orthopédiste, à son expertise médicale déposée au présent dossier, que l’infiltration de corticoïde du 5 octobre 2007 a causé la rupture du tendon du quadriceps gauche, confirmant ainsi les craintes exprimées par le docteur Lavigne.
[48] La Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’employeur a déposé une preuve prépondérante démontrant que la chirurgie subie par le travailleur le 11 août 2008, pour la réparation de la rupture du tendon du quadriceps distal gauche, est une lésion découlant du soin reçu le 5 octobre 2007 pour la tendinite du quadriceps gauche. La déchirure du tendon n’est pas en lien direct avec la tendinite du quadriceps gauche. Elle constitue une nouvelle lésion en lien avec le soin reçu.
[49] La Commission des lésions professionnelles constate également qu’aucun des médecins de la CSST n’a examiné le lien causal entre l’infiltration reçue le 5 octobre 2007 et la rupture du tendon constatée. Cette relation semble pourtant évidente pour le docteur Lacasse. Il y a donc lieu de faire droit à la requête de l’employeur.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête de Société de transport de Montréal;
MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 25 novembre 2009, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la rupture du tendon du quadriceps distal gauche est une lésion professionnelle visée à l’article 327, paragraphe 1, de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles;
DÉCLARE que Société de transport de Montréal a droit au transfert total de l’imputation du coût des prestations reliées à la rupture du tendon du quadriceps distal gauche, à partir du 11 août 2008.
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Line Vallières |
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Madame Caroline Gimenez |
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Médial Conseil Santé Sécurité |
Représentante de la partie requérante
[1] L.R.Q., c. A-3.001
[2] C.L.P. 215643-04-0309, 28 mai 2004, S. Sénéchal.
[3] Desruisseaux c. C.L.P. et C.S.S.T, C.S. 200-05-013595-009, 27 septembre 2000, j. Bouchard; Industries Super Métal inc. c. C.A.L.P. [1995] C.A.L.P. 1961 , (C.A.).
[4] C.L.P. 353555-03B-0807, 14 mai 2009, A. Quigley; voir également Matériaux Économiques inc. et Magny et CSST, C.L.P. 298400-04-0609, 21 avril 2009, J.-L. Rivard, décision relative à une requête en révision; Silos Port-Cartier (Les), C.L.P. 329100-09-0709, 29 mai 2009, C.-A. Ducharme; Bois BSL inc., C.L.P. 363663-01A-0811, 15 décembre 2009, J. David; Services de Gestion Quantum limitée et CSST, C.L.P. 377210-62-0905, 25 janvier 2010, J.-M. Hamel; Maurice Goupil ltée, C.L.P. 260066-01C-0504, 9 février 2010, M. Carignan; Doxasteel inc., C.L.P. 365817-04-0812, 11 mars 2010, D. Lajoie; Commission scolaire de Laval, C.L.P. 376097-61-0904, 15 mars 2010, G. Morin; R. Dubé Limitée et CSST, C.L.P. 407297-02-1004, 17 septembre 2010, M. Sansfaçon.
[5] C.L.P. 397900-08-0912, 26 juillet 2010, P. Champagne.
[6] Coopérative des techniciens ambulanciers du Québec-Métropolitain, C.L.P. 90304-03-9708, 17 avril 1998, M. Carignan; Centre hospitalier Robert-Giffard, C.L.P. 177283-32-0201, 23 avril 2002, M.-A. Jobidon; Industrie John Lewis ltée, C.L.P. 182333-04-0204, 17 mars 2003, A. Gauthier; Entreprise Cara ltée et C.S.S.T., C.L.P. 214961-72-0309, 14 novembre 2003, D. Lévesque (03LP-205); Winners Merchants inc., C.L.P. 376386-31-0904, 2 novembre 2009, G. Tardif.
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