Garda (division Montréal) et Carrière |
2013 QCCLP 2235 |
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[1] Le 2 novembre 2010, Garda (division Montréal) (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 27 octobre 2010, à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 4 juin 2010 et déclare irrecevable la demande de révision portant sur l’imputation et confirme la décision de la CSST du 4 juin 2010 qui déclare que monsieur Daniel Carrière, le travailleur, a été victime d’une lésion professionnelle le 16 novembre 2009 qui lui a causé une tendinite, une bursite et une synovite à l’épaule gauche.
[3] L’audience dans ce dossier s’est tenue à Joliette le 29 janvier 2013. Garda (division Montréal) est présent et représenté. Le travailleur est présent et représenté et la partie intéressée S.C.F.P. (local 3812) (le syndicat) est également présente et non représentée. Le dossier est mis en délibéré le 29 janvier 2013.
L’OBJET DE LA REQUÊTE
[4] L’employeur retire toute demande portant sur la question de l’imputation des coûts de la lésion professionnelle du travailleur considérant qu’une décision portant directement sur cette question a été rendue par la CSST et a fait l’objet d’une autre contestation.
[5] Il demande que sa requête soit accueillie, que la décision du 27 octobre 2010 soit infirmée et que la décision du 11 février 2010 voulant que le travailleur ait été victime d’une lésion professionnelle alors que le syndicat était son employeur soit rétablie. Il plaide que la décision rendue le 4 juin 2010 le désignant comme employeur est une reconsidération illégale et hors délai de la décision rendue le 11 février 2010.
[6] Subsidiairement, si l’argument relatif à la reconsidération illégale ne devait pas être retenu, il demande à la Commission des lésions professionnelles (le tribunal) de déclarer qu’il n’était pas l’employeur du travailleur et d’infirmer la décision de la révision administrative en conséquence.
[7] Le travailleur soulève le fait que le tribunal ne peut se saisir de la question de déterminer qui est l’employeur au présent dossier par la contestation qu’il a fait de la décision portant sur l’admissibilité de la réclamation. L’employeur aurait dû soulever cet argument dans le cadre de sa contestation d’une décision d’imputation, ce qui n’est pas le cas dans le présent dossier.
LA PREUVE
[8] Les parties ont convenu de soumettre une preuve par admissions. Les admissions sont les suivantes :
1. Monsieur Daniel Carrière, le travailleur a été embauché par Garda le 12 février 1982;
2. Le syndicat représente les employés syndiqués de Garda qui occupent un poste de convoyeur de fonds;
3. Le syndicat et l’employeur sont liés par une convention collective en vigueur du 17 octobre 2008 au 30 septembre 2013;
4. L’article 7.04 a) de la convention collective prévoit que le président du syndicat est libéré à temps plein et rémunéré par l’employeur 52 semaines par année, incluant les avantages sociaux, sans remboursement de la part du syndicat;
5. Du 28 août 2005 au 22 novembre 2009 inclusivement, monsieur Carrière était président du syndicat libéré à temps plein et rémunéré selon les dispositions de la convention collective;
6. Au moment des événements du 16 novembre 2009, monsieur Carrière était libéré à temps plein.
[9] Le travailleur a témoigné à la demande du tribunal sur les activités spécifiques qu’il accomplissait au moment des événements. Il explique qu’il est le président d’un syndicat provincial représentant 900 membres. Il est le seul officier libéré à temps complet et le secrétaire général est libéré à mi-temps.
[10] Son travail au syndicat l’amène à visiter les divisions de l’entreprise réparties à la grandeur du Québec. Il s’y rend pour régler les problèmes de relations de travail, de CSST et d’application de la convention collective, exemple déposer des griefs.
[11] Il rencontre l’employeur une fois par mois pour des comités de relations de travail formels. Il a aussi diverses rencontres locales. Tous les jours, il doit entrer en communication avec des représentants de l’employeur pour régler les problèmes liés à l’application de la convention collective.
[12] Il doit choisir ses routes de travail à tous les six mois comme s’il était au travail, même s’il est libéré à temps complet. Il ne rédige pas de rapport formel de ses activités à l’employeur, mais rencontre des représentants de l’employeur et des directeurs de succursales à chaque semaine avec qui il prend des rendez-vous au préalable. Si le problème ne se règle pas, il leur téléphone presqu’à chaque jour.
[13] Il estime faire beaucoup plus d’heures de travail que le nombre d’heures hebdomadaires de libération qui lui sont accordées. L’employeur ne lui dicte pas son horaire. Son bureau n’est pas dans les locaux de l’employeur, mais dans un édifice adjacent.
[14] Sur ce, la preuve est déclarée close.
[15] Le dossier fait également état que le syndicat est inscrit comme employeur auprès de la CSST sous le numéro 79157714.
[16] Dans les notes évolutives du dossier, on retrouve la mention suivante dans la section « Cueillette des informations » faites par l’agente de la CSST, soit le 23 ou le 28 janvier 2010, la date exacte étant illisible :
T (travailleur) était où lorsque s’est produit le fait?
Qui le paie E (Employeur) ou syndicat?
T était dans est dans locaux du syndicat, hors de l’établissement de l’employeur. T était payé par l’employeur au moment de l’événement.
[17] Le 11 février 2010, une décision d’admissibilité est rendue par la CSST. La décision est transmise au travailleur et probablement au syndicat, en sa qualité d’employeur. Le syndicat ne conteste pas cette décision d’admissibilité.
[18] Le 26 février 2010, les notes évolutives indiquent que le travailleur a donné une information voulant qu’il était à faire du travail de bureau au syndicat lors de son accident du travail alors que son travail habituel pour l’employeur est camionneur.
[19] Le 27 mai 2010, on retrouve la note suivante de monsieur Guay à l’attention de madame Leblanc de la CSST dans laquelle il indique :
J’ai discuté avec l’employeur et selon le document que l’on m’a transmis par télécopieur, il y a une entente entre la Société en Commandite de Transports de Valeurs Garda et le Syndicat National des convoyeur(e)s de Fonds (SNCF) SCFP, section locale 3812, mr. Daniel Carrière est libéré à temps plein et rémunéré 52 semaines par année par l’employeur.
Donc l’imputation aurait du être faite au dossier exp 77351325 et ETA 606818113.
Pourrait-tu apporter les corrections
Merci pour ta collaboration.
[sic]
[20] Le 4 juin 2010, la mention suivante de madame Sylviane Leblanc de la CSST figure dans les notes évolutives :
Suite aux informations reçues du Syndicat National des Convoyeurs de fonds, employeur imputé à ce dossier et du service de financement de la CSST, modification de l’imputation de ce dossier, il y a entente entre la Société en Commandite de Transports de Valeurs Garda et le Syndicat National des convoyeurs des fonds.
Le travailleur au dossier étant le président du comité exécutif du syndicat a été libéré à temps plein et rémunéré 52 semaines par année par son employeur (Garda). Modification du dossier expérience, lettre admissibilité faite à l’employeur (Garda) et lettre modification imputation au Syndicat. [sic]
[21] La même journée du 4 juin 2010, une nouvelle décision est rendue par la CSST et adressée à l’employeur. Elle se lit comme suit :
Madame, Monsieur,
Nous avons reçu les documents relatifs à l’accident subi le 16 novembre 2009 par la personne mentionnée ci-dessus et qui lui a causé une tendinite, bursite et synovite à l’épaule gauche. Cette réclamation pour accident du travail est acceptée par la CSST et la personne intéressée en a été avisée.
[…]
[22] Le 7 juin 2010, une décision est rendue et transmise au syndicat, indiquant que la CSST procède à une nouvelle détermination de l’imputation des coûts de la lésion afin de corriger une erreur. On informe le syndicat que la décision du 12 avril 2010 est modifiée et qu’aucun coût ne sera imputé au syndicat. Cette décision du 12 avril 2010 n’est toutefois pas au dossier.
[23] L’employeur demande la révision de la décision du 4 juin 2010. En révision administrative, l’employeur soulève le fait que la décision qui lui a été transmise le 4 juin 2010 est une reconsidération illégale de la décision rendue le 4 février 2010. En révision administrative, la CSST rejette l’argument de l’employeur invoquant que la décision du 4 juin 2010 adressée à l’employeur n’est pas pour ce dernier une reconsidération puisqu’il s’agit de la première décision qui lui est transmise l’informant de l’acceptation de la réclamation.
[24]
Lors des représentations des parties, l’employeur a soulevé le fait que
la reconsidération de la décision du 4 février 2010 avait été faite hors délai
puisqu’il n’y a pas de preuve au dossier faisant état que cette reconsidération
s’est faite dans un délai de 90 jours de la découverte d’un fait essentiel tel
que le prévoit l’article
[25] En réplique à cet argument, le représentant du travailleur a demandé à produire un extrait de la convention collective qui a été transmis par télécopieur à la CSST le 11 mai 2010 par un représentant du syndicat. L’extrait concerne l’article 7.04 de la convention collective liant le syndicat à l’employeur qui se lit comme suit :
L’Employeur accepte de libérer, avec solde et avantages sociaux, les membres du comité exécutif du Syndicat pour s’occuper des affaires courantes, de l’administration du Syndicat, de l’application de la convention collective ou pour participer à des rencontres avec L’Employeur. Ces permissions sont accordées aux conditions suivantes :
a) Le président est libéré à temps plein et rémunéré cinquante-deux (52) semaines par année, incluant les avantages sociaux et les vacances. Sa rémunération est établie comme suit : lors de chaque période de paie, l’employé détenant la fonction de président choisira à son rang d’ancienneté la fonction qu’il aurait dû occuper en respectant son rang d’ancienneté. Il recevra à cet effet le salaire correspondant à telle fonction, et ce, pour la durée du choix d’horaire;
b) Le secrétaire général est libéré à temps plein cinquante-deux (52) semaines par année, incluant les avantages sociaux et les vacances. En retour, l’Employeur facture mensuellement au Syndicat 80% du salaire versé, excluant les vacances, et le Syndicat, sur réception de la facture rembourse la totalité de la somme due dans les trente (30) jours. Sa rémunération est établie comme suit : Lors de chaque période de paie, l’employé détenant la fonction de secrétaire général choisira à son rang d’ancienneté la fonction qu’il aurait dû occuper en respectant son rang d’ancienneté. Il recevra à cet effet le salaire correspondant à telle fonction, et ce, pour la durée du choix d’horaire.
[26] L’objection de l’employeur à la réouverture d’enquête et à l’admission de la preuve formulée par l’employeur a été prise sous réserve. Le tribunal disposera de cette question préliminaire, en premier lieu.
L’AVIS DES MEMBRES SUR L’OBJECTION À LA PREUVE
[27] Conformément à l’article 429.50 de la loi, le juge soussigné a requis l’avis des membres issus des associations syndicales et d’employeurs.
[28] Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs partagent l’avis de rejeter l’objection au dépôt de la preuve. Ils sont d’avis que le tribunal doit faire preuve de souplesse dans l’administration de la preuve, et étant donné que la demande de dépôt de documents s’est faite avant la mise en délibéré du dossier, ils sont d’avis qu’il y a lieu d’accepter cette preuve qui est pertinente dans la mesure où la partie adverse a eu l’opportunité d’y répondre et n’en subit aucun préjudice.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION SUR L’OBJECTION À LA PREUVE
[29] Le tribunal rappelle que le travailleur demande la production d’un document additionnel, soit l’extrait de la convention collective et sa preuve d’envoi à la CSST, le 11 mai 2010, alors que la preuve des parties a été déclarée close de part et d’autre. Le tribunal souligne que le texte de la convention a été porté à son attention par l’employeur. Ce que le travailleur veut mettre en preuve, c’est le fait que cet extrait de la convention collective a été transmis à la CSST par un représentant du syndicat en date du 11 mai 2010 pour démontrer que la décision de la CSST a été reconsidérée à cause de cette communication.
[30] L’employeur s’oppose à sa demande estimant que le travailleur ne satisfait pas aux critères pour obtenir une réouverture d’enquête. Il plaide que le représentant du travailleur avait cette preuve dans son dossier et rien ne l’empêchait de la produire dans le cadre de sa preuve. Une réouverture d’enquête ne doit pas permettre, à une partie, de bonifier la preuve faite lors de l’enquête, si cette preuve était disponible et qu’il a négligé de la produire.
[31] Dans l’affaire Trudel et Transport adapté Québec Métro inc.[2], la Commission des lésions professionnelles a résumé les règles régissant l’admissibilité en preuve de documents après l’enquête et audition :
[11] Les pouvoirs d’enquête de la Commission des lésions professionnelles sont prévus dans diverses sources législatives comme la Loi sur les commissions d’enquête1, la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles2 (la loi) et le Règlement sur la preuve et la procédure de la Commission des lésions professionnelles3 (le règlement). Il ressort des dispositions pertinentes qu’une enquête comprend l’audience, incluant les témoignages et documents qui y sont déposés, mais aussi la preuve documentaire qui est colligée de différentes façons et notamment par la production de documents après l’audience comme telle. C’est à l’aide de ces différents éléments qu’une décision sera par la suite rendue.
[12] On ne peut donc pas conclure que l’enquête était terminée lorsque le travailleur a formulé sa demande.
[13] Dans l’affaire Smith et Nephew inc. et Owens4, la Commission des lésions professionnelles rappelait que lorsqu’un délibéré est suspendu, comme dans le présent dossier, cela signifie que l’enquête est toujours en cours et qu’il est loisible aux parties de produire des commentaires ou arguments additionnels. Tel est le cas en l’espèce où la cause n’a pas été prise en délibéré à l’audience afin de permettre la production de documents additionnels et de plaidoiries écrites. Il était donc loisible aux parties de demander la permission de produire un document sans nécessiter la réouverture d’enquête puisque cette enquête était toujours en cours quant à la preuve documentaire.
[14] En conséquence, la lettre du travailleur doit plutôt être interprétée comme une demande visant la production de documents additionnels, soit des extraits du dossier détenu par une clinique de physiothérapie. Cette possibilité est explicitement traitée à certains articles du règlement:
10. Une partie qui veut déposer un élément de preuve au dossier le transmet à la Commission dès que possible pour qu'elle le reproduise et le transmette aux autres parties avant l'audience.
D. 217-2000, a. 10; D. 618-2007, a. 9.
11.2. Un écrit déposé au dossier moins de 15 jours avant la date de l'audience doit l'être en 5 copies. Il doit, de plus, avoir été communiqué aux autres parties.
D. 618-2007, a. 11.
13. Une partie autorisée à produire un écrit à l'audience en fournit une copie aux autres parties présentes, à l'assesseur et à chaque membre de la Commission.
D. 217-2000, a. 13.
[15] On note donc qu’un document peut être déposé à plusieurs stades du dossier. Rien dans ce règlement n’indique la déchéance du droit d’une partie de déposer un document avant la fin de l’enquête et de l’audition et ce, même si l’audience est terminée.
[16] Dans sa recherche de la vérité, le présent tribunal doit également bénéficier d’un éclairage complet et il croit qu’il doit autoriser la production des documents demandés.
[17] Pour disposer d’un litige, la Commission des lésions professionnelles est investie des pouvoirs des commissaires enquêteurs et peut accepter toute preuve pertinente selon tout mode de preuve qu’elle juge utile pour les fins de la justice et la découverte de la vérité5.
[18] La Cour Suprême du Canada a d’ailleurs rappelé il y a quelques années que le refus d’accepter une preuve pertinente peut constituer un excès de compétence6.
[19] Cette même Cour Suprême a aussi rappelé il y a déjà longtemps que la procédure doit être au service du droit et que le fond doit l’emporter sur la forme7.
[20] D’autres dispositions de la loi méritent également d’être évoquées :
429.13. Avant de rendre une décision, la Commission des lésions professionnelles permet aux parties de se faire entendre.
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1997, c. 27, a. 24.
429.18. La Commission des lésions professionnelles peut accepter une procédure même si elle est entachée d'un vice de forme ou d'une irrégularité.
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1997, c. 27, a. 24.
429.20. En l'absence de dispositions applicables à un cas particulier, la Commission des lésions professionnelles peut y suppléer par toute procédure compatible avec la présente loi et ses règles de procédure.
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1997, c. 27, a. 24.
429.39. Une partie qui désire faire entendre des témoins et produire des documents procède en la manière prévue aux règles de preuve, de procédure et de pratique de la Commission des lésions professionnelles.
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1997, c. 27, a. 24.
[21] Le règlement précité mentionne également à son 1er article qu’il vise le traitement simple, souple et rapide des demandes soumises par les parties.
[22] La Loi sur la justice administrative8 prévoit quant à elle ce qui suit :
10. L'organisme est tenu de donner aux parties l'occasion d'être entendues.
Les audiences sont publiques. Toutefois, le huis clos peut être ordonné, même d'office, lorsque cela est nécessaire pour préserver l'ordre public.
1996, c. 54, a. 10.
11. L'organisme est maître, dans le cadre de la loi, de la conduite de l'audience. Il doit mener les débats avec souplesse et de façon à faire apparaître le droit et à en assurer la sanction.
Il décide de la recevabilité des éléments et des moyens de preuve et il peut, à cette fin, suivre les règles ordinaires de la preuve en matière civile. Il doit toutefois, même d'office, rejeter tout élément de preuve obtenu dans des conditions qui portent atteinte aux droits et libertés fondamentaux et dont l'utilisation est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. L'utilisation d'une preuve obtenue par la violation du droit au respect du secret professionnel est réputée déconsidérer l'administration de la justice.
1996, c. 54, a. 11. (le tribunal souligne)
[23] Le tribunal estime que les documents que veut déposer le travailleur sont de nature à l’éclairer quant à la décision qu’il doit prendre dans le présent dossier. Il s’agit donc à prime abord de documents pertinents.
[24] Comme la Cour Supérieure l’a déterminé dans l’affaire Esen c. Lingerie Hago inc.9, une distinction doit être faite entre un document supplémentaire qu’une partie veut produire après qu’un dossier a été entendu et une demande pour compléter la preuve testimoniale ou demander la réouverture des débats.
[25] Le tribunal estime qu’il ferait preuve de trop de rigidité s’il ne permettait pas le dépôt de ces nouveaux documents qui n’ont pas pour effet de retarder indûment le dossier sans compter que c’est le travailleur lui-même qui est requérant et qui en subirait de toute façon le préjudice.
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L.R.Q., chapitre C-37.
2 L.R.Q., c. A-3.001
3 (2000) 132 G.O. II, 1627
4 100171-72-9804, 28 avril 1999, D. Lévesque, décision sur requête en révision.
5 Bouchard et Charles
E. Bédard ltée
6 Syndicat des
employés professionnels de l’Université
du Québec à Trois-Rivières et Larocque,
7 Duquet vs Ville
de Ste-Agathe-des-Monts,
8 L.R.Q., c. J-3.
9
[32] Le tribunal retient qu’il n’y a pas dans la loi une procédure aussi stricte que celle prévue au Code de procédure civile du Québec[3] régissant chacune des étapes de l’instance. Le Règlement sur la preuve et la procédure de la Commission des lésions professionnelles[4] et la Loi sur la justice administrative[5] de même que la jurisprudence nous enseignent d’appliquer avec souplesse les règles régissant la preuve devant le tribunal, particulièrement dans un contexte où aucune des parties n’en subit préjudice.
[33] Le tribunal constate que la preuve que veut introduire le travailleur est pertinente au débat et cette pertinence s’est révélée de façon plus particulière lors de l’argumentation du procureur de l’employeur qui a soulevé l’absence de fait essentiel connu de la CSST dans le délai de 90 jours prévu à l’article 365 de la loi, donnant ouverture à une reconsidération par la CSST de sa décision rendue.
[34] La communication entre les représentants du travailleur et du syndicat et la CSST du 11 mai 2010 devenait ainsi pertinente au débat. Bien qu’il ait été utile, voire nécessaire, que ce document soit lors de l’administration de la preuve du travailleur, puisque la validité de la reconsidération avait déjà été soulevée par l’employeur lors de la révision administrative, le tribunal peut difficilement écarter une preuve pertinente à laquelle l’employeur a eu l’opportunité de répliquer pour une simple question de forme.
[35] Le tribunal rappelle également que cette demande est formulée avant la fin de l’audience proprement dite et avant la mise en délibéré du dossier. Selon l’affaire Trudel et Transport adapté Québec Métro inc., précitée, rien ne s’oppose à la production de documents à ce stade du dossier. Au surplus, il n’y a pas de preuve que l’employeur subit un préjudice puisqu’il a eu l’opportunité d’y répondre.
[36] Pour ces motifs, le tribunal permet le dépôt de cette preuve.
[37] Le tribunal doit maintenant disposer d’une question préliminaire soulevée par l’employeur, soit l’irrégularité de la reconsidération de la décision rendue par la CSST le 11 février 2010 avant de disposer du fond du litige.
L’AVIS DES MEMBRES
[38] Conformément à l’article 429.50 de la loi, le juge soussigné a requis l’avis des membres issus des associations syndicales et d’employeurs, tant sur la question préliminaire que sur le fond du litige.
[39] Le membre issu des associations syndicales est d’avis de rejeter la question préliminaire soulevée par l’employeur. Il considère en effet que les dispositions de l’article 365 de la loi ne sont pas applicables en l’espèce puisqu’il s’agit d’une décision en matière de financement. Les dispositions du Règlement sur le financement[6] permettent de reconsidérer une décision entachée d’erreur ou qui fait suite à la découverte d’un fait essentiel.
[40] La transmission de la clause de la convention collective en date du 11 mai 2010 venait confirmer qu’il y avait une entente écrite entre le syndicat et l’employeur sur les modalités de la libération syndicale du président et confirmait le maintien du lien d’emploi de ce dernier avec l’employeur. Cet élément constitue un fait essentiel qui justifiait que la CSST reconsidère sa décision initiale qui avait été prise sur la base d’une situation de faits non conforme à la réalité du travailleur.
[41] Sur le fond du dossier, il est d’avis qu’il n’y a aucune preuve qui permet d’infirmer la décision reconsidérée quant à l’admissibilité de la réclamation. Le geste décrit par le travailleur est susceptible d’avoir causé la tendinite de la coiffe des rotateurs gauche.
[42] La membre issue des associations d’employeurs est plutôt d’avis que la CSST a agi illégalement en reconsidérant le 4 juin 2011 sa décision du 11 février 2010. Elle est d’avis que la CSST avait, dès le 28 janvier 2011, tous les éléments lui permettant de prendre sa décision éclairée et elle n’a été informée d’aucun fait nouveau dont elle n’avait pas déjà connaissance avant de reconsidérer sa décision. Cette reconsidération est au surplus hors délai puisqu’elle excède le délai de 90 jours prévu par l’article 365 de la loi et cette reconsidération s’est faite sans que les parties n’en aient été informées au préalable, comme l’exige l’article 365 de la loi.
[43] Sur le fond, elle est d’avis que la décision du 11 février 2010 était la bonne. Le travailleur s’est blessé alors qu’il travaillait au bureau du syndicat, qu’il exerçait des fonctions syndicales et qu’il agissait en tant que président du syndicat. C’est le syndicat qui est son employeur puisque l’employeur n’a aucun contrôle sur ses activités au moment où il se blesse.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[44] Les dispositions de la loi pertinentes à la solution de la question préliminaire sont de l’avis du tribunal, les suivantes :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« accident du travail » : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle;
« employeur » : une personne qui, en vertu d'un contrat de travail ou d'un contrat d'apprentissage, utilise les services d'un travailleur aux fins de son établissement;
« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;
« travailleur » : une personne physique qui exécute un travail pour un employeur, moyennant rémunération, en vertu d'un contrat de travail ou d'apprentissage, à l'exclusion :
4° du dirigeant d'une personne morale quel que soit le travail qu'il exécute pour cette personne morale;
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1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.
5. L'employeur qui loue ou prête les services d'un travailleur à son emploi demeure l'employeur de ce travailleur aux fins de la présente loi.
La personne qui, aux fins de son établissement, utilise un travailleur dont les services lui sont loués ou prêtés est réputée être un employeur, pour l'application de l'article 316, même si elle n'a pas de travailleurs à son emploi.
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1985, c. 6, a. 5; 2006, c. 53, a. 2.
365. La Commission peut reconsidérer sa décision dans les 90 jours, si celle-ci n'a pas fait l'objet d'une décision rendue en vertu de l'article 358.3, pour corriger toute erreur.
Elle peut également, de sa propre initiative ou à la demande d'une partie, si sa décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel, reconsidérer cette décision dans les 90 jours de la connaissance de ce fait.
Avant de reconsidérer une décision, la Commission en informe les personnes à qui elle a notifié cette décision.
Le présent article ne s'applique pas à une décision rendue en vertu du chapitre IX.
__________
1985, c. 6, a. 365; 1992, c. 11, a. 36; 1996, c. 70, a. 43; 1997, c. 27, a. 21.
Règlement sur le financement chapitre A-3.001, r. 7
224. La Commission peut, de sa propre initiative et pour corriger toute erreur, déterminer à nouveau la classification d'un employeur attribuée conformément au livre II, ou l'imputation du coût des prestations effectuée conformément à la section VI du chapitre IX de la Loi, dans les 6 mois de sa décision, si celle-ci n'a pas elle-même fait l'objet d'une décision en vertu de l'article 358.3 de cette Loi. Une telle détermination doit toutefois s'effectuer:
1° au regard de sa classification, au plus tard le 31 décembre de la cinquième année qui suit l'année de cotisation à laquelle elle se rapporte;
2° au regard de l'imputation du coût des prestations, au plus tard le 31 décembre de la cinquième année qui suit celle pendant laquelle l'accident est survenu ou la maladie est déclarée.
Décision 2010-11-18, a. 224.
225. La Commission peut également, de sa propre initiative ou à la demande de l'employeur, déterminer à nouveau cette classification ou cette imputation si sa décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel.
Toute demande présentée par un employeur en vertu du premier alinéa doit parvenir à la Commission dans les 6 mois de la connaissance par ce dernier d'un tel fait essentiel mais avant l'expiration des délais prévus aux paragraphes 1 et 2 de l'article 224.
Décision 2010-11-18, a. 225.
226. Une nouvelle détermination de la classification ou de l'imputation du coût des prestations faite à l'initiative de la Commission en vertu du premier alinéa de l'article 225 doit être effectuée dans les 6 mois de sa connaissance du fait essentiel mais avant l'expiration des délais prévus aux paragraphes 1 et 2 de l'article 224.
Décision 2010-11-18, a. 226
[45] L’employeur plaide que la décision de la CSST est une reconsidération illégale contraire aux dispositions de l’article 365 de la loi, puisqu’il n’est pas en preuve que la décision du 11 février 2010 a été rendue avant que ne soit connu un fait essentiel. Il attire l’attention du tribunal sur le fait que dès le 23 ou le 28 janvier 2010, la CSST savait que le travailleur était un officier du syndicat, libéré à temps plein, payé par l’employeur et qu’il s’est blessé dans le cadre de l’exécution de ses fonctions syndicales puisque ces informations ont été recueillies par l’agent CSST du travailleur à cette date. Il allègue également qu’avant de reconsidérer sa décision, la CSST n’en a pas informé les parties comme l’exige l’article 365 de la loi.
[46] Il prétend finalement que la décision ne comportait pas d’erreur, donnant ouverture à reconsidération. Sur le fond, il considère que l’employeur ne devrait pas être désigné comme l’employeur du travailleur puisqu’aucun lien de subordination n’existe entre l’employeur et le travailleur et l’employeur n’a aucun contrôle sur les activités du travailleur durant sa libération syndicale.
[47] Le tribunal disposera en premier lieu de l’argument soulevé par le représentant du travailleur voulant que l’employeur ne peut remettre en question sa qualité d’employeur en contestant une décision portant sur l’admissibilité de la réclamation.
[48] Avec égards pour cet argument, le tribunal ne peut y souscrire. Dans sa contestation d’une décision d’admissibilité, l’employeur peut faire valoir tous les moyens pouvant lui permettre de faire rejeter la réclamation. Le fait qu’il ne soit pas l’employeur au dossier en fait partie, tout comme le fait que le travailleur ne serait pas un travailleur au sens de la loi. L’employeur n’a pas à attendre qu’une décision formelle sur l’imputation des coûts lui soit acheminée pour faire valoir cet argument. Les dispositions de l’article 377 de la loi donnent à la Commission des lésions professionnelles tous les pouvoirs pour décider de toutes questions de droit et de faits nécessaires à l’exercice de sa compétence. Le fait de décider de la qualité d’employeur lors de l’étude de l’admissibilité de la réclamation fait partie de ces questions de droit et de faits.
[49] Cette question étant résolue, le tribunal entend disposer du premier argument soulevé par l’employeur, soit l’application aux décisions rendues par la CSST des dispositions de l’article 365 de la loi.
[50] Dans l’affaire C.S.S.T. - Soutien à l’imputation[7], la Commission des lésions professionnelles a eu à disposer de cette question. Elle s’exprime ainsi :
[25] Le 4 juin 2007, la CSST à la suite d’une révision administrative rejette cette contestation et maintient que la CSST est l’employeur et lui impute les sommes dues en raison de l’accident survenu le 15 février 2007.
[26] L’employeur-CSST conteste cette décision. À l’audience, il plaide que la reconsidération est illégale puisqu’il n’y a pas de fait nouveau.
[27] L’article 365 de la loi prévoit :
365. La Commission peut reconsidérer sa décision dans les 90 jours, si celle-ci n'a pas fait l'objet d'une décision rendue en vertu de l'article 358.3, pour corriger toute erreur.
Elle peut également, de sa propre initiative ou à la demande d'une partie, si sa décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel, reconsidérer cette décision dans les 90 jours de la connaissance de ce fait.
Avant de reconsidérer une décision, la Commission en informe les personnes à qui elle a notifié cette décision.
Le présent article ne s'applique pas à une décision rendue en vertu du chapitre IX.
__________
1985, c. 6, a. 365; 1992, c. 11, a. 36; 1996, c. 70, a. 43; 1997, c. 27, a. 21.
[28] Le chapitre IX auquel se réfère le dernier alinéa de l’article 365 est celui du financement en vertu duquel la décision du 15 mars 2007 est rendue.
[29] La CSST ne peut donc baser sa décision d’imputation du 3 mai 2007, rendue en vertu du chapitre IX de la loi, sur l’article 365 de la loi.
[30] Toutefois, le Règlement sur la nouvelle détermination de la classification, de la cotisation d’un employeur et de l’imputation du coût des prestations2 prévoit à son article 3 la possibilité de déterminer à nouveau une imputation :
3. La Commission peut également, de sa propre initiative ou à la demande de l’employeur, déterminer à nouveau cette classification ou cette imputation si sa décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel.
Toute demande présentée par un employeur en vertu du premier alinéa doit parvenir à la Commission dans les six mois de la connaissance par ce dernier d’un tel fait essentiel mais avant l’expiration des délais prévus aux paragraphes 1 et 2 de l’article 2.
[31] D’emblée, la Commission des lésions professionnelles constate que la demande faite par le syndicat est produite le 6 mars 2007 et reçue par la CSST le 15 mars 2007. La première décision d’imputation est rendue le 15 mars 2007.
[32] La demande du syndicat formulée le 6 mars 2007 ne peut donc être une nouvelle demande de détermination d’imputation puisqu’aucune décision n’a encore été rendue lorsqu’il la fait.
[33] Cette lettre est plutôt une lettre d’informations transmises à la CSST en vue d’une décision d’imputation à être rendue.
[34] L’article 3 du règlement ne s’applique donc pas.
[35] La CSST lorsqu’elle détermine une nouvelle imputation le 3 mai 2007 le fait de sa propre initiative, à partir des informations qu’elle possède.
[36] L’article 2 du règlement précité prévoit :
2. La Commission peut, de sa propre initiative et pour corriger toute erreur, déterminer à nouveau la classification d’un employeur attribuée conformément à la section III du chapitre IX de la loi, ou l’imputation du coût des prestations effectuée conformément à la section VI de ce chapitre, dans les 6 mois de sa décision, si celle-ci n’a pas elle-même fait l’objet d’une décision en vertu de l’article 358.3 de cette loi. Une telle détermination doit toutefois s’effectuer :
1° en regard de sa classification, au plus tard le 31 décembre de la cinquième année qui suit l’année de cotisation à laquelle elle se rapporte;
2° en regard de l’imputation du coût des prestations, au plus tard le 31 décembre de la cinquième année qui suit celle pendant laquelle l’accident est survenu ou la maladie est déclarée.
[37] La décision rendue le 15 mars 2007 n’a pas été contestée en vertu de l’article 358.3 de la loi, selon le dossier de la CSST.
[38] La Commission des lésions professionnelles conclut donc que la CSST pouvait rendre la décision du 3 mai 2007 parce qu’elle peut. de sa propre initiative et pour corriger toute erreur, déterminer à nouveau l’imputation.
[39] C’est exactement ce qu’elle fait le 3 mai 2007; elle corrige une erreur, c’est-à-dire, elle modifie l’employeur à qui les sommes doivent être imputées. Le délai prescrit est respecté.
[40] La nouvelle détermination d’imputation du 3 mai 2007 est donc valide.
________________
2 (1998) 180 G.O. II, 6435
[51] Tel qu’on le constate, l’article 365 n’a pas d’application lorsque la CSST détermine à nouveau l’imputation dans le dossier. Le tribunal estime qu’en rendant la décision du 4 juin 2010, la CSST a substitué l’employeur au dossier. Elle a ainsi rendu une décision incidente portant sur l’imputation des coûts de la lésion, soit une décision visée par le chapitre IX de la loi puisqu’elle déterminait à nouveau l’imputation des coûts de la lésion dans ce dossier.
[52]
Ce sont les dispositions des articles 224 à 226 du Règlement sur le
financement qui ont remplacé les dispositions des articles
[53] L’employeur soumet que la décision de la CSST ne pouvait être reconsidérée qu’en présence d’un nouveau fait essentiel inconnu au moment de rendre la première décision. Il prétend également que la CSST ne pouvait reconsidérer en l’absence d’erreur dans sa décision. Il soumet également qu’elle ne pouvait le faire qu’à l’intérieur du délai de 90 jours de sa première décision ou après avoir pris connaissance d’un fait essentiel, ce qui n’est pas le cas puisque le 23 ou le 28 janvier 2010, la CSST détenait toute l’information pertinente à la réclamation du travailleur.
[54] Plusieurs des contraventions reprochées par l’employeur à la CSST sont des contraventions à des exigences qui se retrouvent à l’article 365 de la loi, lequel, pour les motifs précédemment énoncés est inapplicable dans le cas où la décision de la CSST porte sur l’imputation des coûts à l’employeur, tel que l’affirmait la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Icanda Corporation (1989) inc.[8] :
[18] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si la C.S.S.T., le 27 janvier 2005, pouvait reconsidérer une décision rendue le 13 septembre 2004.
[19] Les dispositions de l’article 365 de la loi se lisent comme suit :
365. La Commission peut reconsidérer sa décision dans les 90 jours, si celle-ci n'a pas fait l'objet d'une décision rendue en vertu de l'article 358.3, pour corriger toute erreur.
Elle peut également, de sa propre initiative ou à la demande d'une partie, si sa décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel, reconsidérer cette décision dans les 90 jours de la connaissance de ce fait.
Avant de reconsidérer une décision, la Commission en informe les personnes à qui elle a notifié cette décision.
Le présent article ne s'applique pas à une décision rendue en vertu du chapitre IX.
[20] Les dispositions concernant le financement et, en ce qui a trait à l’instance, l’imputation du coût des lésions professionnelle, se trouvent à ce chapitre IX. Le législateur a donc exclu l’application de cet article aux décisions portant sur le financement.
[21] L’article 454 de la loi prévoit le pouvoir réglementaire de la C.S.S.T. On peut lire au paragraphe 12.3 ce qui suit :
454. La Commission peut faire des règlements pour:
[…]
12.3° déterminer dans quels circonstances et délais et à quelles conditions elle peut déterminer à nouveau la classification, l'imputation du coût des prestations et, à la hausse ou à la baisse, la cotisation, la pénalité et les intérêts payables par un employeur et les normes applicables à cette nouvelle détermination;
[22] La C.S.S.T. a exercé ce pouvoir réglementaire et a adopté le Règlement sur la nouvelle détermination de la classification, de la cotisation d’un employeur et de l’imputation du coût des prestations .
[23] L’article 2 de ce règlement se lit comme suit :
2. La Commission peut, de sa propre initiative et pour corriger toute erreur, déterminer à nouveau la classification d'un employeur attribuée conformément à la section III du chapitre IX de la loi, ou l'imputation du coût des prestations effectuée conformément à la section VI de ce chapitre, dans les 6 mois de sa décision, si celle-ci n'a pas elle-même fait l'objet d'une décision en vertu de l'article 358.3 de cette loi. Une telle détermination doit toutefois s'effectuer:
1° en regard de sa classification, au plus tard le 31 décembre de la cinquième année qui suit l'année de cotisation à laquelle elle se rapporte;
2° en regard de l'imputation du coût des prestations, au plus tard le 31 décembre de la cinquième année qui suit celle pendant laquelle l'accident est survenu ou la maladie est déclarée.
(nos italiques)
[24] Les dispositions réglementaires reprennent les éléments essentiels de l’article 365 de la loi, en matière d’erreur, mais avec certaines distinctions : le délai pour corriger toute erreur passe de 90 jours à six mois de la décision initiale; l’obligation d’aviser les personnes à qui la décision a été notifiée, avant de « déterminer à nouveau », n’est pas reprise et le délai ultime pour « déterminer à nouveau » est précisé.
[25] La jurisprudence interprétant les dispositions de l’article 365 peut donc être consultée pour déterminer ce que constitue « toute erreur ».
[26] Il est acquis, dans la jurisprudence, qu’une erreur porte sur une question de fait, mais qu’un changement d’opinion ou d’interprétation ne constitue pas une erreur au sens de la loi ou du règlement précité.
[27] En l’instance, il s’écoule un délai d’un peu plus de quatre mois entre la décision de septembre 2004 et celle de janvier 2005. L’argument de l’employeur sur cet aspect ne peut être retenu.
[28] La décision de septembre 2004 comporte-t-elle une erreur ?
[29] La Commission des lésions professionnelles doit répondre par l’affirmative. Le dossier, à sa face même, révèle que cette décision comporte une erreur.
[30] L’agent de la C.S.S.T. rend, le 13 septembre 2004, une décision qui n’impute aucun coût au dossier financier de l’employeur compte tenu du fait que la durée du travail n’est pas suffisamment longue. L’employeur a affirmé, deux mois plus tôt, que le travailleur a plus de 10 000 heures de travail pour lui. L’employeur est en mesure de réaliser cette erreur de la C.S.S.T.
[31] De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, il s’agit là d’une erreur de fait que le règlement précité a justement pour objet de permettre de corriger.
[32] Il ne s’agit pas de la situation où un fait nouveau est découvert après la décision initiale. Les faits sont au dossier et l’agent de la C.S.S.T. commet une erreur. Il ne s’agit pas non plus d’un cas de réévaluation de la preuve ou d’un changement d’opinion.
[33] La Commission des lésions professionnelles est donc d’avis que la question préliminaire de l’employeur doit être rejetée. Il y a lieu de convoquer l’employeur sur le fond de sa contestation.
[34] La Commission des lésions professionnelles ne peut qu’observer que l’agent qui a rendu la décision de janvier 2005 ne mentionne pas la décision de septembre 2004, la nature de l’erreur commise ou le règlement qui lui permet de reconsidérer une décision antérieure. Il s’agit d’une pratique que la C.S.S.T. devrait mettre en place, même si le règlement précité ne reprend pas l’obligation, prévue à l’article 365, d’aviser les parties.
[55] Telle qu’on le constate dans ce dossier, la décision initiale a été rendue le 11 février 2010 et la décision reconsidérée le 4 juin 2010. L’argument de l’employeur quant au délai de 90 jours ne peut donc être retenu puisque ce n’est pas ce délai qui est applicable mais plutôt le délai de six mois prévu aux articles 224, 225 et 226 du Règlement sur le financement, précité. Le tribunal ne peut retenir également l’argument de l’employeur voulant que la CSST n’ait pas informé les parties avant de reconsidérer sa décision puisque cette exigence ne se retrouve pas au Règlement sur le financement.
[56] Reste la question de l’erreur et de la méconnaissance d’un fait essentiel. L’employeur allègue que la première décision rendue par la CSST ne comportait pas d’erreur. Une erreur se définit comme étant : une opinion, un jugement ou une parole non conforme à la réalité, à la vérité. La CSST a-t-elle commis une erreur en rendant sa première décision?
[57] La première décision qui identifie le syndicat comme étant l’employeur est fondée sur le fait que le travailleur est libéré à temps complet de son travail auprès de l’employeur, qu’il travaille pour le syndicat dans les locaux du syndicat, au moment où il se blesse. Il est exact que les notes évolutives nous apprennent que la CSST sait que le salaire du président est défrayé par l’employeur, mais la CSST n’a pas le détail de l’entente liant le syndicat et l’employeur relativement aux modalités de cette libération.
[58] Sur la base des seuls renseignements détenus en janvier 2010, la décision de la CSST pouvait se justifier. Il y a toutes sortes de libérations syndicales. Certaines exigent une autorisation de l’employeur, d’autres non, certaines exigent que la personne libérée rende des comptes à son employeur, d’autres non. Certaines peuvent être au seul bénéfice du syndicat local ou même du travailleur. Certaines libérations sont prévues pour permettre le prêt de service de l’employé à un syndicat affilié ou à un syndicat central, lorsque par exemple l’officier accepte un poste de conseiller syndical ou d’agent d’affaires.
[59] Le fait que le salaire soit défrayé par l’employeur est un élément à considérer, mais n’est pas déterminant. Ce salaire peut faire l’objet d’un remboursement en partie ou en totalité, qui peut ou non dépendre des activités accomplies durant la libération syndicale.
[60] L’information communiquée à la CSST le 11 mai 2010, soit le texte de la clause 7.04 de la convention collective comportant le détail des modalités de la libération syndicale du président, prend toute son importance.
[61] La CSST constate que la libération du président doit être autorisée par l’employeur. Qu’il est libéré à temps plein aux frais de l’employeur, sans aucune forme de remboursement de la part du syndicat. Que cette libération a pour but de permettre au président de s’occuper des affaires courantes, de l’administration du syndicat, mais également de l’application de la convention collective et pour participer à des rencontres avec l’employeur.
[62] L’ensemble de ces informations n’était pas en possession de la CSST, le 11 février 2010. Ces informations constituent un fait essentiel au sens de l’article 225 du Règlement sur le financement et elles justifiaient la reconsidération de la décision de la CSST. La décision de considérer le syndicat comme employeur a porté sur une situation de faits incomplète ou non conforme à la réalité.
[63] Il s’agit aussi d’un cas d’erreur justifiant que la CSST la reconsidère de son propre chef, en vertu des dispositions de l’article 224 du Règlement sur le financement puisque la décision du 11 février 2010 est un jugement portant sur une réalité non conforme à la réalité ou à la vérité.
[64] Cette décision initiale n’ayant pas fait l’objet d’une demande de révision et les délais prévus au règlement étant respectés, rien ne s’opposait à la reconsidération de la décision à l’initiative de la CSST. Ce dernier argument de l’employeur est donc également rejeté.
[65] Reste à déterminer si la décision de reconsidérer est bien fondée.
[66] Le tribunal doit déterminer qui est le véritable employeur du travailleur au moment où survient la lésion, le syndicat ou l’employeur?
[67] Le tribunal rappelle que l’expression « travailleur » est définie dans la loi comme étant une personne physique qui exécute un travail pour un employeur, moyennant une rémunération, en vertu d'un contrat de travail; et celle d’ « employeur » comme étant une personne qui, en vertu d'un contrat de travail, utilise les services d'un travailleur aux fins de son établissement.
[68] Le tribunal retient de la preuve que le président du syndicat est avant tout un salarié de l’employeur, son emploi habituel est camionneur. La rémunération qui lui est versée en tant que président du syndicat libéré à temps plein, par l’employeur, est celle qu’il recevrait s’il était au travail pour le compte de l’employeur.
[69] La convention collective précise qu’il doit choisir ses assignations selon son rang d’ancienneté, afin que l’on puisse établir sa rémunération. Il conserve tous ses avantages sociaux prévus à la convention collective, comme tout autre employé de l’entreprise.
[70] L’employeur allègue qu’il n’a aucun contrôle sur les activités du président du syndicat. Ce n’est pas ce que le tribunal retient de la preuve. La convention collective précise que la libération du président doit être autorisée par l’employeur et pour les fins mentionnées à l’article 7.04, soit s’occuper des affaires courantes du syndicat, mais également de l’application de la convention collective. Il doit de plus participer aux rencontres avec l’employeur.
[71] L’employeur peut-il raisonnablement prétendre que lorsque le président du syndicat participe à des rencontres ou à des discussions avec ses représentants, dans le but de voir à l’application conforme de la convention collective qui régit l’organisation du travail, ce dernier ne rend pas des services aux fins de son établissement. Le tribunal ne le croit pas. Le rôle du président s’inscrit dans la réalisation de la mission de l’établissement de l’employeur qui ne peut se faire que si l’organisation du travail fonctionne de façon adéquate. Le président du syndicat participe à l’atteinte de cette mission par son rôle d’intermédiaire entre ses membres et la direction de l’entreprise.
[72] En autorisant la libération du président du syndicat à temps plein, l’employeur s’assure de la disponibilité d’un interlocuteur pour régler les problèmes d’application de la convention collective. Si ses interventions profitent aux membres du syndicat, elles profitent également à l’entreprise de l’employeur, motif pour lequel il accepte probablement d’acquitter le salaire et les avantages sociaux de ce dernier, comme s’il était au travail. Le syndicat en tant qu’agent négociateur de la convention collective participe à la vie de l’entreprise et au maintien d’un climat harmonieux de travail qui favorise la réalisation de la mission de l’employeur.
[73] Quant au contrôle de l’employeur sur les activités du président, le tribunal considère que l’employeur balise la libération syndicale consentie au président. Il pourrait certes, cesser de rémunérer le président du syndicat si ce dernier ne s’acquittait plus des tâches prévues à l’article 7.04 de la convention collective. Le tribunal y voit là un lien de subordination et d’emploi qui sont maintenus.
[74] Dans la décision CSST - Soutien à l’imputation, précitée, on a conclu à un prêt de service, en présence de faits similaires, soit à l’application des dispositions de l’article 5 de la loi, et ce, même en présence d’une libération syndicale où le salaire de l’officier est remboursé par le syndicat.
[41] L’employeur-CSST plaide qu’il n’était pas l’employeur de monsieur Gervais lorsque celui-ci se blesse puisque son absence était motivée par des activités syndicales et remboursée par le syndicat.
[42] Le premier alinéa de l’article 5 de la loi prévoit :
5. L'employeur qui loue ou prête les services d'un travailleur à son emploi demeure l'employeur de ce travailleur aux fins de la présente loi.
[43] Cet article a été appliqué dans les dossiers impliquant des agences de personnel, ce qui ne signifie pas que son usage doit être restreint à ces agences3.
[44] Qu’en est-il dans le présent dossier?
[45] La convention collective régit les règles en vertu desquelles un travailleur peut être libéré pour activités syndicales. Ces activités syndicales peuvent bénéficier uniquement au syndicat ou autant au syndicat qu’à l’employeur.
[46] Cette libération signifie pour l’employeur qu’il accepte de prêter les services d’un de ses employés à des fins syndicales; ce prêt peut être gratuit ou non.
[47] Il s’agit d’une absence que l’employeur doit autoriser, dont les mécanismes sont négociés et régis par la convention collective. Si le travailleur n’en respecte pas les conditions, c’est l’employeur, Commission de la santé et de la sécurité du travail, qui sévit en tant qu’employeur, et non le syndicat.
[48] La Commission des lésions professionnelles est d’avis que cette libération est un prêt des services de monsieur Gervais au syndicat pour une période déterminée, que l’absence soit remboursée ou non par le syndicat parce que ce prêt doit être autorisé par l’employeur.
[49] La Commission des lésions professionnelles conclut donc que l’employeur de monsieur Gervais reste la Commission de la santé et de la sécurité du travail pendant cette libération.
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3 Super Marché aux puces Rimouski inc. et Location
Québec,
[75] Dans l’affaire Syndicat canadien de la fonction publique (local 1983) et Société de transport de Montréal (Gestion des lésions professionnelles)[9], on a conclu qu’il n’y avait pas de rupture du lien d’emploi que la libération syndicale faisait partie intrinsèque des conditions de travail d’un salarié de l’employeur :
[43] Ici, un contrat de travail unit la travailleuse et la S.T.M., et non la travailleuse et le S.C.F.P.
[44] La convention collective prévoit qu’une travailleuse peut être libérée aux fins d’activités syndicales. Ce droit fait donc partie des conditions de travail de cette dernière. La convention collective précise les modalités de cette libération, mais il n’y est aucunement indiqué que le lien d’emploi est momentanément suspendu durant ces activités ou que le S.C.F.P. assume la qualité d’employeur durant cette période. Bien au contraire, les droits de la travailleuse en vertu de la convention collective en ce qui a trait à la rémunération, aux cotisations à la caisse de retraite, aux vacances, aux jours de maladie ou à l’ancienneté, pour ne nommer que ces items, sont maintenus malgré ces absences du travail régulier.
[45] De plus, la libération est autorisée par l’employeur et elle n’exempte pas la travailleuse de se rapporter à ce dernier pour lui signaler toute absence maladie.
[46] En outre, la preuve révèle que le travail accompli par la travailleuse le 16 octobre 2009 comporte une certaine utilité pour l’employeur. En effet, celle-ci prépare une convocation faite par l’employeur et elle analyse des rapports aux fins de codification et de recommandations. Ce travail dessert certes les membres du syndicat, mais il profite aussi à l’employeur puisque la travailleuse assiste madame Dumont dans sa tâche de compilation et de codification des rapports d’accident/incident.
[47] Il est vrai que le syndicat rembourse à la S.T.M. la rémunération versée, les cotisations à la caisse de retraite et le montant déboursé à l’assurance-santé. Toutefois, ces remboursements ne suffisent pas à écarter le contrat de travail qui perdure entre la travailleuse et la S.T.M.
[48] Il est également vrai que, dans certaines décisions, la Commission des lésions professionnelles attribue le statut d’employeur au syndicat lorsque la lésion professionnelle survient lors d’une libération syndicale. Or, la Commission des lésions professionnelles constate que, dans les causes déposées par la représentante de la S.T.M., les libérations syndicales sont permanentes ou à très long terme (2 ans, 17 ans et 18 ans).
[49] À l’instar du tribunal dans l’affaire Syndicat de la fonction publique du Québec7, la Commission des lésions professionnelles croit qu’en matière de libération syndicale de longue durée, l’employeur perd tout contrôle sur les activités effectuées par la travailleuse. Le lien de subordination ne peut donc survivre à une telle absence,
[50] Cependant, la situation est différente dans le présent dossier. La travailleuse est libérée de façon sporadique, parfois pour quelques heures, de telle sorte que son lien de subordination avec la S.T.M. n’est pas rompu par ces libérations.
[51] La Commission des lésions professionnelles est donc d’avis que la S.T.M. est l’employeur de la travailleuse au moment de la survenue de sa lésion professionnelle. Il doit donc en assumer les coûts conformément au premier alinéa de l’article 326 de la loi.
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7 Précitée à la note 1.
[76] Le tribunal souscrit aux propos de sa collègue, quant au fait qu’il n’y a pas de rupture du lien d’emploi dans un tel contexte. Le tribunal nuance toutefois lorsqu’il est question de libération de longue durée. Dans le présent dossier, il est admis que le travailleur, qui est président du syndicat, est libéré à temps plein depuis 2005, soit depuis quatre ans, au moment où survient la lésion. La durée de cette libération lui fait-elle perdre son statut de salarié de l’employeur?
[77] De l’avis du tribunal, la seule durée de la libération syndicale n’est pas un facteur déterminant. La convention collective ne prévoit pas que le travailleur est libéré pour une longue période d’avance. Elle prévoit que le président du syndicat bénéficie de cette libération. Si le travailleur perd son statut de président, il perd également sa libération syndicale.
[78] De toute évidence, la durée prévisible de la libération ne peut excéder la durée du mandat du président. Il serait paradoxal qu’un travailleur qui est réélu par ses pairs comme président du syndicat pour un troisième ou quatrième mandat, perde son statut de travailleur uniquement à cause de sa réélection, alors que, s’il perd son élection, son remplaçant en bénéficierait. Ce serait pour le moins incongru. À partir de combien de renouvellements perd-on son statut de travailleur? Ce concept est, de l’avis du soussigné, inapplicable.
[79] Le facteur déterminant demeure la finalité de la libération. Est-elle au bénéfice de l’entreprise ou est-elle au seul bénéfice du syndicat ou encore du travailleur? Quel est le contrôle qu’exerce l’employeur sur la libération ou sur l’employé pendant sa libération? Ce sont là, les éléments les plus pertinents à considérer, bien avant la durée de la libération.
[80] L’employeur a porté à l’attention du tribunal l’affaire Marquis et Ministère des transports[10]. Avec égards, cette décision n’est pas applicable en l’espèce puisqu’il s’agit d’une libération syndicale consentie à un travailleur pour agir à titre de conseiller syndical. L’employeur, dans un tel contexte, ne fait qu’autoriser l’absence au travail de son salarié qui devient un salarié du syndicat qui l’emploie, le rémunère, lui assigne son travail et même le discipline. Il y a dans un tel contexte une rupture du lien de subordination. Le travailleur ne rend plus des services à son employeur mais à son syndicat.
[81] L’affaire SPSS-CHUM (FIQ) et C.H. Université de Montréal[11] semble au même effet puisqu’on fait référence à un employé qui obtient un poste d’agent syndical, élu par les membres et qui s’engage par contrat, à travailler pour son syndicat, qui le rémunère pendant une période de 24 mois. Le syndicat rembourse son salaire à l’employeur, lui paie des heures supplémentaires. Son travail est supervisé par le comité exécutif du syndicat et ses attributions sont définies dans les statuts du syndicat. La situation est différente dans le présent dossier, où les tâches du président sont convenues entre le syndicat et l’employeur et inscrites dans la convention collective. Ces tâches concernent, entre autres, les relations de travail dans l’entreprise, l’application de la convention collective et des rencontres avec l’employeur. Elles ne sont pas au seul bénéfice du travailleur ou même de ses seuls membres.
[82] Quant à l’affaire Blanchet et Prévost Car[12], encore ici des nuances s’imposent puisque la cause de la lésion professionnelle de nature psychique avait pour origine une situation de dénonciation d’une fraude qui s’est produite à l’intérieur du syndicat et aux conséquences de cette dénonciation. L’utilité pour l’employeur du travail de l’officier syndical n’était pas très évidente dans un tel contexte.
[83] Pour ces différents motifs, le tribunal considère que Garda (division Montréal) est demeuré l’employeur du travailleur.
[84] Reste la question de l’admissibilité de la réclamation en tant que telle. Bien que l’employeur ait contesté la décision d’admissibilité, sa contestation ne visait pas à remettre en cause le bien-fondé de la réclamation du travailleur, mais uniquement son statut d’employeur.
[85] Le dossier fait état que le travailleur s’est infligé une tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche alors que son pied droit a glissé lorsqu’il a voulu s’asseoir sur sa chaise. Il a ressenti un craquement. Le diagnostic de la lésion n’est pas contesté, la survenance du fait accidentel non plus. Il est tout à fait probable que l’événement décrit ait causé la lésion diagnostiquée. Le tribunal ne dispose d’aucune preuve lui permettant d’infirmer la décision d’admissibilité de la CSST, il confirme donc que le travailleur a été victime d’une lésion professionnelle, le 16 novembre 2009.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE l’objection à la preuve de Garda (division Montréal), l’employeur;
PERMET la production de l’extrait de la convention collective (article 7.04) et sa preuve d’envoi à la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 11 mai 2010;
REJETTE la question préliminaire de l’employeur;
DÉCLARE que l’employeur, Garda (division Montréal), était l’employeur de monsieur Daniel Carrière, le travailleur, au moment où il a subi une lésion professionnelle, le 16 novembre 2009;
REJETTE la requête de l’employeur;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 27 octobre 2010;
DÉCLARE que monsieur Daniel Carrière, le travailleur, a été victime d’une lésion professionnelle le 16 novembre 2009 et qu’il a droit aux prestations en lien avec cette lésion professionnelle.
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Daniel Pelletier |
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Me Patrick Galizia |
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Norton Rose Canada S.E.N.C.R.L. |
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Représentant de l’employeur |
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M. Pierre Handfield |
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S.C.F.P. |
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Représentant du travailleur |
[1] L.R.Q. c. A-3.001.
[2]
[3] L.R.Q., c. C-25.
[4] R.R.Q., c. A-3.001, r. 12.
[5] L.R.Q., c. J-3.
[6] Chapitre A-3.001, r.7.
[7] C.L.P.
[8] C.L.P.
[9]
[10]
[11]
[12] C.L.P. 243266-03B-0409, 1er février 2005, M. Cusson.
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