Décision

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          COMMISSION D'APPEL EN MATIÈRE DE
          LÉSIONS PROFESSIONNELLES

     QUÉBEC    MONTRÉAL, le 6 janvier 1997

     DISTRICT D'APPEL   DEVANT LA COMMISSAIRE:    Louise Thibault
     DE MONTRÉAL

     RÉGION:  LAURENTIDES  AUDIENCE TENUE LE:        13 août 1996
     DOSSIER: 74150-64-9510

     DOSSIER CSST: 00164 8674À: Montréal
     DOSSIER BR:   6185 9205

          MADAME DENISE RIVARD
          355, 59e avenue
          Pointe-Calumet (Québec)
          J0N 1G4

                                PARTIE APPELANTE

          et

          IMPRIMERIES QUÉBÉCOR INC.
     

Direction des ressources humaines 5825, boul. Métropolitain Est St-Léonard (Québec) H1P 1X3 TECHNOLOGIES BABN INC.

Direction des ressources humaines 3000, boul. l'Assomption Montréal (Québec) H1N 3V5 PARTIES INTÉRESSÉES D É C I S I O N Le 31 octobre 1995, madame Denise Rivard (la travailleuse) en appelle à la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d'appel) d'une décision unanime du Bureau de révision de la région des Laurentides (le bureau de révision) du 16 octobre 1995 modifiant une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la Commission) du 7 décembre 1994 et déclarant que la travailleuse a droit à une indemnité réduite de remplacement du revenu correspondant à 1.87 $ par jour pour la période du 15 mars au 13 août 1989.

OBJET DE L'APPEL La travailleuse demande de corriger le calcul fait par la Commission de l'indemnité à laquelle elle a droit.

LES FAITS La travailleuse subit un accident le 30 novembre 1988, accident qui est reconnu comme lésion professionnelle par la Commission d'appel dans une décision du 15 juillet 1994.

À la suite de cette décision, la Commission verse à la travailleuse le 4 octobre 1994 un montant de 3 275.91 $ qu'elle détaille ainsi dans son avis de paiement: Période Nombre Indemnit Montant à de é payer jours journali ère 16-12-88 au 31-12- 16 33.99 $ 543.84 88 $ 01-01-89 au 31-01- 31 33.99 1 053.69 89 01-02-89 au 28-02- 28 33.99 951.72 89 01-03-89 au 14-03- 14 33.99 475.36 89 15-03-89 au 31-03- 17 1.65 28.05 89 01-04-89 au 30-04- 30 1.65 49.50 89 01-05-89 au 31-05- 31 1.65 51.15 89 01-06-89 au 30-06- 30 1.65 49.50 89 01-07-89 au 31-07- 31 1.65 51.15 89 01-08-89 au 13-08- 13 1.65 21.45 89 L'avis convient également les renseignements suivants: «INFORMATIONS: REVENU BRUT ANNUEL (MAX. ASS.: 48 000 $) 18 566,92$ REVENU NET RETENU POUR UN TRAVAILLEUR SANS CONJOINT OU AVEC CONJOINT NON A CHARGE: 0 PERSONNE(S) A CHARGE : 669,27$ (INDEMNITE ANNUELLE (90% DU REVENU NET RETENU) 602,34$ (INDEMNITE JOURNALIERE (1/365) 1,65$» Ce calcul est effectué sur la base des renseignements fournis par l'employeur qui indiquent notamment le nombre d'heures effectuées par la travailleuse et ses gains bruts.

La Commission rend également, le 6 octobre 1994, une décision à l'effet que la travailleuse est retournée au travail dans son emploi ou un emploi équivalent le 14 août 1989, qu'elle est donc capable de l'exercer à compter de cette date, date de consolidation de sa lésion, et qu'aucune indemnité de remplacement du revenu ne lui sera versée après le 13 août 1989.

Le 18 novembre 1994, le représentant de la travailleuse écrit à la Commission pour obtenir le mode de calcul de l'indemnité de la travailleuse, compte tenu que cette dernière effectuait un retour au travail à temps partiel. Il reçoit la réponse suivante: «Pour répondre à votre demande du 18 novembre dernier, voici les détails concernant le calcul de l'indemnité de remplacement du revenu à la suite d'un retour au travail à temps partiel.

Madame Denise Rivard a gagné 6007,51 $ brut pour la période du 15 mars 1989 au 13 août 1989, soit 21 semaines. Cela nous donne un salaire brut hebdomadaire de 286,07 $, soit 6007,51 $ 21 semaines.

Le système informatique ramène ce revenu sur une base annuelle à 14916,50 $.

Madame Rivard gagnait à l'époque un salaire brut annuel de 18566,92 $. Le système calcule 90% du salaire net de 18566,92$ auquel il soustrait 100% du net de 14916,50 $. Il arrive à une indemnité journalière de 1,65$. Madame Rivard n'avait aucune personne à charge en 1988.» (sic) La travailleuse demande la révision de cette décision le 15 décembre 1994.

Révisant le calcul fait par la Commission, le bureau de révision conclut dans sa décision du 11 octobre 1995, que l'indemnité réduite de remplacement du revenu doit être de 1.87 $ par jour pour la période du 15 mars au 13 août 1989.

La travailleuse dépose à l'audience sa copie annotée du relevé des heures qu'elle a travaillées pour la période en cause.

Ces feuilles de temps indiquent que sa semaine habituelle de travail comporte 4 jours de 7.25 heures et 1 jour de 7.00 heures.

Pendant la période concernée, elle a travaillé plusieurs journées à raison de 7 heures, d'autres à raison de 5 heures. Elle est absente pendant la semaine du 16 avril 1989. Elle est en vacances pendant la période du 16 au 29 juillet 1989.

Le dossier démontre que son médecin la déclare apte à retourner à un travail allégé à plein temps à compter du 15 mars 1989, mais qu'il diminue son temps de travail à trois jours par semaine à compter du 23 mars 1989 et la met en arrêt de travail complet le 17 avril 1989. Le 21 avril 1989, il la déclare apte à travailler à demi-temps, toujours à des tâches allégées.

ARGUMENTATION DES PARTIES Le représentant du travailleur plaide que lorsque la travailleuse retourne au travail le 15 mars 1989, elle ne reprend pas son travail régulier mais un travail allégé. Pendant les heures travaillées, l'employeur a rémunéré la travailleuse à son taux horaire habituel. Cependant, lorsqu'elle n'était pas au travail, la Commission devait lui verser une pleine indemnité de 33.99 $ pour chaque journée de la semaine. Pour les jours où il y a eu une visite médicale ou des traitements, l'employeur devait lui payer son salaire, selon les modalités établies à l'article 61 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., chapitre A-3.001) (la loi) et la Commission devait lui rembourser ce salaire. Le fait que la travailleuse s'administre elle-même les traitements ne change rien à son droit d'être indemnisée.

Il invoque la décision Ministère du Loisir, de la chasse et de la pêche et Jodoin, [1993] C.A.L.P. 881 , les mêmes règles devant, selon lui, s'appliquer à l'assignation temporaire et au retour au travail progressif.

La représentante de l'employeur se dit d'accord avec le fait que la travailleuse devait recevoir une pleine indemnité pour sa période d'arrêt de travail dans la semaine du 16 avril 1989.

Elle souligne aussi que le bureau de révision, dans son calcul, n'a pas tenu compte du fait que le taux horaire payable à la travailleuse a été augmenté en 1989 et se situait à 10.30 $.

Elle souligne que la travailleuse n'a pas fourni d'explication sur son utilisation du temps pour les journées où elle prétend pouvoir être rémunérée conformément à l'article 61 de la loi et que cet article ne peut donc s'appliquer.

Les parties conviennent que lorsque la travailleuse est retournée à des travaux légers, il ne s'agissait pas d'une assignation temporaire au sens des articles 179 et ss. de la loi, l'employeur n'ayant pas encore mis en place sa procédure d'assignation temporaire.

MOTIFS DE LA DÉCISION La Commission d'appel doit décider si le calcul des sommes à verser à la travailleuse a été correctement fait.

Pendant la période du 15 mars au 13 août 1989, la travailleuse ne retourne pas à son emploi régulier mais fait des travaux légers.

Pendant cette période, elle perçoit de son employeur, pour le temps travaillé, un salaire calculé au taux horaire qu'elle avait dans son emploi habituel. Ceci n'est pas remis en cause.

Pour les périodes où elle ne travaille pas, la Commission lui attribue une indemnité quotidienne calculée en soustrayant du revenu annuel qu'elle retirait de l'emploi qu'elle exerçait au moment où elle a subi sa lésion professionnelle le revenu qu'elle tire de son nouvel emploi, conformément à l'article 52 de la loi.

Toutefois, le bureau de révision a révisé le calcul fait par la Commission car celle-ci a ramené le revenu perçu pendant la période en cause sur une base annuelle pour ensuite le déduire du revenu de l'emploi pré-lésionnel. Le bureau de révision, pour sa part, fait le calcul pour la période en cause. Il établit que pendant cette période, la travailleuse aurait reçu une indemnité de 5 166.48 $, soit 153 jours à raison de 33.99 $ par jour. Le revenu net gagné pendant cette période a été de 4 879.65 $. Elle a donc gagné 286.93 $ de moins que l'indemnité à laquelle elle aurait eu droit pendant cette période, ce qui, réparti sur 153 jours, donne une indemnité quotidienne de 1.87 $.

La Commission d'appel est d'avis que la méthode appliquée par la Commission telle que corrigée par le bureau de révision est correcte. La travailleuse a, lors de son retour au travail le 13 mars 1989, occupé un nouvel emploi au sens de l'article 52 de la loi. La Commission devait donc tenir compte du revenu qu'elle en tirait, de la façon déterminée par le bureau de révision.

Cependant, une erreur de calcul s'est glissée dans la décision du bureau de révision: l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle aurait eu droit la travailleuse si elle n'avait pas travaillé est de 5 200.47 $ (153 x 33.99 $) et non de 5 166.48 $.

En déduisant la revenu perçu par la travailleuse (5 200.47 $ - 4 879.65 $) = 320.82 $, on obtient une indemnité quotidienne de 2.10 $ plutôt que 1.87 $.

La représentante de l'employeur dit que la Commission aurait dû tenir compte du fait que le taux horaire de la travailleuse est passé à 10.30 $ à compter du 1er janvier 1989. La Commission d'appel n'est pas de cet avis. L'indemnité de remplacement du revenu à laquelle la travailleuse a droit selon l'article 45 est calculée sur la base du salaire qu'elle faisait au moment où elle a subi sa lésion professionnelle. La Commission n'a pas l'obligation de réévaluer le revenu si le taux horaire des employés de l'entreprise est augmenté par la suite: Fortier et Hôpital St-Julien, [1991] C.A.L.P. 1 .

Pendant qu'elle était affectée à des travaux légers, la travailleuse a subi un arrêt de travail de cinq jours entre le 18 et le 22 avril 1989. Pour cette période, la Commission d'appel est d'avis qu'elle aurait dû recevoir une pleine indemnité de 33.99 $. D'après la preuve faite devant la Commission d'appel, il semble que ces journées auraient été payées à la travailleuse en puisant dans sa banque de congés-maladie. Elle a donc droit au paiement d'une somme de 169.95 $ à ce titre.

Quant à la prétention du représentant de la travailleuse à l'effet qu'elle aurait dû être payée par l'employeur pour les périodes où elle a eu des visites médicales ou a reçu des traitements, la Commission d'appel ne peut lui donner raison qu'en partie.

L'article 61 de la loi se lit comme suit: 61. Lorsqu'un travailleur victime d'une lésion professionnelle est de retour au travail, son employeur lui verse son salaire net pour chaque jour où ce travailleur doit s'absenter de son travail pour recevoir des soins ou subir des examens médicaux relativement à sa lésion ou pour accomplir une activité dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation.

La Commission rembourse à l'employeur, sur demande, le salaire qu'il a payé en vertu du premier alinéa, sauf lorsque le travailleur s'est absenté de son travail pour subir un examen médical requis par son employeur.

Pour qu'il puisse s'appliquer, la travailleuse doit prouver qu'elle devait s'absenter de son travail pour recevoir des soins ou subir des examens médicaux, alors que, n'eût été de ceux-ci, elle aurait travaillé. Or, la travailleuse n'a pas fait cette preuve. Elle a travaillé un nombre d'heures réduites ou un nombre de jours moindre parce qu'elle suivait les prescriptions de son médecin traitant. Le représentant de la travailleuse ayant argumenté qu'il y avait correspondance entre les périodes non travaillées et les visites médicales, la Commission d'appel a vérifié les données avec attention et n'a pu trouver qu'une date où il apparaît que la travailleuse a dû travailler cinq heures plutôt que sept et a eu une visite médicale la même journée, soit le 23 mars 1989. L'employeur aurait dû verser à la travailleuse son salaire horaire pour ces deux heures et se faire rembourser par la Commission. Cependant, il appartient à la travailleuse de réclamer cette somme de son employeur, la Commission n'était tenue que de rembourser à l'employeur sur demande. Quant aux autres journées, elles ont été travaillées selon l'horaire convenu et rien n'indique que la travailleuse a dû quitter son travail pour une visite médicale.

La Commission d'appel ajoute qu'elle ne voit aucune contradiction entre la décision du bureau de révision et celle de la Commission d'appel dans Ministère du loisir, de la chasse et de la pêche et Jodoin, citée par le représentant de la travailleuse. Dans cette affaire, le litige portait sur la question de savoir si l'employeur était tenu, en vertu des articles 179 et 180 de la loi, de verser au travailleur son plein salaire même si une assignation temporaire n'était qu'à temps partiel ou s'il n'avait l'obligation de le payer que pour les heures travaillées. La Commission d'appel a décidé que l'obligation de l'employeur ne s'étendait qu'aux heures effectivement travaillées et que pour le reste du temps, le travailleur devait être considéré comme incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion et qu'il avait alors droit à l'indemnité de remplacement du revenu en vertu de l'article 45 de la loi. Cependant, la décision ne porte aucunement sur les modalités de calcul des sommes dues par la Commission.

POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION D'APPEL EN MATIÈRE DE LÉSIONS PROFESSIONNELLES: ACCUEILLE en partie l'appel de la travailleuse, madame Denise Rivard; INFIRME en partie la décision du 7 décembre 1994 du Bureau de révision de la région des Laurentides; DÉCLARE que la travailleuse a droit à une indemnité de remplacement du revenu de 2.10 $ par jour pour les périodes du 13 mars au 17 avril 1989 et du 23 avril au 13 août 1989; DÉCLARE que la travailleuse a droit à une indemnité de remplacement du revenu de 33.99 $ par jour pour la période du 18 au 22 avril 1989; RETOURNE le dossier à la Commission de la santé et de la sécurité du travail pour qu'elle corrige ses calculs en conséquence et qu'elle paie à la travailleuse les sommes qui lui sont dues.

Louise Thibault Commissaire S.C.E.P. (local 145) (Me Michel Handfield) 4555, boul. Métropolitain Est Bureau 201 Saint-Léonard (Québec) H1R 1Z4 Représentant de la partie appelante

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.