Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Québec

QUÉBEC, le 22 avril 2002

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

137462-32-0005-R

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Pierre Simard, avocat

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Gaétan Gagnon

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Gilles Lamontagne

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

117434233-1

AUDIENCE TENUE LE :

1er octobre 2001

 

 

 

 

EN DÉLIBÉRÉ LE :

3 décembre 2001

 

 

 

 

 

 

À :

Québec

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE PRÉSENTÉE EN VERTU DE L'ARTICLE 429 .56 DE LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES (L.R.Q., chapitre A-3.001)

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DENIS CHABOT

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TOITURES QUALITOIT INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 2 avril 2001, monsieur Denis Chabot (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête en révision d’une décision rendue par cette instance, le 26 février 2001.

[2]               Par cette décision, la première commissaire confirme une décision initialement rendue par les services de révision administrative de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), le 26 avril 2000, à l’effet d’informer les parties du rejet de la réclamation introduite par le travailleur concernant une lésion professionnelle alléguée comme s’étant manifestée  le ou vers le 14 juillet 1999.

[3]               La Commission des lésions professionnelles a tenu une audience, en date du 1er octobre 2001, à Québec.

[4]               Des délais supplémentaires furent accordés aux parties afin qu’elles produisent une argumentation écrite.  La Commission des lésions professionnelles a reçu et pris connaissance de l’argumentation des parties.

 

L'OBJET DE LA REQUÊTE

[5]               Initialement, l’avocate du travailleur, à sa requête du 2 avril 2001, allègue que la décision attaquée est entachée d’erreur.  Plus spécifiquement, elle allègue :

a)         que la première commissaire aurait erronément retenu que le travailleur, à un document produit au dossier, alléguait qu’il souffrait d’une maladie professionnelle;

 

b)         que la première commissaire n’a pas disposé de plusieurs documents médicaux portant spécifiquement sur la relation entre la blessure et l’accident;

 

c)         que la première commissaire aurait attaché une importance «marquée» au fait que le travailleur, à sa réclamation du 16 septembre 1999, a indiqué que l’accident du travail dont il se plaint serait survenu le 1er septembre 1999 alors que la preuve offerte démontrerait que cette mention résulte des interventions des agents de la CSST auprès du travailleur;

 

 

[6]               Lors de l’audience tenue le 1er octobre 2001, l’avocate du travailleur dépose à la commission des lésions professionnelles une série de documents médicaux émis par les Drs Richard Lirette et Chantal Côté, en l’occurrence une arthrographie de l’épaule gauche, interprétée par le Dr Côté, une consultation médicale auprès du Dr Lirette, datée du 29 juin 2001 ainsi qu’un protocole opératoire rédigé par le Dr Lirette et démontrant que le travailleur présente une dégénérescence avec déchirure partielle du labrum.

[7]               Sur la base de ces documents, l’avocate du travailleur allègue qu’il s’agit de faits nouveaux qui, s’ils avaient été connus en temps utile, auraient pu justifier une décision différente par la première commissaire, le tout en application de l’article 429.56, paragraphe 1de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

[8]               Dès lors, un débat entre les parties s’est engagé devant la Commission des lésions professionnelles portant sur le dépôt de ces documents et les conséquences en résultant.

[9]               En effet, il apparaît clairement à la Commission des lésions professionnelles que l’avocate du travailleur amende sa requête en révision du 2 avril 2001 afin d’introduire un nouveau motif de révision, en l’occurrence l’existence d’un fait nouveau sanctionné par l’article 429.56, paragraphe 1de la loi.

[10]           Dans ce contexte, les parties furent invitées par la Commission des lésions professionnelles à débattre de leur position respective sur ce sujet, sur l’admissibilité et la portée de cet amendement dans le contexte du dossier soumis à notre attention.

[11]           Prenant en considération que ce nouvel argument fut soulevé à l’audience sans que l’employeur en fut préalablement informé, la Commission des lésions professionnelles a permis aux parties de soumettre une argumentation écrite sur ce sujet afin que la Commission des lésions professionnelles puisse en disposer.

[12]           Après lecture des argumentations écrites, la Commission des lésions professionnelles a contacté les avocates des parties afin de s’assurer que toutes les représentations utiles à l’intérêt de leurs clients, aussi bien sur l’amendement proposé que sur le fond du litige, sont faites.  Effectivement, les parties ont confirmé à la Commission des lésions professionnelles qu’ils considéraient leurs interventions complètes aussi bien sur les procédures engagées que sur le fond et demeuraient dans l’attente d’une décision finale disposant de l’ensemble des litiges soulevés par la requête en révision pour cause introduite par le travailleur.

 

 

 

L'AVIS DES MEMBRES

[13]           Les membres issus des associations d’employeurs et des associations syndicales sont unanimes pour recommander à la Commission des lésions professionnelles de rejeter la requête en révision pour les mêmes motifs que ceux énoncés à la décision.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[14]           La Commission des lésions professionnelles doit décider s’il fut démontré un motif donnant ouverture à la révision de la décision rendue par cette instance.

[15]           L’article 429.49 de la loi prévoit qu’une décision rendue par la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel :

429.49. Le commissaire rend seul la décision de la Commission des lésions professionnelles dans chacune de ses divisions.

 

Lorsqu'une affaire est entendue par plus d'un commissaire, la décision est prise à la majorité des commissaires qui l'ont entendue.

 

La décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel et toute personne visée doit s'y conformer sans délai.

________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[16]           Cependant, les dispositions de l’article 429.56 de la loi ont expressément prévu que la Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision qu’elle a rendue.

[17]           L’article 429.56 de la loi stipule :

429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

1°  lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

2°  lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

3°  lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[18]           Pour pouvoir procéder à la révision de la décision rendue par la première commissaire, il appartiendra donc au travailleur de démontrer, par une prépondérance de preuve, l’existence de l’un ou l’autre des motifs prévus à cet article.

[19]           Les dispositions de l’article 429.57 de la loi prévoient la procédure à suivre, le tout complété par les règles de preuve, de procédure et de pratique :

429.57. Le recours en révision ou en révocation est formé par requête déposée à la Commission des lésions professionnelles, dans un délai raisonnable à partir de la décision visée ou de la connaissance du fait nouveau susceptible de justifier une décision différente.  La requête indique la décision visée et les motifs invoqués à son soutien.  Elle contient tout autre renseignement exigé par les règles de preuve, de procédure et de pratique.

 

La Commission des lésions professionnelles transmet copie de la requête aux autres parties qui peuvent y répondre, par écrit, dans un délai de 30 jours de sa réception.

 

La Commission des lésions professionnelles procède sur dossier, sauf si l'une des parties demande d'être entendue ou si, de sa propre initiative, elle le juge approprié.

________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

 

[20]           D’autre part, les articles I et 2 des règles de preuve, de procédure et de pratique devant la Commission des lésions professionnelles énoncent :

 «1.      Le présent règlement s’applique aux recours sur lesquels la Commission des lésions professionnelles statue en vertu de l’article 369 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, (L.R.Q., c.A-3.001).

 

            Il vise le traitement simple, souple et rapide des demandes soumises, notamment par la collaboration des parties et des représentants et par l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et des communications, dans le respect des règles de justice naturelle et de l’égalité des parties.

 

2.         La Commission n’est pas tenue à l’application des règles de procédure et de preuve civiles.»

 

 

 

[21]           La première question qui se pose à la Commission des lésions professionnelles porte sur l’admissibilité de l’amendement que l’on désire apporter à la requête du 2 avril 2001 par l’inclusion d’un nouveau motif de révision, en l’occurrence l’existence d’un fait nouveau découvert postérieurement à la décision attaquée et justifiant une décision différente.

[22]           Sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles rappelle que les dispositions de la loi ainsi que des règles de preuve, procédure et pratique visent à un traitement simple, souple et rapide des demandes qui peuvent être soumises à la Commission des lésions professionnelles, organisme qui est dégagé de l’application des règles de procédure et de preuve en matière civile.

[23]           Bien plus, le législateur québécois a spécifiquement prévu à l’article 429.18 que la Commission des lésions professionnelles pouvait accepter une procédure, même si elle est entachée d’un vice de forme ou d’une irrégularité.

[24]           De l’ensemble de ces dispositions, l’on doit conclure que le législateur québécois énonce spécifiquement des objectifs de souplesse, de non formalisme ainsi que de célérité afin de permettre aux parties de se faire entendre par les décideurs et d’obtenir une décision juste, équitable et éclairée disposant du litige qu’il soulève par l’exercice de leur recours.

[25]           Dans les circonstances, la Commission des lésions professionnelles constate que le travailleur, par l’introduction de sa requête en révision du 2 avril 2001, a introduit une requête en révision et qu’il est donc en droit d’obtenir de la Commission des lésions professionnelles une décision portant sur l’ensemble des éléments qu’il entend soulever à l’encontre de la décision attaquée.

[26]           Procéder autrement serait sanctionné une approche procédurale limitative, restreignant l’exercice des droits reconnus par le législateur aux parties.

[27]           En conséquence, la Commission des lésions professionnelles conclut qu’effectivement le travailleur peut procéder à un amendement de sa requête en révision du 2 avril 2001, en autant que les règles de justice naturelle soient respectées, la partie adverse ayant l’occasion de pouvoir réagir et de faire valoir tous les éléments à la défense des intérêts de son client.

[28]           Ayant disposé de ce premier point, la Commission des lésions professionnelles étudiera chacun des motifs soulevés par la requête en révision.

[29]           En premier lieu, à sa requête initiale, le travailleur invoque les dispositions du troisième paragraphe de l’article 429.56 de la loi en ce qu’il reproche à la décision de la première commissaire de comporter des vices de fond ou de procédure de nature à l’invalider.  De jurisprudence constante[2], la Commission des lésions professionnelles rappelle que le travailleur doit démontrer que la décision attaquée comporte une erreur manifeste, de faits ou de droit, qui est déterminante sur l’issue du litige.

[30]           Ajoutons que la jurisprudence enseigne que la révision ne permet pas de substituer son interprétation des dispositions de la loi ou de la preuve à celle retenue par la première commissaire à moins qu’une erreur manifeste et déterminante fut commise.  Le recours en révision ne constitue pas un appel déguisé et est donc soumis à des conditions d’ouverture qui doivent être démontrées[3].

[31]           D’autre part, la Commission des lésions professionnelle ajoute qu’il y a erreur manifeste lorsque la décision méconnaît une règle de droit, applique un faux principe, statue sans preuve, néglige un élément de preuve important ou adopte une méthode qui crée une injustice certaine.  Ces critères, bien qu’étant non exhaustifs, permettent de mieux situer cette notion[4].

[32]           Quant aux faits pertinents dans ce dossier, la Commission des lésions professionnelles réfère le lecteur à la section des faits contenus à la décision attaquée, section qui a l’avantage de rapporter l’historique de ce dossier aussi bien au niveau factuel que médical.

[33]           La première commissaire était saisie d’une contestation portant sur l’admissibilité d’une réclamation pour lésion professionnelle alléguée comme s’étant manifestée le 14 juillet 1999.

[34]           La lecture des motifs qu’elle retient pour rendre sa décision démontre clairement que la première commissaire s’est prononcée aussi bien sur la notion d’«accident du travail» que sur celle de «maladie professionnelle».

[35]           Au centre de son litige, reposait l’application de la présomption de l’article 28 de la loi entraînant une étude approfondie de la crédibilité à apporter aux déclarations du travailleur.

[36]           D’ailleurs, les paragraphes 86 à 94 de la décision attaquée portent spécifiquement sur ce sujet, la première commissaire rapportant les différentes versions offertes par le travailleur concernant l’origine de sa lésion.  Ainsi, la première commissaire souligne que les réclamations initiales du travailleur ne référaient pas à un événement précis, mais plutôt à des tâches que devait effectuer le travailleur dans l’exécution de ses fonctions, en l’occurrence le transport de charges lourdes.  D’ailleurs, la première commissaire note que la preuve médicale initiale émise par le médecin qui a pris charge du travailleur, le Dr Corriveau, référait à ce type de tâche.

[37]           Par la suite, la première commissaire s’intéresse aux différentes versions du fait accidentel décrit par le travailleur selon l’évolution du dossier.  Ainsi, elle note que dans une version, le travailleur n’a pas fait de chute alors qu’il affirme le contraire à l’audience tenue devant elle.

[38]           La première commissaire s’intéresse à l’historique des lésions professionnelles présentées par le travailleur ainsi que de la description qu’il en fait.  Elle note une contradiction entre la preuve documentaire et les déclarations du travailleur concernant une lésion à l’oreille qu’il a subie.

[39]           La première commissaire poursuit son étude et dispose des témoignages de la conjointe du travailleur ainsi que de son père, appréciant que leurs déclarations sont trop vagues et moins précises quant aux éléments qu’ils voulaient mettre en preuve.

[40]           Au paragraphe 93 de sa décision, la première commissaire complète son étude s’intéressant aux premières consultations ainsi qu’à la démarche suivie par le travailleur impliquant le délai relativement long à consulter alors que l’historique de ces accidents du travail antérieurs démontre que le travailleur a adopté un comportement différent.

[41]           Il faut bien constater, de ce court résumé, que la première commissaire s’est prononcée principalement sur cette notion de crédibilité qui était au centre de son litige, aussi bien pour ce qui est de l’application de l’article 28 que de la notion d’accident du travail.  En effet, si la première commissaire ne peut retenir les déclarations du travailleur sur l’origine de sa lésion, il est bien évident qu’elle ne pourra conclure que le travailleur fut victime d’une lésion professionnelle.

[42]           La Commission des lésions professionnelles constate que la première commissaire n’a pas commis d’erreur manifeste et déterminante dans l’appréciation de la crédibilité du travailleur à partir des éléments de la preuve qui lui étaient administrés.  Le premier motif soulevé, par le travailleur, à sa requête du 2 avril 2001, à l’effet que la première commissaire fait référence à un document où le travailleur a inscrit qu’il souffrait d’une maladie professionnelle avant l’incident est nullement erroné puisque la réclamation du travailleur, datée du 16 septembre 1999, produite au dossier, démontre bien dans sa portion supérieure que l’on a coché  maladie professionnelle et décrit l’événement comme suit :

«En transportant des charges lourdes (85 livres et plus)»

 

 

[43]           Le second élément soulevé dans le cadre de l’article 429.56, paragraphe 3, est le fait que la première commissaire a attaché une importance marquée à la date du 1er septembre, initialement rapportée, comme étant la date de l’événement.

[44]           Sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles rejette cet argument comme non fondé.  En effet, la lecture de la décision de la première commissaire démontre clairement que son étude de la crédibilité du travailleur s’est fondée sur un ensemble d’éléments graves, précis et concordants l’amenant à conclure qu’elle ne pouvait retenir les déclarations du travailleur.

[45]           Quant au dernier reproche adressé par le travailleur à sa requête initiale du 2 avril 2001 et portant sur l’absence de justification du rejet des rapports médicaux confirmant la relation entre la blessure et l’accident, la Commission des lésions professionnelles réitère que la première commissaire n’a pas retenu les déclarations du travailleur portant sur les événements qu’il narre comme étant à l’origine de sa lésion.  Dans un tel contexte, il est bien évident que le premier élément du raisonnement étant exclu, en l’occurrence l’événement, toute opinion sur les conséquences de celui-ci doivent être évacuées du débat.  Rappelons qu’il est toujours nécessaire de démontrer l’existence d’un accident avant de se prononcer sur la relation causale qui pourrait exister entre celui-ci et les lésions en découlant.

[46]           D’autre part, quant à la notion de «maladie professionnelle», il appartenait à la première commissaire d'apprécier la preuve sur ce sujet, ce qu’elle fait aux paragraphes 96 et 97 de sa décision.

[47]           Le travailleur ne bénéficiant pas de la présomption prévue à l’article 29 de la loi, la première commissaire rappelle que le travailleur avait le fardeau de la preuve de démontrer les conditions d’application de l’article 30, en l’occurrence qu’il était victime d’une maladie caractéristique de son travail ou reliée directement aux risques particuliers de celui-ci.

[48]           Sur ce sujet, la première commissaire conclut que la preuve médicale offerte était insuffisante.

[49]           La Commission des lésions professionnelles constate donc que la première commissaire a apprécié la preuve médicale qui lui était soumise et qui est d’ailleurs contenue au dossier ainsi qu’à son historique contenue à la section des faits.  Suite à cette appréciation, elle conclut que le fardeau de preuve n’a pas été rencontré.

[50]           La Commission des lésions professionnelles rappelle que le recours en révision ne constitue pas un appel déguisé et ne permet pas au tribunal de substituer son appréciation de cette preuve à celle retenue par la première commissaire.  Plutôt, l’on devait démontrer que la première commissaire, dans cette appréciation a commis une erreur manifeste et déterminante.

[51]           En conséquence, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur n’a pas démontré que les dispositions de l’article 429.56, paragraphe 3 de la loi s’appliquaient aux présentes.

[52]           En second lieu, est-ce que la nouvelle documentation médicale produite par le travailleur constitue un fait nouveau qui, s’il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente?

[53]           Sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles dans les affaires de Bourdon et Genfoot Inc.[5] ainsi que dans l’affaire Subaihi et Commission des lésions professionnelles[6] a déterminé les éléments essentiels permettant l’application du paragraphe 1 de l’article 429.56.

[54]           Les trois éléments essentiels sont :

a).        La découverte postérieure d’un fait nouveau;

b)         la non disponibilité de cet élément au moment où s’est tenue l’audition initiale;

c)         le caractère déterminant qu’aurait eu cet élément sur le sort du litige.

 

 

[55]           La lecture de la documentation médicale déposée par le travailleur révèle que le travailleur présenterait une dégénérescence avec possiblement quelques petites déchirures du labrum le tout dans le contexte des douleurs chroniques qu’il présente à l’épaule gauche depuis 1999.

[56]           De toute évidence, il s’agit d’une découverte médicale apparue suite à l’arthrographie IRM de l’épaule gauche effectuée le 2 août 2001 et confirmée par le protocole opératoire du Dr Lirette, du 11 septembre 2001.

[57]           Cette condition était inconnue lorsque la première commissaire a rendu sa décision, le 26 février 2001.

[58]           La Commission des lésions professionnelles souligne qu’il est essentiel de distinguer entre le contenant et le contenu lorsque l’on procède à l’application du paragraphe 1 de l’article 429.56 de la loi.

[59]           En effet, ce n’est pas les rapports médicaux qui constituent le fait nouveau mais bien ce qu’ils contiennent comme information.  Les rapports médicaux sont plutôt le véhicule qui rend disponible l’information qu’ils contiennent.

[60]           Ainsi, la vraie question est de savoir si la dégénérescence ainsi que les possibles déchirures du labrum sont une condition qui existait avant l’émission de la décision du 26 février 2001, condition qui fut découverte subséquemment.

[61]           Dans le présent cas, il faut rappeler qu’il existe un délai de deux ans entre l’apparition de la symptomatologie dont se plaint le travailleur à l’épaule gauche et l’identification de cette condition à laquelle on associe la découverte d’une bursite légère.

[62]           Prenant en considération l’âge du travailleur, la persistance de la symptomatologie subjective affectant son épaule gauche depuis l’été 1999 ainsi que la condition de dégénérescence impliquant un processus à long terme, la Commission des lésions professionnelles conclut qu’effectivement cette condition médicale constitue un fait nouveau, c’est-à-dire une condition qui, selon toute prababilité, existait avant l’émission de la décision contestée.  Hors cette condition était inconnue.

[63]           Le travailleur satisfait donc à la première condition.

[64]           En second lieu, qu’en est-il de la non disponibilité de cet élément au moment où s’est tenue l’audition initiale.

[65]           Sur ce sujet, la lecture du dossier nous permet de constater l’évolution des diagnostics posés dans ce dossier à partir de la plainte subjective du travailleur.  De toute évidence, cette condition intéressant le labrum n’est apparue que dans le contexte des rapports médicaux nouveaux que l’on dépose.

[66]           Bien plus, la disponibilité de cette preuve est tributaire de la chronicité des symptômes que présente le travailleur ainsi que des nouveaux examens médicaux impliquant une exploration chirurgicale de l’épaule pour en permettre l’identification.

[67]           La Commission des lésions professionnelles conclut donc que cet élément de preuve n’était pas disponible lors de l’audition initiale et que ce n’est que subséquemment que les parties en sont informées.

[68]           Finalement, est-ce que le fait nouveau découvert postérieurement à l’émission de la décision contestée a un caractère déterminant sur l’issue du litige s’il avait été connu en temps utile.

[69]           Sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles doit souligner qu’en regard de la notion d’«accident du travail», aussi bien quant à l’application de l’article 28 de la loi ainsi que de l’article 2, ce nouveau diagnostic n’aurait aucune incidence sur la décision de la première commissaire.  Comme on l’a vu, celle-ci fonde sa décision essentiellement sur la notion de crédibilité rejetant les déclarations du travailleur quant à une chute alléguée comme étant survenue le 14 juillet 1999.  Dès lors, la connaissance de ce nouveau diagnostic, n’a aucun impact sur la décision de la première commissaire et ne possède donc pas le caractère déterminant exigé pour l’application de l’article 429.56, paragraphe 1 de la loi.

 

[70]           Quant à la notion de «maladie professionnelle» on doit conclure  que les dispositions de l’article 29 ne peuvent s’appliquer puisque ce type de lésion n’est pas rapporté à l’annexe I.

[71]           Dans ce contexte, seules les dispositions de l’article 30 demeurent disponibles au travailleur pour démontrer qu’il est victime d’une maladie professionnelle eu égard à la définition retenue par l’article 2 de cette expression.

[72]           La Commission des lésions professionnelles doit constater que les documents produits, en soi-même, ne permettent pas d’établir que ce type de lésion est caractéristique du travail qu’effectuait le travailleur ou rattachable à un risque particulier que le travailleur encourt par l’exécution de ses fonctions.  Plutôt, il faut constater que le DrLirette, à son rapport médical du 29 juin 2001, se situe dans le contexte d’un accident survenu le 14 juillet 1999, accident qui n’est pas reconnu par la décision de la première commissaire.

[73]           De plus, le protocole opératoire réfère :

«à une dégénérescence avec possiblement quelques petites déchirures qui pouvaient possiblement faire l’interposition dans l’articulation.»

 

 

[74]           Ainsi, cette mention du Dr Lirette réfère un processus dégénératif dont l’origine est nullement expliquée.  De plus, l’existence de petites déchirures se situent dans un contexte de possibilité et non de probabilité par le chirurgien orthopédiste qui procède à l’opération.  Finalement, on identifie la présence d’une légère bursite.

[75]           L’ensemble de ces éléments ne nous permettent pas de conclure que la preuve offerte permet de déterminer, par voie d’application de la prépondérance de preuve, que le travailleur est victime d’une maladie professionnelle.

[76]           En conséquence, on se retrouve dans la même situation que la première commissaire s’est retrouvée sur ce sujet en ce que la preuve médicale offerte ne permet pas de conclure que le travailleur présenterait une maladie professionnelle.

[77]           La Commission des lésions professionnelles conclut donc qu’en regard de l’application de la notion de «maladie professionnelle», le fait nouveau devenu disponible postérieurement à la décision attaquée n’a pas le caractère déterminant s’il eut été connu en temps utile.

 

 

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête en révision déposée par monsieur Denis Chabot, le 2 avril 2001 telle qu’amendée suite à l’audience du 1er octobre 2001;

 

 

 

 

 

 

                PIERRE SIMARD

 

                    Commissaire

 

 

 

 

 

MARTIN & ASSOICÉS

(Me Pascale Bergeron)

1170, chemin St-Louis

Québec (Québec)

G1S 1E5

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 

GROUPE AST INC.

(Me Valérie Lizotte)

1400, boul. du Parc Techno # 105

Québec (Québec)

G1P 4R7

 

Représentant de la partie intéressée

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001

[2]          Produits Forestiers Donohue et Villeneuve, [1998] C.L.P. 733

                Franchellini et Sousa , [1998] C.L.P. 483

[3]          Vincenzo Fierimonte et Commission des lésions professionnelles et Béliveau, C. S. 500-05-045146-980, Juge Pierre R. Fournet;

                Poitras et Christina Canada Inc., C.L.P. 100370-62-9803, 07-03-2001, Mireille Zigby, commissaire;

[4]          Communauté urbaine de Montréalet Les Propriétés Guenter Kaussen et Ville de Westmount. [1987] R.J.Q. 2641 à 2648

[5]          C.A.L.P. 89786-62-9706, 15 juin 1999, P. Perron (1999] L.P. -68;

                [1999] C.L.P. 1096 (C.S.) 1106 à 1108.

[6]          C.S. Mtl. 500-05-056718-008, 28 avril 2001, Juge Normand;

AVIS :
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