Union des consommateurs c. Air Canada
| 2022 QCCS 4254 | |||||
COUR SUPÉRIEURE | ||||||
(Action collective) | ||||||
CANADA | ||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | ||||||
DISTRICT DE | montréal | |||||
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No : | 500-06-000513-107 | |||||
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DATE : | Le 10 novembre 2022 | |||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE | L’HONORABLE | karen m. rogers, J.C.S. | ||||
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UNION DES CONSOMMATEURS | ||||||
Demanderesse | ||||||
et | ||||||
MICHAEL SILAS | ||||||
Personne désignée | ||||||
c. | ||||||
AIR CANADA | ||||||
Défenderesse | ||||||
et | ||||||
PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC | ||||||
Mis en cause | ||||||
et | ||||||
LA PRÉSIDENTE DE L’OFFICE DE LA PROTECTION DU CONSOMMATEUR | ||||||
Intervenante | ||||||
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JUGEMENT au mérite sur action collective | ||||||
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APERÇU
[1] Le 7 mars 2014, la Cour d’appel du Québec autorise l’exercice d’une action collective contre Air Canada par l’Union des Consommateurs (l’Union), la représentante des personnes physiques suivantes :
Tout consommateur au sens de la Loi sur la protection du consommateur, résidant au Québec au moment de l'achat, ayant acheté un titre de transport aérien d'Air Canada, entre le 30 juin 2010 et le 8 février 2012, par l'intermédiaire de son site internet et ayant payé un prix supérieur à celui qu'Air Canada annonce sur son site internet (à la première étape), exclusion faite de la taxe sur les produits et services (TPS), de la taxe de vente provinciale (TVQ) et des droits exigibles en vertu d'une loi fédérale ou provinciale lorsque, en vertu de cette loi, ces droits doivent être perçus directement du consommateur pour être remis à une autorité publique, de même que des frais optionnels, et ce, peu importe que le transport aérien ait été effectué par Air Canada, Jazz, Rapidair, un transporteur aérien membre de Star Alliance ou par un autre transporteur aérien avec ou sans partage de codes, notamment :
(« Groupe » ou le ou les « Membre(s) du Groupe »)
[2] Michael Silas est la personne désignée du Groupe aux fins de ce litige.
[3] L’Union recherche une réduction du prix payé par les Membres du Groupe, équivalente à la somme de certaines taxes, charges, surcharges et certains frais exigés selon elle, sans droit par Air Canada lors de l’achat de leur titre de transport aérien (« titre de transport ») entre le 30 juin 2010 et le 8 février 2012 (la « Période »).
[4] Elle recherche aussi une condamnation pour dommages-intérêts punitifs. En effet, l’Union reproche à Air Canada d’avoir systématiquement exigé un prix supérieur à celui initialement annoncé sur son site web (« Site Web ») durant la Période, le tout contrairement aux exigences de l’article 224 c) de la Loi sur la protection du consommateur[1] (« la Loi ») ainsi que celles prévues à l’article 91.8 du Règlement d’application de la Loi sur la protection du consommateur du Québec[2] (le « Règlement »).
[5] À partir de son Site Web, Air Canada offre, vend et émet des titres de transport aérien pour des vols exploités par elle ainsi que par d’autres transporteurs aériens.[3]
[6] Or, le Site Web ne précise pas, dès la première étape de la navigation, le montant des taxes, frais, charges, et surcharges compris dans le prix ultimement exigé à l’achat du titre de transport sélectionné. L’Union soutient que cette pratique contrevient à l’article 224 c)[4] et que, partant, elle a droit au remboursement des sommes illégalement exigées et payées.
[7] L’Union soutient également que le jugement d’autorisation de la Cour d’appel (« Jugement CA ») lie le Tribunal en vertu de la règle du stare decisis dit vertical, de sorte qu’il doit nécessairement conclure qu’Air Canada a contrevenu à l’article 224 c) durant la Période.
[8] À la suite d’une modification à la demande autorisée lors de l’instruction[5], l’Union réclame en plus des dommages punitifs totalisant 10 000 000 $, répartis entre les Membres du Groupe. En outre, au cours de l’instruction, l’Union reconnait que la taxe de vente harmonisée (TVH)[6] n’a pas à être incluse dans le « prix annoncé » en vertu de l’article 224 c), à l’instar de la TVQ, de la TPS et des droits qui doivent être payés pour la sécurité des passagers.
[9] Ainsi donc, les conclusions recherchées par l’Union pour le Groupe se lisent maintenant comme suit :
ACCUEILLIR l'action collective de l'Union et les Membres du Groupe contre la défenderesse ;
CONDAMNER la défenderesse à payer à Michael Silas et à chacun des Membres du Groupe les sommes qu'ils ont déboursées pour l'obtention de leurs titres de transport aérien et qui n'étaient pas comprises dans le prix annoncé à l'exclusion de la taxe de vente du Québec (la « TVQ »), de la taxe sur les produits et services du Canada (la « TPS »), de la taxe de vente harmonisée (la « TVH »), des droits qu'Air Canada est tenue de percevoir directement des consommateurs en vertu d'une loi fédérale ou provinciale pour en faire la remise à une autorité publique et du prix des options ;
ORDONNER que la condamnation qui précède fasse l'objet d'un recouvrement collectif ;
CONDAMNER la défenderesse à payer à Michael Silas et à chacun des Membres du Groupe une somme globale de 10 000 000 $, à titre de dommages-intérêts punitifs, avec intérêts et indemnité additionnelle à compter de la date du jugement à intervenir et ORDONNER que cette condamnation fasse l’objet d’un recouvrement collectif ;
CONDAMNER la défenderesse aux intérêts et à l'indemnité additionnelle prévus par le Code civil du Québec sur la totalité des montants susdits et ORDONNER que cette condamnation fasse l'objet d'un recouvrement collectif ;
CONVOQUER les parties à une audience pour que le Tribunal statue, sur requête de la demanderesse, sur la procédure d’exécution et de gestion des réclamations des Membres du Groupe et sur les avis aux membres, et ce, dans les meilleurs délais suivant la date à laquelle le jugement accueillant l’action collective acquiert l’autorité de la chose jugée ;
RENDRE toute autre ordonnance que le tribunal pourra déterminer et qui serait dans l'intérêt des Membres du Groupe ;
LE TOUT avec dépens, y compris les frais d'avis, les frais de gestion des réclamations et, s'il en est, les frais d'experts y compris les frais d'experts requis pour établir le montant des ordonnances de recouvrement collectif.
[Les soulignements sont ceux du Tribunal et correspondent aux modifications]
[10] Air Canada conteste l’action collective.
[11] Dans un premier temps, elle plaide que la doctrine de l’exclusivité des compétences rend l’article 224 c) constitutionnellement inapplicable à la vente de titres de transport par le biais de son Site Web.
[12] Subsidiairement, elle avance que la doctrine de la prépondérance fédérale rend l’article 224 c) également constitutionnellement inopérant dans le contexte législatif et factuel qui prévalait durant la Période puisqu’il entrave la réalisation de l’objet d’une loi fédérale.
[13] Si le Tribunal rejette ses arguments constitutionnels, et toujours de façon subsidiaire, Air Canada soutient qu’elle n’a pas contrevenu à la Loi puisque :
i) Quant à l’applicabilité de l’article 224 c)
La nature interactive, évolutive et intuitive du processus d’achat de titres de transport sur son Site Web, aboutit à un seul et unique processus au terme duquel un seul prix est annoncé aux utilisateurs, soit le montant qu’ils devront ultimement payer en considération de l’achat du titre de transport choisi.
Par ailleurs, même si le Tribunal conclut que plus d’un prix est annoncé durant le processus auquel l’utilisateur se prête, l’application du test de « l’impression générale » de l’article 218 mène à la conclusion qu’Air Canada n’a pas enfreint la Loi.
ii) Quant au recours choisi
Si le Tribunal retient qu’Air Canada enfreint la Loi, elle soutient, toujours subsidiairement, que :
Les Membres du Groupe ne peuvent demander la réduction de leurs obligations contractuelles puisqu’ils n’ont pas subi de préjudice. En plus, Air Canada a rempli toutes ses obligations corrélatives à leur égard.
Outre les dommages punitifs réclamés, aucun autre recours prévu à l’article 272 n’est possible en l’espèce sauf, théoriquement, le recours en dommages-intérêts compensatoires. Or, la preuve est silencieuse à l’égard d’un préjudice subi par les Membres du Groupe en raison de la « pratique interdite ».
De plus, plusieurs de ces taxes, frais, charges et surcharges constituent des exemptions autorisées au prix annoncé, comme défini dans l’article 224 c) et le Règlement et ne devaient donc pas être inclus dans le « prix annoncé ».
iii) Quant aux dommages punitifs
Aucun dommage punitif ne devrait être accordé et si certains le sont, le montant réclamé est exagéré.
iv) Quant au recouvrement
Le recouvrement collectif n’est pas approprié en l’espèce.
[14] Pour l’essentiel, les faits ne sont pas contestés.
[15] Aucun Membre du Groupe n’a témoigné lors de l’instruction.
[16] Outre les pièces produites par les parties, admises de part et d’autre aux fins de production[7], la preuve comprend essentiellement :
a) L’interrogatoire au préalable de M. Silas[8] ;
b) L’interrogatoire au préalable de la directrice de l’Union, Mme France Latreille[9] ;
c) Les déclarations sous serment, l’interrogatoire au préalable d’un représentant d’Air Canada et le témoignage à l’instruction de M. Mark Oxner, le « Senior director of Air Canada’s division passenger services system transformation »[10] ; et
d) Les déclarations sous serment, l’interrogatoire au préalable d’un représentant d’Air Canada et le témoignage à l’instruction de Mme Marie-Noël Fredette, première directrice d’Air Canada, responsable notamment des taxes nationales et internationales à la consommation.[11]
[17] Deux intervenants s’invitent au débat : le Procureur général du Québec (« PGQ ») intervient au dossier pour les questions constitutionnelles et la Présidente de l’Office de la protection du consommateur pour soutenir la position avancée par l’Union quant à l’interprétation de la Loi.
[18] Air Canada offre des services de transport aérien interprovinciaux et internationaux à des passagers, à partir de divers endroits, dont notamment les principaux aéroports de la province de Québec, avec ou sans correspondance, vers de nombreuses destinations nationales et internationales.
[19] Le transport aérien national et international est une activité complexe et hautement réglementée dans tous les pays. Les gouvernements et certaines autres autorités à travers le monde imposent des taxes, frais et charges aux passagers (Collectivement « Charges ») dans leurs pays respectifs en raison d’un départ, d’une arrivée ou d’une escale en aéronef commercial afin de financer les divers coûts dont notamment ceux liés à la sécurité aérienne[12], la santé[13], le développement local[14], l’environnement[15] ou des visées sociales[16].
[20] Il existe aussi de nombreux types de frais aéroportuaires et autres surcharges exigés des passagers.[17] (Collectivement « Surcharges »).
[21] La nature et le montant de ces Charges et Surcharges peuvent varier en fonction de différents facteurs incluant la destination du vol, le nombre d’escales et la classe de service. Le montant peut être forfaitaire, un pourcentage d’un autre montant ou une combinaison des deux.
[22] À titre de transporteur aérien international, Air Canada doit coopérer avec les autres transporteurs aériens internationaux et participer à la coordination de leurs opérations respectives par l’entremise de l’Association du transport aérien international (IATA) notamment pour faciliter la perception et la remise de manière ordonnée et efficace des Charges et Surcharges, de sorte que les passagers n’ont pas à les acquitter séparément et postérieurement à l’achat du titre de transport.
[23] Air Canada peut exiger des passagers le paiement des Surcharges autorisées par l’Office ou exigées d’une autorité aéroportuaire lors de la vente d’un titre de transport.[18]
[24] Ces Charges et Surcharges s’ajoutent aux tarifs applicables aux vols intérieurs et internationaux d’Air Canada.[19]
[25] Le 30 juin 2010, les modifications à l’article 224 c) et à l’article 91.8 du Règlement, entrent en vigueur (les « Amendements »). Les extraits pertinents aux fins de ce dossier sont les suivants :
Article 224 :
Pratique interdite sur le prix.
224. Aucun commerçant, fabricant ou publicitaire ne peut, par quelque moyen que ce soit :
[…]
c) [ ] exiger pour un bien ou un service un prix supérieur à celui qui est annoncé.
Aux fins du paragraphe c) du premier alinéa, le prix annoncé doit comprendre le total des sommes que le consommateur devra débourser pour l’obtention du bien ou du service. Toutefois, ce prix peut ne pas comprendre la taxe de vente du Québec ni la taxe sur les produits et services du Canada. Le prix annoncé doit ressortir de façon plus évidente que les sommes dont il est composé.
[Emphase ajoutée]
Article 91.8 du Règlement :
91.8. Le commerçant, le fabricant ou le publicitaire est exempté de l'obligation, découlant du troisième alinéa de l'article 224 de la Loi, d'inclure dans le prix annoncé les droits exigibles en vertu d'une loi fédérale ou provinciale lorsque, en vertu de cette loi, ces droits doivent être perçus directement du consommateur pour être remis à une autorité publique.
[Emphase ajoutée]
[26] Ces articles se retrouvent au titre II de la Loi intitulé « Pratiques de commerce », ainsi que l’article 218 qui énonce :
218. Pour déterminer si une représentation constitue une pratique interdite, il faut tenir compte de l’impression générale qu’elle donne et, s’il y a lieu, du sens littéral des termes qui y sont employés.
[27] Le 8 février 2012, Air Canada modifie le système de réservation en ligne.[20] L’Union ne prétend pas que le système modifié contrevient aux dispositions de l’article 224 c).
[28] Pour l’achat de titres de transport en ligne, Air Canada opère un seul Site Web transactionnel au Canada, accessible en français et en anglais, selon le choix de l’utilisateur.[21]
[29] Deux semaines après l’entrée en vigueur des Amendements, M. Silas, de son plein gré, sans aucune incitation, sollicitation ou publicité de la part d’Air Canada, se rend sur le Site Web, à la section des réservations en ligne dans le but précis d’y acheter des titres de transport pour un voyage aller-retour entre Montréal et Fort Lauderdale à des fins personnelles.[22]
[30] Il explique ainsi la démarche qui le mène au Site Web: « […] you go online and you look at an airline rate, you open another browser and look at another airline rate. You shop like that back and forth for the cheapest rate […] ».[23]
[31] Ultimement, M. Silas achète ses titres de transport sur le Site Web, selon le système de réservation et d’achat offert par Air Canada.
[32] En fait, tous les Membres du Groupe ont acheté leurs titres de transport de la même façon pendant la Période et les ont utilisés.
[34] En accédant au Site Web, il doit d’abord inscrire sa ville de départ (Montréal), sa destination (Fort Lauderdale) et ses dates de voyage. Une fois complétée, cette démarche génère une page intitulée « SELECT FLIGHTS » affichant plusieurs choix de vols avec différentes options tarifaires, selon les dates de départ et d’arrivée, les heures de départ et d’arrivée, les escales et, le cas échéant, leurs lieux (« Première étape »).[24]
[35] À la Première étape, M. Silas sélectionne des vols sans escale selon l’option tarifaire Tango Plus,[25] chacun au tarif annoncé de 149 $, qui ne comprend aucune des Charges ou Surcharges dont les paiements lui seront exigés à l’achat des titres de transport sélectionnés.
[36] Cependant, dès la Première étape l’avertissement suivant apparait :
All fares displayed on this page are in Canadian dollars, per person for each way of travel, and do not include taxes, fees or some other charges. Learn more...
[Reproduit tel quel par le Tribunal]
[37] À cette étape, M. Silas ne choisit pas l’option lui permettant d’en connaître plus sur les Charges et Surcharges éventuellement exigibles lors de l’achat de son titre de transport.
[38] En fait, une fois le vol sélectionné, il passe à la deuxième étape, celle du « Review Flight Details » où les informations relatives aux vols sélectionnés y apparaissent, incluant le paiement total qui lui sera exigé lors de l’achat des titres de transport (« Deuxième étape »).[26]
[39] À cette étape, il est toujours impossible d’acheter un titre transport.
[40] Un avertissement apparait également à cette page, soit :
The grand total shown includes all taxes, fees, fuel surcharges where applicable and other charges. Fares shown are the best available uniform rates at this time for the number of tickets requested and the selected travel times and dates. Fares are not guaranteed until you purchase your ticket. [27]
[41] Dans le cas de M. Silas, il existe un écart de 124,46 $ entre le montant qui apparaît à la Première étape et celui affiché à la Deuxième étape.
[42] À la Deuxième étape, M. Silas a l’option d’appuyer sur l’hyperlien « VIEW QUOTE DETAILS » afin de consulter la ventilation du prix annoncé ou de confirmer qu’il accepte de passer à l’étape suivante pour réserver et acheter les titres de transport sélectionnés. Puisque les informations financières comprises à cette étape ne l’intéressent pas, il passe directement à la prochaine étape.[28]
[43] Il passe donc directement à la page intitulée « Billing & delivery information » (« Troisième étape »). On l’invite alors à revoir son itinéraire et, si tout lui convient, à fournir les informations nécessaires pour procéder au paiement des titres de transport sélectionnés.[29]
[44] Une fois les titres de transport achetés, M. Silas est dirigé vers une page qui confirme sa réservation et précise tous les détails quant aux titres de transport achetés.[30]
[45] Les titres de transport payés lui sont acheminés électroniquement avec un résumé détaillant les éléments inclus dans le prix exigé.[31]
[46] Le Jugement CA identifie trois principales questions en litige, reproduites à l’Annexe A du présent jugement.
[47] Le Tribunal adaptera le libellé de certaines questions et répondra à des sous-questions afin de tenir compte des modifications apportées lors de l’instruction.
[48] Par ailleurs, compte tenu, d’une part, du cadre d’analyse de la doctrine de l’exclusivité des compétences qui s’intéresse aux effets de l’application des règles de droit contestées[32], et d’autre part du devoir de retenue judiciaire du Tribunal[33] qui l’oblige à ne décider d’une question constitutionnelle que si nécessaire, le Tribunal déterminera tout d’abord si Air Canada a contrevenu ou non à la Loi. Dans l’affirmative, il se penchera ensuite sur les questions constitutionnelles soumises.
[49] Les questions communes actualisées sont donc :
3.1 Les Membres du Groupe ont-ils droit de réclamer d’Air Canada la réduction de leurs obligations ?
3.2 Le cas échéant, est-ce que cette réduction est nécessairement équivalente au remboursement des Charges et Surcharges dont les montants sont annoncés pour la première fois à la Deuxième étape et qui sont exigibles lors de l’achat des titres de transport sélectionnés ?
5 Le cas échéant, les Membres du Groupe ont-ils droit de réclamer d’Air Canada les intérêts et l’indemnité additionnelle prévus par le Code civil du Québec sur les montants susdits, à compter de la signification de la demande pour autorisation ?
6 Si des dommages-intérêts sont accordés, doivent-ils faire l’objet d’un recouvrement collectif ?
[50] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut que les paramètres établis dans le Jugement CA, bien que n’ayant pas l’effet de chose jugée, lient celui-ci par l’effet de la règle du stares decisis vertical, notamment :
Le montant annoncé à la Première étape est un « prix annoncé » au sens de l’article 224 c); et
Le test de « l’impression générale » du consommateur qui navigue sur le Site Web n’est pas pertinent à l’analyse de la nature « interdite » d’une pratique en vertu de l’article 224 c).
[51] Le Tribunal confirme donc que le montant affiché pendant la Période à la Première étape de la navigation sur le Site Web est un « prix annoncé », inférieur au prix ultimement exigé lors de l’achat des titres de transport sélectionnés par les Membres du Groupe.
[52] De ce fait, ayant annoncé un prix inférieur à celui ultimement exigé, Air Canada contrevient à l’article 224 c), et ce, sans égard au test de l’impression générale des consommateurs, prévu à l’article 218.
[53] Le Jugement CA infirme une décision de la Cour supérieure et autorise l’exercice de la présente action collective contre Air Canada. Pour conclure ainsi, la Cour d’appel intervient pour substituer son opinion à celle du juge de première instance sur certaines des questions portant sur la violation de l’article 224 c) par Air Canada.
[54] Les règles qui régissent l’étape de l’autorisation d’une action collective sont particulières en ce que les faits allégués dans la demande d’autorisation sont tenus pour avérés et le demandeur n’a qu’à démontrer une « cause défendable ». En fait, il est bien reconnu que l’exigence de l’autorisation judiciaire n’est qu’un simple exercice de filtrage pour écarter les demandes insoutenables.[34]
[55] C’est pourquoi un jugement autorisant une action collective ne constitue pas chose jugée sur les questions en litige, leur détermination ultime étant réservée au juge du fond qui entendra toute la preuve.[35]
[56] Considérant le but et le contexte procédural du Jugement CA, les parties et le Tribunal sont d’accord qu’un jugement autorisant une action collective ne peut lier le juge du fond par l’effet du principe de la chose jugée.
[57] Dans R. c. Lapointe[36], la Cour d’appel rappelle que la règle du stare decisis vertical « oblige un tribunal à suivre les précédents d’une juridiction supérieure. »[37]. Elle trouve application lorsque les conditions suivantes sont réunies :
[59] Elle reproche néanmoins à la Cour d’appel d’avoir omis de suivre les enseignements de la Cour Suprême du Canada dans Richard c. Time[40] qui, selon elle, confirme l’application du test de l’impression générale de l’article 218 à l’ensemble des dispositions du titre II de la Loi, incluant l’article 224 c) :
[44] Un des objectifs principaux du titre II de la L.p.c. est la protection du consommateur contre les représentations fausses ou trompeuses. Un nombre important de pratiques qu’il interdit sont reliées à la véracité de l’information transmise au consommateur. L’article 219 L.p.c. exprime de façon particulièrement nette cet objectif. En effet, il interdit de façon générale à tout commerçant, fabricant ou publicitaire, de faire par quelque moyen que ce soit, une représentation fausse ou trompeuse à un consommateur. En effet, la notion de « représentation » est définie à l’art. 216 L.p.c. comme comprenant une affirmation, un comportement ou une omission. Des interdictions relatives à certaines représentations spécifiques (art. 220 à 251 L.p.c.) complètent l’art. 219 L.p.c.
[45] L’article 218 L.p.c. encadre l’application de toutes ces dispositions du titre II. Il expose la méthode prescrite pour déterminer si une représentation doit être considérée comme une pratique interdite […].
[Nos soulignements]
[61] Dans Time, la Cour suprême confirme que le test de « l’impression générale » prévu à l’article 218 est celui de l’impression du consommateur « crédule et inexpérimenté » (test de l’impression générale). Dans la mesure où ce dernier n’est pas induit en erreur par des représentations, le Tribunal doit conclure à l’absence de pratique interdite en vertu du Titre II.
[63] Le Jugement CA juge que la détermination de la nature interdite de la pratique visée par l’article 224 c) doit faire l’objet d’une analyse objective, ce qui exclut le test de l’impression générale.
[64] Alors que le Jugement CA s’appuie sur Time pour décider d’une autre question de droit, ce n’est pas le cas lors de son analyse concernant l’application du test de l’impression générale.[41]
[65] Il est important de souligner que Time porte notamment sur la détermination de la nature « fausse ou trompeuse » d’une représentation d’un commerçant à un consommateur en contravention de l’article 219.
[66] La Cour d’appel distingue les cas de représentations fausses ou trompeuses de certains autres cas où elle est d’opinion que la nature de la pratique « interdite » doit être déterminée selon un test objectif. Elle s’exprime ainsi :
[71] L'article 218 de la L.P.C. concerne précisément le cas d'une représentation faite par le commerçant aux consommateurs. Pour évaluer le caractère faux ou trompeur d'une représentation et, par conséquent, établir si elle constitue une pratique interdite, il faut tenir compte de l'impression générale qu'elle donne à un consommateur crédule et inexpérimenté et, s'il y a lieu, du sens littéral des termes qui y sont employés.
[72] Par contre, certaines pratiques de commerce, par exemple le fait pour un commerçant de refuser d'exécuter une garantie sous prétexte que le document qui la constate ne lui est pas parvenu, doivent être analysées de façon objective. II s'agit de déterminer si la pratique interdite a été commise.
[73] C'est le cas en ce qui concerne l'interdiction d'annoncer un prix incomplet ou fragmentaire. C'est de façon objective que la question de la contravention se pose et nul n'est besoin d'évaluer si le consommateur a bien compris de quoi est composé le véritable prix ni même s'il a été induit en erreur. L'argument de l'intimée selon lequel un consommateur, même crédule et inexpérimenté, aurait compris que le véritable prix est celui qu'il a pu lire à la deuxième étape n'est donc pas pertinent.
[Références omises]
[67] En raison du libellé du texte législatif en cause et de l’intention qu’il sous-tend, la Cour d’appel écarte l’application du test de l’impression générale de l’analyse à une contravention à l’article 224 c). Selon elle, dès que la pratique interdite est démontrée, il y a contravention à la Loi, et ce, sans égard au test de l’impression générale.
[68] Bien que Time confirme, de façon générale, l’application du test de l’impression générale aux dispositions du titre II de la Loi, elle ne se prononce pas sur l’application de ce test dans le cadre particulier de l’article 224 c). Le texte législatif à l’étude par la Cour Suprême diffère de celui analysé dans le Jugement CA de sorte que Time ne crée pas de précédent sur la portée de l’analyse à laquelle un tribunal doit se prêter dans le cadre de la détermination d’une contravention de l’article 224 c).
[69] La première condition formulée dans R. c. Lapointe est donc remplie.
[70] Selon Air Canada, en raison du cadre d’analyse particulier d’une demande en autorisation d’intenter une action collective, le Jugement CA ne peut lier le juge du fond que ce soit suivant le principe de la chose jugée ou de la règle du stare decisis vertical.
[71] À l’étape de l’autorisation, le rôle du Tribunal consiste à procéder à un examen sommaire des conditions posées par l’article 575 du Code de procédure civile (« C.p.c. »)[42] qui se lit comme suit :
575. Le tribunal autorise l’exercice de l’action collective et attribue le statut de représentant au membre qu’il désigne s’il est d’avis que:
1 les demandes des membres soulèvent des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes;
2 les faits allégués paraissent justifier les conclusions recherchées;
3 la composition du groupe rend difficile ou peu pratique l’application des règles sur le mandat d’ester en justice pour le compte d’autrui ou sur la jonction d’instance;
4 le membre auquel il entend attribuer le statut de représentant est en mesure d’assurer une représentation adéquate des membres[43].
[72] Qui plus est, à cette étape, les faits allégués sont tenus pour avérés et, en l’espèce, Air Canada n’a pu offrir de preuve.
[73] Par ailleurs, Air Canada ajoute que la question de sa violation de l’article 224 c) est spécifiquement reprise dans le Jugement CA comme l’une des questions que le juge du fond aura à décider. [44] Or, plaide-t-elle, certains extraits du Jugement CA démontrent l’intention de la Cour d’appel d’en limiter sa portée.
[74] Il est admis par la jurisprudence qu’un jugement autorisant une action collective ne lie pas le juge du procès[45]. Ce jugement relève simplement de l'intendance procédurale et ne préjuge nullement des moyens de défense qui peuvent être soulevés au fond.[46]
[75] De même, les principes applicables sont bien connus lorsque la Cour d’appel siège en appel d’une décision autorisant ou non l’exercice d’une action collective.[47]
[76] La Cour ne détient qu’un pouvoir limité d’intervention l’obligeant à faire preuve de déférence envers la décision du juge autorisateur puisque l’appréciation du respect des conditions d’autorisation implique l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire.[48] Elle n’interviendra donc qu’en présence d’une erreur de droit ou d’une analyse manifestement erronée des critères d'autorisation.[49]
[77] La prémisse d’Air Canada lorsqu’elle assimile la décision de la Cour d’appel à un « simple » jugement d’autorisation est erronée.[50]
[78] Même si le rôle de la Cour d’appel se limite à substituer son analyse en présence d’une erreur de droit ou d’une appréciation manifestement non fondée à l’égard d’un critère prévu à l’article 575 C.p.c.[51], ce n’est pas parce que la Cour « autorise » l’action collective qu’elle devient un juge autorisateur dont les enseignements ne lient pas le juge du fond.
[79] Une des particularités du présent dossier est que les faits tenus pour avérés et considérés par la Cour d’appel dans le cadre de son analyse au stade du Jugement CA sont essentiellement les mêmes que ceux mis en preuve lors de l’instruction, et, au demeurant, non contestés.
[80] De plus, le Jugement CA répond à de « pures questions de droit »[52] à la suite d’une analyse rigoureuse portant sur l’interprétation des textes législatifs. Il confirme que le montant annoncé qui apparait à la Première étape est le prix annoncé aux fins de la Loi et que le test de l’impression générale[53] ne s’applique pas à l’analyse effectuée dans le cadre d’un manquement possible à l’article 224 c).
[81] La Cour d’appel se prononce clairement et avec force sur ces questions. Il n’y a aucune ambiguïté sur sa position en droit. La détermination « …est (…) intrinsèquement liée à la fois à la situation factuelle dans laquelle le litige s’inscrit, ainsi que, en matière d’interprétation législative, au texte de loi qui doit être interprété ». Elle fait donc partie de la notion de ratio decidendi du Jugement CA.[54]
[82] D’ailleurs, ce dernier sert déjà de précédent, autant dans le cadre de jugements se prononçant au mérite[55] que ceux autorisant une action collective.[56]
[83] L’assise du Jugement CA repose sur le même contexte factuel et juridique dont le Tribunal est saisi. Il constitue ainsi un précédent qui lie le Tribunal.
[84] Le Tribunal conclut donc qu’en annonçant seulement les tarifs à la Première étape, Air Canada annonce un prix inférieur au prix ultimement exigé des Membres du Groupe, le tout contrairement à l’article 224 c), et ce, sans égard au test de l’impression générale.
[85] Le 2 juillet 2015, Air Canada avise le PGQ de son intention de faire déclarer constitutionnellement inapplicable ou, subsidiairement, inopérant, l’article 224 c) aux activités de vente de titres de transport sur le Site Web. Son avis indique :
Aux termes de la doctrine de l’exclusivité des compétences, l’article 224 c) est constitutionnellement inapplicable à la vente de titres de transport par Air Canada sur son Site Web ; et
Subsidiairement l’article 224 c) est constitutionnellement inopérant aux termes de la doctrine de la prépondérance fédérale puisqu’il entrave la réalisation de l’objet d’une loi fédérale.[57]
[86] Le PGQ intervient au dossier pour contester la position d’Air Canada.
[87] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut qu’Air Canada est soumise à l’article 224 c).
2.2 Discussion
[88] Lorsqu’il applique des doctrines constitutionnelles, le Tribunal doit adopter une approche souple plutôt que de créer des « compartiments étanches ».[58] Depuis l’arrêt Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta[59], la Cour suprême prône un fédéralisme coopératif qui invite les tribunaux à une interprétation conciliatrice entre les lois des deux paliers de gouvernements qui doivent coexister dans la mesure du possible[60].
[89] Dans le cadre d’une analyse du partage des compétences, l’étude du caractère véritable de la loi précède l’examen de l’application des doctrines de l’exclusivité des compétences et de la prépondérance fédérales, lesquelles présupposent la validité constitutionnelle de la loi ou de la mesure contestée[61].
[90] La doctrine du caractère véritable vise à déterminer si l’ordre du gouvernement qui a adopté la règle de droit en cause avait le pouvoir de le faire.
[91] Dans la présente affaire, il est reconnu que le législateur provincial avait le pouvoir d’adopter la Loi.
[92] Effectivement, l’article 224 c) se situe au cœur des relations contractuelles entre consommateurs et commerçants. Son objectif est de rétablir l’équilibre entre les parties contractantes afin de protéger le consommateur québécois et de s’assurer qu’il ait en sa possession tous les renseignements nécessaires pour faire des choix éclairés.
[93] Il ne fait donc aucun doute qu’il s’agit d’une disposition qui relève de la compétence provinciale concernant « la propriété et les droits civils dans la province » prévue au paragraphe 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1867[62], comme l’a d’ailleurs récemment confirmé la Cour d’appel.[63]
[94] Le débat se limite donc à l’analyse de l’application de la doctrine de l’exclusivité des compétences et subsidiairement, à celle de la prépondérance fédérale.
[95] Une loi provinciale peut dans certaines situations produire des effets sur une entreprise relevant de la compétence du Parlement. Bien que cette loi demeure valide, elle peut néanmoins être déclarée inapplicable à cette entreprise en vertu de la doctrine de l’« exclusivité des compétences » si elle :
empiète « indûment sur le « contenu essentiel irréductible » de la compétence exclusive réservée au Parlement. » ; et
son application « entraverait » le contenu essentiel d’une compétence fédérale. Il y a entrave lorsqu’il y a « atteinte grave ou importante » à la compétence fédérale. [64]
[96] Selon la Cour suprême, le « contenu essentiel » correspond au « contenu minimum élémentaire et irréductible » de la compétence législative en cause[65], lequel est nécessaire pour garantir la réalisation efficace de l’objectif pour lequel la compétence a été attribuée. [66]
[97] Depuis l’arrêt Banque Canadienne de l’Ouest[67], l’approche souple et moderne du fédéralisme coopératif préconisée par la Cour suprême exige que la doctrine de l’exclusivité des compétences soit interprétée de manière restrictive et qu’elle ne s’applique, en général, que dans des situations déjà traitées dans la jurisprudence[68], notamment parce que « la recherche d’un "contenu essentiel" pour un champ de compétence donné est source d’incertitude et d’évolution »[69]. Malgré tout, l’absence de précédent ne scelle pas l’issue du litige.
[98] Le fardeau appartient à Air Canada de démontrer qu’il est absolument nécessaire que le Parlement ait compétence à l’égard de toutes les facettes de la vente de titres de transport par un transporteur aérien pour poursuivre les fins pour lesquelles la compétence en matière d’aéronautique lui a été attribuée.[70]
[99] Selon Air Canada, la compétence du gouvernement fédéral en matière d’aéronautique est reconnue aux termes de son pouvoir général de faire des lois pour la paix, l’ordre et le bon gouvernement au Canada, conformément à l’article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867. Le transport aérien se situe au cœur de cette compétence ce qui comprend la vente de titres par une compagnie aérienne internationale.[71] Comme le gouvernement fédéral exerce pleinement sa compétence en cette matière, les activités de la défenderesse doivent être protégées par la doctrine de l’exclusivité des compétences.
[100] Le transport aérien ne fait pas partie des matières énumérées aux articles 91 à 95 de la Loi constitutionnelle de 1867. C’est la jurisprudence qui attribue au Parlement fédéral ce chef de compétence.[72] Il est acquis au débat que l’aéronautique est une matière d’intérêt national[73] et par conséquent, qu’elle relève du pouvoir résiduaire fédéral de faire des lois « pour la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada ».[74]
[101] La mise en œuvre de cette compétence se fait notamment par le biais de l’Office, tribunal quasi judiciaire indépendant et organisme de réglementation responsable de l’administration de la Loi sur les transports au Canada[75] et de ses règlements.
[102] Dans un arrêt récent[76], la Cour d’appel résume le cœur de la compétence fédérale en matière d’aéronautique en ces termes :
[61] Selon la jurisprudence, le cœur de la compétence fédérale en matière d’aéronautique englobe :
• La réglementation de l’exploitation des aéronefs et des aéroports;
• La détermination de l’emplacement des aéroports;
• Les plans d’un aéroport, ses dimensions, les matériaux qui devront entrer dans la construction des différents bâtiments, pistes et structures, et autres caractéristiques de ce genre;
• La formation des pilotes d’aéronefs.
[62] Échappent toutefois au cœur de cette compétence :
• Les conditions de travail des employés d’un entrepreneur indépendant chargé de la construction d’un aéroport;
• La fourniture d’alcool destiné à la consommation en vol;
• Les lois qui touchent des questions accessoires à l’exploitation d’un aéronef, par exemple celles qui touchent l’exploitation d’un service aéroportuaire de limousines.
[Notre emphase et références omises]
[103] Qu’en est-il pour les contrats de vente de titres de transport par un transporteur aérien ?
[104] En l’espèce, aucun précédent ne justifie l’application de la doctrine de l’exclusivité des compétences pour immuniser les transporteurs aériens contre les différentes lois provinciales conférant des droits aux consommateurs.[77] Dans ce contexte, le Tribunal ne peut donc présumer que la Loi, qui cherche à protéger les consommateurs, empiète sur le contenu essentiel de la compétence fédérale.
[105] D’ailleurs, il est un principe bien établi que les lois provinciales d’application générale comme le Code civil du Québec ou la Loi s’appliquent aux entreprises qui relèvent de la compétence fédérale, sauf s’il y a entrave à l’exercice de certains éléments vitaux, fondamentaux ou essentiels à leurs activités.[78]
[106] En l’espèce, l’article 224 c) se limite à encadrer l’annonce d’un prix, en prohibant sa décomposition à l’étape préliminaire et en obligeant plutôt le commerçant à afficher le prix complet tôt dans le processus afin de protéger les consommateurs.
[107] Dans Bell Canada c. Directeur des poursuites criminelles et pénales[79], la Cour d’appel du Québec a récemment rejeté un argument similaire à celui soulevé par Air Canada, mais à l’égard de « la réglementation des tarifs » dans le domaine de la télécommunication. À ce sujet, elle écrit :
[80] S’il est essentiel pour les entreprises de télécommunications de conclure des contrats avec les consommateurs afin de leur offrir leurs services, tous les droits et obligations qui y sont contenus ne sont certes pas eux-mêmes essentiels à l’accomplissement de leur mission et de la réalisation des objectifs de la LT. Ainsi, affirmer que le cœur de la compétence fédérale en la matière s’étend à l’ensemble des modalités des contrats de service de télécommunications ou à l’ensemble des « conditions de commercialisation », de tels services revient à restreindre voire à écarter de manière indue, l’ensemble de la législation provinciale qui vise à favoriser l’intérêt public en assurant un équilibre et en protégeant les consommateurs. Elle revient à accorder à ses entreprises une « immunité floue » qui n’a pas sa raison d’être.
[Références omises]
[108] De la même façon, la Cour supérieure de l’Ontario a conclu que les dispositions du Wireless Services Agreement Act de l’Ontario qui prévoyaient la possibilité pour un consommateur d’annuler un contrat avec une entreprise de télécommunication, n’affectait pas des aspects vitaux ou essentiels de la compétence fédérale sur la télécommunication.[80]
[109] En l’espèce, le cœur de la compétence fédérale en matière aéronautique n’englobe pas des mesures prises par le législateur provincial pour encadrer l’annonce d’un prix d’un titre de transport afin de favoriser l’intérêt public et protéger les consommateurs. L’article 224 c) n’affecte aucunement l’activité aéronautique et n’a aucun lien avec les activités comprises dans le cœur de la compétence fédérale en de telles matières.
[110] Le Tribunal conclut que l’article 224 c) n’empiète pas sur le « contenu essentiel irréductible » de la compétence aéronautique réservée au Parlement.
[111] Ensuite, à supposer même que les dispositions de la Loi et de son Règlement touchent au cœur de la compétence fédérale relativement à la vente de titres par un transporteur aérien, encore faut-il que ces dispositions « entravent ou empiètent gravement sur le contenu essentiel de la compétence du Parlement en matière de [l’aéronautique] au point de menacer cette compétence. »[81]
[112] Le critère de l’entrave suppose une atteinte grave ou importante au cœur de la compétence, de sorte que le Parlement devra légiférer expressément de manière à écarter la loi provinciale à défaut de quoi, l’activité ne pourrait être exercée.[82]
[113] Selon Air Canada, à titre de transporteur aérien international, elle « doit maintenir un tarif clair, raisonnable et exempt de discrimination injuste. Ce tarif [doit] être déposé auprès de l’Office [qui] a juridiction [exclusive] pour réviser les conditions de transport énoncé dans ce tarif. [Or,] l’Office exerce pleinement cette juridiction ».[83] Dès lors, les dispositions litigieuses ne peuvent venir entraver son activité dans ses éléments vitaux, fondamentaux ou essentiels.
[114] Dans l’affaire Unlu v. Air Canada,[84] la Cour d’appel de la Colombie-Britannique conclut que l’article 5 du Business Practices and Consumer Protection Act[85] interdisant des publicités trompeuses, renseignements trompeurs ou déclarations mensongères, s’applique aux informations apparaissant sur les titres de transport d’Air Canada et n’entrave pas le contenu essentiel de la compétence fédérale sur l’aéronautique.
[115] De plus, la pratique exigée par l’article 224 c) ne peut porter une atteinte grave ou importante au cœur de la compétence fédérale puisqu’Air Canada a poursuivi toutes ses activités, et ce, bien que :
Durant la Période, à l’extérieur du Canada, Air Canada se conforme à la législation étrangère ayant des exigences similaires à celles de l’article 224 c).[86]
En février 2012, dès l’annonce du Parlement de son intention d’adopter[87] un règlement fédéral qui obligerait l’inclusion de tous les frais, taxes fédérales et provinciales dans le prix annoncé pour un service aérien (Règlement Fédéral)[88], Air Canada s’y conforme, et de ce fait, se conforme à l’article 224 c). Finalement, le Règlement Fédéral entre en vigueur en décembre 2012 seulement.
[116] Or, la mise en œuvre du Règlement Fédéral n’a pas empêché Air Canada de poursuivre ses activités. Dès lors, alléguer que l’application de leurs pendants au niveau provincial constituerait une atteinte grave et importante forçant le Parlement à légiférer pour les écarter est difficilement soutenable[89].
[117] Pour toutes ces raisons, le Tribunal est d’avis que la doctrine de l’exclusivité des compétences ne s’applique pas en l’espèce.
[118] Air Canada plaide que le gouvernement fédéral exerce pleinement sa compétence relative à la vente de titres par les transporteurs aériens faisant affaire au Canada par le nombre de lois fédérales qui s’y appliquent.[90]
[119] Il a d’ailleurs confié à l’Office, un tribunal administratif indépendant établi sous sa forme actuelle par la Loi sur les transports au Canada, le mandat d’administrer et de superviser les tarifs, prix, taux, suppléments et autres termes et conditions du transport national et international de passagers.
[120] De plus, la Loi modifiant la Loi sur les transports au Canada et la Loi sur la sécurité ferroviaire et d’autres lois en conséquence[91], sanctionnée le 22 juin 2007, prévoit l’ajout de l’article 86.1 à la Loi sur les transports au Canada, qui édicte désormais ce qui suit :
86.1 (1) L’Office régit, par règlement, la publicité dans les médias, y compris dans Internet, relative aux prix des services aériens au Canada ou dont le point de départ est au Canada.
(2) Les règlements exigent notamment que le prix des services aériens mentionné dans toute publicité faite par le transporteur inclue les coûts supportés par celui-ci pour la fourniture des services et que la publicité indique les frais, droits et taxes perçus par lui pour le compte d’autres personnes, de façon à permettre à l’acheteur de déterminer aisément la somme à payer pour ces services.
(3) Les règlements peuvent également préciser, pour l’application du paragraphe (2), les types de coûts, frais, droits et taxes visés à ce paragraphe.
[Nos soulignements]
[121] Le gouvernement fédéral retarde toutefois à dessein l’entrée en vigueur de cet article au 15 décembre 2011, de sorte que le Règlement Fédéral visant à encadrer les montants devant être inclus dans le prix du service aérien mentionné par Air Canada dans une publicité n’entrera en vigueur qu’en décembre 2012.
[122] Air Canada invite le Tribunal à conclure qu’en retardant l’entrée en vigueur de l’article 86.1 de la Loi sur les transports au Canada et, de ce fait, celle du Règlement Fédéral, le gouvernement fédéral exerce pleinement sa compétence en matière aéronautique.
[123] Partant, l’article 224 c) entre en conflit avec l’objectif parlementaire de l’époque de ne pas nuire à la capacité d’Air Canada de faire concurrence aux autres transporteurs internationaux, non assujettis à l’obligation de mentionner des prix tout compris dans leur publicité.[92]
[124] D’après cette doctrine, lorsque des lois provinciales et fédérales valides sont incompatibles, la loi fédérale l’emporte et la loi provinciale est déclarée inopérante dans la mesure de l’incompatibilité. Ce conflit se décline en deux volets : le conflit d’application et l’incompatibilité d’objet.
[125] Le premier, un conflit d’application ou d’effets, survient lorsqu’il est impossible de respecter simultanément les deux lois puisque l’une dit oui et l’autre dit non[93]. Il doit s’agir d’une incompatibilité réelle. Un simple dédoublement, un ajout ou complément à la législation fédérale ne répond pas à cette exigence.[94]
[126] Le second, un conflit d’objet, se rapporte à l’effet de la loi provinciale sur les objectifs de la loi fédérale, c’est-à-dire lorsque les dispositions provinciales empêchent la réalisation de l’objectif de la loi fédérale[95]. Comme le souligne la Cour suprême dans l’arrêt Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association[96], le seuil à atteindre pour conclure qu’une telle entrave existe est élevé :
[66] (…) La norme d’invalidation d’une loi provinciale au motif qu’elle entrave la réalisation de l’objet fédéral est élevée; une loi fédérale permissive, sans plus, ne permettra pas d’établir l’entrave de son objet par une loi provinciale qui restreint la portée de la permissivité de la loi fédérale :
[Références omises]
[127] Le simple fait que le Parlement ait légiféré sur une matière n’empêche pas les provinces d’en faire autant sur la même matière. Cela n’entraîne pas la présomption que le législateur fédéral a ainsi voulu exclure toute possibilité d’intervention provinciale sur le sujet, surtout en l’absence d’un texte de loi clair à cet effet.[97] C’est la raison pour laquelle les tribunaux évitent de donner à cette doctrine une portée trop large et favorisent plutôt une interprétation harmonieuse et compatible des dispositions en cause, conformément à la doctrine du fédéralisme coopératif.[98]
[128] En l’espèce, pour les motifs qui suivent, le Tribunal est d’avis qu’il n’existe pas de conflit opérationnel ni de conflit d’objet entre les deux paliers de gouvernement qui ferait intervenir la doctrine de la prépondérance fédérale.
[129] Air Canada ne soulève aucun argument quant à un possible conflit d’application, si ce n’est que l’abstention du gouvernement fédéral de légiférer sur le sujet en retardant volontairement l’entrée en vigueur de l’article 86.1 de la Loi sur les Transports du Canada.
[130] Or, l’absence d’un régime législatif traitant spécifiquement de la publicité des prix implique qu’il n’y a rien de potentiellement conflictuel entre les deux paliers de gouvernement.[99]
[131] En outre, l’argument soulevé selon lequel la disposition provinciale litigieuse entrerait en conflit avec l’abstention du Parlement de légiférer a été rejeté par les tribunaux. En effet, la Cour d’appel confirme que la décision de s’abstenir de légiférer signifie qu’on laisse place aux libres forces du marché incluant nécessairement les règles découlant du droit provincial, soit, en l’occurrence, celles issues du Code civil du Québec et de la Loi :
[96] Ne pas réglementer le marché par l’imposition de ses propres règles et normes spécifiques signifie, me semble-t-il, que celui-ci est laissé dans son état actuel, c’est-à-dire sujet au libre jeu des forces du marché et aux règles de droit qui s’imposent à lui et le réglemente, incluant évidemment celles découlant du droit provincial, soit, au Québec, le Code civil du Québec et la LPC.[100].
[Références omises]
[132] Dès lors, le Tribunal ne peut inférer que l’abstention au niveau fédéral équivaut à une incompatibilité d’objet de la Loi entre les deux paliers de gouvernement. La jurisprudence est claire, l’abstention fait jouer les libres forces du marché, dont les règles québécoises.
[133] De même, l’entrée en vigueur ultérieure des articles pertinents du Règlement Fédéral[101] n’a pas pu créer de conflit puisqu’au final les dispositions de la loi fédérale reprennent, en substance, celles de la législation provinciale.[102]
[134] Air Canada fait valoir qu’au moment des infractions commises, le Parlement, exerçant pleinement sa compétence en matière d’aéronautique, a « choisi délibérément de laisser les libres forces du marché contrôler la publicité des prix pour des titres de transport (aérien) entre 2007 et 2012. [Ce faisant,] si le gouvernement provincial, par le biais de dispositions générales de la [Loi] pouvait légiférer sur la vente des titres de transport par un transporteur aérien international durant cet intervalle, il entraverait l’objectif en la matière ».[103]
[135] Comme mentionné plus haut, la Cour d’appel a déjà rejeté un tel argument.[104]
[136] Comme elle le souligne, le libre marché dans le domaine de l’aéronautique au Canada « …est nécessairement fondé, du moins en partie, sur les règles de droit relevant de la compétence des provinces comme celles relatives à la propriété et aux droits civils qui comprennent évidemment la protection des intérêts contractuels des consommateurs et les relations contractuelles entre les consommateurs et les fournisseurs de services ».[105]
[138] Un tel argument est écarté par la jurisprudence[106] ainsi que par l’Office :
(…)
La publicité sur les produits et services est assujettie à des lois sur la protection des consommateurs d’application générale, c’est-à-dire au niveau fédéral, à la Loi sur la concurrence, ainsi qu’au niveau provincial par l’intermédiaire de lois provinciales. Certaines questions concernant les pratiques et les actes mensongers et trompeurs relèvent du Bureau de la concurrence.
Il incombe aux annonceurs de veiller à ce qu’ils se conforment à toutes les lois applicables concernant la publicité des prix, et non pas seulement au RTA.[107]
[Notre emphase]
[139] En conclusion, le Tribunal est d’avis que les dispositions contestées sont applicables et opérantes à l’égard des activités d’Air Canada qui ne parvient pas à démontrer que les doctrines constitutionnelles s’appliquent à sa situation.
[140] Bien que la Loi doive recevoir une interprétation large et libérale[108], favorable au consommateur[109], la preuve démontre que les Membres du Groupe n’ont pas subi de préjudice des suites de la pratique interdite d’Air Canada et que cette dernière a rempli toutes ses obligations contractuelles à leur égard. Ils ne peuvent donc obtenir la réduction du prix des titres de transport, tel qu’ils le demandent, ni des dommages-intérêts compensatoires.[110]
[141] L’article 272 énonce les recours civils dont dispose l’Union :
272. Si le commerçant ou le fabricant manque à une obligation que lui impose la présente loi, un règlement ou un engagement volontaire souscrit en vertu de l’article 314 ou dont l’application a été étendue par un décret pris en vertu de l’article 315.1, le consommateur, sous réserve des autres recours prévus par la présente loi, peut demander, selon le cas:
a) l’exécution de l’obligation;
b) l’autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;
c) la réduction de son obligation;
d) la résiliation du contrat;
e) la résolution du contrat; ou
f) la nullité du contrat,
sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs.
[Nos soulignements]
[142] Bien que le choix du recours lui revienne[111], le Tribunal conserve tout de même une certaine discrétion. En l’espèce, l’Union demande la réduction de l’obligation de chaque Membre à l’égard d’Air Canada pour une somme correspondant au total des Charges et Surcharges qui ne figuraient pas à la Première étape.
[143] Dans l’arrêt Time, le plus haut tribunal du Canada élabore 4 critères permettant au consommateur de bénéficier d’une présomption absolue de préjudice (la Présomption) puisqu’il aura établi le lien rationnel entre la pratique interdite par une disposition du titre II de la Loi et le contrat visé par le recours en vertu de l’article 272 :
(1) la violation par le commerçant ou le fabricant d’une des obligations imposées par le titre II de la loi;
(2) la prise de connaissance de la représentation constituant une pratique interdite par le consommateur;
(3) la formation, la modification ou l’exécution d’un contrat de consommation subséquente à cette prise de connaissance, et
(4) une proximité suffisante entre le contenu de la représentation et le bien ou le service visé par le contrat.
[144] En l’espèce, les trois premiers critères sont clairement satisfaits.
[145] En fait, le Tribunal a constaté la pratique interdite, la personne désignée a confirmé savoir avant même d’aller sur le Site Web d’Air Canada que l’affichage y figurant était contraire à l’article 224 c)[112], et les Membres du Groupe ont tous acheté un titre de transport.
[146] Seul le quatrième critère soulève une contestation.
[147] À cet égard, la Cour suprême enseigne que « la pratique interdite doit être susceptible d’influer sur le comportement adopté par le consommateur relativement à la formation, la modification ou à l’exécution du contrat de consommation. »[113]
[148] L’Union soutient que dès la constatation de la pratique interdite par l’article 224 c), il y a nécessairement un lien rationnel entre celle-ci et la formation, la modification ou l’exécution du contrat, et ce, en raison du libellé même de la disposition législative.
[149] Il s’ensuit donc, selon l’Union, que le Tribunal doit nécessairement conclure que les Membres du Groupe ont subi un préjudice équivalant aux Charges et Surcharges annoncées postérieurement à la Première étape et réduire en conséquence leurs obligations face à Air Canada.
[150] Le Tribunal n’est pas d’accord.
[151] Time fait une distinction importante entre le test applicable lors d’une contravention à une obligation contractuelle prévue au titre I de la Loi et celui applicable lors de la commission d’une pratique interdite par les dispositions du titre II de la Loi.[114]
[152] Dans le premier cas, le consommateur peut, sans exigence additionnelle, obtenir une réparation contractuelle en vertu de l’article 272 alors que dans le deuxième, le consommateur doit nécessairement établir qu’il satisfait aux 4 critères énoncés afin de bénéficier de la Présomption.
[153] Contrairement à certaines dispositions de la Loi qui prévoit spécifiquement la restitution au consommateur de frais payés en contravention de la Loi[115], ce n’est pas le cas de l’article 224 c).
[154] La constatation qu’une pratique interdite par le titre II de la Loi n’implique pas nécessairement qu’un ou plusieurs consommateurs en ont subi un préjudice. Cette question n’est pas pertinente à l’analyse de la nature interdite d’une pratique.[116]
[155] De plus, la pratique visée à l’article 224 c) est interdite, et ce, indépendamment de l’existence d’un contrat à la consommation. Outre les recours civils prévus à l’article 272, la Loi prévoit d’autres sanctions contre un commerçant fautif dont notamment une réclamation en dommages punitifs, des plaintes pénales[117] ou des mesures administratives.[118]
[156] Le but du recours en vertu de l’article 272 n’est pas d’enrichir le consommateur, mais bien de réparer un préjudice subi. Le consommateur peut bénéficier de la Présomption, mais seulement s’il établit qu’il remplit les quatre critères énoncés.
[157] Par ailleurs, même si le Tribunal concluait que la Présomption trouve application en l’espèce, celle-ci permet de demander la réparation en vertu de l’article 272, mais seulement du préjudice « lié au vice informationnel (qui) se devait d'être quantifié ».[119]
[158] En l’espèce, la preuve révèle les faits suivants :
Air Canada pouvait facturer en toute légalité toutes les Charges et Surcharges exigées des Membres du Groupe.
Toutes les Charges et Surcharges étaient prévues au contrat conclu entre les Membres du Groupe et Air Canada lors de l’achat des titres de transport en litige.
M. Silas, à titre de personne désignée du Groupe, a bénéficié des titres de transport, objet du présent litige. Il a effectivement voyagé avec Air Canada, comme prévu, et ni lui ni aucun autre Membre du Groupe ne prétend qu’il y a eu quelques incidents ou manquements de la part d’Air Canada dans l’exécution de ses obligations contractuelles à leur égard.
L’interrogatoire au préalable de la personne désignée démontre qu’avant le paiement il ne s’est aucunement intéressé à ces Charges et Surcharges lors de sa navigation sur le Site Web, étant seulement concerné par les détails des vols qu’il sélectionnait.
Air Canada ne s’est pas enrichie puisque les Charges et Surcharges exigées des Membres du Groupe étaient :
Même si M. Silas, à titre de personne désignée, avait contracté avec une autre compagnie aérienne, les mêmes Charges et Surcharges lui auraient été exigées.
Ni l’Union ni le représentant désigné ne prétend qu’un Membre du Groupe a été sollicité ou trompé par Air Canada lors de leur recherche sur le Site Web ou qu’Air Canada a tenté de les piéger.
M. Silas n’a fait aucune plainte à Air Canada ni transmis de mise en demeure relativement aux Charges et Surcharges exigées.
Ce qui pose un problème n’est pas le montant des Charges et Surcharges, mais leur affichage à la Deuxième étape seulement.
Lors de sa navigation sur le Site Web, la personne désignée est passée d’une étape à une autre, est revenue à l’étape précédente, a interrompu sa recherche sur le Site Web pour consulter le site d’un concurrent d’Air Canada et est revenue à la Première étape. Elle exécute cette démarche à plusieurs reprises, de sorte que, lorsqu’elle achète son titre de transport, elle aura déjà consulté plusieurs fois les pages web s’affichant aux différentes étapes de la navigation sur le Site Web ;[121]
Avant de consulter le Site Web d’Air Canada, M. Silas était au courant des exigences de l’article 224 c) ;
Le représentant d’Air Canada, M. Oxner, confirme que lorsqu’elle a changé sa pratique en 2012 afin d’annoncer un prix tout compris dès la Première étape dans le but de se conformer à la législation fédérale, il n’y avait pas de différence notable à l’égard des ventes.
[159] Les faits énumérés plus haut combinés à l’annonce visible sur la page web de la Première étape mettant en garde le consommateur que seuls les tarifs apparaissent sur cette page et que d’autres frais se rajouteront à l’étape suivante amènent le Tribunal à conclure que la pratique interdite n’est pas « susceptible d’influer sur le comportement adopté par le consommateur relativement à la rédaction, la modification ou à l’exécution du contrat de consommation. »
[160] Les Membres du Groupe n’ont subi aucun préjudice.
[161] Qui plus est, aucun autre recours n’est possible, car pour attribuer des dommages-intérêts compensatoires, M. Silas et les Membres du Groupe devaient prouver leur préjudice.[122]
[162] Tel que mentionné plus haut, le Tribunal a discrétion pour choisir un remède plus approprié que celui choisi par le consommateur.[123] Cela étant, outre la réclamation pour dommages-intérêts punitifs qui sera traitée ultérieurement, il n’y a aucun autre recours ouvert à l’Union.
[163] Le Tribunal est d’avis que la demanderesse n’a pas établi son droit à des dommages-intérêts punitifs, et ce, pour les motifs exprimés plus bas.
[164] L’article 272 prévoit la possibilité pour le Tribunal, dans les paramètres prévus par l’article 1621 C.c.Q., d’octroyer des dommages punitifs dans le cas où un commerçant manque aux obligations prévues à la Loi, et ce, même en l’absence de tout autre dommage.
[165] L’article 1621 C.c.Q. se lit ainsi :
1621 Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.
Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers[124].
[Nos soulignements]
[166] L’attribution de dommages-intérêts punitifs constitue l’exception et non la règle.[125]
[167] Nul besoin d’établir la mauvaise foi ou la faute lourde du commerçant. C’est son attitude générale avant et après la violation qui compte.[126] Néanmoins, la simple violation de la Loi ne suffira pas, à elle seule, à justifier une condamnation à des dommages punitifs.[127]
[168] Voici ce que nous enseigne la Cour suprême sur ce point :[128]
[180] Dans le cas d’une demande de dommages-intérêts punitifs fondée sur l’art. 272 L.p.c., la méthode analytique ci-haut mentionnée s’applique comme suit :
- Les dommages-intérêts punitifs prévus par l’art. 272 L.p.c. seront octroyés en conformité avec l’art. 1621 C.c.Q., dans un objectif de prévention pour décourager la répétition de comportements indésirables;
- Compte tenu de cet objectif et des objectifs de la L.p.c., les violations intentionnelles, malveillantes ou vexatoires, ainsi que la conduite marquée d’ignorance, d’insouciance ou de négligence sérieuse de la part des commerçants ou fabricants à l’égard de leurs obligations et des droits du consommateur sous le régime de la L.p.c. peuvent entraîner l’octroi de dommages-intérêts punitifs. Le tribunal doit toutefois étudier l’ensemble du comportement du commerçant lors de la violation et après celle-ci avant d’accorder des dommages-intérêts punitifs.
[169] Les dommages-intérêts punitifs n’ont pas un objectif compensatoire. L’octroi de tels dommages vise à dissuader et à décourager la répétition d’un comportement tant à l’égard de la personne fautive que de la société en général.[129] Dans cette optique, le Tribunal doit obtenir des « explications satisfaisantes sur les violations à la loi afin de lui permettre de mieux apprécier s’il doit en accorder et, dans cette éventualité, d’en établir adéquatement la quotité ».[130]
[170] Le Tribunal doit apprécier le comportement du commerçant avant et après la violation et le changement de son attitude envers les consommateurs. « Seule cette analyse globale du comportement du commerçant permettra au Tribunal de déterminer si les impératifs de prévention justifient une condamnation à des dommages-intérêts punitifs dans une affaire donnée. »[131]
[171] Pour Air Canada, l’impact de l’octroi des dommages-intérêts punitifs réclamés, demeure modeste en comparaison avec ses résultats financiers récents. Sa capacité de les payer ne semble pas y faire obstacle. [132]
[172] Néanmoins, dans l’exercice de sa discrétion en la matière, le Tribunal conclut que les autres facteurs militent contre l’octroi de cette sanction.
[173] Le Tribunal considère que le comportement d’Air Canada tant avant qu’après la violation de la Loi ne démontre pas « une conduite marquée par de l’ignorance, de l’insouciance ou de la négligence sérieuse » à l’égard de ses obligations ou des droits du consommateur.
[174] Les Amendements entrent en vigueur en juin 2010 et intègrent de nouvelles dispositions à la Loi qui ne définissent pas les termes « prix annoncé ». Elles ne prévoient pas non plus le moment précis pour l’affichage du prix tout compris.
[176] Un peu plus d’un mois après l’entrée en vigueur des Amendements, l’Union et la personne désignée déposent la demande en autorisation d’intenter une action collective contre Air Canada.
[177] Le 8 octobre 2010, l’Office de la protection du consommateur informe Air Canada de son avis que le Site Web contrevient à l’article 224.[133]
[179] L’Office de la protection du consommateur n’intervient au dossier judiciaire qu’en 2015.
[180] Le 4 septembre 2012, la Cour supérieure, sans se prononcer sur les arguments constitutionnels d’Air Canada, rejette la demande d’autorisation d’intenter l’action collective au motif qu’Air Canada ne contrevient pas à l’article 224 en raison des « représentations contenues dans le [ Site Web ] ainsi que l’impression générale qu’elles donnent. »[134]
[181] À cette date, Air Canada a déjà cessé la pratique en raison de l’annonce du gouvernement fédéral de l’entrée en vigueur du Règlement Fédéral.
[182] En effet, tel que mentionné plus haut, dès que le Parlement annonce son intention de légiférer dans le même sens que l’article 224, Air Canada sans plus tarder, modifie son Site Web pour que le prix tout compris apparaisse à la Première Étape.
[183] C’est seulement en 2014, plus de deux ans après la cessation de la pratique interdite par Air Canada, que le Jugement CA, en définissant le cadre d’analyse qui doit servir sous l’article 224 c), confirme que le prix tout compris doit figurer dès la Première étape de la navigation par le consommateur, et ce, peu importe le test de l’impression générale.
[184] Par ailleurs, en tout temps Air Canada prend des mesures concrètes afin de s’assurer que le consommateur qui navigue sur son Site Web ne soit pas induit en erreur et qu'il comprenne que les tarifs qui figurent à la Première étape ne sont pas le prix qui lui sera exigé lors de l’achat des titres de transport.
[185] Notamment, Air Canada insère sur la page pertinente, un avertissement visible, avec les parties importantes en caractère gras, informant le consommateur que les tarifs affichés sur la page qu’il visionne « … ne comprennent pas les taxes, frais et autres suppléments. »
[186] De surcroît, dès la Première étape, le consommateur a l’option d’obtenir plus d’information à l’égard de ces montants qui s’ajouteront au tarif affiché s’il choisit de transiger.
[187] La Cour supérieure a d’ailleurs conclu au stade de l’autorisation de l’action collective qu’un consommateur, même crédible et inexpérimenté, n’aurait pas eu l’impression, en naviguant sur le Site Web, que les tarifs annoncés à la Première étape étaient le prix qui lui serait éventuellement exigé.
[188] Ni la personne désignée, ni l’Union, ni la Présidente de l’Office de la protection du consommateur ne soutiennent qu’un consommateur a été induit en erreur ou leurré par Air Canada lors de sa navigation sur le Site Web.
[189] Durant la Période, Air Canada croit ne pas contrevenir à la Loi et estime qu’il est dans l’intérêt des consommateurs de continuer à afficher les tarifs à la Première étape comme le font ses concurrents.
[190] Vu les circonstances, le Tribunal considère que l’Union n’a pas démontré qu’Air Canada a eu « une conduite marquée par de l’ignorance, de l’insouciance ou de la négligence sérieuse » à l’égard de ses obligations ou des droits du consommateur.
[191] De plus, l’octroi des dommages-intérêts punitifs vise à dissuader et décourager la répétition d’un comportement. Or, ici, Air Canada a cessé d’elle-même la pratique avant même que la Cour supérieure ait rejeté la demande en autorisation.
[192] La preuve démontre qu’une condamnation à des dommages-intérêts punitifs n’est pas nécessaire afin de prévenir une répétition du comportement.
[193] Vu les conclusions auxquelles le Tribunal en arrive il n’y a pas lieu qu’il se prononce sur la question du recouvrement collectif.
[194] Le Tribunal invite les parties à le saisir, si elles estiment que la publication d'un avis en vertu de l'article 591 C.p.c. est nécessaire.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[195] REJETTE l’action collective;
[196] Avec dépens contre la partie demanderesse.
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| __________________________________karen m. rogers j.c.s. | |
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Me Philippe H. Trudel | ||
Me Mathieu Charest-Beaudry | ||
Me André Lespérance | ||
TRUDEL JOHNSTON & LESPÉRANCE | ||
Avocats de la Demanderesse, l’Union des consommateurs | ||
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Me Simon Seida | ||
Me Anthony Cayer | ||
Me Robert J. Torralbo | ||
Me Catherine Beagan Flood | ||
BLAKE CASSELS GRAYDON | ||
Avocats de la Défenderesse, Air Canada | ||
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Me Francis Durocher | ||
Me Samuel Chayer | ||
BERNARD-ROY, JUSTICE QUÉBEC | ||
Avocats du mis en cause, Procureur général du Québec | ||
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Me Vanessa O’Connell-Chrétien | ||
Me Geneviève Duchesne | ||
ALLARD, SIMARD avocats | ||
Avocats de l’Intervenante, Présidente de l’Office de la protection du consommateur | ||
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Dates d’audience : | 16, 24, 25, et 26 mai 2022 | |
Annexe A
1. Air Canada est-elle soumise à la Loi sur la protection du consommateur (L.P.C.) du Québec (L.R.Q., c. P-40.1)?
2. Air Canada contrevient-elle à l'article 224 c) de la L.P.C.?
3. Dans l'affirmative, les membres du groupe ont-ils le droit de réclamer d'Air Canada le paiement des montants suivants?
a) Le remboursement des sommes (à l'exclusion de la TPS, de la TVQ et des droits exigibles en vertu d'une loi fédérale ou provinciale lorsque, en vertu de cette loi, ces droits doivent être perçus directement du consommateur pour être remis à une autorité publique, de même que des frais optionnels [... ])que les membres ont déboursées pour l'obtention de leur titre de transport et qui n'étaient pas comprises dans le prix annoncé?
b) Le paiement d'une somme de 100 $, à titre de dommages punitifs.
c) Les intérêts et l'indemnité additionnelle prévus par le Code civil du Québec sur les montants susdits, à compter de la signification de la requête pour autorisation.
[1] RLRQ, c. P-40.1.
[2] RLRQ, c. P-40.1, r. 3.
[3] À titre d’exemple : Jazz, Rapidair, un transporteur aérien membre de Star Alliance ou par un autre transporteur aérien.
[4] Lorsque le Tribunal réfère à un article de la Loi, il se limitera à indiquer le numéro et paragraphe de la Loi auquel il réfère en omettant la mention « de la Loi »
[5] Procès-verbal du 24 mai 2022.
[6] Procès-verbal du 24 mai 2022.
[7] Procès-verbal du 16 mai 2022.
[8] Pièce D-3.
[9] Pièce D-4.
[10] Voir dossier de la Cour. M. Oxner a occupé ce poste pendant la Période.
[11] Voir dossier de la Cour.
[12] P. ex. le droit pour la sécurité des passagers du transport aérien au Canada et le September 11 Security Fee aux États-Unis.
[13] P. ex. le U.S. Agriculture Fee aux États-Unis.
[14] P. ex. le Derecho No Inmigrante au Mexique.
[15] P. ex. le Noise Isolation Charge aux Pays-Bas.
[16] P. ex. la taxe de solidarité sur les billets d’avion en France.
[17] P. ex. les frais d’amélioration aéroportuaire (AIF) au Canada et les Passenger Facility Charges aux États-Unis ; Témoignage de Marie-Noël Fredette ; voir aussi pièces P-13, P-16, D-5, D-6, D-7, D-8 et D-9.
[18] Pièces P-9, P-17-E et P-11.
[19] Pièces D-1 et D-2.
[20] Pièce P-1.
[21] Témoignage de M. Mark Oxner.
[22] Pièce D-3.
[23] Pièce D-3, p. 17.
[24] Pièce P-6A, l’extrait produit se retrouve à la première page de la pièce qui en compte cinq.
[25] Le vol aller AC 924 et le vol retour AC 925.
[26] L’extrait reproduit se trouve à la première page de la Pièce P-6B qui en compte deux.
[27] Pièce P-6B.
[28] Pièce D-3.
[29] Pièce P-6C.
[30] Pièce P-6D.
[31] Pièce P-6.
[32] Banque de Montréal c. Marcotte, 2014 CSC 55, par. 64 ; Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par. 27 et 45 ; Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta [2007] CSC 22, par 48.
[33] Phillips c. N.-É. (enquête Westray), [1995] 2 R.C.S. 97, par. 6 à 9.
[34] Rogers Communications, s.e.n.c. (Rogers Sans-fil, s.e.n.c.) c. Brière, 2016 QCCA 1497, par. 61-62 ; L’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal c. J.J., 2019 CSC 35, par. 11-12.
[35] Rogers Communications, s.e.n.c. (Rogers Sans-fil, s.e.n.c.) c. Brière, préc., note 34 ; Desjardins Cabinet de services financiers inc. c. Asselin, 2020 CSC 30, par. 72 ; Voir également Sirius XM Canada inc. c. Mendelsohn, 2018 QCCA 996, par. 5-6.
[37] Id., par 31.
[38] Id., par 32 ; R c. Comeau 2018 CSC 15.
[39] R. c. Lapointe, préc., note 36, par 34.
[40] Richard c. Time inc. 2012 CSC 8, par. 44, 45.
[41] Union des consommateurs c. Air Canada, 2014 QCCA 523, par. 75.
[42] Anciennement l’article 1003 du Code de procédure civile, RLRQ, c. C-25.
[43] Code de procédure civile, RLRQ, c. C-25.01, art. 575.
[45] Desjardins Cabinet de services financiers inc. c. Asselin, 2020 CSC 30, par. 72 ; Apple Canada inc. c. Badaoui, 2021 QCCA 432, par. 41.
[46] Sirius XM Canada inc. c. Mendelsohn, 2018 QCCA 996, par. 5.
[49] Id. ; Durand c. Subway Franchise Systems of Canada, 2020 QCCA 1647, par. 47 ; Tenzer c. Huawei Technologies Canada Co. Ltd., 2020 QCCA 633, par. 17 ; voir aussi : Yves LAUZON, « L’appel des jugements prononcés à l’étape de l’autorisation » dans Traité pratique de l’action collective, avec la coll. de Bruce W. JOHNSTON, Montréal, Édition Yvon Blais, 2021, EYB2021TPA41 ; Yves LAUZON et Anne-Julie ASSELIN, Commentaires sous l’article 578, dans Luc CHAMBERLAND (dir.), Le Grand collectif. Code de procédure civile. Commentaires et annotations, 6e éd., vol. 2 « Articles 391 à 836 », Montréal, Éditions Yvon Blais, 2021, EYB2021GCO590.
[50] Plan d’argumentation de la défenderesse, par. 48.
[51] L’Oratoire Saint-Joseph du Mont-royal c. J.J, 2019 CSC 35, par. 10 ; Baratto c. Merck Canada inc., 2018 QCCA 1240, par. 49.
[52] Union des consommateurs c. Air Canada, 2014 QCCA 523, par. 50.
[53] Article 218.
[54] R. c. Lapointe 2021 QCCA 360, par 34.
[55] Stratos Pizzeria (1992) inc. c. Galarneau, 2015 QCCS 2353, ainsi que plusieurs jugements de la Cour du Québec, division des petites créances.
[56] Voir notamment Viot c. U-Haul Co. (Canada) ltée, 2021 QCCS 4212, par. 69-73 ; Mihoubi c. Priceline.com, 2022 QCCS 25, par. 37 et 70-71 ; Lussier c. Expedia inc., 2019 QCCS 727, par. 51-57 ; et Prince c. Avis Budget Group inc., 2016 QCCS 3770, par. 46-68.
[57] Avis d’intention selon l’article 95 C.p.c. (Maintenant l’article 76 C.p.c.).
[58] Transport Desgagnés inc. c. Wärtsilä Canada Inc., 2019 CSC 58, par. 86 ; Rogers Communications inc. c. Châteauguay (Ville), 2016 CSC 23, par. 37 ; Banque canadienne de l'Ouest c. Alberta, 2007 CSC 22, par. 36.
[60] Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Telus Communications inc., 2020 QCCS 1850, par. 169, appels accueillis en partie, 2022 QCCA 408.
[61] Rogers Communications inc. c. Châteauguay (Ville) 2016 CSC 23, par. 34 et 35 ; Canada (P.G.) c. PHS Community Services Society, 2011 CSC 44, par. 58.
[62] Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vic., c. 3, (R.-U.).
[63] Bell Canada c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2022 QCCA 408, par. 69 et 74 ; voir aussi Banque de Montréal c. Marcotte, 2014 CSC 55.
[64] Banque de Montréal c. Marcotte, 2014 CSC 55, par. 62-64 (« BMO ») ; voir aussi Québec (Procureur Général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par 27 ;
[65] Bell Canada c. Québec (Commission de la santé et de la sécurité du travail), [1988] 1 R.C.S. 749, 839.
[66] Transport Desgagnés inc. c. Wärtsilä Canada inc., 2019 CSC 58, par. 93 ; Banque Canadienne de l’Ouest c. Alberta, 2007 CSC 22, par. 50.
[68] Id., par. 77-78 ; Transport Desgagnés inc. c. Wärtsilä Canada inc., 2019 CSC 58, par. 93 ; Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par. 36 ; Rogers Communications inc. c. Châteauguay (Ville), 2016 CSC 23, par. 61. Banque de Montréal c. Marcotte, 2014 CSC 55, par 63.
[70] Id., par. 79, 86.
[71] Défense, par. 2.
[72] Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par. 33. Re. Regulation and control of aeronautics in Canada (1932) A.C. 54 (C.P.) (comité judiciaire du Conseil Privé); Johannesson c. Rural Municipality of West St-Paul (1952) 1 S.C.R. 292.
[73] R. c. Crown Zellerbach Canada Ltd., [1988] 1 R.C.S. 401, par. 37; Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, préc., note 72, par 28.
[74] Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, préc., note 72, par. 28-29 ; Procureure générale du Québec c. Leclerc, 2018 QCCA 1567, par. 44.
[75] L.C. 1996, c. 10.
[76] Procureure générale du Québec c. Leclerc, préc., note 74.
[77] C. MORIN, « La protection des voyageurs aériens dans le contexte constitutionnel canadien », dans Gabriel-Arnaud BERTHOLD et Louis JOLIN (dir.), Le droit du voyage en zone de turbulence, colloque de la fondation Claude Masse, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2021, p. 43, 54.
[78] Bell Canada c. Québec (Commission de la santé et de la sécurité du travail), [1988] 1 R.C.S. 749, 762-763 ; Procureure générale du Québec c. IMTT-Québec inc., 2019 QCCA 1598, par. 236-242.
[80] Nelson v. Telus Communications inc. (Part 1), 2021 ONSC 22, par. 62-64 ; confirmé en appel, Nelson v. Telus Communications inc., 2021 ONCA 751, par. 1 et 3.
[81] Bell Canada c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2022 QCCA 408, par 82.
[82] Banque Canadienne de l’Ouest c. Alberta, 2007 CSC 22, par. 86.
[83] Défense, par. 37.
[84] 2012 BCCA 60, demande d’autorisation d’appeler rejetée, C.S.C., 2013-08-15, 35370.
[85] S.B.C. 2004, c. 2.
[86] Interrogatoire écrit de Mark Oxner, questions 44 à 49 ; interrogatoire de Mark Oxner lors de l’instruction ; Pièce PGQ -11.
[87] Pièce PGQ-11.
[88] Règlement modifiant le Règlement sur le transport aérien et le Règlement sur les textes désignés (Office des Transports du Canada (« RTA ») DORS/2012-298 (213), 147-1 GAZCanII, 202, articles 135.5 à 135.92.
[89] Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Telus Communications inc., 2020 QCCS 1850, par. 111-112.
[90] Loi sur le transport aérien (L.R.C. 1985, c. C-26) ; Loi sur les transports au Canada (L.C. 1996, c. 10) ; Loi sur la commercialisation des services de navigation aérienne civile (L.C. 1996, c. 20) ; Loi sur l’aéronautique (L.R.C. 1985, c. A-2) ; Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada (L.C. 1985, c. C-35 (4e suppl.) ; Loi sur le droit pour la sécurité des passagers du transport aérien (L.C. 2002, c. 9, art. 5) ; La réglementation adoptée en vertu des lois précitées ; et les nombreuses conventions internationales portant sur le transport aérien mises en œuvre en droit canadien.
[91] (L.C. 2007, ch. 19).
[92] Pièces PGQ-9, D-20, D-21, An Act to amend the Canada Transportation Act and the Railway Safety Act and to make consequential amendments to other Acts, S.C. 2007, c. 19, s. 64; Order Bringing into Force Sections 86.1 and 86.2 of the Canada Transportation Act, as enacted by section 27 of the Act, P.C. 2011-1679 December 15, 2011.
[93] Multiple Access Ltd. c. McCutcheon, [1982] 2 R.C.S. 161; Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par. 64; Alberta (Procureur général) c. Moloney, 2015 CSC 51, par. 18; Saskatchewan (Procureur général) c. Lemare Lake Logging Ltd., 2015 CSC 53, par. 17-20.
[94] Banque Canadienne de l’Ouest c. Alberta, 2007 CSC 22, par. 71-73 ; Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par. 64 ; Alberta (Procureur général) c. Moloney, 2015 CSC 51, par. 18 ; Saskatchewan (Procureur général) c. Lemare Lake Logging Ltd., 2015 CSC 53, par. 17-20.
[95] Banque Canadienne de l’Ouest c. Alberta, 2007 CSC 22, par. 71-73 ; Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par. 64 ; Alberta (Procureur général) c. Moloney, 2015 CSC 51, par. 18 ; Saskatchewan (Procureur général) c. Lemare Lake Logging Ltd., 2015 CSC 53, par. 17-20.
[96] Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par. 66.
[97] Transport Desgagnés inc. c. Wärtsilä Canada Inc., 2019 CSC 58, par. 105 ; Banque Canadienne de l’Ouest c. Alberta, 2007 CSC 22, par. 74 ; Banque de Montréal c. Marcotte, 2014 CSC 63, par. 72.
[98] Saskatchewan (Procureur général) c. Lemare Lake Logging Ltd., 2015 CSC 53, par. 20-21 ; Alberta (Procureur général) c. Moloney, 2015 CSC 51, par.14.
[99] Unlu v. Air Canada, 2013 BCCA 112, par. 68 (demande d’autorisation d’appeler rejetée, C.S.C., 2013-08-15, 35370).
[100] Bell Canada c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2022 QCCA 408 ; Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Telus Communications inc., 2020 QCCS 1850, par. 146 ; Morin c. Bell Canada, 2021 QCCS 4191, par. 46.
[101] Règlement sur le transport aérien DORS\88-58 et Règlement modifiant le règlement sur les transports aériens et le Règlement sur les textes désignés DORS\2012 -298.
[102] Banque Canadienne de l’Ouest c. Alberta 2007 CSC 22, par. 72 ; Banque de Montréal c. Marcotte, 2014 CSC 63, par. 80 ; Alberta (Procureur général) c. Moloney, 2015 CSC 51, par. 26.
[103] Par. 45 de la défense.
[104] Bell Canada c. Directeur des poursuites criminelles et pénales (de la protection du consommateur), 2022 QCCA 408, par. 96 et suiv. (« Bell Canada »).
[105] Id., par. 97.
[106] Banque de Montréal c. Marcotte, 2014 CSC 63, par. 79 ; Bell Canada c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2022 QCCA 408, par. 99 ; Unlu v. Air Canada, 2013 BCCA 112, par. 25 et suivante (demande d’autorisation d’appeler rejetée, C.S.C., 2013-08-15, 35370).
[107] Résumé de l’étude d’impact du Règlement modifiant le Règlement sur les transports aériens et le Règlement sur les textes désignés, DORS/2012-298, p. 211 ; voir aussi : Unlu v. Air Canada, 2013 BCCA 112, par. 29-30 (demande d’autorisation d’appeler rejetée, C.S.C., 2013-08-15, 35370).
[108] Richard c. Time, 2012 CSC 8, par. 103 ; Paquette c. Crédit Ford du Canada Ltée, (1989) R.J.Q. 2153, p. 2156 (C.A.) ; Gareau Auto Inc. c. Banque canadienne impériale de commerce, (1989) R.J.Q. 1091, 1095 (C.A.) ; Loi d'interprétation, L.R.Q. c. I-16, art. 41.
[109] Marcotte c. Banque de Montréal, 2014 CSC 63.
[110] Nichols c. Toyota Drummondville (1982) Inc., 1995 RJQ 746, p. 750. Option Consommateurs c. Meubles Léon ltée, 2017 QCCS 3526 par. 55.
[111] Richard c. Time inc., 2012 CSC 8, par. 99, 100 et 114.
[112] Pièce D-3, p. 50-51.
[113] Richard c. Time inc., 2012 CSC 8, par. 125.
[114] Richard c. Time inc. 2012 CSC 8, par. 113 à 124.
[115] À titre d’exemple l’article 271.
[116] Richard c. Time inc. 2012 CSC 8, par 50.
[117] Article 277 et suiv. de la Loi.
[118] Article 314 et suiv. de la Loi.
[119] Fortin c. Mazda Canada inc., 2022 QCCA 635, par 16.
[120] Pièce P-11.
[121] Pièce D-3, p. 17.
[122] Brault & Martineau inc. c Riendeau, 2010 QCCA 366, par. 42.
[123] Richard c. Time inc. 2012 CSC 8, par. 113.
[124] Code civil du Québec, RLRQ, CCQ-1991, art. 1621.
[125] Richard c. Time Inc., 2012 CSC 8, par. 150 ; De Montigny c. Brossard (Succession), 2010 CSC 51, par. 48.
[126] Parisien c. 9112-6847 Québec inc., 2015 QCCS 171, par. 185.
[127] Id., par. 187.
[128] Richard c. Time inc., 2012 CSC 8, par 180.
[129] Option Consommateurs c. Meubles Léon ltée, 2017 QCCS 3526, par. 150, citant Aubry c. Éditions Vice-versa inc., [1998] 1 R.C.S. 591, par. 155.
[130] Option Consommateurs c. Meubles Léon ltée, 2017 QCCS 3526, par. 150, citant Banque de Montréal c. Marcotte, [2014] 2 R.C.S. 725.
[131] Richard c. Time inc., 2012 CSC 8, par. 178.
[132] Pièces P-2, P-3, P-4, P-5, P-22.
[133] Pièce P-19 E)
[134] Union des consommateurs c. Air Canada, 2012 QCCS 4091, par 11
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