Décision

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Gabarit CSF

Barreau du Québec (syndic adjoint) c. Thivierge

                                             2015 QCCDBQ 036

 

 
CONSEIL DE DISCIPLINE

BARREAU DU QUÉBEC

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

N°:

06-14-02898

 

DATE :

   05 mai 2015           

______________________________________________________________________

 

LE CONSEIL :

Me MARIE-JOSÉE CORRIVEAU

Présidente

Me DOMINIQUE  LEGAULT

Membre

Me NADINE MARTIN

Membre

______________________________________________________________________

 

ME NICOLAS BELLEMARE, en sa qualité de syndic adjoint du Barreau du Québec

 

Plaignant

c.

 

ME RICHARD THIVIERGE

 

Intimé

______________________________________________________________________

 

DÉCISION EN VERTU DE L’ARTICLE 149.1 DU CODE DES PROFESSIONS

______________________________________________________________________

 

CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE CONSEIL DE DISCIPLINE A PRONONCÉ UNE ORDONNANCE DE NON-PUBLICATION, DE NON-DIFFUSION ET DE NON ACCÈS DU NOM DE LA VICTIME DONT IL EST QUESTION DANS LA PLAINTE ET DES CLIENTS DE L’INTIMÉ MENTIONNÉS DANS LA PREUVE, AINSI QUE TOUT DOCUMENT OU RENSEIGNEMENT PERMETTANT D’IDENTIFIER LA VICTIME ET CES CLIENTS.

 

LE CONSEIL DE DISCIPLINE A ÉGALEMENT PRONONCÉ UNE ORDONNANCE DE NON-PUBLICATION, DE NON-DIFFUSION ET DE NON ACCÈS DU RÈGLEMENT HORS COUR INTERVENU ENTRE L’INTIMÉ ET LA VICTIME.

 

CES ORDONNANCES DEMEURENT TOUJOURS EN VIGUEUR.

 

 

 

 

[1]         Le Conseil de discipline s’est réuni le 24 février 2015 pour procéder à l’audition de la plainte déposée par Me Nicolas Bellemare en sa qualité de syndic adjoint du Barreau du Québec contre l’intimé, Me Richard Thivierge.

[2]         Le syndic adjoint plaignant se représente lui-même.

[3]         L’intimé est présent et est représenté par Me Guiseppe Battista.

 

LA PLAINTE

[4]          L’intimé fait l’objet d’une plainte formulée par le syndic adjoint plaignant en vertu de l’article 149.1 du Code des professions qui se lit comme suit:

« 149.1. Pouvoir du syndic. Un syndic peut saisir le conseil de discipline, par voie de plainte:

1° de toute décision d'un tribunal canadien déclarant un professionnel coupable d'une infraction criminelle;

2° de toute décision rendue au Québec le déclarant coupable d'une infraction visée à l'article 188 ou d'une infraction à une disposition d'une loi du Québec ou d'une loi fédérale;

3° de toute décision rendue hors Québec le déclarant coupable d'une infraction qui, si elle avait été commise au Québec, aurait pu faire l'objet d'une poursuite pénale en vertu de l'article 188 ou d'une poursuite pénale en vertu d'une disposition d'une loi du Québec ou d'une loi fédérale.

Décision. La décision visée au premier alinéa doit, de l'avis du syndic, avoir un lien avec l'exercice de la profession.

Sanctions. Une copie dûment certifiée de la décision judiciaire fait preuve devant le conseil de discipline de la perpétration de l'infraction et, le cas échéant, des faits qui y sont rapportés. Le conseil de discipline prononce alors contre le professionnel, s'il le juge à propos, une ou plusieurs des sanctions prévues à l'article 156. »

[5]         Cette plainte du syndic adjoint plaignant du 11 décembre 2014 est ainsi rédigée :

« ME RICHARD THIVIERGE (06-14-02898), avocat, de la section de Québec, inscrit au Tableau de l’Ordre des avocats, a commis des actes dérogatoires à l’honneur et à la dignité du Barreau, à savoir:

1.    Le 2 mai 2013, dans le dossier de la Cour du Québec portant le numéro 200-01-159426-117 par jugement de l’honorable Marie-Claude Gilbert, j.c.q., a été déclaré coupable à la suite d’un plaidoyer de culpabilité de l’infraction criminelle suivante ayant un lien avec l’exercice de la profession d’avocat :

Entre le 28 juin 2004 et le 27 juin 2006, à Québec, district de Québec et à Gagnon, district de Mingan, a, à des fins d’ordre sexuel, touché une partie du corps de X (1992-[...]), enfant, âgée de moins de quatorze (14) ans, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 151 du Code criminel;

Entre le 28 juin 2006 et le 27 juin 2008, à Gagnon, district de Mingan, à Québec, district de Québec a, à des fins d’ordre sexuel, touché une partie du corps de X (1992-[...]), adolescente vis-à-vis de laquelle il était en situation d’autorité ou de confiance, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 153 (1) a) du Code criminel;

Entre le 28 juin 2004 et le 27 juin 2006, à Québec, district de Québec et à Gagnon, district de Mingan, a, à des fins d’ordre sexuel, invité, engagé ou incité X (1992-[...]), enfant, âgée de moins de quatorze (14) ans,  à le toucher, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 152 du Code criminel;

Entre le 28 juin 2006 et le 27 juin 2008, à Québec, district de Québec et à Gagnon, district de Mingan, a, à des fins d’ordre sexuel, invité, engagé ou incité X (1992-[...]), une adolescente à le toucher alors qu’il était en situation d’autorité ou de confiance vis-à-vis elle,  commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 153 (1) b) du Code criminel;

Se rendant ainsi passible des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions, tel que prévu à l’article 149.1 de cette même loi.»

[6]         En début d’audition, l’intimé enregistre un plaidoyer de non-culpabilité sur cette plainte disciplinaire.

[7]         Les parties sont alors invitées à présenter leur preuve.

 

LA PREUVE

[8]         La preuve du syndic adjoint plaignant réside en la production d’une preuve documentaire.

[9]         Celle de l’intimé comporte une preuve documentaire et son témoignage.

[10]      De l’ensemble de la preuve présentée, le Conseil retient essentiellement ce qui suit.

Preuve du syndic adjoint plaignant

[11]      La preuve documentaire du syndic adjoint plaignant est composée des pièces suivantes :

·        L’attestation du Barreau du Québec sur le statut de l’intimé (pièce P-1);

·        L’acte d’accusation du 28 septembre 2011 comportant cinq (5) chefs d’accusation dans le dossier 200-01-159426-117 et le procès-verbal  du 2 mai 2013 attestant de la culpabilité de l’intimé suite à son plaidoyer de culpabilité sur les quatre premiers chefs d’accusation d’ordre sexuel sur une mineure (pièce P-2);

·        La transcription des représentations sur sentence et du jugement sur sentence de l’honorable juge Marie-Claude Gilbert de la Cour du Québec chambre criminelle et pénale rendu oralement le 2 mai 2013 condamnant l’intimé à trois ans de pénitencier  (pièce P-3);

·        Une lettre du 2 juin 2014 de l’intimé adressée au syndic adjoint plaignant (pièce P-4);

·        Une lettre du 30 juin 2014 de l’intimé adressée au syndic adjoint plaignant (pièce P-5);

·        La décision du Comité exécutif du Barreau du Québec du 27 novembre 2014 ordonnant la suspension provisoire du droit de pratique de l’intimé au motif qu’il y a un lien entre les actes criminels commis et l’exercice de la profession d’avocat (pièce P-6);

·        Le jugement du Tribunal des professions du 19 janvier 2015 ordonnant le sursis d’exécution de la décision du Comité exécutif du Barreau du Québec (pièce P-7).

[12]      Les actes criminels d’ordre sexuel pour lesquels l’intimé a plaidé coupable sont reproduits au libellé de la présente plainte.

[13]      La transcription des représentations sur sentence fait état des circonstances entourant la commission de ces actes criminels relatées par le procureur de la Couronne.

[14]      Selon la procureure de la Couronne, les abus sexuels ont débuté alors que la victime avait environ 12 ou 13 ans et se sont terminés alors qu’elle avait 15 ans.

[15]      Ces abus se produisaient sur une base régulière et ont eu lieu à différents endroits dont le domicile de l’intimé, dans son auto et à son chalet.

[16]      Dans ses représentations, la procureure de la Couronne indique que les abus ont également eu lieu au bureau de l’intimé. Nous reviendrons sur ce fait plus loin.

[17]      Au soutien de la suggestion commune de trois ans de pénitencier qu’elle présente à la juge, elle soumet notamment les arguments suivants :

-le plaidoyer de culpabilité;

-l’absence d’antécédents judiciaires;

-l’impact de son plaidoyer de culpabilité sur sa profession d’avocat;

-la situation d’autorité face à la victime;

-le crime commis à l’égard d’une enfant;

-la nature des gestes;

-la fréquence;

-la manipulation et l’argent donné.

[18]      Dans son jugement rendu oralement et séance tenante, la juge Gilbert j.c.s. donne suite à la suggestion commune et condamne l’intimé à trois ans de pénitencier avec interdiction de communiquer avec la victime durant sa détention, lui ordonne de se conformer à la Loi sur l’enregistrement des renseignements sur les délinquants sexuels et ce, à perpétuité et émet une ordonnance pour le prélèvement du nombre d’échantillons de substance corporelle suffisant aux fins d’analyses de son profil génétique.

[19]      Dans son jugement, la juge Gilbert j.c.s. tient compte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé, évitant à la victime de témoigner, et de l’absence d’antécédent judiciaire.

[20]      Elle tient également compte de l’âge de la victime et de sa situation de vulnérabilité face à l’intimé qui était en situation d’autorité, la fréquence et la nature des gestes posés, les manœuvres utilisées et les cadeaux donnés à la victime pour qu’elle garde le secret et se laisse entraîner dans cette relation malsaine pour satisfaire les besoins sexuels de l’intimé.

[21]      Dans le cadre de ses échanges avec le Bureau du syndic en juin et juillet 2014, l’intimé reconnaît la gravité de sa conduite (pièces P-4 et P-5).

[22]      Il explique cependant que les actes criminels pour lesquels il a plaidé coupable ont été commis dans le cadre de sa vie privée.

[23]      Il précise qu’aucun des gestes n’a été posé à l’occasion de l’exercice de la profession ou en raison de son titre d’avocat.

[24]      La victime n’était pas une cliente, n’était pas liée à un client, n’était pas une employée de son cabinet et n’était pas liée à un employé ou autrement liée de quelque façon que ce soit à l’exercice de sa profession d’avocat.

[25]      Il indique que sa pratique se limite au droit commercial et corporatif et que ni lui, ni ses associés ne traitent de dossiers susceptibles de le mettre en contact avec des mineurs.

[26]      Il affirme avoir consulté un psychologue pendant plusieurs mois pour comprendre son comportement et s’assurer que cela ne se reproduise plus.

[27]      Il dit avoir avisé sa famille, ses clients et le Bureau du syndic qu’il allait plaider coupable à des accusations d’ordre sexuel avec les conséquences que cela pouvait avoir.

Preuve de l’intimé

[28]      En défense, l’intimé dépose les documents suivants :

·        Une lettre du 19 août 2014 de Me Karine Labbé, associée de l’intimé, adressée au Bureau du syndic (pièce I-1);

·        Une lettre du 21 août 2014 de Me Conrad Légaré, avocat criminaliste, adressée au Syndic du Barreau (pièce I-2);

·        Une lettre du 16 mars 2014 d’Élaine Eglin, conjointe de l’intimé, adressée à la Commission des libérations conditionnelles du Canada (pièce I-3);

·        En liasse, dix-sept (17) lettres d’appui de clients ou de professionnels (pièce I-4);

·        La décision de la Commission des libérations conditionnelles du Canada en date du 4 novembre 2014 accordant une libération totale à l’intimé (pièce I-5).

[29]      Témoignant devant le Conseil, l’intimé, aujourd’hui âgé de 65 ans, explique les événements.

[30]      Il raconte qu’à l’époque, il vivait des moments difficiles tant au point de vue personnel que professionnel.

[31]      Il reconnaît les faits et en a d’énormes regrets.

[32]      Il dit avoir eu des pensées suicidaires tellement il avait honte de ce qu’il avait fait.

[33]      Il tient cependant à préciser que la période durant laquelle il a commis ces actes est moins longue que celle mentionnée aux chefs d’accusation.

[34]      Il situe les événements entre septembre 2006 et août 2007 et non pas depuis juin 2004 comme l’énoncent les premier et troisième chefs d’accusation.

[35]      Il dit avoir tout de même plaidé coupable à ces deux chefs en plus des deuxième et quatrième chefs afin d’éviter que la victime ait à témoigner et qu’elle soit mise en contradiction par d’autres témoignages et éléments de preuve.

[36]      Si l’intimé dit vrai, cela ferait en sorte que les crimes ont été commis alors que la victime, quoique mineure, avait plus de 14 ans.

[37]      Il dit également qu’il y a erreur dans la narration des faits de la procureure de la Couronne lorsqu’elle mentionne que les actes sexuels ont aussi été commis à son bureau.

[38]      Il affirme que c’est plutôt dans l’édifice où est situé son cabinet que certains de ces actes ont été commis, soit à la clinique de sa conjointe située dans le même immeuble, mais jamais à son cabinet.

[39]      L’intimé explique aussi qu’il a toujours collaboré une fois que la victime a révélé les abus sexuels dont elle avait été victime et n’a pas tenté de nier la vérité.

[40]      Il a alors tenté de réparer ses fautes en assumant les frais de thérapie de la victime.

[41]      À l’été 2014, il a également convenu de lui verser une somme d’argent substantielle en réparation du préjudice qu’il lui a causé.

[42]      L’intimé pratique le droit depuis 40 ans.

[43]      Avant de plaider coupable aux actes criminels reprochés, il a rencontré tous ses clients pour les informer de la situation et de leur possibilité de changer de cabinet.

[44]      Il explique également son cheminement depuis sa condamnation le 2 mai 2013.

[45]      Il est incarcéré jusqu’au 16 avril 2014, date à laquelle il a bénéficié d’une semi-liberté en étant transféré dans un Centre résidentiel communautaire.

[46]      À compter de cette date, il reprend le travail à son cabinet étant autorisé à s’y rendre durant le jour.

[47]      L’intimé dit que tous ses clients lui sont restés fidèles à l’exception d’un seul.

[48]      Le 4 novembre 2014, la Commission des libérations conditionnelles du Canada lui accorde une libération conditionnelle totale (pièce P-5).

[49]      Dans cette décision de la Commission des libérations conditionnelles du Canada on peut y lire notamment ceci :

« La relation conjugale entre vous et votre conjointe est positive. (…) Vous avez de bonnes habilités au niveau occupationnel et votre situation financière n’est pas préoccupante. La Commission retient que votre entourage immédiat connaît bien la nature de votre criminalité, ce qui se veut un élément de sécurité important.

Vous souhaitez obtenir votre libération conditionnelle totale afin de retourner habiter à votre domicile avec votre conjointe. Vous êtes ouvert à poursuivre votre implication dans le programme Maintien des acquis. Vous prévoyez continuer de travailler dans le cadre de votre profession.

(…)

Au terme de son analyse, la Commission vous accorde une libération conditionnelle totale puisqu’elle est d’avis qu’une récidive avant l’expiration légale de votre peine ne présentera pas un risque inacceptable pour la société et que cette libération contribuera à la protection de celle-ci en favorisant votre réinsertion sociale en tant que citoyen respectueux des lois.

(…)

Le risque de récidive est évalué comme étant faible par l’ensemble des professionnels, ce qui est confirmé par les outils actuariels.

(…) »

[50]      La Commission des libérations conditionnelles impose certaines conditions à l’intimé dont l’interdiction de communiquer avec la victime et de se trouver en présence de filles de moins de 18 ans sans être accompagné par un adulte responsable qui connaît ses antécédents criminels et qui a été autorisé par écrit au préalable par son surveillant de libération conditionnelle.

[51]      L’intimé continue donc à travailler comme avocat jusqu’à la suspension de son droit d’exercer sa profession imposée par le Comité exécutif du Barreau le 27 novembre 2014 en application de l’article 55.1 du Code des professions.

[52]      Le 19 janvier 2015, il reprend sa pratique suite à l’ordonnance de sursis d’exécution de cette décision prononcée par le Tribunal des professions.

[53]      L’intimé explique au Conseil qu’il œuvre uniquement en droit commercial depuis vingt ou vingt-cinq ans et que son cabinet est composé de trois avocats dont son associée, Me Karine Labbé, qui avait pris sa relève lors de son incarcération.

[54]      Aucun des avocats du cabinet ne pratique en droit de la jeunesse ou en droit de la famille et se concentrent plutôt en droit civil et droit commercial.

[55]      L’intimé passe également en revue les différentes lettres d’appui de certains clients, recueillies en août 2014, confirmant leur désir de continuer à faire affaire avec lui malgré les événements survenus dans sa vie personnelle considérant ses compétences professionnelles.

DÉCISION DU COMITÉ EXÉCUTIF DU 27 NOVEMBRE 2014

[56]      Tel que mentionné précédemment, le 27 novembre 2014, le Comité exécutif du Barreau a rendu une décision en application de l’article 55.1 du Code des professions.

[57]      L’article 55.1 et le paragraphe 1° de l’article 45 du Code des professions auquel l’article 55.1 fait référence se lisent comme suit :

« 55.1 Radiation ou suspension. Le Conseil d’administration peut, après avoir donné au professionnel l’occasion de présenter ses observations, le radier provisoirement ou limiter ou suspendre provisoirement son droit d’exercer ses activités professionnelles, lorsque ce professionnel a fait l’objet d’une décision judicaire visée au paragraphe 1°, 2°, 5°ou 6°du premier alinéa de l’article 45.

(…)

45. Refus. Le Conseil d’administration peut refuser la délivrance d’un permis, l’inscription au tableau ou toute autre demande présentée dans le cadre de sa candidature à l’exercice de la profession à une personne qui :

1° a fait l’objet d’une décision d’un tribunal canadien la déclarant coupable d’une infraction criminelle qui, de l’avis motivé du Conseil d’administration, a un lien avec l’exercice de la profession, sauf si elle a obtenu le pardon.

(…) »

(nos soulignements)

[58]      Ainsi, afin d’exercer son pouvoir administratif en vertu de l’article 55.1 du Code des professions, le Comité exécutif devait déterminer si les actes criminels pour lesquels l’intimé a reconnu sa culpabilité avait un lien avec l’exercice de la profession d’avocat.

[59]      Après avoir pris connaissance de la preuve documentaire présentée et du témoignage de l’intimé et entendu les représentations des procureurs, le Comité exécutif conclut à l’existence de ce lien et décide qu’il y a lieu d’imposer à l’intimé une mesure administrative pour assurer la protection du public.

[60]      Le Comité exécutif motive ainsi sa décision:

« [32] Dans le présent cas, selon la preuve, les infractions n’ont pas été commises dans l’exécution de la profession de Me Thivierge. Les infractions et les événements entourant l’affaire ne se sont pas déroulés dans le bureau de l’avocat ou à sa place d’affaires, ni avec des clients ou dans le cadre des activités professionnelles. Bien que Me Thivierge (…), il n’en demeure pas moins que les infractions sous étude ont été commises alors que la victime connaissait l’intimé et savait qu’il était avocat. À ce titre, elle pouvait donc lui faire confiance. Le Comité exécutif conclut qu’il existe un lien entre l’infraction criminelle reprochée à l’intimé et l’exercice de la profession d’avocat. 

[33]         Le Comité exécutif partage ainsi le point de vue de Me Gervais sur ce point dans la présente affaire, mais apporte une nuance quant à sa position que toute infraction criminelle pour laquelle il y a eu condamnation d’un avocat a un lien avec l’exercice de la profession.

[34]         Comme l’a si bien dit Me Battista, l’évaluation qui doit être faite par le Comité exécutif relève du cas par cas; il n’y a pas de réalité automatique qui s’impose dès qu’un plaidoyer de culpabilité est rendu contre un membre de notre Ordre professionnel.

[35]         Tel que le souligne le tribunal dans l’affaire Lessard à la page 190 :

« L’exercice de la profession doit nécessairement envisager une matérialité de faits, une réalité dans laquelle se trouve le professionnel au moment de la perpétration de l’infraction criminelle. Réduire l’expression exercice de la profession au statut d’avocat, comme le propose l’appelant, c’est l’évacuer de la substance nécessaire à une analyse objective de la question sur l’existence ou non d’un lien. »

[36]         Par ailleurs, le Comité exécutif est sensible à la considération de la réalité dans laquelle se trouve le professionnel au moment de la perpétration de l’infraction criminelle, en l’espèce la maladie de son père. Or, toute la preuve soumise milite en faveur de l’existence de ce lien.

[37]         Le Comité exécutif considère la relation d’autorité et de confiance existante entre Me Thivierge et la victime. Il est clair dans l’esprit des membres, après l’analyse de la preuve, que la profession d’avocat, le statut et la notoriété qu’avaient Me Thivierge ont eu une influence dans la présente affaire. La confiance du public en est ainsi affectée.

[38]         Également, la période, soit la durée des gestes commis et les circonstances entourant les événements, sur lesquels le Comité exécutif n’élaborera pas ni ne donnera de détails, pour préserver l’identité de la victime, sont considérés dans la décision.

[39]         Les actes commis pour lesquels Me Thivierge a été condamné portent atteinte à l’honneur et la dignité de notre profession.

[40]         Le Comité exécutif, tel que le souligne Me Battista, n’a pas à porter un jugement moral sur le comportement de l’intimé. Ces gestes commis par Me Thivierge affectent tout de même la perception du public quant à la moralité de nos membres, et par le fait même, sa confiance envers la profession d’avocat.

[41]         Le Comité exécutif ne voit pas pourquoi dans l’analyse de l’ensemble du dossier que le Comité exécutif devrait fermer les yeux sur les critères établis par la Cour suprême* en semblable matière concernant les hauts standards de notre profession, tel que l’a plaidé Me Gervais. » (*Ville de Lévis c. Fraternité des policiers de Lévis, REJB 2007-116734)

[61]      Conséquemment, le Comité exécutif impose la mesure administrative suivante :

« 1) SUSPENDRE provisoirement le droit d’exercice  de Me Richard Thivierge ([...]) jusqu’à la levée du mandat de la Commission des libérations conditionnelles;

2) Dès que la suspension provisoire sera terminée, LIMITER provisoirement son droit d’exercer de la façon suivante :

-permettre d’exercer uniquement en droit commercial;

-limiter provisoirement son droit d’exercer à sa clientèle existante en date de la présente décision;

-interdire de représenter un ou des mineurs;

-interdire de pratiquer en pratique privée solo ou pratique privée seul. »

[62]      L’intimé a porté cette décision en appel devant le Tribunal des professions et a demandé le sursis de la mesure administrative imposée.

JUGEMENT DU TRIBUNAL DES PROFESSIONS SUR LA DEMANDE DE SURSIS DU 15 JANVIER 2015

[63]      Le 15 janvier 2015, l’honorable juge Jacques Paquet j.c.q. du Tribunal des professions accorde la demande de sursis de l’intimé en ces termes :

« ORDONNE le sursis d’exécution de la décision du Comité exécutif du Barreau du Québec du 27 novembre 2014, jusqu’à la décision définitive et exécutoire du Conseil de discipline du Barreau du Québec ou de notre Tribunal, le cas échéant, sur la plainte disciplinaire portée contre l’appelant, sous réserve du jugement qui sera rendu sur le présent appel; »

[64]      L’honorable juge Paquet j.c.q. mentionne notamment ce qui suit au soutien de sa décision :

«[18]        À ce stade-ci, il va de soi qu’il faut éviter de vouloir décider du fond de l’appel. Il faut essentiellement déterminer si la décision du Comité présente « à première vue » une ou plusieurs faiblesses apparentes.

[19]         L’élément déterminant au regard de la décision du Comité concerne le lien avec l’exercice de la profession. Tout comme à l’article 149.1 C. prof., le législateur, à l’article 55.1 C. prof. avec référence à l’article 45 C. prof., pose comme condition essentielle à l’imposition d’une mesure disciplinaire ou administrative l’existence d’un lien entre l’infraction commise et l’exercice de la profession.

[20]         En l’espèce, le Comité trouve que ce lien est démontré.

[21]         Or, les motifs énoncés par le Comité pour conclure ainsi sont pour le moins succincts. Pour l’essentiel, ils se retrouvent au paragraphe 32 de la décision précitée du Comité, où celui-ci, dès lors, « conclut qu’il existe un lien entre l’infraction criminelle reprochée à [l’appelant] et l’exercice de la profession d’avocat ».

[22]         En somme, le Comité conclut à l’existence d’un tel lien parce que la victime pouvait faire confiance à l’appelant, étant donné qu’elle le « connaissait et qu’elle savait qu’il était avocat ».

[23]         À cet égard, il est utile de rappeler que l’article 45(1) C. prof. auquel renvoie l’article 55.1 C. prof. exige que le Comité rende un « avis motivé ».

[24]         Tout en étant conscient de la gravité des infractions commises et de la nécessité de ne pas banaliser, il faut tout de même constater qu’en l’espèce le lien entre les actes commis et l’exercice de la profession d’avocat n’est pas évident.

[25]         Je suis d’avis que moins le lien entre l’acte commis et l’exercice de la profession est évident, plus la motivation du Comité devra être convaincante.

[26]         Il est important par ailleurs de noter que le législateur, tant à l’article 45 C. prof. qu’à l’article 149.1 C.  prof. ne fait pas référence à l’honneur et à la dignité de la profession, comme il le fait aux articles 59, 59.1, 59.1.1 et 59.2 C. prof., mais essentiellement au lien entre l’acte commis et l’exercice de la profession.

[27]         Dans cette optique, on peut se demander si le Comité, dans l’exercice de la compétence que lui attribue l’article 55.1 C. prof., a raison de considérer, comme il l’a fait au paragraphe 39 de sa décision, que les actes commis par l’appelant « portent atteinte à l’honneur et à la dignité » de la profession d’avocat.

[28]         Compte tenu de ce qui précède, la faiblesse apparente de la décision en ce qui a trait au lien avec l’exercice de la profession réside dans la motivation du Comité. Peut-être a-t-il raison de conclure comme il l’a fait? Encore faut-il qu’il l’établisse de façon suffisamment probante, ce qui, à première vue, me semble faire défaut en l’espèce. »

 

REPRÉSENTATIONS DES PARTIES

Le syndic adjoint plaignant

[65]      Le syndic adjoint plaignant rappelle au Conseil que l’exercice qu’impose l’article 149.1 du Code des professions se fait en deux étapes.

[66]      D’abord, le Conseil doit déterminer si l’infraction criminelle reprochée a un lien avec l’exercice de la profession.

[67]      Si tel est le cas, le Conseil doit ensuite décider de la sanction appropriée.

[68]      D’entrée de jeu, le syndic adjoint plaignant soumet que le cas sous étude est hors des sentiers battus et peu courant.

[69]      Il s’éloigne des cas plus évidents de l’avocat qui a volé un de ses clients ou du médecin qui a agressé sexuellement une de ses patientes.

[70]      Il a la particularité également de ne pas avoir été commis dans l’exercice de ses fonctions d’avocat.

[71]      À cet égard, il mentionne que le cas de l’avocat qui n’a pas respecté une ordonnance du Tribunal de produire sa déclaration fiscale ou qui a commis un outrage au Tribunal est plus évident en ce que cela touche à son devoir de respecter une ordonnance de la Cour.

[72]      Le syndic adjoint plaignant soumet qu’il est de son fardeau de prouver ce lien avec la profession d’avocat.

[73]      Il souligne que le Comité exécutif, dont il a déposé la décision, est d’avis que ce lien existe en l’espèce.

[74]      Il ajoute cependant que le Conseil n’est pas lié par cette décision, mais  peut s’en inspirer.

[75]      Il soumet l’article de doctrine de Me Francis Gervais : « Le lien avec l’exercice de la profession : une notion fluide »[1] qui fait une étude exhaustive de la jurisprudence en cette matière.

[76]      Me Gervais conclut que toute infraction criminelle pour laquelle un avocat est trouvé coupable a nécessairement un lien avec la profession.

[77]      Le syndic adjoint plaignant mentionne cependant que ni le syndic, ni le Comité exécutif ne vont aussi loin dans leur interprétation du lien avec l’exercice de la profession d’avocat.

[78]      Il reconnaît qu’il ne s’agit pas ici  de se prononcer sur les mœurs de l’intimé mais de déterminer s’il existe un lien avec la profession.

[79]      Chaque cas doit s’examiner au mérite.

[80]      Le syndic adjoint plaignant s’en remet plutôt aux principes énoncés par le Tribunal des professions dans l’affaire Grenier c. Avocats (Ordre professionnel des)[2] qu’il soumet au Conseil.

[81]      Dans cette affaire, il s’agissait d’un procureur de la Couronne trouvé coupable de possession de cocaïne alors qu’il n’était pas dans l’exercice de ses fonctions.

[82]      Le Tribunal des professions a confirmé la décision du Comité exécutif rendue en vertu de l’article 55.1 du Code des professions à l’effet qu’il existait un lien entre l’infraction criminelle reprochée et la fonction de procureur de la Couronne.

[83]      Le syndic adjoint plaignant précise que le cœur de son argumentation dans la présente cause se résume à l’énoncé du Tribunal au paragraphe 195 du jugement Grenier :

« [195] Les membres du Comité ne commettent pas d’erreur déraisonnable en concluant que l’infraction commise par l’appelant a un lien avec l’exercice de la profession parce qu’elle est de nature à compromettre l’image d’intégrité et la confiance que la communauté porte à la fonction de substitut du procureur général dont on s’attend légitimement qu’il respectera la loi qu’il est lui-même chargé de faire appliquer. »

[84]      Le syndic adjoint plaignant plaide que l’intimé a abusé de la confiance de la victime.

[85]      Il invite le Conseil à relire notamment les chefs 2 et 4 de l’acte d’accusation où il est fait référence à la « situation d’autorité ou de confiance vis-à-vis » l’adolescente.

[86]      Il argue que la nature même de l’infraction, peu importe la période durant laquelle elle a été commise, touche à la rupture du lien de confiance avec une personne mineure.

[87]      Il fait le parallèle avec la profession d’avocat où le lien de confiance avec le client est fondamental.

[88]      C’est ainsi qu’il fait le lien entre l’infraction criminelle d’ordre sexuel sur une mineure et la profession d’avocat.

[89]      Même s’il admet que ce lien n’est pas direct en l’espèce, il soumet que le lien de confiance est  intrinsèque à la profession d’avocat et que celui-ci est désormais rompu.

[90]      Il soumet de plus qu’il serait hasardeux pour le Conseil de s’en remettre aux lettres des clients qui ont renouvelé leur confiance en l’intimé pour décider s’il existe un lien avec la profession.

Le procureur de l’intimé

[91]      Le procureur de l’intimé dépose devant le Conseil un plan d’argumentation détaillé et les autorités suivantes :

·        Chalifoux c. Avocats (Ordre professionnel des)  QCTP 21;

·        J.D. c. Médecins (Ordre professionnel des), 2010 QCTP 12;

·        David c. Infirmiers, 1998 QCTP 1600;

·        Lessard c. Barreau, 1999 QCTP 74;

·        Tremblay c. Dionne, 2006 QCCA 1441;

·        Lévis (Ville) c. Fraternité des policiers de Lévis inc., [2007] 1 R.C.S. 591, 2007 CSC 14;

·        Travailleurs sociaux (Ordre professionnel des) c. Fortin, 2009 CanLII 92313 (QC OTSTCFQ);

·        Barreau du Québec c. Brousseau, [2001] J.Q. no 258 (CA).

[92]      Il soumet que le Conseil n’est pas lié par la décision du Comité exécutif dont l’appel est actuellement pendant devant le Tribunal des professions.

[93]      Il ajoute cependant que les principes jurisprudentiels découlant des décisions rendues en vertu de l’article 55.1 du Code des professions s’appliquent à l’analyse que demande l’article 149.1 du Code des professions.

[94]      Il revient sur les faits du dossier en précisant que son client pratique exclusivement en droit des affaires et que les actes criminels ont été commis à l’extérieur du cadre de sa profession.

[95]      Tout en reconnaissant qu’il puisse exister un lien même si une infraction criminelle est commise dans la sphère de la vie privée, il soumet qu’il faut tenir compte de l’ensemble des circonstances incluant la profession exercée et le lien que le comportement peut avoir avec l’exercice de la profession.

[96]      Il soumet qu’en l’espèce les actes criminels commis par l’intimé dans la sphère de sa vie privée n’ont pas de lien avec l’exercice de sa profession.

[97]      Il plaide que la nature de la pratique de l’avocat joue un rôle prédominant dans l’existence ou non d’un lien avec l’infraction criminelle.

[98]      Il affirme que l’intimé pratique dans un domaine qui n’a rien à voir avec l’infraction commise et qui ne le met pas en contact avec des mineurs.

[99]      Il soumet que le jugement du Tribunal des professions dans l’affaire Grenier aurait pu être différent si l’avocat n’avait pas été substitut du procureur général au moment de la commission de son crime.

[100]   Il affirme que la rupture du lien de confiance avec la victime ne peut être transposée au lien de confiance devant prévaloir entre un avocat et son client pour conclure au lien avec l’exercice de la profession.

[101]   Il fait une distinction entre les faits de la présente cause et ceux de l’affaire David[3] où un infirmier avait été trouvé coupable de plusieurs actes criminels, dont des vols qualifiés, une infraction violente contredisant « l’essence de la profession d’infirmier ».

[102]   Il soumet que les faits de la présente cause s’apparentent à ceux de l’affaire Lessard[4] où le Tribunal des professions a décidé qu’il n’y avait pas de lien entre l’infraction à caractère sexuel commise à l’égard d’un enfant de moins de 14 ans par un avocat fiscaliste qui parrainait ce jeune dans l’organisation des Grands Frères et sa profession.

[103]   Il explique que le Conseil doit se demander si l’erreur commise par l’intimé, aussi grave soit-elle, nous fait douter de son comportement dans sa profession.

[104]   Il s’agit d’une question de protection du public et non de moralité de celui qui exerce.

[105]   Il réfère à l’affaire Brousseau[5] où la Cour d’appel fait une nette distinction entre la démarche d’admission ou la réinscription à l’Ordre et le processus disciplinaire.

[106]   Dans les cas d’admission et de réinscription, les articles 45 et 70 de la Loi sur le Barreau prévoient spécifiquement que le Comité d’accès à la profession et le Comité exécutif doivent vérifier si le candidat possède notamment les mœurs et la conduite requises pour exercer la profession et être membre en règle du Barreau.

[107]   Il soumet également que l’expression « honneur et dignité de la profession » mentionnée à la plainte ne fait pas partie des considérants de l’article 149.1 du Code des professions qui réfère uniquement au lien avec l’exercice de la profession.

[108]   Cette notion fait par ailleurs partie de l’article 59.2 du Code des professions.

[109]   Il plaide que de toute façon pour être dérogatoire à l’honneur et à la dignité de la profession, un acte doit avoir un lien avec l’exercice de la profession étant donné que pour qu’il y ait faute disciplinaire, celle-ci doit nécessairement être liée à l’exercice de la profession.

[110]   Au soutien de cet argument, le procureur de l’intimé réfère notamment au jugement de la Cour d’appel dans l’affaire Tremblay c. Dionne[6].

[111]   Bref, le procureur de l’intimé conclut que la conduite pour laquelle l’intimé a plaidé coupable n’a aucun lien avec l’exercice de la profession au sens de l’article 149.1 du Code des professions et que cette absence de lien a comme conséquence que cette conduite n’est pas dérogatoire à l’honneur ou à la dignité de la profession au sens de l’article 59.2 du Code des professions.

[112]   Il demande donc l’acquittement de l’intimé de la plainte disciplinaire portée contre lui.

ANALYSE

A)   LA PORTÉE DE L’ARTICLE 149.1 DU CODE DES PROFESSIONS

[113]   Afin de bien cerner le rôle du Conseil de discipline saisi d’une plainte portée en application de l'article 149.1 du Code des professions, il est utile de se référer aux enseignements du Tribunal des professions dans l’affaire Landry c. Avocats (Ordre professionnel des)[7] qui s’exprime ainsi :

«[16] L’article 149.1 C. prof. est particulier d’abord parce que seul le syndic peut saisir le Conseil de discipline d’une décision d’un tribunal canadien déclarant le professionnel coupable d’une infraction criminelle. Dans cette optique, l’article 128 C. prof. n’est pas applicable à cette disposition législative. C’est dire que « toute autre personne » ne pourrait porter plainte aux termes de l’article 149.1 C. prof. Seul le syndic peut le faire.

[17] Le caractère particulier de l’article 149.1 C. prof. découle également du fait qu’au terme du processus disciplinaire qu’il prévoit le Conseil de discipline n’a pas à décider si le professionnel est ou non coupable de l’infraction. La seule décision que doit rendre le Conseil de discipline concerne l’existence ou non d’un lien entre l’infraction et la profession. S’il décide qu’il n’y a pas un tel lien, le processus s’arrête alors. Au contraire, s’il décide que l’infraction a un lien avec l’exercice de la profession, il pourra, « s’il le juge à propos », imposer au professionnel une des sanctions prévues à l’article 156 C. prof.

(…)

[19] À l’évidence, cette disposition législative est complète en soi. Le législateur a voulu que le syndic puisse saisir le Conseil de discipline par l’entremise d’une plainte. Il s’agit essentiellement d’un véhicule procédural et il ne faut pas pour autant conclure qu’il s’agit d’une plainte de même nature que celle dont il est question aux articles 116 et 129 C. prof.»

(nos soulignements)

[114]   Cette disposition permet donc au syndic d'un ordre professionnel de saisir un Conseil de discipline, par voie de plainte, d'une décision d'un tribunal canadien déclarant un professionnel coupable d'une infraction criminelle s’il est d’avis que cette infraction a un lien avec l'exercice de sa profession.

[115]   Après avoir fait le constat de la déclaration de culpabilité de l’infraction criminelle mentionnée à la plainte disciplinaire par le dépôt d’une copie certifiée du jugement, le Conseil de discipline doit alors déterminer si cette infraction criminelle a un lien avec l’exercice de la profession du professionnel concerné.

[116]   Si tel est le cas, le Conseil de discipline doit ensuite décider s’il est à propos de prononcer une ou plusieurs des sanctions prévues à l’article 156 du Code.

[117]   Le Conseil n’a toutefois pas à déclarer l’intimé coupable de la plainte disciplinaire portée contre lui avant de lui imposer une sanction[8].

[118]   Tout comme il n’a pas à prononcer un acquittement en regard de la plainte disciplinaire s’il conclut à l’absence de lien avec l’exercice de la profession.

B)   LE CONSTAT DE LA DÉCLARATION DE CULPABILITÉ DES INFRACTIONS CRIMINELLES MENTIONNÉES À LA PLAINTE

[119]   Cela dit, le Conseil a pris connaissance du procès-verbal d’audience  de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, du 2 mai 2013 dans le dossier 200-01-159426-117 où il est indiqué que l’intimé a plaidé coupable à quatre (4) des cinq (5) chefs d’actes criminels dont il était accusé.

[120]   Les premier et troisième chefs pour lesquels l’intimé a plaidé coupable concernent des actes criminels d’ordre sexuel commis sur une période de deux (2) ans alors que la victime avait moins de quatorze (14) ans.

[121]   Les deuxième et quatrième chefs pour lesquels l’intimé a aussi plaidé coupable concernent des actes criminels d’ordre sexuel sur une période de deux (2) ans alors que la victime était mineure, mais avait au moins quatorze (14) ans.

[122]   Le cinquième chef visant une accusation d’agression sexuelle sur une période de quatre (4) ans a été retiré.

[123]   Le Conseil a également pris connaissance de la transcription des représentations sur sentence présentées le même jour, ainsi que le jugement rendu séance tenante par l’honorable juge Marie-Claude Gilbert j.c.s. déclarant l’intimé coupable des actes criminels mentionnés à la plainte et le condamnant à trois (3) ans de pénitencier.

[124]   Lors de son témoignage, l’intimé a prétendu qu’il n’avait pas commis les gestes d’ordre sexuel dont il était accusé aux premier et troisième chefs alors que la victime avait moins de 14 ans.

[125]   Il explique qu’il y a erreur quant à la période durant laquelle les actes reprochés ont été commis.

[126]   Il dit qu’il a tout de même plaidé coupable à ces deux chefs afin d’éviter à la victime de témoigner et d’avoir à  la mettre en contradiction par d’autres témoignages.

[127]   Le Conseil ne peut accepter en preuve un élément qui viendrait contredire le jugement de culpabilité déposé en vertu de l’article 149.1 du Code des professions.

[128]   Dans l’analyse de la présente plainte, le Conseil écarte donc la partie du témoignage de l’intimé visant à se disculper de deux des quatre (4) chefs d’accusation pour lesquels il a été trouvé coupable suite à son plaidoyer.

[129]   Le Tribunal des professions a déjà tranché cette question dans l’affaire précitée de Landry c. Avocats (Ordre professionnel des)[9] :

« Troisième question : Est-il permis de faire une preuve contraire aux faits rapportés dans le jugement déposé en vertu de l’article 149.1 du Code des professions?

[31] Cette question consiste, entre autres, à se demander si l’appelant peut tenter de prouver devant le Conseil de discipline, lors de l’enquête tenue en application de l’article 149.1 C. prof., qu’il n’a pas commis les infractions pour lesquelles il a été déclaré coupable par un tribunal de juridiction criminelle.

[32] L’article 149.1 C. prof. est jusqu’à un certain point la codification du principe de l’issue estoppel. Dans Danyluk c. Ainsworth Technologies Inc.[11]le juge Binnie de la Cour suprême cite avec approbation la définition de ce qu’est l’issue estoppel proposée par le juge Middleton de la Cour d’appel de l’Ontario dans McIntosh c. Parent, [1924] 4 D.L.R. 420, page 422 :

[24] […] When a question is litigated, the judgment of the Court is a final determination as between the parties and their privies. Any right, question, or fact distinctly put in issue and directly determined by a Court of competent jurisdiction as a ground of recovery, or as an answer to a claim set up, cannot be re-tried in a subsequent suit between the same parties or their privies, though for a different cause of action. The right, question, or fact, one determined, must as between them, be taken to be conclusively established so long as the judgment remains.

[33] Le seul moyen pour le professionnel de remettre en cause la déclaration de culpabilité est l’appel. Il faut conséquemment répondre par la négative à cette troisième question. »

[130]   Cela dit, le Conseil ajoute cependant que cet élément de preuve n’est de toute façon pas déterminant quant à la décision qu’il a à rendre.

[131]   L’existence ou non d’un lien avec la profession n’est pas ici tributaire de la période durant laquelle les gestes reprochés ont été commis, non plus du fait que la victime ait eu 14 ans plutôt que 13.

C)   LA DÉTERMINATION DU LIEN AVEC L’EXERCICE DE LA PROFESSION

(i)            Remarques générales

[132]   Comme l’a mentionné le syndic adjoint plaignant, le cas sous étude s’éloigne du cas plus évident de l’avocat qui a volé un de ses clients ou du médecin qui a agressé sexuellement une de ses patientes.

[133]   La nature des infractions criminelles reprochés et leur commission dans la sphère de la vie privée de l’intimé mérite réflexion et analyse.

[134]   Dans le cadre de cet exercice, la protection du public doit demeurer au centre des préoccupations du Conseil.

(ii)          La décision du Comité exécutif du 27 novembre 2014

[135]    En vertu de ses pouvoirs administratifs prévus à l’article 55.1 du Code des professions, le Comité exécutif a conclu à l’existence du lien entre les infractions criminelles et l’exercice de la profession.

[136]   Le Conseil n’est évidemment pas lié par cette décision,[10] qui sera soumise à l’analyse du Tribunal des professions au cours des prochains mois.

[137]   Le Conseil a jugé cependant utile de prendre connaissance des motifs, reproduits précédemment, qui ont amené le Comité exécutif à décider de la sorte pour alimenter sa réflexion.

[138]   Le Conseil note par ailleurs que la décision de la Commission des libérations conditionnelles accordant la libération conditionnelle totale de l’intimé n’était pas rendue lors de l’audition devant le Comité exécutif.

[139]   Celui-ci n’a donc pu bénéficier des données objectives exposées dans cette décision, notamment quant à l’évaluation psychologique de l’intimé, sa relation avec la victime et au faible risque de récidive vu la particularité de cette relation.

[140]   Ces données font  certainement partie des éléments à considérer quant à la question de savoir si les actes criminels d’ordre sexuel commis par l’intimé sont susceptibles de nous faire douter de son comportement dans l’exercice de sa profession.

(iii)         Les articles 45 et 55.1 du Code des professions

[141]   Aux fins de son analyse, le Conseil convient que les principes jurisprudentiels découlant des décisions rendues dans le cadre de l’application de l’article 55.1 du Code des professions peuvent être transposés à l’exercice qu’impose l’article 149.1 du Code des professions.

[142]   En effet, l’article 55.1 et le paragraphe 1 de l’article 45 du Code des professions auquel il réfère requièrent  l’analyse et la détermination de l’existence ou non d’un lien entre l’infraction criminelle pour laquelle un professionnel est trouvé coupable et l’exercice de sa profession, tout comme c’est le cas dans le cadre de l’application de l’article 149.1 du Code des professions.

(iv)         Peut-il y avoir un lien avec l’exercice de la profession lorsque l’infraction criminelle est commise dans la sphère de la vie privée du professionnel?

[143]   Il nous apparaît clair de la jurisprudence étudiée qu’il soit possible qu’une infraction criminelle commise dans la sphère de la vie privée du professionnel ait tout de même un lien avec l’exercice de la profession.

[144]   Plusieurs décisions illustrent les différents paramètres qui permettent de conclure à un tel lien.

[145]   La cause J.D. c. Médecins (Ordre professionnel des)[11] est un cas d’application de l’article 149.1 du Code des professions.

[146]   Dans cette affaire, il est question d’un omnipraticien trouvé coupable d’accusations criminelles d’attouchements sexuels et de grossière indécence à l’endroit d’une enfant âgée de moins de 14 ans commis à diverses fréquences sur plusieurs années.

[147]   Le Tribunal des professions confirme la décision du Conseil de discipline des médecins concluant au lien avec l’exercice de la profession même si les gestes reprochés n’avait pas été commis dans le cadre d’une relation médecin/patient.

[148]   Dans sa décision le Tribunal reproduit les motifs du Conseil  justifiant cette conclusion:

« [51]      Les actes posés par l’intimé sont également en relation directe avec l’exercice de la profession, bien qu’il n’aient pas été posés […]. […]. Tel que l’a souligné avec raison  le procureur du plaignant, l’intimé est médecin 24 heures par jour et il doit agir, en tout temps, dans le respect de ses obligations et conformément aux valeurs fondamentales qui régissent cette profession.

[52]         Au surplus, il doit également posséder les qualités nécessaires à l’exercice de cette profession, dont notamment le souci de protéger la vie et le bien-être des individus et ce d’autant plus lorsqu’ils sont vulnérables, entre autres, en raison de leur âge. Dans ces circonstances, la façon dont a agi l’intimé discrédite la profession, porte atteinte à la confiance du public et constitue une situation tout à fait intolérable, qui milite en faveur de l’imposition d’une sanction.

[53]  Il est d’ailleurs aisé de mesurer l’extrême gravité d’un tel comportement et l’impact d’une condamnation pour des gestes de cette nature, en se demandant  si un « bon père de famille » accepterait de confier son enfant à l’intimé,  […]. Poser la question c’est y répondre.

[54]         Ainsi, le comité n’a aucune hésitation à conclure que les gestes posés touchent à l’essence même de la profession de médecin.

[55]         Enfin, compte tenu des motifs déjà énoncés, le comité est également convaincu que la nature des gestes posés exige qu’il intervienne afin de protéger le public. De tels gestes ne peuvent d’aucune façon être tolérés, notamment en ce qu’ils portent atteinte à la confiance qu’a le public envers les médecins. Le public doit savoir qu’il est protégé face à de tels comportements et l’imposition de sanctions sévères contribue non seulement à préserver cette confiance mais également à dissuader le professionnel en question, ainsi que les autres membres de l’Ordre, d’agir de la sorte. »

(nos soulignements)

[149]    Dans l’affaire David c. Infirmiers[12], le Tribunal des professions confirme la décision du Comité administratif imposant une radiation à un infirmier en application de l’article 55.1 du Code des professions.

[150]   Cet infirmier avait été trouvé coupable de vol qualifié, d'usage d'arme à feu et d'abus de confiance au criminel.

[151]   Le Tribunal confirme l’existence du lien de rattachement entre ces crimes et la profession d’infirmière et d’infirmier et s’exprime comme suit :

« En l'espèce, nous sommes d'avis que l'appelant, en commettant les actes criminels pour lesquels il a été condamné en 1994, affecte le lien de confiance entre lui et les personnes avec lesquelles il est appelé à être en relation sur le plan professionnel. Comme le mentionne l'intimé, le vol qualifié constitue une infraction violente qui contredit l'essence de la profession d'infirmier. Son comportement fait douter qu'il possède les qualités requises par sa profession  telles la compassion, la sollicitude et l'empathie :

Il s’agit d’un comportement incompatible avec l’honneur et la dignité de la profession puisque la protection de la vie et la promotion de la santé ont été bafouées.»

(nos soulignements)

[152]   Dans l’affaire Infirmiers et infirmières c. Mario M. Duperron[13], le Conseil de discipline a reconnu le lien entre les infractions criminelles d’ordre sexuel commises par un infirmier sur deux enfants de moins de 14 ans  durant une longue période, dans le cadre de sa vie privée, et sa profession.

[153]   Il est intéressant de souligner le passage où le Conseil fait état des représentations du procureur de la syndique plaignante au sujet des gestes qu’un infirmier ou une infirmière est appelé à poser dans le cadre de sa profession:

« [39] Quant à la confiance du public, le procureur de la plaignante est d’avis qu’elle est minée par un tel comportement et ce, compte tenu que l’intimé travaille auprès d’une clientèle vulnérable et qu’il est appelé à poser des gestes de nature intime envers un public de tout âge, ajoutant qu’il est évident pour sa cliente que l’intimé peut reproduire ces gestes dans le cadre de l’exercice de sa profession. »

[154]   Référant à l’affaire David précitée, le Conseil de discipline conclut ainsi:

« [72] Tenant compte de cet extrait, le comité n’a aucune hésitation à conclure que les gestes posés touchent à l’essence même et à la raison d’être de la profession d’infirmier. Notons par ailleurs que le comité administratif de l’Ordre en est venu à la même conclusion lors de la première condamnation de l’intimé.

[73] Enfin, compte tenu des motifs déjà énoncés, le comité est également convaincu que la nature des gestes posés exige qu’il intervienne afin de protéger le public. »

(nos soulignements)

[155]   Plus près de nous, le Tribunal des professions a eu à se pencher sur cette question dans l’affaire Jacques c. Comeau[14] dans le cadre d’une requête en sursis d’exécution d’une décision du Comité des requêtes rendue en vertu de l’article 55.1 du Code des professions.

[156]   Me Jacques avait été trouvée coupable d’actes criminels de fraude envers le gouvernement, d’abus de pouvoir et de trafic d’influence alors qu’elle était député fédéral. 

[157]   Le Tribunal mentionne ce qui suit  au sujet du lien avec les actes criminels reprochés et l’exercice de la profession d’avocat:

« Quant au lien avec l'exercice de la profession, l'appelante n'élabore pas beaucoup dans sa requête, si ce n'est au paragraphe 19 où l'on peut lire:

 

"19. Les faits ayant mené à la condamnation criminelle et à la radiation n'auraient pas été perpétrés dans l'exercice de la profession d'avocat et, si tant est qu'ils sont survenus de la façon décrite par l'instance criminelle, ils sont entièrement reliés à la vie politique de la requérante."

Il ne s'agit pas de savoir si les gestes fautifs ont été commis à l'occasion de l'exercice de la profession, mais de vérifier, entre autres, s'ils touchent à l'essence même de la profession, à la raison d'être de celle-ci.

Compte tenu du rôle de l'avocat, de sa fonction au sein de l'administration de la justice, être trouvée coupable de complot en vue de commettre un acte criminel et de fraude envers le gouvernement a certainement un lien avec l'exercice de la profession, si ténu soit-il. »

(nos soulignements)

[158]   Dans l’affaire Grenier, le Tribunal des professions a eu à se prononcer sur le fond de la question, cette fois dans le cadre d’un appel d’une décision du Comité des requêtes rendue en vertu de l’article 55.1 du Code des professions radiant l’avocat[15].

[159]   Cette affaire illustre avec clarté la détermination du lien entre une infraction criminelle commise dans la sphère de la vie privée de l’avocat et la profession.

[160]   Le Tribunal des professions a de fait conclu qu’il existait un lien entre la condamnation criminelle d’un procureur de la Couronne pour possession de cocaïne et l’exercice de sa profession.

[161]   Ce jugement  nous enseigne que pour décider de l’existence de ce lien, il faut considérer l’exercice de la profession du professionnel au moment de la perpétration de l’infraction criminelle.

[162]   En ce sens, le fait que l’intimé soit substitut du procureur général prenait toute son importance.

[163]   Le Conseil juge utile de reproduire l’extrait suivant du jugement Grenier:

« [187] Le Comité ne commet aucune erreur déraisonnable en tenant compte de la fonction de substitut du procureur général que l’appelant occupe au moment de la perpétration de l’infraction criminelle.

[188] Le grief de l’appelant que le Comité distingue là où l’article 55.1 (1°) ne le fait pas n’est pas fondé.

[189] L’exercice de la profession dont il est question à l’article 55.1 (1°) du Code s’entend de l’exercice de la profession par le professionnel au moment de la perpétration de l’infraction criminelle. Il s’agit précisément de l’un des éléments objectifs sur lesquels doit s’appuyer l’avis du Comité portant sur l’existence ou non d’un lien avec l’exercice de la profession.

[190] L’exercice de la profession doit nécessairement envisager une matérialité de faits, une réalité dans laquelle se trouve le professionnel au moment de la perpétration de l’infraction criminelle. Réduire l’expression exercice de la profession au statut d’avocat, comme le propose l’appelant, c’est l’évacuer de la substance nécessaire à une analyse objective de la question ou non du lien.

[191] Le Comité écrit :

« [55] Eut-il été avocat « en défense », ou praticien dans un champ professionnel où la présence à la cour n’est pas requise, cela n’affecterait en rien la conséquence du geste posé, tout au plus peut-on dire, que la pratique en matière criminelle le rendait plus averti qu’un autre sur les conséquences de ses gestes;

[56] Pour paraphraser la décision David, l’avocat n’est-il pas le professionnel de la justice qui est constamment auprès des justiciables pour leur donner des avis, des conseils, prendre des actions en justice. Dans ces circonstances, le lien de confiance doit être absolu, non seulement en regard de la compétence relative à la pratique du droit mais également en ce qui concerne son respect pour les lois en vigueur, la confiance qu’il inspire au public ainsi que son respect du système juridique. »

[192] En considérant la confiance que doit inspirer au public la fonction de substitut du procureur général, le Comité ne commet aucune erreur. Il s’agit bien au contraire d’un critère pertinent judicieusement appliqué dans les circonstances de l’espèce.

[193] Le substitut du procureur général joue un rôle capital au sein du système judiciaire. 

[194] Ainsi, en vertu de l’article 3 de la Loi sur les substituts du procureur général, telle qu’elle s’appliquait à l’appelant, les substituts représentent le procureur général devant les tribunaux en matière criminelle et pénale. L’article 4 leur confère, sous l’autorité du procureur général, des pouvoirs considérables, notamment autoriser des poursuites pénales et criminelles contre les contrevenants, plaider devant les tribunaux de première instance ou d’appel dans toute poursuite intentée en vertu du Code criminel, porter en appel toute cause dans laquelle ils peuvent agir lorsque à leur avis, l’intérêt public l’exige, faire au Tribunal « les représentations qui s’imposent dans les cas de demandes de cautionnement faites par un accusé et conseiller les agents de la paix et les personnes chargées de l’application de la loi sous toute matière qui relève de l’application du Code criminel ou d’une disposition pénale d’une loi ou d’un règlement du Québec. »

[195] Les membres majoritaires du Comité ne commettent pas d’erreur déraisonnable en concluant que l’infraction commise par l’appelant a un lien avec l’exercice de la profession parce qu’elle est de nature à compromettre l’image d’intégrité et la confiance que la communauté porte à la fonction de substitut du procureur général dont on s’attend légitimement qu’il respectera la loi qu’il est lui-même chargé de faire appliquer. »

(nos soulignements)

[164]   C’est dans cet optique qu’il faut retenir les enseignements de la Cour suprême dans l’arrêt Lévis (Ville de) c. Fraternité des policiers de Lévis Inc.[16], qui a rétabli la sanction disciplinaire de destitution à un policier ayant été trouvé coupable de plusieurs infractions criminelles commises alors qu’il n’était pas en fonction.

[165]   Un policier est chargé de réprimer le crime et de faire appliquer la loi tout comme un procureur de la couronne.

[166]   La Cour suprême a ainsi statué que les actes criminels commis par ce policier avaient un impact direct sur ses capacités à exercer ses fonctions et sur la confiance du public.

[167]   Tout récemment, le Tribunal des professions a eu l’occasion de traiter à nouveau des balises servant à déterminer l’existence ou non d’un lien entre une infraction criminelle et la profession de comptable professionnel agréé dans l’affaire Théroux[17].

[168]   Ce comptable avait été trouvé coupable de fabrication et d’usage de faux, fraude et complot impliquant une perte de près de quatre millions de dollars pour une institution bancaire.

[169]   Pour décider du lien entre ces infractions criminelles et l’exercice de la profession de comptable, le Tribunal a examiné la Loi sur les comptables professionnels agréés afin de cibler quel était le champ d’activités de la profession.

[170]   Après avoir cerné les activités mentionnées à l’article 4 de la Loi précitée, le Tribunal s’exprime ainsi :

« [44] La lecture de cette disposition permet de constater que l’une des fonctions importantes de la profession de comptable est d’attester la conformité ou certifier des informations financières, des politiques, procédures, processus et contrôles liés à la gouvernance, à la stratégie et à la gestion des risques. Force est de conclure que l’honnêteté, l’intégrité, la sincérité et la probité sont des qualités essentielles pour exercer la profession de comptable.

[45] Dans l’affaire Grenier c. Avocats (Ordre professionnel des) notre Tribunal examine le sens à donner à l’expression « en lien avec la profession » contenu à l’article 55.1 du C. des prof. Cette disposition octroie compétence au conseil de discipline pour examiner la situation du professionnel faisant l’objet d’une décision judiciaire. S’agissant d’un contexte similaire en relation avec un candidat à l’exercice de la profession, les propos du juge Lavergne dans cette décision, s’appliquent au présent cas :

[168] Quelle est donc la nature du lien avec la profession?

[169] Le terme lien connote l’idée d’une relation ou d’un rapport quelconque entre des éléments distincts. Inversement, il ne saurait y avoir de lien lorsque les deux éléments distincts s’avèrent indépendants l’un de l’autre, incomparables ou sans rapport.

[170] Aux fins de l’article 55.1 du Code, on peut distinguer deux catégories d’infractions criminelles ayant un lien avec l’exercice de la profession :

- les infractions criminelles commises par un professionnel lorsqu’il se trouve dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire, lorsqu’il pose l’un des gestes exclusifs ou réservés, attribués par la règlementation; celles-là ne posent aucune difficulté, le lien apparaissant à l’évidence.

- toutes les autres infractions criminelles ne répondant pas aux conditions de la première catégorie.

[46] Dans cette même décision, notre Tribunal rappelle la grande déférence qui s’impose à l’instance de révision à l’égard d’une décision prise en vertu de l’article 55.1 du C. des prof. De plus, il souligne que « le devoir imposé aux ordres professionnels en vertu de l’art 55.1 du Code de contrôler l’exercice de la profession ne se limite pas aux actes exclusifs ou réservés à l’une ou l’autre des professions. »

[47] L’analyse du Comité repose essentiellement sur les propos de l’auteure Me Marie Paré qui propose un test établissant l’existence d’un lien entre l’acte commis et l’exercice de la profession. Ce test est repris avec approbation par la Cour du Québec dans la décision Brissette c. Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec. Voici comment s’exprime Me Paré:

À la lumière de ce qui précède, on peut conclure que le Bureau agissant sous 55.1 C.P. doit se demander si le comportement révélé par les infractions criminelles met en cause des qualités essentielles à l’exercice de la profession. Si la réponse est positive, le fait que l’infraction ait été ou non commise dans le cadre d’une relation professionnelle ne sera pas déterminant. Le contraire est également vrai: une infraction criminelle qui n’offre pas de lien intrinsèque avec les actes normalement posés, dans l’exercice d’une profession, peut fort bien entraîner l’application de l’article 55.1 C.P. lorsqu’elle a été commise dans le cadre d’une relation professionnelle. Dans un cas comme dans l’autre, le Bureau pourra conclure à l’existence d’un lien entre l’infraction et l’exercice de la profession.

[48] Le Comité constate que l’appelant n’était pas en relation strictement professionnelle avec l’institution bancaire flouée, mais il conclut tout de même à l’existence d’un lien entre les gestes posés et la profession. Le Comité s’exprime ainsi :

[69] Les professionnels comptables sont souvent appelés à certifier l’information financière auprès d’entreprises qui ont recours au financement bancaire, tout comme ces propres institutions financières ont recours aux CPA pour auditer leurs états financiers. Il est essentiel de préserver auprès de ces institutions la crédibilité et la probité des membres de notre profession ainsi qu’auprès du public en général.

[70] Les condamnations dont il est question remettent en cause les qualités essentielles dont le futur professionnel CPA doit faire preuve avant d’intégrer la profession, soit celle de l’intégrité, la probité et la crédibilité.

[71] En l’espèce, les infractions criminelles de fraude et de fabrication de faux sont parmi les actes dérogatoires les plus graves que l’on peut reprocher à un professionnel comptable et s’inscrivent au cœur même de l’honneur et de la dignité de cette profession.

[49] Les conclusions du Comité reposent sur les éléments et observations présentés par les parties. Il exerce judiciairement sa compétence en évaluant les aptitudes de l’appelant à exercer la profession et en établissant les qualités requises. Le Tribunal doit faire preuve d’une grande déférence à l’égard d’un décideur composé de pairs. »

(nos soulignements et références omises)

(v)        Les actes criminels d’ordre sexuel sur une mineure commis par l’intimé ont-ils un lien avec l’exercice de la profession

[171]   L’affaire Lessard c. Barreau[18] est probablement la cause qui se rapproche le plus des faits en l’instance.

[172]   Dans cette affaire, le Tribunal des professions était saisi d’un appel d’une décision du Comité des requêtes du Barreau du Québec en vertu de l’article 55.1 du Code des professions radiant un avocat fiscaliste qui avait été trouvé coupable d’une infraction criminelle d’ordre sexuel sur une personne mineure.

[173]   Cet avocat avait parrainé un enfant dans le cadre de sa participation à l’organisation des Grands Frères indépendamment de sa vie professionnelle.

[174]   C’est dans ce contexte qu’il avait commis une infraction criminelle d’ordre sexuel pour laquelle il avait plaidé coupable.

[175]   Dans la détermination du lien entre l’infraction criminelle et l’exercice de la profession, le Tribunal écarte d’entrée de jeu le critère de bonnes mœurs.

[176]   Ce critère doit seulement être pris en compte pour les demandes d’inscription ou de réinscription au Tableau de l’Ordre régies par l’article 45 de la Loi sur le Barreau.[19]

[177]   D’ailleurs, dans l’affaire Grenier précitée, le Tribunal confirme ce principe comme suit en faisant référence à l’affaire Lessard:

« [183] Dans cette affaire, le Tribunal décide essentiellement que le Comité des requêtes ne peut importer un critère de bonnes mœurs dans la détermination de la question de savoir s’il existe un lien entre l’infraction criminelle et l’exercice de la profession. Il s’agit d’une considération impertinente à l’analyse en vertu de l’article 55.1 du Code. »

[178]   Dans l’affaire Lessard, le Tribunal fait également une distinction entre la protection du public en général pour une inconduite de nature sexuelle, qui est du ressort de la chambre criminelle de la Cour du Québec et la protection du public contre l’avocat, qui est du ressort de son Ordre professionnel si son crime touche l’exercice de sa profession d’avocat.

[179]   Le Tribunal conclut ainsi à l’absence de lien entre l’infraction criminelle d’ordre sexuel reprochée et la profession d’avocat :

« Le geste hautement répréhensible auquel l’appelant a plaidé coupable devant la chambre criminelle de la Cour du Québec n’a pas de lien avec l’exercice de la profession d’avocat car la jeune victime n’était pas un client de l’avocat, ni lié à un client, ni lié à un employé ou n’était lié d’aucune façon à l’exercice de la profession d’avocat. De plus, ces malheureux incidents font partie du domaine de la vie privée de l’appelant et n’ont aucun lien lors de la survenance avec le fait que l’appelant était avocat. Enfin, le fait que Pierre Lessard était un avocat n’a rien eu à faire avec le fait qu’il devienne membre de l’organisation des Grands Frères. »

[180]   Le Tribunal souligne par ailleurs l’incongruité de conclure d’une part au lien entre l’infraction criminelle et l’exercice de la profession et reconnaître d’autre part qu’il était « peu probable que l’intimé dans le contexte de sa pratique professionnelle puisse entrer en contact avec de jeunes enfants d’âge mineur ».

[181]   L’auteure Me Marie Paré, dans son article intitulé « Le professionnel reconnu coupable d’une infraction criminelle : l’état de la jurisprudence relative à l’article 55.1 (1) du Code des professions » paru en 1999, commente comme suit l’affaire Lessard :

« La jurisprudence du Tribunal des professions permet de conclure que l’existence de ce lien n’est pas en fonction de la gravité intrinsèque de l’infraction criminelle, et que le rôle du Bureau ne consiste pas à porter un jugement moral sur le professionnel. »[20]

[182]   Cela dit, qu’en est-il dans le cas qui nous occupe.

[183]   D’abord, il n’est pas de la juridiction du Conseil de punir l’intimé pour les crimes odieux qu’il a commis.

[184]   La Chambre criminelle de la Cour du Québec a exercé cette juridiction et l’intimé a purgé sa peine.

[185]   Le Conseil n’a pas pour rôle non plus de juger de la moralité de l’intimé.

[186]   Le processus disciplinaire se distingue du processus d’inscription ou de réinscription au Tableau de l’Ordre lors duquel on doit au contraire vérifier si les mœurs du candidat sont compatibles avec l’exercice de la profession.

[187]   Le Conseil doit se limiter à déterminer s’il existe un lien entre les actes reprochés et l’exercice de la profession, tel que le requiert l’article 149.1 du Code des professions et ce, même si ceux-ci ont été commis en dehors des activités professionnelles de l’intimé.

[188]   Dans le cadre de cet examen, le Conseil doit évaluer si les actes commis sont de nature à contrevenir à l’essence même de la profession, à sa raison d’être.

[189]   Autrement dit, le Conseil doit évaluer si ces actes remettent en cause les qualités essentielles de l’intimé à exercer sa profession et font douter de ses compétences professionnelles.

[190]   Le Conseil doit donc examiner in concreto quelles étaient les activités professionnelles de l’intimé au moment des événements et quelles sont-elles aujourd’hui.

[191]   Il doit aussi regarder le type de clientèle qu’il dessert et son environnement de travail.

[192]   La preuve a démontré que l’intimé est un avocat de droit des affaires qui se spécialise depuis plus de vingt (20) ans en financement des entreprises, baux commerciaux, fusion et acquisition.

[193]   Sa clientèle est composée uniquement de gens d’affaires.

[194]   Il n’a pas à être en contact avec des personnes mineures.

[195]   Les autres avocats de son cabinet pratiquent en droit civil et commercial.

[196]   La preuve révèle également que la jeune victime n’était pas une cliente de l’intimé ou de son cabinet, n’avait pas de lien avec la clientèle de l’intimé ou du cabinet, n’était pas une employée et n’était liée d’aucune façon à l’exercice de sa profession d’avocat.

[197]   La preuve démontre aussi que la relation malsaine que l’intimé entretenait avec sa victime ne se déroulait pas à son cabinet, mais bien dans l’environnement de sa vie privée.

[198]   Il importe de souligner que la preuve n’a pas démontré que la profession d’avocat de l’intimé ou son titre d’avocat ait pu jouer un rôle dans la relation malsaine qu’il entretenait avec sa victime.

[199]   De plus, selon l’évaluation psychologique mentionnée dans la décision de la Commission sur les libérations conditionnelles déposée en preuve, la déviance sexuelle de l’intimé semblait limitée à la victime et à la particularité de la relation qui les unissait.

[200]   Par conséquent, le Conseil ne peut faire autrement que constater que le comportement sexuel déviant de l’intimé n’a aucun rapport avec sa pratique du droit.

[201]   Contrairement au médecin, à l’infirmier ou autre professionnel de la santé, l’intimé n’a pas à poser des gestes de nature intime dans le cadre de sa profession.

[202]   Il n’a pas à composer avec le même type de clientèle dont la vulnérabilité n’est définitivement pas du même ordre.

[203]   Le Conseil ne peut adhérer à l’argument du syndic adjoint plaignant quant au lien qu’il fait entre l’abus du lien de confiance entre l’intimé et sa victime et la rupture du lien de confiance entre l’avocat et son client.

[204]   Le Conseil ne peut en effet retenir que le climat de confiance qu’a su établir l’intimé avec sa victime pour commettre des infractions d’ordre sexuel puisse se transposer au climat de confiance qu’il établit avec sa clientèle pour leur fournir des services juridiques.

[205]   À la lumière de ce qui précède, le Conseil est d’avis, à l’instar du Tribunal des professions dans l’affaire Lessard, qu’il n’y a pas de lien entre les infractions criminelles d’ordre sexuel commises par l’intimé sur une jeune mineure et l’exercice de sa profession d’avocat en droit des affaires.

[206]   La nature des infractions criminelles et l’absence de connexité avec la pratique de l’intimé indiquent que la protection du public n’est pas menacée.

[207]   En effet, le comportement sexuel déviant de l’intimé ne nous permet pas de douter de ses qualités à exercer sa profession et ne porte pas atteinte à l’essence même de la profession contrairement au médecin, à l’infirmier ou autre professionnel de la santé appelés à oeuvrer dans la sphère plus intime de leurs patients.

[208]   Le Conseil est donc d’avis que le lien de confiance entre le public et l’intimé, sur le plan professionnel, n’est pas rompu.

[209]   Certaines personnes pourraient, certes, refuser de faire affaire avec l’intimé pour des questions de principes et de moralité, mais non pour des raisons de compétences et de qualités professionnelles.

(vi)       Les actes criminels d’ordre sexuel sur une mineure commis par l’intimé sont-ils dérogatoires à l’honneur et à la dignité de la profession

[210]   En terminant, il est utile de rappeler que la plainte telle que portée ne comprend pas de chef d’infraction fondée sur l’article 59.2 du Code des professions qui réfère à la notion d’honneur et de dignité de la profession.

[211]   Le Conseil n’a donc pas à se prononcer sur la culpabilité de l’intimé quant à cette infraction.

[212]   Le syndic adjoint plaignant s’est uniquement autorisé de l’article 149.1 du Code des professions pour porter sa plainte.

[213]   Or, la notion d’honneur et de dignité de la profession n’est pas un critère à considérer dans l’application de l’article 149.1 du Code.

[214]    Cependant, le syndic adjoint plaignant a tout de même mentionné dans le libellé de sa plainte que les infractions criminelles pour lesquelles l’intimé a été trouvé coupable constituaient des actes dérogatoires à l’honneur et à la dignité de la profession.

[215]   Pour cette raison, le Conseil juge pertinent de préciser que pour qu’un acte soit dérogatoire à l’honneur et à la dignité de la profession, encore faut-il qu’il ait un lien avec l’exercice de la profession.

[216]   En effet, tel que le mentionne la Cour d’appel dans la cause Tremblay c. Dionne[21] pour qu’une faute disciplinaire soit commise, elle doit être en lien avec l’exercice de la profession :

 « La faute disciplinaire professionnelle est liée à l’exercice de la profession [références omises]. Lorsque ce lien existe, il peut même arriver que la faute inclue « des actes de sa vie privée dans la mesure où ceux-ci sont suffisamment liés à l’exercice de la profession et causent un scandale [portant] atteinte à la dignité » de celle-ci [références omises]. »

[217]   Ainsi, ayant conclu à l’absence de lien entre les infractions criminelles et la profession de l’intimé, le Conseil ne peut conclure que ces condamnations portent atteinte à l’honneur et à la dignité de la profession.

[218]   Considérant tout ce qui précède et les conclusions auxquelles en arrive le Conseil, il n’y a donc pas lieu d’imposer une sanction à l’intimé.

EN CONSÉQUENCE, LE CONSEIL, UNANIMEMENT :

CONSTATE que l’intimé a été déclaré coupable d’infractions criminelles apparaissant au libellé de la plainte disciplinaire;

DÉCLARE que les infractions criminelles pour lesquelles l’intimé a été trouvé coupable n’ont pas de lien avec sa profession d’avocat;

DÉCIDE qu’il n’est pas à propos d’imposer une des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions.

CONDAMNE la partie plaignante au paiement des entiers débours.

 

 

 

 

__________________________________

Me MARIE-JOSÉE CORRIVEAU

Présidente du Conseil de discipline

 

 

 

__________________________________

Me DOMINIQUE LEGAULT

Membre du Conseil de discipline

 

 

 

__________________________________

Me NADINE MARTIN

Membre du Conseil de discipline

 

 

Me Nicolas Bellemare, en sa qualité de syndic adjoint du Barreau du Québec

Partie plaignante

 

Me Richard Thivierge

Partie intimée

 

Me Guiseppe Battista

Procureur de la partie intimée

 

 

Date d’audience :

Le 24 février 2015

 

 

AUTORITÉS CONSULTÉES :

 

-Barreau du Québec c. Brousseau [2001] J.Q. no 258 (CA)

-David c. Infirmiers, 1998 QCTP 1600

-Lessard c. Barreau, 1999 Q.C.T.P. 74

-Tremblay c. Dionne, 2006 QCCA 1441

-Chalifoux c. Avocats (Ordre professionnel des), 2007 QCTP 21

-Lévis (Ville) c. Fraternité des policiers de Lévis Inc., [2007] 1 RCS 591, 2007 CSC 14

-Barreau du Québec c. Landry 2008 QCCDBQ 60 (CanLII)

-Grenier c. Avocats (Ordre professionnel des) 2008 QCTP 177

-Ordre des infirmières et infirmiers du Québec c. Bouchard, 2009 42465 (QC CDOII)

-Travailleurs sociaux (Ordre professionnel des) c. Fortin, 2009 CanLII 92313 (QC OTSTCFQ)

-J.D. c. Médecins (Ordre professionnel des), 2010 QCTP 12

-Landry c. Avocats (Ordre professionnel des) 2011 QCTP 208 (CanLII)

-Barreau du Québec (syndic adjoint) c. Landry, 2013 QCCDBQ 8 (CanLII)

-Barreau du Québec (syndic adjoint) c. Salehabadi, 2014 QCCDBQ 99 (CanLII)

-Dufresne c. Médecins (Ordre professionnel des), 2014 QCTP 125 (CanLII)

-Me Francis Gervais, -Développements récents en déontologie, droit professionnel et disciplinaire 2008, Volume 290, éd. Y. Blais

-Me Marie Paré,-Le professionnel reconnu coupable d’une infraction criminelle : l’état de la jurisprudence relative à l’article 55.1 (1) du code des professions, (1999) 59 R. du B. 725



[1] Volume 290-Développements récents en déontologie, droit professionnel et disciplinaire 2008, éd. Y. Blais;

[2] 2008 QCTP 177 (CanLII);

[3] 1998 QCTP l600;

[4] 1999 QCTP 74;

[5] [2001] J.Q. no 258 (CA);

[6] 2006 QCCA 1441;

[7] 2012 QCTP 107 (CanLII);

[8] Barreau du Québec (syndic adjoint) c. Salehabadi, 2014 QCCDBQ 99 (CanLII);

[9] Précité note 7;

[10] Grenier c. Avocats, précité note 2; Chalifoux c. Avocats, 2007 QCTP 21;

[11] 2010 QCTP 12

[12] Précité note 3;

[13] 2006 DDOP 84; voir aussi Lecourt c. Infirmières et infirmiers (Ordre professionnel des), 2010 QCTP 70 (CanLII);

[14] 1998 QCTP 1685 (CanLII)

[15] Précité note 2;

[16] [2007] 1 RCS 591, 2007 CSC 14;

[17] Théroux c. Comptables professionnels agréés (Ordre des), 2015 QCTP 18 (CanLII);

[18] Précité note 4;

[19] Voir Barreau du Québec c. Brousseau  [2001] J.Q. no 258 (CA) pour une application de l’article 45 de la Loi sur le Barreau qui se distingue du processus disciplinaire;

 

[20] (1999) 59 R. du B. 725, p. 733;

[21] 2006 QCCA 1441; voir aussi Travailleurs sociaux (Ordre professionnel des) c. Fortin, 2009 CanLII 92313 (QC OTSTCFQ) pour un cas d’application de l’article 59.2 dans la sphère de la vie privée.

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